(aéroport, février) Il doute du bien fondé de son idée, désormais. ll doute qu’avoir proposé de venir la chercher à l’aéroport dès son retour au pays puisse avoir quoi que ce soit d’une bonne idée, même. La seule bonne chose dans tout ça, c’est qu’il a l’argent nécessaire pour payer le taxi à l’aller autant qu’au retour ; mais puisque cet argent provient de la mort de son père d’adoption, tout est à relativiser, n’est-ce pas ? Elle était à Los Angeles, entourée de stars et de paillettes, et l’idée qu’elle retrouve son quotidien morne lui tord le cœur, parce qu’il va simplement aider à rendre les choses plus grises, tristes et sans saveur encore. Peut-être même qu’elle finira par regretter de ne pas être repartie avec toute sa famille après les fêtes. Eux, aussi énergivores puissent-ils être, ne lui mentaient pas.

Après avoir vérifié son terminal et son heure d’arrivée, il a décidé d’aller la chercher dès la sortie de la sécurité de l’aéroport plutôt que de simplement le faire en dehors du taxi. Il est toujours aussi pressé, il court toujours autant à droite et à gauche et il aurait bien d’autres choses à faire, oui, mais il refuse de la traiter comme un vulgaire objet dont il pourrait disposer à sa convenance. S’il s’arrête à tout arrêter, en réalité, cela n’a rien d’une véritable envie de sa part et bien au contraire: Ambrose pense qu’il s’agit de la meilleure chose à faire, pour lui autant que pour elle. Cela traduit le simple fait qu’il aurait dû y réfléchir davantage avant de foncer tête baissée dans leurs pseudo-fiançailles, mais cela traduit aussi le fait que sa vie a bien trop changée depuis le début de la nouvelle année pour qu’il puisse continuer avec les mêmes acquis de l’année précédente. Il a perdu et retrouvé Ruben ; il a perdu et jamais retrouvé Norman. Ca l’a travaillé, ça l’a fait réfléchir, ça lui a donné l’envie de retourner le monde. Et ça a des conséquences sur Cassandra, sans qu’il n’ait la moindre envie de lui faire des reproches quant à leur accord. Elle a tenu son rôle, elle l’a toujours fait.

Quand il reconnaît sa chevelure blonde, il esquisse un sourire sincère. Il n’est pas amoureux, non, mais ça ne l’empêche pas le moins du monde d’être simplement heureux de la retrouver, surtout alors qu’il anticipe déjà l’idée que c’est peut-être la dernière fois qu’ils se voient. « Hey. » Le brun souffle, simple et sobre, avant d’embrasser sa tempe. Il aurait pu avoir ce geste à son égard sans que ce soit réfléchi, stratégique, ou Dieu sait quoi d’autre encore. Néanmoins, il ne peut s’empêcher de penser que les bruits de couloir peuvent naître de n’importe où et il est hors de question de donner à manger aux coloporteurs. Ils en auront bien assez d’ici peu de temps. « Tout s’est bien passé ? » Pour les Grammy, il se doute que oui, mais il parle bel et bien de Cassie et pour elle seulement, pas l’artiste qu’elle représente et dont les récompenses ne seront jamais siennes. Pour l’avion, aussi, il demande, il cherche à savoir. « Je me disais que tu voudrais peut-être rentrer à la maison le plus vite. » Elle doit être extenuée par le voyage autant que le décalage horaire, et sur ce simple point, il ne ment pas non plus. Simplement, il ne précise pas qu’il attend surtout qu’ils soient dans la voiture pour entamer leur véritable discussion, laquelle ne peut pas avoir lieu entourée du moindre inconnu. « Je nous ai commandé àmanger. » Et surtout, surtout, il la caresse dans le sens du poil pour qu’elle ne fasse pas d’esclandre le moment venu. L’attitude d’un homme qui sait que la faute repose sur lui.

Le retour à la réalité est presque trop brutal pour être vraiment bien intégré. L’effervescence du séjour bourdonne encore dans ton crâne -à moins que ça ne soit l’excès de champagne ou peut-être le décalage horaire- et il faut désormais se préparer à la suite des événements. Si tu n’es pas directement concernée par l’obtention des récompenses, il n’en reste pas moins que tu as été en première ligne pendant tout le process qui a mené au moment où Midas est monté sur scène pour les récupérer. Presque aussi fière que si c’était toi qui avait tenu le trophée bien haut sous l’oeil attentif des caméras et des spectateurs. La consécration d’années de travail acharné, la gratitude dans ses mots, tout ça, ça marque un nouveau tournant dans sa carrière. T’es heureuse pour lui et même les stinky eyes balancés en coin par Jo n’auront pas eu raison de l’ambiance.
Sur le moment, tout le monde a eu du mal à y croire -bien que ça n’a rien de surprenant-, dans l’avion, tout le monde avait encore du mal à y croire, et en arrivant à l’aéroport, pareil. Il faut désormais redescendre de son petit nuage et commencer à préparer la suite. Bien évidemment, tu as déjà un coup d’avance mais tu as promis de laisser une à deux semaines de battement histoire que lui et la Carter puissent se reposer. De ton côté, ça te laisse amplement le temps de peaufiner les détails de tout ce qu’il y aura à faire ensuite mais surtout de préparer la transition à venir.
Ambrose, en parfait fiancé qu’il est, a proposé de venir te récupérer à ton arrivée à Brisbane ; “parfait”, as-tu répondu, peu friande à l’idée de devoir faire appel à un Uber avec plus de douze heures de vol et le jetlag qui va avec. Là, tu vas pouvoir rentrer directement, prendre un bain d’environ une heure et aller te coucher directement si tu ne t’endors pas dans la baignoire avant.
L’équipe se dit au revoir, félicite encore les artistes et se sépare finalement, tous très désireux d’enfin pouvoir rentrer chez eux. Toi non plus, tu ne traînes pas. Pas d’effusions, pas de sentiments qui débordent, tout a déjà été dit et redit. Ta valise récupérée, tu t’éclipses à ton tour pour être accueillie par le brun qui vient t’accueillir comme il faut pour maintenir l’illusion et tu ne lui offres qu’un sourire fatigué, visiblement épuisée par le voyage et le surplus d’émotions qu’il a procuré. « Tout était parfait, oui. » L’accueil sur place, la réactivité des organisateurs et des équipes, aucun accroc à signaler et c’est tout ce que tu pouvais attendre. « Tout était fou, franchement t’aurais dû venir, » c’est même pas un reproche, loin de là, juste un constat. Ayant passé du temps au sein d’un groupe dont la renommée n’est plus à faire, il aurait largement été dans son élément. « Et toi ? Ça s'est bien passé avec Beyoncé ? » Le sourire est taquin, qu’il s’occupe d’elle pendant ton absence a été ta seule requête. D’ordinaire tu t’arranges autrement, mais puisqu’il avait les clés, t’en as un peu profité. « T’as pas idée, j’ai juste hâte d’aller m’allonger, là. » C’est pas tant que t’as mal dormi, dans l’avion, après tout il y avait tout le luxe et le confort nécessaire, mais y a clairement rien qui compare avec un retour au bercail. « Oh… J’ai mangé dans l’avion, déjà. » Sur un vol longue durée comme ça, forcément. « Mais si toi non, te prives pas pour moi, vraiment. » Premier réflexe une fois installée dans la voiture, reculer le siège à fond et étendre tes jambes au maximum. Pour le coup, tu vas bien profiter d’être une passenger princess, pas de doute là-dessus. « Midas a demandé à te rencontrer. » C’était qu’une question de temps, après tout.

« Tout était fou, franchement t’aurais dû venir. » Et avec le recul, il regrette de ne pas l’avoir fait. C’est un monde qu’il connaît à son niveau, c’est à dire pas grand chose, mais qu’il aurait sans doute adoré découvrir de l’intérieur. Il sait que ses accès auraient été plutôt limités parce que Cassie n’est pas directement dans l’industrie elle-même, mais justement il aurait pu profiter d’un certain anonymat et ne pas voir son étiquette politique tachée par ce genre de soirées extravagantes. Au final, il n’en a rien été, et il sait qu’il va devoir se contenter du récit qu’elle en fait, elle qui se montre toujours aussi extatique malgré les nombreuses heure d’avion et presque autant de décalage horaire. Il se garde de lui répondre qu’il viendra la prochaine fois, déjà certain qu’il n’y aura justement aucune prochaine fois. Pendant un instant, il remet tout en question et se demande si justement il n’est pas celui qui s’apprête à faire une erreur, alors qu’en réalité il continue de penser que la seule erreur date de près d’un an, quand il a décidé de se prendre pour un putain d’acteur.

« Et toi ? Ça s'est bien passé avec Beyoncé ? » - « On est devenus intimes, elle et moi. » En d’autres mots, s’il y a bien au moins une chose dont elle n’a pas à s’inquiéter, c’est la façon dont il s’est occupé de son chat, laquelle se porte à merveille et a sûrement à peine pris en compte l’absence de Cassie. « Oh… J’ai mangé dans l’avion, déjà. » Il se mord l’intérieur de la joue, un brin mis à mal que son seul bon élan de volonté coule aussi rapidement à pic. « J’avais pas vraiment faim. On le gardera au frais. » Elle le gardera au frais, du moins, parce qu’il ne sera pas davantage présent dans son appartement à l’avenir. Il anticipe déjà qu’elle n’acceptera plus de l’héberger à titre gracieux si elle n’a plus rien à y gagner de son côté, et il le comprend d’autant plus qu’il en aurait fait de même à son tour. « Midas a demandé à te rencontrer. » Il prend le temps s’attacher sa ceinture avant de répondre, comme s’il avait besoin d’une quelconque protection de la sorte face au futur courroux de Cassie. « Je suis pas certain que ce soit une bonne idée. » Il veut le rencontrer parce qu’il gravite autour de Cassie ; à la seconde où elle ne sera plus dans l’équation, il n’aura plus aucune raison de vouloir le rencontrer et Ambrose le premier acceptera l’idée sans chercher à négocier. Ils ne se doivent rien, ils ne se connaissent pas, et ce n’est pas au niveau où Ambrose chante qu’il risque d’exister dans le quotidien d’une star mondial telle que Sterling. « Je voulais te parler d’un truc en fait, justement. » Un truc qui ne pouvait pas attendre qu’elle ait le temps de s’installer après son voyage, ce qui laisse entendre que cela représente un certain empressement pour Ambrose malgré tout. « J’ai bien réfléchi pour le mariage, tout ça… et je suis pas certain que ce soit viable sur la durée, au final. » Leur mensonge, leur bonheur. Les attentes. Tout, absolument tout. Sa vie a été largement bousculée en début d’année et il a revu l’ordre de ses priorités, un ordre dont Cassie ne fait pas partie malgré l’affection sincère qu’il a appris à cultiver au sujet de la jeune femme. Ce n’est pas de l’amour et cela ne le sera jamais, parce qu’il sait ce que c’est que d’aimer quelqu’un plus que soi et il sent que ce ne sera jamais le cas envers elle. Tout comme elle n’en ressentira jamais autant envers lui, et ce n’est pas ce qu’il lui demande. Simplement, cela rend leur mensonge d’autant plus difficile à tenir, pour ne pas dire impossible Inhumain.

Inconsciemment, tu te tends lorsqu’il te sort sa version remodelée du “faut qu’on parle” qui n’annonce généralement rien de bon. D’avance, tu sais que ça risque de ne pas te plaire, sans quoi il ne se donnerait même pas la peine d’essayer d’arrondir les angles avant d’en venir directement au fait. Le mariage. Bien sûr. Bien sûr que c’est de ça qu’il veut parler, que c’est pour ça qu’il est venu te chercher, qu’il s’est montré presque trop galant alors qu’il n’y avait presque personne pour assister à vos retrouvailles émouvantes après une semaine passée loin de l’autre.
Soupir.
C’était évident, pourtant. Tu savais que ça ne durerait pas, que c’était juste pour le show et que ça se terminerait un beau jour parce que ça n’a jamais été voué à s’étendre au-delà de ce que vous avez décidé. Sauf que dans ce cas-là, tu n’as rien décidé. Il te met devant le fait accompli et t’as presque l’impression de te faire larguer pour de vrai. L’idée de mettre un terme à votre arrangement devrait te soulager, après tout, tu vas retrouver ta liberté de faire comme tu l’entends et surtout, de peut-être te lancer dans une vraie relation, pour une fois. Seulement voilà, la pilule ne passe pas. « Okay donc tu t’es vraiment dit que le meilleur moment pour parler de ça c’était pile à la sortie d’un vol de quinze heures ? » Pas que tu le prennes mal, après tout ça n’était jamais voué à durer, mais quand même. Il y a des moments bien plus propices à ce genre d’annonce et tu estimes que maintenant n’en fait pas partie. So much pour un retour tranquille à la maison, hein. Du bout des doigts, tu viens te masser les tempes, sentant déjà poindre le mal de crâne à l’idée de traiter ça dans la voiture. « Du coup t’as prévu quoi pour la suite ? » Légère pause, tu fais de ton mieux pour ne pas avoir l’air extrêmement agacée par l’annonce. « Tu me déposes chez moi et tu récupères les affaires que t’as déjà préparées ? » A tous les coups il n’a même plus rien à reprendre puisque les rares affaires qu’il avait ramenées chez toi ont dû être emballées et déménagées durant ton absence.
Nouveau soupir.
Tu attrapes ta bouteille d’eau que tu descends à moitié, plus par envie d’occuper tes mains que par besoin de boire. « Tu veux l’annoncer quand ? » Est-ce que t’as le temps de préparer ta mère et ta famille à la séparation ou est-ce qu’il veut se dépêcher de passer à autre chose ? Dans tous les cas, il vous faudra accorder vos violons une nouvelle fois pour expliquer les raisons vous poussant à annuler vos fiançailles. « Tu veux l’annoncer comment ? » Dans votre histoire, t’imagines que ça l’arrange si vous vous quittez en bon terme, pas d’histoire sordide à donner à manger aux quelques médias qui viendront s’intéresser à l’affaire.

Il savait que la pilule ne passerait pas, il le savait pertinemment et il ne peut pas en vouloir un seul instant à Cassie sur ce point. Après tout, il est celui qui est venu la chercher pour lui proposer un arrangement digne du siècle dernier. Et aujourd’hui, il est celui qui vient la chercher pour lui annoncer que finalement, il n’est plus question d’un quelconque plan entre eux et qu’ils auraient dû commencer par ne jamais y penser. « Okay donc tu t’es vraiment dit que le meilleur moment pour parler de ça c’était pile à la sortie d’un vol de quinze heures ? » Elle répond par l’attaque en guise d’axe de défense, et là encore il accepte l’intonation de sa voix sans lutter davantage contre elle. Cassie est bien plus dans son droit que lui, il ne se fait aucune illusion sur ce point. « J’ai attendu que tu rentres pour t’en parler, mais je voulais pas mettre de suspense. » Elle devrait au moins s’estimer heureuse qu’il ait attendu son retour pour lui en parler les yeux dans les yeux, voilà ce qu’il pense au fond de lui, même si ses mots prennent une forme plus délicate et plus avenante aussi.

« Du coup t’as prévu quoi pour la suite ? » “Rien” n’est pas une réponse convenable dans un tel contexte, pas vrai ? Pourtant, c’est celle qui se rapproche le plus d’une forme de vérité et réalité. Il s’est imaginé quelques plans et sorties de secours, mais rien de véritablement concret. « On se quitte en bons termes, on a voulu aller trop vite. Fin de l’histoire. » Révéler la supercherie n’est pas une issue envisageable, évidemment, et il espère qu’elle l’entendra autant que lui. « Tu me déposes chez moi et tu récupères les affaires que t’as déjà préparées ? » - « Que j’ai déjà récupérées. » Il précise, il reformule. Cela ne sert à rien de lui mentir sur ce point, encore moins alors qu’ils seront chez elle d’ici plusieurs dizaines de minutes et qu’elle verra de ses propres yeux qu’il n’y a justement plus rien à voir. « Je vais dormir chez Malone en attendant. » Elle s’en moque sûrement, mais il le précise malgré tout. Pour leur histoire, pour qu’elle comprenne le tableau dans son entièreté. Maintenant, il est évidemment impossible de retourner vivre chez Norman. Sans Norman.

Lorsqu’elle attrape une bouteille d’eau pour la boire nerveusement, il lui laisse le temps de réfléchir à la situation sans la brusquer. « Tu veux l’annoncer quand ? Tu veux l’annoncer comment ? » Ambrose s’arrête un instant, incapable de savoir si c’est une quelconque bonne nouvelle pour lui qu’elle lui laisse autant les rennes de la situation. « Le plus tôt possible. Retire juste ta bague de fiançailles, ça devrait suffire. » Ils n’ont pas besoin de faire d’annonces publiques. Ils ne sont pas des stars, ils ne sont pas suivis comme des personnalités - pas sur ces sujets, du moins. Ils n’auront qu’à prévenir leur entourage et faire comme Monsieur tout le monde. Rien d’immense, rien de grandiose. Simplement un couple qui décide de prendre des chemins différents, comme beaucoup d’autres avant eux. « Qu’est-ce que t’en penses ? » Ambrose finit par demander, ne voulant pas lui imposer les faits dans leur ensemble sans même prendre le temps de lui demander sa position sur ces sujets. Ce n’est pas tant un acte d’empathie, mais surtout un besoin de s’assurer qu’elle continuera à être dans le même camp que lui, même alors qu’ils n’auront plus d’objectifs communs.

Léger rire amer, t’es pas certaine d’aller dans le même sens que lui concernant le raisonnement qu’il te lâche, mais ce qui est fait est fait ; il est désormais trop tard pour faire marche arrière. « J’avoue que par SMS ça aurait pas été sport, » t’aurais encaissé comme une grande, ce n’est pas la question, mais t’aurais peut-être quand même eu besoin d’un petit temps d’adaptation pour retrouver une poker face correcte et convaincante face à toute l’équipe. Finalement c’est peut-être pas plus mal comme ça. Nouveau soupir sonore, tu t’enfonces un peu plus dans le siège passager, tournant ton regard vers la route qui défile sans pour autant stopper les questions.
« En bon termes, ouais, » t’acquiesces en pinçant les lèvres, ne sachant pas tellement d’où vient cette frustration que tu sens monter progressivement. Probablement que t’aurais aimé être mieux préparée et moins prise au dépourvue, ou alors amorcer la fin par toi-même plutôt que de la subir de plein fouet dès la sortie du tarmac. T’aurais aimé être chez toi, reposée de la semaine qui vient de se passer et surtout, t’aurais aimé avoir le contrôle de la situation, comme toujours. Bien évidemment qu’il a déjà récupéré ses affaires, ça doit même faire un moment qu’il a prévu le coup et qu’il a plié bagages, peut-être même à l’instant où tu as posé un pied dans l’avion direction Los Angeles. « T’as pas peur qu’il pose les mauvaises questions ? » Il reste son frère et c’est pas impossible qu’il soit celui qui se rend compte que quelque chose cloche.
Quand il vient à parler de la bague que tu es supposée retirer, tu viens machinalement la faire tourner entre tes doigts. C’est dingue à quel point on s’habitue vite à ces bijoux une fois qu’ils sont là. Mais oui, c’est faisable comme ça. Pour maintenant, tu attendras d’être rentrée et de pouvoir la ranger quelque part. « J’en pense que j’aurai aimé un heads up avant. » C’est la moindre des choses dans un cas comme ça. Non pas qu’il y ait de guide ou de meilleure façon de faire, mais tout de même. « J’veux dire… Je sais que c’était jamais fait pour durer dans le temps et qu’on s’était mis d’accord, mais… » Doucement, tu viens te gratter la joue avant de lâcher un nouveau soupir. « Je m’attendais pas vraiment à ce que ça tombe comme ça d’un coup. » Pas alors que t’es crevée et que t’as pas les armes pour réagir comme il le faudrait. Dans d’autres circonstances t’aurais gardé la tête haute, t’aurais balayé la nouvelle d’un revers de main avant de simplement hausser les épaules et ça en serait resté là. « Je crois que le pire truc ça va être d’en parler à ma mère. » Tu sais d’avance qu’elle va te tenir le crachoir pendant des heures pour s’assurer que tout va bien et que tu n’as pas besoin de soutien ou peu importe. « Du coup t’étonnes pas non plus si elle essaie de t’appeler toi aussi, hein. » Vu comme elle peut se montrer intrusive, il n’est pas exclu qu’elle tente de contacter Ambrose pour avoir sa version à lui et pour tenter de le convaincre de faire marche arrière, c’est qu’il avait fait forte impression auprès de la mère de famille, l’air de rien. « Dans l’histoire c’est elle qui va avoir le coeur brisé, je crois. » Ca t’emmerde parce que ça fait des mois que tu vis avec ce mensonge, que t’as appris à le manier et à le brandir à la moindre occasion pour jouer le rôle, ça va te faire bizarre de ne plus avoir à être systématiquement sur tes gardes. « Tu comptes rester longtemps chez ton frère ou tu as des plans pour plus tard ? » Il a forcément d’autres plans pour l’après.

« J’avoue que par SMS ça aurait pas été sport, » Et il ne veut pas être cette personne qui rompt par message, même si l’idée de “rompre” ne correspond pas réellement à leur situation. Ils ne peuvent pas mettre fin à une relation quand il n’y en a jamais eu une et qu’il a été plus mal à l’aise qu’autre chose à l’idée de dormir avec elle lorsque sa famille s’est invitée avec surprise au moment des fêtes de fin d’année. S’il a appris à sincèrement l’apprécier, elle et son petit caractère, il n’y a rien dans ses pensées qui aille plus loin. « En bon termes, ouais, » Ses mots disent une chose et toute son attitude en dit une autre mais Ambrose sait bien qu’il est plutôt mal placé dans cette histoire pour en tenir rigueur à Cassie. Elle a le droit d’être blessée ; il l’aurait été bien plus encore à sa place et sans doute même qu’il n’aurait pas accepté la décision comme elle semble le faire de son côté. Il aurait été bien plus vindicatif, peu importe l’image que cela aurait pu donner de lui.

Malgré tout, il lui présente son plan, lequel se résume maladroitement à dormir sur le canapé de Malone - loin d’être grand confort, il n’y a pas besoin qu’ils en discutent pour que cela soit une vérité connue de tous. « T’as pas peur qu’il pose les mauvaises questions ? » Il aurait eu peur des questions que James pourrait poser, ça oui, mais Malone ? Lui et son frère ne sont pas assez proches pour qu’il puisse craindre quoi que ce soit, pas même que son propre frère ne soit pas réellement triste après la fin abrupte de ses fiançailles - il est au moins assez à terre à cause de la mort de Norman pour mimer tout le reste et ainsi pouvoir l’englober. « T’en fais pas. On a jamais été proches. » Il commente avec une certaine amertume, déjà certain que Cassie n’était pas en train de se faire un sang d’encre au sujet de quoi que ce soit.

« J’en pense que j’aurai aimé un heads up avant. » Il sait, il comprend. Il ne réfute rien. Il n’est pas irréprochable et il déteste ne pas l’être, mais il ne peut pas réécrire l’histoire. Ambrose a voulu aller plus vite que la musique et en paie désormais les conséquences, Cassie à ses côtés uniquement parce qu’il lui a demandé de l’être. « J’veux dire… Je sais que c’était jamais fait pour durer dans le temps et qu’on s’était mis d’accord, mais… - Je m’attendais pas vraiment à ce que ça tombe comme ça d’un coup. » Face à la réaction de Cassie, il ressent bien plus de peine à son égard que ce qu’il aurait pu penser. Il en ressent assez pour que son visage change et qu’il l’observe différemment, plus que jamais désolé de lui imposer cette conversation maintenant. « Je sais. J’ai pas cherché à te blesser. » Peu importe à quel point il se montre maladroit : il le subit presque autant que la jeune femme face à lui, loin d’être heureux dans l’idée d’infliger de la peine à autrui. « J’y pensais pas y’a pas si longtemps que ça. » Avant que tout tourne au drame avec Ruben, avant que Norman passe de vie à trépas, avant qu’il reprenne contact avec Mavis. La vie a une saveur différente, maintenant. Une valeur différente, aussi. Une valeur qui ne peut pas se permettre d’être faussée par des sentiments mimés, ce qui les empêche tous deux de vivre une vie privée comme ils pourraient l’entendre. Elle a le droit d’être aimée en public. Il a le droit qu’il en soit de même pour lui - quand ils auront passé les mois nécessaires avant de s’afficher avec une autre personne sans qu’ils ne soient accusés de tourner trop vite la page.

En pleine discussion, il souffle longuement en même temps qu’il fait glisser sa main contre son visage, espérant ainsi se remettre les idées en place avec si peu. « Je crois que le pire truc ça va être d’en parler à ma mère. Du coup t’étonnes pas non plus si elle essaie de t’appeler toi aussi, hein. » - « Je compte pas la ghost si elle appelle. » Il ne serait pas ravi de l’avoir au téléphone pour cette raison, mais elle n’a rien à voir avec leurs petites histoires et mérite une pleine considération, même alors qu’il n’a plus rien à y gagner à se faire bien voir par sa belle-mère. « Tu lui diras rien, hm ? » Rien qui ne tourne autour de leur secret. Cela coule de source, mais il préfère s’en assurer deux fois plutôt qu’une. « Dans l’histoire c’est elle qui va avoir le coeur brisé, je crois. » Il se mord une partie de la lèvre en guise de réponse. Ambrose tente de se souvenir que c’est elle qui leur a fait la surprise de venir dans un premier temps mais il ne peut pas s’empêcher de se dire que s’il avait une mère, lui aussi, alors elle aurait connu une réaction similaire. Si. « Tu comptes rester longtemps chez ton frère ou tu as des plans pour plus tard ? » - « Je sais pas. Le temps d’avoir l’héritage de Norman, je pense. » Il lui lègue un logement, elle le sait déjà. Ils ont un temps discuté d’y habiter ensemble. Ambrose a aussi pensé en faire son véritable chez lui, où il aurait pu retrouver les personnes qui lui sont chères - comprendre ici Ruben. La donne est différente, maintenant, et il aura véritablement besoin de ce toit où dormir. « Tu comptes faire quoi, toi ? » Elle n’a pas eu le temps d’y réfléchir, mais il cherche malgré tout à comprendre si elle ira bien, si elle saura rebondir. « Si t’as besoin, je suis là hein. Je veux dire, au fond, ça change pas grand chose pour nous deux. On est pas en pleine dispute. » Ils n’ont pas le cœur brisé non plus.

C’est la fatigue qui prend le dessus, promis. En temps normal et avec un peu de temps pour appréhender, t’aurais réagis comme la grande dame que tu es, avec classe et retenue (juré), mais là, à l’abri des regards, c’est la frustration qui prend le dessus. C’est que ça pique un peu ton égo, cette histoire ; mais ça tu ne l’avoueras pas, bien évidemment.
Et malgré tout ça, ça t’embête quand même de savoir qu’il préfère aller squatter le canapé de son frère plutôt que de rester chez toi où il est pas loin d’avoir sa propre garçonnière. En plus et pour le peu que vous vous croisez à l’appartement, on ne peut pas vraiment dire que vous vous marchiez dessus. « Je t’aurais pas mis à la porte, tu sais, » malgré tout, « par contre j’aurai peut-être commencé à demander un loyer. » Bon, peut-être pas quand même, mais juste pour le principe, tu laisses planer le doute, en tout cas tu fais genre que non, tu n’es pas blessée dans ta fierté et que t’es suffisamment mature pour bien le prendre. « Enfin si t’es sûr de toi… » Léger haussement d’épaules l’air de dire que tu n’iras pas lui courir après. Et puis tu devrais être contente, c’est le retour de l’indépendance, la possibilité d’inviter qui tu veux quand tu veux sans avoir à prévenir qui que ce soit pour dire “bouge tes affaires de la chambre d’ami sinon on va se poser des questions”, et ça c’est franchement une libération pour vous deux.
Maintenant que t’as eu un peu le temps d’assimiler et de faire le point, tu dévies le sujet ; dans toute cette histoire ceux qui seront les plus affectés resteront vos proches, puisque dans leur cas, l’histoire était réelle. S’ils n’ont techniquement rien à y faire, certains (ta mère) prenaient l’affaire très à coeur. Raison de plus pour mettre Ambrose en garde sur la possible réaction de la matriarche. Léger rire soufflé face à la promesse de ne pas la ghoster, « vaut mieux pas, de toute façon, elle te ferait vivre un enfer. » il a pu être témoin qu’elle n’est pas du genre à garder les choses pour elle. C’est une femme qui exprime ses émotions, qui tentera sûrement d’amadouer le bellâtre avant de lâcher l’affaire et de dire “j’ai tout essayé”. « Elle risquerait de revenir ici pour te retrouver. » Peut-être même qu’elle fera l’effort de venir te voir au passage, qui sait. « Je vais rien lui dire. » Bien sûr que non, pour qui il te prend ? C’est que ta famille a pris tout ça très au sérieux, leur faire l’affront d’avouer que tout n’était qu’un mensonge dissimulé, ça serait un coup à se voir reniée et déshéritée. « La déception serait encore pire que l’annonce, là. » Et encore, t’es gentille.
Il mentionne Norman et tu plisses le nez, « encore désolée pour lui, » tu sais à quel point le départ de l’homme l’a affecté. « Je sais pas encore. » Qu’y a-t-il à faire, en vérité ? « Déjà j’ai pas à déménager, ça facilite la transition. » Pour le coup t’es bien contente de pas avoir eu à bouger de place tout ça pour couvrir votre histoire. « Beyoncé va pouvoir récupérer sa chambre, elle va être ravie. » Peut-être un peu triste de ne plus avoir son nouveau meilleur ami, aussi. « Pour le reste je sais pas trop. Et puis t’as raison, y a pas grand chose qui change, au final. » Faudra juste se montrer particulièrement précautionneux et ne pas se remettre en selle trop vite. « On devrait se laisser un ou deux mois avant de s’afficher à nouveau avec quelqu’un, tu crois pas ? » Enfin s’il y a quelqu’un à afficher, ce qui n’est pas ton cas et tu doutes que ça le soit d’ici là. « Ça évitera les rumeurs foireuses si on va trop vite pour passer à autre chose. » Question de bon sens.

« Je t’aurais pas mis à la porte, tu sais, » Peut-être pas de suite, non, mais cela aurait dû finir par venir un jour ou l’autre, et il ne voulait pas les mettre dans une telle position. Il a préféré anticiper et s’apporter le coup de grâce lui-même plutôt qu’il vienne d’une tierce personne. « par contre j’aurai peut-être commencé à demander un loyer. » Cette remarque a au moins le don de lui tirer un sourire sincère, ce qui permet par la même occasion de lui donner un certain brin de confiance en eux et en l’avenir : ils continuent de bien s’entendre malgré leur rupture (véritable, métaphorique, tout et rien à la fois). Ils ne se trahiront pas non plus, et c’est pour très largement rassurer Ambrose malgré tout. « Enfin si t’es sûr de toi… » Léger haussement d’épaules l’air de dire que tu n’iras pas lui courir après. Et puis tu devrais être contente, c’est le retour de l’indépendance, la possibilité d’inviter qui tu veux quand tu veux sans avoir à prévenir qui que ce soit pour dire “bouge tes affaires de la chambre d’ami sinon on va se poser des questions”, et ça c’est franchement une libération pour vous deux. "Je le suis, oui." Inutile de faire davantage de suspens sur ce point. Il est sûr de lui et ne reviendra pas sur ce point.

Il aborde le sujet de la matriarche, ironiquement bien conscient de l’influence et du pouvoir que peuvent avoir les mères alors qu’il n’a jamais connu la sienne. « Je vais rien lui dire. La déception serait encore pire que l’annonce, là. » Tant mieux. Le monde entier continuera de parfaitement bien se porter s’ils n’apprennent jamais quel a été l’arrangement entre eux. Ils n’auraient rien à y gagner, ni lui ni même Cassie qui passerait pour une personne tout aussi opportuniste qu’il l’a été. Ambrose est celui qui a fait la proposition, mais elle est celle qui a accepté sans avoir à y penser à deux fois. Aux yeux de l’histoire, ils se montrent tout aussi coupables l’un que l’autre. "Je dirai rien à mes proches non plus." Pour les mêmes raisons ; il n’élabore donc pas davantage.

A la mention  de Norman, il est sincèrement touché de la réaction de Cassie et de la compassion qui est la sienne, quand bien même il ne lui a rien demandé en ce sens et aurait compris son ressentiment à son égard si elle avait ressenti le besoin de l’exprimer. « encore désolée pour lui, » Il hoche la tête pour accepter ses mots, sans laisser sa voix parler et risquer d’être enrouée. « Beyoncé va pouvoir récupérer sa chambre, elle va être ravie. » Il esquisse un sourire amusé. Le chat risque de lui manquer, à n’en pas douter, mais il n’est certainement pas en droit de demander une quelconque garde de cette dernière. « On devrait se laisser un ou deux mois avant de s’afficher à nouveau avec quelqu’un, tu crois pas ? » Lentement, il positionne à nouveau son regard dans celui de la jeune femme et prend son temps avant de lui offrir une réponse. Il a besoin de l’observer un temps et de comprendre la raison derrière ces mots. "T’es pressée de te maquer avec quelqu’un en particulier ?" Il ironise, loin de pouvoir ressentir la moindre jalousie à cette idée. Ils étaient clairs sur l’idée que chacun pouvait continuer à vivre sa vie privée tel qu’il l’entendait, tant que cela restait sous l’oeil des radars en tout genre. "Tu peux me le dire, maintenant." Elle pouvait déjà le lui dire avant, en réalité, mais maintenant qu’ils s’apprêtent à ne plus rien être de façon officielle, elle le peut d’autant plus. "Je compte attendre un peu plus que ça, de mon côté. Toi, fais comme tu le sens." Elle seule peut savoir ce qui est le mieux pour elle, et Ambrose n’a plus aucune raison de vouloir réglementer et codifier sa vie. Elle est tout aussi libre que lui, désormais.

Rassurée à l’idée qu’il gère les questions un peu trop intrusives de ta mère comme un champion (encore), tu peux tout de même souffler à ce niveau là. Elle va vous contacter en boucle chacun de votre côté, se la jouer entremetteuse et tenter de comprendre les tenants et les aboutissants de la rupture dans l’espoir de peut-être pouvoir réparer ce qui a été brisé et qui a mené à cette décision. Si vous êtes deux à lui servir la même soupe, ça devrait être suffisant pour qu’elle ne saute pas dans le premier avion direction Brisbane et qu’elle traverse littéralement le monde pour combler son ennui à la maison. « T’façon on aurait dit quoi ? » c’est purement rhétorique, bien évidemment. « Ah au fait les fiançailles c’était pour de faux, » que tu réponds en prenant une voix volontairement haut perchée, tu secoues la tête en ricanant doucement. « Merci la réputation de menteur qui va suivre, hein. » Aka des gens peu fiables, qui agissent par intérêt et blablabla. Si sur le papier ce n’est pas faux -c’est ce que vous êtes-, il est important que vous restiez les seuls à le savoir et que ça ne s’ébruite pas. Tu connais des personnes qui seraient bien trop ravies à l’idée de se saisir de ce genre d’information pour pouvoir les utiliser contre toi. Non, ce secret, tu l’emporteras dans la tombe et tu comptes sur Ambrose pour en faire de même.
Les condoléances présentées, tu ne t’attardes pas tellement sur le sujet. Ca doit être encore compliqué pour lui et puis de ton côté, tu n’es pas forcément douée pour gérer la peine des autres et trouver les mots justes. Autant dévier et poser un semblant de procédure à suivre après ce soir. Il te renvoie la question, s’attendant sûrement à s’entendre dire que tu fréquentes et que ça t’arrange d’arrêter. « Moi ? » Avec le recul, tu te rends compte de quoi ça peut avoir l’air, ce genre de demande. « Non, y a personne. » Plus depuis un moment, d’ailleurs. « J’ai pas vraiment le temps pour tout ça. » Trop de projets en cours, pas assez d’heures dans une journée, bref, les excuses classiques que tu sortais avant de te lancer dans cette histoire avec lui. Probablement la raison pour laquelle l’annonce avait tellement surpris tes parents, ça sortait de nulle part et ils n’étaient pas réellement dupes au point de se laisser tromper si facilement. Heureusement qu’avec Constantine, vous avez su les convaincre, eux et les autres plus septiques. « C’était juste… Je sais pas, histoire de dire qu’il y ait tout de même un délai un minimum décent, quoi. » Après il fait bien ce qu’il veut, tu ne vas pas non plus aller le fliquer pour t’assurer qu’il fait bien gaffe à qui il voit et où il le fait. Dans le pire des cas, t’as toujours l’option de faire un scandale en faisant mine d’être jalouse ou alors de te montrer compréhensive en lui souhaitant d’être heureux et blablabla. « Enfin tant mieux si tu mets plus de temps, je détesterai savoir qu’on se remet si facilement d’une rupture avec moi. » En toute modestie. Tu lui adresses un sourire complice en t’étirant un peu, tentant vainement de chasser la fatigue du voyage de ton corps. « Même si on se quitte en bon terme. » C’est le deal, après tout. « Tu vois quelqu’un, toi ? » Que tu demandes par pure curiosité.

La discussion se passe aussi bien qu’une discussion du genre pourrait se passer et Ambrose en est sincèrement soulagé, parce qu’à défaut de nourrir un quelconque sentiment amoureux pour Cassie, ce n’en est pas moins une personne qu’il a appris à estimer avec le temps et à apprécier sincèrement. Une vie à ses côtés ne correspond plus au genre de mensonge qu’il se sent capable de proférer à la face du monde et surtout à celle de ses proches, mais il n’en pense pas moins qu’elle aurait été une alliée irréprochable - ce qui est sans doute une façon de se conforter dans son propre choix et surtout son propre ego. « T’façon on aurait dit quoi ? Ah au fait les fiançailles c’était pour de faux. Merci la réputation de menteur qui va suivre, hein. » Il a un rire simple, un brin pris de court. C’est ce qu’il pensait, oui, évidemment, mais il n’aurait pas été jusqu’à le statuer à voix haute. « On va éviter, tu te doutes. » Et par “éviter”, il veut évidemment dire qu’ils emporteront ce secret dans leur tombe, parce que c’est sûrement le seul endroit où il pourrait y être à sa place sans malfaçon. Elle a trop à y perdre et lui aussi, ce qui explique qu’ils n’ont même pas besoin de jouer de quelconque menaces pour en arriver à bout.

De toute évidence, la réponse que Cassie lui apporte au sujet d’une possible relation n’est pas celle qu’il aurait pu espérer pour la quiétude de leur fin de relation, mais c’est au moins une réponse qui berce son ego. « Non, y a personne. J’ai pas vraiment le temps pour tout ça. » Tant mieux. Il est le premier à être allé voir ailleurs et à l’avoir statué dès la première seconde, mais ego oblige il est soulagé de savoir qu’il n’en a pas été de même pour Cassie. Il a au moins l’impression d’être suffisant, même s’il s’agit là d’un mensonge et qu’il n’a jamais été question de répondre à de quelconques désirs ou vides pour Cassie. Il aurait été là pour elle si elle avait eu besoin d’un soutien, pour une raison ou pour une autre, mais il n’aurait pas tenu le rôle qu’ils ont vendu au grand public. « Okay. C’était juste pour savoir. » Et il ne ment pas. Il voulait effectivement juste savoir à quoi s’en tenir et, surtout, ne pas être étonné d’une nouvelle qui pourrait lui être rapportée par à peu près n’importe qui. « C’était juste… Je sais pas, histoire de dire qu’il y ait tout de même un délai un minimum décent, quoi. » - « Je sais, je sais. Je comprends. » Et il est soulagé qu’elle aborde le sujet avant qu’il ne se soit senti obligé de le faire, parce qu’il n’avait aucune hâte à l’idée de passer une fois de plus pour le psychorigide de la situation où personne ne devrait prétendre à être rigide tant ils évoluent dans le mensonge. « Deux mois, c’est un bon début. » Le minimum, s’il se montrait honnête, mais il ne veut pas imposer davantage de discrétion à Cassie si jamais elle en venait à finalement trouver sa personne - la vraie, pas une mascarade. Il n’en ressent pas moins une compassion et une amitié sincère pour la jeune femme. « Enfin tant mieux si tu mets plus de temps, je détesterai savoir qu’on se remet si facilement d’une rupture avec moi. » Elle sourit et il en fait de même, avec une simplicité naturelle et une complicité qui l’est presque tout autant. « Tu vois quelqu’un, toi ? » Ruben ne compte pas dans l’équation, pas vrai ? Si bien que la réponse d’Ambrose lui vient naturellement, en même temps qu’il balance sa tête de droite à gauche. « Non. Non, pas pour le moment. » Pas sur le point de vue purement amoureux, du moins. Peut-être qu’il en profite aussi pour se voiler la face au sujet de l’amitié qu’il entretient avec Mavis, à n’en pas douter, mais sur l’instant il n’a pas l’impression de mentir à Cassie et c’est tout ce qui lui importe. « Je suis content d’avoir été ton fiancé au milieu de tout ça. » Malgré tout, malgré l’échec presque assumé. Il est heureux de l’avoir eue à ses côtés, pour une période de sa vie au moins.