Elle pouvait dire ce qu’elle voulait pour faire baisser le taux de stress, mais Elena n'était plus habituée aux dates, les ayant résolument délaissés pour des coups d'un soir dûment présentés comme tels et jamais ouverts à davantage : si elle n'avait pas fait son profil Tinder en ce sens, les premiers messages donnaient rapidement le ton. Ce n'était pas faute de vouloir s'ouvrir à autre chose, pourtant, mais il fallait croire qu’Elena en était parfaitement infoutue. Trop coincée dans ses appréhensions, peut-être. Un putain de divorce avant même d'avoir franchi l’aune de la trentaine, il fallait quand même le faire.
C'était peut-être en partie la raison pour laquelle elle s'était foutue sur cette application : moins d’attentes, et moins la possibilité d'orienter le match directement sur une partie de jambes en l'air (à moins qu’elle n'ait loupé l’option Quokka à cet effet) ; c'était davantage fait pour viser les rencontres en ville et favoriser le développement de petites initiatives locales. Swiper sur des profils intéressés par l’amour lui avait semblé un engagement trop fort : elle s’était mise sur ouverte à tout en se promettant de n'avoir aucune perspective limitée au sexe, cette fois, et advienne que pourra.
Le fait qu'on lui foute un pénis directement sous le nez n'était donc absolument pas de son fait. D'ailleurs, elle n'était pas sûre de lui rendre justice, ni en le fixant probablement tout le long de l'atelier avec un air circonspect, ni en essayant de le dessiner avec des mains qui n'avaient plus touché un pinceau depuis les toutes premières années d’école. Mais Lara avait eu l'air assez emballée par l'activité, et Elena, quant à elle, était suffisamment emballée par Lara pour décider que l'activité vaudrait sûrement le coup.
Elle s’était rendue au bar à l’heure convenue, avec une tenue soigneusement choisie, ce qui lui semblait foutrement incongru puisqu'elles allaient peindre un (ou une !) inconnu tout nu pendant une heure. Elle avait rapidement repéré Lara (pas très difficile, à sa charge, après avoir regardé sa photo une bonne quinzaine de fois) et lui avait adressé un signe de la main, sourire en coin caractéristique bien en place. « Lara ? » qu’elle avait complété, pour faire bonne mesure, petit signe de la main en prime. Elle se redresse à peine de son perchoir à l’entrée du bar qu’elle note les quasi 30cm qui les séparent – ce qui ne vaut pas grand-chose, comparé au fait que le date en question est bien plus jolie que sur sa photo. Le stress fait son grand retour, mais il n’aura pas le temps de faire trop de ravages avant le début de l’atelier. « Je t’offre un verre avant que ça commence ? »

@Lara Pearson

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{might as well be over the moon}
crédit/(ssoveiagifs) ✰ w/@Elena Esteves

"Ugh, je n'ai rien à me mettre..." Tu l'as dit, tu l'as pensé, tu t'es détesté de l'avoir pensé, surtout qu'en sachant que ce n'est pas la vérité. Pas avec un placard aussi fourni que le tien, pas avec la vitesse avec laquelle tu fais chauffer ta carte de crédit. La réalité est que tu es stressée. Un peu nerveuse, tu te demandes pourquoi tu t'es inscrite sur un site de rencontres et pourquoi tu as accepté ce rendez-vous. Tu es rouillée dans le domaine, plus que rouillée. Comme tu l'as dit à Elena par message, tu n'as aucune expérience. Et, la seule chose qui t'a convaincu de continuer la conversation avec elle : tu n'as rien à perdre. C'est ce que tu te dis en faisant face à ton propre reflet, avant de prendre une profonde inspiration et de choisir une tenue. Ce sera rose, cela reste ta couleur préférée et ce qui te définit le mieux, et au moins, tu sauras directement si le courant passe entre Elena et toi. Tu optes pour un maquillage léger et tes boucles brunes sont rangées dans une queue de cheval un peu bancale, mais tant pis, tu pars avant de le regretter. Tu connais le bar et quand tu passes le seuil, tu le cherches aussitôt. Pas de talons aiguilles aujourd'hui, tu as opté pour des plateformes, pour une fois, te disant que ce serait le mieux pour votre date. On te fait un signe de la main, au moins, la photo ne mentait pas et tu te diriges vers la brune, en face d'elle la seconde suivante.
"Oui, c'est moi..." Un sourire sur le visage, en train de faire quelque chose qui te terrifie, mais tu es bien là."Et tu es Elena ?" Pas une question, c'est une confirmation que tu fais et tu investis le siège juste à côté du sien. Pour mieux l'observer, elle et ses traits fins. Oui, elle est jolie, c'est superficiel à souhait de dire cela, mais ça compte aussi... tu le sais. "Si c'est un verre d'alcool, je vais dire non. Un moyen rapide de m'amadouer, c'est le sucre et… encore le sucre. Ouais, je t'aide en plus de tout." Tu as un léger rire à la fin de ta phrase, mais c'est bien pour cela que vous êtes là, non ? Pour apprendre à vous connaitre, pour être plus que de simples étrangères et voir si vous pouvez... faire quelque chose ensemble ? Tu ne sais pas, c'est un concept qui t'a toujours paru étrange, Elena doit en savoir plus, après tout, elle a été mariée."Ou alors, je devrais dire oui à l'alcool vu le cours qu'on va rejoindre." Tu l'ajoutes avant de laisser à l'autre brune le temps de répondre."Désolée, je parle un peu trop quand je suis nerveuse."

« Elle-même », qu’elle répond, avec un sourire qui fait miroir à celui de Lara : un peu timide, avec une bonne dose d’awkwardness dont elle ne sait pas trop quoi faire et une sincérité à égale mesure. Des dates, elle en a eu quelques uns, au cours des mois passés, et ça a été tantôt oubliable, tantôt franchement désagréable, ni plus ni moins : retourner dans l’univers du dating après près de dix ans de relation, c'était aussi composer avec un âge bien différent de celui de l'époque, et par conséquent des attentes qu’elle n'avait pas tellement remises en question ni formulées concrètement par absence de besoin. Cette période avait aussi coïncidé avec des doutes autour de sa sexualité : ses rencards avaient donc été principalement avec la gent masculine, et ça avait fini d’achever l'idée qu’elle pouvait s’être trompée sur l'orientation qu’elle avait adopté comme sienne à ses quatorze ans. L’expérience au total avait été principalement déplaisante, quoique parfois intrigante de manières qu’elle avait poussé jusqu'au bout, pour la curiosité, jusqu'à ce que ça devienne aussi (sans trop de surprise) déplaisant que les autres. Lara était la première femme après une longue liste de déceptions, et tandis qu’Elena n'avait pas d’attentes particulières pour ce rencard, elle était déjà bien plus emballée au premier contact.
« Pas d’alcool, alors, noté », opine-t-elle, décidant d’avance de rester sur les softs elle aussi. Elle rit franchement face au volte-face de Lara, considérant le fait qu’elles vont peindre quelqu'un de tout nu en étant parfaitement sobres : « Ça peut être à double tranchant : soit ça anesthésie la douleur d'être aussi nulles, soit ça empire la nullité. À toi de voir, mais je dirais qu'on doit à la pauvre personne nue d’essayer de lui rendre justice au mieux… » Elle ne se départit pas de son sourire taquin, fidèle à elle-même jusque dans son anxiété suffisamment avancée pour qu’elle sente ses mains trembler, si elle n’y prend pas gare : elle espère que parler tout autant déstressera Lara, et contribuera à la déstresser elle-même. Jusque-là, peu de résultats : Lara a des fossettes près des yeux, quand elle sourit, et ça a le don de la déconcentrer un peu plus. « Quel genre de trucs sucrés ? Chocolat chaud, tout ça ? Sinon, ils ont des cheesecakes, je crois. Je paie la première tournée. » Peut-être de quoi faire subtilement comprendre qu’elle est contente d'être là. À moins qu’elles n’en aient pas le temps avant que l’atelier démarre : déjà, elles sont appelées dans la salle derrière le bar, certainement attendues par des toiles et une personne toute nue. Peut-être que Lara avait raison : l’alcool, ça aurait pas été de trop.

@Lara Pearson

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crédit/(ssoveiagifs) ✰ w/@Elena Esteves

Ce n'est pas aussi bizarre que ce que tu imaginais et au moins la discussion n'est pas à sens unique. Cela, ç'aurait été le pire. Si tu adores t'écouter parler et que tu es capable de remplir des minutes et des minutes de conversation, ce n'est pas vraiment idéal. Et ce n'est pas le but d'un... rendez-vous. Non, le but d'un rendez-vous, c'est d'apprendre à connaitre et peut-être apprécier la personne en face de soit. Donc ça ne peut pas vraiment marcher si le dialogue est à sens unique. Elena t'arrache au moins un rire, et tu hausses les épaules."Oh je vois, ce n'est pas une si mauvaise idée que ça en réalité mais Elena..." L'alcool, comme tu le lui as dit et même confirmé là tout de suite, tu n'es pas une fan. Tu commences à t'y faire depuis que tu bosses à Paradise City et que tu améliores tes compétences de barmaid. Vu que tu peux tout doser, tu es connue pour faire des cocktails colorés et sucrés, qui masquent bien le goût de l'alcool. Ce qui est très bien quand on veut pousser les gens à la dépense, comme vous essayez souvent de le faire à Paradise City.
"C'est sûrement le moment où je te dis que j'ai une très haute estime de moi-même, donc bon, je peux bien me permettre de vivre avec une humiliation ou deux.... je m'en sors plutôt bien en fait." Tu prends une profonde inspiration en disant cela, tu te tiens un peu plus droite, sûrement pour appuyer ton propos. Tant pis si Elena te voit comme un peu arrogante. Tu supposes que... par bien des aspects, tu l'es complètement arrogante. Tu ne vois pas cela comme un défaut personnellement, ça t'a permis de te tenir sur tes deux pieds par le passé et de réaliser tes rêves. Tous tes rêves. Donc est-ce vraiment une si mauvaise chose que cela ? Non, du tout selon toi."On peut garder le cheesecake pour plus tard tu sais, tu m'as déjà convaincue." Et il en faut peu pour te convaincre, surtout quand il s'agit de sucre, mais Elena remarque bien avant toi que le cours va commencer et tu hoches la tête, toujours avec le sourire aux lèvres. "C'est parti." Tu suis le mouvement vers la salle en question, vous n'êtes pas les seules à participer, et dans un sens, ça te rassure, tout le monde ne peut pas être un artiste talentueux et confirmé dans Brisbane, pas vrai ? Tu en es sûre et certaine. Tu es la première à faire face au modèle au centre de la pièce, il porte encore un peignoir alors que l'enseignante, une femme, vous dit de vous installer et de vous mettre à l'aise. "Évidemment, c'est un homme." Cela, tu le marmonnes à l'attention d'Elena, avec un regard comme si vous étiez en train d'échanger une blague de longue date. Ce n'est pas trop le cas mais tu fais un autre signe de la tête la seconde suivante. "Il y a deux places là-bas à l'écart, je pense que c'est parfait pour nous, non ?" Ta décision est déjà prise dans un sens, alors que tu bouges, vers les places en question.