L’amener au restaurant à vélo c’était comme un message, je ne suis pas sûr qu’il soit si facilement descriptible mais je voulais lui dire que l’on est encore jeune. Que c’est pas parce que j’aimerai que les choses deviennent sérieuses que je veux qu’on oublie le fun, et qu’on devienne chiant. C’est peut-être, encore plus gamin que ce que nos âges nous permettent mais ça la fait rire et rien que la sensation du vent sur ma peau me procure une certaine extase. Puisqu’il faut faire les choses bien je décide d’y aller à fond, l’espace d’un instant j’ai même hésité à lui amener une fleur mais je crois que ça aurait été trop éloigné de ce que nous sommes et le but n’est pas non plus de la perturber je me suis alors contenté de faire quelque chose qui me ressemblait et de me dénicher un vélo. Puis une fois à table de me présenter. Comme si nous ne nous étions jamais rencontré. Comme j’aurais du le faire il y a bien longtemps le jours ou plutôt que de me présenter je l’ai traité de trainé avant de la foutre dehors de l’appart à ma mère. Ce jour me semble si loin aujourd’hui. Neuf mois d’une relation tumultueuse et incompréhensible qui nous a mené aujourd’hui à notre premier rendez-vous. J’aurais pourtant pensé que ce moment n’arriverait jamais. Mais ni elle ni moi ne semblons vraiment stressés comme si tout ça allait dans l’ordre des choses. « Un artiste alors… c’est intéressant ! » Mon sourire s’illumine à ces propos. « On peut dire ça oui… » Je pense assez peu souvent à moi en ces termes mais ça me plait bien. « Je viendrai te voir avec plaisir.Si je suis invitée… » Il faudra que je le fasse pour de vrai, que je l’invite à venir me voir une de ces jours. Que je fasse de ce bar autre chose qu’un autre de ces lieux ou nous nous sommes fait la guerre. Elle laisse tomber ces bras et je comprends que c’est son tour d’entamer la conversation. « Je m’appelle Tamara, mais depuis pratiquement 10 ans, on m’appelle Kyrah. J’ai eu 28 ans il y a quelques semaines, même si j’ai bien conscience de ne pas avoir la mentalité d’une femme de 28 ans ! » Je rigole légèrement pas capable de ne pas confirmer ces dires. Même si je suis supposé faire comme si on ne se connaissait pas encore dans notre petit jeu de rôle. « Et je suis danseuse. Enfin, j’ai fait une petite pause de quelques mois à cause d’évènements inattendus, mais la danse c’est ma vie, et je peux pas me résoudre à passer ma vie sans danser. » Je vois son petit regard briller quand elle parle de la danse et il me semble apercevoir un réel espoir. Celui que tout n’est pas fini. Les parties encore tendues de mon corps semblent se détendre alors que je l’écoute, la dévorant du regard sans aucune gêne « J’ai entendu dire de source sûre que tu étais une magnifique danseuse. » Evidement la source sûre c’est moi et je ne rêve que de la voir danser à nouveau. Elle ne semble jamais autant apaisée que dans ces moments là – même dans mes bras à mon grand dam. « J’ai perdu mes deux parents et il ne me reste plus que mon frère avec qui je n’ai plus vraiment une relation fraternelle depuis dix ans. » Je hoche la tête cette fois, touché qu’elle m’en parle aussi librement. Je ne compte pas creuser le sujet, je ne crois pas que c’est le moment de toute façon mais le fait qu’elle le dise n’est pas si anodin. Le serveur arrive pour nous apporter les apéritifs et prendre nos commandes. Et repart aussi vite non sans nous jeter un petit regard, comme pour vérifier qu’on est bien sage. Je le trouve sympathique, et étonnement pas trop invasif si on oublie sa gourde du début. « Tu ne m’as pas parlé de ta famille… » « Je voulais garder un peu de mystère. » Je rigole un peu parce qu’on sait elle comme moi qu’elle en connaît plus sur ma famille que la plus part des personnes que je côtoie. « On trinque en premier ? » Je lève mon verre pour aller le faire tinter avec le sien. « Au premier rendez-vous et aux apéritifs gratuits évidement. » Je rigole est porte la boisson à ma bouche, elle est un peu trop sucrée pour moi, mais je me doute que c’est fait pour plaire aux femmes. Même si je ne suis pas sûr que ça soit le genre de Kyrah. « Ma famille est quelque peu compliquée. Je n’ai jamais connu ma mère et c’est ma belle-mère qui m’a élevé. Une femme extraordinaire mais qui n’a jamais trop su comment me gérer. Mon père est un connard fini mais comme on dit on choisit pas sa famille. Il aura au moins fait une chose bien, il m’a donné une super petite sœur, qui elle même a fait deux terreurs rousses, que j’élève aujourd’hui avec ma meilleure amie. » Je la regarde portant à nouveau le verre à ma bouche. « Et ça c’est la version courte. » Je sourire avec un petit air amusé. J’ai volontairement décidé de ne pas glisser le décès de ma sœur la au milieu. Comme je le fais toujours. Certains sujet restent à jamais plus sensibles que d’autres et avec la venue des jumeaux dans ma vie je n’ai jamais vraiment pris le temps de penser à ce que sa mort avait crée en moi. Peut-être que c’est mieux comme ça – que c’est plus simple parfois de simplement aller de l’avant. Et c’est la raison pour laquelle je ne compte pas forcer Kyrah à me parler de sa mère…. C’est à elle de décider si elle en a envie. « A et si tu veux vraiment en savoir plus pour moi j’ai une info à te donner que personne ne connaît. Je vais partout en trottinette ça tout le monde le sait, mais j’ai la même depuis 15ans et… Ce que les gens ne savent pas c’est qu’elle a un petit nom. » Je la regarde un peu amusé. Même Kaecy et le jumeau ne savent pas que je lui ai donné un surnom, ils se foutent déjà assez de moi parce qu’ils trouvent que je le chouchoute bien trop pour une trottinette. Alors que je porte à nouveau mon verre à ma bouche un son attire mon attention, quelques notes de piano qui éveillent ma curiosité. Je me tourne pour voir un homme qui pianote plutôt bien sur l’engin. J’ai aperçu en rentrant un coin dédié à la danse et si j’étais un homme un peu sérieux je serais sans doute resté bien sagement sur ma chaise. Mais ce soir j’ai envie de plus. J’ai envie de la faire danser, je me lève alors pour lui tendre la main. « Tu m’accordes cette danse ? » Elle semble jeter un coup d’œil aux alentours. Evidement personne ne danse « Une autre chose sur moi, c’est que je me moque bien de faire les choses comme les autres. » C’était supposé être notre soirée normalité et ça part déjà en couille mais je m’en fiche. Elle finit par attraper ma main et je l’entrain vers cet espace dégager avant de venir placer mes mains dans le creux de ces reins. La musique est douce et nous dansons à peine mais son corps coller au mien me met dans une situation de légèreté et de bonheur que je ne connais qu’à son contact. Elle pose sa tête sur mon épaule et je me sens apaisé. A ma place.
Si jusqu’à présent j’avais su me mettre à nue physiquement devant lui, il y avait eu seulement quelques bribes, quelques instants aussi courts qu’un soupir où il avait pu voir mon coeur, mon âme, mon vrai moi. Et ce soir, c’est ce qui arrive. Je m’ouvre à lui doucement mais sûrement, posant des mots sur ma situation, ce que je suis. C’est plutôt étrange quand on sait ce qu’il sait, mais ce n’est pas plus mal. C’est comme une sorte de renouveau, quelque chose de fort, de toute évidence. « J’ai entendu dire de source sûre que tu étais une magnifique danseuse. » Je souris, presque un peu gênée, et baisse légèrement les yeux. Si j’avais l’habitude de rougir, je pense que j’aurai été rouge comme une tomate. Je finis par lui parler de la perte de mes parents, de mon frère absent, et j’embraye sur une question à mon tour. « Je voulais garder un peu de mystère. » Je souris à mon tour. « On trinque en premier ? Au premier rendez-vous et aux apéritifs gratuits évidement. » Je lève mon verre en riant légèrement et le fais tinter avec le sien sans jamais le quitter des yeux, puis je porte ledit verre à mes lèvres pour en boire une gorgée. Le cocktail est sucré, ce n’est pas désagréable mais c’est le genre de truc qui monte vite à la tête. « Ma famille est quelque peu compliquée. Je n’ai jamais connu ma mère et c’est ma belle-mère qui m’a élevé. Une femme extraordinaire mais qui n’a jamais trop su comment me gérer. Mon père est un connard fini mais comme on dit on choisit pas sa famille. Il aura au moins fait une chose bien, il m’a donné une super petite sœur, qui elle même a fait deux terreurs rousses, que j’élève aujourd’hui avec ma meilleure amie. » Je ne le lâche toujours pas des yeux, qui ceux-ci deviennent brillants lorsqu’il évoque sa petite soeur sans parler de sa mort. Un jour, on en parlera peut-être, mais je le laisserai venir à moi. Jamais je ne le forcerai à me parler de quelque chose. « Et ça c’est la version courte. » Je lui rends son sourire et hausse un peu les épaules. « De toute manière, toutes les histoires de famille sont compliquées ! » Je bois une nouvelle gorgée de mon cocktail et je n’arrive pas à détourner mes yeux d’Elio. Mon regard passant de ses yeux aux détails de son visage, ses lèvres que je meurs d’envie de m’emparer, le col de sa chemise laissant apparaître ce cou que j’adore dévorer. Il faut que je me calme. « Ah et si tu veux vraiment en savoir plus sur moi j’ai une info à te donner que personne ne connaît. Je vais partout en trottinette ça tout le monde le sait, mais j’ai la même depuis 15ans et… Ce que les gens ne savent pas c’est qu’elle a un petit nom. » J’arque un sourcil, amusé « Ah oui ? Alors je veux savoir ! » Mais il n’a même pas le temps de me répondre que je le vois se redresser, tendre l’oreille. Je penche la tête un peu sur le côté, continuant de le regarder comme pour comprendre ce qui lui arrive. Il se lève finalement et me tends la main comme un gentleman, j’ai l’impression d’être dans un film. « Tu m’accordes cette danse ? » Je tourne la tête comme pour regarder les alentours. Personne ne danse, je n’ai pas spécialement envie de me donner en spectacle. « Une autre chose sur moi, c’est que je me moque bien de faire les choses comme les autres. » Je secoue un peu la tête, amusée, conquise, et je viens mettre ma main dans la sienne, me levant pour le suivre. Nous nous retrouvons près du piano duquel s’en découle une douce mélodie, et mon corps vient retrouver celui d’Elio, comme les deux aimants que nous sommes. Une main dans son dos, l’autre posée sur son torse, je viens poser ma tête contre lui, relevant légèrement la tête pour venir sentir l’odeur de sa peau, son parfum, et je dépose un léger baiser dans son cou avant de reposer ma tête délicatement. Je ferme les yeux et profite simplement de cet instant de partage, de simplicité. Je ne pense à rien, juste à cet instant qu’il m’est donné de partager avec lui. Ma respiration est calme, posée. Ma main initialement posée sur son torse remonte légèrement jusqu’à trouver sa peau, puis glisse dans sa nuque, glissant mes doigts sur la naissance de son cuir chevelu. Je me décale un peu pour le regarder alors que nous continuons de danser. Mes yeux s’arrêtent sur ses lèvres mais je me retiens au maximum de ce que je peux. Je dois trouver une stratégie pour ne pas succomber. Je me racle légèrement la gorge et prends la parole, sur un ton amusé. « Elle a un nom donc… Dis moi… j’ai envie de savoir maintenant ! » J’ai bien peur d’éclater de rire quand je vais savoir, mais c’est lui qui a commencé à m’en parler. Je l’écoute attentivement quand un nouveau serveur vient nous déranger dans ce moment d’intimité. Il se racle la gorge et nous arrêtons de danser pour le regarder. « Mr et Mme Harrington, je suis désolé de vous déranger mais vos plats sont servis. » Je ne peux m’empêcher de sourire largement en regardant Elio, puis de nouveau le serveur. « Merci, on arrive. » Il s’éloigne et je replonge mon regard dans celui du beau brun. « Décidément, c’est déjà la deuxième personne à nous voir mariés, faut qu’on se méfie ! » Je m’approche de lui et déposer un baiser au coin de ses lèvres avant de me défaire de son étreinte, récupérant sa main pour retrouver notre table sur laquelle nous attendent nos plats. « J’ai une question… » J’attends d’accrocher son regard avant de la lui poser. « Pourquoi tu ne fais pas de la musique ton métier ? Je sais que c’est important pour toi la langue des signes et tout ça, mais… enfin vu le talent que tu as, tu pourrais écrire et composer pour les autres, non ? » Je me doute qu’il n’est pas vraiment le genre à vouloir percer dans le milieu de la musique, il n’a pas réellement le profil. Mais écrire pour les autres, vivre de sa passion ? C’est quand même quelque chose de plaisant…
L’intimité de ce moment est inexplicable, là au milieu des gens, de cette musique qui nous englobe nos corps se lient l’un à l’autre. Ils s’écoutent et bougent en même temps, ils partagent la musique, la complicité, les gestes tendres mais maladroits. Son odeur familière me picotant les narines avec délectation. Je voudrais que tout soit toujours aussi simple que ce moment, que cette danse et cette intimité qui est présente mais ne nous gêne pas, ne nous interroge même pas. Ces lèvres dans mon cou m’arrachent un sourire alors que je resserre un peu mon étreinte autour de son corps frêle, pour faire durer cet instant encore un peu. Sa main qui glisse son mon torse remonte dans ma nuque alors que le contact de sa peau m’arrache un frisson de désir, mes yeux dévorant son regard, sa bouche, son cou avec cette envie qui nous est si connue et cette certitude bien encrée qu’il ne faut pas que j’y cède. « Elle a un nom donc… Dis moi… j’ai envie de savoir maintenant ! » Ce changement radical de sa part m’étonne un peu mais je m’en amuse, plutôt heureux qu’elle ait mis fin à l’intensité de ce moment qui faisait naitre tant de désir en moi. « Tu te moques pas ein ? » Son petit sourire taquin m’indique bien que je peux toujours rêver mais je lui dis tout de même. « Elle s’appelle Ginette, Ginette la trottinette. » Voilà qu’elle se fiche de moi mais je peux pas vraiment lui en vouloir, je rigole moi aussi, légèrement honteux d’avoir osé lui dire ça. « Il y a 15ans je trouvais ça trop stylé que ça rime, j’étais jeune… et innocent. » Nous rigolons encore un moment l’un contre l’autre quand un serveur vient nous interrompre. « Mr et Mme Harrington, je suis désolé de vous déranger mais vos plats sont servis. » Je regarde Kyrah avec un air amusé alors qu’elle l’avertie que nous allons venir. « Décidément, c’est déjà la deuxième personne à nous voir mariés, faut qu’on se méfie ! » Pour aller à l’encontre de ces propos elle vient déposer un baiser au coin de mes lèvres, qui me donne déjà envie de plus. Me séparant d’elle j’improvise une petite courbette ridicule. « Si madame Harrington veut bien ? » Je me moque un peu d’elle, de nous, de ce serveur qui a bien de la chance que nous ne soyons pas vraiment à notre premier rendez-vous car c’est le genre de choses qui peut créer un certain malaise. Nous retournons à notre table main dans la main et avec une impression de légèreté pour retrouver nos plats qui ont l’air bien plus appétissants que la bouillie de Kyrah à midi. « Bonne appétit. » Je jette un oeil à Kyrah qui regarde son plat avec envie et ce simple regard mais fait chaud au cœur. Puis je m’intéresse à nouveau au mien attrapant mes couverts pour commencer le festin. « J’ai une question… » Mon regard retrouve le sien avec intensité. « Je t’écoute. » « Pourquoi tu ne fais pas de la musique ton métier ? Je sais que c’est important pour toi la langue des signes et tout ça, mais… enfin vu le talent que tu as, tu pourrais écrire et composer pour les autres, non ? » La question me prend un peu de court et je reste un petit moment sans trop rien dire. Habituellement les gens évitent ce genre de sujet, pour ne pas entendre le couple des artistes malheureux et de la compétition rude, et du talent qu’il faut… Mais Kyrah connaît le monde artistique tout comme moi et il est évident que rien ne la dérange. « J’imagine qu’il y a plus d’une raison… » Je me gratte nerveusement le crâne ne sachant trop par où commencer. « Enfin déjà merci… Ca me touche que tu penses réellement que j’ai du talent… » Je le suis vraiment, je n’ai pas eu la chance d’avoir beaucoup de gens qui croyaient en moi et l’entendre me pousser vers le haut fait un bien fou. « J’imagine que la première des raisons c’est que rien m’a jamais laissé penser que j’avais le talent suffisant pour ça… Enfin faire de la musique et aimer ça c’est un peu différent que d’en faire son métier. Et d’avoir le talent pour. » C’est même très différent et si je ne suis pas encore prêt à le verbaliser de cette façon il est évident que j’ai certaines peurs, certaines craintes. Celles d’être critiqué, celle d’y mettre toute mon énergie et de me vautrer parce qu’alors ça serait un vrai échec, et il faudrait vivre avec ça. Tant que je ne tente pas vraiment je ne risque pas de me rétamer. « Et puis… Je crois qu’il y a quelque que chose de tellement personnelle quand je compose, j’y mets tout mon être. Je suis pas sûr d’être prêt à léguer ça a quelqu’un d’autre… Je sais pas si tu comprends mais… C’est privé. Ca semble pas très logique quand on sait que je peux le partager dans un bar sur une scène avec des gens que je connais même pas mais… C’est mon histoire. Et je suis pas sur de savoir écrire l’histoire d’un autre et encore moi de vouloir donner la mienne. » J’imagine que mine de rien il y a une certaine pudeur là derrière, ou alors un envie un peu égoïste que les choses restent mienne, un besoin de contrôle sur ce que je compose, ce que je suis prêt à livrer. « Puis… Il y a les jumeaux maintenant. Le monde de la musique c’est pas quelque chose de stable, et je peux pas prendre le risque de pas gagner assez pour qu’on continue à vivre au moins décemment. Ca fait très adulte qui se sacrifie dit comme ça mais honnêtement j’aime ce que je fais. La langue des signes ça me passionne depuis que je suis tout petit pour moi, c’est aussi une sorte d’art. J’aime traduire et voir le monde naitre dans les yeux de ceux qui ne le comprendrait pas sans mon intervention, j’aime cette langue du corps… Ce qu’on peut dire avec que les mots ne sauraient expliquer et je me sens utile quand je fais ça. Puis la musique fait toujours partie de ma vie… Si j’en fais mon métier qui me dit que ça deviendra plus un plaisir mais une obligation ? » J’ai enfin fini mon laïus et je relève les yeux vers Kyrah qui m’a écouté avec attention. Un fin sourire fendant mes lèvres. « Je dis pas que j’y ai jamais pensé… bien au contraire. » Puis attrapant mon verre de vin que le serveur nous a servi juste avant de partir je l’emmène à ma bouche. Je ne suis pas un grand fan de vin, j’ai toujours pensé que c’était pour le vieux mais j’imagine qu’il faut que je m’y mette… Je ne suis plus si jeune. « Et toi Kyrah… Qu’est ce que tu as fait pendant toutes ces années ? Pourquoi cette envie de rentrer en école de danse arrive si tardivement. » Ca fait longtemps que je me pose la question, celle de son passé. De la vie qu’elle menait avant que son père ne meurt. Elle m’a avoué qu’elle était trop âgée aujourd’hui pour rentrer dans son école, mais pourquoi ne jamais l’avoir fait avant. La danse semble tenir une place primordiale dans sa vie depuis toujours… Pourquoi ? Comment ? Sa vie m’intrigue tellement.
Toujours tout contre lui, je reste à danser doucement, une danse lente et sensuelle, même si elle ne devrait pas l’être en fonction de ce qu’on a essayé de se promettre un peu plus tôt. Résister à la tentation risque d’être difficile, surtout avec cette proximité, mais je me suis promis de faire l’effort, d’essayer au moins. « Tu te moques pas ein ? » Je me mords la lèvre inférieure dans un sourire et secoue la tête, alors qu’il doit bien être certain que je ne pourrai pas m’en empêcher. « Elle s’appelle Ginette, Ginette la trottinette. » Impossible de ne pas rire à cet aveu, non, vraiment. Impossible. J’essaie de me retenir un maximum, cachant ma bouche avec ma main mais c’est plus que difficile. « Il y a 15ans je trouvais ça trop stylé que ça rime, j’étais jeune… et innocent. » Je secoue la tête, amusée. « Ginette la trottinette… merde… » Je l’imagine 15 ans plus tôt trouver un nom à ce pauvre engin de transport qui aujourd’hui ne ressemble plus à rien. Mais je ne peux pas juger après tout. Finalement, un nouveau serveur nous invite à rejoindre notre table. « Si madame Harrington veut bien ? » Il me fait une sorte de petite courbette amusante et je le suis sans rien dire, d’un simple sourire. Nous retrouvons nos places et les discussions reprennent de bon train. J’ai comme envie d’en savoir un peu plus, de le connaître ne profondeur, profiter de ce moment pour lui poser les questions que je n’ai encore pu poser jusqu’à présent. Celle-ci traite de sa passion pour la musique. Pourquoi ne pas vouloir en faire son métier ? « J’imagine qu’il y a plus d’une raison…Enfin déjà merci… Ca me touche que tu penses réellement que j’ai du talent… » Je lui souris, sûrement avec un peu trop d’amour dans les yeux. C’est vrai, je trouve qu’il a un talent indéniable, et directement en pensant à ça, j’ai dans la tête cette mélodie qu’il a composée en pensant à moi, c’était il y a si longtemps, et les sentiments puissants étaient pourtant déjà là, bien qu’on ne veuille pas mettre de mots dessus. « J’imagine que la première des raisons c’est que rien m’a jamais laissé penser que j’avais le talent suffisant pour ça… Enfin faire de la musique et aimer ça c’est un peu différent que d’en faire son métier. Et d’avoir le talent pour. » Je penche un peu la tête sur le côté. Je suis d’accord avec lui, mais à la différence que je sais que le talent, ce n’est pas ça qui lui manque. Finalement, il continue son argumentaire, et j’ose à peine baisser les yeux sur mon plat pour le déguster tellement je suis absorbée par les paroles d’Elio. Il me captive, et ça a toujours été. Je ne sais pas si c’est qu’il est un grand orateur, ou si c’est simplement mes sentiments pour lui qui obstruent ma vision des choses, mais j’adore l’écouter parler. Et puis, il est tellement beau. « Puis… Il y a les jumeaux maintenant. Le monde de la musique c’est pas quelque chose de stable, et je peux pas prendre le risque de pas gagner assez pour qu’on continue à vivre au moins décemment. Ca fait très adulte qui se sacrifie dit comme ça mais honnêtement j’aime ce que je fais. » Je souris de plus belle, il n’a pas tord, mais en même temps, c’est un réel signe de maturité que de faire passer sa famille et ses responsabilités en première ligne. Il continue en me parlant de la langue des signes et je comprends vite que c’est plus qu’un métier pour lui. C’est sans doute parti de la nécessité de parler avec sa meilleure amie, et c’en est devenu une passion, un art, quelque chose qui le captive. Je trouve ça beau qu’il arrive à vivre de quelque chose qui le passionne. Finalement, c’est sans doute une meilleure idée que la musique, quand on y pense. « Je dis pas que j’y ai jamais pensé… bien au contraire. » Je hoche doucement la tête en continuant de manger doucement. « Je comprends mieux alors. » Son regard croise le mien et je lui offre un sourire sincère. « Tu m’apprendras ? » Il penche un peu la tête sur le côté comme pour essayer de comprendre ma question. « La langue des signes, tu m’apprendras ? Ça m’a toujours fasciné, et puis j’avoue que j’aime bien pouvoir parler avec quelqu’un sans que tout le monde comprenne. Y’a qu’avec mon frère que je pouvais faire ça, en Russe ! » Je ris légèrement, prenant conscience que je viens de me souvenir de quelque chose d’heureux avec Anton, ce qui n’est pas arrivé depuis un moment. Je porte mon verre de vin blanc à mes lèvres pour en boire une gorgée pendant qu’Elio, à son tour, me pose une question plus personnelle. « Et toi Kyrah… Qu’est ce que tu as fait pendant toutes ces années ? Pourquoi cette envie de rentrer en école de danse arrive si tardivement. » Je pensais lui avoir déjà parlé de mon parcours, mais de toute évidence, ce n’est pas le cas. Je repose mon verre et essaye de retracer au mieux mon histoire avec la danse. « J’ai commencé à danser j’avais une dizaine d’années, c’est assez tard quand on voit que toutes les danseuses de ballet on su danser avant même de marcher ! » Je ris légèrement avant de poursuivre. « J’ai de suite été très douée, du moins, c’est ce que disaient mes professeurs. Et j’ai vite voulu en faire mon métier, entrer dans une école de danse, je ne voyais que par ça. Je dansais nuit et jour, en oubliant l’école. Et puis mon père a mis un terme à tout ça, il a arrêté de me payer mes cours et m’a dit de passer mon bac d’abord. Du coup j’ai quand même continué à danser, mais sans cours. Je bossais au black pour me payer des salles de danses pour avoir la place de danser correctement. » Je sens le regard d’Elio assez insistant, même si ce n’est pas voulu, mais ça me fait baisser plusieurs fois les yeux, alors que je continue de lui parler, ma fourchette jouant avec mes pâtes dans mon assiette. « Et puis après mon bac, on est arrivés à Brisbane et j’ai réussi à obtenir ce que je voulais te mon père, et j’ai repris les cours. J’étais pas assez à niveau pour entrer au conservatoire, du coup j’ai attendu quelques années. Et je suis rentrée au conservatoire y’a 5 ans. Faut savoir qu’il faut 5 ans pour terminer l’école et espérer entrer dans des ballets professionnels. Mais comme mon père est mort y’a un peu plus d’un an et que c’est lui qui payait, du coup j’ai du arrêter, alors que je touchais au but. » Une boule se forme dans ma gorge alors que je sens l’amertume de cette fatalité me glacer le sang. Je soupire légèrement. « Et puis du coup maintenant c’est trop tard, j’suis trop vieille ! » Je laisse échapper un rire, comme pour me forcer à me décoincer un peu. « J’ai juste pas envie de finir prof quoi… je rêve de pouvoir interner un ballet, danser devant des gens… » Je hausse un peu les épaules et soupire à nouveau. « Il va falloir que je cherche comment me faire repérer. Passer des castings, ce genre de trucs. Ça va pas être simple mais je suis incapable de faire autre chose que danser. Enfin à part faire chier le monde ! » Je ris à nouveau et recommence à manger un peu, enfin comme un moineau, parce que mon estomac n’a plus l’habitude, alors qu’avant je mangeais comme un ogre. « Ça me fait penser que j’ai jamais dansé pour toi. Enfin, que pour toi, en privé… » J’arque un sourcil, un regard charmeur, et puis je secoue la tête. « Ah non c’est vrai. On a dit pas avant le 10ème rendez-vous ! » Je me mordille la lèvre inférieure en souriant de mon air malicieux.
J’ai l’impression d’avoir parlé pendant des heures quand enfin je mets fin à mon discours. Kyrah me regarde, sans un mot, comme si elle avait bu mes paroles, je ne pensais pas pouvoir autant l’intéresser en lui parlant de moi. « Je comprends mieux alors. » Je lui adresse un petit sourire. J’aime pouvoir lui parler aussi simplement. Sans peser mes mots, sans avoir peur de l’impact qu’ils pourront avoir sur elle. « Tu m’apprendras ? » Je ne comprends pas de suite de quoi elle parle. « La langue des signes, tu m’apprendras ? Ça m’a toujours fasciné, et puis j’avoue que j’aime bien pouvoir parler avec quelqu’un sans que tout le monde comprenne. Y’a qu’avec mon frère que je pouvais faire ça, en Russe ! » Il me semble voir dans son regard quelque chose de plus heureux de plus rieur et cette lueur fait naitre un sourire sur mon visage. « Si ça t’intéresse évidement, tu pourrais m’apprendre le Russe en échange. » J’ai toujours eu de la facilité pour les langues et avec mes nombreux voyages je me suis vite habitué à en parler plus d’une, espagnole, français, italien, portugais, allemand mais le Russe. Pas encore. Je n’ai même jamais visité le pays, trop froid pour mes envies de fêtes nocturnes sur la plage. « J’ai commencé à danser j’avais une dizaine d’années, c’est assez tard quand on voit que toutes les danseuses de ballet on su danser avant même de marcher ! » Je l’écoute parler de son parcours avec attention. « … Mais comme mon père est mort y’a un peu plus d’un an et que c’est lui qui payait, du coup j’ai du arrêter, alors que je touchais au but. » Je sens bien que le sujet est sensible, sa voix se fait moins assurée, son regard flirtant avec son assiette sans oser me regarder. Je crois comprendre que cette peine est plus pour son rêve abandonné que pour son père. Mais j’imagine que les deux sont aujourd’hui indissociables pour Kyrah. « J’ai juste pas envie de finir prof quoi… je rêve de pouvoir interner un ballet, danser devant des gens… » Je comprends son rêve et je voudrais pouvoir l’y aider mais j’imagine qu’elle est la seule à pouvoir s’en donner la chance. « Il va falloir que je cherche comment me faire repérer. Passer des castings, ce genre de trucs. Ça va pas être simple mais je suis incapable de faire autre chose que danser. Enfin à part faire chier le monde ! » Je rigole un peu goutant mon assiette avec plaisir. Je ne regrette pas le choix du restaurant c’est délicieux. « C’est vrai que tu as une sacré capacité pour ça, on devrait se renseigner. Tu pourrais peut-être faire une carrière. » Je la taquine évidement et un sourire de petit imbécile vient prendre place sur mon visage. Je me sens de plus en plus à l’aise pour lui faire ce genre de remarques un peu stupides. Celles que j’aurais fait avant… Si je l’avais rencontré dans n’importe quelle autre circonstance. « Ça me fait penser que j’ai jamais dansé pour toi. Enfin, que pour toi, en privé… » Je fais légèrement bouger mes épaules pour ne pas lui laisser montrer l’envie et le désire que cela fait naitre en moi. Rien que l’idée de son corps, sous mon regard j’en frissonne. Je suis obligé d’arrêter de manger et mon regard se lève vers elle. Incapable de cacher mon envie. « Ah non c’est vrai. On a dit pas avant le 10ème rendez-vous ! » La façon dont elle me regarde me rend fou. Ce petit regard malicieux cette façon dont elle mord sa lèvre sensuellement. « Le 10ème rendez vous ? » J’avale difficilement ma salive, j’ai beau savoir qu’on ne tiendra jamais, rien que d’y penser est une vraie torture. « Comme si tu étais capable de me résister aussi longtemps. » Je lui fais un petit sourire portant mon verre à ma bouche sans quitter ces yeux. « Tout vas bien pour vous deux ? » Je relève le regard vers le premier serveur qui nous regarde, croisant ces mains avec un sourire presque trop grand. « Oui c’est délicieux merci ! Et encore merci pour le cocktail. » Je me suis quand même fait un plaisir de le boire. « Très jolie danse que vous nous avez offert. On a de la peine à croire que c’est votre premier rendez vous. » Je pense qu’il a bien compris que la situation est un peu plus compliquée que ça entre nous. Et le regard qu’il porte sur nous et celui qu’on réserve à l’amour naissant. Je ne sais pas si ça m’effraye ou me touche mais quand il me quitte je suis heureux de me retrouver à nouveau seul avec Kyrah. Le souper continuant sur la même note, une bonne humeur un peu coquine. Je vois bien qu’elle et moi nous nous cherchons en sachant pertinemment qu’on ne compte pas fléchir. Du moins pas ce soir, pas si facilement. Après le dessert je paye l’addition et nous quittons le restaurant. Ma main vient chercher la sienne alors que nous marchons dans la rue déserte. J’ai abandonné le vélo pour marcher en sa compagnie. « J’ai envie d’aller danser… De… De faire la fête. » C’est étrange comme ça me vient d’un coup. Peut-être dans un moment peu opportun. « J’ai l’impression que je m’amuse plus... Enfin plus comme ça… Depuis trop longtemps et que ce soir… C’est une soirée spéciale. » Une soirée juste pur nous deux ou on peut oublier tout le reste. Tout ce qui nous sépare et la complexité de la vie. Je n’ai pas envie que ça finisse aussi vite. « On aurait bien pu se rencontrer dans un bar non ? Ou sur la piste de danse ? » Je ne suis pas sûr qu’elle soit du genre à aller danser dans les soirée, mais je l’ai bien vu se trémousser avec d’autres hommes pour me rendre fou alors pourquoi pas avec moi ce soir. « Eliiioo ? » Je me retourne étonné d’entendre mon nom dans cette rue que je croyais déserte. « Ca fait tellement longtemps. » J’ai à peine le temps de voir la tête de la jeune fille qu’elle me saute au cou en me serrant très fortement me séparant de Kyrah. Puis je reconnais son odeur. « Sady ? Tu… » Je la repousse comme je peux étonné de la voir ici. « Tu est sortie de… » « Oui, oui ! Les psys disaient que c’était pas ma place. Je suis pas folle tu sais. » Je hoche la tête, apeuré tout de même. Pas folle, tout est relatif. « C’est qui cette fille. » Je regarde Kyrah m’excusant déjà du regard. « C’est personne, une amie à… Une connaissance. » Elle regarde Kyrah de haut en bas la reluquant de son air louche et un peu névrotique. Puis elle s’intéresse à nouveau à moi. « T’es pas venu me voir ! T’avais dit que tu viendrais. » J’essaye de prendre un peu de distance. « J’ai pas pu mais… Je dois y aller Sady. Mais je t’appelle d’accord ? » « D’accord. » Elle colle un énorme bisou sur ma joue et me quitte avec un clin d’œil. « J’attends ton appelle. » Je baisse la tête sans rien répondre continuant ma route avec Kyrah à mes côtés. Nous n’échangeons pas un mot, la distance entre nous se faisant plus grande jusqu’à ce que je me retourne pour vérifier que Sady est assez loin. « Je peux pas croire qu’ils l’ont laissé sortir. » Je m’approche alors un peu de Kyrah qui semble réticente. « Kyrah je suis… Je suis désolé. Je voulais pas te blesser mais crois moi c’est mieux qu’elle sache pas qui tu es ! Cette fille est une vraie barge ! Je suis… Enfin j’ai eu une brève histoire avec elle et elle m’a harcelé pendant des mois avant de se faire interner… Je pensais qu’elle ne sortirait jamais. Je me suis trompé… De toute évidence. » Je n’aime pas du tout savoir cette barjo dehors et encore moi qu’elle me croise avec Kyrah. « Je veux toujours aller danser tu sais… » J’essaye de rattraper mon coup. Celui d’avoir prétendu qu’elle n’était personne. Je ne suis pas sûr que je vais y arriver mais je n’ai pas envie qu’on se quitte comme ça. Pas après une si bonne soirée.
« Si ça t’intéresse évidement, tu pourrais m’apprendre le Russe en échange. » Je hoche vivement la tête de manière vraiment intéressée. Malgré mon manque évident d’attachement envers ce pays qui m’a vue naître, j’ai quand même un vrai amour pour la langue, que j’espère ne pas perdre au fil des années. « Avec plaisir ! » Très vite, Elio me pose de nouvelles questions et j’essaie de lui répondre le plus justement possible. Ce n’est pas forcément évident, parce que mon parcours n’a pas été le plus facile du monde. Mais j’ai su me débrouiller et toujours rebondir, alors pourquoi je m’arrêterai maintenant alors que je suis si près du but ? Je sais que ça ne sera pas facile mais je me dois d’essayer jusqu’à épuisement. Je finis par une touche d’humour en disant que je ne suis, de toute manière, douée que pour danser, et faire chier le monde. Je n’invente rien, il le sait mieux que personne. « C’est vrai que tu as une sacré capacité pour ça, on devrait se renseigner. Tu pourrais peut-être faire une carrière. » Je ris légèrement et lui donner un léger coup de pied sous la table, comme ce midi. J’enchaîne finalement sur une réflexion un peu plus salace, ce sourire charmeur coincé sur le coin de mes lèvres. « Le 10ème rendez vous ? » Je penche un peu la tête, amusée, attendant qu’il me dise ce à quoi il pense. « Comme si tu étais capable de me résister aussi longtemps. » Je lève les yeux au ciel en souriant. « Evidemment, tu m’as prise pour qui ? » Mais rapidement le serveur vient pour prendre la température et être sûr que tout va bien. « Très jolie danse que vous nous avez offert. On a de la peine à croire que c’est votre premier rendez vous. » Je tourne les yeux vers Elio et lui sourit de manière complice. Effectivement, il ne faut pas être sorti d’une école d’ingénieur pour comprendre ce qu’il se passe entre nous. J’en suis consciente. Une fois le dessert englouti et le repas terminé, nous quittons le restaurant. Sa main trouve la mienne et je ne rechigne pas à entremêler mes doigts avec les siens. Je ne sais toujours pas où nous allons, mais tant que je suis avec lui, je ne préfère pas y réfléchir. « J’ai envie d’aller danser… De… De faire la fête. » Je tourne la tête pour le regarder, plus ou moins surprise de cette envie. « J’ai l’impression que je m’amuse plus... Enfin plus comme ça… Depuis trop longtemps et que ce soir… C’est une soirée spéciale. » Je lui souris légèrement et le laisse continuer de me dire ce dont il a envie. « On aurait bien pu se rencontrer dans un bar non ? Ou sur la piste de danse ? » Je hoche un peu la tête. « C’est vrai, on aurait pu ! Alors allons-y ! Je sens bien que de t’avoir parlé de danse ça te donne envie de me voir danser ! » Je le taquine un peu, je sais qu’au fond il y a un peu de ça, mais il y a surtout l’envie de partager cette fin de soirée ensemble. Mais soudain, une tornade blonde saute sur Elio, séparant nos corps, nos mains, et notre proximité. Je regarde cette scène surréaliste se passer devant mes yeux, et mon coeur se serre légèrement lorsqu’elle pose son regard sur moi, assassin. Je fronce un peu les sourcils. « C’est qui cette fille ? » Je croise les bras alors qu’elle me reluque de haut en bas. « C’est personne, une amie à… Une connaissance. » Cette fois, c’est comme un pieu planté en plein dans mon coeur. Je manque de souffle, je perds tout. Mes bras se décroisent et je n’entends même plus la fin de ce qu’ils se racontent. Je me repasse en boucle ses mots. Un en particulier. Personne. Je suis personne. Les larmes me montent directement au yeux et j’essaie un maximum de me contenir. Elio reprend notre route et je mets une seconde ou deux avant de prendre conscience de ce qu’il se passe. Mes pas rejoignent les siens sans un mot et je croise mes bras à nouveau. Un vent de froideur vient de s’abattre sur moi. Mes yeux rivés sur le sol, je ne dis rien, je rumine simplement. Je ne sais même pas pourquoi je continue de le suivre. « Je peux pas croire qu’ils l’ont laissé sortir. » Je reste silencieuse et Elio semble vouloir se rapprocher de moi mais c’est à moi de m’éloigner un peu. « Kyrah je suis… Je suis désolé. » Je m’arrête et plante mon regard dans le sien, un mélange de déception et de peine. « Je voulais pas te blesser mais crois moi c’est mieux qu’elle sache pas qui tu es ! Cette fille est une vraie barge ! Je suis… Enfin j’ai eu une brève histoire avec elle et elle m’a harcelé pendant des mois avant de se faire interner… Je pensais qu’elle ne sortirait jamais. Je me suis trompé… De toute évidence. » Je secoue la tête. « Pourquoi tu te justifies ? J’ai l’impression qu’à chaque fois qu’on rencontre quelqu’un que tu connais, tu fais tout pour éviter qu’ils sachent qui je suis… » Je n’ai pas vraiment assimilé ses mots, trop blessée pour en comprendre le sens. Je n’ai sûrement entendu que des bribes. « Rien. De toute évidence. Enfin non…’Personne’ ! » Je mime les guillemets de mes doigts alors que mon regard plus froid est plongé dans le sien. « Te fatigues pas. J’ai bien compris. Je suis une connaissance. » Je soupire un peu et me racle la gorge pour me remettre de mes émotions. « Je veux toujours aller danser tu sais… » Un silence s’installe, je ne sais pas si j’ai encore envie d’aller danser après ça. Je me rends compte qu’Elio est un aimant à filles cinglées, et j’en fais sûrement partie. Je ne suis pas originale sur ce coup là. « Ouais, allons-y, je crois que j’ai besoin d’une vodka. » Je recroise mes bras pour garder cette distance entre nous, pour ne pas qu’il essaye de se rapprocher trop, de reprendre ma main. Je veux simplement lui faire comprendre à quel point il m’a blessée. J’aurai préféré qu’il esquive la question, j’aurai même préféré qu’il utilise le mot amie. Mais ‘personne’, ça fait trop mal. Le reste du trajet reste silencieux et nous arrivons dans un night club, il est pas loin de minuit. Le temps passe à une vitesse folle. Elio nous commande de quoi boire, dont ma vodka que je n’ai même pas eu besoin de lui demander à nouveau. Et cette fois, c’est à mon tour d’avoir le droit à une connaissance qui débarque. C’est la soirée il faut croire. « Hey jolie Kyrah ! » Brett vient passer une main dans mon dos et plaque un baiser sur ma joue, alors que je lui offre un mince sourire. « Ça fait plaisir de te voir ici, ça fait un bail, tu viens danser ? » Mon regard bifurque sur Elio qui lui-même me regarde, me demandant juste de ses yeux de ne pas accepter. Je peux lire en lui comme dans un livre ouvert. Je pourrai bien dire oui à Brett, lui dire qu’Elio n’est personne. Mais je n’en ai pas envie. Alors je tourne le regard vers le jeune blondinet et lui offre un mince sourire. « Pas ce soir Brett, je suis accompagnée ! Une autre fois peut-être ! » Nos commandes arrivent et je récupère mon verre pour en boire une grosse gorgée sans avoir pris le temps de trinquer avec lui. « Alors, tu veux toujours danser avec ‘personne’ ? » Rancunière moi ? Jamais de la vie…
Je ne peux pas croire que cette fille va venir gâcher notre soirée. Moi qui étais entrain de me dire qu’on allait y arriver, passer une soirée juste nous, sans que le monde extérieur ne vienne tout entraver. Il faut croire que c’est impossible. Je fais un pas vers Kyrah mais tout son être me fait comprendre qu’elle ne veut pas que j’approche et je l’écoute en baissant la tête. « Pourquoi tu te justifies ? J’ai l’impression qu’à chaque fois qu’on rencontre quelqu’un que tu connais, tu fais tout pour éviter qu’ils sachent qui je suis… » Je tente à nouveau de faire un pas vers elle. « Non, c’est pas ça… » Je sens bien que pour le moment mes mots ne servent à rien, qu’elle est trop blessée pour les entendre. « Rien. De toute évidence. Enfin non…’Personne’ ! » « Kyrah… » « Te fatigues pas. J’ai bien compris. Je suis une connaissance. » Je baisser la tête, je me sens vraiment idiot. Je n’ai pas réfléchi sur le moment, juste à l’idée qu’il valait mieux que je ne la présente pas. Mais il est évident que mon attitude est blessante. J’ai juste envie qu’on ne se quitte pas le dessus et sans être sûr que ça marche je me contente de lui dire que j’ai encore envie d’aller danse, encore envie qu’on passe du temps ensemble. « Ouais, allons-y, je crois que j’ai besoin d’une vodka. » Je ne rajoute rien et c’est dans le silence que nous continuons notre chemin. Arrivés, je vais nous commander à boire, je la suis avec la vodka, ce n’est pas l’alcool que je supporte le mieux mais je crois que ça n’est pas plus mal vu l’ambiance. Je me retourne vers elle et il faut à peine quelques secondes pour qu’un jeune homme vienne briser le silence entre nous. « Hey jolie Kyrah ! » Il plante un baiser sur sa joue et je ne peux m’empêcher de me pincer jalousement les lèvres. « Ça fait plaisir de te voir ici, ça fait un bail, tu viens danser ? » Elle se retourne vers moi et je me contente de la regarder. J’espère qu’elle va dire non – qu’elle ne va pas rentrer dans un petit jeu malsain juste pour me blesser à mon tour. « Pas ce soir Brett, je suis accompagnée ! Une autre fois peut-être ! » Un léger sourire soulagé se dessine sur mon visage alors que je fais un signe de tête à son ami qui s’en va sans demander plus d’informations. Je ne peux m’empêcher de me demander qui il pense que je suis, si il pense que je suis un des ces hommes qui payent pour la compagnie de Kyrah. Mais bien vite je chasse cette idée de ma tête. Je m’en fous au final, ce n’est pas la question. « Alors, tu veux toujours danser avec ‘personne’ ? » Je fronce un peu les sourcils avant de me pencher vers elle et j’attends que son regard trouve le mien pour prendre la parole. « Kyrah… Je suis sincèrement désolé ! » Je ne sais pas comment le dire autrement. Je laisse mes doigts glisser sur mon verre un peu maladroitement. « J’ai été maladroit. Tu n’es pas personne, au contraire. Et sache que je n’ai pas voulu te cacher parce que j’avais honte, ou je ne sais pas ce que tu peux penser dans ton petit cerveau tordu. » Mon doigt va se poser sur sa tempe pour tapoter cette dernière. Puis je coupe le contact entre nous, attrapant mon verre pour boire une grande gorgée de ma vodka avant de reprendre la parole, sans pouvoir retenir une légère grimace. « J’aurais peut-être pas du dire ça mais… Sérieusement cette fille est folle, elle a même menacé Kaecy alors que je l’ai toujours présenté comme mon amie. Je pensais pas mal faire et… » Je laisse un léger moment de silence avant de reprendre, bien conscient que je n’ai pas envie de lui dire ce que je vais tout de même dire. « J’ai pas toujours choisi les bonnes relations, avant toi. » Et si j’écoute Kaecy elle me dirait que Kyrah ne fait pas vraiment exception mais je ne suis pas d’accord. « J’ai connu des filles qui sont… Enfin elles se sont avérées le plus souvent pas être très nettes… J’en venais presque à me demander si c’était pas moi qui les rendait folle… Enfin tout ça c’est un passé qui fait parti de moi. Et ces filles existent même si je préférais que ça soit pas le cas. Dire que t’es personne c’était blessant pour toi et je le pensais pas une seconde mais je continue de penser que c’était le mieux à faire. » C’est pas exactement des excuses comme elle les aimerait j’imagine. Mais je n’ai pas envie de lui mentir, parce que si c’était à refaire je ne suis pas sûr que je prendrais le risque de le faire autrement. « Donc pour te répondre oui je veux toujours danser avec toi Kyrah. » J’accentue mon propos sur son prénom avant de continuer. « Parce que je te trouve magnifique ce soir, et que je me pense très chanceux d’être avec toi et que tu ai refusé de danser avec ton ami pour rester avec moi… » Je lui fais un mince sourire pour essayer de me faire pardonner. « Mais j’ai envie que tu le veuilles toi aussi. Sinon ça n’aurait pas de sens. » Et de toute évidence avec sa petite pique de tout à l’heure elle était loin d’avoir envie de danser avec moi, plutôt de boire son verre et de me tourner le dos pour bien me faire comprendre que j’ai merdé.
Je le regarde froncer les sourcils. Oui, j’attends une explication, et des excuses aussi. Je ne vais pas laisser tomber. Si il y a quelques mois, ou même quelques semaines, j’aurai fui sous la colère, la rage, la déception. Mais je suis là, toujours en face de lui. J’aurai aussi pu aller danser avec Brett pour faire chier Elio. Mais non. A croire que j’ai grandi. « Kyrah… Je suis sincèrement désolé ! » Mon regard se fond dans le sien et j’attends la suite, ne disant rien pour le moment. Il n’y a que mon regard qui parle. Il est insistant, il le défie de faire les choses bien, d’être sincère. « J’ai été maladroit. Tu n’es pas personne, au contraire. Et sache que je n’ai pas voulu te cacher parce que j’avais honte, ou je ne sais pas ce que tu peux penser dans ton petit cerveau tordu. » Il vient tapoter ma tempe et je baisse un peu les yeux. Il faut dire que vu la faible estime que j’ai de moi-même, je n’aurai pas vraiment pu réagir autrement. Il n’a fait que confirmer ce que je pensais déjà. Le fait de n’être rien, personne. Mon regard se redresse au moment où il avale une grosse gorgée de sa vodka avant de grimacer, reprenant finalement la parole. « J’aurais peut-être pas du dire ça mais… Sérieusement cette fille est folle, elle a même menacé Kaecy alors que je l’ai toujours présenté comme mon amie. Je pensais pas mal faire et…J’ai pas toujours choisi les bonnes relations, avant toi. » Je n’ai pas envie de l’interrompre, de toute manière, je ne vois pas trop ce que je pourrai dire. Alors je l’écoute, mon regard oscillant entre mon verre et le regard du jeune homme. Il m’explique finalement qu’il a connu des filles vraiment cinglées. Le fait qu’il se demande si ce n’est pas lui qui les a rendues folles me conforte dans l’idée que ce n’est pas un connard fini, qu’il sait aussi se remettre en question. Mais clairement, si il peut rendre folles les femmes, ce n’est pas dans ce sens. Enfin, il ne les enverrai pas en hôpital psychiatrique. « Dire que t’es personne c’était blessant pour toi et je le pensais pas une seconde mais je continue de penser que c’était le mieux à faire. » Je le préfère sincère plutôt que me passant de la pommade pour se faire pardonner alors qu’il ne pense que la moitié de ce qu’il raconte. « Ok… » Je ne sais pas quoi dire d’autre, je suis encore un peu froide, c’est vrai, mais je ne me vois pas non plus lui sauter au cou et l’embrasser pour lui dire que c’est bon, que c’est fini, que je lui pardonne et qu’on n’en parle plus. Je ne suis pas comme ça, et il le sais pertinemment. « Donc pour te répondre oui je veux toujours danser avec toi Kyrah. » Mon regard se plante dans le sien, avec une lueur qui semble être retrouvée. « Parce que je te trouve magnifique ce soir, et que je me pense très chanceux d’être avec toi et que tu ai refusé de danser avec ton ami pour rester avec moi… » J’esquisse un fin sourire. Je ne me voyais pas faire autrement de toute manière. Je crois que je suis épuisée de jouer à le rendre fou. Je n’ai pas besoin de le rendre jaloux pour savoir qu’il tient à moi, même si c’est difficile encore à avouer. « Mais j’ai envie que tu le veuilles toi aussi. Sinon ça n’aurait pas de sens. » Je pose mon regard dans mon verre, laisse passer une seconde, puis j’avale le contenu de celui-ci d’une traite avant de regarder Elio à nouveau. « T’as de la chance que j’ai pas envie qu’on finisse cette soirée comme toutes les autres ! » Je penche la tête un peu sur le côté avec un mince sourire, puis je viens chercher sa main et l’attire à moi alors que je me dirige vers la piste de danse. Il y a du monde, mais pas au point qu’on se marche tous dessus, on a un peu de quoi respirer, et c’est tant mieux. Une fois sur la piste, je me retourne et attrape la chemise d’Elio pour l’attirer à moi. Nos corps se retrouvent et ma main glisse déjà jusqu’à sa nuque alors que mon regard est planté dans le sien, et qu’un sourire naît sur mes lèvres. Plus sincère celui-là, plus joueur et aguicheur aussi. Les mains d’Elio trouvent leur place rapidement sur mes courbes alors que mon corps commence déjà à onduler contre lui. J’ai l’impression que tout disparait de seconde en seconde, il n’y a plus que nous et la musique. Nous entrons dans un duel de regards hautement sensuel alors que nos corps s’adonnent à une danse naturelle, non réfléchie, et elle aussi très sensuelle. Je pense qu’aux cinquante mètres carrés environnants, tout le monde pourrait comprendre ce qui nous lie, ce qui nous anime, au delà de l’envie qui se fait sentir, il y a cette puissance dans notre échange de regard. Cette puissance qui ne trompe pas. Je continue de danser avec lui, contre lui, de manière plus ou moins suggestive, juste pour le rendre fou, parce que je sais que j’ai ce pouvoir. Mais nous arrêter après ça risque d’être fortement compliqué. Et alors que mes doigts courent sur sa peau, jusque dans sa nuque, je viens approcher mon visage de son oreille pour lui dire quelques mots. « Tu sais que tu vas devoir me ramener ce soir sans rien espérer de plus…? » C’était le deal. Et puis de toute manière, on n’a pas tellement le choix, chez lui il y a Kaecy et les jumeaux, et je n’ai plus, ou pas encore de chez moi. Je ne vais pas me permettre de le ramener chez Charly pour faire des bêtises. Il faudra résister à la tentation.
Je commence à comprendre qu’avec Kyrah il vaut mieux jouer la carte de la sincérité. Elle n’est pas le genre de fille qui veut qu’on lui dise les choses pour lui faire plaisir. Elle veut la vérité et je pense être capable de la lui donner, je penser là lui devoir, encore plus quand je lui demande en retour une certaine transparence et un confiance. J’attends tout de même sa réaction avec une pointe d’inquiétude. Je ne suis pas sûr d’avoir prononcer les bons mots. Ceux qui pourraient nous laisser passer une bonne fin de soirée mais le sourire qu’elle m’adresse me rassure déjà un peu. « T’as de la chance que j’ai pas envie qu’on finisse cette soirée comme toutes les autres ! » Je ne peux que hocher la tête en sachant très bien de quoi elle veut parler. Et être d’accord avec elle. Et c’est elle qui vient chercher ma main pour me tirer sur la piste de danse, collant son corps contre le mien pour me donner le rythme. Nos regards se trouvant dans une intensité qui nous est connue, dévorante et agréable. Mes mains se posant sur son corps je sens le désir monter en moi, celui qu’elle sait si bien me provoquer. Ces gestes sont là pour ça je le sais, elle joue avec moi et je fais de même. La température monte d’un cran et j’oublie le reste du monde, j’oublie presque la musique car c’est son corps qui me guide. Ca devrait sans doute être l’inverse, l’homme qui guide, mais entre nous rien n’a jamais été très conventionnel et je suis bien placé pour savoir qu’elle sait mener le jeu quand elle le veut. Sa main glisse dans ma nuque alors qu’elle se rapproche de mon oreille pour y glisser quelques mots. « Tu sais que tu vas devoir me ramener ce soir sans rien espérer de plus…? » Je profite de cette nouvelle proximité pour la serrer un peu plus fort contre moi et sentir son corps épouser totalement le mien. « Je le sais… » Je me sépare un peu d’elle pour plonger mon regard dans le sien avec passion. « Et c’est un vrai supplice. » Ce n’est pas si loin de la vérité mais ça ne m’empêchera pas de tenir mon engagement. Pour ce soir elle sera la fille du premier rendez vous, la fille que j’aurais du respecter depuis le début comme je m’apprête à le faire ce soir. On ne peut sans doute pas réécrire l’histoire mais j’aime l’idée qu’on l’arrange à notre sauce. Pour dissiper légèrement mes envies j’attrape sa main pour la faire tourner et son rire vient tinter à mes oreilles. Pur et précieux je le garde dans un coin de mon esprit en souvenir de cette soirée. Puis nous continuons à danser, à rire,… Deux jeunes qui profitent de la vie, deux jeunent qui ont leur premier rendez-vous et flirtent, apprenant à se connaître. La tête finissant par nous tourner nous quittons le club avec un sourire collé aux lèvres. Je n’ai aucune idée de l’heure et je m’en fiche. Je vais m’asseoir sur un muret dans la fraicheur de la soirée et Kyrah vient me rejoindre. Je suis à bout de souffle en sueur mais heureux… Je me sens bien. Elle pose sa tête sur mon épaule et mon regard se lève légèrement vers les étoiles. « Je suis bien là… » Avec elle, ce soir, maintenant…
Je finis par la raccompagner chez son amie. Plus rien ne vient entraver cette soirée. Devant la maison j’hésite un instant. La tentation est grande, celle de lui voler un baiser, de passer outre une part des limites que j’ai moi-même voulu nous fixer. Mais je ne le fais pas. Je dépose un baiser tendre sur sa joue, peut-être un peu trop proche de ces lèvres mais je n’ai rien cité à ce propos dans notre pacte. « J’ai passé une excellente soirée Kyrah… » Mon regard glisse sur elle avec tendresse, avec amour. « C’est le moment où je te dis que je te rappelle j’imagine ? » Si on suit les bons procédés des premiers rendez-vous. Même si je nous sais au dessus de ça. « Bonne nuit. » Je la quitte devant la porte qu’elle ouvre déjà et arrivé au bout de l’allée je me retourne pour une dernier regard, plus long et intense que prévenu, avant qu’elle ne referme la porte. Pour ce soir je vais abandonner le vélo là où il est. Rentrer à pied me fera du bien. Après cette soirée je crois que j’ai besoin d’aérer un peu mon cerveau… Et aussi envie de la faire durer encore un peu. Même si Kyrah n’est plus là.