Le quart de travail de Leslie tire à sa fin - en fait, il est terminé depuis une heure déjà, mais bon - lorsqu’elle attrape le dossier du prochain patient. Elle le parcourt rapidement, mais elle accroche rapidement sur le nom qui figure sur celui-ci. Honte à elle, elle a le temps de se demander pendant une grosse minute d’où elle connaît ce nom jusqu’à ce que ça la frappe d’un seul coup. Finnley Coverdale, celui qui lui avait passé une bague en plastique au doigt - c’est fou ce qu’on peut se payer dans les machines à 2$. Elle n’avait pas eu de ses nouvelles depuis très longtemps. Elle n’avait pas cherché à en avoir pour tout dire. Et lui non plus visiblement. L’avait-il un peu oublié comme elle ? À moins qu’il soit là aujourd’hui justement pour la voir elle ? Il mérite toute son attention s’il a perdu des heures à attendre sur une chaise en plastique simplement pour lui parler - elle et son égo peuvent bien rêver. « Est-ce qu'il a demandé à ce que ce soit moi ? » qu’elle demande à l’infirmière qui s’occupe du triage. Elle réfléchit pendant quelques secondes avant de tourner la tête de gauche à droite.« Non. Tu le connais ? » C’était sans doute idiot de même le penser. Il ne pouvait quand même pas savoir que ce serait elle qui serait de service aujourd’hui. Mais il aurait quand même pu prendre une chance, tâter le terrain, revenir une autre fois si elle n’y était pas. Elle n’est même plus certaine d’avoir encore son numéro. C’est sûrement le cas pour lui aussi. C’est probablement le seul endroit où il savait qu’elle pouvait se trouver. Qu’importe, il n’est pas là pour elle. « On peut dire ça, oui. » qu’elle conclut simplement avant de pousser la porte de la troisième salle d’examen.

La surprise qu’elle lit sur le visage de Finn lorsqu’il lève la tête vers elle lui confirme une nouvelle fois qu’il n’avait aucunement l’intention de venir la voir. Pas de quoi se vexer, elle n’en avait pas plus l’intention. Faut croire que le hasard se charge de les forcer à régler leur problème d’adulte. Parce que, oui, ce mariage est bel et bien un problème. Rien d’autre. « T’es là pour m’offrir mon cadeau d’anniversaire de mariage ou tu t’es vraiment fait mal ? » C’était quand au juste ce fameux anniversaire ? Leslie n’arrive même plus à se souvenir de la date exacte. Ça donne une idée de l’importance de l'événement. Chose certaine, ils sont au moins deux, même trois cadeaux en retard. « J'espère que c'est la deuxième option, parce que je vais vraiment passer pour une épouse médiocre. » Tourné la situation au ridicule, elle ne sait pas faire autrement Leslie. Quelque part au travers tout ça, elle a sans doute honte de ne pas avoir réalisé ce qu’elle faisait réellement. Elle a honte de n’avoir rien pris au sérieux, de ne pas avoir mesuré l’étendue de son acte. Même si rien de tout ceci ne veut dire quelque chose, ce mariage reste un boulet à son pied. Elle préférait le moment où elle ne pensait plus à son existence.

« Comment tu vas ? » qu’elle lui demande plus sérieusement après avoir pris place sur la chaise devant le bureau. « Pour de vrai j’veux dire. » Elle ne parle pas de son bras - même si c’est sans doute de ça qu’elle devrait parler. Elle parle de lui, de sa vie en général. Elle se souvient de quelqu’un en plein combat contre ses démons au moment de leur rencontre. Est-il encore dans sa spirale infernale ? Elle gagne souvent celle-là.

@finnley coverdale

Il a bien compris que l’infirmier remettait sa version en cause, en vue du nombre de précisions qu’il lui a demandé, insistant sur des détails considérés comme insignifiants aux yeux de Finnley, et comme particulièrement importants aux yeux du professionnel. En vérité, ce n’est pas tant qu’il ment qu’il ne se souvient pas de la manière dont c’est arrivé, Finnley. Oh bien sûr, il se revoit trébucher et faire une mauvaise chute ; mais il ne saurait dire si le sol était effectivement glissant, s’il s’est pris les pieds dans un obstacle laissé là, s’il a fait un malaise ou si un autre facteur rentre en ligne de compte. Un verre de trop, par exemple, comme n’a pas pu s’empêcher de souligner l’infirmier en considérant la raison de ses dernières visites entre ces murs, proclamant le tout avec un air de jugement qui n’a pas rendu Finnley plus sympathique – qui a sans doute été la raison de cette interminable attente avant qu’un médecin ne daigne enfin venir s’occuper de lui et son bras probablement cassé. Il n’a pas bu un verre de trop, quiconque s’approche de lui peut le sentir à son haleine qui est nettement moins chargée qu’à une époque, à sa démarche assurée et sa locution impeccable ; autant dire que les hypothèses du type l’ont particulièrement vexé et rendu irritable, alors que le rouquin se débat avec une envie de plus en plus oppressante contre laquelle il arrive encore à lutter. Il a bu, oui, mais certainement pas un verre de trop ; et pas assez pour perdre l’équilibre. Tout s’est passé très vite et il n’a pas eu la chance de s’arrêter sur tous les détails qui l’ont amené à chuter, mais ce n’était absolument pas à cause d’un manque d’équilibre, bien au contraire. Un seul verre ne l’a jamais mis dans cet état, et la façon dont l’homme l’a jugé n’a fait que conforter une idée à laquelle il ne devrait pas s’accrocher : il est et restera toujours un alcoolique, peu importe les efforts qu’il peut fournir. Il est resté sobre durant des années, et il suffit d’un accident domestique qui peut arriver à n’importe qui pour qu’on lui recolle cette étiquette sur le front. Alors oui, il peut légitimement se sentir hors de lui, et la vision qui lui apparaît ne l’aide pas franchement à se détendre.

Il n’a rien contre Leslie, non, bien au contraire ; il y a quelques années, au cours d’une soirée, il l’a appréciée plus que de raison et les voilà désormais à partager un mariage qu’aucun n’a jamais cherché à faire annuler. Bien qu’il fût effectivement très alcoolisé ce soir-là, il se souvient d’une femme sûre d’elle, intelligente, presque mystérieuse, qui a rapidement suscité une forme de fascination même si ce n’était que le temps d’une soirée – sans se douter qu’elle les lierait à vie. Non, ce n’est pas contre elle personnellement qu’il est agacé, mais contre ce hasard qui a un sens de l’humour douteux, et qui semble prendre plaisir à le renvoyer à tout ce qu’il aimerait justement fuir. Leslie est sympathique, mais le mariage qui a découlé de cette soirée est une erreur dont il peine encore à se remettre, lui pour qui de tels vœux sont sacrés. « T’es là pour m’offrir mon cadeau d’anniversaire de mariage ou tu t’es vraiment fait mal ? » - « Je me suis vraiment fait mal, mais comme t’es médecin… j’imagine que c’est ce qui se rapproche le plus d’un cadeau ? » Il souligne, baissant un instant le regard sur ce bras inerte et enveloppé dans une écharpe en attendant d’en savoir plus, et qui le fait souffrir à chaque fois qu’il se rappelle à lui. « J'espère que c'est la deuxième option, parce que je vais vraiment passer pour une épouse médiocre. » - « Si tu me répares ça, dit-il en bougeant doucement son bras par réflexe et en regrettant aussitôt en une grimace de douleur, tu seras loin d’être une épouse médiocre. » Ce sera toujours mieux que l’infirmier en charge du tri, un petit con qui mériterait qu’il le retrouve une fois plâtré pour l’assommer un beau coup.

« Comment tu vas ? » - « Super, je touche un peu plus du doigt l’amputation à chaque fois qu’on m’envoie quelqu’un pour discuter plutôt que de me soigner. » Il rétorque, légèrement agacé, relevant les yeux, presque coupable. « Désolé. La douleur, tout ça. » Ça lui fait dire n’importe quoi, ce n’est certainement pas sa personnalité d’être imbuvable, voyons. « Pour de vrai j’veux dire. » - « Si tu veux de mes nouvelles, on peut le faire autour du café infect du distributeur au bout du couloir, quand, tu sais, je serai fixé sur mon sort ? » Ou dans un café plus agréable, où l’on signerait les papiers du divorce, par exemple ? « Pour le reste, me fais pas croire que ton mari te manque, si ? » Oh, une femme aussi accomplie qu’elle subit sans doute moins que lui d’avoir ce boulet attaché à son pied ; et c’est sa façon à lui de lui retourner la question, dans un sens.

@Leslie Cohen

« Je me suis vraiment fait mal, mais comme t’es médecin… j’imagine que c’est ce qui se rapproche le plus d’un cadeau ? » - « C'est vrai que c'est de l’argent facilement gagné. » Comme si Leslie portait un quelconque intérêt à l'argent en général - oui, ça prend bien quelqu'un qui a de l’argent pour ne pas s’en soucier. Reste que juste en se fiant à ses biens et à sa manière de vivre en général, personne ne pourrait se douter qu’elle gagne plus que bien sa vie. Elle est simple, Leslie. Elle l’a toujours été et le sera sans doute toujours. « Si tu me répares ça, tu seras loin d’être une épouse médiocre. » Ce qui est fascinant avec le corps humain, c'est qu'il se répare tout seul comme un grand, même s'il a parfois besoin d'un petit coup de pouce. Ce n'est certainement pas elle qui réparera son bras, mais elle peut lui offrir les outils pour qu'il se répare convenablement, oui. « C’est dans mes cordes. » qu’elle répond tout de même. Les médecins ont toujours le beau rôle, alors que ce sont les autres qui se tapent tout le boulot. Elle détourne ensuite la conversation pour prendre de ses nouvelles. Ce n'est sans doute pas le moment, ni l’endroit pour le faire, mais elle saisit la chance simplement parce que c'est la première fois qu’elle l’a. « Super, je touche un peu plus du doigt l’amputation à chaque fois qu’on m’envoie quelqu’un pour discuter plutôt que de me soigner. » La médecin ne risque pas de se vexer pour ça. Elle passe ses journées à avoir des commentaires sur le temps d’attente des urgences. Une de plus, une de moins, ça ne l’atteint pas le moins du monde. Ce n'est pas comme si c'était de sa faute si la surcharge de travail dépasse le nombre de personnel. « Que veux-tu ? J’aime bien me faire désirer. » Voilà une réplique qu’elle ne peut pas balancer à n'importe quel patient plaignard. De toute façon, après qu’elle l'ai marié le soir de leur rencontre, son commentaire lui semblera tout sauf vrai. Franchement, qui peut résister à Elvis ? Pas Leslie. Et Finnley n’a pas été particulièrement difficile à convaincre non plus. « Désolé. La douleur, tout ça. » Est-ce qu'il s’excusera s'il ne l'avait pas rencontré auparavant ? Sûrement pas. Elle lui laisse tout de même comprendre d'un signe de main de ne pas s'en faire avec ça. « Appelle la prochaine fois. J’ai entendu dire que les maris avaient un passe-droit. » Le genre de passe-droit qui leur évite de passer des heures à attendre. C'est sans doute idiot de donner un tel privilège à quelqu'un qu'elle connait à peine. Après tout, elle ne peut pas faire ça avec tout le monde. Elle l’aurait quand même fait pour lui sans trop savoir pourquoi. Elle aurait même fait service à domicile si elle n'était pas de service.

« Si tu veux de mes nouvelles, on peut le faire autour du café infect du distributeur au bout du couloir, quand, tu sais, je serai fixé sur mon sort ? » Le grimace qui passe sur son visage donne clairement son opinion sur ce fameux café. Après être presque morte d'une intoxication, elle s'est juré de ne plus jamais y toucher. « Ton offre est très alléchante, mais mon estomac me supplie de refuser. » De toute façon, ce n'est pas comme si c'était une réelle invitation. Une invitation médiocre vient automatiquement avec l'espoir d’un refus. Elle aurait dû accepter finalement. Juste pour aller à contresens. « Pour le reste, me fais pas croire que ton mari te manque, si ? » Ce serait culotté de prétendre le contraire alors que, pas une fois, elle n'a réellement pris le temps de prendre de ses nouvelles. Par chance qu'il ne l'est pas plus fait. Il la dédouane de toute culpabilité. Elle hausse finalement les épaules. « Encore faudrait-il que je le connaisse un peu. » Est-ce une invitation à faire connaissance ? Non, pas vraiment. Ce n'est qu’une constatation des faits. Une personne qu'on ne connaît pas ne peut pas nous manquer. La personne qu’elle a devant elle n'a rien avoir avec celle qu’elle a épousée dans une chapelle miteuse. Mais bon, le contexte est bien loin d'être le même avant et maintenant. « Bon, laisse-moi regarder ça. » qu’elle enchaîne, puisqu'il n'est visiblement pas là pour faire causette. Elle fait rouler sa chaise jusqu'à lui pour tirer sur l’écharpe qui l’empêchait de voir l’état de son bras. Elle est même assez gentille pour lui éviter le sale coup du ça fait mal si j'appuie là?. Elle a déjà vu sur son visage qu'il souffrait. Pas besoin de le torturer encore plus. Impossible de faire un diagnostic à l'œil nu, mais la couleur bleuté de sa peau penche pour une fracture. « Par la couleur, ça semble fracturé, mais c'est peut-être juste une bonne entorse. On va être fixé avec la radiographie. » qu’elle lui dit en retournant vers son bureau pour attraper une requête qu’elle complète avant de la lui redonner. « Tu reviens me voir après ? » Ce n'est pas comme s'il avait vraiment le choix. Elle peut toujours remettre le dossier dans les mains de quelqu'un d'autre si c'est ce qu'il préfère, mais Leslie reste son option la plus rapide maintenant qu'elle l'a prise en charge.

Peu enclin à croire au destin, ces retrouvailles avec Leslie sont pourtant ce qui s’en rapproche le plus. À défaut de les avoir volontairement provoquées, Finn les a imaginées à de nombreuses reprises – sans jamais trouver le meilleur moyen de les rendre réelles. La situation dans son ensemble est particulière et, à ses yeux, honteuse – c’est sans doute la raison pour laquelle il ne s’est pas donné la peine de faire le premier pas. L’institution du mariage étant sacrée, cette union n’est pas seulement une vaste blague, mais aussi et surtout un coup de canif sur ses valeurs. Valeurs qu’il aurait peut-être pu préserver en s’assurant d’une annulation rapide, mais aux yeux de Finn le mal était déjà fait et rien ne pouvait changer la donne. Puis, petit à petit, la vie les a éloignés malgré ce lien sacré entre eux, il en a trouvé une forme de bénéfice à évoquer ce mariage comme étant une réussite aux yeux de ceux qui le voyaient comme un échec, et Finn s’est laissé prendre à son propre jeu. À celui-ci s’est ajouté des aléas de plus en plus difficiles à gérer, ne lui laissant que peu l’opportunité de se rappeler au bon souvenir de Leslie – ou, plutôt, ne voulant pas le faire par crainte d’être jugé quant aux difficultés traversées. Alors oui, après autant de fuite, le destin a semble-t-il joué un rôle pour que leurs chemins se recroisent et que, peut-être, cette mascarade s’achève enfin, malgré l’humeur légère et les plaisanteries sur ce mariage qui n’en est pas vraiment un. « C'est vrai que c'est de l’argent facilement gagné. » - « Dommage qu’on ne fasse pas compte commun. » Il rétorque en haussant les épaules ; dommage pour lui, heureux pour elle. Ce n’est que la représentation de leurs rôles, après tout, il n’est pas difficile de deviner celui qui a eu le plus de chance, et celui qui s’est condamné à travers cette union, aussi fausse soit-elle.

Il est donc bien celui qui a de la veine, d’autant plus en considérant le métier de son épouse, et les raisons de sa venue aujourd’hui. Il n’a pas encore la certitude quant à son état, mais il se fie à son sixième sens, pas toujours bien aiguisé, mais particulièrement efficace dans des situations comme celle-ci. « C’est dans mes cordes. » - « Dans le cas contraire, je m’en serais plaint à la direction. » Il ajoute avec un léger sourire pour la peine, s’imaginant bien qu’en tant que médecin urgentiste, une fracture relève de l’ordinaire, et que ce n’est de loin pas un cas susceptible de lui poser des difficultés. Ce qui lui en pose, à lui, c’est cette douleur qui s’accentue toujours un peu plus à mesure que les gens autour de lui évaluent sa situation ou, pire, lui demandent des nouvelles, alors que Finnley aimerait être soigné avant toute bienséance, et s’il ne peut pas se vanter de connaître sa femme par cœur, il peut au moins compter sur des souvenirs qui lui indiquent qu’elle n’est pas susceptible. « Que veux-tu ? J’aime bien me faire désirer. » - « J’aurais pu te croire si ça n’avait pas pris quatre shoots et une bague en plastique pour te convaincre de m’épouser. » Tant qu’à avoir piétiné ses valeurs, autant continuer joyeusement, à travers un humour douteux, mais qui frappe juste. Après tout, elle ne s’est pas fait désirer ce soir-là, bien au contraire ; il n’avait pas été difficile de la faire céder, même Finnley s’en était étonné. Bien sûr, si on lui demande son avis aujourd’hui, il aurait préféré qu’elle soit véritablement insaisissable, ce soir d’il y a deux ans.  « Appelle la prochaine fois. J’ai entendu dire que les maris avaient un passe-droit. » - « Je ne veux pas te vexer, mais j’espère qu’il n’y aura pas de prochaine fois. » Plutôt peu maladroit au quotidien, Finn n’a pas envie de réitérer l’exploit et de se découvrir un nouveau penchant pour les os cassés – celui pour la bouteille suffit amplement. « Mais merci, j’apprécie. » Finalement, elles ne sont pas difficiles à trouver, les raisons pour lesquelles le divorce n’a jamais été prononcé. Plutôt que d’admettre qu’il a manqué de discernement, il est plus agréable de trouver des arguments, aussi futiles soient-ils.

« Ton offre est très alléchante, mais mon estomac me supplie de refuser. » Faisant mine d’être vexé pendant un instant, Finn détourne bien rapidement la conversation sur elle – c’est préférable, vu les circonstances. « Encore faudrait-il que je le connaisse un peu. » - « Oh non, il aurait peur que tu t’attaches. » Et il prend l’habitude de parler de lui à la troisième personne, quelle horreur. Nul doute que s’ils apprenaient à se connaître, il serait sans doute celui qui s’attache le plus, bien que cette perspective paraisse saugrenue étant donné qu’il est du genre distant et froid, mais elle a nettement plus de qualités qu’il n’en possède, c’est certain. « Bon, laisse-moi regarder ça. » Hochant doucement la tête, il suit Leslie du regard alors qu’elle s’avance jusqu’à lui et la remercie silencieusement pour sa délicatesse qui tranche avec celle de l’infirmier d’il y a quelques minutes. « Par la couleur, ça semble fracturé, mais c'est peut-être juste une bonne entorse. On va être fixé avec la radiographie. » Il grimace une nouvelle fois, non pas parce qu’il souffre, mais parce que sa crainte semble se confirme de plus en plus. « Tu reviens me voir après ? » - « Pour faire valoir mon passe-droit ? Évidemment. » Se saisissant du papier qu’elle lui tend, il lui offre un sourire reconnaissant avant de disparaître dans les couloirs.

Il a l’impression d’avoir perdu des heures supplémentaires quand il revient enfin dans le service de Leslie, usant de son pouvoir et nommant la jeune femme comme ultime argument pour qu’on s’occupe de lui sans tarder (dans la limite de l’urgence des cas, n’allez pas croire qu’il est insensible à la souffrance des autres). Ses radios dans une main, il ne tarde pas à les tendre à la jeune femme quand elle réapparaît. « T’as raison, ça marche bien le passe-droit, ça laisse songeur. » Il s’en amuse dans un premier temps et après quelques instants, se montre plus sérieux quand il demande : « alors, verdict ? »

@Leslie Cohen

« Dommage qu’on ne fasse pas compte commun. » Encore heureux plutôt. Voilà un problème auquel elle n'a pas envie de réfléchir pour l’instant. Elle n'est pas experte en divorce, Leslie, ni en mariage d'ailleurs, mais elle sait tout de même que l'un comme l'autre vient avec des frais. C'est souvent la prochaine fois qui ressort d'un divorce : l’un est partie avec la moitié des affaires de l'autre. Oui, la situation entre elle et Finnley est totalement différente. Ils n'ont partagé ni argent, ni aucun bien. Ça pourrait sans doute être assez facile pour lui de profiter de ce divorce pour s'en mettre plein les poches. Elle a envie de croire que ce n'est pas son genre. Il aurait sûrement insisté pour que le divorce soit prononcé bien avant si ça aurait été le cas. Toutefois, Finn reste un inconnu. Elle n'a aucune réelle idée de ce qu'il peut réellement faire ou pas. Vu là chance qu’à Leslie, oui, elle ne serait pas si surprise d'avoir besoin de s’équiper d'un avocat en béton quand le moment viendra. « J’aurais pu te croire si ça n’avait pas pris quatre shoots et une bague en plastique pour te convaincre de m’épouser. » La voilà qui ne peut s’empêcher de rire à cette remarque. « Outch. » Bon, elle pourrait ajouter qu’elle avait déjà de l’alcool dans le corps avant de le croiser dans ce bar, mais ça n’aiderait en rien sa cause. Elle gagnerait sûrement à apprendre à se laisser désirer. Ça lui éviterait de se retrouver dans une situation comme celle-ci. Mais quand elle aime ce qu’elle a sous les yeux, Leslie est gourmande et (trop?) entreprenante. Elle ne réfléchit pas. Elle veut et elle obtient voilà. « Je ne veux pas te vexer, mais j’espère qu’il n’y aura pas de prochaine fois. » qu'il ajoute alors qu’elle aborde l'idée d'une prochaine fois. Encore là, aucune chance qu’elle se vexe - ça lui en prend beaucoup pour se vexer d'ailleurs. Elle est bien consciente que personne n’aime la voir par le biais des urgences. Mais elle est aussi consciente qu’on a souvent besoin d'un médecin bien plus souvent qu'on le voudrait. Toujours pratique d’avoir un contact pour les virus tenaces de la vie. « Mais merci, j’apprécie. » - « Pas d’quoi. » qu’elle ajoute en haussant légèrement les épaules.

« Oh non, il aurait peur que tu t’attaches. » S’attacher, c'est un mot relatif. Elle comprend le sens qu'il emploie (même si ça n'a rien de sérieux). S’attacher, développer des sentiments, ce n'est pas quelque chose qui arrive si souvent à Leslie. Ce n'est pas forcément quelque chose qu’elle rejette. Elle ne cherche pas, mais elle ne rejette pas non plus. C'est juste que ça lui prend du temps. Trop de temps. L’autre a déjà eu le temps de partir avant ça. Est-ce qu’elle pourrait s'attacher à lui autrement ? Oui, elle pourrait facilement tenir à lui sans qu’aucun sentiment amoureux n'y soit mêler. C'est pas forcément mauvais d’avoir un attache. « J’comprends. J’suis déjà en train de m'attacher après dix minutes. » qu’elle lui balance toutefois alors qu’un sourire en coin vient retrousser ses lèvres. Elle ne peut pas nier qu’elle aime la répartie de Finn. Elle ne l’a pas épousé pour rien après tout. Elle se demande s'ils se seraient revus sans cette histoire de faux-mariage-finalement-pas-faux qui est venu instaurer une panique? un malaise ? entre eux. On ne le saura jamais. Leslie change finalement de se sujet pour s’occuper de la véritable raison de sa visite : son bras endoloris. Elle lui donne le papier qui lui permettra d'aller passer une radiographie pour regarder l'étendue des dégâts tout en lui proposant de revenir la voir par la suite. « Pour faire valoir mon passe-droit ? Évidemment. » qu’il accepte en quittant le bureau.

Elle a le temps de voir deux autres patients avant qu’on l’avise que Finnley est de retour dans la salle d’évaluation. Après ça, elle pourra rentrer chez elle. Dès qu’elle fait son entrée, elle prend les radios que lui tend le rouquin. « T’as raison, ça marche bien le passe-droit, ça laisse songeur. » Un sourire amusé se glisse sur ses lèvres. « Me dit pas que c'est toi qui s'attache finalement ? » Uniquement pour pouvoir conserver son passe-droit évidemment. Elle repose finalement son attention sur les radios alors qu'il lui demande plusieurs : « alors, verdict ? » - « C’est léger, mais, oui, c'est bien fracturé. » qu’elle lui confirme avant de retourner dans sa paperasse à la recherche des bons papiers. « Je te donne ça pour aller faire ton plâtre. Tu l'auras pour au moins quatre semaines. Et voilà pour la douleur. » qu’elle lui explique en lui remettant les deux papiers. « Besoin d'un arrêt de travail ? » qu’elle lui demande ensuite plus trop certaine de ce qu'il fait comme boulot, si c'est nécessaire ou non.