Heard the risk is drownin’ But I'm gonna take it
@isabel flores  

C’était le plus long samedi de sa vie. L’interview qu’elle avait annulé le jeudi matin avait pourtant été déplacé à ce samedi matin : elle avait donc une matinée bien remplie, mais même alors qu’elle répondait en souriant aux questions d’un journaliste, son esprit était ailleurs. Elle s’efforçait de se concentrer sur le sujet, se focaliser sur l’instant présent en répondant avec humour, jouant de ses charmes pour contourner les questions trop indiscrètes, mais rien à faire : elle avait déjà l’estomac nouée depuis son réveil à cause de ce fichu rendez-vous. « Des surprises pour cette nouvelle saison du Gina Cooper Show ? » Les questions s’enchainaient alors qu’elle sirotait son café au lait d’avoine, mâchouillant nerveusement la paille, presque malgré elle. Une grosse heure s’écoulait avant qu’elle soit libre de partir. Il fallait qu’elle reste occupée, alors elle accompagnait ses amies pour une virer shopping, espérant qu’écouter les problèmes de Olive et Mac lui ferait oublier les siens. Mais non. Elle pensait qu’à ça, pesait le pour et le contre, se questionnait sur pourquoi est ce qu’elle faisait tout ces efforts pour une petite brune devenue aigrie, se demandait si ce n’était pas une erreur, ou une perte de temps. Elle avait l’impression de devenir folle, à ne plus savoir si elle devait prendre la fuite, ou forcer le passage. De retour chez elle avec des achats inutiles, elle lâchait ses sacs de shopping et appelait sa psy pour discuter. Elle la payait vraiment pour l’entendre dire « suis ton coeur » ? C’était ridicule. Elle avait raconté toute sa vie à cette nana, c’était certainement la seule personne sur cette terre à connaitre tout, sans exception, de Regina Cooper. Et même en connaissant ses traumas passés, elle lui disait de suivre son coeur.
L’heure fatidique approchait à grand pas et Gina prenait un tout petit peu de coc' avant de passer à la douche. Il fallait qu’elle s’active. Elle enfilait une robe noire, moulante, plutôt sobre pour une fois, rien qui ne devrait attirer l’attention, parce qu’elle sortait de toute façon pour s’amuser et non pour travailler. Son téléphone lui indiquait vingt-deux degrés, alors elle attrapait une veste en jean oversized et son sac à main YSL avant de quitter sa villa.

Elle arrivait au sixteen antlers vers dix heure trente, en avance, en espérant qu’un cocktail ou deux lui permettront de se détendre. Elle n’avait pas angoissé comme ça depuis longtemps, probablement depuis son histoire de Marceline à vrai dire. Ça avait de quoi la remué, tout du moins, plus qu’elle ne l’aurait voulu. Elle passait par le comptoir pour commander un port star martini, avant de rejoindre l’une des tables près des grandes baies vitrées qui donnaient sur l’extérieur et la vue imprenable sur Brisbane. Elle enchainait ensuite avec un cranberry sour, rajustant son gloss entre deux gorgées, se distrayant un temps sur son téléphone et un temps sur les gens qui dansaient un peu plus loin. Elle relevait le nez de son écran en voyant quelqu’un s’inviter à sa table. Elle pensait voir Isabel, mais non, un gars, visiblement un peu trop sur de lui tentait un rapprochement. « J’attend quelqu’un. » assurait-elle au grand brun qui posait déjà ses coudes sur la table, faisant face à la blonde. Elle échappait un soupire, voyant qu’il ne bougeait pas et tentait même de lancer la conversation. « T’es plus petite qu’à la télé. » lâchait-il.

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Elle était sur le point de dire au crétin en face d’elle qu’elle était aussi moins sympa qu’à la télé, avant de lui demander de dégager, mais déjà Isabel arrivait à leur hauteur. Gina posait aussitôt ses grands yeux bleu sur elle, la détaillant de haute en bas, alors qu’elle se prenait le bec avec le squatteur.  « Un, deux, allez dégage. Elle bosse pas, ce soir, » Pourquoi c’était aussi sexy de la voir s’énerver ? D’autant plus que pour le coup ce n’était pas sur elle qu’elle passait ses nerfs, mais sur un parfait inconnu. Gina ne quittait pas des yeux la brune, alors que le jeune homme se tirait enfin de sa chaise, (enfin de la chaise d’Isabel), lâchant avant de partir tout un florilège d’insultes, plus créatives les une que les autres. Le réflexe de Gina fut d’accorder un regard et un sourire poli à l’inconnu avant de reporter son attention sur l’australienne qui se laissait tomber dans son siège avec un soupire un brin dramatique. Drama queen, piquante, de petite taille …. Wait, est ce qu’elle avait un crush sur une version Latina d’elle-même ? Son cerveau tentait d’y réfléchir mais le martini et la moitié de son cranberry sour ralentissait un peu le processus.[ color=#ff3366] « J’espère que je vous ai pas dérangés. »[/color] Le regard de Gina suivait les mains de la brune, regardant ses doigts s’agiter. « Non, au contraire. » assurait-elle. Elle aurait bien ajouté ‘tu me sauves la vie’, mais venant de celle qui avait gâché la vie d’Isabel c’était probablement pas très bienvenu. Gina détachait enfin ses yeux d’Isabel, cherchant rapidement un serveur dans la salle, faisant un signe de main au premier repéré, ne comptant pas laisser son invitée sans rien à boire. « Jolie robe, » Son regard quittait le serveur qui approchait pour se reposer sur Isabel, presque surprise que la brune se permette un compliment. « M-merci … ? » lâchait-elle ne cachant pas sa confusion. « J’arrive pas à savoir si tu me détestes ou si tu veux me—» Pas le temps de finir sa phrase, de toute façon probablement trop crue pour être prononcé dès le début de soirée, encore plus en présence du serveur qui se permettait de lui couper la parole pour demander ce qu’elles aimeraient boire. Gina faisait signe à Isabel de commander ce qu’elle voulait, en profitant pour reprendre un martini, avant que le serveur ne reparte. « Merci d’être venue. » reprenait-elle une fois seule avec la jeune femme. « J’étais prête à passer la soirée solo, ne sachant pas trop si t’allais me poser un lapin ou pas. » notait-elle, reprenant une gorgée de son verre presque vide. Elle avait l’impression, pour une fois, de réfléchir un peu trop à ce qu’elle allait dire, plus angoissée que lorsqu’elle était en directe à la télévision. Elle n’avait pas de prompteur sur lequel se reposer pour remplir les blanc et surtout, elle ne se sentait pas aussi à l’aise qu’à l’habitude. Où était passée la dragueuse invétérée qui flirtait avec le premier humain passant devant elle ? Elle jouait ce rôle tout les jours au travail en plus, elle ne pouvait pas être bien loin ! Pourquoi Isabel l’intimidait ? Elle avait envie de se répéter qu’elle n’était qu’une barmaid fauchée de quelques centimètres plus grande qu’elle, mais rien que de penser à ça la faisait revenir à une séance de thérapie : « ne pas juger les gens sur leur compte en banque », « il n’y a pas de sous métier », « on n’est pas tous égaux face aux méandres de la vie, chacun mène sa barque comme il le peux » et blablabla. Hantée par sa psy. Quel enfer. « Est ce qu’on doit … se poser des questions en mode first date ? Se reprendre la tête comme l’autre soir ? Ou juste picoler ? » Elle votait pour la dernière option, même si au fond la première était chouette aussi, enfin si on oubliait que ça faisait un peu first date d'adolescentes awkward.

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 « Si je veux te quoi, Gina ? » La blonde préférait ne pas répondre, se focalisant sur le serveur et le fait qu’il fallait commander tant qu’il était là. Isabel regardait rapidement la carte avant de commander un cocktail nommé le Hellfire, ce qui lui correspondait plutôt bien. (On ne fera pas de remarque sur le Porn star martini de Gina, merci). Le serveur disparaissait et Gina en profitait pour reprendre la parole et changer de sujet, préférant la remercier d’être venue. C’était sincère, elle était contente qu’elle soit là, d’autant plus qu’elle n’aurait pas été surprise que Isabel lui pose un lapin, juste pour lui faire les pieds. Sorte de petite vengeance, introduisant probablement une longue liste d’autres actions désagréables dans ce genre.  « Non, j'avais bien l'intention de venir. Je vois que tu ne m'as pas attendue pour commencer les festivités, » Gina esquissait un sourire amusée. « Je suis là depuis une heure, j’allais pas mourir de soif en t’attendant. » notait-elle, terminant son verre cul sec alors que la brune retirait sa veste en cuire. Ouais, finir son verre à cet instant était une bonne idée, de quoi la rafraichir un peu malgré la présence de la brune. Le serveur réapparaissait avec leur commande, posant un verre devant chacune d’elles avant de repartir avec le verre vide de Gina. Elle attrapait son verre rempli d’un liquide orange et ornementé d’un petit morceau de fruit de la passion, trinquant avec Isabel qui revenait déjà à l’attaque :  « Un peu de tout ça ? Mais je connais de meilleurs moyens de faire passer la colère latente. » « Ah oui ? » rebondissait Gina, reprenant ses moyens, jouant la fausse ignorance. A croire qu’il lui manquait juste un peu d’alcool dans le sang pour ne plus bégayer devant les regards dévorant d’Isabel. « La méditation ça marche bien pour ça aussi. » notait-elle avec une pointe d’humour en reposant son cocktail devant elle. Evidemment que retrouver Isabel, comme avant et l’entendre gémir était tentant, et ce serait mentir que de dire que ça ne lui manquait pas un peu et qu’elle n’y avait pas pensé plusieurs fois depuis qu’elle avait recroiser l’australienne. Mais ce n’était pas supposé être le but de cette soirée. Enfin pas selon Gina, qui pour une fois ne voulait pas bruler les étapes, même si elle avait en face d’elle une fille ‘pas intéressée’ par une relation sérieuse. Ça rajoutait une sacré difficulté à ce qui était déjà un challenge pour elle, puis ça la forçait à prendre sur elle et tenir le cap, ne pas se laisser tenter par un raccourci qui mènerait à une énième relation kleenex et une excuse parfaite pour rester dans l’évitement.  « Qu'est-ce que tu deviens depuis tout ce temps ? Ton émission a l'air de cartonner. What's next ? » « Hm…J’ai eu un interview avec un journaliste de Vogue Australia ce matin. Et c’est tout. J’ai pas de grand projet côté boulot en ce moment. Je veux simplement continuer avec mon émission et essayer de prendre un peu plus de temps pour me reposer, au lieu d’enchainer les shooting photos et autres projets annexes. » répondait-elle. C’était pas passionnant, parce que tout était plutôt stable et confortable de ce côté là, et qu’en plus son but dernièrement était de ne plus se noyer dans son travail, donc elle acceptait beaucoup moins de projets que les années précédentes. « Et toi ? T’as certainement bien plus de chose à raconter… » notait-elle. Ça allait être probablement l’instant culpabilité de la soirée, mais elle voulait savoir ce qui c’était passée dans la vie de Isabel depuis l’embrouille autour du vin et des chocolats. Elle jouait nerveusement avec son verre, détaillant le visage d'Isabel dans l'espoir de capter tout émotion la traversant.

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 « C'est comme ça que tu passes tes nerfs maintenant, plutôt que de coucher avec tes assistantes ? C'est ta psy qui te l'a conseillé ? » Gina échappait aussitôt un petit rire avant de se mordre la lèvre inférieur en hochant lentement la tête. « Touché. » est ce qu’elle c’était tapée la remplaçante d’Isabel ? Peut-être bien. Est ce qu'elle avait arrêter ce genre de chose pour ne pas avoir de soucis avec la RH de l'entreprise : probablement. « Oui recommandation de ma psy. » confirmait-elle avant de mentionner sa vie professionnelle m’a foi plutôt plan-plan.  « C'est-à-dire ? T'as prévu des vacances ? » « Non pas vraiment, juste d’arrêter de me noyer dans le boulot, et essayer de … profiter de la vie. J’imagine. » Elle ne savait pas trop elle même, en dehors du travail elle avait peur de s’ennuyer, peur surtout d’être seule avec ses pensées, ses traumas et tout ce qu’elle avait toujours bien pris soin de réprimer depuis son adolescence. Elle préférait tourner le sujet vers Isabel, sa petite vie à elle que Gina savait plus mouvementée sans en connaitre les détails.
Isabel répondait rapidement, annonçant avoir été à la rue pendant un temps après son départ de ABC, le tout avec un regard dénué d’émotion, comme si ce n’était rien, comme si elle répétait des phrases toutes faites qui n’avaient pas, ou plus, d’impacte sur elle. Il n’y avait pas à dire : elle avait changé. Elle c’était endurcie. Et a entendre ce par quoi elle était passée : ce n’était pas surprenant. Gina n’avait jamais eu ce problème, clairement. Enfin ça aurait pu se produire, mais sa victoire dans l’émission Big Brother lui avait permis de décrocher un joli chèque et un contrat avec ABC, donc elle n’avait pas finis à la rue. Isabel n’avait pas la même chance qu’elle de ce côté là, bien qu’elle mentionnait vivre avec une amie, ce qui laissait entendre qu’elle était entourée malgré tout. (ça rassurait un peu Gina). L'américaine l’écoutait, l’air sérieux, hochant lentement la tête, enregistrant toutes ces infos. Elle avait presque envie de lui proposer de payer sa formation pour elle, de l’aider financièrement, mais elle avait trop peur que Isabel voit ça comme une façon d’acheter son pardon. Et, il fallait l’admettre : vouloir réparer les dégâts qu’elle avait causé en faisant un joli virement bancaire, revenait un peu à ça. La brune affichait un sourire forcé, clairement pas à l’aise avec l’idée de partager. Tellement gênée qu’elle tentait de changer radicalement de sujet :  « Bon... on va chez toi ? » « Bien tenté mais non. » répondait-elle aussitôt, en fronçant les sourcils avant de glisser sa main sur la table pour venir la poser sur celle de la brune. « Je suis désolée que t’ai dû traversé tout ça. J’peux même pas imaginer à quel point ça a dû être difficile. » Une petite brune seule dans la rue ? Elle avait dû passer des nuits bien longues ! « Je sais que tout ça c’est en plus en partie à cause de moi, parce que j’imagine que si t’avais gardé ton job, t’aurais pas été à la rue… » notait-elle. « Je… je savais pas que c’était aussi tendu pour toi à l’époque… sans quoi peut-être que j’aurais été un peu moins égoïste. » Elle grimaçait un peu avant d’ajouter : « Enfin, c’est pas sûr. » Elle en avait quand même fait du chemin depuis. Une bonne année de thérapie et elle passait de drunk on power, à spoiled blonde with feelings. « On a jamais vraiment parlé en même temps... » admettait-elle, réalisant une nouvelle fois à quelle point elle connaissait peu Isabel. Elle savait qu'elle avait un petit Grin de beauté près de l'omoplate gauche, mais ne savait même pas si elle avait des frères et soeur, quel était son plat préféré, bref : des choses classiques dans ce genre. « C’est cool que t’ai plein de projet en tout cas. La formation c’est une super idée ! » notait-elle, imaginant que ça devait être un poste moins difficile que faire des cocktails et de la vaisselle à longueur de soirée.

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 « Ouais, profite. Avant de devenir toute fripée. » Gina préférait ne pas relever. C’était bas de s’attaquer à son âge, surtout qu’elle n’avait même pas trente ans, donc elle laissait passer, mettant ça sur le dos de la rancoeur qu’Isabel avait envers elle, puisque clairement, deux ans auparavant, elle n’avait rien à redire de la beauté de la blonde.  « Pas sûr du tout, même. J'crois que t'en aurais profité pour me balancer que j’étais une moins que rien qui méritait de crever la bouche ouverte, ou quelque chose de ce genre. » Gina levait les yeux au ciel en secouant la tête. « N’importe quoi. J’ai beaucoup plus de classe que ça. » rétorquait-elle. « Je t’aurais fait un chèque avant de te foutre à la porte. » ajoutait-elle esquissant un demi-sourire amusé. Bon c’était peut-être encore trop tôt pour Isabel pour en rire, mais qu’importe, elle trouvait sa répartie plutôt amusante et l’alcool l’empêchait de le cacher. Elle allait rapidement rire à toute ses blagues, mais au moins elle passerait une soirée un peu amusante.   « On avait mieux à faire que parler. Comme maintenant. » notait-la brune, retirant sa main de sous celle de Gina avant de s’éloigner au fond de son siège. Elle marquait clairement une limite. Limite qui visiblement était : ‘on ne se tient pas la main, mais j’accepte de faire un tour entre tes cuisses.’ Gina hochait lentement la tête. « T’aimais bien me parler pourtant… » notait-elle, se remémorant le nombre de fois où elle avait été obligée de lui rouler un patin pour qu’elle arrête de lui raconter sa journée. Comme si elle avait quelques choses à foutre de la journée d’une assistante sérieux ! (Non Gina, reprend toi. Il n’y a pas de sous métiers ! Respecte les autres !).
La blonde attrapait son verre, se réfugiant elle aussi au fond de son siège, sirotant son martini en dévorant des yeux la brune. « Mais puisque tu veux parler... parlons. Il s'est passé quoi avec l'autre ? » Gina esquissait un sourire, notant sans mal l’énième tentative d’attaque de l’australienne. Elle n’en ratait pas une visiblement. « Je me suis attachée, ça m’a fait flipper, je l’ai trompé avec un gars. Fin de l’histoire. »  résumait-elle. Elle en avait parlé avec les deux concernés et avec sa psy, donc au final c’était plus facile à verbaliser que d’autres choses. Elle n’avait pas pour autant envie de s’étaler sur le sujet, parce qu’elle avait vraiment aimé Marceline, qu’elle avait été torturé par les questions trop indiscrètes à son gout de l’actrice, qu’elle avait fait ce qu’elle pensait être de gros efforts en lui parlant un peu de Paris et de ses amis là bas… Bref, c’était un échec. Rien d’agréable comme sujet. « Le gars était un très bon coup ceci dit. Donc bon… » Elle haussait les épaules, se retenant de rire une nouvelle fois à sa propre blague. Bon c’était pas de très bon gout, mais passer par l’humour et le sarcasme était un bon moyen pour elle de reprendre un peu ses aises, d’oublier un instant qu’elle tentait de faire un effort et de rattraper ses conneries d’il y a deux ans. « Et toi? T’as eu des copines pendant tout ce temps ? Raconte un peu. » lançait-elle, reprenant une gorgée de son cocktail sans quitter des yeux la brune. Elle voulait jouer : elles allaient jouer. Après ce verre Gina aurait peut-être un peu plus de mal à rebondir, et probablement plus de mal aussi à suivre la sagesse de sa psy, mais qu’importe, elle ferait en sorte que Isabel soit aussi bourrée qu’elle d’ici peu. Qu’elles soient à armes égales. « T'as bien dû trouver une ou deux nana comme rebound ? »

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« Waouh, » Clairement les remarques voulu teintées d’humour de Gina n’amuse qu’elle. En même temps elle a bu trois verre, elle sait pertinemment qu’elle perd son temps avec Isabel qui est devenue une sorte de méchante de soap opéra, et puis elle préfère rire de ses erreurs passer plutôt que de continuer à se lamenter. C’est peut-être aussi un peu ça la magie de la thérapie : apprendre à vivre avec ses erreurs et surtout tourner tout ça en humour. (Non ? C’est pas ça qu’il faut faire ?). Bref, si elle n’avait pas le public souhaité ce soir, tant pis, elle continuait quand même sa mission initiale : apprendre à connaitre Isabel, à commencé par savoir si elle avait eu des relations depuis ces deux dernières années. Mais la réponse de la brune était des plus décevante. Rien à signalé dans sa vie amoureuse, trop dégoutée par l’amour à cause de Gina. La blonde notait quand même l’utilisation du mot ‘amour’ qui n’était pour elle pas rien. Elle évoque le fait de vivre chez sa mentor, Gina imagine déjà une femme d’un certain âge, puis une coloc avec qui elle a une relation un brin ambiguë, un truc clairement qui criait « lesbienne qui aménage ensemble trop vite ». Et Bel concluait pas une :  « A part ça... j'suis plutôt sage. Un vrai ange. Totalement pure. » Au quel Gina manquait de recracher sa gorgée de martini dans son verre. « Oui, bien suuuuur. » lâchait-elle des plus sarcastique. « Sage alors que tu veux me déshabiller depuis que t’es arrivée. » notait-elle, s’essuyant la bouche du bout des doigts avant de reposer son verre sur la table. Isabel rapproche alors dangereusement son siège, prenant clairement patience avec Gina. Il fallait dire que malgré des petits dérapages visiblement pas aux gouts de la brune, dans l’ensemble, Gina tenait bon et était sage. Elle était d’ailleurs plutôt fière d’elle. Après tout c’était pas si souvent qu’elle ne tentait pas de noyer ses pensées en couchant avec le ou la première venue. Donc tenir bon devant les avances de Isabel : c’était une petite victoire. Pas sûr que ça dur ceci dit, puisque la brune passait à l’offensive, décalant une mèche de cheveux de la blonde pour venir lui chuchoter à l’oreille. « Mais c'est pas drôle d’être sage. Et si je me souviens bien, tu ne l’étais pas particulièrement. » Shit, shit, shit. Elle tentait de contrôler son souffle, alors qu’elle sentait une sorte de frisson descendre le long de sa nuque.  Non, elle tiendrait bon. Elle gardait le regard river sur son verre, réfléchissant à son next move, comment remettre l’australienne à sa place sans passer pour une totale connasse (quoi qu’elle était plus vraiment à ça près.). Mais déjà elle sentait la main d’Isabel sur son menton et tentait de contrôler un mouvement de recule machinale avant de sagement suivre le mouvement de la main de la jeune femme, plantant ses yeux dans les siens. « J'me trompe ? » Gina esquissait une sourire, posant une main sur la cuisse de la brune (she can play dirty too), l’autre sur son avant bras pour repousser gentiment la main qu’elle avait posé sous le menton de la blonde. « Tu sais très bien que je vais pas te donner ce que tu veux aussi facilement. » chuchotait-elle tout contre ses lèvres, avant de se décaler pour lui chuchoter à l’oreille: « Mais je vois que t’as bien étudié mon fonctionnement. » Elle se reculait, retournant au fond de son siège, posant son pied droit sur le bord de celui d’Isabel pour l’éloigner un peu. « Tu fais une Gina, contre Gina. C’est un peu ridicule. Si j’avais envie de me mettre en couple avec moi même je me masturberais devant un miroir. » déclarait-elle, sanglante, récupérant son verre. « Bel, c’est pas parce que je veux une relation sérieuse et tenter une vraie histoire d’amour sans tou foutre en l’air que je suis devenue totalement naïve. » Elle soupirait, un brin agacé de toute cette situation, de cette perte de temps, du fait qu’elle avait voulu y croire un instant et que Isabel continuait son petit numéro de fille froide comme la glace (enfin chaude aussi, go figure), comme si elle avait perdu son coeur à cause d’une boite de chocolats. « Si t’es juste venue pour boire à l’oeil : pas de soucis. Mais par contre si t’es en manque: trouve quelqu’un d’autre. » Elle terminait son verre, le reposant avant de croiser ses bras sur sa poitrine, son regard planté dans celui de la brune. « Je t’ai pas invité pour du sexe sans attache. Sinon j’aurais appelé quelqu’un d’autre. »

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La petite flamme de vengeance qui brulait au fond des yeux d’Isabel semblait faiblir à chaque gestes de Gina. Comme si en refusant de l’embrasser, en refusant d’aller plus loin avec elle et en poussant son siège de quelques centimètres, elle venait de lui offrir la douche froide du siècle. La blonde ne reconnaissait pas Isabel. Elle avait en face d’elle une pale copie d’elle-même : il ne manquait qu’une perruque blonde et des lentilles de contact bleu et elle se retrouverait presque devant un miroir. Seulement Isabel agissait comme ça par rancoeur, voulant très clairement utiliser la blonde comme celle ci l’avait fait deux en plus tôt, pour lui rendre la monnaie de sa pièce. Mais Gina avait fait bien trop d’effort et de travail sur elle-même pour ruiner tout ça en acceptant de s’envoyer en l’aire avec Isabel. Elle avait envie de lui demander où était passée la fille avec la boite de chocolat ? Pour savoir si elle était encore là, quelques part, cachée derrière toute cette colère, savoir si elle pouvait voir la main tendue de Gina à travers toutes cette rancoeur…Mais avant même qu’elle n’ai le temps de tenter une nouvelle approche, Isabel se levait déjà de sa place. Récupérant sa veste en cuire, prête à partir. « Je... j'peux pas faire ça. » Gina se redressait dans son siège, assise au bord, prête à se lever à son tour. « Si tu changes d'avis... t'as mon numéro. » Et alors que la brune tournait déjà les talons pour prendre la fuite, Gina la rattrapait, le regard teinté de tristesse alors qu’elle tirait tendrement Isabel vers elle, pour que la brune lui fasse de nouveau face. « J’étais pas prête. Là je le suis. » lâchait-elle. « Je suis pas là pour te faire du mal. Et je comprend que t’ai envie de m’en faire pour te venger. » Elle parlait vite, de peur qu'Isabel ne se défasse de cette main qui tenait tout juste son avant bras et ne prenne la fuite pour de bon. Sa voix grave se tordant légèrement sous le coup de l’émotion. « J’ai été horrible avec toi. Je sais. C'est mon moyen de me protéger, ou du moins ça l’était, parce que j’ai aussi beaucoup de rancoeur et de blessures que je me traine depuis de longues années. Mais j’essaie, sincèrement, d’enfin affronter tout ces PTSD et ces peurs à la con, parce que j’en ai marre d’être la méchante dans l’histoire de tout mes ex. Au fond j’ai envie de la même chose que tout le monde : trouver quelqu’un avec qui je puisse être moi-même, être vulnérable. Je fais vraiment ce que je peux pour me sortir de ces schémas ultra toxiques que j’ai moi-même créés en pensant me protéger. » Elle reprenait son souffle, passant une main dans sa crinière blonde, sentant la pièce tourner un peu. Le dernier martini était probablement de trop, c’était peut-être aussi pour ça que l’émotion la submergeait un peu et qu’elle tremblait presque, de peur d’en dire trop et de se mettre en danger comme par le passer. « Je te vois faire la même chose que moi : te cacher derrière cette carapace de mean girl, bitchy, et ça me rend triste. Parce que j’ai connu une petite brune avec une boite de chocolat qui était, je le pense, bien plus sincère envers elle-même et bien plus courageuse que la majorité des personnes que j’ai pu rencontrer. » Ses yeux bleu, légèrement rougis par les larmes qu’elle retenait (et la coc qu’elle avait prise avant de venir aussi mais bon) restaient planté droit dans ceux d'Isabel. « Bien plus courageuse que moi. Parce qu’au fond : c’est facile d’envoyer balader tout le monde. Mais ça demande beaucoup plus de force d’accepter d’ouvrir son coeur à quelqu’un. » Elle lâchait le bras d’Isabel, scrutant son regard un instant, cherchant si celle qu’elle avait connu était encore là, caché derrière ses grands yeux sombres. « Si tu te sens prête à laisser tomber le masque avec moi : t’as aussi mon numéro. » concluait-elle, esquissant un petit sourire voulu rassurant avant de récupérer sa veste et son sac à main et de rejoindre le comptoir pour payer. Elle passait sa carte sur le terminal de paiement et jetait un coup d’oeil à Isabel, espérant vraiment que son speech un peu trop sincère, et bien que vague, beaucoup trop vulnérable à son gout, face son chemin dans l’esprit de la brune… et pourquoi pas, qu’il s’aventure même vers son petit coeur blessé et y ramène une pointe d’espoir et de réconfort.