crossing the river of denial

@Micah Tomlinson 17 août 2024 - logements à toowong
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Depuis son arrivée au domicile de ses parents, la chirurgienne esquivait sans relâche la question tant redoutée de "Sam n'est pas là ?". A chaque fois qu'elle franchissait les lèvres des nombreux convives, Helen déglutissait difficilement et se forçait à arborer un immense sourire, archi faux, pour mieux faire passer la pilule tandis qu'elle sortait un énième mensonge pour justifier l'absence de son époux à un événement aussi important dans la famille Stenfield. James et Lillian Cartwright fêtaient leur quarante ans de mariage, tout pile. Pour l'occasion, famille et amis étaient conviés à festoyer en leur honneur. Autant être honnête, Helen n'avait pas la moindre envie d'être là. Evidemment que l'absence de Sam allait être remarquée, tout d'abord par ses propres parents qu'elle imaginait lui tenir un réel interrogatoire... finalement, à sa plus grande surprise, les préparatifs et l'envie que cette journée soit parfaite les avait rendu moins curieux que ce qu'elle avait imaginé. Mais c'était sans compter sur la présence d'Emily, sa petite sœur, qui leur avait fait l'honneur de sa présence, alors qu'elle était souvent la première à rater ce genre de fête prout-prout et ennuyante à souhait. Emily venait tout juste de la prendre à part dans la cuisine pour lui tirer les vers du nez à propos de Sam. Si tous les autres convives croyaient à son histoire de Covid empêchant son mari de se joindre à la fête, la plus jeune des Cartwright semblait lire en elle comme dans un livre ouvert et se douter de quelque chose. Evidemment, Helen avait nié en bloc, car elle ne voulait pas prendre le risque que 1) Emily déballe tous à leurs parents 2) Emily la fasse chanter avec ça 3) qu'elle s'occupe un peu trop d'affaires qui ne la regardaient tout simplement pas. Au moment de sortir de la cuisine, le regard de la chirurgienne s'arrêta sur son cousin, Micah, qui semblait avoir la même idée que sa petite sœur : faire l'honneur d'une présence dont on aurait largement pu se passer. Énervée, agacée, remontée (vous comprenez l'état d'esprit quoi), Helen tendit le bâton pour se faire battre en se rendant à ses côtés c'était certain, mais elle avait besoin de laisser sortir le trop plein de nerfs qui l'envahissait à l'instant : « Ne serait-ce pas le célèbre Micah Tomlinson qui nous fait l'honneur d'être ici, aujourd'hui ? » Depuis combien de temps ne s'étaient-ils pas vu ? Des semaines, des mois, des années ? Les rapports cousin/cousine n'étaient pas très positifs, alors Micah n'était pas du genre à manquer à la vie de la chirurgienne... « Ton dernier film a fait un bide ? tu viens choper gratuitement des petits fours ? » Autrement dit, qu'était-il venu faire ici, alors qu'il était lui aussi plutôt du genre à snober ce type d'événements dans le bas peuple dont il semblait prétendre ne plus faire partie ?

La dynamique entre Micah et sa famille était tristement similaire à celle qui régnait entre lui et tous ces inconnus qui suivaient religieusement sa vie dans les médias, se permettant toutefois de la juger, tandis que lui n'avait pas la moindre idée de leur existence. Le seul lien qui les unissait était disseminé dans les gènes qu'ils se vantaient certainement de partager avec lui en croisant son visage sur un bus ou un écran publicitaire, avant de l'oublier aussitôt disparu au profit d'un autre. Il avait fallu que son père perde la mémoire pour faire réaliser à Micah que cette aliénation n'était pas saine, et surtout qu'elle pesait sur lui bien plus qu'il n'aurait pu l'imaginer. Il avait été surpris d'apprendre par le biais de Gary, son assistant, qu'il était toujours invité aux événements pour lesquels il avait démontré une condescendance profonde plutôt que le moindre signe d'intérêt. Toutes ces années il n'avait pas pris la peine de le mettre dans la confidence, sachant pertinemment la réponse sans avoir à poser la question. Cette fois-ci l'invitation aux 40 ans de mariage de son oncle et de sa tante fut intercepté. Micah avait commandé de l'inscrire dans son agenda, et de faire porter des fleurs et une carte en cet honneur, qu'il n'avait néanmoins pas pris le soin de rédiger lui-même. Il se doutait que ce ne serait pas assez pour se faire pardonner des années de dédain, mais le monde avait toujours su s'émouvoir de ses attentions. Sa présence fut en effet remarquée, dans le bon sens du terme. Beaucoup se réjouissaient de pouvoir échanger avec lui après tout ce temps, sans oublier de glisser un mot compatissant envers son père. Si ce n'était pas le même côté de la famille, Micah se consolait d'avoir fait preuve d'indifférence lorsqu'il constatait cette sympathie obligée qu'on lui servait comme une coupe de champagne, par politesse plus que par sollicitude. Jo n'avait pas tout à fait tort quand elle lui avait balancé à la figure que son père finirait sa vie seul, et que c'était le sort qui lui était réservé à lui aussi s'il ne faisait pas l'effort de renouer un peu avec ces gens qu'il avait appris à estimer indignes de lui. On l'obligea même à signer des autographes, prendre quelques photos qui finiraient certainement sur les réseaux sociaux, comme s'il était une bête de foire plus qu'un membre oublié de la famille. Si c'était le prix à payer pour ne pas finir seul, alors il le ferait avec ce sourire de façade qu'il avait mis des années à perfectionner. Ce dernier s'effaça cependant à l'apparition d'Helen, qui avait ce don d'aspirer la joie du monde partout dans son sillage. Aux dernières nouvelles, il s'agissait d'une fête en l'honneur de ses parents, alors pourquoi cette tête d'enterrement ? « Un plaisir de te croiser Helen, toujours aussi aimable. J'en déduis donc que t'as pas baisé depuis la dernière fois qu'on s'est vus. » dit-il en réponse à ses accusations puériles. Il ne comprenait pas vraiment d'où lui venait cette animosité, si ce n'était une certaine jalousie mêlée à un profond manque d'assurance. « J'ai vraiment l'air d'avoir besoin de profiter de bouffe gratuire ? » demanda-t-il en baissant les yeux sur son total look Prada à 4 chiffres. « Par contre toi t'as l'air de passer un sale moment. T'as besoin d'en parler ? »

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Helen s'était jurée lancer son plus noir des regards à la prochaine personne qui viendrait l'ennuyer après sa sœur, mais elle se ravisa en se répétant que le faire susciterait davantage les soupçons quant à sa situation sentimentale aujourd'hui. En faire trop, cela signifiait subir plus de questions sur l'absence de Sam, sur l'absence de grossesse depuis trop d'années, sur ses projets en tant que chirurgienne, bref, tous les sujets dont elle ne voulait pas causer maintenant, ni jamais, avec des personnes à qui elle souriait faussement, pour préserver les apparences. Emily venait de la faire sortir de ses gongs en sous-entendant diverses choses à propos de Sam et lui. Et ce qui l'énervait davantage, c'était qu'elle avait raison sur plein de points... mais évidemment qu'Helen avait nié en bloc. Emily et elle n'avaient jamais été suffisamment proches pour que la brune ose se confier à sa petite sœur. Alors, en voyant Micah à la fête d'anniversaire de ses parents, la jeune femme vit en cette présence la possibilité de lâcher ses nerfs sur son cousin qu'elle ne portait pas dans son cœur. Elle s'adressa à lui en le taclant d'emblée, ce qui montrait que son affection pour lui restait intact : elle le détestait lui, son air pédant et sa vie pleine de paillettes dont elle n'avait strictement rien à carrer. « Un plaisir de te croiser Helen, toujours aussi aimable. J'en déduis donc que t'as pas baisé depuis la dernière fois qu'on s'est vus. » La chirurgienne roula des yeux, ennuyée à l'idée qu'on s'inquiète autant que ça de sa vie sexuelle à chaque fois qu'elle prenait cet air pincé et désagréable. Même l'une de ses internes s'était permise ce genre de réflexions, alors qu'elles n'étaient pas proches au point de se permettre ces familiarités... et elle pouvait en dire tout autant de Micah. « J'ai vraiment l'air d'avoir besoin de profiter de bouffe gratuite ? » « Désolée, je ne savais pas que mes parents t'avaient engagé comme clown pour faire l'animation à leur fête de mariage. J'espère qu'ils t'ont promis un bon salaire. » Railla-t-elle en suivant son regard sur sa tenue qu'il considérait comme la preuve de sa richesse, alors que la chirurgienne ne voyait en elle qu'une tenue de cocktail tout à fait banale. Vraiment, c'était typiquement le genre de réaction de la part de son cousin qui lui donnait la gerbe à son sujet. La popularité lui montait à la tête, et il semblait se placer au-dessus de tout, et de tout le monde. C'était insupportable. La seule chose pour laquelle la jeune femme semblait ressentir un peu de peine, c'était pour l'Alzheimer précoce de son oncle, qui devait forcément peiner Micah. « Par contre toi t'as l'air de passer un sale moment. T'as besoin d'en parler ? » La jeune femme lui adressa un regard interrogateur, surpris et à la fois dégouté. Il s'imaginait vraiment qu'elle allait lui parler de ses soucis ? et d'ailleurs, pourquoi est-ce qu'elle lui confirmerait que des soucis, elle en avait ? « Tout va très bien dans ma vie, c'est fort aimable de ta part de te soucier du bien-être de ta cousine... mais sache que je n'ai pas de temps à perdre pour te confier quoique ce soit, si j'avais quelque chose à confier, d'ailleurs. » Elle haussait les épaules, prétendant ne pas avoir le temps de lui parler. Et pourtant, elle restait là, à ses côtés, pour continuer à décharger sa frustration et sa colère de toute à l'heure. « J'ai vu que les invités te demandaient une photo et des autographes, ça doit pas être facile d'avoir le melon comme ça, même à une fête de la sphère privée ? » Elle grimaça, prétendant ressentir la douleur de devoir satisfaire le monde à cause de son image publique... alors qu'elle s'en fichait complètement, en réalité, elle disait toujours cela pour se sentir mieux. « D'ailleurs, quelle mouche t'a piqué ? Tu ne viens jamais aux fêtes de famille. C'est une sortie sponsorisée ? tu vas toucher un peu d'argent pour t'être pointé ici ? » Depuis combien de temps n'avait-il pas pointé le bout de son nez dans une soirée, ou un repas de famille ? Des semaines ? Des mois ? Sa présence, bien qu'appréciée par les autres invités, l'interrogeait beaucoup.

Petit nuage chargé d'amertume, Helen avait cette fâcheuse tendance à se déplacer nerveusement et à  crisper les conversations les plus ordinaires. Micah ne la connaissait pas suffisamment pour savoir ce qui la frustrait dans la vie, mais il aimait croire que c'était lié à une sexualité bridée et une propension exagérée à la jalousie. Lui avait la chance d'être fils unique, si bien qu'il n'avait jamais ressenti le besoin de s'opposer à une fratrie dans laquelle les parents valorisaient les accomplissements de certains en éclipsant ceux des autres. Tout ce qu'il faisait avait toujours mérité la fierté manifeste de son père, ce en dépit de ses exigences de manager. Chez les Stenfield, la compétition était évidente, autant que la soumission d'Helen à des choix qui n'étaient pas les siens et qui la rendaient aigrie avant l'heure. Elle détestait si incontestablement sa vie qu'elle se sentait obligée de commenter et rabaisser celle des autres. Une stratégie stérile pour se convaincre qu'elle était heureuse et épanouie. « C'est sûr qu'ils pouvaient pas compter sur toi pour amuser la galerie. » avait-il rétorqué sans se départir d'un sourire carnassier. Les rapports non conflictuels que Micah pouvait entretenir avec ses cousins étaient rares. Qu'ils soient du milieu ou non, ils avaient tous cette manie de vouloir se hisser au-dessus des autres. A la différence d'Helen, lui était intimement persuadé d'être supérieur et il ne s'encombrait jamais à le cacher sous de la fausse modestie. « Je t'ai fait quoi Helen sérieusement ? Si ça te fait chier que je sois là, tu pouvais aussi bien m'ignorer. » demanda-t-il toutefois, un peu déçu de devoir se réduire à cette sempiternelle dynamique entre eux alors qu'il était venu avec les meilleures intentions du monde. Pourquoi s'était-elle ruée comme une furie hystérique pour l'insulter alors qu'elle avait des tas d'autres personnes plus intéressantes à détester ? Leur dernière rencontre remontant à plusieurs mois, voire années, il aurait pu s'attendre à un accueil plus apaisé, ou tout du moins une indifférence de circonstance. Sa tentative de prêcher le faux pour savoir le vrai sembla faire mouche, car Helen se montra désarçonnée par la perspicacité avec laquelle il avait mis le doigt sur les raisons de sa mine égarée. Sa vaine tentative de se défendre d'aller bien lui arracha un rire perplexe. « Comme quoi la comédie c'est pas qu'une affaire de famille, t'es pas très douée pour mentir. » accusa-t-il en hochant la tête d'un air faussement affecté. S'il se serait attendu à ce que Helen prenne congés pour se consoler d'avoir eu le dernier mot, elle n'en fit rien et resta pourtant plantée devant lui, comme si elle avait besoin d'échapper à quelque chose. Jouant la montre, elle se risqua même à prétendre qu'elle avait de la sympathie pour lui, derrière ses habituels sarcasmes. « Je pensais pas avoir à faire ça ici je t'avoue. Mais je suis pas trop en position de refuser quoique ce soit. Je suis pas venu pour attirer l'attention, je voulais juste être un mec normal pour changer. » se désola-t-il sans se couvrir cette fois de cette impertinence avec laquelle ils échangaient depuis le départ. Il espérait au moins que sa sincériré transparaitrait suffisamment pour avoir une discussion courtoise et constructive le temps de se faire alpaguer de nouveau. Il ne pouvait pas tenir rigueur à Helen de l'accuser d'être venu par intérêt. Au fond, elle n'avait pas tort, même si elle était loin de se douter que ses intérêts étaient aussi nobles qu'une tentative de réconciliation. Une preuve qu'il tenait à réparer le lien qu'il avait brisé de son propre chef en privilégiant sa propre valeur plutôt que celle insoupçonnée de la famille. « Je suis là pour rien d'autre que rattraper le temps perdu. Mais je t'en veux pas de croire que je pourrais avoir des ambitions cachées, j'ai pas brillé par ma présence ces dernières années. Tu sais bien ce que c'est d'être occupé, non ? » demanda-t-il un peu au hasard, dans l'espoir de trouver un point commun sur lequel s'entendre.

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« C'est sûr qu'ils pouvaient pas compter sur toi pour amuser la galerie. » A ses mots, la chirurgienne lui adressa une grimace qui signifiait clairement 'tu m'emmerdes' à son cher cousin. Sa récente conversation avec Emily l'avait bien trop mise sur les nerfs pour qu'elle ait envie d'agir autrement que comme une mégère à l'égard de Micah, qui au fond n'avait rien fait de mal à part ouvrir la bouche. Pour Helen, c'était déjà trop, cette dernière étant bien trop fatiguée par les conventions sociales durant ce genre de dîner. S'obliger à sourire, prétendre être ravie de voir tout le monde, même les invités les plus coincés et ennuyants du monde. Bref, c'était pas le bon jour, ni le bon moment pour la voir sous un jour agréable. « Je t'ai fait quoi Helen sérieusement ? Si ça te fait chier que je sois là, tu pouvais aussi bien m'ignorer. » Helen avait-elle au moins la force de faire semblant de réfléchir à cette question ? Pas vraiment. Le ton de Micah était plein de reproches, mais plutôt légitimement, il fallait l'admettre. Il était vrai que, si elle l'avait vraiment souhaité, l'ignorer aurait été la solution parfaite pour ne pas nourrir sa frustration et ses nerfs déjà bien chargés. Qu'attendait-elle de Micah, véritablement ? De l'utiliser comme échappatoire ? C'était une bonne idée, au fond. « Comme quoi la comédie c'est pas qu'une affaire de famille, t'es pas très douée pour mentir. » Est-ce que ça se voyait tant que ça que les choses n'allaient pas ? Un doute s'installa en elle, si bien qu'elle se risqua à demander à son cousin : « Qu'est-ce qui t'a fait dire que ça ne va pas ? Je ne souris pas assez faussement, c'est ça ? Je me suis entraînée toute la nuit pourtant. » Inconsciemment, la jeune femme s'était un brin radoucie, lui adressant presque un sourire mi-amusé mi-désemparé face à sa propre remarque. Elle avouait plus explicitement que quelque chose ne tournait pas rond, il était vrai... mais l'idée d'utiliser Micah pour s'exiler un peu de ce repas, et de prendre l'air, commençait à véritablement mûrir dans sa tête comme étant l'idée la plus parfaite de ce début de soirée. « Je pensais pas avoir à faire ça ici je t'avoue. Mais je suis pas trop en position de refuser quoique ce soit. Je suis pas venu pour attirer l'attention, je voulais juste être un mec normal pour changer. » La fin de son intervention lui fit un léger pincement au cœur, même si depuis des années, la chirurgienne était persuadée que la célébrité lui montait bien trop à la tête. Micah avait l'air sincère en disant avoir voulu être un mec normal, alors ça lui faisait un petit quelque chose dans son qu'on appelait son empathie. C'était très rare que cette émotion surgisse en elle lorsque Micah était dans les parages. « Je suis là pour rien d'autre que rattraper le temps perdu. Mais je t'en veux pas de croire que je pourrais avoir des ambitions cachées, j'ai pas brillé par ma présence ces dernières années. Tu sais bien ce que c'est d'être occupé, non ? » La tension ne faisait que de redescendre entre eux, si bien qu'Helen regretta presque de s'être montrée aussi tranchante d'emblée, en le voyant à ses côtés. La jeune femme pouvait avoir ce côté tyrannique dans certaines situations, ce qui ne lui ressemblait pas vraiment, dans le fond. Helen n'était en rien une personne méchante, simplement une femme fatiguée par des choix forcés et un rythme de vie qu'elle n'avait pas choisi toute seule. « Oui, je sais bien... les journées devraient durer plus longtemps que 24h, tu ne penses pas ? » Elle lui balançait cette question pour lui montrer qu'elle acceptait d'agiter elle aussi le drapeau blanc, ce qui l'incita à poursuivre : « Désolée, Emily m'a un peu tendu tout à l'heure dans la cuisine. ça te dit qu'on s'éloigne un peu dans le jardin ? J'ai l'impression que la foule commence un peu à m'oppresser. » Chose encore plus rare que de manifester un peu d'empathie pour son cousin, la brune accrocha son bras pour l'inviter à s'éloigner de ce brouhaha environnant, recherchant un peu plus d'intimité pour aider Micah à remplir cet objectif de "rattraper le temps perdu", et pour permettre aux oreilles indiscrètes de ne pas interférer dans leurs prochaines confidences. « Tu dis vouloir rattraper le temps perdu ? Qu'est-ce qui t'as fais changer d'avis ? » Evidemment, la chirurgienne avait eu vent de l'Alzheimer précoce de son père, mais était-ce au moins lié à ce revirement de situation ?

Il fallait bien peu d'imagination pour transposer la scène deux décennies en arrière, à une époque où l'âge d'Helen pouvait pardonner ses accès de gaminerie. Pourtant, Micah n'avait pas assez de souvenirs en commun pour ressentir la moindre nostalgie, obligé de se contenter de l'animosité qu'elle lui accordait aujourd'hui, sans autre justification qu'une jalousie aussi évidente qu'elle se sentait illégitime auprès des siens. Compte tenu du palmarès de la famille, il suffisait de la moindre faille pour passer de prodige à vilain petit canard, faiblesse que sa cousine avait a priori manifesté pour se retrouver dans l'ombre de sa sœur, et d'un cousin qu'elle accablait faute d'une autre cible. C'était bien mal le connaître, de croire qu'elle pourrait s'en sortir avec un sarcasme que seule son aigreur précoce égalait. Helen avait cette image de fille trop lisse, s'efforçant de rentrer dans les clous au cas où se présenterait un jour l'opportunité de remonter dans l'estime de ses parents. Micah ne pouvait pas totalement la mépriser de vouloir faire leur fierté alors qu'il avait lui-même été conditionné pour satisfaire les exigences de son père. A vrai dire, ils se ressemblaient bien plus qu'ils ne pouvaient le croire, si ce n'était qu'il n'avait aucun problème à se montrer impertinent ou à aborder les sujets qui, de toute évidence, feraient rougir sa cousine. Cette dernière sembla enfin se dérider, rabaissant une garde qu'elle déployait certainement avec tout le monde pour camoufler une confiance effarouchée par le déshonneur de ses parents. Micah ne faisait que spéculer mais il avait toujours trouvé sa cousine triste, comme si elle en voulait au monde d'avoir fait à sa place des choix qui finalement ne semblaient contenter personne. Il n'y avait rien de précis qui pouvait trahir ce malaise, si ce n'était la manie qu'elle avait d'être constamment sur la défensive, y compris avec des membres de sa famille qu'elle n'avait pas vu depuis des années. Micah fréquentait suffisamment de stars mégalomanes pour reconnaître un ego blessé. « Tu t'es entrainée face à un miroir ? Parce que ton sourire ressemble plus à une contraction musculaire qu'autre chose. Je connais des filles botoxées à mort plus expressives que toi. » se moqua-t-il à nouveau, espérant cette fois lui arracher un véritable sourire. Helen donnait le change, mais qui croyait-elle berner au juste si ce n'était elle-même ? Elle avait l'air aussi à l'aise qu'une prostitué dans un couvent alors qu'il était question de l'anniversaire de mariage de ses parents. Pouvait-on faire plus joyeux comme événement que la célébration de la longévité d'un engagement sacré auquel plus personne ne croyait ? Micah sembla déceler de la tendresse dans le visage autrefois crispé de sa cousine. Il fallait admettre qu'il était aussi doué pour énerver les gens que pour les amadouer. Il lui avait fallu bien plus de temps que ça pour transformer l'indifférence de Midas en énervement. Sauf que cette fois, Micah était sincère. Il ne se sentait pas à sa place dans cette famille au sein de laquelle il essayait désespérément de se fondre, comme une couleur un peu trop vive dans un tableau pastel. L'accueil que lui avait accordé Helen ne faisait que le convaincre qu'il était peut-être condamné à rester sur le banc de touche. Que tous ses efforts ne parviendraient pas à faire oublier des années d'égoïsme. « Je suis à la fois d'accord et sceptique, parce que ça voudrait dire que je dormirais encore moins, et j'ai besoin de mon beauty sleep. Tu crois que je fais comment pour être si canon ? » Helen avait l'embarras du choix pour lui répondre. La maquillage, les retouches dans les magazines ou encore la cocaïne, il n'y avait rien de moins faux que le sommeil auquel il prétendait être attaché. Alors que sa cousine subtilisa son bras pour l'emmener à l'extérieur, Micah fit mine d'observer tout autour de lui pour donner un effet dramatique à la blague qu'il s'apprêtait à faire. « Qu'est-ce qui se passe, tu as vu des photographes ? » demanda-t-il, mutin, pour expliquer la soudaine envie d'Helen de s'afficher à son bras. Il la suivit néanmoins volontiers, sous les yeux circonspects de certains convives. « Donc c'est Emily le problème, pas moi. Je suis rassuré. » dit-il alors qu'ils parvenaient dans le jardin. « T'as envie d'en dire plus ou je dois juste en conclure qu'elle aime donner des leçons parce qu'elle est plus âgée ? » Si la conversation n'avait pas pris une tournure plus apaisée, Micah aurait simplement pu trouver Emily assez saine pour agacer sa sœur, vu qu'elle avait la manie de se sentir acculée par tout le monde, mais le moment était mal choisi pour ce genre de familiarités. « J'aimerais te dire que je regrette seulement de pas avoir pris la peine de vous connaître, mais la vérité c'est que mon père est plus qu'une coquille vide, que j'ai pas de frères et sœurs et que j'ai une relation inexistante avec ma mère. Au fur et à mesure que l'état de mon père s'est dégradé, j'ai pris conscience de ce qui me restait, et autant te dire que c'est rien de très immuable. » concéda-t-il en haussant fatalement les épaules. Une fois son père parti, il ne lui lèguerait rien d'autre qu'un patrimoine aussi démesuré que les ambitions qu'il avait toujours nourries pour son fils. Et si la fortune avait de quoi faire rêver les plus cupides, elle n'avait pas de grande valeur sentimentale, ni de quoi lui faire oublier la solitude à laquelle elle l'avait condamné.

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Sourire faussement, Helen avait des années d'expérience auprès de ses parents. Ne voulant pas faire naître la déception sur leur visage à eux, la chirurgienne s'était entraînée encore et encore pour prétendre que sa vie la satisfaisait complètement. Malgré les remarques désobligeantes, malgré qu'on la pousse toujours plus pour réussir dans cette voie qu'elle n'avait pas choisi, la brune excellait désormais dans le mensonge de sa vie. Son père et sa mère la pensaient heureuse ; professionnellement, personnellement. Alors qu'ils avaient absolument tout faux : son boulot de chirurgienne commençait à la peser, et surtout, l'envie de s'adonner à sa véritable passion recommençait à pointer le bout de son nez. Son mariage avec Sam était un échec, et ils ne remarquaient absolument rien à ce propos. Les mensonges qu'elle déblatérait leur suffisaient, visiblement, pour croire que tout continuer de rouler dans sa vie "parfaite". Sauf qu'Helen n'était pas prête pour s'envoler de ses propres ailes. Maintenant qu'elle avait ciblé le problème (dixit, ses parents), la jeune femme s'apprêtait à se satisfaire de ça pour quelques temps. Perdre ses parents n'étaient pas au programme, car elle ne voyait pas d'autres issues possibles lorsqu'elle leur annoncerait : son divorce + son changement de voie professionnelle. « Tu t'es entrainée face à un miroir ? Parce que ton sourire ressemble plus à une contraction musculaire qu'autre chose. Je connais des filles botoxées à mort plus expressives que toi. » Sa remarque la fit franchement sourire. Est-ce qu'elle se sentait con ? Absolument. Visiblement, Helen donnait l'air encore plus coincée que ce qu'elle croyait. « Si tu devais servir le même ramassis de mensonges que moi depuis l'arrivée de tous les invités, je suis persuadée que tu aurais la même manière de sourire. » Peu à peu, la jeune femme s'ouvrait. A vrai dire, Micah lui faisait prendre conscience du ridicule qui la caractérisait en voulant à tout prix se montrant tranchante et froide à son égard, alors qu'au fond, il ne lui avait jamais rien fait de mal. Aucune réelle attaque, ne serait-ce que d'être cette star montante qui prend la grosse tête. En soi, rien d'alarmant non plus. Et puis, ses propres aveux sur son envie de se rapprocher de sa famille attendrissait indéniablement la chirurgienne, qui se radoucissait à vue d'œil. « Je suis à la fois d'accord et sceptique, parce que ça voudrait dire que je dormirais encore moins, et j'ai besoin de mon beauty sleep. Tu crois que je fais comment pour être si canon ? » - « Ton arrogance ? » Malgré la pique, Helen n'était plus virulente comme tout à l'heure. Elle arborait plutôt un air amusé, cette fois-ci. Cela la poussa à avoir subitement envie de s'éloigner de la fête aux côtés de son cousin, qu'elle attrapa par le bras. « Qu'est-ce qui se passe, tu as vu des photographes ? » - « Désolée de te décevoir, mais s'il y a bien quelque chose qui ne m'intéresse pas, c'est bien la célébrité. » Soupira-t-elle presque, même si elle comprenait qu'il disait ça pour la blague. De son côté, c'était la stricte vérité. Helen se fichait bien qu'une star fasse partie de sa famille, elle ne recherchait pas la notoriété de son côté. Au contraire, la jeune femme rêvait de davantage de tranquillité, encore une fois. « Donc c'est Alyson le problème, pas moi. Je suis rassuré. T'as envie d'en dire plus ou je dois juste en conclure qu'elle aime donner des leçons parce qu'elle est plus âgée ? » - « Alyson est plus jeune que moi, c'est la petite dernière. Et ben, c'est clair qu'on ne partage pas grand chose pour que tu te plantes sur ce point là. » Rectifia-t-elle, avant de poursuivre : « Elle me harcèle parce qu'elle veut savoir pourquoi Sam n'est pas là. » Qu'est-ce qu'elle pouvait être pénible quand elle s'y mettait, vraiment. Mais maintenant qu'Helen avouait à Micah pourquoi sa petite sœur l'avait tendu tout à l'heure, la brune allait certainement devoir lui expliquer la vérité... à condition qu'il la lui demande. Pour l'heure, la chirurgienne était pleine de curiosité : pourquoi Micah parlait-il de renouer avec les membres de sa famille, dont elle ? « J'aimerais te dire que je regrette seulement de pas avoir pris la peine de vous connaître, mais la vérité c'est que mon père est plus qu'une coquille vide, que j'ai pas de frères et sœurs et que j'ai une relation inexistante avec ma mère. Au fur et à mesure que l'état de mon père s'est dégradé, j'ai pris conscience de ce qui me restait, et autant te dire que c'est rien de très immuable. » Ses mots la touchaient, et la firent rester silencieuse quelques secondes, qui paraissaient être d'interminables minutes. Helen réfléchissait, et prenait conscience de certains points communs qu'elle partageait avec Micah. « J'ai appris pour ton père, désolée. » Souffla-t-elle, en arborant une légère moue. Gagné, désormais la chirurgienne s'en voulait d'avoir été infecte tout à l'heure avec son cousin. « Je comprends ton ressenti, tu sais. » Elle pencha légèrement la tête, en se mordillant légèrement la lèvre. Elle s'apprêtait à avouer des choses qu'elle disait rarement à voix haute. « J'ai un frère et une sœur, pourtant on n'est pas proche du tout. Et je mens sur toute la ligne à mes parents, alors ce que j'ai côté famille, c'est pas très profond non plus. » Triste constat, mais c'était bien vrai. Au fond, ils se retrouvaient un peu au même stade, tous les deux. « Pour être honnête, je ne saurai même pas te dire pourquoi je suis infecte avec toi ; l'habitude, certainement. En vrai, je n'arrive pas à trouver les raisons qui me poussent à te détester. » Avoua-t-elle, faisant tomber ce mur qu'elle avait bâti entre eux. Cette conversation, pour le moins inhabituelle, allait certainement marquer le début de quelque chose entre eux... le contraire serait décevant, à vrai dire. Si la chirurgienne acceptait de s'ouvrir auprès de son cousin, elle espérait que cela ne soit pas pour rien car, des déceptions, elle en connaissait trop ces derniers temps.

On reprochait facilement aux gens de ne pas sourire, comme s'il n'était pas admis de manifester des émotions négatives face à des témoins innocents. En fait, percevoir la tristesse, ou du moins le manque de bonheur, sur les autres avait tendance à mettre mal à l'aise, et c'était uniquement par égoïsme qu'on leur ordonnait, souvent sous couvert de blague, de se dérider un peu. Micah n'était pas étranger à cette règle, d'ailleurs absolument personne n'acceptait les expressions placides sur les tapis rouges, car cela exigeait de se rendre à l'évidence que les stars étaient foncièrement comme tout le monde. Au final, il ne saurait trancher s'il avait forcé ce sourire chez Helen par empathie, ou tout simplement parce qu'il refusait d'avoir fait ce déplacement pour être confronté à d'autres plaintes que les siennes. Comme prévu, ce sourire plus sincère de sa cousine acheva de le rassurer lui-même, comme si plaisanter ensemble excluait de fait la possibilité qu'il avait la moindre part de responsabilité dans ses humeurs. Sa remarque naïve lui arracha un rire à son tour. « Tu sais vraiment à qui tu parles ? C'est mon métier, de mentir et de faire semblant. » rectifia-t-il en lui servant son plus beau sourire de façade. Micah n'était pas toujours en forme, contrairement à ce qu'il pouvait faire croire, et c'était bien ce qui suscitait la jalousie des gens, comme Helen, qui se laissaient berner par les apparences. Sinon, quelle autre raison aurait-elle de le mépriser ? « Si tu veux je t'apprendrai à sourire en toute circonstance, c'est genre le b.a-ba pour survivre dans le show business. » ajouta-t-il en opinant du chef. Et encore, il avait le privilège d'être un homme, car une femme qui se permettait de ne pas sourire aux photographes était forcément ingrate et dépressive. Cette fois, la pique que lui lança Helen sembla se rapprocher davantage de la taquinerie que de la pure méchanceté. Elle n'avait pas tort, Micah était arrogant, mais il n'avait jamais considéré ça comme un défaut. Ce qui l'insupportait, lui, c'était la fausse modestie. « Appelle ça comme tu veux, mais dans tous les cas ça a l'air de marcher pas mal. » dit-il en haussant les épaules, résigné à cette étiquette qu'on lui collait avec raison. Bras dessus bras dessous, ils s'éclipsèrent de la fête dans un revirement inespéré. Micah en était le moins étonné, après tout il ne doutait pas d'être un homme duquel on aimait s'entourer. « Pourquoi ? Parce que tu pourrais plus te contenter d'incarner une plante verte ? » demanda-t-il lorsque sa cousine lui avoua ne pas être avare de célébrité. Il la comprenait, lui n'avait justement pas cette capacité de passer inaperçu qui lui plairait parfois. Loin de lui faire honte, il s'amusa au contraire de la façon dont Helen souligna son manque de connaissance de la famille. De fait, depuis des années son arbre généalogique se limitait à son père et lui, ainsi que sa mère qui flottait un peu plus loin, branche qui se serait détachée pour s'enraciner autre part. « Ah au temps pour moi, donc elle aime juste donner des leçons. » Ce qui la rendait d'autant plus antipathique, si elle voulait son avis. « Et du coup je suis censé savoir qui est Sam ? Attends... j'imagine que c'est pas un animal ? » s'interrogea-t-il, prétextant la blague pour camoufler son évidente ignorance des intrications familiales.

Persuadé que son désarroi n'intéressait personne, Micah se sentait moins coupable de n'être qu'un satellite dans la famille. Même si le joindre n'était pas une mince affaire, avant aujourd'hui personne n'avait pris la peine de prendre des nouvelles, se figurant que sa présence médiatique était une preuve suffisante qu'il avait tourné la page, ou du moins qu'il s'en accommodait. Se confier à Helen avait quelque chose de cathartique, et c'était un moyen de redevenir humain aux yeux de personnes qui le considéraient toujours comme quelqu'un d'exceptionnel. « Merci. » se contenta-t-il de répondre. Comme tout le monde elle avait appris la nouvelle, mais qu'en avait-elle fait, sinon croire que ce n'était qu'une infortune dans une vie par ailleurs parfaite. Il s'en remettrait, avait-elle dû songer, après tout il a de l'argent. « Moi je sais pourquoi tu me détestes Helen. Parce que tu es persuadée que j'ai la vie facile, que j'ai jamais dû mentir à personne et encore moins à moi-même, que je suis bien entouré et tu te demandes pourquoi un connard arrogant a le droit à cette vie parfaite pendant que toi tu dois te débattre tous les jours. » se hasarda-t-il, car la vérité était que les gens le détestaient souvent pour les mêmes raisons. Par envie et inconscience de tous les sacrifices qu'une telle vie exigeait. « Mais tu te trompes... Pourquoi tu mens à tes parents de toute façon ? C'est pas comme s'ils faisaient semblant d'apprécier tous leurs enfants de façon équitable. Je veux dire, s'ils sont pas capables de voir tout ce que tu fais pour eux, pourquoi tu ferais pas les choses pour toi-même ? » Il était assez évident que quelque chose manquait à la vie d'Helen. De la folie, de la spontanéité, tout ce que l'avenir rêvé et tracé par ses parents n'avait pas su lui apporter. « Tu t'es jamais dit que peut-être les gens arrivent pas à se réjouir pour toi parce que t'as l'air déprimée H24 ? »

crossing the river of denial

@Micah Tomlinson 17 août 2024 - logements à toowong
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« Tu sais vraiment à qui tu parles ? C'est mon métier, de mentir et de faire semblant. » Pourtant, Micah rayonnait, il avait cet air intouchable des stars au sourire colgate, qui maîtrisent parfaitement l'art de sourire correctement, au bon moment. Ce genre de sourire qui était propre, parfaitement capturé par les paparazzis ; alors qu'Helen, la plus commune des mortels, n'avait pas ce don là. Ses sourires de façade n'avaient rien à voir avec ce que lui servait Micah actuellement, alors elle peinait à croire que son bien-être n'était que mensonge. « Si tu veux je t'apprendrai à sourire en toute circonstance, c'est genre le b.a-ba pour survivre dans le show business. » - « J'aimerais surtout arrêter de devoir sourire faussement, comme ça... » Souffla-t-elle, fatiguée pour tous ces mensonges, ces faux semblants. Helen voulait de la sincérité, avec un soupçon de joie dans sa vie, qu'elle perdait peu à peu avec tous les soucis personnels qu'elle rencontrait. Si elle se sentait parfaitement épaulée par ses amis sur la question (malgré les soucis avec Izan), la chirurgienne savait qu'elle ne pouvait pas en parler avec qui que ce soit de sa famille. En réalité, si elle le faisait, elle prenait le risque de s'en manger plein la tête, alors qu'elle n'était pas la plus fautive dans cette histoire. « Appelle ça comme tu veux, mais dans tous les cas ça a l'air de marcher pas mal. » Elle haussa des épaules, un peu désemparée par la nonchalance évidente de Micah certaine fois. Son arrogance l'agaçait, et il en jouait, chose qu'elle détestait. « Pourquoi ? Parce que tu pourrais plus te contenter d'incarner une plante verte ? » - « Ne serait-ce pas un brin de jalousie que j'entends là, dans ta voix ? Admets que tu aimerais aussi pouvoir te la jouer plante verte de temps en temps ? » Quelle star ne rêverait pas d'un peu plus d'anonymat et d'intimité ? Se faire suivre par des photographes tous les jours, devoir faire semblant de sourire à tous ces fans. Rien que d'y penser, Helen en était épuisée. « Ah au temps pour moi, donc elle aime juste donner des leçons.  Et du coup je suis censé savoir qui est Sam ? Attends... j'imagine que c'est pas un animal ? » La question de Micah la fit rire sincèrement, première fois depuis très longtemps entre les deux cousins. « Non, Sam n'est pas un animal... quoique, chien en rut, ça le décrit bien, je crois. » Helen leva les yeux au ciel, sans vraiment savoir si elle pouvait en dire plus à ce sujet. Si elle s'évertuait à ne rien dire à Alyson, pourquoi le ferait-elle auprès de Micah, si rapidement après qu'elle ait compris que rien n'obligeait à ce qu'ils se détestent mutuellement. « Moi je sais pourquoi tu me détestes Helen. Parce que tu es persuadée que j'ai la vie facile, que j'ai jamais dû mentir à personne et encore moins à moi-même, que je suis bien entouré et tu te demandes pourquoi un connard arrogant a le droit à cette vie parfaite pendant que toi tu dois te débattre tous les jours. » Aoutch. Avouer qu'il avait raison, ou prétendre qu'il ne voyait pas juste ? Choix difficile, car ce serait admettre pour la première fois que Micah arrive à lire en elle, et ça... pour une mésentente vieille de longues années, ça fait mal. « Peut-être bien, oui... » Souffla-t-elle, pour temporiser sa capacité à réfléchir davantage à ce qu'elle pourrait dire, pour éviter de dire simplement "t'as raison". « Mais tu te trompes... Pourquoi tu mens à tes parents de toute façon ? C'est pas comme s'ils faisaient semblant d'apprécier tous leurs enfants de façon équitable. Je veux dire, s'ils sont pas capables de voir tout ce que tu fais pour eux, pourquoi tu ferais pas les choses pour toi-même ? » Helen n'aimait pas s'aventurer sur ce sujet épineux... déjà qu'avec elle-même, la chirurgienne se torturait l'esprit sur la question ; alors, avec Micah, était-ce bien judicieux d'affronter ses peurs, ses doutes, ses angoisses à propos de ses parents ? « Tu t'es jamais dit que peut-être les gens arrivent pas à se réjouir pour toi parce que t'as l'air déprimée H24 ? » Petite claque verbale en passant, ça aussi, ça faisait mal. Il fallait qu'elle se protège de ces mots blessants, même si Micah cherchait avant tout à lui faire ouvrir les yeux, plutôt qu'à la heurter ; « J'ai pas l'air déprimée H24 non plus... » En tout cas, pas à ses yeux. « Je... je ne peux pas me passer de mes parents. C'est con, mais rien qu'à l'idée de les décevoir, ça me fout dans un état... je sais qu'ils sont injustes avec nous, mais ça reste mes parents. » Sans eux, elle avait le sentiment de n'être rien... alors qu'elle serait certainement tout autre chose ; quelque chose de beaucoup moins négatif, il ne fallait donc pas voir cela péjorativement. « J'entends que tu ne sois finalement pas ce petit con arrogant, que je me sois trompée sur toute la ligne sur toi, vraiment. Mais, essaie quand même de te mettre à ma place... mes parents sont en bonne santé, mes frères et sœurs aussi, je n'ai pas envie de créer des histoires parce que, finalement, je n'ai pas la même vision de la vie qu'eux. » Le ton de sa voix était calme, voir même voilé d'une certaine tristesse. Elle ne voulait pas blesser Micah non plus, mais Helen voulait aussi lui expliquer son point de vue à elle : « Je suis chirurgienne, je ne sais que trop bien que la vie peut nous réserver des surprises... tant que tout le monde se porte bien, c'est le principal à mes yeux. » Alors, pour le moment, elle ne changerait rien à tout ça ; elle était prête à supporter davantage cette situation pesante, pour l'équilibre de leur famille. « HELEN !» La voix de sa mère retentit au loin, cette dernière lui intimait de revenir au cœur de la fête. Si c'était Lilian qui l'appelait, elle n'avait pas vraiment le choix. Elle se retourna alors vers Micah, avec un sourire désolé : « Je crois qu'il faut qu'on y retourne... désolée. » En voyant l'insistance de sa génitrice, Helen se mit à marcher tranquillement vers la foule, en ayant au préalable attendu que Micah soit à ses côtés : « Si ça te dit, qu'on se voit un de ces quatre... sans la famille, rien que tous les deux. » Elle prononçait cela sur un ton détaché, en insistant sur le "si ça te dit", comme s'il allait être le seul à le vouloir. Alors Helen précisa, pour montrer sa bonne foi, et ce caractère changeant de sa perception envers son cousin : « ça me ferait plaisir. » Finalement, ça ne lui brûle pas autant la langue que ce qu'elle aurait pu le croire.