Everything has its beauty, but not everyone sees it.

@Norah Sawyer & Oscar

Oscar avait perdu la flamme, il ne savait plus bien quand c’était arrivé, quand il avait arrêté de s’enfermer dans son bureau pour se plonger dans la peinture, pour s’immerger totalement dans cette passion qui lui faisait perdre le fil du temps. Probablement, que l’arrêt avait été progressif et avait coïncidé avec la dégradation de son couple. À bien y réfléchir, Oscar avait toujours marché avec des muses, des femmes qui l’avaient inspiré, non pas qu’il les peigne toujours elle, mais elles avaient su allumer quelque chose dans son esprit. La première avait sans doute été Olive, sa petite sœur, dernière arrivée de la fratrie. Il était alors en âge de comprendre un peu mieux le monde, et ce petit être créé de toute pièce par ses parents l’avait subjugué. Peu de temps auparavant, en fouillant le grenier, il était tombé sur des tonnes de dessin de sa cadette. Ensuite, il y avait eu Elisa, celle qui est devenue bien plus tard sa femme. Quand il l’a rencontrée, il avait à peine 11 ans, et pourtant, elle l’avait de suite subjugué, intéressée, intriguée… Elle était devenue l’objet de tous ces dessins, et quelque part n’avait jamais cessé de l’être, bien qu’il ne l’ait pas vu pendant 10 ans. Aux fils de ces années, d’autres avaient pris le relais, mais jamais aussi intensément qu’Elisa. Puis, quand il avait revu Elisa, la passion pour l’art était devenue aussi débordante que celle qu’il avait partagée avec elle. Il avait vécu ses meilleures années… Finalement, les épreuves de la vie avaient terni leur couple et toute son inspiration. Au point que l’idée même de tenir un pinceau avait fini par s’évaporer, ne le laissant puiser ses ressources artistiques plus que dans celles des autres en écumant les musées et les expositions. 
 
Puis il y avait eu Norah, jamais il ne l’avouerait à haute voix, parce que c’est une gamine, à peine sortie de l’adolescence, la fille d’un de ses clients, rencontré à une soirée mondaine où sa femme l’accompagnait quelques mois auparavant. À peine les yeux posés sur elle qu’il avait ressenti cette envie, cette passion. Elle avait tout ce qu’il avait tant aimé chez sa femme, et qu’il ne retrouvait plus que lorsqu’ils jouaient le jeu du couple parfait en public. Cette étincelle si particulière, son regard pressant et vif. Cette gamine avait réveillé en lui quelque chose d’endormi depuis trop longtemps… Et il avait recommencé à peindre. Tous les soirs, il s’enfermait pour coucher sur le papier ce souvenir qui semblait déjà s’effacer. Ensuite, il l’avait aperçu sur le campus, à plusieurs reprises, lui permettant juste, dans un échange de regard et un sourire, d’attraper suffisamment pour le nourrir artistiquement. Mais depuis plusieurs semaines plus rien, elle était comme évaporée, le laissant seul avec ses pensées. Inquiet de perdre la flamme, il avait finalement décidé de reprendre les cours arrêtés depuis trop longtemps. 
 
C’est comme ça qu’il se retrouve à passer la porte du cours de dessin, avec un peu d’appréhension. « Oscar, je suis vraiment heureux de te revoir. » Une accolade avec Henri, le prof le plus extravagant, mais aussi le plus doué qu’il n’ait jamais eu. Habillé ce soir de 5 couleurs différentes, un béret collet sur la tête, il semble toujours venir d’une autre planète. « Installe-toi ici. » Il lui montre un tabouret, et quand son regard dévie un peu sur le siège à côté, il lui semble qu’il va défaillir. Elle est là… Sa muse, son inspiration, juste à côté de lui à ce cours de peinture, ça lui semble improbable. Il garde pourtant contenance, il a toujours été bon pour cacher les émotions, les laisser à peine pointer. S’installant à côté d’elle et lui adressant un sourire amical. « Je crois qu’on s’est déjà rencontré, Norah, c’est juste ? » Il lui tend sa main. Une comédie bien jouée parce qu’il est évident qu’il n’a jamais oublié son prénom. 

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Dernière édition par Oscar Sterling le Mar 8 Oct 2024 - 0:05, édité 2 fois

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@Oscar Sterling & Norah Sawyer

Alors que ses études avaient touché à leur fin, Norah pouvait de nouveau vaquer aux occupations qu'étaient les siennes avant son arrivée à Brisbane. Outre le fait qu'elle devait s'acclimater à ce nouveau cadre de vie, la Sawyer avait dû faire des sacrifices pour assumer ses études de droit, demandant à la fois temps et rigueur. Forcément, c'était ses passions qui en étaient les premières touchées, en particulier la peinture. Si elle appréciait l'art dans son intégralité, c'est l'art pictural qui avait su attiser sa curiosité. N'en déplaise à ses parents qui auraient préféré qu'elle se focalise sur des choses plus importantes, force était de constater que ce n'était que devant une toile qu'elle se sentait libre, qu'elle pouvait s'exprimer pleinement. Le crayon était le relais entre son imagination et la réalité, les couleurs le témoin de ses émotions et souhaits. Elle était très jeune la première fois qu'elle avait un pinceau entre les mains et depuis, ses compétences en dessin et en peinture avaient eu le temps de se développer. Plus qu'un passe-temps, elle posait sur une toile le fruit de ses tracas, devenant à ce titre – en plus d'une passion – un besoin quasi thérapeutique. C'est pour cela qu'elle continua à peindre lorsqu'elle avait un moment. Même si cela se comptait en minutes, il lui fallait ces moments devant son chevalet. Car 'en éloigner allait être tellement déchirant, ce qu'elle n'aurait pu supporter trop longtemps.

Norah a toujours peint en autodidacte. Elle se fiait à son oeil artistique, à ses intuitions et à ses envies, s'inspirant des livres et des vidéos qu'elle pouvait trouver sur internet. Cela lui avait suffi un temps, notamment pour peindre des paysages très réalistes ou des natures mortes élaborées. Mais c'est en ayant eu ce date insolite avec Angelo où ils durent peindre des nus que la Sawyer s'est heurtée à une dure réalité : il lui manquait certains aspects techniques pour développer davantage son maniement du pinceau. Elle n'avait jamais peint quelqu'un avant ou alors juste des ombres, jamais un corps entier avec ses formes et ses expressions. Pour elle, l'exercice semblait impossible, elle ne savait pas par où commencer. Pourtant, elle avait essayé d'appréhender la chose à travers des tutoriels sur YouTube comme elle avait pu le faire par le passé mais rien y fait, Norah avait comme un blocage. Elle s'était pourtant donnée le challenge d'y parvenir car elle avait un beau projet en perspective mais elle devait se rendre à l'évidence, elle avait besoin d'aide. Alors, elle avait décidé de s'inscrire à des cours de peinture en ville, justement pour apprendre les techniques de dessin lui permettant d'esquisser les silhouettes de manière réaliste et compléter ainsi ses possibilités artistiques. En plus, elle venait de terminer son semestre de droit pénal, lui libérant suffisamment de temps pour aller à son premier cours. Norah avait préparé toutes ses affaires, tout son matériel – elle aurait même pris son chevalet si elle avait pu le porter – pour le jour j. Forcément, elle avait un peu d'appréhension. Elle ne savait pas le nombre de personnes qui assisteraient à ce cours, ni ce qu'ils allaient faire précisément, ni le niveau des autres participants. Elle qui avait tout appris par elle même avait peur d'être ridicule à côté de celles et ceux qui auraient commencé la peinture auprès de professionnels. Mais elle essayait de ne rien laisser transparaître et gardait son sourire naturelle, son meilleur allié lorsqu'elle ne voulait pas montrer ses angoisses.

Norah arriva en avance, comme à son habitude. Elle salua le professeur et se présenta, un curieux personnage avec qui elle passerait sans doute de très bon moment. La personnalité de Henri était suffisante pour que la Sawyer se détende un peu et s'installe sereinement devant un chevalet. Et c'est en déballant ses affaires qu'elle entendit une voix familière, voix qui échangeait les premières familiarités avec le professeur puis qui s'approcha d'elle avant de l'interpeller. « Je crois qu’on s’est déjà rencontré, Norah, c’est juste ? » Elle releva doucement le menton, tournée vers son nouvel interlocuteur qu'elle reconnut sans trop de mal. Après tout, elle était une grande observatrice et se souvenait très bien des visages. « Monsieur Sterling. Vous peignez vous aussi ? » Ses prunelles noisettes traduisant sa surprise, elle répondit en acquiesçant et en lui tendant sa main en retour. Oscar Sterling, architecte qui avait travaillé pour ses parents sur un projet et qui a déjà été invité à des évènements organisés par la famille Sawyer. Norah avait pu le croiser une seule fois et pourtant, les quelques mots qu'ils s'étaient échangés l'avaient suffisamment marquée pour qu'elle se souvienne de sa voix et de ses traits du visage. Elle le vit s'installer à côté d'elle, un grand sourire au visage. « Je suis surprise que l'on se revoit à un cours de peinture et pas dans des circonstances plus... distinguées ! » Elle pouffa un rire, faisant référence aux soirées mondaines où les apparences étaient si importantes. Ce jour, elle était habillée sobrement, les cheveux détachés et peu maquillée, bien loin de l'extravagance de ce genre d'événements. Pourtant, elle ne paraissait pas mal à l'aise, sûrement parce qu'il l'avait reconnue en premier mais aussi parce qu'elle avait un visage familier pour l'accompagner pendant ce cours. « Vous allez bien ? J'espère que mon père ne vous harcèle pas trop avec ses invitations. » Elle connaissait son géniteur par coeur, et tout comme sa fille, il adorait être entouré même si dans son cas, cela était intéressé. Henri finit par attirer l'attention de tous, une petite dizaine de personnes répartie dans toute la salle. Le cours d'aujourd'hui porterait sur la perspective, chose que Norah maîtrisait plutôt bien. Un peu déçu que la représentation du corps ne soit pas abordé, il s'agirait d'un mal pour un bien puisqu'elle pouvait prendre ses marques en toute confiance. Résultat : elle réussirait les exercices avec brio. Mais ce qui attiserait sa curiosité serait certainement l'homme à côté d'elle, comme par magnétisme. Oscar ou sa toile, peut-être même les deux, elle le regarderait plus ou moins discrètement tout le long du cours et ce, sans pouvoir l'expliquer.

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Le monde est petit et un peu improbable, voilà ce qu’Oscar se dit alors qu’il tend la main à Norah. Quelles étaient les chances pour qu’il la retrouve ici dans cette classe, pour qu’elle partage sa passion. Cette même passion qu’il ne partage presque avec personne, son secret le mieux gardé, ou presque, le fiasco de son mariage l’ayant dépassé depuis quelques années maintenant. « Monsieur Sterling. Vous peignez, vous aussi ? » Il est presque étonné de l’entendre l’appeler Monsieur. Elle a si souvent occupé ses pensées qu'il lui semble qu’ils sont déjà proches, alors même qu’il n’est qu’un total étranger pour elle, plus proche de l’âge de son père que du sien. Un frisson lui parcourt pourtant l’échine alors qu’elle serre sa main, le contact avec la douceur de sa main le frappant. « Appelle-moi Oscar s’il te plaît, ici il n’y a pas de Monsieur qui tienne. » Il se cache derrière la règle du cours pour se donner un semblant de jeunesse. Les mots de la jeune femme lui ayant donné un petit coup de vieux. « Je participe sporadiquement à ce cours depuis quelques années maintenant, c’est mon plaisir coupable. » Il le glisse à sa manière, espérant qu’elle comprenne qu’il préférait que sa présence ici ne soit pas rapportée à l’extérieur. « Il me semble que c’est la première fois que je te vois ici cependant. » Il en est même sûr, il n’aurait pas pu passer à côté d’elle sans la remarquer. 
 
« Je suis surprise que l'on se revoit à un cours de peinture et pas dans des circonstances plus… distinguées ! » Son rire est délicieux, voilà ce qu’il se dit alors qu’un sourire se dessine sur son propre visage. Elle est pourtant aussi intrigante pour lui dans ses habits quotidiens que dans son souvenir. Et si lui n’est pas apprêté comme lors de soirées mondaines, il porte toujours une attention particulière à ses vêtements, les apparences prenant une place importante dans sa vie. « J’imagine qu’il est difficile de penser que je suis autre chose qu’architecte quand on me voit engoncé dans un costard. » Un sourire un peu taquin sur le visage, il continue. « Tu es étudiante à l’université, c’est juste ? » Il ne lui avouera pas qu’il l’y a vu à plusieurs reprises, craignant de passer pour un stalker, ce qu’il se donne un peu l’impression d’être à ce moment même. « Vous allez bien ? J'espère que mon père ne vous harcèle pas trop avec ses invitations. » Le père de Norah étant un homme qu’il qualifierait de charmant, ce ne sont pas ces invitations dont il se plaindrait. « Très bien, merci, et toi ?  Ton père est un homme convaincant, je ne saurais pas refuser une de ses invitations en tous les cas. » Il n’était pas toujours convié, mais avait pu y passer des soirées sympathiques, retrouvant l’espace de quelques heures une complicité feinte avec sa femme. « S’il te plaît, Norah, tu peux me tutoyer, je ne suis pas si vieux, et nous sommes collègues de cours maintenant. » Il se retient de faire un clin d’œil, craignant de passer pour un gros lourd. Préférant détourner son regard pour le poser sur sa toile alors que le cours commence. 
 
Pendant de longues minutes, il se concentre sur sa toile, réussissant presque à faire abstraction du lieu, alors qu’il suit les instructions, son esprit vagabondant pourtant dès que son pinceau touche la toile, une capacité de s’extraire de son corps que seule la peinture est capable de lui donner. Le sujet de la perspective n’est pas son favori, la maîtriser des techniques de dessin ayant toujours été un peu complexe à appréhender pour lui qui peint avec les émotions et le ressenti plus qu’avec le cerveau. Il s’y attelle pourtant, il sait que pour continuer à progresser, il doit pratiquer et apprendre. Furtivement, il jette un regard sur sa gauche, Norah semble absorbée par sa toile, un petit rictus déforme sa joue, elle ressemble plus que jamais à Elisa. Une ressemblance qui le déroute un instant alors qu’elle relève le regard vers lui. « Tu es douée. » Il répond du tac au tac, gêné d’avoir été surpris dans sa contemplation. « Tu peins depuis longtemps ? Je trouve ton coup de pinceau très affirmé pour une jeune femme si jeune. ». Il lui semble qu'elle a déjà une pratique importante, ce qui est étonnant, mais pourrait sembler un peu hautain de la manière dont il le lui expose.

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@Oscar Sterling & Norah Sawyer

Un constat avait frappé Norah ces derniers temps : le fait que nombreux étaient les personnes de son entourage à aimer les arts picturales, sans forcément qu’elles les pratiquent elles-mêmes. Pour beaucoup, les tableaux étaient des chefs d’œuvre, les galeries et vernissages des événements où il était agréable de se rendre. La peinture, lorsqu’elle était contemplée, avait la force de questionner ceux qui posaient leurs yeux sur elle. Car les interprétations étaient diverses, que les concepts étaient personnels et que la lecture de l’un pouvait être grandement différente de celle d’un autre. Mais c’est le point de vue du peintre qui rendait la chose encore plus exaltante. Bien qu’elle n’ait jamais été exposée, il lui arrivait à de poster certaines de ses œuvres sur les réseaux sociaux et elle se réjouissait de découvrir les retours, les interprétations des autres. Car si elle avait ses propres idées lorsqu’elle était devant la toile vierge, savoir que sa création pouvait transmettre d’autres émotions l’amusait et l’intéressait grandement. Et cela était d’autant plus vrai que la technique était maitrisée, justifiant encore plus sa présence à ce cours. Pour autant, jamais elle n’aurait cru y retrouver un homme qu’elle avait croisé à une soirée mondaine, soirée qui n’avait rien à voir avec la peinture. « Appelle-moi Oscar s’il te plaît, ici il n’y a pas de Monsieur qui tienne. » Elle acquiesça, elle préférait s’adresser à lui par son prénom mais le respect des us et coutumes l’en empêchait tant qu’il ne lui avait pas permis de le faire. Chose faite, elle sourit à son interlocuteur, se décalant quelque peu pour qu’il ait la place de s’installer à côté d’elle. « Je participe sporadiquement à ce cours depuis quelques années maintenant, c’est mon plaisir coupable. » Un rire soufflé, elle rétorqua aussitôt. « Un plaisir coupable ? Vous avez à ce point honte de prendre des cours de peinture ? » La tournure amusait beaucoup la Sawyer tant elle ne voyait pas le mal à avoir cette occupation. De quels regards avaient-ils peur ? En tout cas, il ne devait pas avoir peur de celui de Norah qui savait très bien garder les secrets. « Pas d’inquiétude, votre pratique déviante de la peinture est bien protégée avec moi. » Son sourire amusée ne la quitta pas, presque intrigué. « Il me semble que c’est la première fois que je te vois ici cependant. » Elle acquiesça une seconde fois. « C’est mon tout premier cours, en effet. J’ai hâte de savoir ce qu’on va faire. »

« J’imagine qu’il est difficile de penser que je suis autre chose qu’architecte quand on me voit engoncé dans un costard. » - « Vous pourriez être bien d’autres choses comme… je ne sais pas, professeur d’université ? » Un ricanement, Norah l’avait remarqué lorsqu’elle foulait encore les couloirs de la faculté, uniquement de loin lorsque la promotion de droit libérait l’amphithéâtre pour les étudiants d’architecture. Leurs regards et leurs sourires se croisèrent sans qu’un seul mot puisse être échangé, les deux étant malheureusement attendus. « Tu es étudiante à l’université, c’est juste ? » Elle prit une inspiration, s’apprêtant à évoquer une page de sa vie qu’elle venait de tourner. « Oui, en droit. Enfin, étais. J’ai terminé la formation théorique il y a quelques semaines. Vous y travaillez depuis longtemps, vous ? » Forcément, elle se posait la question, maintenant qu’ils se découvraient ce point commun. Curieuse, Norah se demandait s’ils se loupaient depuis longtemps ou non. « Très bien, merci, et toi ? Ton père est un homme convaincant, je ne saurais pas refuser une de ses invitations en tous les cas. » Un sourire, elle se demandait si quelqu’un avait déjà résisté au pouvoir de persuasion de son père. « Oui, merci ! Il serait ravi de l’entendre, mais évitez de lui dire, il risquerait de ne plus pouvoir passer les portes après. » Clin d’œil, elle ne connaissait que trop bien l’ego de son paternel et il était déjà démesuré. « S’il te plaît, Norah, tu peux me tutoyer, je ne suis pas si vieux, et nous sommes collègues de cours maintenant. » - « Oh c’est plus pour le respect de l’étiquette que par rapport à ton âge. Mais d’accord, aucun problème. Je préfère, même. » Car elle avait toujours préféré converser avec des personnes plus âgées qu’elle, souvent plus matures et plus intéressantes. Et Oscar semblait en faire partie, à son plus grand plaisir.

Les premiers exercices furent présentés et Norah les complétait assez rapidement, les lignes et les formes se dévoilèrent facilement sur la toile devant elle. Elle était devenue particulièrement habile du crayon et du pinceau, si bien qu’elle se mettait en condition assez vite. La Sawyer était particulièrement appliquée, finissant les exercices dans les premiers. « Tu es douée. » Les mots d’Oscar l’extirpa de sa bulle, elle se tourna vers lui tout en posant son crayon sur le chevalet, non sans une rougeur sur ses joues. « Merci, c’est gentil. Tu as l’air de très bien te débrouiller aussi. » Elle ne voulait pas trop regarder ce qu’il dessinait pour ne pas le perturber, mais force était de constater qu’elle ne pouvait s’en empêcher et elle espérait que cela ne le dérangerait pas. « Tu peins depuis longtemps ? Je trouve ton coup de pinceau très affirmé pour une jeune femme si jeune. » Elle pinça ses lèvres l’une contre l’autre, flattée. « Depuis que je suis petite mais je peins par période. Mais j’espère en faire un hobby beaucoup plus constant maintenant. » Norah exprimait une envie qui était la sienne depuis un moment maintenant. La peinture était une vraie passion et elle était prête à y consacrer beaucoup plus de temps désormais. « Et toi ? » Elle marqua une pause avant de reprendre. « Est-ce que tu peins en dehors de ces cours ? » Un sourire, elle pourrait totalement comprendre qu’avec ses activités à l’université, il ne puisse se libérer trop de temps pour cela. En parallèle, elle continuait à inspecter la toile de son interlocuteur et son sourire se dressa. « C’est drôle, nos perspectives sont complémentaires. » Elle tourna sa toile et la plaça à côté de celle d’Oscar, les murs qu’ils avaient dessinés formant une pièce entière une fois rassemblés. Une coïncidence qui valait le coup d’être soulignée tant ils ne s’étaient pas concertés.

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Oscar n’était jamais enchanté de croiser des regards connus à ses cours de dessin, il faut dire que depuis toujours, il avait consciencieusement séparé sa vie d’artiste de sa vie professionnelle et familiale. Si Elisa connaissait son intérêt pour l’art, il était peu souvent évoqué et ses œuvres jamais sorties d’entre les 4 murs où elles voyaient le jour. « Un plaisir coupable ? Vous avez à ce point honte de prendre des cours de peinture ? » La honte, c’était à peine fort pour désigner les sentiments controversés que sa pratique de la peinture lui inspirait. « Disons juste que c’est un pan de ma vie qui m’est très intime. » C’était une manière édulcorée de cacher son sentiment d’inutilité et de futilité lorsqu’il peignait. Alors même qu’il ne ressentait jamais ça pour l’art des autres, une absurdité qu’il n’aurait probablement jamais pu expliquer. « Pas d’inquiétude, votre pratique déviante de la peinture est bien protégée avec moi. » Il la remercie d’un hochement de tête, manière efficace de clore le sujet. 
 
« Vous pourriez être bien d’autres choses comme… je ne sais pas, professeur d’université ? » Ses yeux s’arrondissent un peu alors que la remarque semble sortir si simplement de la bouche de la jeune femme, lui indiquant qu’elle aussi l’a remarqué. Ce qui évidemment ne voulait pas dire grand-chose, mais lui permettait de diminuer un peu son sentiment d’obsession qu’il le tenait quand il pensait à elle. « Oui, en droit. Enfin, j’étais. J’ai terminé la formation théorique il y a quelques semaines. Vous y travaillez depuis longtemps, vous ? » Une fois de plus, il s’étonne des propos de la jeune femme, si pétillante avec apparemment une âme d’artiste. « Le droit ? Je n’aurais pas imaginé… C’est un milieu très lointain à l’art, il me semble. » Ou alors pouvait-on y trouver une forme d’art, une forme qu’il pouvait comprendre, mais s'il s’apparentait plus à la joute verbale qu’au maniement des pinceaux. « Ça fait 3 ans maintenant, je dois dire que parfois, c’est encore étrange, il n’y a pas si longtemps, je foulais encore ces bancs. » Si Oscar assumait son âge, il lui semblait pourtant que les années filaient à toute vitesse, lui laissant à peine le temps de s’en rendre compte. 
 
Heureux de finalement l’entendre accepter de le tutoyer, il avait fini par détourner son regard pour se plonger dans sa toile, suivant le cours d’un œil attentif. Du moins jusqu’à ce qu’à nouveau son regard se pose sur elle, attiré comme un aimant. Puis sur sa toile. « Merci, c’est gentil. Tu as l’air de très bien te débrouiller aussi. » Flatté, il hocha la tête. « Mon travail est probablement aidant pour ce thème. » les flatteries concernant son art étant toujours aussi difficile à recevoir. Les années n’ayant jamais permis qu’il les accepte totalement. Il préférait dévier à nouveau la conversation sur la jeune femme. « Depuis que je suis petite, mais je peins par période. Mais j’espère en faire un hobby beaucoup plus constant maintenant. » Elle avait très certainement le talent pour ça. « J’imagine que nous serons amenés à nous revoir ici alors. » Un sourire franc se dessine sur son visage, il n’en est pas mécontent, bien qu’un peu gêné de l’admettre. « Et toi ? Est-ce que tu peins en dehors de ces cours ? » Cela restait toujours étrange pour Oscar de parler de cette passion cachée, même si avec les années son entourage s’était progressivement complété de personnes partageant sa passion. « J’ai beaucoup dessiné au début, noirci plus d’une feuille. Je pense que j’ai sérieusement commencé la pratique de la peinture quand je suis arrivée à l’université. » Il y avait donc bien quelques années. Avant ça, le simple fait d’habiter dans la maison familiale ne lui permettait pas de se sentir libre. « Mais je dirais que ma pratique est en dents de scie, j’ai eu beaucoup pratiqué à certaines périodes de ma vie, puis moins. » Évidemment, il n’allait pas lui avouer qu’elle était l’une des raisons principales de sa reprise de l’art pictural ces derniers mois. 
 
« C’est drôle, nos perspectives sont complémentaires. » Il observe les deux tableaux, un sourire aux lèvres. « Et bien… On dirait presque de la sorcellerie. Miss Sawyer, sortez tout de suite de ma tête. » Il la taquine, trouvant tout de même la coïncidence plutôt folle. « Oscar, cesse de déconcentrer notre nouvelle recrue. » Relevant les yeux, il s’aperçut qu’Henri s’était diablement rapproché d’eux pour porter un regard sur leurs toiles. « Intéressant… On dirait que le destin ne vous a pas mis à côté l’un de l’autre par hasard. » Du Henri tout craché, s’ils le laissaient continuer, il pourrait bien sortir ses cartes de tarot dans 2 minutes pour leur lire l'avenir. « Ça m’inspire une idée. » Oscar a presque l’impression de voir une ampoule s’allumer au-dessus de sa tête. Alors que le prof reprend pour toute la classe. « Travail en duo pour la semaine prochaine, peinture à 4 mains. Venez avec une toile déjà réalisée, nous pourrons la commenter ensemble pour voir les axes de progression. Thème libre. » Se retournant vers les deux, il leur dit. « Je me réjouis de voir votre travail commun. » Ne leur laissant pas d’autres choix que d’accepter. « Maintenant, silence et à vos œuvres. » Échangeant un regard complice avec la jolie brune, il se contenta de lui glisser un « Je crois qu’il faudra qu’on reprenne cette conversation à la fin du cours. » Et de toute évidence, ils avaient aussi un rendez-vous à fixer. Ce qui laissa Oscar pensif, incapable de décrire le mélange d’émotion qu’il le saisissait à cette idée. 

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@Oscar Sterling & Norah Sawyer

S'il y avait bien quelque chose qu'elle pouvait comprendre, c'est le rapport intime que le peintre pouvait avoir avec ses œuvres. La peinture était personnelle, pour Norah le moyen le plus efficace de concrétiser ses émotions et de cultiver son jardin secret. Il n'y avait que les reproductions de paysage à partir de photographies qu'elle s'autorisait de partager avec les autres, les autres – celles qui mettaient sur la toile ce qu'elle pouvait ressentir – étaient bien gardées dans sa chambre à l'appartement. Mais alors qu'elle se découvrait ce point commun avec Oscar, elle ressentait cette envie inexpliquée de savoir ce qu'il pouvait bien peigner, ce qu'il considérait lui-même comme intime. La Sawyer était bien curieuse, elle le savait et l'assumait mais cela ne l'avait jamais poussé à convoiter les secrets d'un autre. Son interlocuteur l'intriguait à ce point, sans pouvoir l'expliquer et sans qu'elle ne s'en rende compte pour le moment. Car à cet instant, ils n'étaient que de simples élèves qui discutaient en attendant le début du cours de peinture, rien de plus.

« Le droit ? Je n’aurais pas imaginé… C’est un milieu très lointain à l’art, il me semble. » Norah pouvait le comprendre que la plupart des personnes pensaient cela, mais elle n'était pas vraiment de cette avis. Un sourire, elle inspira avant de répondre. « Je trouve qu'il y a un petit côté théâtral dans le droit, notamment lorsque les dossiers nous amènent tout droit au tribunal. Il faut tantôt persuader son audience, tantôt se mettre en retrait et accepter la représentation du parti adverse... Il faut imaginer plusieurs scénarios, les plus avantageux comme les pires, de sorte de ne pas avoir l'air complètement perdus si quelque chose d'inattendu se produit. Et il y a aussi la rédaction des plaidoiries, ça c'est ma partie préférée ! » Elle s'autorisa un léger rire à la fin de son explicatif qu'elle avait volontairement avorté pour ne pas monopoliser la parole. Il fallait certes connaître les éléments de droit mais il y avait toute une dimension du travail d'avocat qui consistait en la rhétorique, un fait qui avait tant plu à Norah lorsqu'elle avait entamé ses études. Un sourire en coin maintenant que ses iris espiègles étaient tournées vers Oscar, elle reprit. « Mais maintenant je veux savoir dans quoi tu m'as imaginée. » Son entourage lui disait pourtant que le droit lui seyait bien vu son côté méthodique et terriblement maniaque. Alors, elle était intriguée que cet homme puisse la voir dans un autre domaine et était impatiente d'entendre sa réponse. « Ça fait 3 ans maintenant, je dois dire que parfois, c’est encore étrange, il n’y a pas si longtemps, je foulais encore ces bancs. » Son visage s'illumina à la parole de son interlocuteur, son sourire s'étirant davantage. « Tu as fait tes études là-bas et maintenant tu y fais cours ? A mes yeux c'est plus beau qu'étrange. » C'était le genre d'histoire qui parvenait à l'attendrir, lorsqu'il y avait un lien fort avec un lieu, un objet ou même une personne. « J'espère que tu ne te fais pas trop malmener par tes étudiants. » Un clin d'œil, Norah connaissait par cœur les farces d'amphithéâtre, après tout elle venait tout juste de quitter ses bancs.

« Mon travail est probablement aidant pour ce thème. » En tant qu'architecte, il devait avoir un certain bagage en terme de dessin, d'autant plus lorsqu'il était question de perspective. Par chance, elle peignait avec les points de fuite depuis longtemps maintenant pour ne pas paraître complétement ridicule à côté d'Oscar. Il était modeste là où il aurait pu étaler ses compétences, de quoi adoucir davantage la Sawyer. « J’imagine que nous serons amenés à nous revoir ici alors. » – « Sans aucun doute. » Pour ne pas dire qu'elle en serait ravie, car Oscar était un charmant interlocuteur et surtout fort intéressant. « J’ai beaucoup dessiné au début, noirci plus d’une feuille. Je pense que j’ai sérieusement commencé la pratique de la peinture quand je suis arrivée à l’université. Mais je dirais que ma pratique est en dents de scie, j’ai eu beaucoup pratiqué à certaines périodes de ma vie, puis moins. » Là encore ils avaient leur similitude et alors qu'elle griffonnait sur sa toile, elle répondit calmement. « C'est ce qui est réconfortant avec la peinture, je trouve. On peut arrêter et reprendre comme et quand on veut, recommencer ou commencer une nouvelle toile avant de revenir sur une ancienne... On y est totalement libres. » Et c'est cette sensation de liberté qu'elle cherchait tant, elle qui n'avait vécu que par le prisme de ses parents.

« Et bien… On dirait presque de la sorcellerie. Miss Sawyer, sortez tout de suite de ma tête. » Elle ria, tant ils entraient dans la période de la spooky season que la coïncidence semblait surnaturelle. « Je vais essayer… A moins que ce soit toi qui es dans la mienne. » Le regard légèrement plissée dans une moue faussement suspicieuse, ils furent interpeler par le professeur qui réprimandait Oscar dans un premier lieu. Norah pinça ses lèvres pour retenir un rire, la situation lui rappelant lorsqu’elle se faisait gronder à l’école pour bavardage. Heureusement, la complémentarité de leur toile vint calmer Henri. « Intéressant… On dirait que le destin ne vous a pas mis à côté l’un de l’autre par hasard. » Son regard croisa celui d’Oscar, un grand sourire sur son visage alors que ses joues se teintèrent légèrement de rose. « Ça m’inspire une idée. Travail en duo pour la semaine prochaine, peinture à 4 mains. Venez avec une toile déjà réalisée, nous pourrons la commenter ensemble pour voir les axes de progression. Thème libre. » Terriblement expressive, Norah fronça les sourcils tant cela ne collait pas avec l’image qu’elle se faisait de sa passion, tant elle était personnelle et compliquée à décrire. Tout l’amenait à penser qu’il s’agissait d’une mauvaise idée, quand bien même son naturel sociable et avenant. Henri revint vers eux. « Je me réjouis de voir votre travail commun. » Un brin de soulagement à l’annonce de leur pair, au moins elle ne formerait pas équipe avec un total inconnu. Elle se tourna vers son nouveau binôme pour sonder sa réaction, il ne semblait pas déçu, de quoi la rassurer. « Je crois qu’il faudra qu’on reprenne cette conversation à la fin du cours. » Elle se contenta d’acquiescer avec gratitude et resta silencieuse le reste du cours, non sans quelques regards complices vers son voisin de chevalet. Car ça, elle ne pouvait s’en empêcher.

***

« Nous en avons terminé pour aujourd’hui. Si vous pouvez juste ranger les chevalets au fond de la salle… Vous en profiterez pour prendre une toile vierge pour votre devoir de la prochaine séance. » Norah se leva aussitôt de son tabouret, satisfaite de ce qu’elle avait composé durant ce cours. Elle déplia le chevalet devant elle et le traina contre le mur le plus éloigné de la pièce. Là bas, elle rejoignait Oscar, un grand sourire aux lèvres. « Qui prend la toile ? » Elle pouvait s’y coller, surtout qu’elle n’habitait pas très loin de l’école. Mais c’était avant tout pour rouvrir le dialogue avec son interlocuteur, maintenant que le cours touchait à sa fin, non sans un pincement au cœur. « Sauf si tu veux changer de binôme, au final. » Parce que la taquinerie n'était jamais trop loin.

Everything has its beauty, but not everyone sees it.

@Norah Sawyer & Oscar

Oscar l’écoute avec attention, les yeux rivés dans les siens alors qu’elle lui explique son choix pour le droit, ce qui devient rapidement une évidence pour lui alors qu’elle lui expose les points l’un après l’autre. « Ça se voit, ton plaidoyer était parfait. » Peut-être ne l’avait-il juste jamais vu dans une situation qui lui permettait d’émettre un vrai avis, les soirées mondaines étant bien trop pleines de faux-semblants pour ça. Et bien qu’il connaisse peu le père de la jeune femme, il l’imaginait mal accepter que sa fille puisse se donner en spectacle. « Mais maintenant, je veux savoir dans quoi tu m'as imaginée. » Il porte la main à son menton pensif. « C’est une bonne question, Norah, je crois que la première fois, je n’ai pas imaginé grand-chose… Puis aujourd’hui, quand je t’ai vu ici, j’ai pensé à la mode ou alors l'architecture d’intérieur… Je t’aurais même imaginé comme une de mes étudiantes. » Il n’est pas mécontent que ça ne soit pas le cas, la jeune femme le troublant assez pour que donner un cours puisse devenir compliqué en sa présence.
 
« Tu as fait tes études là-bas et maintenant tu y fais cours ? A mes yeux c'est plus beau qu'étrange. J'espère que tu ne te fais pas trop malmener par tes étudiants. » Il n’est pas sûr d’y voir la beauté, plus l’expression de son blocage dans le temps. Il avait figé la période de l’université comme la meilleure de sa vie et quelque part avait sans doute tenté d’y revenir. Sans vraiment, réussit à recréer cette légèreté et cette fureur de vivre qui l’habitait à cette époque. Il se dit qu’il aurait bien aimé la croiser à cette époque, quand il était un jeune homme sans les blessures que ces dernières années de vie lui avaient infligées. Aujourd’hui, il était un homme marié et bien plus triste. « C'est ce qui est réconfortant avec la peinture, je trouve. On peut arrêter et reprendre comme et quand on veut, recommencer ou commencer une nouvelle toile avant de revenir sur une ancienne… On y est totalement libres. » Il hoche la tête à ces mots qui font écho en lui, trouvant un peu de réconfort à savoir qu’il n’est pas le seul à parfois abandonner son pinceau. 
 
« Je vais essayer… À moins que ce soit toi qui es dans la mienne. » Il aimerait que ce soit le cas, mais doit se contenter de plonger son regard dans celui un peu espiègle de la jeune femme pour tenter de comprendre un peu mieux son caractère doux et joyeux, mais surtout les blessures qu’il cache sans doute. Pourtant, il n’a que peu de temps pour le faire, rapidement interrompu par le prof, qui finit par le renvoyer à son travail. Cette fois plus studieux, il ne détourne plus le regard pour observer sa voisine. 
 
« Nous en avons terminé pour aujourd’hui. Si vous pouvez juste ranger les chevalets au fond de la salle… Vous en profiterez pour prendre une toile vierge pour votre devoir de la prochaine séance. » Il relève enfin les yeux, ayant presque oublié ce qui l’entourait. Se souvenant alors qu’il a encore une mission à concrétiser avant de partir. « Qui prend la toile ? » À peine le temps de répondre qu’elle enchaîne déjà : « Sauf si tu veux changer de binôme, au final. » Il lui rend son sourire amusé. « Je crois que le destin, aka Henri, ne va pas nous laisser le choix. » De toute façon, il n’aurait pas voulu qu’il en soit autrement. « Pour la toile, je peux m’en charger, je suis en voiture. D’ailleurs, si tu as besoin, que je te pousse. » Il ne doute pas qu’elle a déjà un moyen pour rentrer, mais propose tout de même. « Peut-être que l’on pourrait échanger nos numéros ? Ce sera plus simple pour se trouver une date. Et sinon, j’ai une salle dédiée à la peinture si tu veux me rejoindre chez moi pour l'exercice. » Il n’est pas sûr que ça soit bien vu d’inviter une si jeune et jolie fille chez lui, mais bon, c’est la faute d’Henri ! 

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@Oscar Sterling & Norah Sawyer

Norah aimait parler de ses études, outre le fait que le droit était déjà connoté comme une discipline prestigieuse, car elle s'y était plu plus qu'elle ne l'aurait imaginé. Au départ, elle avait fait ce choix pour faire plaisir à ses parents mais surtout pour s'éloigner d'eux, s'installant dans une ville autre que Sydney. Il s'agissait de son unique ambition, beaucoup trop occupée à trouver le moyen de sortir de leur emprise plutôt que se chercher sa vocation. Fort heureusement, la Sawyer se découvrait un intérêt pour le domaine juridique, si bien qu'elle s'investissait autant que ses camarades dont le droit était le rêve. Maintenant qu'elle avait terminé ses études, elle était excitée à l'idée de découvrir les activités du quotidien d'un vrai avocat. « Ça se voit, ton plaidoyer était parfait. » Un grand sourire et un regard chargé de gratitude, Elle demeurait silencieuse tant elle n'avait pas l'habitude de recevoir ce type de compliment. Ses professeurs étaient trop stricts, ses encadrants de stage trop pudiques pour cela, et même si elle n'en avait pas besoin pour avancer, Norah appréciait sincèrement les mots de son interlocuteur. « C’est une bonne question, Norah, je crois que la première fois, je n’ai pas imaginé grand-chose… Puis aujourd’hui, quand je t’ai vu ici, j’ai pensé à la mode ou alors l'architecture d’intérieur… Je t’aurais même imaginé comme une de mes étudiantes. » Un rictus amusé, l'architecture faisait partie de sa liste alors qu'elle s'apprêtait à quitter le secondaire, avec la finance et la médecine. Dans d'autres circonstances, ils auraient pu se rencontrer bien avant ce dîner mondain où Oscar fut invité. « Honnêtement, si je n'en avais pas eu marre des amphithéâtres et des examens, j'aurais bien voulu voir à quoi peuvent bien ressembler les études d'architecture. » Un sourire adressé à celui qui l'accompagnerait tout au long de ce cours, témoin de la curiosité qu'elle éprouvait déjà à son égard. Et puis ce plan lui aurait donné une bonne raison de rester ici, à Brisbane.

Face à sa toile qui était sensiblement le miroir de celle d'Oscar, elle se demandait si Henri n'avait pas raison et s'il n'y avait pas une sorte de force extérieure – qu'il nommait le destin – qui les avait mis sur le chemin de l'un et de l'autre. Norah savait pertinemment qu'il y avait des évènements qui se produisaient dans sa vie sans qu'elle puisse y faire quelque chose. Ici en l'occurrence, il s'agissait d'un moment particulièrement agréable, bien loin des difficultés qui se dressaient sur sa route. « On faisait déjà une bonne équipe sans qu'on le sache, il faut croire. » Quelque part, maintenant qu'ils étaient face à cette coïncidence  – ou plutôt une évidence selon le professeur de peinture –, Norah ne doutait pas qu'il proposerait un travail de qualité pour la prochaine séance. Elle en avait même hâte, parce qu'elle adorait peindre mais aussi parce que cela lui permettrait de connaître un peu plus son partenaire. Car c’était plus fort qu’elle, une fois qu’elle avait porté son intérêt sur quelque chose ou plutôt quelqu’un, elle se devait d’en connaître les raisons.

« Je crois que le destin, aka Henri, ne va pas nous laisser le choix. » Un rire, Henri leur avait en effet forcé la main, sans pour autant que Norah s’en plaigne. Et de toute évidence, Oscar ne semblait pas vouloir changer de binôme non plus. « Pour la toile, je peux m’en charger, je suis en voiture. D’ailleurs, si tu as besoin, que je te pousse. » Son sourire se dressa davantage alors qu’elle attrapa son sac où étaient rangées toutes ses affaires de peinture. « Oh ça ira, j’habite un peu plus loin dans la rue. », dit-elle en désignant du doigt la direction où se trouvait son appartement. « Mais merci pour la toile. Tu es sûr de pouvoir te libérer pour le prochain cours ? » Il disait se rendre à ces séances de manière sporadique, peut-être pour des raisons d’emploi du temps. Après tout, il devait être assez occupé au quotidien avec l’université et toutes les sollicitations de son père. « Peut-être que l’on pourrait échanger nos numéros ? Ce sera plus simple pour se trouver une date. Et sinon, j’ai une salle dédiée à la peinture si tu veux me rejoindre chez moi pour l'exercice. » Un peu surprise par la proposition d’Oscar, elle répondit sans perdre son sourire et en acquiesçant. « Je ne veux pas vous déranger… » Désignant la famille de son interlocuteur, elle ne voulait pas envahir leur cocon surtout pour un moment qui pourrait s’éterniser. En parallèle, elle sortit son téléphone, le déverrouilla et le tendit à Oscar pour qu’il puisse entrer son numéro et ferait de même en retour. « Je peux peut-être t’aider à transporter quelque chose ? » Déjà qu’il se proposait de prendre la toile, la Sawyer pouvait bien prendre certaines de ses affaires et les amener jusqu’à sa voiture. Quoi qu’il en soit, tous les élèves quittèrent la salle pour se séparer une fois sur le parking. « C’était très cool, en tout cas. » Un grand sourire et à l’image de ce cours de peinture, ils savaient tous les deux que cette parenthèse touchait à sa fin. Pour pas très longtemps, heureusement.

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@Norah Sawyer & Oscar

À bien y réfléchir, peut-être que Norah lui faisait en partie penser à lui. Si elle avait les expressions et la beauté d’Elisa, elle lui ressemblait avec quelques années de moins, cette même fougue dans le regard, cette envie de découvrir le monde. Alors évidemment, quelque part, il l’avait imaginé dans l’architecture, mais Norah n’avait peut-être pas besoin de cette échappatoire pour vivre ses rêves. Capable d’assumer sa passion bien mieux que lui, apparemment. « Honnêtement, si je n'en avais pas eu marre des amphithéâtres et des examens, j'aurais bien voulu voir à quoi peuvent bien ressembler les études d'architecture. » Il aurait peut-être apprécié l’initier finalement, se sentant de plus en plus à l’aise en sa présence. 
 
« On faisait déjà une bonne équipe sans qu'on le sache, il faut croire. » Au début de cette journée, il n’aurait sans doute pas pu s’imaginer de tel mot sortir de la bouche de la jeune fille, elle qui semblait alors n’être qu’un mirage dans son esprit. Aujourd’hui, elle prenait forme devant lui, se dessinait son propre caractère, sa personnalité, s’éloignant petit à petit de celle idéalisée d’une Elisa jeune. 
 
« Oh ça ira, j’habite un peu plus loin dans la rue. » Il regarde la direction qu’elle indique, se demandant à quoi ressemble son chez-elle loin de ses parents. Qu’est-ce qu’elle a bien pu y mettre, est-ce qu’elle est bordélique ou maniaque. Il voudrait voir, mais n’oserait jamais s’imposer par simple curiosité. « Mais merci pour la toile. Tu es sûr de pouvoir te libérer pour le prochain cours ? » Il attrape la toile blanche, s’imaginant que dans quelques jours elle sera couverte de leur art commun. « Je vais faire en sorte d’être là, je ne voudrais pas décevoir Henri… » Un léger silence, puis il reprend. « Ou toi. » Se rendant compte que la tournure de sa phrase peut être mal perçu. « Enfin, je veux dire, je ne voudrais pas te faire faux plan, c’est un axe de travail intéressant, je trouve, et une première pour moi. » Qu’il n’était pas mécontent de réaliser avec elle. 
 
« Je ne veux pas vous déranger… » « Je ne l’aurais pas proposé si c’était le cas. » Une partie de lui étant même impatiente de la revoir, sentiment qu’il réprimande comme il le peut. « Je peux peut-être t’aider à transporter quelque chose ? » Il trouve adorable ce qu’elle propose. « C’est gentil, ça va aller, j’ai l’habitude. » Il embarque tout en se dirigeant vers la sortie en sa compagnie. « C’était très cool, en tout cas. » Il sourit, tournant le visage vers elle. « Si ce cours t’a plus, la suite va te plaire, c’est sûr. Il y en a des biens plus passionnants. Henri a une imagination débordante. » Arrivé près du parking, il sait que le moment des au revoirs est arrivé. « Je te souhaite un bon retour chez toi, Norah. Je t’écris pour que l’on fixe une date. » Les mains prises, il ne lui adresse pas une poignée de main qui aurait sans doute été un peu déplacée, préférant un signe de tête amicale alors qu’il dépose ses affaires dans le coffre de la voiture, regardant déjà la silhouette de la jeune femme le quitter après un au revoir. 

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