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@Mabel Griffiths & Alma Barton Central Business District - Siège de la MHI

C’est loin d’être une instance rare, de recevoir des personnalités au sein du siège de Michael Hills. La maison est prestigieuse malgré les scandales qui ont entaché son nom à cause des frasques de Saül Williams, et sa réputation n’est plus à faire. Ainsi, travailler avec elle est une bonne publicité pour ceux qui acceptent la main qu’on tend vers eux. C’est donc presque la routine pour Lola que de se préparer à une rencontre du type de celle qui l’attend ce matin. En réalité, elle la prépare depuis des jours en association avec ses collaborateurs et ses assistants, lesquels n’ont pas lésiné sur les informations et les plans bien ficelés pour lui faire entendre raison sur un choix qui lui paraît évident sur le papier, qui l’est un peu moins en réalité puisque rien n’est jamais facile dans ce milieu, c’est un fait, et que les embûches existent. Ça ne lui fait pas peur, elle en fait son affaire. La direction veut renouveler l’image de la marque depuis un moment maintenant, et alors que Rhett Hartfield a plié bagage avec sa compagne, laquelle s’avère être à la tête de la société depuis plus d’une année désormais, il a laissé vacante la place qu’il occupait en tant qu’égérie de la campagne pour les bijoux unisexes qui a marqué le retour en fanfare de Michael Hills sur le marché, et ce pour se concentrer à ce qui la contraint à quitter le continent. Grand bien lui fasse, tout le monde se réjouit pour lui, pour eux. Ce n’est pas si grave, ou du moins, ça ne l’est plus, puisqu’à force d’acharnement et de recherches tout au long des dernières semaines, chaque petites mains autour d’Alma se sont affairées pour lui trouver une alternative intéressante à envisager.

Elle la reçoit ce matin en exclusivité "Mabel, bonjour, je suis Alma Greene." Elle secoue la tête "Barton. Enchantée." se reprend-t-elle très vite, faisant passer son erreur pour pas grand-chose en partageant avec elle sa joie de la rencontrer. Mabel Griffiths resplendit sous les lumières douce du sas dans lequel elle attend patiemment l’heure de son rendez-vous. Sans attendre, Lola lui tend une main, et remarque ce qu’elle tient dans l’autre avec un petit sourire qui illumine son visage lorsqu’elle lui dit dans la foulée "Vous avez été accueillie comme il se doit, à ce que je vois." Encore heureux. Dans un environnement aussi prestigieux, chacun est formé à la politesse, et sa secrétaire est une perle qu’Alma ne braderait pour rien au monde. Cependant, pour créer une complicité avec la jeune femme, c’est après lui avoir serré la main quelle lui fait sur le ton de la confidence "Le café est bien meilleur dans mon bureau, mais faites comme si je ne vous ai rien dit." Elle ne ment pas, mais c’est un moindre détail, celui qui lui permet seulement d’enchaîner et de lui proposer avec toujours autant de bienséance "Si vous voulez bien me suivre, c’est juste à côté."  

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"Le plaisir est partagé." L’échange de politesses est complaisant, encore qu’elle pense sincèrement ce qu’elle dit, et qu’elle est ravie d’enfin rencontrer cette femme dont elle a tant entendu parler au cours des dernières semaines. Lola observe Mabel avec un sourire discret, essayant de deviner ce qui se cache derrière ce calme apparent. Elle sait qu’elle est redoutable, c’est écrit partout sur la toile. Ses collaborateurs ont fait un travail d’orfèvres avec les recherches qu’elle leur a demandé de faire au sujet de l’actrice dont la réputation la précède. Ainsi, elle a une vue d’ensemble du personnage public qu’elle est, et elle se questionne, essaye de déterminer à quel point elle joue la comédie ici, puisqu’elle a l’air moins d'une arriviste que d’une petite-fille sage ; très loin donc de ce qu’on dépeint dans les lignes des articles qui lui ont été rapportés. Elle remarque ses mains qui effleurent machinalement les plis de sa jupe, geste révélateur d'une nervosité bien dissimulée. Ce genre de détails, elle les capte rapidement — une habitude forgée par des années dans l’univers exigeant du luxe. Elle sait que chaque geste trahit quelque chose de plus profond, même chez une femme aussi raffinée que Mabel avec qui, très vite, elle essaye d’instaurer un climat de confiance en plaisantant sur la qualité du café que lui a apporté sa secrétaire, et ne fait qu’acquiescer à ce qu’elle lui répond, l’invitant ensuite à la suivre dans son bureau qu’elles rejoignent rapidement.

"Asseyez-vous, je vous en prie." lui dit-elle en rejoignant elle-même sa place, mais en ne s’installant pas tout de suite. À la place, elle lui demande, restant sur l'idée du café bien meilleur dans son bureau qu'ailleurs "Un autre café ?" En attendant qu’elle lui réponde, elle lui montre le fauteuil à sa disposition, puis elle se décale pour rejoindre le coin rafraichissements de son bureau avec une élégance qu’on pourrait croire calculée, qui ne l’est pas autant que ça en vérité. Au loin, elle laisse son regard glisser vers le dossier soigneusement préparé pour l’entretien qui est posé sur son bureau ; il recèle de faits sur la jeune femme qu’elle écoute avec attention, dans l’attente de savoir si oui ou non, elle a envie d’une autre boisson. Dans le même temps, elle réalise que Mabel semble déjà séduite par les créations de Michael Hill "Vous vous êtes donc intéressée à notre esthétique avant de vous rendre à cette entretien, Mabel ?" lui répond Alma avec un sourire bienveillant, accentuant volontairement cette fausse familiarité en utilisant son prénom. Ça semble être la moindre des choses à faire. Sauf que tout le monde n’est pas aussi impliqué que l’actrice, c’est une certitude dont elle peut témoigner avec autant de désolation que de mépris. Elle incline la tête, et après s’être servi à elle-même une rasade de café fumant, tente l’air de rien de percer l’expression du visage de son interlocutrice à qui elle fait, intriguée par ses paroles "Pourquoi êtes-vous autant étonnée par cette prise de contact ?" Elle revient vers elle, sa tasse tenue entre ses mains, ses épaules se haussant très doucement "Votre nom circule depuis des années dans le monde de la joaillerie de luxe, il me semble même que vos contrats avec Dior sont renouvelés depuis quelques saisons maintenant, non ?" Ce n’est pas une question piège, c’est une invitation subtile à soulever des sujets qui fâchent avant que Lola ne soit forcée de le faire à sa place.

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Mabel refuse le café neuf que Lola lui propose, ça lui permet de revenir tranquillement vers son bureau avec un certain sens de l’anticipation, se rasseyant en face d’elle pour mieux entrer dans le vif du sujet. Elle coince une mèche de cheveux bruns derrière son oreille, croise élégamment les chevilles sous le verre épais du bureau auquel elle s’accoude, le menton droit, le visage détendu, l’oeil vif et perçant. On pourrait lui reprocher de faire les choses trop instinctivement ; un entretien de ce genre se tient généralement avec des agents et des avocats, mais Alma ne travaille pas de cette façon. Elle aime l’intimité du tête-à-tête ; elle préfère discuter, apprendre de la personne qui se trouve en face d’elle, cherchant surtout à jauger la sincérité de son interlocuteur, décelant ses failles et ses qualités en un seul coup d’oeil. Avec Mabel, c’est un tantinet différent, elle s’imagine qu’il y a une grande part de faux-semblant dans la manière dont elle se présente aujourd’hui, sa réserve lui paraissant loin des ragots qui tournent à son sujet.

Son image publique la suit, des rumeurs circulent, et parce que la MHI ne peut se permettre de travailler avec des gens qui amènent la polémique, elle s’est renseignée ; pas plus qu’elle ne l’aurait fait avec quelqu’un d’autre cela dit, la jeune femme n’est pas traitée à meilleure enseigne que les autres, c’est juste un protocole auquel la maison tient depuis la débâcle de Saül Williams. Elle laisse un très léger rire lui échapper, le cliquetis de sa montre contre la manchette qu’elle porte au même poignet se répandant dans l’espace qui les sépare "C’est drôle vous savez, si notre entretien s’avère concluant, vous remplacerez Rhett Hartfield en tant qu’égérie de la collection que vous représenterez. C’est une collection unisexe." précise-t-elle. Drôle n’est probablement pas le bon terme, mais elle tient à lui faire subtilement entendre qu’elle connait son passé, et ajoute dans la foulée, une facétie certaine faisant rayonner son visage sublimé par le maquillage "A croire que nous aimons les outsiders, chez Michael Hill." Ni Mabel ni Rhett n’est réellement un outsider — Rhett plus que Mabel, à dire vrai. Mais leur carrière vient avec des histoires intéressantes, saupoudrées d’un nuage de mythes dont elle aimerait savoir s’ils sont vrais ou faux.

En attendant, elle hoche la tête à ce que la jeune femme lui répond, reprenant entre ses deux mains sa tasse de café fumant "C’est tout à votre honneur." Elle hoche la tête, roule ses lèvres l’une sur l’autre en enchainant sans délai "Je ne vous apprends rien si je vous dis que certaines personnes que nous sollicitons se contentent d’envoyer leur agent pour traiter avec ce genre d’entrevue, alors c’est appréciable de tomber sur quelqu’un qui fait ses devoirs avant de se présenter soi-même. Vous êtes une perle rare, Mabel." Elle incline la tête sur le côté, plisse les yeux pour faire la focale sur le visage presque poupin de la blonde. Elle a gardé de rondeurs de l’enfance, ça lui va à ravir. Elle a cette aura intemporelle qui lui permet de toucher tous les coeurs de cible ; elle est assez raffinée pour parler aux femmes d’un certain âge, active pour viser les besoins des femmes qui travaillent, et juvénile pour permettre aux adolescentes de s’imaginer devenir comme elle plus tard — elle ne compte pas les hommes, ils sont la cible la moins difficile à convaincre. Un léger sourire en coin sur le visage, tirant des conclusions des paroles qu’elles échangent, elle ajoute "Je suis ravie vous soyez sensible à nos créations." Et là encore, c’est sincère. Elle n’a qu’une toute petite partie de responsabilité dans ce lancement-ci en particulier, ce dernier ayant été façonné et dirigé d’une main de maître par Evelyn elle-même, mais puisque cette campagne a relancé l’intérêt autour de la marque, il est vrai que les compliments qui l’entourent ont une saveur particulière pour chaque membre de l’équipe dont elle fait partie.

Enfin, c’est d’un geste discret qu’elle fait glisser le dossier posé sur le bureau pour s’y intéresser, repousse doucement sa tasse de café, et interroge Mabel au sujet de son étonnement concernant cet entretien. Elle remarque qu’elle choisit bien ses mots et décide de se concentrer sur le volet professionnel qui les lie. Sauf qu’Alma est plus incisive que ça "Hmm-hm, ça n’a donc absolument rien à voir avec les déboires de l’avant-dernier dirigeant, ou même des vôtres ?" Elle ouvre la page de garde du dossier vers lequel elle baisse la tête, et lui demande de but-en-blanc, son index à l’ongle soigné qui le surplombe glissant sur les nombreuses entrées concernant Mabel et les quelques polémiques qui l’entourent "Où en est votre sobriété ? Vous tenez le choc ?" Si l’expression une main de fer dans un gant de velours devait trouver sa source d’inspiration pour l’illustrer, Lola serait probablement dépeinte pas une photo de son portrait tout à côté de la définition. Ses yeux émeraudes trouvent ceux de l’actrice, et dans un léger sourire, aussi doux que ses yeux sont inquisiteurs, elle lui fait dans un murmure qui fait se plisser le haut de son nez "Moi aussi je suis du genre à faire mes devoirs, vous ne m’en voudrez pas d’avoir fait mes recherches."

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La jeune femme se replace dans sa chaise, délaisse sa tasse de café qu’elle ne boira certainement pas, et pointe très brièvement du doigt la blonde qui lui fait face "Vous oubliez Lewis Hamilton." Elle ne la contredit pas pour le plaisir, elle la contredit parce que ce monde la passionne. Un léger sourire fend ses lèvres, son attention toute dirigée vers Mabel dont le contrat avec Dior la fait souligner dans la foulée "C’est un de vos collègues d’ailleurs, si j’en crois les dernières nouvelles venant de Dior." Tout le monde ne se tient pas au courant de ce qui se passe dans le monde du luxe, elle ce serait toutefois attendue à ce qu’une femme comme Mabel, qui paraît si consciencieuse, vérifie ses sources lorsqu’elle affirme que les sportifs masculins n’ont pas la cote auprès des grandes maisons. L’une des dernières campagnes de Louis Vuitton mettait en scène deux pontes du football mondial, c’est donc faux, que les marques négligent ces hommes, et Lola a encore de nombreux contre-exemples qui lui viennent en tête, celui de Lewis Hamilton étant le premier à lui traverser l’esprit. Rhett a surement jouit de sa proximité avec la nouvelle dirigeante de l’entreprise — nombre de bruits de couloir ont raisonné dans ceux de la MHI —, mais à en croire les chiffres, c’est davantage sa success story qui a aidé à la marque à se refaire une place sur le marché sans que la polémique de Saül Williams ne vienne tout détruire ; le fait qu’il soit beau ne gâche rien non plus, c’est une évidence. Toutefois, Alma ne mentionne pas sa relation avec Evelyn, elle n’a pas envie de mettre sa patronne dans l’embarras, tout comme elle n’a pas envie de discuter de la vie privée de cette derrière avec une femme qui a un jour partagé la vie de son conjoint. Elle reprend, calme et sereine "En tout cas, il a été un allié de choix, ça a été facile de travailler avec lui." Plus que tout le monde ne le pensait, d’ailleurs "Ce sera un challenge de passer après lui." Un challenge, pas un mirage cependant. Si Mabel est présente aujourd’hui, c’est que Lola croit qu’elle en est capable.

Elles en reviennent à la manière consciencieuse avec laquelle Mabel choisit ses contrats "Vous n’êtes pas seulement actrice, vous êtes aussi initiatrice de votre destinée, c’est une très bonne chose." affirme la directrice artistique qu’Alma est. Elle est ravie de se retrouver face à quelqu’un qui n’est pas passive et ne se laisse pas dicter la marche à suivre par ses décideurs "J’aime votre façon de fonctionner, nous devrions bien nous entendre." Pour l’heure en tout cas, c’est l’impression qu’elle a ; ce sera probablement moins le cas lorsqu’elle se montrera plus intrusive, disons. Mais en attendant, le courant passe "J’ai donc bien fait de demander à vous voir seule." Elle peut se permettre un peu de complaisance au sujet de ses propres choix. C’est juste une façon de continuer à discuter sans entrer dans le vif du sujet. Elle apprécie toutefois que Mabel prenne les choses au sérieux, ça l’aidera à mieux comprendre pourquoi Alma a dû mettre le nez dans ses affaires les plus privées.

Elles ont toutes les deux des intérêts à coeur, et Mabel a l’habitude des questions, ainsi celles que la jeune femme lui pose finalement ne la surprendront pas autant que ça, elle en est certaine. Le dossier qu’elle a fait préparer sous le nez, elle essaye de se montrer subtile dans sa manière d’entamer le sujet de la sobriété de Mabel qui, à ses yeux, n’est qu’un problème comme un autre. Il y a pire. Seulement, elles vivent désormais dans un monde où chaque erreur est scrutée. Celles de l’ancien dirigeant de la MHI n’étant pas des moindres, la nouvelle direction s’accorde à ne plus vouloir commettre aucun impair, alors leur vigilance est accrue. Elle entend le ton de Mabel changer, mais elle, elle reste sur sa ligne, c’est-à-dire déterminée à en savoir plus. Elle lui explique "Moi, ça ne m’inquiète pas outre mesure." avoue-t-elle, continuant sur sa lancée, et décroisant ses doigts les uns des autres "Mais je ne suis pas à la tête de l’entreprise." C’est une vérité qu’elle n’a pas honte de rétablir "Vous n’êtes pas sans savoir que cette dernière a connu des jours sombres au cours des dernières années, ainsi la politique en matière de polémique est devenu plus rigide, et nous tachons d’éviter de s’associer à des individus qui pourraient nous causer problème sur le long terme, comme vous dites." Ce qui n’est pas normal au demeurant. C’est devenu monnaie courante de se renseigner en amont sur ses futurs employés, qu'il s’agisse d'une entreprise de luxe, ou non "Nous engageons des centaines de milliers dans nos campagnes, là non plus, je ne vous apprends rien, alors ce n’est pas agréable, je l’entends, mais ce sont dans les intérêts de chacun des partis de s’assurer qu’aucun impair, passé ou présent, ne ruinera la confiance que nous nous accordons mutuellement en collaborant." Elle termine avec un sourire, la tête légèrement penchée sur le côté "N’y voyez rien de personnel, c’est comme qui dirait le protocole." De ses doigts longs et soignés, elle dessine des guillemets au-dessus de sa tête pour mettre l’emphase sur ce mot qui s’éteint en même temps que Mabel reprend la parole pour souligner que la personne qui a vendu la mèche au sujet de ses difficultés avec l’alcool ne sait pas tout. Lola hausse les épaules "Je n’ai pas de conseils à vous donner, mais peut-être devriez-vous envisager de faire le ménage dans votre entourage." Il n’y a rien de condescendant dans la manière dont elle le dit, elle pense simplement que la confiance est d’une importance capitale dans ce genre de milieu pour perdurer, et visiblement, Mabel l’accorde à des gens qui n’en sont pas dignes. Elle pince les lèvres, plisse les paupières "Je ne vous poserai pas davantage de questions à ce sujet, mais ce ne sera pas le cas des avocats de Michael Hill." lui annonce-t-elle en lui donnant un nouveau conseil, celui dont elle fera ce qu’elle voudra "Vous devriez vous y préparer, ils seront probablement plus incisifs que moi. Ils sont sur le qui-vive." Depuis les déboires de Saül Williams, se retient-elle d’ajouter étant donné que ça paraît plutôt évident.

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Mabel est fermée, Alma le comprend. Elle enchaîne sur un terrain miné, mais elle se doit de le faire et pas uniquement parce qu’il s’agit de la nouvelle politique de la maison de travailler avec des gens qui, s’ils ont des bagages comme tout un chacun, s’engagent cependant à les laisser à la porte du siège de Michael Hill. Elle ne rebondit pas sur la notion de blâme et d’erreur que la jeune femme soulève en prononçant une vérité qui frappe Lola. Elle en connait un rayon sur la question. Sauf que ce n’est ni le moment ni le lieu pour en faire l’étalage. Ainsi elle se tait, et offre un sourire poli, puis un hochement de tête, à son interlocutrice.

Elle reprend la conversation pour décortiquer les raisons qui poussent la MHI à se montrer prudents avec ses collaborateurs. Mabel reste factuelle de son côté, et si ça ne déplait pas à Alma, elle doit avouer en même temps que sa rigidité l’indispose. Elle doit avoir l’habitude de traiter avec des fonctionnements similaires à celui imposé par son potentiel contrat avec la maison, elle doit savoir que la transparence, dans une certaine mesure, reste une condition sine qua non pour permettre à tous les partis engagés d’y trouver son compte et d’être rassurés. Pourtant, elle reste là, à se contenter de fournir à la directrice artistique rien de plus qu’un bien maigre discours, lui accordant une bénédiction dont elle n’a guère besoin au sujet des attentes de la direction direction envers les égéries de ses nouvelles collections "Tant mieux." Que peut-elle dire d’autre, si ce n’est ça ? Mabel n’est pas volubile, Alma s’efforce de l’être pour deux. Après une courte réflexion, elle lui demande "Vous comprenez ce que ça veut dire, Mabel ?" A nouveau, elle joint ses mains devant elle, reprend après l’avoir observée du coin de l’oeil pour savoir si c’est de la confiance en elle qu’elle sent s’échapper de la jeune femme, ou si c’est de la stupidité "Nous, la direction comme moi-même, attendons une assurance de votre part." Elle marque une pause, ferme la page de garde du dossier qu’elle a sous le nez et le repousse du bout des doigts tout en poursuivant "Celle qui confirme que, ce que les équipes ont trouvé à votre sujet, ne sont que des rumeurs qui tendent à être étouffées, plutôt que des faits qui pourraient, éventuellement, selon comment vous vous situez au niveau de vos… progrès", le choix de vocabulaire est important, Lola en maîtrise plusieurs, en plusieurs langues, "nous mettre, vous et Michael Hill, dans l’embarras." Elle ne laisse pas le doute planer sur ses propos, termine en se redressant sur son siège "Personne ne veut de ça." Être embarrassé. Surtout pas après l’épisode Saül Williams. Elle ne tourne rien comme une question ouverte, elle l’encourage simplement à, effectivement, se montrer plus prolixe sur les ragots qui ont été amenés par les recherches des équipes au sujet de Mabel.

De l’autre côté de son bureau, elle la regarde, incline la tête sur le côté en appréciant ses remerciements. Elle tient surtout à remettre les choses bien à leur place "Rien n’est encore fait, nous discutons." C’est donc de la confiance, non de la stupidité, qui émane de la blonde qui lui donne l’air de croire que tout est fait. Ce n’est pas le cas, le chemin va être long, probablement semé de quelques embuches. Elle préfère le voir autrement, Alma, et amusée par le parallèle qu’elle fait dans son esprit, elle s’autorise à l’utiliser à voix haute lorsqu’elle lui dit dans un semblant de murmure, ramenant vers elle sa tasse de café fumant "Les préliminaires vont durer un certain temps." Elle boit une gorgée de son breuvage, ses yeux ne quittant pas Mabel "La direction est une amante plutôt capricieuse, il faut apprendre à l’apprivoiser avant de se lancer." Et ça passe par une confiance mutuelle, celle que Mabel devra accorder à ceux qui rendront possible sa collaboration avec l’employeur de Lola.