Ils ne veulent pas annuler la clinique d’aujourd'hui. C’est dans des moments comme ceux-ci qu'on réalise qu’un hôpital est une business comme une autre où ceux d'en haut pensent au budget plutôt qu’aux humains. C'est la santé des êtres humains qui paient les frais de leur erreur. Ou de leur gourmandise. Leslie n'était pas particulièrement friande à l'idée de prendre en charge des patients qui n’étaient pas les siens, de faire des suivis alors qu’elle n'avait pas entendu l'histoire originelle. Elle ne serait pas à l'aise de le faire avec des adultes. Elle l'est encore moins avec des enfants. Oh, elle adore les gosses. Surtout ceux des autres qu’elle n'a pas à s'occuper dès qu'il devient des monstres. Le problème vient toujours des parents. Passer une journée entière à dealer avec des parents ? Pas tellement envie, non. Mais bien sûr, son supérieur sait comment lui faire faire tout ce qu’elle veut. Elle est leur dernière chance. Ils devront annuler une dizaine d'enfants aujourd'hui si elle refuse. Les suivis prendront du retard et blablabla. « Bon, d’accord, s'il n'y a aucun cas complexe. » Qu’on lui mette pas sur le dos un cas de cancer infantile. Ils lui ont assuré que c'était pour la plupart des suivis annuels. Leslie ne leur fait pas totalement confiance. Ils diraient n'importe quoi pour qu’elle ne se désiste pas.

La matinée se passe sans problème. La plupart des parents trouvent étrange d'être servis par un autre médecin, mais n’en font pas de cas. En fait, tout se passe bien jusqu'à ce qu’elle prenne le dossier suivant : Riley Daxson. Pourvu que la gamine soit là avec sa mère. Elle se lève du bureau pour aller dans la salle d’attente. Évidemment que ce n'est pas la mère de Riley qui est avec elle dans la salle d'attente - enfin, elle ne reconnaîtrait jamais l’enfant sans l'un de ses parents. C'est bel et bien son ancien beau-frère qui est avec elle. Et il semble plus que surpris de te voir. Tu m’étonnes. "Leslie ... Je savais pas que tu étais de retour." - « Ça ne fait que quelques jours. J’imagine que Eve n’a pas encore eu le temps de te le dire. » Ou alors c'était une information qu’elle n’avait pas jugé nécessaire de partager avec son frère. Personne ne serait vraiment surpris que Eve ne prenne pas le retour de son ex au sérieux. Et tout le monde la comprendrait. "Le docteur Ellis n'est pas là ?" - « Il a eu un empêchement de dernière minute. Tu peux toujours reporter l’examen si tu préfères que ce soit lui qui évalue Riley. » Leslie n’a aucun problème à le faire elle-même. Pour avoir consulté le dossier rapidement, ce sera vite fait. Jayden n'a peut-être pas envie de répondre aux questions personnelles qu’elle doit lui poser par contre. En fait, Leslie est convaincue qu'il n'a pas envie d'en parler avec elle. Elle peut toujours faire la moitié de la consultation pour gérer le physique et laisser le psychologique dans les mains de quelqu’un d'autre. De toute façon, ça sort de son domaine de compétence.

"Non, effectivement, elle ne m'en a rien dit." L’ambiance est.. tendu ? Disons que le malaise est palpable. Leslie affiche un petite moue désolée. Elle n'est pas particulièrement désolée que Eve n'ait pas communiqué les dernières nouvelles à son frère. Ce n'est pas son problème, et ça le regarde plus ou moins. Elle est plutôt désolée de cet imprévu qui le rend mal à l'aise. Pour un rendez-vous comme celui-ci, mieux vaut pouvoir discuter avec une personne avec qui on est à l'aise. La médecin a de forts doutes que Jayden ait envie de lui parler de son quotidien. C'est la raison pour laquelle elle lui propose de déplacer son rendez-vous au retour du Dr. Ellis. Elle fera son possible pour qu'il n'y ait pas trop d'attente avant le prochain, mais, elle n’a que très peu de pouvoir ici. Elle ne peut pas faire de changement aux horaires probablement déjà plein du médecin. "Non. On est là ... on va rester." Elle a presque envie d'insister. Pas parce qu’elle ne veut pas se taper le boulot, mais plus parce qu'il ne semble pas particulièrement convaincant dans sa réponse. Elle ne va pas se vexer s'il annule l'examen - quoique Leslie doute qu’il en ait quelque chose à faire qu’elle soit vexée ou pas. "Je ne sais pas quand je pourrais la ramener." Elle ne peut que comprendre que ça prend énormément d’organisation pour se libérer pour les rendez-vous des enfants. Il manque sûrement du travail pour être ici. Déplacer le rendez-vous veut aussi dire s’absenter une autre journée. "On te suit." qu’il confirme finalement en se levant de sa chaise avec Riley. « Très bien. C'est par ici. » qu’elle lui dit en lui faisant signe de la suivre.

Elle les laisse entrer d'abord dans la salle d’examen, puis, elle prend place sur la chaise derrière le bureau. Elle consulte une dernière fois le dossier de Riley pour être certaine de ne rien oublier, puis relève la tête vers Jayden assis en face d’elle. « Ça ne devrait pas être très long. » qu’elle débute autant pour le soulager lui qu’elle. Tu n'auras pas à supporter ma présence trop longtemps. « Le Dr. Ellis veut qu’on refasse un bilan sanguin. » qu’elle poursuit en remplissant l'ordonnance pour qu'il puisse aller faire les prises de sang avec Riley au laboratoire. Elle glisse ensuite la feuille devant lui. « On doit aussi vérifier qu’elle continue de prendre du poids. » Parce qu’elle était largement sous sa courbe de poids lors de sa première hospitalisation. Sans doute qu’elle n'a pas mangé à sa faim durant les mois précédents, que ce soit par choix ou par imposition. « Sinon, comment ça se passe à la maison ? Riley s’adapte bien à son retour ? » Parce qu'il a aussi spécifier de vérifier le psychologique de l’enfant, de la diriger vers un spécialiste au besoin.

"C'est pas grave si ça prend un peu plus de temps. J'ai mon après-midi." Temps mieux pour lui, mais ce n’est pas le cas de Leslie. Elle a un horaire chargé à respecter et n’a pas particulièrement envie d’éternisé sa journée. Et puis, ils ne commenceront pas à faire semblant de vouloir prendre des nouvelles l’un de l’autre. Donc, non, aucune raison pour que ce rendez-vous soit plus long que prévu. C’est pas contre lui. C’est juste qu’elle est pas assez bête pour croire qu’il se soucie d’elle le moindrement. L’époque où ils étaient copains tous les deux, ça appartient à une autre vie. Bref, Leslie enchaîne rapidement sur les différents examens à faire selon la demande de son médecin, puis elle demande comment ça se déroule à la maison sans trop savoir s’il était à l’aise d’aborder un sujet aussi intime et sensible avec elle. "Elle a un peu de mal à comprendre que Lisbeth et moi, on ne vit plus ensemble." Ce qui est tout-à-fait normal même sans ce qu’elle a traversé. Ça demande toujours une période d’adaptation quand on vient chambouler le quotidien d’un enfant. C’est pas facile pour eux de comprendre qu’à partir de maintenant, ce sera différent. Leslie se demande si leur séparation est due à la disparition de leur fille. Après tout, ça doit mettre un couple à rude épreuve. Heureusement pour tout le monde dans cette pièce, elle est encore assez professionnelle pour ne pas satisfaire sa curiosité mal placée. "Quoi qu'elle a compris qu'elle pouvait avoir deux fois plus de jouets." Elle sourit doucement à cette pensée. C’est bien le pansement que doivent se mettre tous les enfants de couple séparé. Tout avoir en double. C’est cool au début, mais ça fait son temps. « Faut pas s'en faire avec ça. Les enfants s’habituent plus rapidement que les adultes. » qu’elle lui répond. La brune sait parfaitement de quoi elle parle. Ella s’est intégré dans sa famille rapidement, facilement même. C’est peut-être plus facile de passer de un à deux parents que l’inverse, mais bon, on peut tout de même dire que Leslie s’y connaît plutôt bien en garde partagée. Elle peut parler en connaissance de cause. "Elle me parle pas vraiment ... de ce qui s'est passé. Et je dois avouer que c'est dur de ne pas savoir." Elle ne peut définitivement pas comprendre ce que sa famille traverse - et heureusement. Mais, elle se doute que ça ne doit pas être facile effectivement. "Peut-être qu'elle a oublié. Et c'est peut-être pas plus mal." Parfois le corps est bien fait. Il nous fait oublier ce qu’on ne peut pas supporter, mais ça reste toujours ancré en nous d’une manière ou une autre. Ça ne reste pas sans conséquence. « J’crois pas qu'on puisse totalement oublié. » qu’elle débute. Non, le silence de Riley ne les aide pas vraiment à savoir sur quel pied danser. « Est-ce que vous avez besoin de rencontrer quelqu'un pour en parler ? Tu as l'impression qu'elle en a besoin ? » qu’elle lui demande ensuite pour savoir si elle doit leur donner une ordonnance pour rencontrer un spécialiste. « Personnellement, je crois qu'elle devrait consulter un psychologue au moins une fois. Il sera mieux placé que tout le monde pour savoir ce qui sera le mieux pour Riley. » Juste une fois. Peut-être qu’un psychologue dira qu’elle n’a pas besoin de suivi. C’est mieux d’y aller pour rien plutôt que ça éclate plus tard et qu’il soit possiblement trop tard justement. Ça ne reste qu’un conseil. La discussion lui appartient.