A bout de souffle. Réellement, je l'étais comme rarement dans ma vie. Et pourtant je fais du sport tous les jours. Même quand je ne vais pas à la salle je fais en sorte de faire au moins un petit footing d'une bonne heure histoire de me mettre en forme. Et bien sûr ce matin c'est ce que j'avais fait. Et là, j'étais en train de le regretter amèrement. Mais c'est le genre de chose qu'on ne peut pas prévoir, comme le fait que celui que je voulais arrêter avait une sacrée enjambée, et bien plus grande que la mienne. La drogue semblait lui faire pousser des ailes que même moi je n'arrivais pas vraiment à surpasser. Parce que je n'étais pas non plus à des mètres de lui, non je n'étais qu'à deux ou trois mètres à tout casser. Mais la prise de substance trahit toujours le détenteur, il allait donc faire une erreur, et je n'avais qu'à prendre sur moi pour avoir de la patience et surtout l'endurance nécessaire pour tenir jusqu'à cette erreur que le pauvre petit camé allait faire. Et sans même que je ne puisse réellement l'attendre ni même m'y préparer, il se rentra une blonde de plein fouet à l'angle d'une rue après avoir mal atterri sur ses jambes. Quand je vous disais que leur sens s'affaiblit à la prise de la drogue … Ça, ça me désespère, mais ça m'énerve davantage quand ils mêlent des personnes innocentes et qu'ils les blessent. Mais je devais d'abord l'arrêter. Je n'hésitais pas une seule seconde et je donnais tout ce qui me restait pour courir les peu de mètres qui nous séparait et lui tombais méchamment dessus tellement que j'ai bien cru que je lui avais défoncé le menton. D'ailleurs il commençait à pisser le sang. Il avait qu'à se rendre cordialement, je n'ai vraiment aucun remord, ni aucune conscience en pareil cas. Vous allez bien ? Demandais-je à la jeune femme blonde qu'il avait violemment bousculé. Mais bien sûr il essaya d'articuler quelque chose, mais je lui en empêchais en lui plaquant encore plus la face contre terre C'est pas à toi que j'cause idiot. Je retournais mon visage sur la demoiselle au doux visage tout en lui souriant de façon attentionnée. Heureusement mon coéquipier arriva bien vite et je pus me redresser, et le laisser embarquer ce minable au poste.
Jordan traîne sa carcasse dans les rues de Brisbane, sans but, errance d’une âme en peine ou d’une profonde indécise. Elle a besoin de s’éclaircir les pensées, un joint y aiderait bien mais elle a pas le fric pour et Jay est une vraie salope avec sa collection. Elle marche, encore et encore, elle sait pas vraiment où elle va mais tout est bon pour échapper aux images de sa mère, immobile et respirant à peine. Ca la fout chaque fois à terre d’y aller mais elle doit, on fait pas toujours ce qu’on veut et puis…elle est pas conne Jordan, elle sait qu’elle est pas innocente dans la manière dont les choses ont évolué. Dans le temps, elle a cru bien faire, elle voulait juste aider mais rien de bon n’en est ressorti, juste un champ de bataille, du sang, des cris et des remords. Elle a besoin d’une clope, mais elle en a pas non plus, un délire qu’elle s’était faite de vouloir arrêter et de devenir clean. Elle sait même plus où elle avait la tête, pourquoi, comment, un pari avec Jay sûrement comme ils en faisaient beaucoup et puis merde. Elle accoste un passant, lui taxe une clope, sourire angélique et air aimable, on lui refuse rien à Jo quand elle fait cette tête. Elle le remercie, et s’en va clope bec, nicotine dans l’organisme qui l’apaise et puis sans qu’elle comprenne, un choc qui la propulse violemment au sol. Sonnée, paumée, elle bouge pas, elle se perd dans ses sensations, convoque sa raison et faut que quelqu’un se penche pour qu’elle reprenne ses esprits. « Ma cigarette » qu’elle murmure, pensive, oubliant où elle se trouve, oubliant que son bras droit lui fait mal. Finalement elle repère la clope qui a pas survécu au choc, bon tant pis qu’elle se dit, y a pire dans la vie. Elle se relève doucement pour finalement se retrouver face à un visage masculin inconnu. « Vous n’auriez pas une cigarette ? » qu’elle lui demande finalement, avec un petit sourire embarrassé. Elle sait que ça se fait pas mais elle a rien à perdre à essayer.
Le choc avait été violent. Tellement que la jeune femme bousculée s'était retrouvée à terre. Pauvre con. Heureusement qu'on avait réussi à le choper. D'ailleurs, à peine mon coéquipier lui avait mis les menottes qui l'emmena directement au poste. Il savait que je prendrais soin de savoir comment va la jeune femme. Elle ne semblait pas bien aller d'ailleurs, elle me demandait si je n'avais pas une cigarette. J'ai cru au début que j'avais mal entendu. Ses premiers mots, ses premières pensées étaient donc parties avec sa clope toute déglinguée à présent. Ca aurait pu être elle, et je suis sûr qu'elle a mal quelque part, mais elle ne semble s'en faire que pour sa cigarette. Etrange. C'est bien la première fois que je fais affaire à ce genre de réaction. Je fronce alors les sourcils, perplexe et lui répond simplement Heu non. Ca me désespère presque quand je vois une personne fumer et être accro à la nicotine. Ce n'est pas pire que la drogue dure, mais presque. C'est comme l'alcool, je suis loin d'être à l'aise avec cette idée. Mais c'est une drogue légale, et je n'ai rien à lui reprocher. Seulement mon travail consistait aussi de savoir comment elle allait. Vous allez pas me dire que l'état de votre cigarette vous importe plus que le votre ?! Lui demandais-je interloqué par la jeune femme qui ne m'avait pas répondu, et qui s'était empressée de me demander une clope. Je ne l'ai pas mal pris, il m'en faut plus, mais c'est assez désagréable quand on ne répond pas à ce qu'on demande. Mais ce n'est pas ce qui m'arrête, donc forcément je lui redemande la même chose d'une autre façon, histoire de bien lui faire comprendre que je veux vraiment savoir si elle va bien.
Il n’en a pas, bon tant pis, elle aura essayé. Il la fixe, il a l’air franc qu’elle se dit car son regard est assez expressif, dur, plein de jugements ? Elle ne sait pas trop. « Je suis pas accro, hein, je fume pas tout le temps… » elle parle, elle sait pas vraiment pourquoi, peut-être d’autorité qu’il dégage et qui l’écrase, la faisant se sentir petite-fille. Elle arrive pas à se l’expliquer, mais elle continue de parler « j’ai juste eu une longue journée… » lui aussi apparemment vu la scène qu’elle a distraitement observé. Elle se tait finalement parce que ça le regarde pas, parce que ça l’intéresse pas, parce qu’il a sûrement mieux à faire. « C’est pas ça » elle cherche ses mots, il a pas tort dans le fond, son sort elle s’en fout un peu, de toute façon, on crèvera tous un jour ou l’autre alors pourquoi s’en inquiéter, ça viendra quand ça viendra. « Juste que je tiens debout, je suis en un seul morceau » Elle offre un grand sourire pour appuyer ses propos, à force de volonté, elle parvient à passer outre la douleur qu’elle ressent sur tout le côté droit, ça finira par passer, comme tout dans la vie, faut juste l’accepter et se montrer patient « donc c’est pas si grave » qu’elle conclut finalement, son sourire étant toujours de la partie. Elle se sait dans le vrai, une fois qu’on a accepté ce fait, la vie est plus simple on se retrouve moins pris au dépourvu et en proie au désespoir. « Je vous remercie de vous en soucier » C’est la moindre des choses qu’elle puisse faire après lui avoir imposer de s’occuper d’elle. Il a sûrement mieux à faire, ça elle en doute pas.
Ce n'est clairement pas tous les jours que je rencontre une jeune femme comme elle, ou une réaction de ce genre. Et ça a le don de m'intriguer quitte à être indiscret. C'est mon métier après tout de l'être. Si je ne l'étais pas, je n'aurais pas toutes les informations nécessaires pour arrêter ces dealers et camés. Mais ce n'est pas vraiment dans mes habitudes d'interroger des « victimes » de la sorte, si on part du principe que la blonde en est une. Chose qui me surprend et en même temps m'impressionne. Elle devait à peine avoir la vingtaine passée, ou tout du moins elle n'en faisait pas plus, surtout face ses justifications qu'elle se rendit compte étaient surement de trop. Cela ne me regardait pas, mais elle avait du se sentir obligé, comme lorsque j'interroge mes témoins. Avec de la bouteille, on commençait à bien savoir s'y prendre avec un simple regard. En tout cas, elle avait subi une sacrée chute, et le fait qu'elle fume ou non m'importait peu, je voulais juste vérifier qu'elle ne soit pas blessée. Et quelque chose me disait qu'elle avait mal quelque part. Elle essayait de sourire, et c'était plutôt convainquant. Une « warrior » comme rarement j'en rencontre, c'est évident. Mais elle me scotcha sur place. Elle semblait si douce en même temps, et dissuasive de venir à son aide alors que je ne suis pas du genre à me laisser avoir de la sorte. Seulement elle n'avait rien fait et elle ne saignait pas comme un porc. Donc je ne pouvais rien faire, je ne voulais pas plus l'embêter, la chute avait bien été suffisante. Vous êtes sûre ? Lui demandais-je tout de même avant qu'elle ne m'échappe pour de bon. Vous n'êtes pas blessée ? Vous avez fait une sacrée chute … Je peux être chiant oui, mais au moins je serais sûr qu'elle peut se remettre à marcher pour rentrer chez elle en toute sécurité.
C'est rare qu'on se soucie autant de son sort, c'est pas normal qu'elle se dit, pas normal, bizarre même. Ses prunelles captent celles de l'inconnu et les lâchent plus. Elle essaie de comprendre, de trouver quelque chose dans son regard qui l'éclairerait dans ses pensées profondes, mais rien. Ca lui revient ce que Jax disait, personne est gentil comme ça, gratuitement, pour le plaisir, encore moins avec quelqu'un comme elle. Jordan est pas du genre méfiante alors elle chasse ça de son esprit, tout sourire pour répondre à sa question. Ouais elle est sûre, c'est pas grave, rien n'est grave, elle va rentrer, filer sous la couette et dormir jusqu'à demain. Puis en se réveillant si elle a encore mal, elle se noiera dans un bain ou un truc comme ça. j'ai un peu mal par ici -elle indique son bras douloureux mais rien d'insupportable elle décide de se montrer franche devant son insistance tout en le rassurant tout de même c'est gentil de vous en soucier elle a l'impression de passer la discussion à le remercier, ce qui veut dire qu'il faut rapidement y couper court bon je vais y aller moi, bon courage à vous pour... -elle cherche les mots, elle ne sait si c'est son boulot ou autre, en vrai elle a même pas eu le temps de piger ce qui se passait la suite ouais bon ça fera l'affaire qu'elle se dit, c'est pas une grande curieuse au revoir monsieur, au plaisir pas dit qu'ils se revoient mais qui sait, Brisbane est une petite ville et le destin fait très souvent dans les évènements tordus.
Cette jeune femme m'intriguait. Elle avait un comportement que je n'avais jamais encore observé et je me demandais bien ce qu'il se passait dans sa tête. Mais à faute d'avoir ce genre de réponses, je préférais insister pour savoir si elle allait vraiment bien, et elle me faisait savoir qu'elle avait une douleur au bras qu'elle pouvait supporter. Tant qu'il n'y avait rien de grave, ni rien de casser, je suppose que c'était ce qui importait. Mais le fait qu'elle ne veuille vraiment pas d'aide de ma part me faisait un peu de peine aussi. Je fais aussi mon métier pour aider mon prochain, et c'est comme une drogue pour moi. Ironique oui, mais la mienne n'a jamais fait de mal à personne. Peut-être un peu à moi quand je reçois déception sur déception. Mais ça reste relativement rare. En général on accepte assez facilement mon aide. Seulement avec cette blonde, je n'ose rien faire de plus. Lui proposer de la raccompagner serait trop déplacé et la ferait certainement flipper. Pas sûr, vu qu'elle n'avait pas eu peur avec cette bousculade. Je suppose que c'est le comportement à avoir, mais ça a quelque chose d'inquiétant. Et si elle n'avait pas peur alors que c'est nécessaire ? Mais avant que je ne cherche à comprendre davantage, elle décida de s'éclipser tout en restant extrêmement polie alors que je la regardais encore interloqué Au revoir. Lui avais-je simplement répondu par reflex. Je me retrouvais comme un con, ne sachant plus quoi faire. Rejoindre mon coéquipier ? Il était déjà parti et je pouvais toujours le rejoindre au post ou au bureau ou rentrer chez moi. Mais non, je voulais m'assurer que la jeune blonde rentrerait saine et sauve chez elle. Comme un pressentiment, comme pour me rassurer, je me suis mis à la suivre, espérant qu'elle ne flippe pas trop si elle me repère.
Le souvenir de l’inconnu reste encore quelques minutes dans sa petite caboche, elle aurait peut-être dû lui demander son prénom qu’elle se dit, se présenter avant et savoir comment il s’appelle ensuite. Ou peut-être pas, quel serait l’intérêt ? Elle sait pas trop, sans doute trop polie la Jordan, mais la curiosité est quand même là, c’est pas tout le temps qu’elle intéresse quelqu’un à ce point, enfin son sort donc elle l’aurait bien remercié un peu plus. Et puis, réflexion faite, ça lui aurait plus perdre son temps qu’autre chose, il est pas comme elle, il doit être occupé à des trucs importants. Elle se frotte un peu le bras, tire son t-shirt pour remarquer un superbe bleu, m’enfin, elle s’en émeut pas plus que ça, elle marque vite la Jordan, souvent pour des contacts ridicules, elle ferait une mauvaise femme battue se moque Jay à chaque fois qu’elle se plaint de ses marques. Tête en l’air, elle entre de plein fouet dans un corps inconnu, décidément c’était sa journée mais la différence cette fois c’est que ce n’est pas un inconnu, bien au contraire ! « Jay ?! Qu’est-ce que tu fous là ? » qu’elle s’exclame, étonnée, il était si tard que ça ? Elle a perdu le fil, il avise un café et lui ordonne d’y entrer, il a envie de sa drogue quotidienne, soumise, elle obtempère sans broncher.
blabla:
Hey ! Je te propose qu'on boucle celui-ci là et que l'on passe à celui du bar comme on en avait discuté, t'en penses quoi ?
Je regrettais vraiment de m’être mis à la suivre, je regrettais à chaque pas que je faisais, mais ma conscience ou mon instinct me disait qu’elle devait être un minimum escortée jusqu’à chez elle, histoire qu’elle arrive saine et sauve. Après je repartirais dans mes affaires, incognito. Sauf que ça ne se déroula pas du tout comme prévu, non. Elle bouscula de nouveau un type, mais ne tomba pas à terre cette fois-ci, et il me semblait de là où j’étais qu’elle lui souriait même. Ou pas. Peut-être lui parlait-elle tout simplement. Cette hypothèse fut bien confirmée puisqu’ils se dirigèrent ensemble dans un petit bar assez miteux que je reconnaissais. C’est à ce moment même que j’aperçus le visage du type qui l’accompagnait. Manquer plus que ça. Une chose est sûre, mon instinct ne me faisait pas défaut aujourd’hui. C’était un pauvre type, un camé qui plus est, que j’avais fait coffré plusieurs fois pour possession de drogue mais qui avait surtout de très mauvaise relations. Je ne pouvais pas laissé cette jeune femme se faire embrigader. Il fallait vraiment que je trouve une solution et la meilleure qu’il m’est venu pour le moment, c’était de continuer à la suivre et de rentrer dans ce fameux bar. En espérant que tout se déroule pour le mieux. En espérant que je trouve rapidement un plan pour me débarrasser de ce type dont j’avais totalement oublié le nom et que je sauve une deuxième fois cette jolie blonde qui avait le don de se mettre dans un sale pétrin deux fois dans la même journée.