Fallait pas prendre ce chemin. J'ai bien tenté d'te faire passer par la grande rue, celle qui mène directement à l’arrêt de bus, mais comme d'hab, t'en as fait qu’à ta tête, décidant de couper par la ruelle en pensant chopper le bus qui,
by the way, est déjà parti puisqu'il était en avance. Longeant l’allée sombre vers la route principale, tu tires ton casque de tes oreilles pour le laisser pendre autour de ton cou. C'est à ce moment que tu les entends. Les pas derrière toi.
Merde... T’accélères l'allure, mais ton suiveur en fait de même, et c'est là que tu commences à flipper. Juste au moment où tu t’apprêtes à jeter un œil derrière toi, une ombre se faufile de côté - t'as juste le temps de sentir un coup de vent et un frôlement avant que le type - d’après la silhouette - ne te dépasse rapidement sans se retourner.
Hein ? Qu'est-ce que... C'est en plongeant la main dans ta poche pour sortir ton portable - geste réflexe de sécurité - que tu te rends compte de ce qui vient de se passer. Un putain de pickpocket.
"Hé ho !" Toutes tes gardes s'abaissent d'un coup. Plus de peur, juste un élan de colère qui te fait pousser des ailes. L'ombre s’éloigne devant toi, de plus en plus vite, et tu te mets à courir pour la rattraper.
"Rends-moi mon téléphone, connard !" Cours, Forrest, cours. Mais il court bien plus vite - ça doit être un pro. Sans doute qu'il en pique au moins dix par soirée, de portables.
"REVIENS !" hurles-tu en atteignant enfin la grande rue, bruyante et lumineuse. Essoufflée, tu jettes des regards partout autour de toi, cherchant l'ombre à capuche. Impossible de retrouver le type, qui a sans doute profité du tournant pour se fondre dans les passants ou disparaître derrière un bâtiment.
"Putain de merde..." Dépitée, tu te penches en avant, mains sur les cuisses, un sifflement s’échappant de ta gorge - c'est pas une super idée de courir comme ça quand on a des vieux restes d'asthme, tu sais. Fumer non plus, d'ailleurs, mais comme je le répète : tu m’écoutes jamais. Tu plonges une main fébrile dans la poche avant de ton sac en bandoulière, sors un inhalateur et inspires une bouffée de ventoline. Une fois ta respiration calmée, tu fermes les paupières en te maudissant toi, le mec à capuche, ta malchance légendaire, et la Terre entière. Pourquoi toi ? Pourquoi ce soir ? Il te reste un trajet de vingt-cinq minutes en bus - soit une heure et demi à pied - pour rentrer, et sans ton portable, sans l'appli Uber et sans la carte de crédit que t'as glissée dans la coque tu téléphone, t'es... dans la merde.
- hj:
C'est l'heure de la rédemption, Maisie Moriarty !