Assoupie dans le canapé avec un plaid sur mes épaules, je sursaute en entendant la porte d’entrée. Kelya vient de rentrer. Je me frotte un peu les yeux et me tourne dans sa direction en lui adressant un petit sourire. « Salut ma p’tite baleine, comment ça va aujourd’hui ? » Je ris et lui balance un petit coussin dans sa direction, qui ne l’atteint pas, évidemment. « La baleine elle t’emmerde ! ». Je ne compte pas les semaines, ça m’énerve, je vois juste que mon ventre grossit un peu plus chaque jour, et que bientôt, je ne pourrai plus le cacher. Pour l’instant, j’arrive encore à danser, il n’y a pas de contre-indication, et heureusement. Parce que le jour où je vais me retrouver à devoir donner mes cours assise sur une chaise, je vais avoir envie de me pendre. « Tu m’attendais pour manger ? » Je hoche la tête. « Ouais, mais j’ai pas faim. » « Kyrah, faut que tu manges on t’a dit… » Je soupire comme une gamine qu’on mettrait devant un plat d’épinards. « Je nous cuit une pizza ? » Ok, là mon regard s’illumine. Elle sait comment me parler. « Ah au fait, la semaine prochaine je pars quelques jours à Londres. J’ai quelques trucs à régler. Ça ira ? » « T’inquiètes, j’suis pas mourante ! J’vais pouvoir faire une grosse fiesta ici ! » Elle sait que je plaisante, déjà parce que ce n’est pas mon genre, et aussi et surtout parce que je ne peux plus boire d’alcool. Même si ce n’est pas l’envie qui me manque.
***
Kelya est partie depuis deux jours et c’est affreusement vide à la maison, alors j’essaie de m’occuper le plus possible, sortir pour ne pas rester seule, voir les gens que je ne vois que trop peu. Je n’ai pas encore osé rappeler Astrée depuis que je sais pour le bébé, je ne sais pas vraiment si c’est l’envie qui me manque, ou la peur de faire des trucs pas catholiques alors qu’un petit être vit en moi. Tout ça me chamboule pas mal, mais je ne veux pas m’arrêter de vivre pour autant. Ce soir, c’est avec Charly que j’étais. Elle n’a pas été très contente d’apprendre que j’étais enceinte d’Elio, surtout après tout ce que je lui ai raconté sur lui, et la façon dont il m’a traitée. Je ne sais pas pourquoi mais j’essaie toujours de le défendre, c’est plus fort que moi. Sûrement que l’amour que je lui porte est plus important que je l’imagine. En sortant de chez elle, je croise Jesabel et la salue vaguement avant d’emprunter la rue qui me ramènera chez moi. Enfin, chez Kelya. Il est presque minuit, et il pleut des cordes, si bien qu’en à peine 500 mètres, je suis déjà trempée jusqu’aux os, et je grelotte comme une idiote. Arrivée devant chez Kelya, je fouille dans mes poches pour trouver mes clefs, mais elles restent introuvables. Putain, pas maintenant ! Kelya n’est pas là, et je me retrouve à la rue, cette idée m’angoisse, me rappelle là où je vivais avant de rencontrer Kelya, et avant elle Erin. Je sors de ma poche mon téléphone et essaie d’appeler Charly pour savoir si je n’ai pas laissé mes clefs chez elle, mais elle ne répond pas, je la suspecte d’être déjà en train de faire des galipettes avec Jesa. Merde. Quelle conne je suis. Je tremble un peu plus, sentant mes fringues trempées me glacer le sang. Je suis sous le porche, mais un vent frais vient m’achever. J’ai juste envie de pleurer, les hormones n’aident pas je suppose. Je rappelle Charly mais toujours rien « Charly réponds moi je t’en supplie, je suis en train de crever, dis moi que t’as mes clefs… » Je raccroche et me laisse glisser contre la porte d’entrée, assise comme une pauvre clocharde. Et puis, un instant de lucidité. Elio. Il est la première personne à qui je pense. Je lui envoie directement un message en me dirigeant vers chez lui, il n’habite pas très loin, mais ça me parait être une éternité. Je crois que je suis une piscine sur pattes. J’entre dans le halle de l’immeuble et monte jusqu’à mon étage, me plantant là devant la porte. Pas de réponse à mon message. Je colle une oreille à la porte, aucun bruit, en même temps, à minuit, tout le monde doit dormir ici. J’appelle Elio, rien, personne ne répond, c’est pas vrai mais la poisse putain. Je m’assieds dans le couloir, près de la porte, une flaque est déjà en train de s’étaler sous mes fesses alors que l’eau dégouline le long de mon corps. J’attends là un long, trop long moment, et puis finalement, un bruit. Quelqu’un monte les escaliers. Je crois que je supplierai n’importe qui de me laisser prendre une douche chez lui et me filer des fringues sèches. Et comme l’apparition du saint esprit, c’est Elio qui débarque. Je suis tellement faible de me battre depuis plus d’une heure contre le froid que je suis à deux doigts de tomber dans les pommes, et en le voyant, je me mets à pleurer comme une enfant. « Pourquoi t’as pas répondu à mes appels ? ». Ma voix est faible, beaucoup trop faible. Je suis fatiguée, épuisée même, et j’ai jamais eu aussi froid. Mon ventre est tout contracté depuis une heure et j’ai même peur que ça ait une influence sur le bébé.
Je tourne et retourne la photo dans tous les sens. « Tu vois un bébé toi ? » Kaecy regarde la photo avec moi d’un air un peu dubitatif. « Je suis pas vraiment sûr mais ça se pourrait par là. » Elle désigne une sorte de forme étrange et je hoche la tête. Bon dieu ça fait du bien de pouvoir en parler avec elle, de ne plus garder tout ça pour moi. « Elle a une photo elle aussi ? » Mon regard flirt légèrement avec le sol alors que je devrais répondre à sa question. « Non… » Je sais bien ce que ça veut dire – cette façon dont elle ne s’investie pas totalement et qui m’effraye un peu. Mais je n’ai pas envie qu’on parle de ça. Jamais je n’ai voulu avoir un enfant – enfin du moins pas maintenant – pas dans ces circonstances. Je me disais que ça arriverait un jour, quand je me sentirais prêt. Evidement je ne me sens pas prêt mais il va arriver et puisque c’est le cas je voudrais en faire quelque chose de positif, je veux ressentir cette brise de bonheur qui devrait être le quotidien de tout nouveau père. Je voudrais être comme tout le monde et m’attacher à ce bébé – je le suis d’ailleurs déjà rien que par le fait qu’il est le mien. Cette constatation me fait battre le cœur un peu plus vite alors que je range la photo dans ma poche. « Tu l’as dit à Olivia ? Que vous alliez le garder ? » Cette fois je me lève comme pour prendre un peu d’espace. « Pas encore… Je me dis qu’elle posera la question quand elle sera prête à entendre la réponse. » Oui en gros je fais le lâche, le gros lâche. « Elio ? » Je me retourne pour regarder ma meilleure amie qui a ces yeux accrochés à sa montre. « Tu devais pas travailler à 18h ? » Mon regard se tourne vers l’horloge murale. « Meeerrdde ! » Je suis déjà en retard. Je pose un rapide baiser sur le front de Kaecy avant de sortir en vitesse de l’appart, pas de veste ni de téléphone je pars sans rien, et sans trop réfléchir non plus.
***
« Fini le service beau gosse ? » Olivia vient se poster derrière moi passant ces mains sur le devant de mon corps alors qu’elle pose un baiser dans mon cou. Je sourire légèrement avant de me retourner. « Tu commences maintenant ? » « Oui, je te rejoins chez toi quand j’ai fini ? » Evidement j’hésite, je sais que les fins de nuit sont souvent les moments les plus propices à avoir des conversations que je préfère éviter. « Je dois me lever tôt pour le jumeaux demain… On essaye de se voir dans la journée plutôt ? » Elle est déçue et ne le cache pas mais je ne reviens pas sur ma décision. « Elio je peux te parler ? » C’est le patron qui vient couper notre échange et je dépose un baiser sur les lèvres d’Oli avant de le rejoindre. « Je suis désolé pour mon retard Ted… » Il a son air sévère celui que je n’aime pas. « Elio c’est plus possible. Tu arrives en retard, tu pars en plein milieu d’un service, je sais que ta vie est compliquée mais je peux pas accepter ça, c’est injuste pour les autres gens qui bossent ici… » J’ai comme l’impression qu’il tente de me virer là. C’est pas le moment, je ne peux vraiment pas me faire virer maintenant. « Je vais me reprendre Ted, je suis désolé vraiment, c’est une mauvaise passe mais j’ai absolument besoin de ce travail. Laisse moi encore une chance. » Je sais qu’il m’aime bien, qu’il se laisse trop souvent amadouer par ma situation et une fois de plus il lache. « Je compte sur toi Elio, plus un pas de travers. » Je hoche la tête vigoureusement. « Allez file… Reposes toi bien et je te vois demain, à l’heure ! » Je prends la direction de la sortie et quand j’ouvre la porte c’est la tempête. « Bordel c’est quoi ce temps ? » Je n’ai pas de veste ni parapluie et je présents que je vais me faire totalement détremper mais peu importe, je prendrais une bonne douche chaude en arrivant. J’enfourche ma trottinette et brave la tempête. Quand j’arrive à la maison je suis trempé et pas qu’un peu, la pluie est froide et un long frisson me parcourt tout le corps. C’était le moment d’arriver.
Je monte les escaliers en vitesse sautant les marches trois par trois et quand j’arrive en haut je me retrouve face à un spectacle que je n’avais pas imaginé une seconde. Kyrah est là transie de froid. Son regard croche le mien et il n’en faut pas plus pour qu’elle commence à pleurer. « Kyrah ? » Je me rapproche d’elle avec lenteur comme on le ferait d’un animal apeuré. « Pourquoi t’as pas répondu à mes appels ? » Je grimace légèrement « J’ai pas mon portable, j’étais au travail… » Cette fois je dis la vérité mais je crois qu’au final ce n’est pas ça qui est important. J’arrive à sa hauteur et lui tends une main pour qu’elle se relève. Elle l’attrape et ces doigts gelés me glacent presque le sang. « Bon dieu Kyrah… Qu’est ce qui c’est passé t’es glacée. » Je ne me pose pas plus de questions et ouvre la porte pour la faire pénétrer avec moi. Une fois à l’intérieur je fais le moins de bruit possible, les jumeaux dorment et Kaecy aussi probablement. Je l’amené avec moi dans la salle de bain sans dire un mot, je dois presque la porter tant elle est faible et je sens mon ventre commencer à être noué par la peur. Une fois entrés dans la salle de bain je ferme derrière nous et allume déjà l’eau de la douche pour la faire chauffer. « Il faut que tu te réchauffes, faut absolument que tu te réchauffes… » Je suis un peu paniqué et je pense qu’elle le sent elle aussi. Ces lèvres bleues semblent vouloir me dire quelque chose mais c’est comme si elle n’en avait pas la force et bien que l’eau coule elle ne se déshabille pas, continuant de grelotter les bras croisés sur son torse. Je me rapproche un peu d’elle tentant cette fois de reprendre mon calme. Mes mains viennent se poser de chaque côté de son visage… « Je vais t’aider… » J’ai presque peur de la toucher, peur aussi des ces réactions, cette situation est des plus étranges et alors que j’attrape son haut pour le faire remonter doucement le long de son corps les souvenirs de nos moments intimes me reviennent à la tête comme un boomerang. Je les chasse au plus vite. Kyrah semble n’apprécier que moyennement mais ces propres gestes sont tellement lents qu’elle ne repousse pas mon aide – elle sait qu’elle a besoin de cette douche et au plus vite. Pour ma part j’ose à peine regarder son corps dénudé… Il faut qu’elle rentre dans cette douche et que je sorte de là au plus vite… C’est ce qu’il y a de mieux à faire.
J’ai beau être un peu énervée qu’il n’ait pas répondu à mes messages alors qu’il avait promis de toujours y répondre au plus vite, je n’ai plus la force de l’engueuler. Je suis trop faible, et même ma voix est quasi inaudible tellement mon corps est contracté et tellement il retient au maximum toute énergie nécessaire à me garder lucide. Je ne me suis jamais sentie comme ça, même après des mois passés dans la rue, ça n’a jamais été aussi pire que ça. C’est dingue. Ce gosse me pompe une énergie folle. « J’ai pas mon portable, j’étais au travail… » Il s’approche doucement et me tend la main pour que je puisse la prenne. Mon cerveau est au ralenti. Je regarde sa main une seconde, puis je le regarde et finis par saisir sa main de mes doigts gelés. « Bon dieu Kyrah… Qu’est ce qui c’est passé t’es glacée. » Je n’arrive même pas à lui répondre, je crois que je relâche un peu la pression, être avec lui me rassure, je me dis que maintenant qu’il est là, tout ira bien. Il ouvre la porte et nous fait entrer à l’intérieur. Je ne fais pas de bruit, de toute manière, je n’ai pas l’énergie pour ça. Elio me retient, m’aide à avancer jusqu’à la salle de bain. Il ferme la porte et allume l’eau chaude. La chaleur commence à me saisir et je sens mon corps entier me brûler, j’ai presque peur d’aller sous la douche. Les yeux clos, je garde mes bras refermés contre moi comme pour me protéger. J’ai l’impression d’être un glaçon, je n’arrive pas à bouger, je tremble de partout. « Il faut que tu te réchauffes, faut absolument que tu te réchauffes… ». Je réouvre les yeux pour le regarder et je voudrais lui expliquer, lui dire ce qu’il s’est passé, mais j’en suis tout bonnement incapable. Mes dents claquent encore malgré la chaleur qui emplit la petite pièce à cause de l’eau chaude. Il vient poser ses mains sur mon visage. « Je vais t’aider… » Ça me brûle, ses mains me brûlent tellement mon visage doit être gelé. Je grimace un peu mais je n’ai pas d’autre choix que le laisser faire. Je suis incapable de bouger ou de me déshabiller seule. Doucement il attrape mes vêtements trempés pour les faire glisser le long de mon corps. Je lève les bras pour l’aider un peu, je dégouline tellement la pluie est introduite jusque sous mes vêtements. J’ai l’impression qu’elle s’est même imprégnée dans les pores de ma peau. C’est horrible. Machinalement, je replace mes bras serrés contre me ventre comme pour le protéger. Je ne cherche même pas à me cacher de lui, ce n’est pas la première fois qu’il me voit nue de toute manière, et à cet instant, mes pensées sont loin d’être ce qu’elles ont pu être il y a quelques temps. Je suis encore trop congelée pour penser à des trucs pas catholiques. Il finit par retirer mon pantalon et ce qu’il reste de bout de tissus, pour que je me retrouve totalement nue face à lui. Mon regard accroche le sien, comme pour lui dire merci, mais je tremble encore. Alors je me dirige vers la douche, doucement, hésitante, et alors que je tourne la tête vers Elio, il se dirige déjà vers la sortie. « Elio ! » Il se retourne pour me regarder et, le regard suppliant, je lui demande, d’une petite voix presque couverte par le bruit de l’eau qui coule dans la douche. « Me laisse pas toute seule s’il te plait. » Il lâche alors la poignée et se rapproche un peu. « Toi aussi t’es trempé. Viens avec moi. » De toute manière, dans l’état dans lequel je suis, il doit bien se douter que je ne vais pas lui sauter dessus. J’ai juste besoin qu’il soit près de moi, au cas où il se passerait quelque chose. Je ne sais pas bien quoi, mais j’en ai besoin. Il semble hésitant, ce que je peux comprendre, mais je le supplie presque du regard, et il finit par se déshabiller lui aussi. Je me retourne pour ne pas le regarder faire et j’entre sous la douche, à pas de velours. L’eau me paraît brûlante alors que le thermostat est réglé sur 37. C’est pire que ce que je pensais. Doucement, mon corps se réchauffe et je garde les yeux fermés, entendant Elio entrer dans la douche. Je sens sa présence, ça me suffit pour me sentir un peu mieux. Je décroche la paume de douche et me retourne pour faire face à Elio, et je lui tends la paume de douche. C’est la première fois depuis presque trois mois que je le vois nu, et je sens tout de même une vague de chaleur m’envahir. J’essaie simplement de ne pas trop le regarder. Mais lorsque nos regards se croisent, j’esquisse un petit sourire. « Merci. ». Décidément, j’ai un peu trop tendance à lui dire merci ces derniers temps. « J’ai perdu les clefs de chez la copine chez qui je dors en ce moment. Et comme elle est à Londres, elle pouvait pas m’ouvrir. Je savais pas trop où aller… » Je me pince un peu les lèvres d’un air désolé. Je sais que je bouleverse sa vie depuis que je suis arrivée, et ce n’est pas prêt de changer, la preuve encore ce soir.
Elle est nue – totalement nue devant moi et même si je tente de faire abstraction c’est impossible pour moi de ne rien ressentir. De ne pas avoir cette ribambelle de souvenirs qui reviennent au grand galop. Je dois sortir de cette pièce maintenant, j’en ai déjà fait assez – elle n’a pas besoin de moi pour prendre sa douche. « Elio ! » Ma main est sur la poignée quand elle appelle mon prénom, je ferme les yeux une demi seconde sachant pertinemment que son appelle va me faire céder. Peu importe ce qu’elle veut. Je me retourne osant tout juste la regarder… « Me laisse pas toute seule s’il te plait. » Je sens mes entrailles se serrer alors qu’elle me demande de rester. Je lui ai promis d’être là – promis de ne pas la laisser tomber et c’est un engagement auquel je tiens. Je lâche la poignée me rapprochant un peu d’elle en espérant l’inciter à aller dans la douche. « Toi aussi t’es trempé. Viens avec moi. » Mon regard approche le sien, je voudrais y lire une pointe d’humour, quelque chose qui m’insisterait à le prendre comme une blague mais ce n’est pas le cas. A ce moment précis mon esprit devrait être entrain de faire une liste de toute les bonnes raisons de fuir – de tout ce que j’ai à perdre en rentrant dans cette douche, en me laissant guider par mes envies. Mais mon cerveau est comme tout le reste de mon corps gelé. J’ai froid moi aussi, je ne m’en rends vraiment compte que maintenant que je prends le temps de penser à moi et non plus à Kyrah. Lentement je me débarrasse de mes propres habits qui vont rejoindre ceux de Kyrah sur le sol. Je suis nu à mon tour, presque vulnérable devant les yeux de la seule personne qui est capable de faire vivre en moi autant d’émotions. Mais elle ne me regarde pas, l’eau ruisselle sur son corps et je l’observe un instant avant d’oser aller la rejoindre. Une fois dans la douche avec elle je sens mon cœur s’emballer, mon regard chercher à capter autre chose que son corps dénudé. Quand elle me tend la paume de douche je l’attrape un peu maladroitement laissant l’eau couler sur mon corps et réchauffer ma propre peau. « Merci. » Cette fois nos regards se croisent et contre toute attente mon cœur semble retrouver un rythme un peu plus descend alors que c’est cette fois mon ventre qui semble me chatouiller de l’intérieur. « J’ai perdu les clefs de chez la copine chez qui je dors en ce moment. Et comme elle est à Londres, elle pouvait pas m’ouvrir. Je savais pas trop où aller… » Et c’est ici qu’elle est venue. C’est à moi qu’elle fait confiance pour une fois, cette constatation me fait du bien. « Tu as bien fait de venir… » Je sais qu’elle aurait pu appeler ma mère. Que mon père est absent et que probablement elle lui aurait ouvert grand la porte mais c’est ici qu’elle est venue. Cette constatation me touche presque autant qu’elle m’effraye. « Reprends la Kyrah, tu en as plus besoin que moi. » Je lui tends la paume de douche et elle semble ne pas trop savoir ce qu’il faut en faire. Comment se le partager équitablement. « Donne, je vais la mettre là-haut. » Je la reprend délicatement et l’installe sur le portoir que je relève le plus haut possible. La cascade m’oblige à passer un peu au dessus de Kyrah et nos peaux à peines réchauffées se touchent me procurant une chaleur intense et inexplicable. Une fois la paume bien haute, l’eau nous asperge tous les deux. Je me remets en position sur le sol et la distance entre Kyrah et moi est tellement infime que je peux sentir la chaleur de son corps reprendre possession d’elle. Nos yeux se trouvent pour ne plus se lâcher créant une ambiance particulière dans cette minuscule douche. Le désir nous lie une fois de plus je peux le sentir…Je pourrais l’embrasser là maintenant – j’en meurs d’envie – mais je ne fais rien et elle non plus. Dans ce moment très spécial c’est comme si un baiser était superflu comme si il n’y avait besoin d’aucun contact pour dire toutes ces choses que l’on ne se dit jamais. Alors ni elle, ni moi ne bougons, le regard rivé dans celui de l’autre, l’eau ruisselant à l’unisson sur nos deux corps presque enlacés. Puis ma main monte pour se poser délicatement sur son visage alors que mon pouce vient dessiner avec timidité le contour de ces lèvres. « Tu reprends des couleurs… » Un sourire se dessine sur mon visage et je le communique à Kyrah. Et ma main descend lentement le long de son cou pour aller se placer derrière sa nuque alors que je l’attire un peu à moi. Mon front va se poser contre le sien et nos lèvres sont maintenant à quelques centimètres à peine l’une de l’autre. Que je sens son souffle chaud sur mes lèvres, dans ma bouche. « J’ai tellement envie de t’embrasser Kyrah… Je te promets c’est fou… J’ai jamais ressenti ça, jamais eu cette impression que le désire me consume complètement… Mais ça serait tellement injuste de le faire. Ca ne serait tellement pas une bonne idée… Que je me laisse consumer… » Je laisse un léger moment de silence le temps que l’envie qui me tiraille s’en aille – du moins j’espère qu’elle le fasse mais rien, elle est toujours là. « J’ai plus envie de te faire de mal… » Je relève mon regard pour le plonger dans le sien… Je ne sais pas pourquoi je parle pourquoi je lui dis tout ça mais je suis incapable de faire comme si de rien n’était, je sais que si je ne le dis pas je vais céder et que ça serait un erreur. « J’ai plus envie de te laisser l’opportunité de m’en faire non plus… » Je sais que nous sommes tous les deux fautifs que cette douleur qu’elle m’a fait ressentir n’était qu’un juste retour des choses et pourtant rien que d’y penser j’ai l’impression que mon cœur est encore meurtri, que jamais je ne pourrais lui faire confiance comme je voudrais et que c’est là que repose tout le problème entre nous… « Je veux faire les choses bien tu sais… On va être parents il serait temps que je sache comment me conduire en adulte. » Responsable, c’est le mot que mon père utiliserait. Celui qu’on m’a sermonné depuis le jour ou j’ai eu la garde des jumeaux comme le saint graal d’une bonne éducation. J’ai jusqu’à maintenant échoué lamentablement à l’épreuve de la responsabilité mais je veux réellement que ça change.
Je ne sais pas trop pourquoi je parle, pourquoi je ne garde pas mon énergie pour réussir à refaire de moi un corps en vie. Mais j’en ressens comme le besoin, peut-être pour occuper mon esprit qui semble divaguer sur le fait que nous sommes tous les deux nus sous la douche, ou peut-être simplement pour briser le silence. Sans doute un peu des deux. « Tu as bien fait de venir… » Bien sûr, j’aurai pu aller voir n’importe qui d’autre, je connais pas mal de monde ici finalement. Ça aurait pu être quelqu’un que je connais, ou pire quelqu’un que je ne connais ça. Ça aurait pu être Astrée, Danny, ou même Erin. Mais non, c’est ici que j’ai eu besoin de venir, pour le voir, lui, comme un besoin irrépressible. C’est comme si mon cerveau une fois déconnecté était venu par instinct, ou peut-être que c’est le bébé qui m’a mené jusqu’ici ? Peu importe, je suis là maintenant, et il est là aussi. C’est ce qui importe. « Reprends la Kyrah, tu en as plus besoin que moi. » Je récupère la paume de douche mais j’aimerai juste trouver un moyen de répartir l’eau chaude pour nous réchauffer tous les deux. « Donne, je vais la mettre là-haut. ». Je le laisse faire, et alors qu’il se penche un peu sur moi, je me recule comme pour me barricader, ne pas qu’il me touche, que son corps me frôle, par protection pour moi même et aussi pour lui. Faut-il que je lui rappelle que je suis enceinte et que le moindre effleurement pourrait déclencher en moi une envie subite de lui faire l’amour sur place ? Je me contrôle, du mieux que je peux, je pense à Olivia, encore et encore, comme si ça pouvait m’aider à ne pas me laisser aller dans les bras d’Elio. Mais mon regard dans le sien, mon corps qui se réchauffe doucement, ça devient de plus en plus compliqué. Il soulève sa main pour la poser sur ma joue et son pouce effleure mes lèvres, ce qui me fait fermer les yeux quelques secondes, mon coeur s’accélérant dans ma poitrine. Je t’en prie Elio, ne fais pas ce genre de chose. Sa main glisse dans mon cou et je me contracte un peu comme pour, une fois encore, m’empêcher de me laisser aller dans mes sentiments. Il m’attire à lui et déjà nos corps se rapprochent, se touchent. Front contre front, je sens son souffle caresser mes lèvres et je me concentre du mieux que je peux pour ne pas me laisser aller dans ses bras. Mes mains restent le long de mon corps, encore un peu crispées, ne sachant pas quoi faire. « J’ai tellement envie de t’embrasser Kyrah… Je te promets c’est fou… J’ai jamais ressenti ça, jamais eu cette impression que le désire me consume complètement… Mais ça serait tellement injuste de le faire. Ca ne serait tellement pas une bonne idée… Que je me laisse consumer… » Ne dis pas des trucs comme ça Elio je t’en supplie. Je me pince les lèvres mais ne réouvre surtout pas les yeux, je sais que je pourrai bien craquer. Mon coeur bat à une allure folle, c’est dingue. Comment peut-il avoir ce pouvoir sur moi. « J’ai plus envie de te faire de mal… » Je réouvre les yeux pour les plonger dans les siens et sans que je m’en rende compte, mes mains sont venues se poser à sa taille, glissant jusque dans son dos. « J’ai plus envie de te laisser l’opportunité de m’en faire non plus… ». Mes mains retombent le long de mon corps et je sépare nos fronts, sans pour autant arrêter de le regarder. J’ai l’impression de reprendre conscience d’un coup. Que mon corps et mon cerveau ont repris du service, mais je ne sais pas quel état je préférais au final. Il a chamboulé ma vie en y entrant, et il continue, malgré lui. Me dire qu’il meurt d’envie de m’embrasser, et la minute d’après me dire qu’il ne veut plus qu’on se fasse de mal, justement, ça me fait mal. « Je veux faire les choses bien tu sais… On va être parents il serait temps que je sache comment me conduire en adulte. ». Je hoche la tête. « T’as raison. Et moi je suis l’irresponsable dans l’affaire. » Je soupire un peu et pose ma main sur mon front en fermant les yeux quelques secondes. « Je sais pas pourquoi je suis venue ici. Je… » Je me pince les lèvres une nouvelle fois, alors que mon corps me crie de lui sauter dessus, et que mon cerveau me dit de fuir très loin. « Merci pour la douche. Je vais rentrer… » Je glisse près de lui pour atteindre l’autre côté de la douche où se trouve la porte qui me mènera jusqu’à l’extérieur. Mais au moment de sortir, je m’arrête net. Putain, pourquoi je suis aussi tiraillée quand ça le concerne, merde ! « Tu sais quoi ? Moi aussi j’ai décidé que j’allais devenir responsable. » Je me retourne vers lui et plante mon regard intense dans le sien. « Je serai responsable quand le bébé sera là. Ce sera déjà bien assez tôt. » Et sans attendre, je réduis la distance entre nous et viens attraper sa nuque pour plaquer mes lèvres contre les siennes. Je l’embrasse comme si ma vie en dépendait, le plaquant contre le mur de la douche, dans la précipitation. On aura bien le temps d’être responsables quand on sera parents…
Tout mon corps la désire autant qu’il refuse de se laisse aller. C’est elle qui met fin à notre contact. Elle a sans doute raison, sinon j’aurais bien pu céder à une tentation qui se faisait plus grande de secondes en secondes. « T’as raison. Et moi je suis l’irresponsable dans l’affaire. » Pourquoi faut-il qu’elle comprenne tout de travers. « J’ai pas dit ça… » .Pour une fois dans notre relation je ne parlais pas d’elle mais bien de moi – je l’ai dit c’est moi qui ait besoin de devenir plus réfléchi, je ne lui demande rien – je ne l’insulte pas et pourtant elle le prend de toute évidence pour elle. « Je sais pas pourquoi je suis venue ici. Je… » Je plisse un peu les sourcilles, ne sachant pas vraiment ce qui est entrain de se passer, je n’avais pas imaginé un tel retournement de situation. « Kyrah… » Ma voix est douce un peu fautive, je voudrais m’excuser mais je ne sais pas exactement de quoi. D’avoir accepté de venir dans cette douche avec elle, ou alors de ne pas savoir comment gérer mes émotions en sa présence. Dans mon crane c’est du bouillon, une grosse soupe de n’importe quoi que je n’arrive pas à trier. « Merci pour la douche. Je vais rentrer… » Je reste planté comme un con nu et sous l’eau alors qu’elle me passe à côté je tente de lui toucher le bras pour l’en dissuader… « Ne pars pas… » Mais elle semble décidée et a déjà une main sur la porte vitrée. Pourtant elle s’arrête là ne continuant pas son chemin. « Tu sais quoi ? Moi aussi j’ai décidé que j’allais devenir responsable. » Je la regarde un peu interloquer… Parfait tant mieux. Que veut-elle que je lui réponde, que de toute évidence ce n’est pas pour ce soir parce qu’elle s’apprête à fuir alors que c’est encore la tempête dehors et qu’elle n’a nul part où aller ? « Je serai responsable quand le bébé sera là. Ce sera déjà bien assez tôt. » Je n’ai pas le temps d’analyser sa phrase, à peine de la comprendre que Kyrah est déjà proche de moi, ces lèvres trouvant les miennes pour m’embrasser comme seule elle sait le faire. Elle me pousse contre le mur et je me laisse faire incapable de bouger une autre partie de mon corps que les lèvres. Et pourtant je me sens revivre, grandir en moi une énergie que j’avais presque oublié avoir. Mes bras se referment sur son corps, une de mes mains glissant dans sa nuque pour accentuer un peu plus notre baiser. Son corps si proche du mien le touchant fait déjà monter en moi une excitation que rien ne peut cacher. Je laisse une sorte de gémissement animal sortir de ma gorge alors qu’elle fait glisser ces mains sur mon torse mouillé. J’avais presque oublié comme ça fait du bien – comme je me sens bien quand il n’y a que nous, le temps d’un instant. Serrant sa taille un peu plus fortement j’inverse la tendance la tournant pour la mettre contre le mur à son tour alors que ma langue joue toujours avec la sienne, mais dans mon élan je manque de tomber en glissant sur le sol de la baignoire. Un rire franc sort de ma bouche alors que je la décroche de celle de Kyrah. Je suis pris dans l’euphorie du moment mon cerveau complètement déconnecté. « Viens on sort de là, ça devient dangereux. » Je rigole évidement et la tire par la main pour la sortir de la douche puis j’attrape une serviette que je lui passe sur les épaules, la frictionnant un peu pour la sécher, je finis par remonter un peu la serviette en ébouriffant ces cheveux mouillés. « Magnifique, je crois que j’ai loupé ma vocation de coiffeur. » Je ris une fois de plus et de mes mains des deux côtés de sa tête encore dans la serviette je l’amène à moi pour un baiser un peu plus tendre mais qui prend vite des allures plus bestiales comme si nous étions incapable de séparer nos bouches une fois collées l’une à l’autre. Je réussi pourtant à attraper une serviette que j’enroule autour de ma taille pour cacher mon excitation déjà bien présente. Puis me séparant d’elle j’ouvre la porte en faisant le moins de bruit possible et nous pénétrons dans le couloir. « Elio ? » J’ai à peine fait un pas que la petite voix ensommeillée de Dani raisonne à mes oreilles. « Pourquoi tu rigoles avec Cruella ? » J’aurais du m’en douter, leur chambre est accolée à la salle de bain ça aurait été un miracle que ça n’en réveille pas au moins un. « Dani on t’a réveillé ? » Ou comment éluder une question à laquelle on ne veut pas répondre. « Un peu… Elle est là Olivia. » Je passe un main dans ma nuque un peu mal à l’aise. La joie des enfants qui comprennent malheureusement bien plus de choses que ce que l’on aimerait. « Non… Non elle est pas là… Tu peux aller te recoucher Dani, on va faire moins de bruit. » Quand nous rentrons dans la chambre tous les deux on peut bien sentir que Dani a cassé l’ambiance me rappelant subtilement que j’ai déjà une petite amie et que ça n’est pas Kyrah… Moi qui voulais arrêter de jouer les cons c’est loupé. Je me dirige vers l’armoire. « Je suis désolé les affaires de Kaecy sont dans sa chambre alors il te faudra te satisfaire d’un de mes T-shirt… Et… D’un short si tu veux. » Le tout risque d’être carrément trop grand pour elle mais c’est mieux que rien j’imagine. Il y a un certain malaise il me semble entre nous, ou alors c’est juste moi et ma culpabilité. « Tu as mangé quelque chose ? Tu veux un thé ? Ou autre chose ? » Bien qu’elle ait repris des couleurs je m’inquiète pour elle – pour elle et le bébé évidement mais j’ai peur qu’aborder le sujet ne fasse que rendre la situation encore plus étrange.
« Kyrah… » Sa voix. Mon prénom prononcé entre ses lèvres me donne une vague de chaleur extrême. Je le réentends dire mon prénom pendant qu’on faisait l’amour. Je me sens envahir de tous ces souvenirs que j’essayais de garder enfouis. Mais ce soir, il est trop difficile de les laisser de côté. Et maintenant que le bébé est là, après tout, on risque quoi ? Rien . Plus rien. Je ne pense plus à Olivia, plus à l’endroit où on se trouve. Il n’y a plus que lui et moi. Et le désir, le désir ardent de me retrouver avec lui, contre lui. Je me jette sur lui et déjà ses bras se referment sur moi, comme s’il attendait ça, lui aussi, ne sachant pas comment formuler sa demande, son envie. Je sens rapidement son corps se contracter, et son excitation se faire présente, très présente. L’envie de lui grandit de seconde en seconde à mesure que nos baisers deviennent plus langoureux. Il me retourne et me plaque à mon tour contre le mur alors que je laisse échapper un léger grognement de plaisir. Il m’a tellement manqué. Ma jambe remonte le long de la sienne, et mes mains, à l’inverse, perdent de l’altitude pour venir caresser ses fesses. Mais Elio manque de se casser la figure en glissant et mon rire se mêle au sien. Toutes les tensions semblent s’être évaporées. J’ai l’impression de le retrouver, ce Elio, celui de qui je suis tombée amoureuse. « Viens on sort de là, ça devient dangereux. » Il prend ma main et m’invite à sortir alors qu’il m’enroule dans une serviette, me frictionnant légèrement. Il finit par ébouriffer mes cheveux et je le regarde rire. « Magnifique, je crois que j’ai loupé ma vocation de coiffeur. » Je ris avec lui, amusée par la situation. Je me sens tellement plus légère. Il revient poser ses lèvres sur les miennes et le baiser pourtant au départ plutôt chaste devient plus langoureux, rempli d’envies. Elio sépare nos lèvres pour attraper à son tour une serviette et l’enrouler autour de sa taille, juste après que mon regard se soit glissé sur sa virilité. Je me mordille la lèvre dans une sourire avant d’ajouter. « T’as raison, cache-moi ça… ». J’attache à mon tour la serviette autour de ma poitrine et nous sortons de la salle de bain sans bruit, tombant nez à nez avec un des jumeaux, impossible de savoir lequel. Je me cache à moitié derrière Elio, mais je suis vite démarquée. « Elio ? Pourquoi tu rigoles avec Cruella ? » « Dani on t’a réveillé ? » Voilà, c’est Dani. Au moins maintenant je le sais. « Un peu… Elle est là Olivia. » Je lève les yeux au ciel et retiens un soupir. Manquait plus que ça. Il pouvait pas se la fermer celui-là ? J’avais réussi à lui faire oublier cette Olivia l’espace d’un instant. Comment faire retomber le soufflé en 1 leçon, par Dani Harrington. « Non… Non elle est pas là… Tu peux aller te recoucher Dani, on va faire moins de bruit. ». Je regarde le garçon endormi retourner dans sa chambre alors que nous prenons le chemin de la chambre d’Elio. L’ambiance est différente, il a tout cassé. « Je suis désolé les affaires de Kaecy sont dans sa chambre alors il te faudra te satisfaire d’un de mes T-shirt… Et… D’un short si tu veux. » Je hoche un peu la tête « Ok, donne-moi un t-shirt. » Je ne vais pas lui dire que j'ai l'habitude de dormir nue... Je le laisse fouiller dans son armoire pour me tendre un bout de tissus que j’attrape, avant de laisser tomber la serviette à mes pieds pour enfiler le t-shirt. J’ai bien compris que ça ne servait à rien que je lui saute dessus à nouveau. Il est en train de penser à sa petite amie. Je le vois bien. Le malaise est bien présent. « Tu as mangé quelque chose ? Tu veux un thé ? Ou autre chose ? » Je secoue la tête. « Ça va, t’inquiètes, j’ai mangé chez une amie ce soir, je vais bien. » J’esquisse un mince sourire qui se veut rassurant et je me pince un peu les lèvres. « Je crois qu’on ferait mieux de dormir… » Même si je ne me sens pas réellement fatiguée. Je récupère au sol la serviette pour me sécher un peu mieux les cheveux, et je reste dos à Elio volontairement le temps qu’il s’habille, qu’il mette au moins un caleçon, s’il ne veut pas que je le viole. Je pose la serviette sur un dossier de chaise et me dirige vers le lit. « Tu dors d’un côté en particulier ? » Je le laisse me répondre, et prends la place inverse. J’aurai pu lui proposer d’aller dormir sur le canapé, mais je n’imagine pas bien la tête de Kaecy ou des jumeaux au réveil en me voyant endormie là. Je me faufile sous la couette et m’installe du mieux que je peux pour ne pas prendre trop de place, et ne pas être trop près de lui, on ne sait jamais. Je me tourne dos à lui, en position du foetus, les yeux encore grands ouverts. Je le sens gigoter mais je ne bouge pas. Et puis finalement, je recule un peu et mon corps se heurte au sien, l’épousant comme à la perfection. Il était couché dans la même position que moi. Je glisse ma main dans mon dos et attrape son bras, puis je me cale un peu mieux contre lui et pose sa main sur mon ventre, sous le t-shirt. D’une voix douce et calme, je lui murmure. « Je crois que c’est bien qu’il sente que tu es là… » Du bout de mon pouce, je caresse le dessus de sa main, alors que mes yeux se ferment doucement, bercée par la respiration d’Elio. Je ne me suis pas sentie aussi bien depuis très longtemps. Depuis cette nuit il y a trois mois quand je me sis endormie dans ses bras, sûrement.
C’est la culpabilité qui me ronge maintenant, bien plus forte que la première fois. Pourtant nous n’avons pas couché ensemble, ça ne devrait pas me faire aussi mal mais cette fois c’est pire. C’est lacher là où je m’étais promis d’être plus fort. C’est me prouver une fois de plus que face à Kyrah je suis faible, qu’il n’y a qu’elle qui sache me faire cet effet bien qu’elle semble toujours si inatteignable… Je fouille dans l’armoire pour ne pas avoir à la regarder, pour tenter de chasser le malaise mais rien n’y fait. « Ok, donne-moi un t-shirt. » J’attrape le premier que je trouve, assez grand pour qu’il la cache un peu puis je prends moi-même des affaires que j’enfile en vitesse. Un calçons et un T-shirt. Je suis plutôt habitué à rester nu mais dans notre situation ça serait plutôt mal vu. « Ça va, t’inquiètes, j’ai mangé chez une amie ce soir, je vais bien. » Je suis rassuré de savoir qu’elle prend soin d’elle, soin de notre bébé. Elle m’a fichu une peur bleu ce soir je dois bien l’avouer et même si je peine à la regarder revoir son visage coloré me fait un bien fou. « Je crois qu’on ferait mieux de dormir… » Elle a sans doute raison et je regarde le lit avec une moue un peu étrange. « Peut-être que je devrais dormir sur le canapé… » Elle me regarde avec ce petit plissement de sourcil que je trouve beaucoup trop adorable et qui me fait presque détourner les yeux. Elle n’a pas besoin de parler pour que l’on se comprenne. Nous sommes des adultes et de toute évidence il ne se passera rien entre nous ce soir. « Tu dors d’un côté en particulier ? » Je hausse les épaules sans réellement répondre. Je me suis toujours bien moqué de ce genre de chose et j’ai plutôt l’habitude de faire comme les évènements nous mènent à le faire mais aujourd’hui la situation est un peu particulière. Nous nous installons dans le lit et je suis bien incapable de rester en place. Je tourne et retourne, cherchant une position alors que je sais bien que ce n’est pas le problème principal. Le problème c’est qu’elle est dans mon lit. Je finis par me tourner vers elle, mes yeux commençant à s’habituer à l’obscurité je peux tout juste voir ces courbes. Quand elle se déplace légèrement et que son corps frôle le mien j’ai d’abord une contraction légère, pourtant vite je me détends, sa chaleur me fait du bien elle semble me détendre et quand sa main va chercher la mienne pour la poser sur son ventre je sens une vague de bien-être m’envahir. « Je crois que c’est bien qu’il sente que tu es là… » Je viens caler ma tête proche de sa nuque alors que ma main se resserre délicatement sur son ventre. Sur notre bébé – l’espace d’un instant j’en oublie presque tout le reste – cette situation trop compliqué entre nous. Il n’y a que nous trois… Que nous trois…
***
Quand j’ouvre les yeux le soleil filtre légèrement par la fenêtre. Je jette un coup d’œil à mon réveille, j’ai encore quelques minutes devant moi. Minutes pour réfléchir à la façon dont je vais gérer la situation ce matin. Ma main est toujours sur le ventre de Kyrah bien que nos corps ne se touchent plus que de cette façon puis que je suis maintenant couché sur le ventre. Je me relève un peu sur le coude pour l’observer. Elle semble aller bien… Elle semble plus calme que jamais. Ma main va délicatement remettre ces cheveux en place et ça la réveille. Je devrais sans doute être mal à l’aise mais ça n’est pas le cas. « Salut… » Un mince sourire se dessine sur mon visage alors que je retire ma main. « Tu as bien dormi ? » C’est d’une banalité à mourir et tellement étrange ce genre de questions entre nous mais pourtant j’ai vraiment envie de savoir – j’aimerai être sur qu’elle va mieux. Qu’elle n’a pas l’impression qu’il y a un quelconque soucis avec le bébé. C’est le genre de choses que les femmes sentent non ? « Dis tu crois que… Tu crois qu’il faudrait que je lui parle ? Au bébé je veux dire… Il y a des études qui parlent de ça je sais pas ce qu’elles disent vraiment mais c’est bien non ? » Je descends légèrement dans le lit pour positionner ma tête vers son ventre, c’est étrange je dois bien l’avouer et je racle un peu la gorge avant de commencer. « Salut… Heu… Bébé. » Je commence à rire en levant les yeux vers Kyrah qui me regarde faire. « C’est le truc le plus étrange que j’ai jamais fait. » Je rigole encore un peu en me disant que je suis d’un cliché, un vrai cliché sur pattes. « Elio ! Pourquoi tu parles au ventre de Cruella ? » Je n’ai pas entendu la porte s’ouvrir et je me retourne pour faire face aux jumeaux toujours en pyjama qui nous regardent avec leurs cheveux roux et hirsutes sur leur tête. Assez rapidement je me relève pour m’asseoir dans le lit. « Je… heu… » Mon dieu je crois que je ne peux pas continuer à leur inventer des histoires. Kaecy est maintenant au courant, c’est leur tour il me semble. « Venez là les terreurs j’ai quelque chose à vous dire. » J’imagine que ce n’est pas le meilleur moment, que Kyrah voudrait sans doute échapper à ça mais si elle doit avoir mon enfant alors je ne vais pas lui cacher la réalité de ma vie. Les jumeaux font partie de ma vie et je ne peux totalement me dissocier d’eux. Les deux têtes rousses viennent s’asseoir sur le lit regardant Kyrah et moi chacun notre tour. « Je parle au ventre de Kyrah parce qu’il y a un bébé à l’intérieur. » Je vois leurs yeux s’arrondirent. « Elle a mangé un bébé ? » Bon dieu lui qui croit déjà qu’elle se fait des manteaux de fourrure avec des chiens. « Non, t’es bête ! Ca veut dire que un bébé il grandit dans son ventre et après il va sortir par sa bouche. » Je rigole légèrement. « C’est presque ça oui… Et ce bébé c’est celui de Kyrah et le mien aussi. » Ils hochent la tête en restant silencieux. « Il va vivre avec nous ? » « Il sera aussi notre bébé à nous. » C’est un peu trop de questions d’un coup. « Je… Je sais pas vraiment mais en tout cas il fera partie de notre famille. Faudra en prendre bien soin. » Leurs sourires de gamins amorcent le mien et je jette un œil à Kyrah. « Cool, on va s’entrainer avec les poupées Scott ? » « Ouais bah moi je serai meilleur que toi. » Ils disparaissent tous les deux nous laissant seuls. « C’était pas si dur au final. » Je ne sais pas ce qui me faisait si peur dans l’idée de leur dire. « Kaecy doit déjà être loin, je vais faire déjeuner les jumeaux tu veux quelque chose ? Je peux aller te chercher des habits. » J’attends sa réponse et sors de la chambre pour trouver dans le salon un message de Kaecy. « J’ai trouvé vos habits mouillés dans la salle de bain, ils sont à sécher. On en parlera ce soir… Si tu as envi. » Je sens que son message et pleins de sous entendus et qu’elle doit savoir que les habits ne sont pas ceux d’Olivia … Je récupère les habits de Kyrah et les lui ramène. « Hem… Kaecy a fait sécher tes habits alors si tu veux les récupérer… » Bon dieu je peux pas croire qu’on a quitté la salle de bain en laissant tout en plan hier soir.
Je crois que je n’ai pas aussi bien dormi depuis des mois, voire même des années. J’ai tendance à avoir le sommeil très agité, souvent même entrecoupé par une heure d’insomnie. Mais là, j’ai dormi tout d’une traite, sans même bouger, d’un sommeil profond et serein. Je sens quelque chose me chatouiller la joue et j’ouvre doucement les yeux, posant mon regard encore un peu flou et endormi sur Elio, qui est là, tout près, à me regarder. « Salut… ». Sa main quitte mon ventre, où elle était posée depuis bien longtemps visiblement puisque je ressens directement un froid s’installer à l’endroit même où sa phalanges me réchauffaient pendant la nuit. Je viens porter mes mains à mon visage pour le frotter doucement, comme pour vérifier que je ne suis pas en train de rêver. Être encore là, me réveiller près de lui, dans son lit, c’est un peu quelque chose d’aussi fou qu’inattendu. Mais agréable aussi, bien trop agréable pour que ce soit vrai. « Tu as bien dormi ? » J’esquisse un petit sourire et hoche doucement la tête. Je ne suis pas vraiment du matin, le réveil pour moi a toujours été plus ou moins compliqué, et j’ai tendance à ne pas être de très bonne humeur lorsque je sors du lit. Mais là, je suis étonnement calme, sûrement parce que je me sens reposée de cette nuit réparatrice. Il regarde mon ventre, alors que mon t-shirt est remonté, et que la couette s’arrête juste au dessus de mon intimité - qui rappelons-le, est encore dénudée de tout sous-vêtement, puisqu’ils gisent sûrement encore sur le sol de la salle de bain. « Dis tu crois que… Tu crois qu’il faudrait que je lui parle ? Au bébé je veux dire… Il y a des études qui parlent de ça je sais pas ce qu’elles disent vraiment mais c’est bien non ? » Je n’ai pas vraiment le temps de répondre qu’il vient déjà s’approcher de mon ventre, que je contracte sans trop le vouloir. J’essaie de respirer correctement même si ça s’avère légèrement compliqué. Il s’adresse désormais à mon ventre, ou du moins, à ce bout de machin qui vit en moi. « Salut… Heu… Bébé. » Je ne peux m’empêcher de sourire. « J’ai jamais rien lu sur le sujet, je sais pas si ça sert à grand chose, à part te rendre adorablement ridicule… » Je ris un peu en le regardant d’un air complice. « C’est le truc le plus étrange que j’ai jamais fait. ». Mon rire se mêle au sien, mais nous sommes coupés par une petite voix. Heureusement, parce qu’on commençait à être parfaitement ridicules de tant de clichés. « Elio ! Pourquoi tu parles au ventre de Cruella ? » Je fais glisser le t-shirt le long de mon ventre et remonte la couette sur moi, comme pour me planquer un peu. Je crois qu’ils aiment bien Olivia, alors me voir ici, dans le lit de leur oncle, alors qu’il parlait à mon ventre nu… J’ai juste envie de me terrer six pieds sous Terre. « Je… heu… Venez là les terreurs j’ai quelque chose à vous dire. » Merde. Non ! Elio pas maintenant ! Je ramène à moi mes jambes pour laisser aux garçons la place de s’incruster sur le lit. Pitié, que ça passe vite, je voudrais être ailleurs et ne pas assister à ça. « Je parle au ventre de Kyrah parce qu’il y a un bébé à l’intérieur. » Je ne quitte pas les jumeaux des yeux, essayant de déceler la moindre chose qui pourrait m’induire sur une piste de leurs sentiments. « Elle a mangé un bébé ? ». Ok, lui, il m’aime décidément pas. Je ne peux m’empêcher de lever les yeux au ciel. Il a pas fini. C’est vraiment con un gosse quand même. Je laisse Elio faire sa petite tirade et son explication pour faire comprendre aux garçons qu’ils vont avoir un petit neveu, enfin, un nouveau gamin dans la famille quoi. Ils ont l’air contents, Elio avait raison. Heureusement, ils ne tardent pas à repartir comme ils sont arrivés, comme de vraies tornades. « C’était pas si dur au final. » J’esquisse un mince sourire, un peu gênée quand même, toujours recroquevillée sur moi-même, en mode protection. « Kaecy doit déjà être loin, je vais faire déjeuner les jumeaux tu veux quelque chose ? Je peux aller te chercher des habits. ». Je grimace un peu. « Il me faut un peu de temps avant d’avaler un truc. Mais je veux bien au moins de quoi habiller mes fesses… » Je le regarde quitter la chambre et je passe mes mains dans mes cheveux, un peu nerveusement. Cette situation est définitivement trop bizarre. Je m’en veux presque de me sentir bien ici. Elio ne tarde pas à revenir avec ce que je devine être mes affaires. « Hem… Kaecy a fait sécher tes habits alors si tu veux les récupérer… ». Je grimace et repousse la couette pour sortir du lit, en tirant volontairement sur son t-shirt pour me cacher du mieux que je peux. « Je crois que tu vas avoir droit à une discussion avec Kaecy quand elle va rentrer… » Je récupère entre ses mains ma culotte et l’enfile devant lui, sans aucune gêne, bizarrement. Après tout, il m’a vue nue plus d’une fois, et cette nuit encore. « Finalement, j’ai faim. » Je lui souris et ajoute directement après. « ON a faim ! ». Son sourire me fait fondre, complètement. Et je le suis jusque dans la cuisine, pieds nus, simplement habillée de son ‘long’ t-shirt, qui m’arrive juste en dessous des fesses. « Vous avez du lait ? Je peux faire des pancakes. » « Des pankaces ouaiiiiissss !!! » Je ne sai spas dans quoi je me suis embarquée visiblement. Sans plus attendre, Elio me sort tout ce dont j’ai besoin, et je fais la pâte, puis commence à faire cuir les pancakes sur lesquels les jumeaux se jettent goulument. J’ai l’impression d’être une autre personne. Ce bébé est en train de me changer, définitivement. Mais comme si tout ne pouvait pas rester indéfiniment calme, j’entends le bruit de la porte d’entrée qui claque. Je regarde directement Elio comme pour lui demander si je dois me planquer. Et Olivia fait son arrivée, posant son regard accusateur sur moi. Un des garçons va lui sauter dans les bras et elle le porte pour lui donner un baiser sur le front. Mon coeur s’accélère et mon pancake est déjà en train de crâmer dans la poêle. Je suis habillée simplement d’un t-shirt appartement à son mec, il n’est même pas huit heures, elle n’est pas conne, les connections doivent se faire rapidement dans son cerveau. « Tu savais qu’on allait avoir un bébé ? » Manquait plus que ça. J’implore Harry Potter de me transformer en souris sur le champs pour que je puisse ailler me planquer loin, très loin.
Je me fais parfois l’impression d’habiter encore chez mes parents. Peut-être parce que Kaecy s’occupe de nous trois comme le ferait une mère, et que je m’inclus facilement dans le trios diffcile dont elle doit prendre soin. Ce matin, trouver nos habits secs au reveil alors que nous avions tout laissé en plan hier soir ne fait qu’accentuer cette impression. « Je crois que tu vas avoir droit à une discussion avec Kaecy quand elle va rentrer… » J’esquisse un léger sourire pour ne pas montrer que cette idée me perturbe un peu. Je sais que je n’ai pas bien agi hier, même si nous n’avons au final pas couché ensemble et que le simple regard de Kaecy suffira pour me faire comprendre que je fais le con. Avec elle il n’y a même pas besoin de conversation. Je tends ces habits à Kyrah qui enfile une culotte avant de se lever comme prise d’un élan de motivation. « Finalement, j’ai faim. » J’hoche la tête alors qu’elle continue sa phrase « ON a faim ! » Cette fois mon sourire s’étend un peu plus et j’ouvre la marche pour nous conduire dans la cuisine où les jumeaux nous attendent déjà en tournant comme des hélices autours de l’ilot central. « Vous avez du lait ? Je peux faire des pancakes. » « Des pankaces ouaiiiiissss !!! » Je reste un moment interdit face à cette proposition avant de me décider à lui donner les ingrédients pour cuisiner. La scène me paraît irréaliste, Kyrah cette fille que je pensais si sauvage est entrain de faire à manger pour mes neveux. Je la regarde faire légèrement amusé alors que les jumeaux sont au nirvana avec leur pancakes dans l’assiette. « C’est tellement plus bon que quand c’est Elio. » Je lève les yeux au ciel. Je crois qu’on a compris que je ne savais pas cuisiner merci de remuer le couteau dans la plaie. Et alors que je regarde la scène avec un air attendri la porte de l’entrer claque me rappelant violement à la réalité. J’ai à peine le temps de réagir qu’Olivia est déjà dans la cuisine son regard faisant des allers retours entre Kyrah qui porte mon t-shirt et moi. Ces sourcils se froncent mais elle ne dit rien alors que Dani lui saute déjà dans les bras pour recevoir ces câlins habituels. « Tu savais qu’on allait avoir un bébé ? » Elle le dépose sur le sol son regard fixé à moi cette fois comme si elle attendait une explication que je ne peux pas lui donner. « Je… Oui… Vous êtes déjà au courant ? » Merde, merde, je sens que c’est mal parti pour moi. Elle pose son sac sur l’un des sièges et défait son manteau avec une telle lenteur que ça en est presque difficile à vivre. Je m’attends à ce qu’elle dise quelque chose mais rien ne sort de sa bouche. Kyrah quant à elle ne bouge pas. « Tu veux manger des pancakes ? Ils sont trop bons. » L’innocence de Scott est presque touchante mais le regard d’Olivia est maintenant fixé sur Kyrah est bien plus noir que je ne l’ai jamais vu. Il me semble enfin apercevoir chez elle autre chose que de la bonté… Kyrah avait raison, Olivia la déteste c’est une certitude. « Non ne je veux pas de pancakes. Je veux qu’elle parte. » Je reste sans voix face à la détermination qu’Olivia a mise dans sa phrase. Jamais je ne me serais attendu à une telle réaction de sa part. « Non. » Mon ton est sec est presque sorti de nul part. Les deux jeunes femmes me regardent maintenant semblant attendre une suite mais je ne sais pas comment débuter et à qui adresser. Puis les jumeaux qui me regardent leurs bouilles pleines de Nutella ne m’aident pas. « Je sais que c’est… Que la situation est compliquée pour toi et on va en parler mais Kyrah… Elle a nul part ou aller alors pour le moment elle va rester ici. » Son regard semble se voiler d’un coup. Elle devait sans doute attendre de moi que je la soutienne. Ca aurait été la moindre des choses au vu de la situation dans laquelle elle nous retrouve ce matin mais je n’en fais rien… « Scott et Dani vous pouvez aller vous habiller pour l’école, je rangerais. » Evidement ils ne se font pas prier. Si ils peuvent échapper aux corvées de rangement. Une fois les deux garçons dehors je me tourne vers Kyrah… « Tu veux bien nous laisser ? » Ma voix est douce je tente de gérer ca le mieux possible mais c’est sans compter sur Olivia. « Non, non ne part pas. Puisque de toute évidence nous n’avons plus aucun secret pour toi. Si tu veux te taper Elio et ne même pas t’en cacher je crois que t’es autant concernée que moi par cette conversation. » Mon cœur s’accélère un peu. Je redoute ce genre de confrontation car je sais qu’elles n’apportent rien de bon. « On n’a pas couché ensemble Oli. » Je vois bien qu’elle tente de garder son calme mais les larmes lui montent aux yeux. « Prends moi pas pour une conne, Elle est à moitié nue dans ta cuisine avec ton T-shirt. Tu veux me faire croire que vous avez joué au scrabble ? » Cette fois je regarde Kyrah comme pour demander son aide. Je sais que c’est moche de ma part et qu’elle pourrait me descendre, elle en aurait toutes les raisons mais j’ai envie de croire qu’elle ne va pas le faire. Si il faut qu’on se supporte pendant des années maintenant autant qu’on soit dans le même camps j’imagine. Et puisqu’elle aussi est bloquée dans cette situation, le mieux serait qu’on en ressortent tous le moins meurtri possible.
C’est l’apocalypse dans ma tête. Je reste figée sur place, les yeux rivés sur ma poêle en espérant pouvoir disparaître, mais visiblement, je ne disparais pas, puisque je sens toujours son regard sur moi. Elle est en train de me fusiller, je n’ai pas besoin de la regarder pour le savoir. J’aimerai tirer sur mon t-shirt pour cacher un peu plus mes jambes, mais je crois que je ne ferai qu’accroitre ma culpabilité. « Je… Oui… Vous êtes déjà au courant ? » Je suis en apnée depuis un peu trop longtemps, et j’ose à peine bouger que je sens déjà l’odeur de brûlé se répandre dans la maison. Alors je dépose le pancake dans l’assiette près de moi et reverse un peu de pâte pour la terminer, dans le silence le plus total. « Tu veux manger des pancakes ? Ils sont trop bons. » Je serre un peu plus les mâchoires, les gamins, c’est vraiment pas évident, ça se faufile dans tes pattes au moment où tu le voudrais le moins. « Non ne je veux pas de pancakes. Je veux qu’elle parte. » Cette fois, je relève la tête et la tourne dans sa direction en une fraction de seconde, choquée par ce qu’elle vient de dire. Et à la fois, ça semblait si prévisible. Seulement, j’avais espéré qu’elle ne dise pas ce genre de chose devant moi, ni devant les enfants. « Non. » C’est maintenant Elio que je regarde, choquée. Il aurait très bien pu lui dire qu’ils allaient en parler ailleurs, mais au lieu de ça, il est catégorique. « Je sais que c’est… Que la situation est compliquée pour toi et on va en parler mais Kyrah… Elle a nul part ou aller alors pour le moment elle va rester ici. » Mais non ! Mes yeux s’arrondissent. Non ! Je n’ai jamais demandé ça, jamais ! Si elle me détestait déjà, là elle a juste envie de m’enterrer vivante. Elio s’empresse d’envoyer les garçons dans leurs chambres, et je voudrais aller avec eux. J’ai presque envie de dire un truc du genre ‘je vais les aider’, mais les mots restent coincés dans ma gorge et mes pieds cloués au sol. J’éteins finalement le feu, c’est bien la seule chose que je suis capable de faire. « Tu veux bien nous laisser ? » Je tourne la tête pour regarder Elio et me contente de hocher légèrement la tête, comme une enfant qui est à deux doigts de se faire engueuler, et je n’ai le temps que de faire un pas. Même pas d’ailleurs. « Non, non ne part pas. Puisque de toute évidence nous n’avons plus aucun secret pour toi. Si tu veux te taper Elio et ne même pas t’en cacher je crois que t’es autant concernée que moi par cette conversation. » Je fronce les sourcils, mon regard se durcit. Mais pour qui elle se prend celle là ? « On n’a pas couché ensemble Oli. » « Prends moi pas pour une conne, Elle est à moitié nue dans ta cuisine avec ton T-shirt. Tu veux me faire croire que vous avez joué au scrabble ? » De toute évidence, on dirait une vache enragée. Elle fait presque peur à voir. Je serre les mâchoires avec l’envie folle de lui faire fermer sa gueule en étant méchante, mais j’essaie de me contenir. Je ne sais pas pourquoi ni comment, mais j’y arrive. Presque. Jusqu’à ce qu’Elio se tourne vers moi comme pour me demander de l’aide. Cette fois, c’est pire que je que je m’imaginais. Comment ça ? Qu’est-ce qu’il veut que je lui dise ? Mon regard est empli d’incompréhension, j’essaie pourtant de déchiffrer son message, et je finis par soupirer. « Ecoute Olivia. Je sais que les apparences sont trompeuses mais non, on a pas couché ensemble. Et fais moi confiance, si ça avait été le cas, j’aurai été du genre à te le vomir à la gueule. J’ai bien compris que tu m’aimais pas, et tu sais quoi, je peux presque comprendre. Mais si t’as un problème avec moi, c’est à moi que tu dois en parler, pas à Elio. Ce bébé on l’a fait avant que t’arrives dans sa vie. C’était avant ok ? » Je regarde Elio et la gorge légèrement serrée, je continue de parler à Olivia sans quitter le jeune homme des yeux. « Malheureusement pour moi, je crois que tu peux lui faire confiance. » Je tourne alors les yeux en direction de la jeune femme et joue la carte de la sincérité, pour une fois. « J’ai essayé hier soir. Et il m’a envoyée balader. Donc tu vois, tout ce qu’il reste entre nous, c’est ce gosse, rien de plus. Tu peux être tranquille. Maintenant si vous voulez bien, je vais m’habiller et me casser d’ici avant d’exploser pour de bon. J’étouffe ! » Je passe entre eux pour filer dans la chambre et me rhabiller en quatrième vitesse. Au moment de me retourner pour prendre la poudre d’escampette, je fais face à deux têtes rousses. « Tu nous emmènes pas à l’école avec Elio ? » Je secoue la tête « Nan les terreurs. Je dois m’en aller. » « Tu reviendras nous faire des pancakes ? » J’esquisse un sourire un peu triste. « Je pense pas. Olivia m’aime pas, et Elio aime Olivia. Donc… » « Donc quoi ? » Je soupire un peu et hausse les épaules. « C’est des histoires de grands, laissez-tomber. » Je passe entre les deux petites têtes et à peine quelques pas, je fais face à Elio, plongeant mon regard dans le sien avec le coeur battant. « Je vais pas rester ici Elio. C’est trop compliqué. J’ai pas envie de me faire décapiter chaque fois qu’elle mettra les pieds ici. Vous êtes ensemble, l’affaire est réglée. »
Je sais que je l’ai mise dans une situation délicate. Ou peut-être que c’est elle qui nous y amené peu importe à qui la faute au final le fait est que ce moment est désagréable pour tout le monde. L’ambiance qui règne dans la pièce est presque étouffante tant elle est lourde et je ne trouve aucun mot pour l’apaiser. Je ne crois pas qu’il y en ait de toute façon, je voudrais pouvoir rendre tout le monde heureux, trouver un compromis mais il n’y en a aucun et on doit tous s’y faire. A quel moment ma vie est devenue aussi compliquée ? A quel moment j’ai pensé que cette relation avec Olivia allait arranger les choses ? J’avais tout faux aujourd’hui ça semble bien au contraire tout compliquer. « Ecoute Olivia. Je sais que les apparences sont trompeuses mais non, on a pas couché ensemble. Et fais moi confiance, si ça avait été le cas, j’aurai été du genre à te le vomir à la gueule. J’ai bien compris que tu m’aimais pas, et tu sais quoi, je peux presque comprendre. Mais si t’as un problème avec moi, c’est à moi que tu dois en parler, pas à Elio. Ce bébé on l’a fait avant que t’arrives dans sa vie. C’était avant ok ? » Mon cœur se serre légèrement et pourtant mon regard se posant sur Kyrah se fait reconnaissant et Olivia semble enfin se calmer un peu, même si sa bouche reste légèrement ouverte sa lèvre tremblant encore. « Malheureusement pour moi, je crois que tu peux lui faire confiance. » Mon regard flirte légèrement avec le sol quand je pense à ce que j’aurais pu faire hier, à quel point j’en avais envi et j’étais comme incapable de m’arrêter. Je sais que si Dani ne nous avais pas surpris j’aurais cédé sans me poser plus de questions et cette simple pensée me rend coupable. « J’ai essayé hier soir. Et il m’a envoyée balader. Donc tu vois, tout ce qu’il reste entre nous, c’est ce gosse, rien de plus. Tu peux être tranquille. Maintenant si vous voulez bien, je vais m’habiller et me casser d’ici avant d’exploser pour de bon. J’étouffe ! » Je lève le regard juste trop tard pour la voir passer, mon bras se lève comme pour l’interpeller et retombe aussi lourdement sur mon corps. Mes deux mains vont trouver le bord du bar alors que je baisse la tête en tentant d’identifier les sentiments qui ont afflué en moi et me font presque mal. « C’est vrai ? » J’avais presque oublié Olivia qui s’approche un peu plus de moi ces bras encore croisés devant son buste. Mon regard glisse légèrement dans le sien alors que je cherche les bons mots. « C’est… Elle va mettre au monde mon enfant Oli’, alors on sera toujours lié… Si tu veux rester dans ma vie il va falloir t’y faire. » C’est injuste de lui demander ça je sais, surtout quand je ne peux pas lui promettre la fidélité. Elle ferait mieux de partir – je devrais l’y forcer mais je semble me raccrocher à ce semblant de relation comme si c’était ce qui me définissait – ce qui faisait de moi quelqu’un de bien. Comme si j’avais l’espoir que la bonté d’Olivia déteigne sur moi… Mais de toute évidence c’est plutôt l’inverse qui se passe. Je suis entrain de l’abimer, de la rendre amère. « Je ne veux pas partir juste avoir l’impression que tu es de mon côté… » Je plisse légèrement les yeux en la regardant. « Il n’y a pas de côté Olivia, j’essaye juste de faire au mieux… » C’est elle qui se sent coupable cette fois et je m’en veux presque d’être capable de retourner la situation aussi facilement. Elle pose sa main sur mon bras mais je me défais de son étreinte. « Je vais aller la voir avant qu’elle parte, j’ai besoin d’être sur que ça va aller. Désolé… » Evidement elle ne connaît rien des conditions de vie de Kyrah, ni de l’état dans lequel je l’ai retrouvé hier soir devant ma porte, mes ces yeux tristes me regardent sortir de la cuisine sans rien dire. Je me place face à Kyrah juste à temps avant qu’elle ne prenne la fuite. « Je vais pas rester ici Elio. C’est trop compliqué. J’ai pas envie de me faire décapiter chaque fois qu’elle mettra les pieds ici. Vous êtes ensemble, l’affaire est réglée. » Je tente de prendre son bras comme pour instaurer un contact entre nous et l’empêcher de partir comme ça, mais elle fait un mouvement vers l’arrière pour m’en empêcher et je n’insiste pas. « Reste… » C’est tout ce que je trouve à dire, parce que je m’inquiète pour elle, que je voudrais être sur que ça va aller mais je sais déjà qu’elle ne va pas le faire. Sa main est déjà sur la porte et je ne peux pas le retenir elle a fait son choix. « Je t’en prie si tu as le moindre soucis, si tu ne trouve pas d’endroits où dormir vient ici… Olivia doit s’y faire tu fais parti de ma vie maintenant. Notre bébé et toi… » Je voudrais pouvoir lui en dire plus. Lui dire que j’ai envie qu’elle fasse partie de ma vie même si trop souvent ça me fait mal mais je ne dis rien cette fois. Je sais que c’est contre productif que ça ne servirait à rien si ce n’est lui faire du mal alors je la laisse partir… Je la laisse claquer la porte et s’en aller sur un autre de ces conflits qui parsèment notre relation.