Trimballé d’une chambre d’hôtel à une autre, voyageant sans cesse d’un pays à ses voisins, Izan trompe l’ennui de sa douloureuse solitude par les représentations qu’il enchaîne en jouissant du caractère tout à fait prodigieux qu’on lui accorde depuis son enfance, bien qu’il n’ait plus vraiment l’âge d’être considéré de la sorte. Son premier album en solo, Memory, est un succès qu’il n’a partagé qu’avec ses amis les plus proches, puisque sa famille refuse toujours de lui adresser la parole, sinon pour lui formuler des reproches et des insultes qu’il n’a plus la force d’encaisser. Mais même les éloges qu’on lui distille à longueur de journée, surtout après que son album solo se soit classé numéro un au classement classique du Billboard, ont un goût amer sur sa langue, mais il tâche de les accueillir avec le sourire diplomatique nécessaire à la poursuite de sa carrière, considérant que c’est la seule chose qu’il lui reste. Ce soir encore, ayant quitté Berlin pour Londres, c’est en abordant un rictus qui sert de façade qu’il écume les conversations après sa représentation au gala donné par les Sighbury, et les plus connaisseurs ne tardent pas à le féliciter pour avoir exécuté avec brio l’une des compositions les plus difficiles de Mili Balakirev, grandement réputé pour la complexité de ses partitions. ’’Excusez-moi…’’ hochant mollement son menton de haut en bas, il décline poliment la compagnie de ses interlocuteurs et interlocutrices en brandissant le fameux sourire de façade qui lui permet de se soustraire de la morne discussion pour filer vers le bar, nourrissant le projet d’obtenir un verre suffisamment corsé pour recharger sa batterie sociale qui semble s’être épuisée au cours de la soirée, quand bien même a-t-il pu se perdre sur le clavier de son instrument. Mais, parfois, même le piano n’est pas suffisant à lui faire oublier l’ombre des tourments qui marchent dans ses pas, et c’est avec un soupir empli de nervosité qu’il prend place sur l’un des hauts tabourets qui borde le comptoir, sans presser le serveur qui est affairé à essuyer quelques verres avec un torchon propre. Tordant sa nuque endolorie à gauche et à droite, le pianiste fait glisser ses mains sur la surface froide devant lui, faisant pianoter ses doigts d’une manière tout à fait inconsciente avant de tourner son menton pour découvrir le visage d’une petite blonde qui paraît patienter, elle aussi, après le barman qui ne daigne même pas tourner le regard vers eux pour l’instant. ’’J’crois qu’il va falloir qu’on se serve nous-mêmes…’’ qu’il entame avec un petit sourire malicieux sans la regarder, ne mettant point de sérieux dans cette proposition impatiente puisqu’il n’intime aucun geste pour la réaliser. Le barman partant de l’autre côté du comptoir — décidément, ils ont la poisse — l’hispanique souffle finalement d’agacement en aplatissant ses paumes sur le comptoir avant d’en relever une pour la passer sur sa nuque, ses doigts effleurant la racine de ses cheveux sombres pendant qu’il se formule l’idée qu’il aimerait que sa meilleure amie soit présente avec lui, ce soir, puisque même entouré par des centaines de personnes, il se sent bien seul, Izan. ’’Est-ce que c’est malpoli de l’interpeller ?’’ est-ce que ça se voit qu’il n’a pas du tout l’habitude de ces soirées, du coup ?

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Comme à son habitude, elle avait tenté de négocier. Comme à son habitude, elle avait utilisé tous les arguments du monde pour y échapper. Comme à son habitude, elle s’était résignée et avait arboré son plus beau faux sourire de circonstance. Ses parents gagnaient toujours et l’idée de passer quelques heures à dissimuler ses bâillements derrière sa main était toujours moins effrayante que celle de batailler avec eux. Leurs arguments étaient pourtant loin d’être aussi solides que ceux de leur fille : l’événement était majeur pour la promotion de la collection qu’ils avaient présentée lors d’un défilé quelques jours auparavant et ils avaient, pour l’occasion, fait venir un pianiste reconnu. Mais qu’est-ce qu’elle pouvait bien en avoir à faire, de ce pianiste ? Greta était plutôt du genre groupes indépendants que musique classique et la façon dont elle avait levé les yeux au ciel avait marqué la fin de la discussion mais pas de sa mauvaise foi. Sur place, pourtant, le musicien était effectivement assez doué pour bénéficier de toute son attention et la toute nouvelle écrivaine s’était glissée jusqu’au bar en même temps que lui, parce qu’il était malheureusement la seule personne de son âge avec laquelle elle avait envie de discuter. Ses groupies, elles, pouvaient aller se faire voir. ’’J’crois qu’il va falloir qu’on se serve nous-mêmes…’’ Ce n’était que quelques mots qui mis bout à bout venaient formuler une sorte de plaisanterie mais c’était déjà plus que ce dont la curiosité de Greta avait besoin pour prendre les devants. Ils étaient rares, ceux qui se hasardaient à la moindre remarque dans ce genre d’endroit et le simple fait qu’il le fasse lui laissait penser que, peut-être, il serait le candidat idéal pour la sortir de son ennui. La cadette Sighbury n’avait pas répondu, se contentant d’étirer ses lèvres en un sourire en le laissant s’agacer devant un barman qui avait pour indication de ne jamais laisser patienter les personnes importantes, au détriment des autres. ’’Est-ce que c’est malpoli de l’interpeller ?’’ « Essaie et tu verras. » avait-elle lancé en haussant les épaules et en lui accordant un regard malicieux avant de se racler la gorge pour attirer l’attention de celui qui n’en accordait aucune au pianiste. En un instant, une coupe de champagne lui avait été servie et elle avait désigné le pianiste pour que l’on prenne enfin sa commande. « Je te donne le secret, il suffit d’être suffisamment important ou à défaut d’être accompagné de la bonne personne. Greta. La fille des Sighbury. » Il y avait fort à parier que la pause à laquelle il avait eu le droit au milieu du gala coïncidait avec le moment du discours des créateurs et qu’il n’était pas encore au fait de la personne avec qui il avait engagé la conversation. Et c’était amusant pour elle, de prétendre qu’elle possédait toute l’arrogance que son nom de famille laissait supposer, et c’était le jeu auquel elle avait décidé de jouer ce soir parce qu’elle se sentait incroyablement seule sans Arthur à ses côtés. Leurs verres en main, ils s’étaient éloignés et plutôt que de laisser s’échapper son unique chance de se divertir, la blonde avait repris. « Pratiquement sûre d’avoir vu deux filles s’entraîner à prononcer le nom du compositeur auquel tu faisais honneur avant de venir t’aborder. » Pathétique, si on lui demandait, mais avoir été témoin d’un tel spectacle avait laissé Greta rieuse. Après tout, elle cherchait la moindre distraction au milieu de cette foule qui ne la connaissait que parce que ses parents insistaient à la présenter comme un diamant brut aux côtés de son frère. « Tu passes un bon moment ? Et sois honnête, je suis la première à me plaindre de ce genre d’événements où on me traîne de force. » En un instant, elle avait choisi de laisser tomber son masque en lui accordant même un sourire sincère pour ne laisser aucune place au doute. Mais s'il avait un minimum d'instinct de survie au milieu des requins, il serait assez intelligent pour mentir.

Il ne s’attendait pas véritablement à une réponse, Izan, mais celle que lui livre l’inconnue  est suffisante pour faire naître un sourire malicieux sur ses lèvres, puisque le « Essaie et tu verras. » résonne comme un air de défi propre aux enfants qui n’ont pas peur de subir les représailles des adultes. Mais la blonde ne lui laisse pas le temps de démontrer toute l’espièglerie et l’audace dont il sait faire preuve, le gamin turbulent devenu adulte insolent, puisqu’elle s’empare du sujet avec une aisance naturelle et autoritaire, qui oblige le barman à venir en sa direction pour lui concéder une coupe de champagne, sans même qu’elle ait besoin d’attendre après son regard. La démonstration le laisse à la fois admiratif et interloqué, et le pianiste finit par battre des cils en échappant un petit rire silencieux, détournant le regard pour observer ses mains posées l’une à côté de l’autre sur le comptoir, en se faisant la réflexion que son interlocutrice doit être quelqu’un d’important - la fille de, qu’il pressent. Elle a l’air, en tous cas, de connaître les codes de ces soirées mondaines sur le bout des doigts, et être suffisamment intelligente pour déambuler en ces murs comme une reine traversant son royaume ; mais peut-être que le cage dorée n’est rien de plus que ce qu’elle est : une cage. ’’Même chose, s’il vous plaît.’’ qu’il adresse à l’attention du serveur, avant de se retourner vers la blonde lorsqu’elle reprend la parole, en haussant progressivement ses sourcils pour lui signifier sa posture d’écoute. « Je te donne le secret, il suffit d’être suffisamment important ou à défaut d’être accompagné de la bonne personne. Greta. La fille des Sighbury. » bingo qu’il pense en hochant calmement son menton de haut en bas, avant de redresser ses épaules pour attraper la coupe qu’on lui tend, et qu’il incline brièvement vers elle. ’’Merci pour la leçon, Greta.’’ apportant sa boisson à ses lèvres pour en aspirer une fine gorgée, il s’apprête à s’éloigner pour rejoindre les membres de son équipe mais, il est une nouvelle fois retenu par les paroles qu’elle lui adresse, et qui le font pivoter sur ses pieds pour pouvoir la regarder. « Pratiquement sûre d’avoir vu deux filles s’entraîner à prononcer le nom du compositeur auquel tu faisais honneur avant de venir t’aborder. » - ’’Vraiment ?’’ qu’il rétorque en fronçant ses sourcils, ses longs cils papillonnant pendant quelques secondes avant qu’il ne déclare, presque méprisant envers les deux demoiselles citées ’’Ce n’est pourtant pas si compliqué… Faudrait peut-être faire appel à un orthophoniste.’’ izan-les-bons-tuyaux, toujours là pour distiller des conseils même quand on ne lui en demande pas. Balayant machinalement l’assemblée du regard, comme s’il cherchait les deux filles à travers la foule, il boit une seconde gorgée de sa coupe avant de faire un pas pour revenir auprès de Greta, intriguée de son attitude qui n’est pas franchement calquée sur ses parents. « Tu passes un bon moment ? Et sois honnête, je suis la première à me plaindre de ce genre d’événements où on me traîne de force. » il n’a guère besoin d’un temps de réflexion pour lui répondre, mais c’est en la regardant par-dessus son verre qu’il fait entendre, tout d’abord : ’’J’ai du mal à croire qu’on puisse te forcer à faire quoique ce soit.’’ dans ses mots, résonnent le sourire mutin qui orne ses lèvres, et c’est en abandonnant sa coupe sur le comptoir qu’il reprend un air plus sérieux, sachant pertinemment qu’il n’a pas vraiment la possibilité d’exprimer ce qu’il pense, quand bien même vient-elle de dire tout haut ce qu’il est obligé de taire ’’Il y a pire comme soirée.’’ l’art et la manière de rester diplomatique : il a l’habitude, le pianiste mondialement (re)connu ’’Qu’est-ce qui te déplait autant ?’’ les choix sont multiples, mais il est curieux d’entendre la réponse qu’elle va lui donner, la fille de.

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Le bar devenait rapidement le refuge de tous ceux qui ne trouvaient aucun autre intérêt que la gratuité des boissons et de la nourriture à l’événement. Greta ne faisais pas partie des pique-assiettes mais demeurait évidemment en première ligne, habituée à ce que le champagne devienne sa seule échappatoire. ’’Même chose, s’il vous plaît.’’ Et lui l’avait méritée, cette coupe de champagne qu’il n’avait pas tardé à entamer. ’’Merci pour la leçon, Greta.’’ C’était à ce jeu qu’elle voulait jouer, celui où il ne se laissait pas impressionner par les discours préconçus de la bourgeoisie. Elle maîtrisait cette langue, mais ne l’utilisait jamais au premier degré et qu’il ait réussi à se défaire de cette première barrière l’amusait déjà, assez pour lui livrer un premier élément qui l’empêcherait de se laisser happer par les personnes à éviter. ’’Vraiment ?’’ Greta avait acquiesé, un air presque désolé sur le visage. ’’Ce n’est pourtant pas si compliqué… Faudrait peut-être faire appel à un orthophoniste.’’ Il avait réussi à la faire rire, et c’était à peu près tout ce qu’elle attendait de ceux à qui elle adressait la parole au milieu de ce défilé d’hypocrites. « Ou leur offrir un peu de cette classe qu’elles s’efforcent de montrer et dont elles manquent pourtant cruellement. » A l’entendre, Greta s’efforçait de fustiger ces femmes pour s’assurer une place auprès du pianiste, et elle s’était immédiatement écartée de la liste des suspectes. « D’habitude elles réservent leurs battements de cils à mon copain. » avait-elle ajouté avec un sourire amusé sur les lèvres, le premier depuis le début de ce moment qui ne l’amusait plus. ’’J’ai du mal à croire qu’on puisse te forcer à faire quoique ce soit.’’ En une seule phrase, il avait marqué un bon nombre de points mais il avait également soulevé tout le paradoxe que représentait la blonde. Greta savait se rebeller, mais rarement devant ses parents, parce que s’ils l’avaient dégoutée de ce monde luxueux dans lequel ils baignaient, ils lui avaient malgré tout inculqué quelques valeurs auxquelles elles s’efforçaient de s’attacher. Alors elle avait haussé les épaules, parce que ce ne serait pas l’unique point qui pourrait le surprendre s’il leur laissait l’occasion de discuter. ’’Il y a pire comme soirée.’’ Ses lèvres s’étaient pincées en une moue peu convaincue et elle avait levé le menton pour confirmer son point de vue même si elle ne le partageait pas. ’’Qu’est-ce qui te déplait autant ?’’ « Le fait que tout soit faux. Le sourire de cette femme, les diamants de celle-ci et même les dents du type qui essaie de draguer là-bas. » Sa coupe de champagne esquissait un dessin abstrait alors qu’elle désignait sans aucune gêne l’ensemble des personnes qu’elle était en train d’évoquer. Mais elle en avait conscience, elle ne serait pas de bonne compagnie si elle continuait à critiquer l'ensemble des invités alors même si elle adorait ce jeu en présence d'Arthur, Greta devait diversifier ses approches.« Tant mieux si ça t’a plu. C’est sûrement parce que tu l’as passé derrière ton piano, je me trompe ? » Greta était intriguée par le musicien, s'il n'était pas en train de judicieusement maintenir sa garde pour s'assurer d'être invité pour d'autres représentations, cela voulait dire qu’il était sérieux et qu’elle l’avait mal jugé. Mais il était probablement difficile de bien cerner la réalité de l'événement derrière un piano assez imposant pour lui permettre de disparaître totalement. Pourtant, il était doué, assez pour attirer les regards, et c’était l’une des qualités de ses parents : repérer le chic et le bon genre. « Je comprends pourquoi mes parents t’ont choisi. Beaucoup moins pourquoi on t’a fait attendre autant de temps au bar. » Izan était discret, et pourtant, même une Greta qui s'intéressait autant aux joueurs de piano que celles qu’elle mentionnait auparavant savait parfaitement qui il était et pour cause : « J’ai google, Izan. » Elle s'était permise de décliner son identité parce qu'il n'avait pas pris la peine de le faire à sa suite. Greta avait fini par rire devant son air surpris de l'entendre évoquer sa notoriété, sûrement presque aussi relative que la sienne car n'étant réelle que pour les amateurs de leurs arts.

« Ou leur offrir un peu de cette classe qu’elles s’efforcent de montrer et dont elles manquent pourtant cruellement. » elle est incisive, Greta, incisive et piquante envers les convives de ses parents, qui se confondent en parades et hypocrisies pour satisfaire des intérêts qu’Izan n’est peut-être même pas capable d’imaginer. Mais cet élan rebelle, qui s’éloigne des conventions et des attentes propres à sa qualité presque noble en ces lieux, fend le masque de sérieux du pianiste qui décroche ses lippes sous l’hilarité silencieuse qui secoue son torse pendant quelques secondes. « D’habitude elles réservent leurs battements de cils à mon copain. » qui doit sans doute être aussi important qu’elle pour attirer tous ces suffrages supposés, même s’il note surtout que le succès du petit-ami n’est pas une raison suffisante pour que Greta reste cramponnée à lui comme une moule à son rocher ; ils ont une relation suffisamment saine pour que la jalousie ne se mêle pas à leur dynamique ou, elle a suffisamment confiance en elle pour s’assurer qu’il n’aille pas voir ailleurs. Vu l’audacieuse jeune femme qui se tient devant lui, Izan penche plus pour la deuxième option. ’’Et c’est la dernière chose qu’elles font ou tu leur laisses la vie sauve, avec ta grande bonté d’âme ?’’ qu’il demande sur un ton amusé en buvant une nouvelle gorgée de sa coupe, avant d’évoquer, sur le même timbre, le caractère tout à fait indocile qu’il voit se profiler chez la blonde : il ne lui parle que depuis quelques minutes mais, déjà, il devine qu’elle n’est pas de celle qui se plie aux bons vouloirs des autres… Ce qui rend sa présence bien curieuse, puisqu’elle semble avoir en horreur ces assemblées de paraître et d’ennui. « Le fait que tout soit faux. Le sourire de cette femme, les diamants de celle-ci et même les dents du type qui essaie de draguer là-bas. » machinalement, il suit la direction donnée par le verre qui englobe tout le parterre pour considérer les invités d’un regard indifférent, beaucoup moins teinté de mépris que les mots prononcés à leur égard par la voix féminine. ’’J’y suis trop habitué pour m’en rendre compte.’’ malheureusement qu’il se retient de rajouter, en détournant les yeux pour se retourner vers le bar ; même s’il n’y a pas grand-chose d’intéressant à y observer, au moins, il n’a pas l’impression d’être pressé dans une marée humaine « Tant mieux si ça t’a plu. C’est sûrement parce que tu l’as passé derrière ton piano, je me trompe ? » il ne peut pas nier que son instrument lui sert de bouclier dans les soirées mondaines qu’il déplore, mais prétendre que ce n’est pas à double tranchant serait mentir : sitôt qu’il a fini de jouer, on se rue vers lui sans lui laisser la possibilité de respirer. Oscillant ainsi son menton de gauche à droite sous cette réflexion, il mordille l’intérieur de sa joue avant de calmement rectifier : ’’Je le reconnais : personne n’est jamais venu m’interrompre, alors on peut considérer que mon piano fait plutôt bien barrage. Le souci est quand je dois arrêter de jouer.’’ il avoue implicitement que le plus pénible commence après sa représentation puisque, sur l’instant, la seule chose qui compte est sa conversation exposé avec son instrument ; dans ces moments-là, le reste n’a pas franchement d’importance. « Je comprends pourquoi mes parents t’ont choisi. Beaucoup moins pourquoi on t’a fait attendre autant de temps au bar. » il hausse les épaules, pas franchement certain de pouvoir la suivre sur ce terrain ; il sait qu’on l’a choisi principalement parce que sa présence induit une somme colossale déboursée à son label, pour des oreilles incapables d’apprécier sa musique. Il n’irait pas jusqu’à dire qu’il est venu pour rien mais, l’idée n’est pas loin. ’’Tes parents m’ont choisi parce que mon nom ressortait bien sur les cartons d’invitation.’’ il ne s’en offusque pas vraiment, Izan, ses lèvres dessinant les contours d’un sourire complice car il la pense suffisamment intelligente pour comprendre le sous-entendu qui vient d’être marmonné, bien que cela ne soit pas vraiment un reproche formulé envers les Sighbury. Mais la jeune femme a d’autres arguments en tête : « J’ai google, Izan. » son rire grave se mêle aux échos féminins tandis qu’il secoue son menton, en se murmurant qu’elle n’a de cesse de le surprendre. ’’Parce que tu ne me connaissais pas avant ? Wow, je suis déçu…’’ mimant un faux air effaré, il fait une petite moue attristée en courbant ses sourcils vers l’intérieur de ses paupières, avant de se remettre à rire. ’’D’accord, tu sais qui je suis et ce que je fais. Mais toi, alors, qu’est-ce que tu fais de tes journées ? Ne me dis pas que tu te contentes d’écumer les soirées mondaines pour critiquer tout le monde… Ou alors, j’espère que tu cherches un associé.’’ en attendant la réponse, il reprend sa coupe pour en boire une fine gorgée, trouvant finalement cette soirée de plus en plus intéressante.

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Elle n’avait aucun mal à être un cliché mais ce rôle lui convenait bien mieux lorsqu’elle choisissait duquel il s’agissait. Pas la fille de, mais la riche héritière blasée de cette fortune qui ne lui apporterait finalement rien de ce qu’elle recherchait. Le scénario était connu de tous, et Greta était consciente de ne pas faire dans l’originalité, mais c’était bel et bien ce qu’elle ressentait : elle était prisonnière d’une cage dorée et ne s’amusait réellement que lorsqu’elle enfreignait les règles de base que son statut lui imposait. Un jeu qu’Arthur et elle maîtrisaient à la perfection lorsqu’ils étaient ensemble, et lorsqu’ils ne l’étaient pas, Greta trouvait toujours ce qui pouvait la ramener à lui. En l’occurence, il s’agissait de ces filles qui attisaient ses moqueries bien plus que sa jalousie qu’elle avait appris à ne jamais laisser parler - au risque de devenir folle au bras de quelqu’un comme l’anglais. ’’Et c’est la dernière chose qu’elles font ou tu leur laisses la vie sauve, avec ta grande bonté d’âme ?’’ « Oh. Je comptais pas te parler des cadavres dans mon placard tout de suite. » Une grimace suffisait à s’assurer qu’il comprenne son second degré qu’il avait visiblement saisi dès le début de leur échange. C’était une raison suffisante pour que Greta continue sur cette voix, ne demandant rien d’autre qu’un moment de légèreté dénotant de l’atmosphère ambiante où régnait l’hypocrisie, un point qu’elle avait soulevé à Izan. ’’J’y suis trop habitué pour m’en rendre compte.’’ Elle avait hoché doucement la tête, cet événement là n’était probablement pas le premier ni le dernier où Izan jouerait.

Et c’était son meilleur atout, pouvoir profiter de l’intimité toute relative que lui offrait son instrument. ’’Je le reconnais : personne n’est jamais venu m’interrompre, alors on peut considérer que mon piano fait plutôt bien barrage. Le souci est quand je dois arrêter de jouer.’’ Son sourcil s’était arqué alors qu’elle prenait un air faussement sérieux. « Alors on en profite pour venir t’importuner. Je me sens visée. » Mais son haussement d’épaules venait indiquer qu’elle n’en avait que faire, après tout, ils étaient ici bien obligés de s’adonner à ce type de discussions dénuées de sens et si celle-ci lui convenait, Greta estimait que le sentiment serait partagé. Sa confiance en elle pouvait être un réel atout parfois, un désavantage lorsqu’il s’agissait de parler à la place des autres. ’’Tes parents m’ont choisi parce que mon nom ressortait bien sur les cartons d’invitation.’’ Il ne pouvait pas avoir aussi peu d’estime de lui, tout chez lui criait l’arrogance même s’il venait la dissimuler derrière un discours façonné par sa crainte de décevoir les Sighbury. Alors Greta avait haussé le menton, se contentant de le fixer avec un sourire en coin comme pour lui indiquer qu'elle n’était pas dupe et bientôt, le ton d’Izan avait changé. ’’Parce que tu ne me connaissais pas avant ? Wow, je suis déçu…’’ Son léger rire s’était éteint dans sa coupe. « J’aurais moi aussi pu prétendre m’intérésser particulièrement à la musique classique mais au risque de te décevoir, non, j’ignorais qui tu étais. Mais ton nom ressort effectivement très bien sur les cartons d’invitation. » Comme s’il était prédestiné à une grande carrière que Greta pouvait souligner sans pour autant battre des cils comme la plupart des invités présents ce soir, son charme était indéniable, elle y était simplement aveugle. ’’D’accord, tu sais qui je suis et ce que je fais. Mais toi, alors, qu’est-ce que tu fais de tes journées ? Ne me dis pas que tu te contentes d’écumer les soirées mondaines pour critiquer tout le monde… Ou alors, j’espère que tu cherches un associé.’’ Il avait enfin trouvé la façon parfaite de s’adresser à l’héritière, non pas en la traitant comme telle mais comme n’importe quelle personne insignifiante que l’on pouvait rencontrer au quotidien. « Moi aussi, je suis déçue. Parce que si tu avais pris le temps de passer en librairie tu aurais vu mon nom partout. Je viens de sortir mon premier roman. » Sur ce point, sa fierté n’était pas feinte. « A force d’observer les gens et de m’ennuyer, j’ai réussi à écrire une histoire qui vaut la peine d’être lue. Si tu me tiens compagnie je pourrais même t’offrir un exemplaire dédicacé. » Le chantage n’en était pas vraiment un car Greta ne s’attendait pas à ce qu’il meure d’envie de lire son ouvrage et qu’il s’était lui-même proposé en tant qu’associé pour continuer de critiquer l’événement et ses invités. « Tu as prévu de passer du temps à Londres ? » Ou de s’échapper aussitôt terminé la représentation, auquel cas, Greta oublierait toute possibilité de faire d’Izan un nouvel ami et se contenterait de l'ajouter à la longue liste de personne n'ayant fait qu'un bref passage dans sa vie.

« Oh. Je comptais pas te parler des cadavres dans mon placard tout de suite. » elle n’avait nul besoin de contorsionner les traits de son visage dans une quelconque grimace pour qu’il devine la plaisanterie dissimulée derrière le sombre aveu, puisqu’il a bien compris que la demoiselle, quoique de noble patronyme et ayant hérité d’un empire (du moins, c’est ce qu’il croit), se plaît à repousser les limites de ce que son rang lui impose. ’’Tu ferais mieux de les dissoudre dans l’acide, ça laisse pas de traces.’’ qu’il rétorque d’une voix faussement sérieuse et presque sur le ton de la confidence, avant de fendre sa sévérité par un sourire plaisantin, qui va de concorde avec la nature de leur conversation. L’hispanique est forcé de reconnaître que Greta est bien charmante par les élans irrévérencieux de son esprit, puisqu’elle fait preuve d’une vivacité et d’un humour qui n’ont pas peur de flirter avec ce que la bienséance juge immorale ; il se permet donc de lui avouer qu’il est bien plus confortable derrière son instrument que livré en pâtures aux hordes hypocrites qui se succèdent devant ses yeux ennuyés, en se disant que, de toute façon, elle ne pourra pas vraiment s’en offusquer, celle qui les critique ouvertement « Alors on en profite pour venir t’importuner. Je me sens visée. » - ’’Tu peux.’’ pour mettre une emphase sur son incrimination, il hoche son menton de haut en bas avant de lui sourire avec complicité, signant qu’il n’en pense rien ; au contraire, elle est bien la première à lui inspirer un peu d’intérêt ici. Parce que s’il veut bien concevoir que ses hôtes se plaisent à l’écouter, il sait que la plupart n’ont aucun attrait pour la musique classique ; ici, ce n’est pas son domaine, il n’est rien de plus qu’un bijou scintillant accroché au cou des madones qui paradent. « J’aurais moi aussi pu prétendre m’intérésser particulièrement à la musique classique mais au risque de te décevoir, non, j’ignorais qui tu étais. Mais ton nom ressort effectivement très bien sur les cartons d’invitation. » il hausse les épaules avec une indifférence qui n’a rien de la modestie ou de la nonchalance qu’on peut brandir pour sauver son égo, puisqu’il n’espérait nullement qu’elle le connaisse : elle n’a pas franchement l’air d’être quelqu’un qui s’intéresse à la musique classique, Greta. ’’Les consonances hispaniques, sans doute.’’ il l’assure en buvant une nouvelle gorgée de son champagne, son regard s’évaporant brièvement sur la gauche lorsqu’un éclat de rire masculin particulièrement tonitruant se fait entendre. « Moi aussi, je suis déçue. Parce que si tu avais pris le temps de passer en librairie tu aurais vu mon nom partout. Je viens de sortir mon premier roman. » il n’aurait pas parié sur ce plan de carrière la concernant, Izan, la voyant plutôt dans un business assuré par papa et maman mais, à bien y réfléchir, elle a la rhétorique suffisante pour pondre un bouquin, ouais ’’Et il parle de quoi, ton roman ?’’ s’il est sincèrement curieux d’entendre le sujet choisi par l’héritière, il l’est beaucoup moins d’avoir le fameux livre entre les mains : non seulement il n’a pas le temps mais, en plus, si ce n’est pas la biographie d’un grand compositeur ou un livre de partitions, il s’en contrefout royalement « A force d’observer les gens et de m’ennuyer, j’ai réussi à écrire une histoire qui vaut la peine d’être lue. Si tu me tiens compagnie je pourrais même t’offrir un exemplaire dédicacé. » - ’’Ça dépend… Tu penses que je peux le revendre combien ?’’ mutin, il apporte de nouveau sa coupe à ses lèvres pour boire la dernière gorgée de sa boisson, sans perdre son sourire malicieux.  « Tu as prévu de passer du temps à Londres ? » abandonnant définitivement sa coupe sur le comptoir, il se retourne vers la blondinette en hochant mollement son menton de haut en bas, songeant combien le programme de son séjour dans cette ville doit paraître barbant d’un point de vue extérieur ’’Quelques jours, oui. J’voudrais pas te rendre jalouse mais je suis invité par l’Orchestre Symphonique, alors…’’ assurément une marque de grande reconnaissance et un privilège, mais il traite volontiers la chose avec amusement auprès de son interlocutrice, à laquelle il demande ensuite : ’’Pourquoi ? Tu veux me conseiller des coins sympas à visiter ?’’ héritière, écrivaine, critique sociale et maintenant guide touristique…Decidément, elle n’a que des talents, Greta.

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Même s’il ne s’agissait que du pianiste, sa renommée et le besoin de Sighbury de s’assurer qu’ils pourraient continuer à proposer à leurs invités les meilleures prestations lors de leurs défilés et leurs galas suffisaient à ce que Greta se sente à l’aise à se tenir là avec lui. Aucune remarque ne lui serait faite, au contraire, ses parents y verraient même là un désir de leur cadette de leur rendre service et elle avait appris à être extrêmement maligne lorsqu’il s’agissait de leur lancer de la poudre aux yeux. Parce qu’à ce moment précis, c’était surtout ses intérêts qu’elle servait, la discussion avec un musicien qui se détendait au fur et à mesure devenant de plus en plus intéressante. ’’Tu ferais mieux de les dissoudre dans l’acide, ça laisse pas de traces.’’ Son éclat de rire avait fait tourner quelques têtes, qui, en réalisant qui faisait autant de bruit, avaient repris leurs discussions comme si de rien n’était. L’écrivaine se retrouvait satisfaite de le voir jouer le jeu et de s’adapter à un humour qui lui aurait attiré les foudres d’un bon nombre d’invités ce soir. A croire qu’elle savait repérer les personnes qui ne la feraient pas mourir d’ennui, au grand désespoir d’un pianiste qui avait probablement bien mieux à faire. ’’Tu peux.’’ Ils avaient presque tous un talent d’acteur, ceux qui se devaient de parader devant un public depuis leur plus tendre enfance. Alors Greta avait mis la main devant sa bouche qu’elle avait légèrement ouverte pour indiquer à quel point l’entendre confirmer qu’elle l’importunait la choquait avant de rire doucement. Parce qu’il s’agissait là d’une sorte de joute verbale à laquelle ils s’adonnaient volontiers pour parer à l’ennui, Greta avait affirmé ne connaître le garçon qu’au travers de recherches sur internet qu’elle avait pu faire grâce à ce nom indiqué en lettres dorées sur l’invitation. ’’Les consonances hispaniques, sans doute.’’ Pinçant les lèvres, la blonde était venue confirmer ses propos avant de se raconter elle-même. ’’Et il parle de quoi, ton roman ?’’ « D’amour. Je suis pas si originale. » Si l’héritière avait choisi d’écrire plutôt que de sagement attendre les virements bancaires de ses parents allongée sur un yacht, sa plume était des plus banales. Et pour s’en rendre compte, elle pouvait sortir de sa chambre l’un des nombreux exemplaires qu’elle possédait encore pour l’offrir à Izan. ’’Ça dépend… Tu penses que je peux le revendre combien ?’’ Son sourire en coin était venu indiquer à l’espagnol à quel point il avait trouvé le ton parfait pour s’adresser à elle, celui qui l’amusait et qui lui évitait cette impression d’être mise sur un piédestal simplement parce que son interlocuteur désirait plaire à ses parents. « Tu serais déçu, je pense. Mais déformation professionnelle de Sighbury, je vois à ton costume que t’as pas tant besoin d’argent que ça. » Elle se serait presque autorisée à lui adresser un coup de coude complice s’ils ne s’étaient pas rencontrés quelques minutes auparavant seulement, à la place s’était contentée d’un sourire. Et puisqu’ils s’entendaient si bien, Greta s’était même intéressé à la suite du programme d’Izan. ’’Quelques jours, oui. J’voudrais pas te rendre jalouse mais je suis invité par l’Orchestre Symphonique, alors…’’ Greta avait levé les sourcils pour signifier à quel point elle était impressionnée. ’’Pourquoi ? Tu veux me conseiller des coins sympas à visiter ?’’  « C’est pas la porte à côté, l’Australie alors j’espère que t’es pas venu que pour nous.» avait-elle commencé, ignorant dans un premier temps savamment sa seconde question, prenant le temps de boire une longue gorgée de champagne. « Si tu veux visiter la ville en évitant les endroits banals et touristiques je peux te livrer mes secrets. Et je peux t’éviter de faire la queue dans pas mal d’endroits aussi. » Elle avait haussé les épaules - certains avantages étaient toujours bons à prendre.