Après une année et demi en histoire de l'art, Poppy s'était sentie honorée d'avoir décroché un stage au musée d'arts du Queensland. Le poste était prestigieux, et généralement réservé aux années plus élevées. Le musée était réputé pour l'accompagnement de qualité qu'il donnait à ses stagiaires, ainsi que ses avantanges, et notamment un pass permettant de profiter gratuitement des musées de la ville pendant toute la durée du stage.

Elle avait malheureusement oublié le département d'art moderne, la forme d'art qui lui parlait le moins. Elle étudiait l'histoire de l'art, et tout ce qui était plus contemporain lui parlait beaucoup moins, alors elle n'avait pu empêché cette petite vague de déception dans le mail qui lui indiquait de quel département elle dépendait.

La rencontre avec Mateo ne s'était pas forcément bien passée non plus, ce qui n'avait pas aidé à la rassurer. Il avait l'air jeune pourtant, alors elle s'était dit qu'ils trouveraient facilement de quoi parler. Mais il avait surtout l'air d'avoir beaucoup de travail et pas le temps de gérer la petite stagiaire qui mettait les pieds au QAGOMA pour la première fois et ne savait pas comment utiliser leur matériel informatique ou se repérer dans les couloirs réservés au personnel.

Et là, quelques jours après son arrivée, elle allait devoir faire équipe avec Mateo pour encadrer une classe de primaire. Le chef du département n'avait pas pris le temps de lui expliquer le projet artistique de la classe. Elle avait passé sa soirée de la veille à étudier un peu les pièces les plus emblématiques du département d'art moderne pour s'assurer de pouvoir répondre aux questions du professeur.

Elle avait ses feuilles de notes dans une poche de son jean alors qu'elle attendait la classe, les mains un peu moites. C'était un exercice auquel elle n'était pas habituée, toutes ces dernières prises de paroles de ces derniers mois s'étant juste faites devant ses camarades de promotion.

« Ça arrive souvent que des classes viennent visiter le musée ? » demanda-t-elle à Mateo, qui l'accompagnait ce jour-là.

Elle espérait fortement que non, parce qu'elle n'était pas très à l'aise face aux enfants. Ceux de ses voisins, qu'elle connaissait bien et voyait par petits groupes, ça allait encore, mais une classe composée de vingt-cinq ou trente enfants qu'elle ne connaissait pas la terrifiait. Heureusement que leur instituteur était sensé rester avec eux tout au long de la visite.

« Est-ce qu'on a le droit à un pourcentage de perte ? »

Elle pensait à toutes les possibilités de cachette sur le parcours du musée. Entre les murs installés ça et là pour augmenter la possibilité d'accrocher des tableaux et les renfoncements menant à des couloirs privés, il y avait de quoi jouer pour des enfants peu intéressés par l'art et cherchant surtout à s'amuser d'une journée qui n'était pas passée à l'école

ft. @Mateo Alvarez