when did all our lessons start to look like weapons

@james beauregard

lieu: suncorp stadium, toowong.
(c): himerobyn (gif), luleaby (codage).

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Aller voir un match au stade faisait partie des petites traditions qui s’étaient installées au fil des années entre les enfants Beauregard. Pas pour tous les individus de la fratrie, pas tous en même temps et pas sur une régularité qui avait pu être celle d’autrefois, mais c’était un quelque-chose qui était resté malgré les années qui défilaient et c’était toujours un plaisir pour Ezra en tous cas de retrouver certains d’eux sur place. La bonne ambiance était toujours au rendez-vous, le spectacle aussi et en plus cela leur permettait de prendre l’air de profiter de quelque-chose en dehors de leur quotidien; ces derniers temps, il en avait particulièrement besoin de son côté. Il avait donc fait appel à une baby-sitter pour les plus petits, Noah était parti voir sa mère pour la soirée - c’était une pierre deux coups pour tous sur cette partie là -, et Ezra s’était rendu au stade où il avait donné rendez-vous à son ainé.

Il ne mit qu’à peine une poignée de minutes avant de repérer James à travers la foule, une fois les premières portes d’entrée du lieu passées. Il lui fit un geste de la main à distance avant de s’approcher de lui et de lui faire une accolade pour le saluer. « Si j’avais du parier qui de nous deux arriverait en premier, j’aurais encore été gagnant. » S’il y avait bien quelque-chose par laquelle Ezra avait toujours réussi à briller, c’était son retard - il savait même que certains de ses proches lui donnaient de fausses heures de rendez-vous pour être certains qu’il soit lui à l’heure lorsque c’était important. « Bières et hot-dogs, comme d’habitude ? » Il indiqua autant d’un mouvement de tête que du pouce le stand qui se tenait à quelques pas d’ici - il mentirait en disant qu’il n’avait pas eu hâte de ce moment là également.

Ce ne fut qu’une fois les mains bien chargées et les billets validés qu’ils rejoignirent leurs places attitrées dans le stade pour le reste de la soirée. Avec un soupire de soulagement, il s’assit à sa place, posant avec précaution sa bière sur le sol entre ses pieds pour en pas la renverser quand son carton contenant son hot-dog eut le droit lui d’être posé sur ses genoux - il ferait surement une tâche sur son pantalon en agissant de la sorte, mais qui viendrait lui faire la montre réflexion désormais, hein ? Il était le seul à s’occuper de savoir si les tâches étaient dérangeantes sur ses vêtements maintenant, alors il pouvait bien faire ce qu’il voulait. « Mathis est chez sa mère ce soir ? » Il tourna son visage vers James, haussant légèrement un sourcil. Il peinait déjà à garder en tête le programme de ses propres enfants, alors celui des enfants de ses frères et soeurs n’était pas celui qu’il réussirait à se remémorer avec le plus de facilité.

Quand Ezra l’a invité à assister à un match de rugby, la première pensée de James a été de refuser : il n’a pas la tête à ça. Depuis que Savannah lui a annoncé que la rentrée de Mathis dans sa nouvelle école a été des plus catastrophique, James a bien du mal à penser à autre chose. Il est plus préoccupé par le bien-être de son fils, c’est sa raison d’être par dessus tout mais il a l’impression d’avoir échoué. Echoué d’être un bon parent pour lui, échoué à lui offrir un cadre de vie sécurisé dans lequel il peut s’épanouir en dépit de ses efforts et de son engagement dans la vie de son fils. Il a beau se repasser le film, il ne sait pas ce qu’il aurait pu mieux faire pour protéger son fils : dans sa précédente école il avait confronté ses harceleurs et leurs parents, a eu tout un tas de rendez-vous avec la directrice et il l’a finalement changé d’école après l’inaction de la direction. Le changement d’école n’a pas solutionné le problème du harcèlement puisque visiblement, le même schéma semble se reproduire inlassablement, au grand dam du père de famille qui se sent plus que jamais démuni. Savannah est -pour une fois- présente pour leur fils mais il la pense si incapable d’être une mère responsable, qu’il ne la compte pas dans l’équation. Lorsqu’il réfléchit à un plan d’action pour régler la situation il pense seul sans la considérer : la coparentalité n’est qu’une contrainte administrative qu’il subit. Dans son esprit Savannah ne peut qu’envenimer une situation ou créer de nouveaux problèmes, il est donc le seul adulte responsable sur qui il peut compter quand il s’agit de Mathis. Mais Mathis n’est pas avec lui cette semaine et James se sent désespérément seul chez lui à ruminer un problème sur lequel il n’arrive pas à avoir d’emprise. Il répond donc positivement à l’appel d’Ezra : sortir de chez lui ne pourra que lui faire du bien. Et puis assister au match du dimanche est une tradition dans leur fratrie, et les traditions, les Beauregard y sont particulièrement attachés.

Comme à son habitude, James est arrivé en avance, vingt minutes exactement. Une habitude qu’il a gardée après l’armée et qui est des plus naturelles pour lui. Ezra, lui, tarde à se montrer mais cela n’inquiète pas James qui y est habitué. Atteint de retardomalgie sévère, Ezra vit sur un autre fuseau horaire, ce qui agace parfois James qui ne lui en tient pas rigueur aujourd’hui, au contraire. Il répond à ses signes de la main, un sourire est accroché à ses lèvres en voyant son petit frère. « Si j’avais du parier qui de nous deux arriverait en premier, j’aurais encore été gagnant. » La remarque fait rire le professeur de sport qui hoche la tête avant de répondre. “Il y a des choses qui ne changent pas.” Le moment pourrait avoir un air de déjà vu mais cela a un côté rassurant. « Bières et hot-dogs, comme d’habitude ? » Le régime alimentaire que James s’impose est strict, ses assiettes ont trop souvent l’air d’être préparé par un nutritionniste mais ses entraînements et les courses auxquelles il est inscrit nécessite une préparation alimentaire très rigoureuse. Aujourd’hui cependant, pour faire plaisir à Ezra il s’autorise un écart, un cheat meal pour une fois. “Bien sûr.”

Les deux frères Beauregard s’installent finalement à leur place, une bière dans une main et le hot-dog dans l’autre. Avec beaucoup de précautions, il pose sa serviette en papier sur sa jambe avant de poser le hot-dog par dessus pour éviter tout risque de tâche disgracieuse. « Mathis est chez sa mère ce soir ? » James ne peut s’empêcher de soupirer. “Malheureusement.” Une réponse qui résume bien la situation et l’avis très tranché qu’il a pour la mère de son fils. “Elle l’a eu pour la semaine de la rentrée aussi, tu sais on l’a changé d’école…” Ezra est au courant des problématiques de harcèlement qui entourent la scolarité de Mathis depuis le début jusqu’à leur décision il y a quelques mois de changer d’établissement. “mais ça ne s’arrange pas, je vois bien qu’il n’est pas bien.” Et c’est un véritable crève-coeur pour James qui se sent plus qu’impuissant dans cette situation. “Donc j’espère qu’elle a au moins su lui remonter le moral cette semaine.” C’est le strict minimum mais avec Savannah une déception n’est jamais loin et il préfère éviter d’avoir de trop grandes attentes.

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@james beauregard

lieu: suncorp stadium, toowong.
(c): himerobyn (gif), luleaby (codage).

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Les habitudes avaient tendance à avoir la vie dure, que ce soit les bonnes ou les mauvaises, et les Beauregard ne faisaient pas exception à la règle; s’il y avait de mauvaises habitudes qui pouvaient se percevoir chez les garçons de la fratrie, celle qui était bonne et persistait avec les années c’était de se retrouver au stade pour un match d’un quelconque sport. James et Ezra étaient de ceux qui s’adonnaient avec assiduité à cette tradition, en témoignait le fait que le plus âgé des deux ait répondu présent sans trop d’hésitation à la proposition de son cadet. Et puisque les habitudes perduraient sur tous les points: bien sur qu’il fut sur place avant lui et que cela n’étonna personne. « Il y a des choses qui ne changent pas. » Bien sur que cela le fit rire même si son frère se moquait gentiment de lui - il était bien au fait de son propre comportement. Rapidement par la suite, Ezra proposa à James de s’octroyer un repas qui à ses yeux était digne de ce nom: bière et hot-dog, qui irait parfaitement avec le programme du soir - ici le match de rugby qui allait se disputer sur le terrain. « Bien sûr. » Comme s’il était un enfant le jour de Noël, un grand sourire s’afficha sur les lèvres du plus jeune alors qu’il se rendait au stand.

Après quelques acrobaties pour rejoindre leurs places - les rangées étaient déjà bien pleines tant Ezra avait mis du temps à arriver sur place et le détour par le stand de ravitaillement n’avait pas joué en leur faveur -, et s’être assurés que leur nourriture ne tombe pas de leurs mains, les deux frères purent enfin s’installer correctement et s’apprêter pour profiter du spectacle. Ce dernier n’ayant pas commencé, ils avaient un peu de temps devant eux pour échanger et rattraper sur leur vie respective; ces rendez-vous sportifs permettaient aussi de prendre des nouvelles les uns des autres. « Malheureusement. » Même s’il savait que c’était là le coeur de père de James qui parlait en répondant de cette manière, Ezra ne put s’empêcher de froncer un peu le bout de son nez pour deux raisons distinctes: parce-qu’il comprenait son frère, mais aussi parce-qu’il ne pouvait malheureusement adhérer complètement à l’idée que ce soit une mauvaise idée que Mathis passe du temps avec sa mère. Certes, les compétences de cette dernière ne s’étaient pas prouvées être tout le temps exceptionnelles, mais il ne connaissait que trop bien la sensation d’être mis de côté pour un rôle qui devait lui revenir de droit et naturellement à la jeune femme: celui d’être mère malgré tout. Ezra connaissait bien puisqu’il avait lui-même été écarté de son rôle de père auprès de Noah pendant de longues années. Malgré tout, sa loyauté allait à son frère et il le comprenait aussi - alors il garda son commentaire pour lui.

« Elle l’a eu pour la semaine de la rentrée aussi, tu sais on l’a changé d’école… » Opinant quelque peu du chef, il but une gorgée de sa bière. « Tu m’en avais parlé ouais. » Parce-que c’était un sujet qui tenait à coeur à son frère et qu’il avait eu besoin de se confier sur le sujet à un moment donné, si bien que bien sur qu’Ezra avait eu vent de cette histoire. « mais ça ne s’arrange pas, je vois bien qu’il n’est pas bien. » Pinçant quelque peu les lèvres, il soupira un instant. « T’as pu en discuter un peu avec lui même s’il était pas chez toi ? » Il faisait partie d’une génération, Mathis comme son propre fils Noah, qui pouvait avoir accès aux deux parents d’un message envoyé ou d’un appel passé là où les choses n’étaient pas aussi simples à leur époque à eux. C’était un avantage pour les parents divorcés et pour leurs enfants: tous avaient des nouvelles de leurs proches malgré les relations entre ces derniers.

« Donc j’espère qu’elle a au moins su lui remonter le moral cette semaine. » Il fit glisser ses lèvres l’une sur l’autre, avant de tourner son regard vers son frère. « Tu penses qu’elle fait pas attention à tout ça malgré tout ? » Il ne prenait pas la défense de Savannah, attention: c’était important d’être précisé ici. Il ne faisait en sorte que de pointer du doigt des choses qui semblaient déranger son frère, si cela pouvait permettre ce dernier de s’exprimer sur la question pour soulager un peu le stress qui était le sien c’était surtout l’objectif ici. « Je veux dire: ça doit se voir que Mathis est pas bien non ? » Et puis surtout, dans ses souvenirs, il lui semblait que la jeune femme avait participé et était d’accord pour ce changement. Elle se devait donc de porter un regard plus attentif que cela n’avait pu être le cas les autres années pour celle en cours - surtout que le changement d’école n’était pas anodin pour un enfant de cet âge. « Ou tu penses qu’il est pas assez à l’aise pour en discuter avec elle ? » Parce-qu’il y avait de ça aussi: si le gamin n’était pas à l’aise avec sa mère, prenant inconsciemment en compte les ressentis de son père sur la question, peut-être que sa mère n’aurait pas l’opportunité de voir que les choses ne se passaient pas comme prévues - et ne pourrait pas donc l’aider comme il le faudrait. Noah lui avait toujours été à l’aise de discuter de tout autant avec son père qu'avec sa mère, étant un gamin très expansif et ayant rapidement compris que de garder pour lui ses ressentis n’était pas utile - si bien qu’Ezra ne saurait exactement comprendre les choses d’un simple coup d’oeil, par rapport à la situation de son frère. En revanche il savait ce que c'était de passer son temps à changer son fils d’école: là dessus, James pouvait compter sur son point de vue.