as long as you're here with me
crédits/ unapologeticallyallin & azianxpersuasionwrites
@Helen Stenfield 11/2024 - st vincent hospital

tw : mention d'accident de voitures

Du haut de ses quelques années, Joe s’était étonnée que la première chose qu’il fasse, en se réveillant, soit de vérifier que ses doigts n’étaient pas cassés. Au regard de l’état grandement préoccupant dans lequel ils étaient arrivés, Helen et lui, c’était presque risible de s’attacher à une blessure aussi moindre, une qui n’aurait point menacé sa survie ou retardé sa sortie de l’hôpital mais, son instinct de pianiste avait parlé avant tout le reste, et son Abuela s’était bien chargée de lui faire comprendre qu’il devrait revoir son sens des priorités. Elle l’avait tendrement grondé entre deux sanglots diminués par son sourire chaleureux, qui avait eu le don de réchauffer considérablement l’atmosphère de la chambre, dans laquelle rebondissait le tintement mécanique des machines. Patiemment, il avait guidé sa main jusqu’à rencontrer celle de sa grand-mère pour qu’elle s’en saisisse, qu’elle la presse, la serre, la caresse, tandis que son regard accrochait le visage de Mando puis de Jayden, ainsi que de Troy, dans un soulagement qui avait décrispé les traits de son visage, en lui faisant comprendre qu’il était en sécurité. « Tu t’es réveillé parce que j’ai menacé de manger tous les bonbons, pas vrai tonton ? » la petite voix de Joe, sur sa droite, l’avait mollement fait sourire avec tendresse pendant qu’il refermait les yeux quelques secondes, en essayant de remettre de l’ordre dans le schéma de sa mémoire, encore un peu groggy par la fatigue et les anti-douleurs qui circulaient dans ses veines, facilitant son réveil qui est dépourvu de brusquerie, jusqu’à ce que… ’’Où est Helen ?’’ derrière ses paupières closes, le trombinoscope des derniers évènements avait défilé avec une confusion sans nom, remplissant le vide de son inconscience en ne laissant qu’une évidence suspendue, seule lumière visible dans l’obscurité de ses incertitudes : elle était là, il le savait, et le craquement macabre qui avait résonné dans ses pensées lui avait laissé tout le loisir de se remémorer sa blessure au bras…

Ils ont survécu, tous les deux.
Lui n’a aucune séquelle.
Mais Helen ?

’’Debout, là-dedans…’’ il n’a pas été autorisé à quitter son lit avant la fin d’après-midi, mais après le refus des médecins, c’est celui de sa grand-mère qui l’a cantonné à l’immobilité alors il a patiemment attendu la fin des visites pour rejoindre Helen, déjà rassuré, dès la première vision de la jeune femme, du fait qu’elle soit parfaitement intacte. Ou presque. ’’T’as une mine affreuse…’’ il possède à peu près le même teint blafard, les mêmes pansements qui recouvrent ses plaies sans gravité et les mêmes cernes qui forment des auréoles sous ses paupières, mais le sourire qu’il lui lance est désarmé de toute peur, de tout chagrin et de tout désespoir. Il ne se souvient pas de tout, pas encore, puisque les souvenirs sont comme les pièces d’un puzzle éparpillées, certaines sont à l’envers, plus ou moins identifiables, mais il manque parfois un détail, une couleur, une odeur, une sensation, mais il n’est pas certain de vouloir recouvrer parfaitement la mémoire. ’’Comment tu te sens ?’’ il le demande en tirant une chaise pour s’asseoir près de son lit, sa main venant aussitôt quérir la sienne — celle qui n’est pas reliée au bras en écharpe — en poursuivant, d’un ton plus anxieux, comme s’il appréhendait la réponse : ’’Ils t’ont dit quoi, pour ton bras ?’’