Les sourcils froncés, l’air dubitatif, j’observais scrupuleusement la dernière réponse de Mac suite à mon SMS. Si l’une de mes peurs premières était de me faire traiter de boomer par ma (plus) jeune cousine, je parvenais pour l’instant encore à me convaincre qu’enseigner à une bande de collégiens me permettait de rester à la page et de faire illusion. Aussi j’étais presque certaine à 100% que ce point qu’elle avait mis à la fin de sa réponse n’était pas bon signe. Surtout quand la question initiale était aussi simple que "Comment ça va ?" Ok j’avais un instinct maternel très prononcé quand il s’agissait de Mac et de tous les scénarios catastrophes fictifs qui ne se produiraient ô grand jamais mais que j’étais tout de même capable d’imaginer…Mais là ? Un p.o.i.n.t. ? Pas d’emojis, j’aurais pu laisser passer. Mais une telle violence syntaxique pour terminer son SMS…il y avait forcément quelque chose qui n’allait pas. Il ne me fallut pas plus de 5 minutes pour attraper mes affaires, enfiler mes baskets, mon manteau, attraper les clés de ma voiture et me mettre en route pour son appartement, espérant que Spencer ne serait pas dans le coin afin de pouvoir lui tirer les vers du nez si vers à tirer il y avait. J’espérais simplement ne pas débarquer comme une fleur au milieu d’une potentielle dispute, me doutant que cela aurait probablement nui à mon statut de cousine stylée que je m’appliquais à entretenir (e.g. : en ne faisant par exemple pas part de mes scénarios catastrophes fictifs à Mac. Il y avait des choses qu’il valait mieux qu’elle continue d’ignorer).
Je sonnais à la porte et jetais rapidement un coup d’œil derrière elle quand elle vint m’ouvrir afin d’éloigner l’hypothèse dispute et de confirmer que nous ne serions que toutes les deux pour discuter du drame du point. Ce n’est qu’une fois que j’eus l’assurance d’un tête-à-tête que je daignais poser mon regard sur elle avec un sourire synonyme de "Surprise !", avant de passer rapidement derrière elle et de me frayer un chemin jusqu’à la cuisine sans lui laisser la possibilité de me refermer la porte au nez (ce qu’elle n’aurait bien évidemment jamais osé faire). Je sortis une bouteille de vin de mon sac tout en déclarant : « C’est vendredi soir, c’est Shabbat, on doit boire ! » Mh. Ok, ça n’était pas exactement comme ça que c’était formulé en général mais potato potahto, l’important c’était le résultat et j’avais parié sur le fait qu’une bouteille de vin ne serait pas de trop pour cette soirée. « J’ai commandé à manger, le livreur devrait sonner d’ici une dizaine de minutes. J’espère qu’italien ça te convient ? » J’appuyais mon propos par un sourire qui, je l’espérais, permettait de traduire un "Rappelle-toi que je suis ta personne préférée sur la terre entière avant de m’en vouloir pour cette intrusion." Je sortis ensuite mon téléphone pour le poser sur la table avant de me tourner à nouveau vers elle : « Je viens juste vérifier une théorie. Je te repose la question à l’oral pour voir si mon ressenti est le même ou non : comment ça va ? » Aucune chance pour rester la cousine cool encore très longtemps si je continuais comme ça.