Absolument tous les moyens sont bons pour s’occuper les mains et l’esprit. Il ne se passe pas un seul jour sans que Wesley ne soit à réfléchir à de nouvelles façons de s’occuper pour ne pas penser à ce qui le tente tant. À ce qui le tourmente depuis son anniversaire. Ou plutôt, la nuit qui a suivi. Une cuite de trop et une promesse faite, seul face à son miroir. Celle de ne plus avaler une goutte d’alcool. Tant bien que mal, il s’accroche à cette promesse et refuse de se montrer faible en basculant. Il veut encore croire qu’il ne sera pas comme tous ceux qui finissent par fauter et qui retombent une fois ou deux avant le véritable arrêt. Il se croit plus malin que ça. À tort, sans doute. Mais pour l’heure, il tient le coup sans trop savoir comment, si ce n’est en se forçant vraiment très fort. Il se perd dans les jeux vidéo jusque tard le soir, quand il est chez lui. Et la journée, il enchaîne les rendez-vous avec les clients. L’avantage des tatouages, c’est qu’en plus de lui occuper les mains, ça lui occupe le cerveau. Parce qu’il est concentré juste assez pour pouvoir papoter. Parler de tout et de rien. Jouer le rôle de confident aussi, pour ceux qui en ont le besoin et qui sont assez à l’aise avec lui pour oser s’épancher. Il aime beaucoup ça, Wesley. S’il avait été bon à l’école, il aurait presque pu se lancer dans ses études de psy. Ceci dit, pas sûr qu’il aurait aimé la vie derrière un bureau. Il préfère quand même l’art qu’il étale sur la peau des gens. Faire apparaître sur leurs corps un bout de l’histoire qu’ils sont d’accord pour partager avec lui, en toute confiance. Un pan de vie qu’ils dévoilent et sont prêts à montrer au "reste du monde".

Arrive quand même un moment où il doit arrêter de tatouer. Parce que sa main ne supporte pas plus de dix heures de tatouage par jour avec les vibrations qui remontent jusqu’au poignet. Et parce que ses yeux aussi finissent par être épuisés. Fut un temps où, quand il terminait une grosse journée de ce genre, il prenait plaisir à aller se perdre dans un pub ou un bar du coin pour s’offrir un verre ou deux. Rarement beaucoup plus que ça. Mais déjà trop pour n’importe quelle personne normale, parce qu’il faisait ça absolument tous les jours et, parfois, s’offrait d’autres verres tout au long de la journée. Il a décidé que c’était derrière lui tout ça. Alors, en voyant la journée arriver à sa fin, il a envoyé un message à un ami et client. Il a un nouveau projet en tête et Wesley s’est chargé de le faire apparaître sur sa tablette, la veille au soir. Encore une fois, quand il devait s’occuper mains et esprit pour ne pas trop penser. Il n’aura pas le courage de le tatouer aujourd’hui, mais il a quand même envie de lui montrer l’idée qu’il a développée et veut lui proposer pour un nouveau coin de sa peau. La proposition faite par SMS n’est valide que si l’homme n’est pas déjà enfermé chez lui et prêt à profiter d’une soirée tranquille. Il ne lui propose que de passer par le shop s’il est dans les parages. En fonction de la réponse, Wesley est prêt à plier bagage, à faire un brin de ménage et à fermer boutique jusqu’au lendemain matin où il a prévu de commencer tôt. Là encore, il a veillé à compléter autant que possible sa journée, ce qui est sans doute un peu dingue. Il ne tiendra pas le coup très longtemps s’il continue à ce rythme infernal.

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L’anglais ne savait définitivement pas pourquoi il aimait tant les tatouages. Certes, il s’agissait d’une façon de marquer définitivement des souvenirs et des moments importants sur sa peau. Les siens ne faisaient pas exception à cette règle. Ash possédait quelques dessins qui se faisaient un peu vieux, puisqu’il les avait faits faire lorsqu’il était plus jeune et moins mature. Il ne les regrettait pas. Il ne regrettait absolument rien de ce qu’il avait fait inscrire sur sa peau. Chaque marque représentait un moment important de sa vie. Même si certains pouvaient paraître étranges ou ne semblaient pas à leur place, ils étaient bien là où ils devaient être. Le plus récent en liste avait été le tatouage fait en l’honneur de son désormais fiancé. Il s’agissait d’une éclipse qu’il avait fait graver sur ses côtes. Il n’en avait pas fini avec ces derniers. Les projets se succédaient dans son esprit et il avait la chance que son tatoueur soit à l’écoute. Il était d’ailleurs fréquemment en contact avec Wes. Ce dernier était devenu un bon ami avec le temps, un confident dont il ne pouvait pas se passer. Certains tatoueurs préféraient le silence lors des séances, mais lui acceptait que Ash lui parle de ses états d'âme. Ce soir-là, il l’avait contacté pour qu’il passe à la boutique, pour qu’il puisse voir l'avancée de son futur projet. Il lui avait bien spécifié qu’il n’avait pas le temps le soir-même pour le lui tatouer et Ash comprenait tout à fait. Ils avaient tous les deux leur journée dans le corps et probablement que le guitariste se serait endormi sur la chaise de son tatoueur. Entre les cours de guitare, son groupe de musique et la blessure d’Izan, il manquait de temps dans une journée. L’anglais n’était donc aucunement pressé de passer sur la chaise. Il décida tout de même qu’il s’agissait d’une bonne idée de simplement passer du temps avec Wes, même si ce n’était que pour discuter. Par contre, un pincement au cœur s’en était suivi. Après avoir donné des cours de guitare, il revenait toujours immédiatement à la maison pour tenir compagnie à Izan qui avait grandement besoin de sa présence. Heureusement, ce soir, il était en compagnie d’Helen, alors il n’avait pas besoin immédiatement de lui. Il lui envoya tout de même un petit mot pour le prévenir pour ne pas qu’il s’inquiète. Il mit donc sa guitare dans sa voiture et fila jusqu’à la boutique de Wesley qui se trouvait dans Spring Hill. Poussant la porte de la shop, il eut un immense sourire en voyant l’homme qui faisait un brin de ménage dans ses affaires. « bonsoir! je crois que j’ai oublié de répondre à ton sms, j’étais certain de l’avoir fait! Grosse semaine! » mentionna l’anglais en allant saluer l’homme qui était tout autant son ami. Il alla lui faire un accolade, puis alla s'asseoir. « comment vas-tu? » Le tatouage de l’éclipse datant de juillet ou août - il ne savait même plus, cela faisait un petit moment qu’ils ne s’étaient pas croisés. « merci de m’avoir écrit, j’avais grand besoin de parler à un adulte… » Ash aimait Izan à la folie, mais depuis que Sam lui avait brisé le poignet, il agissait comme s’il était mourant. L’anglais savait qu’il ne fallait pas répondre à ses moindres caprices, mais il était comme cela. Il restait d’un calme légendaire et faisait tout son possible pour que son homme reprenne du mieux et que son moral soit toujours au plus haut. Et puis, ses élèves n'étaient pas non plus les plus matures et il ne pouvait pas réellement avec de discussions avec eux.

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Wesley n’est pas encore complètement certain de voir débouler dans son shop l’un de ses plus grands clients. Assez grand pour être devenu un bon ami, depuis le temps qu’il lui rend visite pour s’ajouter un peu d’encre sur la peau. Et les nombreuses heures que cela représente à se faire tatouer et à parler de tout et de rien. Wesley apprécie fortement le fait d’être, peut-être, devenu un confident pour lui. Il apprécie toujours de voir et de savoir que les gens sont assez à l’aise avec sa personne pour se confier un peu sur tout et n’importe quoi. Lui-même peut-être un grand bavard si on le laisse faire, alors forcément, quand on lui rend la pareille, ça lui plait vraiment. Asher ne tardera peut-être pas à retrouver une petite place temporaire sur la table qui permet à Wesley de tatouer. Ils font ça de façon assez régulière, mais arrivera bien un moment où cette toile-là sera trop chargée pour qu’ils puissent continuer. Pour sûr, il n’a pas hâte de voir ce jour arriver et il n’a pas envie d’y penser plus que ça. En attendant, il continue de penser et de créer des tatouages qui sont presque du sur-mesure pour l’homme qui en possède déjà pas mal. Il ne sait pas s’il sera emballé par celui-ci, mais il veut quand même le lui montrer et ils verront bien ensuite. Soit il le retravaillera pour qu’il soit plus adapté à sa personne, soit il l’abandonnera, soit il le transformera un peu pour en faire un flash. Le moins que l’on puisse dire, c’est que Wesley n’est jamais à court d’idées. Il réfléchit même encore à des idées, quand il fait le ménage dans la boutique pour la fermer en fin de journée. Peut-être qu’il passera sa soirée à dessiner et à créer, puisqu’il ne peut sortir et prendre le risque d’être tenté par l’alcool qui coule à flot de partout.

Quand Asher entre dans la boutique, Wesley se redresse et lui offre un sourire sincère.  « C’est pas grave. J’comptais attendre un petit quart d’heure de plus avant de partir.  » Mais il ose espérer qu’il lui aurait plutôt envoyé un message s’il n’avait pu se libérer pour venir lui rendre cette petite visite. Histoire qu’il n’attende pas plus longtemps que nécessaire. Enfin, peu importe dans le fond, puisqu’il est maintenant là et qu’ils vont pouvoir échanger tous les deux. Peut-être pas très longtemps avant que le brun ne soit forcé de reprendre la route pour rentrer chez lui. Ils échangent une brève accolade avant que le musicien n’aille s’asseoir. Preuve qu’il se sent toujours aussi à l’aise dans le salon de son ami. Celui qui est en train de récupérer sa tablette, avant d’aller le rejoindre pour s’installer dans un siège en face du sien.  « Ça va très bien. Et toi ? » Il va aussi bien que peut aller un ancien alcoolique dont le sevrage est encore récent et qui doit donc lutter tous les jours contre ses envies profondes et presque vicérales. Il refuse d’écouter son cerveau qui ne semble être là que pour le torturer aussi fort et aussi souvent que possible. Il n’a pas droit à la parole, point barre. Les mots d’Asher arrachent un rire immédiat à l’homme en face de lui. Il n’est pas réputé pour être la personne la plus mature et adulte qui soit. Mais certes, il l’est peut-être davantage que les jeunes à qui il apprend. « T’es sûr d’être tombé sur la bonne personne pour ça ? » Il lui lance un coup d’œil amusé par-dessus la tablette sur laquelle il est en train de voyager. « Qui te rend assez dingue pour que tu aies besoin de venir parler à un adulte pas tout à fait adulte ? » 

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