(louis) love is a wet nose and a happy tail

(#)Sam 23 Mar 2024 - 13:31

(c) dilfgifs

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the r.s.p.c.a. shelter, redcliffe - mars 2024

« Vous devriez y songer sérieusement, Atlas. » Il dut se retenir de ne pas lever les yeux au ciel face au ton employé par sa psychologue. « Cela ne pourrait vous être que bénéfique. » Tel un bon élève, Atlas hocha la tête. Ce n’est pas qu’il n’était pas persuadé par son argumentaire, elle prêchait un convaincu. Il rêvait d’avoir un chien depuis des années, il s’était souvent posé la question, mais ce n’était jamais le moment idéal. Sa carrière était toujours passée avant tout. Il comblait son désir d’un compagnon canin avec les bergers allemands qui venaient parfois avec eux en mission. Rien n’avait changé en ce point, sa carrière restait sa priorité, qu'importe ce que pouvaient dire les gens autour de lui. Accepter d’envisager l’adoption d’un chien laissait passer un message. Celui qui sous entendrait qu’il ne repartira jamais en mission. Il en a conscience, c’est ce qui lui pend au bout du nez, la sentence finira par tomber, mais tant qu’il se trouvait dans le contrôle, Atlas avait bien du mal à accepter cette conclusion. Il se rendait encore sur la base, pratiquement tous les jours. Il avait interdiction de participer à la moindre mission, mais on lui demandait encore son avis sur certains points. Il restait un gradé à la carrière estimée, personne ne pourrait lui enlever cela, il avait travaillé trop dur pour en arriver là. Mais tout abandonner, accepter la retraite que l’on ne cessait de pousser dans sa direction ? Atlas n’était pas encore prêt à cela.

Les semaines se sont écoulées sans que jamais sa psy ne remette le sujet sur le tapis, mais Atlas ne cessait d’y penser. Il en avait envie, ne serait-ce que pour combler cette solitude qui était devenue la sienne. Le silence prenait trop de place dans son appartement, l’entraînant parfois à ne pas quitter son lit pour la journée entière. Avoir un chien l’obligerait à sortir, ne serait-ce que pour son compagnon à quatre pattes. Il en avait vu l’exemple en Louis. Ce gamin, qui n’en était plus vraiment un depuis longtemps, qu’il avait rencontré lors d’un de ces meetings imposés pour la thérapie. Il faisait tout avec son chien, Campo ne le lâchait jamais, et Atlas trouvait l’idée intéressante. Quelqu’un qui l’accompagne de partout, qui voudra toujours se retrouver à ses côtés. Il laissait l’idée germer dans un coin de sa tête depuis des jours et des jours. Chaque nouvelle impulsion appelait à la prudence. Jusqu’à ce qu’un jour, il se décida à céder à la possibilité. Il avait envoyé un message à Louis, le déclarant expert sur la question canine, lui demandant de l’accompagner à un refuge. Bien sûr que son camarade avait accepté dans la minute.

Appuyé contre sa voiture, Atlas observait les quelques cages alignées de l’autre côté du bâtiment. Les chiens paraissent calmes, vaquant à leur petite activité extérieure. Certains se montraient un peu plus dès qu’un visiteur s’approchait de leur enclos. Il n’avait aucune idée de ce qu’il attendait de cette visite. À savoir qu’il lui paraissait difficile d’adopter un chien âgé. Il allait avoir besoin d’un animal plein de fougue, un peu à l’image de Campo qui venait de lui foncer dans les jambes. « Bonjour toi ! » Il se baissa légèrement pour gratter la tête de l’animal, alors que son maître arrivait à un rythme bien plus mesuré. « Merci d’avoir accepté de m’accompagner. » Il n’avait aucune idée de ce qui allait se passer et doutait franchement que Louis lui soit d’une grande aide, mais c’était toujours plus sympa d’avoir un peu de compagnie. « Je crois que tu m’as convaincu à force de toujours l’amener partout avec toi. » Il était difficile de ne pas craquer face à la tête du chien de son ami, l’animal était si affectueux et toujours prêt à partir en balade. « Ça va toi ? » Qu’il demanda à Louis sans presser les choses, ils avaient toute l’après-midi devant eux après tout et peut-être être qu’Atlas avait besoin d’une minute avant que le plan ne se mette en marche.

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@atlas siede

Louis se souvenait parfaitement bien du jour où Campo avait débarqué dans sa vie. Cela faisait des mois que l’idée l’accompagnait matin, midi et soir, au point qu’il arrivait presque systématiquement à la mentionner à sa thérapeute à chaque séance. Elle avait arrêté de l’encourager à franchir le cap au bout de la cinquième fois, lui répétant ensuite inlassablement qu’il connaissait parfaitement sa position à ce sujet et qu’il était le seul à trouver de fausses excuses pour ne pas se lancer. À cette période, il passait chaque matin ou presque devant le refuge, qui n’était qu’à quelques rues de son appartement. Il lui arrivait même d’en pousser la porte, pour passer une heure ou deux en compagnie des animaux recueillis. Et puis un jour, on lui avait présenté Campo - ou plutôt Lucky à ce moment-là - et Louis avait immédiatement senti qu’il venait de se faire prendre à son propre piège. Il avait dû patienter quelques jours supplémentaires, pour compléter les documents administratifs qu’il n’avait lus qu’en diagonale, puis il avait enfin pû ramener son nouveau compagnon chez lui. Malgré les sorties nocturnes, les balades par tous les temps, les accidents de pipi et les chaussures mordillées, il n’avait jamais regretté sa décision et il le faisait savoir sans retenue à toutes les personnes qui lui posaient la question. C’était peut-être pour ça que c’était vers lui qu’Atlas s’était tourné lorsqu’il avait apparemment décidé que le moment était venu de passer le cap, pour lui aussi. Sans surprise, Louis avait immédiatement accepté de lui apporter son soutien et son expertise, le tout accompagné de bien trop de points d’exclamations, signes de son excitation certaine.

Avant de rejoindre Atlas, Louis avait préféré faire faire un tour à Campo, pour évacuer au moins une partie de son trop plein d’énergie. Cela ne suffit apparemment pas à l’empêcher de foncer dans les jambes du pilote dès qu’il aperçut sa silhouette, appuyé contre sa voiture. Louis laissa échapper un rire étouffé mais ne tenta pas de retenir son chien ; il savait que c’était peine perdue, et surtout, que ça ne dérangerait pas l’autre homme. Il le suivit sans accélérer son rythme, et regarda, le sourire aux lèvres, Atlas lui gratter la tête pour le saluer. « Merci d’avoir accepté de m’accompagner. » « Avec plaisir. Tu sais bien que je pense de cette idée. » Dès que le pilote avait évoqué la possibilité d’adopter un chien, Louis ne s’était pas fait prier pour lister une énième fois les multiples bénéfices que cela pourrait lui apporter. Il n’était évidemment pas des plus objectifs - avoir un chien étant un de ses plus vieux rêves d’enfant - mais il s’en fichait, et il avait vite compris que c’était un autre point commun qu’ils partageaient tous les deux. « Je crois que tu m’as convaincu à force de toujours l’amener partout avec toi. » Louis hocha la tête, un sourire satisfait étirant ses lèvres. « Ravi de voir que notre lobbying est efficace. » Pour appuyer ses propos, il frotta la tête de Campo, qui jappa, comme pour exprimer son accord.

Malgré son excitation et son impatience à voir son ami faire la connaissance d’un éventuel futur compagnon, Louis s’était promis de ne pas le brusquer et de le laisser aller à son rythme. Il avait conscience que ce n’était pas une décision anodine et qu’elle demandait de prendre son temps. « Ça va toi ? » « Hmm, » acquiesça Louis en hochant la tête. « Plutôt bien, ouais. Je vais sûrement reprendre le rugby bientôt. » Il se contenta pour le moment de sujets superficiels, évitant l’armée ou leurs antécédents médicaux, qui pesaient souvent lourds dans leurs conversations. Aux yeux de Louis, Atlas était l’un des seuls à pouvoir vraiment le comprendre, mais cela ne devait pas les empêcher de parler d’autres choses, plus légères parfois. « Et toi ? » Le fait que ce projet d’adopter un chien devienne plus concret lui semblait être un bon signe quant au moral de l’autre homme, mais il savait aussi que tout n’était jamais tout noir ou tout blanc.

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@LOUIS DALTON & ATLAS

Sous ses yeux, quelques chiens s’amusaient dans l’immense pré alloué au refuge. Un léger sourire vint étirer ses lèvres tandis qu’il s’imaginait repartir avec l’un d’entre eux. Contrairement à ce que son message à Louis pouvait laisser sous-entendre, il ne s’agissait pas d’une décision prise à la légère. Atlas avait longuement réfléchi à l’idée d’adopter un animal de compagnie. Longtemps, l’argument contre avait été le même : impossible de laisser un animal seul lorsque les missions pouvaient durer des mois. Mais ce dernier c’était fait la malle, en même temps que ses perspectives d’avenir et sa mémoire. Il avait dû lâcher prise, s’autoriser à digérer l’idée même que sa vie ne sera plus jamais la même, avant de prendre cette décision. Aujourd'hui, il ne restait plus que les pours. Avoir un compagnon, se forcer à sortir tous les jours et la liste entière que Louis s’était évertué de lui dresser depuis qu’il avait osé mentionner l’idée. « Avec plaisir. Tu sais bien ce que je pense de cette idée. » Oh, il avait vaguement compris, aux alentours du dixième message texte sur le sujet. « Tu as été très clair, c’est sûr. » Il plaisantait, sourire aux lèvres. Leur amitié était née dans des circonstances que chacun aurait préféré ne pas avoir à traverser, mais au final, Louis était devenu quelqu’un d’important dans son quotidien. Le seul qui pouvait réellement comprendre ce qu’Atlas traversait depuis son accident. Il était le plus âgé du duo, mais Louis lui en apprenait beaucoup en retour. Ce jour en était la preuve. « Ravi de voir que notre lobbying est efficace. » Il aurait levé les yeux au ciel si Campo ne s’était pas décidé à donner son avis en retour. Un éclat de rire lui échappa alors que ses doigts vinrent s’enfoncer dans la fourrure de l’animal. « J’ai bien compris, toi aussi, tu veux un copain. » Atlas s’était promis une chose : cette adoption devait être un véritable coup de cœur. Il ne voulait pas précipiter les choses et préférait laisser son feeling entrer en jeu. Il s’agissait avant tout d’une première visite, pour voir.

Et pour ne pas se jeter immédiatement dans la gueule du loup, il avait cherché à détourner la conversation. Rien d’énorme, rien qui ne soit anormal. Juste prendre des nouvelles tout en se disant qu’il allait passer la porte de ce refuge et qu’il n’y aurait plus de retour en arrière. « Plutôt bien, ouais. Je vais sûrement reprendre le rugby bientôt. » Son instinct de grand frère lui amena une remarque sur le bout des lèvres. Un commentaire non pas déplacé, mais d’un homme qui avait toujours voulu protéger les siens. Quelque chose qu’il n’osait pas encore se permettre avec Louis, mais qui lui venait instinctivement malgré tout. « C’est génial ! » Au-delà des inquiétudes que cela avait réveillées chez lui, cela restait une bonne nouvelle, Louis allait de l’avant. « Tu as déjà trouvé une équipe ? » À une époque, il aurait voulu se joindre à l’expérience. Il aurait été le premier à proposer à Louis d’aller s’entraîner ensemble, mais aujourd'hui, il avait parfaitement conscience de son incapacité à faire une telle chose. Et cette simple pensée vint réveiller la douleur sournoise qui s’agitait au creux de sa cuisse. « Et toi ? » Il releva les yeux vers son ami, soudainement moins enclin à la conversation. « J’ai décidé d’adopter un chien sous les conseils insistants de ma psy. » Il eut un rire qui ne s’accordait en rien avec le ton de leur conversation. Il ne voulait pas parler de l’armée, mais il faut croire que tout le ramenait toujours à cela. Tel un raté qui avait consacré sa vie à sa carrière sans jamais rien construire à côté. « J’essaye de ne pas en faire toute une montagne, même si ça veut dire beaucoup. » Ça voulait dire ne plus accepter de mission, préparer sa vie à changer d’une manière ou d’une autre. « Une étape après l’autre, pas vrai ? » C’est ce que l’on s’efforçait de leur enseigner dans le groupe qui leur arrivait encore de fréquenter.

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« Tu as été très clair, c’est sûr. » Louis s’esclaffa d’un rire sincère, sans ressentir aucun regret. Accueillir Campo avait été l’une des meilleures décisions de sa vie - ce qui n’était pas réellement un exploit lorsqu’on faisait le ratio bonnes décisions vs. mauvaises décisions, mais quand même - alors il ne voyait aucune raison de ne pas inciter un ami à en faire de même. Campo lui-même semblait du même avis, si on en croyait ses jappements et les frétillements de sa queue. « J’ai bien compris, toi aussi, tu veux un copain. » Louis baissa un regard à la fois amusé et attendri vers son chien. Atlas n’avait pas tort, Campo était sociable et toujours partant pour jouer avec tous les copains à quatre pattes qu’il croisait - même quand ces derniers n’étaient pas des plus enthousiastes.

Décidé à laisser Atlas aller à son rythme, Louis suivit de bonne grâce son détour dans la conversation et l’informa de sa probable reprise prochaine du rugby. « C’est génial ! » Il sourit face à cette réaction enthousiaste, soulagée qu’elle ne soit pas teintée d’inquiétudes comme cela était parfois le cas. Il ne lui en aurait pas voulu ; il était après tout le mieux placé pour savoir les conséquences désastreuses qu’un choc à la tête pouvait causer, et ce n’était pas rare dans le rugby. Mais Louis était au courant des risques, tout comme il connaissait son sport sur le bout des doigts, et ce n’était pas une décision prise à la légère. « Tu as déjà trouvé une équipe ? » Il hocha la tête distraitement avant de répondre. « J’ai repéré un club amateur, il me reste plus qu’à avoir le courage d’appeler pour savoir si je peux faire un entraînement test. » À plusieurs reprises il avait tapé le numéro du club sur le clavier de son téléphone, avant de changer d’avis à la dernière minute. Il trouvait toujours de bonnes excuses : il n’avait pas le feu vert officiel de son médecin, ou bien il avait besoin de refaire un petit peu de musculation avant de se lancer, ou alors il n’était pas sûr que les horaires d'entraînement soient compatibles avec son emploi du temps au travail… Maintenant qu’il se trouvait face à Atlas, qui avait - il en avait parfaitement conscience - davantage de séquelles physiques que lui, il s’en voulait de laisser autant de faux prétextes l’empêcher de sauter le pas.

Dès l’instant où Louis lui retourna la question pour savoir comment il allait, il sentit Atlas se tendre imperceptiblement, apparemment toujours si peu enclin à parler de lui. « J’ai décidé d’adopter un chien sous les conseils insistants de ma psy. » Il joint son rire à celui de son ami, s’amusant de cet énième parallèle entre leurs deux parcours. « J’me demande si elles font toutes ça à un moment ou un autre d’un suivi. » C’était peu probable, les parcours de vie de leurs patients étaient tous différents, mais il était vrai que ceux d’Atlas et de Louis, depuis leurs accidents respectifs, se rejoignaient souvent. « J’essaye de ne pas en faire toute une montagne, même si ça veut dire beaucoup. » Cette remarque calma l’amusement de Louis, conscient que cette décision était loin d’être anodine pour Atlas qui, contrairement à lui, avait longtemps caressé l’espoir de reprendre sa carrière dans l’armée là où il l’avait laissée. N’ayant aucun souvenir des raisons de son engagement, le plus jeune avait rapidement balayé cette possibilité, mais il savait que les choses étaient différentes pour le capitaine du squadron 816. « Une étape après l’autre, pas vrai ? » Louis hocha la tête tout en appuyant ses mots. « Une étape après l’autre, c’est ça. » Il avait arrêté de compter le nombre de fois où il avait entendu cette phrase depuis son accident. Et elle avait beau le faire grincer des dents, parfois, il avait fini par réaliser qu’elle était effectivement un bon conseil dans leurs situations. « Tu veux rentrer ou tu préfères rester dehors encore un peu ? » Ça ne dérangeait pas Louis de rester à l’extérieur jusqu’à ce qu’Atlas se sente prêt à franchir la porte du refuge, mais il se permit tout de même de poser la question, se disant que c’était peut-être simplement la petite impulsion dont il avait besoin.

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@LOUIS DALTON & ATLAS

Il cherchait à gagner du temps. Cela pouvait s’avérer complètement idiot et surtout absolument pas nécessaire, mais Atlas avait ainsi l’impression d’avoir un total contrôle sur la situation. Il était venu jusqu’ici, il avait atteint le parking. Ce n’était pas grand-chose, mais c’était une étape. Il avait besoin d’une minute, pour accepter et se faire à l’idée. Louis avait l’air de comprendre. Il n’avait pas besoin de lui exposer toute la situation, tout se voulait assez clair. Il était au courant de tout ce qu’Atlas cherchait à fuir, de tout ce qu’il avait besoin d’assimiler avant d’avancer. Les longs discours n’avaient rien de nécessaire. « J’ai repéré un club amateur, il me reste plus qu’à avoir le courage d’appeler pour savoir si je peux faire un entraînement test. » Beaucoup auraient trouvé cela idiot qu’un adulte ne trouve pas le courage de se jeter dans le vide. Atlas n’allait pas juger la manière dont Louis cherchait à gérer les choses, bien au contraire. Il avait déjà trouvé ce qui serait sa prochaine étape. Lui aussi avait tout simplement besoin d’une minute pour rendre tout cela concret. Et peut-être d’un camarade pour tenter cette étape de plus. « Est-ce que tu veux qu’on aille voir l’un de leur match ? » Ce n’était rien d’obligatoire, rien qui n’allait engager Louis dans quoi que ce soit, si ce n’est le plaisir de voir en vrai ce qu’il pourrait rejoindre. Comme le regard d’Atlas ne cessait de se diriger vers les chiens qui couraient au loin dans le parc fermé du refuge.

Et bien sûr, la conversation ne pouvait rester aussi naturelle si Louis ne s’intéressait pas un peu plus à ce qui les avait amenés dans ce parking. Ce n’est pas qu’Atlas fuyait la question, mais il n’aimait pas parler de lui. Il ne voulait pas entrer dans les détails qui l’amenait à hésiter d’un rien. Mais Louis allait comprendre, pas vrai ? « J’me demande si elles font toutes ça à un moment ou un autre d’un suivi. » Il ne put retenir un léger rire amusé. « Tu crois qu’ils ont un partenariat avec les refuges du coin ? » Est-ce que cela pouvait même être quelque chose de réel ? « Genre une compet et celui qui a fait le plus adopter à la fin de l’année gagne… Le droit d’être connu ? » Il aurait pu parler d’une médaille, mais cela aurait été l’hôpital qui se fout de la charité quand il n’avait fait cela que toute sa vie, courir après des médailles. Qui ne lui servait désormais plus à rien. « Une étape après l’autre, c’est ça. » S’ils se le répétaient assez souvent, le mantra allait finir par fonctionner. « J’ai pas encore tout lâché. » Le poste administratif qu’on lui avait filé par pitié continuait à occuper certaines de ses journées. Tant qu’il se tenait loin d’une piste d’atterrissage, rien de grave ne pouvait arriver. Il s’accrochait encore et toujours, à des espoirs qui n’avaient plus lieu d’être. Cela se voulait pathétique, mais il n’était pas nécessaire de le souligner.

« Tu veux rentrer ou tu préfères rester dehors encore un peu ? » C’est comme s’il lisait dans ses pensées. Ou bien que l’élève avait fini par dépasser le maître ou toutes les conneries du genre et plus encore. « Je t’ai pas fait venir ici pour traîner sur le parking, promis. » Il avait juste besoin de l’impulsion que lui soufflait Louis. C’est bien pour cela qu’il s’était refusé de faire cette visite tout seul. « Aller, viens, on va voir si je me trouve un pote à quatre pattes. » Une inspiration, juste une, et il se leva du capot de sa voiture pour mieux pénétrer dans le refuge.

Une jeune femme les accueillit avec le sourire, elle leur expliqua quelques règles à suivre, demandant à Louis de tenir son chien en laisse, avant de les autoriser à aller voir les différents chenils. Les premiers étaient emplis de chiens à l’énergie débordante et qui effrayait un peu Atlas. Il se sentait plus vieux que jamais face à une telle énergie, il avait besoin d’un chien plus calme. Et à force de remonter les allées, son regard se posa sur une cage en particulier. À l’intérieur se trouvait un berger allemand, la pancarte sur le côté indiquait qu’il ne devait pas avoir plus d’un an et avait un peu peur de l’homme. Mais Atlas ne pouvait décoller son regard. « Et celui-là ? » Louis lui avait pointé tout un tas de chiens du doigt, mais le militaire se trouvait attirer par le petit chien qui se terrait dans un coin sans jamais le lâcher du regard. « Tu crois que je peux m’asseoir devant, pour qu’il ait moins peur ? » Il n’allait plus être capable de se relever s’il s’asseyait par terre, mais il était prêt à tenter le coup.

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Si Atlas était l’une des personnes avec qui il était le plus facile de parler des conséquences de son accident, il était également l’un de ceux auprès de qui il était le plus facile de ne pas tout dire, justement. Parce qu’il savait et qu’il comprenait ce qu’il vivait sans que Louis ait besoin de dire à voix haute ce qu’il ressentait. Il espérait que l’inverse était vrai et ne chercha pas à creuser la vraie raison de leur présence ici tant qu’Atlas ne se sentirait pas prêt. Alors leur discussion dévia naturellement vers le rugby et les hésitations de Louis à reprendre une licence dans un club après des années d’arrêt. « Est-ce que tu veux qu’on aille voir l’un de leur match ? » Le sourire qui étira alors les lèvres de Louis avait la saveur de l’entrain d’un enfant de huit ans qui apprend que le père Noël lui a déposé sous le sapin le cadeau de ses rêves. « Carrément, ouais ! » La perspective d’assister à un match de rugby ravissait toujours le jeune homme, quelles que soient les circonstances, mais le faire en envisageant d’intégrer ensuite l’équipe qui évoluait sur le terrain était encore plus enthousiasmant à ses yeux. « Tu t’y connais un peu en rugby ? » À première vue, Atlas n’avait pas vraiment le physique typique d’un rugbyman, mais Louis savait que ça n’était pas toujours incompatible - lui-même en était la preuve.

S’il n’y prenait pas garde, Louis était capable de parler de rugby pendant des heures, sans réaliser que le sujet ne passionnait pas autant son interlocuteur. Aujourd’hui il avait toutefois conscience qu’il était là pour soutenir Atlas, pas pour l’ennuyer avec ses histoires de renvoi aux 22 mètres et de défense inversée. « Tu crois qu’ils ont un partenariat avec les refuges du coin ? » Louis laissa échapper un rire, heureux de voir Atlas saisir la perche qu’il lui avait lancée et s’amuser d’un sujet qui était pourtant initialement douloureux pour tous les deux. « Genre une compet et celui qui a fait le plus adopter à la fin de l’année gagne… Le droit d’être connu ? » « Si c’est pas déjà le cas, ils devraient y réfléchir en tout cas. » Il avait conscience qu’adopter un animal n’était pas une solution miracle, et qu’elle ne convenait sans doute pas à tous les patients suivis par des psys, mais elle se révélait pertinente pour tous les deux apparemment, alors pourquoi s’en priver ?

« J’ai pas encore tout lâché. » Louis hocha la tête, attendant qu’Atlas poursuive, mais ce dernier resta silencieux. « Et ça te convient ? De garder un pied dedans ? » Si leurs parcours présentaient des similitudes, ils étaient aussi différents par bien des aspects, en commençant par leur rapport actuel à l’armée. Si Louis n’avait jamais ressenti, depuis son réveil, le besoin de réintégrer ses rangs - son amnésie lui ayant aussi fait oublier les raisons qui l’avaient un jour poussé à s’engager - il n’en était pas de même pour Atlas. « Je sais que ça a rien de comparable, mais… » Il se retint de poursuivre par un si c’est mieux que rien, pas sûr que ce soit la meilleure chose à dire ; alors il laissa sa phrase en suspens, espérant qu’Atlas comprenne ce qu’il voulait dire.

Sentant que le moment était venu - et Campo commençant à montrer son impatience - Louis lança ensuite une perche à son ami, pour savoir s’il était prêt à franchir le pas. « Je t’ai pas fait venir ici pour traîner sur le parking, promis. » Il haussa les épaules d’un air faussement nonchalant. « C’est un super parking, pourtant. » Evidemment qu’ils n’étaient pas là pour traîner indéfiniment sur le parking, mais Louis ne voulait pas empêcher Atlas d’avancer à son rythme. Alors s’il devaient patienter encore de longues minutes sur ce parking, il le ferait sans se plaindre. Finalement, l’autre homme donna son feu vert pour entrer dans le refuge. « Aller, viens, on va voir si je me trouve un pote à quatre pattes. » Louis hocha la tête, sourire aux lèvres, puis attacha la laisse de Campo, pour ne prendre aucun risque.

Une fois entrés, Louis eut l’impression d’être de retour quelques mois en arrière, lorsqu’il s’était retrouvé dans la même situation qu’Atlas. En regardant Campo trottiner gaiement à ses côtés, il ne put s’empêcher de se dire qu’il avait pris ce jour-là l’une des meilleures décisions de sa vie, et il espérait que son ami allait pouvoir expérimenter la même chose très bientôt. Il le laissa déambuler à sa guise au milieu des cages, pointant parfois du doigt un chien qu’il trouvait amusant ou mignon, sans qu’aucun ne retienne particulièrement son attention. Il était en train de regarder du côté des chiens plus âgés, Campo ne le quittant pas d’une semelle, lorsque la voix d’Atlas attira son attention. « Et celui-là ? » Au départ, lorsqu’il regarda la cage devant laquelle l’autre homme se trouvait, il ne vit rien, jusqu’à ce qu’il remarque un petit chien qui se terrait dans un coin. Louis se rapprocha doucement, comme pour ne pas l’effrayer davantage. « Tu crois que je peux m’asseoir devant, pour qu’il ait moins peur ? » Il pouvait se tromper, mais il crut voir une petite étincelle s’allumer dans le regard de l’autre homme. Il ne fit toutefois aucune remarque, craignant de le brusquer et préférant lui laisser le temps de se faire à l’idée. « Oui, tente, c’est une bonne idée. » Louis savait qu’il fallait parfois du temps pour s’apprivoiser. « On va aller dehors avec Campo, pour ne pas lui faire peur. » Son chien n’était pas méchant, mais son enthousiasme débordant pouvait parfois effrayer les plus timides. Louis et Campo se dirigèrent donc vers l’arrière, là où les chiens pouvaient profiter de l’extérieur plus librement, et même si Louis gardait sa laisse fermement en main, son compagnon trouva quelques amis à poils avec qui s’amuser, en attendant de savoir si Atlas allait sauter le pas ou non.

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@LOUIS DALTON & ATLAS

Il n’était pas nécessaire de se lancer dans des grands discours. Atlas n’avait aucunement envie de lui tirer les vers du nez ou de lui faire subir un interrogatoire. Ce n’était pas nécessaire, ils pouvaient se comprendre sans et tout ce qu’Atlas pouvait voir, c’est que Louis avait peut-être besoin d’un léger coup de main pour se lancer. « Carrément, ouais ! » Et si, la simple idée d’aller voir un match pouvait tirer un tel sourire sur ses traits, Atlas était prêt à retenter l’expérience. Ce n’était rien de très sorcier, après tout, quelques bières et un match en direct, il avait connu pire. « Tu t’y connais un peu en rugby ? » Il haussa les épaules. « Je suis pas un pro, mais mon père m’a refilé la passion. » On manquait rarement la diffusion d’un match chez les Siede et même si sa carrière avait rendu le suivi un peu plus sporadique, Atlas avait toujours gardé un œil sur les résultats de l’équipe nationale. « Ça fait bien longtemps que je suis pas allé voir un match en vrai. » Il en avait même oublié l’ambiance qui pouvait régner dans un stade, mais c’était toujours plus intéressant après tout, pas vrai ? « Mais ça serait un plaisir de t’accompagner. » Après tout, ce serait pour voir un groupe d'amateurs, mais ce serait toujours un moment fun.

Il avait remarqué à quel point Louis pouvait être passionné par la conversation autour de son sport favori et il aurait presque pu s’en servir pour détourner l’attention, mais ils n’étaient pas sur ce parking pour discuter de rugby. Il reculait pourtant l’instant où il franchissait les portes du refuge. « Et ça te convient ? De garder un pied dedans ? » Est-ce qu’il était si facile de deviner ses pensées ? « Pas vraiment. » Il détestait se sentir mis de côté, il ne supportait plus de réaliser à chaque nouvelle journée qu’il ne serait plus jamais l’homme qu’il avait pu être sur le terrain. Tout se voulait complexe, dur à digérer et si difficile à accepter, surtout. « Je sais que ça a rien de comparable, mais… » Il eut un rire nerveux, sachant parfaitement ce que le silence de Louis cachait. « C’est toujours mieux que rien. » C’est mieux que de dire qu’il devait tirer un trait sur vingt ans de carrière. C’était mieux que de redevenir un simple civil, incapable de savoir ce qu’il ferait pour le reste de sa vie.

Et si la conversation aurait pu durer durant une bonne heure encore, Atlas finit par trouver le courage pour se lancer. Il se devait d’arrêter de réfléchir et de se jeter dans le bain. Ce n’était rien de grave après tout, juste un simple tour dans un refuge. Et si ses premiers pas furent un peu timides, Atlas finit par prendre le temps de regarder dans chacun des enclos. Son regard finissant par se perdre sur un jeune berger allemand visiblement peu rassuré par son environnement. De tous les chiens, il était le seul à réellement avoir retenu son attention. Comme si Atlas se retrouvait hypnotisé par l’animal. « Oui, tente, c’est une bonne idée. » Il releva la tête pour croiser le regard rassurant de Louis. « On va aller dehors avec Campo, pour ne pas lui faire peur. » Il lui adressa un sourire. « Merci. Je te rejoins après. » Et sans un mot de plus, Atlas entrepris de s’asseoir à même le sol, sans le moindre mouvement brusque.

Il fallut du temps, de très longues minutes, avant que l’animal ne s’approche de la grille. Plusieurs encore avant qu’Atlas n’ose tendre la main dans sa direction, mais lorsque le chien vint lui lécher le bout des doigts, il eut le sourire d’un enfant fier de son exploit. « T’es sympa, toi. » La responsable du chenil, lui autorisa à entrer dans l’enclos pour s’asseoir un peu plus près. Le chien ne semblait plus aussi peureux, bien au contraire. Il paraissait rassuré et curieux de cet homme qui voulait le rencontrer. Atlas prit le temps d’échanger avec la demoiselle qui semblait s’être occupée du chiot depuis son arrivée au refuge. Il avait six mois, ou un peu plus. Il a été retrouvé attaché à un arbre sur le bord d’une route. Un abandon somme toute classique, mais qui vint tirer sur le cœur d’Atlas. « Je peux l’amener dehors ? » Il voulait voir comment le chien pouvait réagir auprès de Campo et dans un environnement autre qu’une cage. La jeune femme sembla lui faire confiance, lui donnant une longe et l’autorisation de se balader dans le parc fermé. Il lui fallut un instant pour se relever et immédiatement, le chien vint poser sa truffe contre sa cuisse. « Je suis pas très rapide parfois. » Le regard qu’il échangea avec l’animal parut le convaincre un peu plus. Pas de jugement, simplement de la compréhension et un droit mutuel à se donner du temps.

Quelques minutes plus tard, Atlas se retrouva dehors, les doigts enroulés autour de la longe, le chien trottant à ses côtés. Campo fut le premier à dresser les oreilles avant que Louis ne se retourne vers eux. « Je crois qu’on s’entend bien. » Il avait le sourire, il se sentait un peu moins crispé. « On m’a dit que je pouvais le balader tant qu’on restait dans le parc fermé, vous venez avec nous ? » Il regarda avec attention le jeune chien qui s’approchait très lentement d’un Campo passablement excité. « Tu l’as fait dresser Campo ? » Il se souvenait désormais que le chien de Louis se voulait obéissant et connaissait quelques mots de rappel. « Je sais pas vraiment dans quoi je m’engage là. » Et peut-être que cela l’inquiétait un peu, au final.

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