knock knock lady luck
Spencer Blackwell & @Isabel Flores

Soirée tranquille en perspective, pas de table spéciale, juste des clients lambdas avec bien plus de pognon que ce que t’auras jamais, mais hé, si ça les amuse de le flamber et d’au passage laisser quelques pourboires bien gras directement dans le creux de ta main, tu vas pas t’en plaindre. Ton banquier est plutôt content, même, ça fait deux ans que t’as plus eu le moindre découvert, que tu payes tes factures en temps et en heure et que tu dépenses peu, une vraie citoyenne modèle. (Faut bien rattraper les vingt-cinq dernières années à un moment donné, bon.)
En pleine préparation de ta table pour commencer à accueillir les clients incessamment sous peu, c’est à peine si tu prêtes attention aux pas tout sauf discrets qui se rapprochent de ta position. Ce n’est que lorsqu’on t’interpelle que tu daignes lever les yeux, pas franchement certaine que c’est bien à toi qu’on s’adresse. Coup d’oeil à droite puis à gauche, il n’y a personne d’autre pourtant. Face à toi, une des serveuses qui enchaîne avec aplomb, te laissant perplexe. « Ce que je fais…? » L’espace d’un instant, tu crains qu’elle soit le genre de personne trop observatrice pour son propre bien, que d’une manière ou d’une autre elle ait flairé la combine pourtant bien rodée. Méfiante mais pas hostile, tu te contentes de l’écouter alors qu’elle continue sur sa lancée.
Visiblement confuse face à la proposition qui suit, t’en restes sans voix, incapable de même répliquer un bête “mais t’as genre douze ans, calme toi un peu, non ?” qui aurait été bienvenue pour directement calmer ses ardeurs avant que ça n’ait la chance d’aller plus loin. Y a un instant de flottement un peu gênant pendant lequel tu la regardes la bouche légèrement entrouverte et elle s’empresse de corriger, corrigeant ainsi l’énorme quiproquo qui était à deux doigts de prendre toute la place dans la conversation. Instantanément, tu te retrouves soulagée et surtout tu te sens un peu conne d’avoir directement sauté à ce genre de conclusion. « Écoute- » rapide coup d’oeil au petit badge doré épinglé sur son veston, « Isabel, » légère pause, ton regard retourne accrocher le sien avant de reprendre. « Je sais pas trop ce que tu cherches comme coup de main, mais je suis probablement pas la personne la plus qualifiée pour ça. » C’est même carrément certain. Si c’est des conseils qu’elle veut, y a des gens bien plus compétents au sein du casino. Pour les problèmes d’argent et les formations à prendre, t’es à peu près sûre qu’il y a possibilité de s’arranger avec le comptable pour que ça soit pris en charge et qu’elle pourra rembourser tout ça par la suite. « Puis j’suis à peu près sûre que les deux roues ont une dent contre moi. » Pas que t’aimerais pas apprendre à faire de la bécane ou quoi, mais t’es déjà à deux fractures du bras à cause d’un vélo, alors une moto, t’imagines même pas.

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Spencer Blackwell & @Isabel Flores

La petite brune te corrige instantanément sur le prénom, préférant visiblement une version raccourcie lorsqu’on s’adresse à elle. Soit, si ça peut lui faire plaisir. Sa remarque te fait doucement sourire, visiblement elle fait partie des rares personnes du casino à ne pas connaître ton lien de filiation avec la patronne. Sans quoi, elle aurait fait comme tous les autres en pestant au favoritisme sur ton passage et en remettant en cause ta capacité à assumer un tel rôle. Ca a pris du temps et du travail, de leur prouver que t’étais capable et que ta place était aussi méritée que la leur.
Isabel - Bel - débite, plaide sa cause et son envie de changer de poste et t’es bien surprise de la ferveur dont elle fait preuve. Visiblement ce qui pêche pour elle, c’est la dextérité pour manier les outils. Ca s’apprend, c’est pas la question, mais c’est un sacré boulot. « T’as essayé les tutos YouTube ? » Mac s’est à moitié foutu de ta gueule quand t’as passé des heures devant, au début, que t’as ragé de ne pas réussir à comprendre telle ou telle manipulation du premier coup. Et dans le même temps, elle a été ta première supporter slash coach afin que tu ne lâches pas l’affaire parce que c’était soit trop dur, soit trop long à assimiler.
Un léger soupir t’échappe alors qu’elle n’en démord pas. Elle continue à te proposer tout un tas de services comme pour prouver son ambition et sa détermination à avoir le dernier mot. Un peu machinalement, ta main se pose sur le paquet de cartes devant toi, ton pouce soulevant les tranches de chacune d’entre elles à répétition. « Admettons que je garde la proposition de petsitter de côté, » hypothétiquement, pour le moment, qu’elle évite de s’emballer tout de suite, « t’as conscience que c’est pas qu’une histoire de manipuler des cartes et des jetons, hm ? » Ca, c’est juste la façade du métier. Il faut savoir observer ses joueurs et repérer les failles aussi bien que les fraudes, faut être capable de les laisser suffisamment gagner pour leur donner envie de revenir et de flamber encore plus, faut trouver le bon moment pour mettre un terme à une lucky streak, il faut garder son professionnalisme en toutes circonstances et tellement d’autres choses encore. Pour l’heure, tu ne t’amuses pas à le lui détailler, ça viendra bien assez tôt dans le courant de la discussion. « Pourquoi tu veux faire ce job, exactement ? » En vérité la paye et les pourboires ne sont pas si différents que le poste de serveuse (pour un poste classique, en tout cas.) A titre personnel, la seule vraie raison pour laquelle t’es là, c’est les extras. « Tu vois quelqu’un ? » Peut-être un peu trop direct, mais tu précises rapidement le fond de ta pensée. « Parce que c’est des horaires de chien et ça peut être… compliqué à gérer. » Ca l’est aussi en étant barmaid, t’es passée par là avant d’arriver derrière les tables de jeu, mais dans la mesure où y a pas autant de croupiers, ça ça ne tourne pas de la même façon au niveau des shifts. C’est vivre en décalé de l’autre la plupart du temps et toi-même tu te demandes comment tu fais, parfois. Il est probable qu’à l’instant où ta dette sera complètement remboursée, tu demandes à retourner servir des verres ou que tu tentes carrément de faire un autre boulot.

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Spencer Blackwell & @Isabel Flores

« Disons qu’il y a mieux comme job pour s’épanouir dans ses relations. » Bon, c’est pas excessivement mieux en bossant derrière le bar ou en allant servir des verres à une clientèle fortunée et pas toujours respectueuse des employés, mais ça offre un peu plus de liberté. A moins que ça ne soit ton poste en particulier qui te stresse un peu trop et que t’as tendance à appréhender la chose différemment.
Mais bref, tu passes au-dessus et tu recentres ton attention sur la petite brune. Pour l’instant sans réponse quant à ta question sur la raison qui la pousse à vouloir devenir croupière, tu ne peux t’empêcher de sourire face à la répartie mordante dont elle fait preuve. « Oui voilà, bonne idée, » tu renchéris l’air de dire “fais donc ça”, « il sera sûrement ravi de te prendre sous son aile. » Et bien meilleur professeur, qui plus est. Par contre, il serait bien du genre à jouer sur les mots et à profiter à fond des propositions un peu maladroites d’Isabel au point d’en devenir bien trop lourd voire même un poil flippant. Merde, le simple fait d’y penser et t’as déjà des remords à l’idée de l’envoyer ramper vers ce type. Nouveau soupir en jetant un œil à l’horloge murale. « Allez, t’sais quoi, je vais te laisser une chance de me convaincre que ça sera pas une perte de temps pour moi. » Trop magnanime, la meuf. C’est culotté de ta part dans la mesure où t’es toi-même venue réclamer de l’aide pour rembourser tes dettes, que ta seule vraie difficulté a été de suivre les quelques cours gracieusement offerts par l’ancien patron, puis d’améliorer tes compétences avant d’avoir le poste. Mais tout ça, elle n’a pas à le savoir. Si ça se trouve, l’idée de devoir te prouver quelque chose là, maintenant, sans y avoir été préparée, sera suffisante pour la dissuader de traiter avec toi. « Viens là, » d’un pas, tu t’écartes de ta place de croupière pour la lui laisser. Toi, tu vas t'asseoir à la place d’un joueur, profitant de leur absence pour la demi-heure à venir. Mains croisées sur la table, tu ne lâches pas la jeune fille des yeux. « Ok, donc, tu connais les règles du blackjack, hm ? » C’est en tout cas ce qu’elle a prétendu il y a à peine une minute. Peut-être qu’elle a déjà joué avec des potes, qu’elle s’est contentée d’observer comment une table fonctionnait ou qu’elle a potassé la théorie. Dans tous les cas, une mise en pratique même factice reste tout de même bien plus révélatrice que de la simple parlotte sur ses potentielles motivations. « T’as trois joueurs à ta table, » toi, plus deux fantômes à qui tu attribues quelques jetons pour indiquer où ils se trouvent sur la table, « mets en place et deal. » Tu te fiches bien de savoir si elle est gauche dans sa façon de mélanger les cartes ou de les distribuer, elle apprendra en temps voulu si c’est ce qu’elle veut vraiment, tu veux juste voir si elle se laisse démonter face à une situation imprévue ou un gentil coup de pression. D’un geste de tête, tu l’invites à se mettre à l’oeuvre rapidement, insinuant ainsi qu’elle a tout intérêt à prendre l’exercice au sérieux. « Si tu te foires pas trop, j’envisagerai de te filer un coup de main. » Et tu ne tiens pas à entendre parler de services rendus en échange, t’es pas là pour vampiriser ceux qui en sont réduits à venir te demander ton aide à toi.

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Spencer Blackwell & @Isabel Flores

A vrai dire, tu te fiches pas mal de savoir si elle connaît les règles sur le bout des doigts, c’est pour ça que sont faites les formations et les approfondissements. Ce soir, ce que tu veux voir, c’est sa capacité à faire semblant, à garder la face alors qu’une difficulté quelconque vient lui barrer la route sans qu’elle s’y attende. Rien de bien sorcier lorsqu’on sait comment faire, et si toi tu y arrives, n’importe qui en est capable. Tu lâches tes instructions, observant la moindre de ses réactions et de ses gestes, allant jusqu’à remarquer le plus petit tic de son sourcil ou la façon dont ses doigts hésitent parfois. Elle ne se défait pas pour autant, Isabel, elle joue le jeu et c’est tout ce que tu demandais.
Le plus drôle dans tout ça, c’est que t’as aucune foutue idée de comment t’es supposée lui enseigner quoi que ce soit. T’as jamais été bonne élève, en classe t’as toujours été dans la moyenne basse et tu sais juste que t’es pas qualifiée pour ce genre d’exercice. T’imagines qu’elle s’en rendra compte à un moment donné, qu’elle trouvera une excuse vaseuse pour aller voir ailleurs si elle trouve mieux et tu ne pourras que l’y encourager. Pour l’heure, ton regard est braqué sur ses mains, glisse vers son visage et ses traits tirés par la concentration, puis vers les cartes qui glissent un poil trop loin lorsque distribuées, mais ça n’a aucune importance dans l’immédiat. Pas d’erreur notable, elle s’en sort plutôt bien pour quelqu’un qui s'entraîne à coups de tuto YouTube, il faut l’admettre. “C’est à vous de jouer”, qu’elle dit une fois la dernière carte posée. Un coup d’oeil rapide à ta main, As et sept, un jeu intéressant qui te pousse à tenter un petit piège facile et évident pour n’importe quel débutant. « Ok, hit, » que tu dis en même temps que tu tends ta main vers le paquet pour te servir toi-même, te mettant dans la peau d’une joueuse un peu trop confiante et impatiente à l’idée de recevoir sa prochaine carte. Si ce genre de situation arrive assez rarement, il faut garder en tête que le culot de certains joueurs n’a que peu de limites. Sous prétexte qu’ils ont les poches remplies de billets et le foie imbibé de whisky trop coûteux, ils se pensent souvent tout permis et n’auront aucune hésitation à tenter de s’approprier la table autour de laquelle ils sont conviés. Généralement un simple rappel à l’ordre est suffisant pour calmer leurs ardeurs et s’ils sont du genre trop têtus et n’ont que faire des instructions d’un croupier, c’est alors la sécurité qui se chargera d’eux. Bien évidemment dans ce cas précis, ça n’ira pas aussi loin.
Qu’elle réagisse comme tu l’attends ou pas, ta décision est déjà plus ou moins prise ; tu vas lui filer un coup de main dans la mesure du possible, tu trouveras bien un truc ou deux et peut-être que t’essaieras d’aller toucher un mot au comptable pour voir s’il est possible de faire financer sa formation. D’ici là, « si c’est de l’aide que tu veux, va falloir trouver des créneaux, » terminé le personnage du cliente trop à l’aise, c’est Spencer qui s’adresse à Bel, « c’est quoi tes dispo ? »