Il fallait s’attendre à ce que la semaine passe vite. Comme toujours. Il faut dire qu’à partir du moment où nos proches ont été informés de la naissance de Daniel, le temps s’est accéléré. Les visites se sont enchaînées, et je rentrais tous les soirs à la maison avec un bon paquet de cadeaux dans les bras à déposer dans la chambre du petit. J’ai eu de nombreuses heures pour terminer celle-ci. Bien sûr, je trouverai toujours quelque chose à redire, cela ne sera jamais parfait. Mais il faut bien cesser de retoucher tous les jours. Après tout, une fois jeté hors de la chambre de ma fiancée par le personnel une fois les heures de visites terminées, je n’avais pas beaucoup mieux à faire. Je ne voulais pas peindre autre chose. Mon esprit était trop obnubilé par l’arrivée à venir de notre fils à la maison. Impossible de contenir cette excitation, ni la panique allant de pair et qui me tenait éveillé la nuit. Ma semaine de congé supposée de reposer n’a pas vraiment eu l’effet escompté, et moi qui n’ai jamais de problèmes pour m’endormir, j’étais sujet à de longues insomnies. Il est assez étrange de ne plus sentir la présence de l’être aimé auprès de soi la nuit lorsque l’on y est habitué. Joanne me manquait. Alors que dormir ensemble était presque devenu insupportable ces dernières semaines, cette fois, elle me manquait énormément. La nuit dernière était la pire de toutes bien sûr. La veille du grand jour. Je fais un dernier tour dans la petite pièce aménagée avec tant d’attention, les doigts frôlant le bois du berceau qui accueillera bientôt son petit propriétaire. J’ai déposé dedans la petite peluche que je lui ai enfin trouvée. Un lapin blanc, très simple, terriblement doux. Je sais déjà qu’il ne manque rien dans la chambre, mais je ne peux pas m’empêcher de vérifier. Un coup d’œil à ma montre, et je constate qu’il est quasiment l’heure d’y aller. Je file au rez-de-chaussée, attrape ma veste à la volée en bas des escaliers. Il commence à faire plus frais à l’extérieur depuis quelques jours. Les chiens sont calmes, profitant des nouveaux tapis au sol et mordillant leurs jouets. Dans l’attente, eux aussi. L’air est encore bien embaumé par une odeur de textiles neufs et de peinture appliquée il y a quelques jours, toute juste sèche. Les anciens meubles, pour ceux qui ont survécu au grand ménage, ont repris leur place, complétés par les récents achats, comme l’imposante table en bois de la salle à manger et son luminaire rustiques, le nouveau grand canapé aux coussins colorés près de la baie vitrée, la bibliothèque pleine à craquer et les étagères sur lesquelles les photos qui manquaient cruellement ont pris place. Je ne pensais pas que l’intérieur puisse être aussi méconnaissable. L’endroit est devenu un véritable cocon dans lequel on ne peut souhaiter que rester et se prélasser toute la journée. Le petit espace imaginé par Joanne aura toute son utilité. Nous pourrons nous lover là lorsque le petit sera tranquille. Tout est chaleureux, pétillant et cosy à la fois. J’admets préférer cette nouvelle allure à l’ancienne, plus stoïque, sans la moindre hésitation. J’aime ce vent de renouveau. Cette impression d’avoir un vrai chez nous. Je jette un dernier coup d’œil derrière moi, replace machinalement les clés ornées d’un nœud sur la tablette de l’entrée. Oui, c’est parfait. La surprise sera complète. Alors je ferme la porte derrière moi, prends la voiture, et file à l’hôpital chercher Joanne et notre bout de chou. Il ouvre grand les yeux désormais, de grands yeux bleus d’une rare intensité. Mais presque tous les bébés ont les yeux bleus à la naissance, nous a assuré la sage-femme. Nous n’en connaitrons la véritable couleur que dans quelques temps. Arrivés devant la porte d’entrée, je laisse ma fiancée porter notre fils pendant que je tire ses affaires du coffre. Faisant quelques pas dans le salon, elle découvre ce nouveau chez nous en même temps que lui. Les bras enfin libérés, je m’approche d’eux et embrasse tendrement Joanne. Puis Daniel, sur le front. « Bienvenue à la maison, bonhomme. »
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Les visites étaient loin d'être quelque chose de reposant. On pouvait penser que ça arrangeait la maman que le bébé passe dans tous les bras possibles et imaginables, mais le fait de répéter à chaque le même discours était assez épuisant. Les parents de Joanne était parmi les premiers à venir, les bras armés déjà de nombreux cadeaux. Surtout des vêtements, des choses qui allaient vers le pratique. Sa mère avait tricoté une petite couverture avec du vert, du gris clair et du brun, pour le mettre encore par dessus la turbulette si certaines nuits allaient se faire fraîche. Elle en avait les larmes aux yeux, de voir son premier petit-fils dans les bras. Puis il y avait des personnes qu'elle connaissait beaucoup moins, mais qui faisait partie l'entourage de Jamie. La jeune femme ne disait que l'essentiel, ne voyant pas un réel intérêt à rentrer dans les détails des problèmes qu'elle avait pu avoir, de ses premières impressions. Après tout, ils étaient surtout venus parce qu'ils connaissaient le père, non ? Heureusement, il y avait les soignants qui devinaient facilement lorsque la mère avait besoin de calme et de repos. Ce n'était pas quelque chose d'évident pour toutes les visites, mais les sage-femmes étaient particulièrement douées pour faire passer le message. Joanne ne leur sera jamais assez reconnaissante. C'était un véritable bonheur de voir qu'il n'était enfin plus que trois dans la même pièce. Son fiancé arrivait dès le premier horaire de visite toléré et en profitait jusqu'à la dernière seconde, suivant l'expression là à la lettre. Et les jours défilaient ainsi, sans qu'elle ne s'en rende véritablement compte. Comme tous les nouveaux nés, Daniel avait son petit lot d'examens pour s'assurer que tout allait. Un test auditif, le passage de l'ostéopathe, du pédiatre. Et à chaque fois, c'était un soulagement d'entendre qu'il était le plus normal des bébés, et qu'il était en excellente santé. Ces mots là avaient tellement de valeur pour elle. Jusqu'au grand jour, le jour du départ. Joanne était tout de même assez nerveuse, mais n'aurait su dire pourquoi. Il y avait très certainement un mélange d'un peu de tout. Joanne avait eu le temps de rassembler toutes les affaires et de donner une grosse boîte de chocolats aux soignants en guise de remerciements, elle avait demandé à Jamie de lui en acheter une la veille. En l'attendant, la jeune femme tenait son enfant dans les bras. Celui-ci était chaudement habillé et emmitouflé dans ses vêtements flambant neufs. Il dormait à point fermé. Joanne le berçait doucement et chantonnait bouche fermée jusqu'à ce que son fils arrive, pile à l'heure. Il l'aida à transporter toutes les affaires afin de les mettre dans le coffre de sa voiture. Pendant ce temps, elle installa Dan son son siège auto adapté. En quelques minutes, ils étaient à la maison. Découvrir leur nouveau séjour avait été bien plus qu'un émerveillement, pour la jeune femme, qui restait longuement bouchée. Jamie s'approcha d'elle afin de l'embrasser avec amour, ainsi que son fils, juste après qu'il se soit débarrassé des affaires qu'il porte. Elle avançait de quelques pas, pour découvrir un peu plus leur nouveau chez-soi. C'était encore plus beau qu'elle n'aurait pu se l'imaginer. Elle se sentait chez elle. Ses iris bleus observaient, il ne manquait absolument rien. Elle était totalement sous le charme de leur petit salon, qui faisait office de petit cocon dans un grand. Jamie avait pensé à absolument tout, l'ambiance était des plus chaleureuses. "C'est chez nous." dit-elle tout bas, en continuant de tour regarder. Là, oui, Joanne allait sentir chez elle, et plus comme une étranger, une invitée au long terme. Les chiens ne tardèrent pas à deviner qu'il y avait quelque chose de nouveau dans l'air et s'approchèrent curieusement de Joanne. Celle-ci demanda à Ben et Milo de se calmer. C'était surtout le plus petit qui était particulièrement surexcité. Le golden retriever avait un air tout pataud, bien que très curieux. Une fois que Milo sautillait moins, Joanne s'accroupir avec précaution. "Voici Daniel." leur dit-elle tout bas, bien qu'ils ne comprenaient certainement pas un mot de ce qu'elle racontait. "Il faut être très sage avec lui, d'accord ?" Ben regarda le tout petit avec perplexité, pointant ses oreilles et penchant légèrement sa tête sur le côté. Il s'assied, et continuait d'observer cette étrange petite chose. Parfois il approchait un peu sa truffe pour renifler ses habits, et il restait inhabituellement délicat. Milo, quant à lui, était bien plus excité, si bien que Joanne dut se redresser afin d'éviter qu'il ne blesse ou fasse peur au bébé. Elle sourit ensuite tendrement à son fiancé. "Tout ceci est magnifique, Jamie, je..." Elle en perdait même ses mots. "Merci pour tout. Merci pour absolument tout."
Les présentations entre Daniel, Ben et Milo sont des plus attendrissantes. Le plus grand cherche encore à comprendre quel est cette sorte d'humain miniature qui sent le talc, il semble particulièrement intrigué face à ce nouveau petit maître. Le plus petit, lui, n'y voit qu'un compagnon de jeu avec lequel il a déjà hâte de faire des bêtises. Il est si jeune et si excité qu'il ne comprend pas que ce petit être est encore bien fragile. Mains dans les poches, j'observe la scène avec un sourire amusé. Il y a tant de nouveautés pour eux aussi, mais ils se sont déjà bien habitués au réagencement du rez-de-chaussée et ont pris pleinement possession des lieux. Joanne exprime également son enthousiasme face à cette pièce qui n'a plus rien à voir avec ce qu'elle était à son départ. Elle perd un peu ses mots, ce qui fait rosir légèrement mes joues, flatté. « Content que ça te plaise. J'avais parfois peur de m'éloigner de ce que tu imaginais et que tu ne te sentes toujours pas chez toi. Je suis resté fidèle à ce que nous avions dit autant que possible. » Le dessin s'est apposé à la réalité à l'aide des achats que nous avons effectués ensemble, et d'un peu d'huile de coude. Le résultat en valait vraiment la peine. On devine facilement que la tension qui résultat du malaise de Joanne, de son impression de ne pas être chez elle, a quitté ses épaules. « Viens à l'étage, faisons-lui découvrir sa chambre. » dis-je en me dirigeant vers l'escalier. La rambarde est neuve, il n'y en avait pas avant. La chambre d'amis est réaménagée également, mais nous passons devant sans trop y faire attention, allant directement à la pièce qui nous intéresse. « Je t'ai trouvé la pièce manquante. » J'indique à la jeune femme la chaise à bascule dont elle avait tant envie. Je n'ai malheureusement pas eu le temps d'en retaper une comme je le souhaitais, mais celle-ci devrait faire l'affaire. Elle a une allure assez vintage et il me semblait que cela pourrait plaire à la jeune maman. Celle-ci ne tarde pas à s'installer dedans. La moquette au sol empêche le bois de la chaise d'effectuer de gros craquements. Daniel reste imperturbable et n'ouvre les yeux que de temps en temps avant de mieux somnoler. Je m'accroupis à côté d'eux. Une main posée sur la tête du bébé, je caresse son front avec mon pouce. Il est tellement beau. Tellement calme et doux. « Ca me retire toute envie de retourner au travail. » je murmure à voix basse. Je pourrais rester là à l'admirer pendant des heures, des jours entiers. Là, sans bouger, caressant tendrement sa tête de temps en temps, ou le laissant serrer mes gros doigts de toutes ses petites forces. « Qu'est-ce qui te ferait plaisir de faire cet après-midi ? » je demande, gardant toujours une voix basse pour ne pas perturber le calme de notre petit bout. Je continue de tendrement caresser ses longs cheveux bruns et si fins, mais mon regard s'est posé sur la mère dont le visage témoigne encore d'une grande fatigue. Son corps prendra son temps pour se remettre de tout ceci, et en attendant, comme je le lui ait dit à la maternité, il n'est pas question qu'elle fasse quoi que ce soit d'autre que dorloter son fils et me laisser la choyer comme je n'ai plus eu l'occasion de le faire depuis bien trop longtemps. Sachant qu'elle risque de ne pas vraiment avoir d'autres idées que rester ici à bercer Daniel sur le rocking chair ou aller dormir dans la pièce d'à côté, je poursuis en lui proposant un petit programme qui pourrait éventuellement lui plaire ; « Je pourrais te faire couler un bain avec tout ce qu'il faut dedans, ainsi qu'un bon massage. Et préparer des crêpes pour un goûter devant un bon film dans notre bulle. » Joanne n'a sûrement pas eu de vrai bon bain depuis quelques temps, dans une eau parfumée, tranquille. Elle pourra me laisser soulager son dos en somnolant, avant de profiter d'une de ses gourmandises favorites. Nous pourrons inaugurer le petit salon qu'elle nous a imaginé, avec le petit Dan dormant à côté si elle ne souhaite pas s'en éloigner. J'ai déjà prévu de lui faire à dîner, selon sa faim. Et, plus tard, de lui faire une dernière surprise. « Tu auras ton cadeau de jeune maman ce soir. »
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
"Et toi, tu te sens chez toi ?" dit-elle, d'un air véritablement inquiet. Ce serait le comble que les rôles s'échangent en ayant ainsi tout réaménagé. "S'il y a des choses qui ne te plaisent pas, on peut toujours le changer." Elle comprendrait qu'il y ait un détail qui ne lui convienne pas et qui clochait, alors que ça ne l'aurait pas peut-être pas dérangé sur le papier. La petite famille allait ensuite à l'étage, afin d'aller dans la chambre de Daniel. Celle-ci était parfaite. L'arbre qu'avait peint Jamie sur le mur était merveilleux, comme tout droit sorti d'un rêve. Jusqu'ici, Joanne ne l'avait regardé que très succinctement, Jamie y passant le plus clair de son temps libre à l'intérieur. L'ambiance n'était pas au beau fixe et l'air se faisait particulièrement pesant une fois qu'ils étaient dans la même pièce. Jamie avait même réussi à lui trouver une chaise à bascule, comme elle en avait tant rêvé. Elle ne tarda pas à s'y installer dedans, toujours avec son bébé dans les bras. Son fiancé se rapprocha d'eux et s'accroupit, afin d'avoir Daniel au plus près de lui. Il était considérablement devenue le centre de tout. Joanne les observait d'un air attendri, avec un léger sourire dessiné sur ses lèvres. Il disait ne plus vraiment avoir envie d'aller travailler, en regardant ainsi son petit loup. Et dire qu'il était sensé être à mi-temps. Il était toujours aussi occupé qu'avant. Joanne se passait de faire un commentaire, sachant qu'elle ne pouvait plus changer grand-chose désormais. Et son travail lui plaisait énormément, bien qu'il se faisait de plus en plus chronophage. Son ascension allait un peu à l'opposé de l'envie de construire une famille et d'en faire partie. Elle appréhendait beaucoup le jour où il reprendrait le travail, craignant que cette fâcheuse routine reprenne sans qu'ils ne puissent profiter de la présence de l'autre, et de celle de Daniel. Sur le coup, Joanne ne savait pas trop quoi faire de son après-midi. Elle était encore fatiguée, certes, mais déjà moins que les premiers jours après l'accouchement. La jeune femme ne savait pas trop quoi répondre et Jamie en vint rapidement à lui faire une suggestion. "Un bain ?" Dans le fond, c'était une idée merveilleuse et elle aurait certainement adoré en prendre un. Mais un tout autre mécanisme de la pensée fit son apparition, et revenant au grand galop. Qui disait bain disait être nu, et Jamie voudra très certainement en profiter avec elle. La pudeur avait su parfaitement à refaire surface, pour pas grand chose. Le ventre de Joanne avait alors déjà beaucoup dégonflé, mais il n'en restait pas moins un peu fripé, d'allure assez disgracieuse. Elle avait terriblement peur que cela ne répugne son fiancé, d'une manière ou d'une autre. La sage-femme lui avait conseillé toute une série de marque de crèmes et autres lotions pouvant faire face à ce problème-là, Joanne avait anticipé en les achetant avant la fin de sa grossesse. Et ça faisait des mois que Jamie ne l'avait pas vue nue, et cela ne faisait qu'accroître les angoisses de la jeune femme. Celle-ci restait muette quelques secondes, incapable de répondre quoi que ce soit. "Je..." L'idée de programme de Jamie était merveilleuse, dans le fond, ça l'enthousiasmait beaucoup, mais il y avait ce blocage là qui revenait en force et elle ne voulait pas l'offenser de quelque manière que ce soit. Il embraya ensuite sur une histoire de cadeaux. Joanne lui sourit tendrement. "Il est déjà là, mon cadeau." dit-elle tout bas en indiquant Daniel d'un signe de tête. "Et tu me gâtes déjà bien assez." Entre le salon, l'immense bouquet de fleurs qu'elle avait eu à la maternité. Les cadeaux précédents étaient un peu plus ternes dans la mesure où il cherchait certainement par là un moyen de se faire pardonner de ses très longues journées passées au travail. "Juste une chose avant de faire quoi que ce soit." dit-elle tout bas avant de se relever de sa chaise à bascule. Elle porta Daniel à ses lèvres pour l'embrasser et lui glisser quelques mots d'amour en un murmure avant de le déposer dans son berceau, où il y avait la peluche d'Ezra et celle de Jamie disposées de parts et d'autres. Elle le laissa enveloppé dans sa couverture, craignant qu'il n'attrape froid. Joanne se redressa et se rapprocha de son fils, son regard plongeant dans le sien. Elle fut d'abord hésitante, puis approcha timidement ses lèvres des siennes. "Je ne sais pas comment montrer toute ma reconnaissance." dit-elle en un mumure. Elle le fixait encore quelques secondes avant d'oser enfin à embrasser tendrement et longuement ses lèvres.
Même si le programme pour le reste de la journée semble plaire à Joanne, il n’y a ni réel enthousiasme ou autre réaction concrète face à mes propositions. Je plisse les yeux, scrute son regard bleu encore cerné. Je mets finalement cela sur le compte de la fatigue. Mon sourire tendre ne quitte pas mes lèvres. La pauvre aura bien besoin de plus d’une semaine de repos pour pleinement se remettre de son accouchement et de ses quelques complications. Pourtant, elle sera seule avec Daniel dès demain, lorsque je reprendrai le travail, et le petit occupera ses journées. Petit à petit, je me dis que prendre quelques jours supplémentaires pour la soutenir ne serait pas du luxe. Nos premiers jours ensemble, en tant que famille, à la maison, peuvent suffire à marquer tous les suivants. Est-ce que je veux mettre notre vie de famille sous le signe de l’abandon dès les premiers temps ? « Tu ?... » je demande pour relancer la phrase que Joanne a avorté. Elle est pensive, mais n’a pas terminé de partager ce qui lui passait par la tête, je ne sais pas pourquoi. Ou peut-être a-t-elle simplement oublié ce qu’elle voulait dire. Quoi qu’il en soit, je ne sais toujours pas si elle souhaite suivre mes suggestions, ou simplement se reposer avec le petit près d’elle. La jeune femme quitte la chaise à bascule. Je me redresse également et la suit jusqu’au berceau dans lequel elle dépose notre fils. Notre petit ange. Pendant quelques secondes, j’observe sa réaction au contact de ce nouveau lit, bien différent de celui de la maternité. Je suppose que si un détail le dérangeait, il n’hésiterait pas à nous en faire part à sa façon. Mais non. Il dort comme un loir et soupire d’aise, emmitouflé dans sa couverture, bien au chaud. Constatant que le petit n’a besoin de rien, Joanne s’approche finalement de moi. Je ne sais pas pourquoi cela me surprend de la voir avancer son visage vers le mien, et doucement frôler mes lèvres. « Tu n’as pas besoin de me remercier. » je murmure aussi bas qu’elle, envoûté par son souffle et sa bouche entrouverte qui entre en contact avec la mienne. Machinalement, mes mains saisissent délicatement sa tête, mes doigts glissent dans ses cheveux pour l’approcher un peu plus, prolonger ce doux baiser. Je frisonne un peu. Mon cœur s’accélère sensiblement. Petit à petit, je la retrouve. Nous sommes enfin engagés sur un chemin pouvant mener à l’harmonie. Il n’y a plus de place pour la rancœur sur pareille route. Le pardon est acquis. « Je t’aime. » dis-je au bord de ses lèvres, mon regard noyé dans le sien. Je fais passer ses mèches blondes derrière ses oreilles, lui souriant tendrement. Elle est magnifique. La savoir capable d’engendrer pareil miracle ne la rend que plus précieuse à mes yeux, et dieu sait qu’elle est déjà mon plus grand trésor. « Ca n’a pas été simple dernièrement, et je sais que l’arrivée du bébé va changer beaucoup de choses, mais tout ira bien. » Mes bras encerclent son petit corps pour l’étreindre de plus en plus, jusqu’à ce qu’elle puisse loger son visage au creux de mon cou. « Nous sommes une famille maintenant. » j’ajoute près de son oreille. Nous sommes liés pour toujours. Nous marier n’est plus qu’un détail afin d’officialiser cela. Mais un détail qui sera célébré en bonne et due forme le moment voulu. Sûrement dans quelques mois encore, le temps que Daniel soit plus grand. « Viens. Laissons-le profiter de son nid. » Je prends la main de Joanne et l’attire dans le couloir jusqu’à la porte suivante, celle de notre salle de bain. « Est-ce que tu préfères que je te laisse seule ? » je demande, assis sur le rebord de la baignoire, enclenchant l’écoulement de l’eau qui commence lentement à la remplir dans un clapotis continuel. Je ne compte pas lui imposer ma présence si elle ne souhaite qu’être au calme, avec elle-même, pour une fois. En profiter, se prélasser, ne m’appelant qu’en cas de besoin ou une fois qu’elle aura terminé.
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Joanne ne trouvait pas les mots, et même si Jamie tentait de relancer sa phrase, ça venait pas. Elle ne voulait pas le vexer, ou le décevoir, ou lui faire ressentir n'importe quel sentiment négatifs juste à cause de son propre mal-être. Alors elle avait préféré se rapprocher de lui, non sans hésitation et timidité, dans le but de l'embrasse. Pour lui, il n'y avait pas besoin de le remercier pour quoi que ce soit. Joanne le contredit par un simple hochement de tête de haut en bas avant que leurs lèvres ne s'effleurent et s'aiment tendrement. Que Jamie prenne son visage entre les deux mains, faisant glisser ses doigts sur ses mèches blondes fit bondir son coeur dans sa poitrine. Elle aimait tellement la tendresse qu'il avait à son égard. Peut-être était-ce son absence au cours des dernières semaines, mais Joanne trouvait ses gestes encore plus doux, plus délicats, et bien plus précieux qu'avant. Elle n'en perdait pas une miette, se laissant complètement envoûter par son charme. Elle avait l'impression qu'il n'y avait plus de rancœur, plus de haine à son égard. Ce n'était pas comparable à ces derniers temps. Plus d'atmosphère lourde ou d'air irrespirable. Joanne se sentait sereine et bien, dans ses bras. Il n'avait par contre pas perdu l'habitude de jouer avec ses mèches de cheveux, les plaçant derrière son oreille. "Je t'aime aussi." lui dit-elle tout bas, subjuguée d'être auprès d'un homme qui lui était parfait. Joanne avalait chacun de ses mots, et une vive émotion survint en elle, faisant ainsi briller ses yeux de joie, et de soulagement. Alors, cette mauvaise passe était donc terminée, enfin. Jamie la prit dans ses bras et l'enlaça doucement. La jeune femme logea son visage dans son cou, acceptant toute la tendresse qu'il était prêt à lui donner. Et il ajoutait des mots qui la fit vibrer tout en elle. Joanne redressa sa tête et le regarda, plongeant ses yeux dans les siens. Elle l'aimait tellement. "Merci." Elle ne faisait que se répéter, mais peu lui importait. Elle l'embrassa ensuite à plusieurs reprises, ne trouvant pas les mots pour décrire tout ce qu'elle pouvait ressentir. Jamie prit ensuite sa main, afin de laisser le bébé dormir tranquillement. Il la conduit jusqu'à la salle de bains, où il commença à faire couler l'eau du bain. Joanne croisa les bras, et se sentait à nouveau prise de court. Elle adorait cette salle de bain, c'était certainement l'une des premières choses qu'elle avait pu dire à Jamie en aménageant ici la première fois. "Peut-être, oui. Je ne sais pas." dit-elle, confuse. Elle adorerait sa présence, être avec lui tant qu'elle le pouvait, avant qu'il ne se remette au travail, mais il y avait toujours la même chose qui butait et ça l'énervait beaucoup. Ca ne faisait que décupler son incapacité à prendre des décisions et donner des réponses claires. Quand il s'agissait de se retrouver tous les deux, ils étaient tout feu tout flamme, mais Joanne avait l'impression que cette fois-là, il fallait peut-être y aller un peu plus modérément. Il y avait un bébé en plus, et la jeune maman était toujours particulièrement épuisée suite à son accouchement compliqué. Mais la pudeur lui avait toujours posé beaucoup de soucis depuis le début de leur relation, et elle n'arrivait pas à s'en défaire, bien au contraire. Elle avait peur de le vexer. Jouant nerveusement avec ses doigts, elle finit par lui dire, à voix basse, très hésitante. "Je ne pense pas que tu veuilles voir... tout ça." Il ne l'avait pas vu dénudée à ses dernières semaines de grossesse, ni la manière dont son corps avait changé, ni comme il était désormais. Joanne ne s'était regardée qu'une seule fois dans le miroir de sa salle de bains dans la maternité, et elle n'avait absolument pas aimé ce qu'elle avait pu y voir. Ce nouveau complexe et sa pudeur étaient de véritables freins alors que leur relation amoureuse renaissait, et elle se détestait souvent d'être ainsi, et que le seul qui était parvenu à faire tomber les barrières, non sans mal, c'était Jamie. [color=#006699]"Pas cette fois, peut-être." finit-elle par dire, s'en voulant beaucoup. A se demander quand serait la prochaine fois qu'ils auraient du temps pour tous les deux. Joanne avait déjà l'impression de tout ruiner.
La tendresse avait disparu depuis bien trop longtemps. C’est ce qui se ressent si bien lorsque je prends Joanne dans mes bras, la serrant délicatement, puis un peu plus fort. Sa chaleur m’a manqué, ce genre de contact si doux tout autant. Où étaient-ils partis ? Pourquoi avaient-ils disparus ? A ce moment, je ne sais même plus. J’ai l’impression d’avoir perdu tant de temps avec ma fiancée, d’avoir gâché de longues semaines à ressasser ma rancœur, nous privant de ce genre de moments. Je m’en veux tellement d’avoir été incapable de pardonner plus tôt, de tourner la page. Comme pour beaucoup de choses, je suppose qu’un déclic était nécessaire, et pour cela, il fallait un déclencheur. L’arrivée de Daniel m’a permis de tirer un trait sur nos mésaventures, sur l’abandon de Joanne. Malgré l’ambiance qu’elle a subie pendant les derniers mois de sa grossesse, elle est restée. Elle m’a donné un fils, le plus beau qui soit. Une famille dont je n’osais pas rêver. Elle n’a jamais cessé de m’aimer, et moi non plus. Non, je dirais même que je l’aime encore plus aujourd’hui qu’avant. Ma merveille, mon ange. Ce n’est qu’une fois dans la salle de bain qu’un semblant de malaise revient, sans que je comprenne pourquoi. Un brin de nervosité qui s’empare de ma belle, ses bras croisés formant une frontière défensive. Lorsque je lui propose de la laisser seule, elle marmonne et bégaye un peu. Je ne suis pas étonné qu’elle préfère profiter de son bain en tête-à-tête avec elle-même. C’est sa manière de le formuler sans oser qui m’intrigue. « Qu’est-ce qui ne va pas ? » je finis par demander, restant doux, mais assez ferme pour qu’elle comprenne que je veux une réponse. Le ton que j’emploie toujours lorsque je sais que quelque chose se trouve sur le bout de la langue de Joanne, mais qu’elle ne veut pas l’articuler. Le ton qui la bouscule juste assez pour qu’elle me parle. Alors qu’elle m’avoue à demi-mot que mon regard sur son corps la met mal à l’aise. Son ventre est encore un peu gonflé, et sûrement la peau est-elle distendue après des mois à grossir et s’adapter à tous les changements exigés par le bébé. La jeune femme ne voulait déjà plus que je la vois nue pendant les derniers mois, et je n’avais aucune envie de la contrarier à ce sujet, même si plus d’une fois j’aurais voulu admirer son ventre bien rond. Elle ne m’autorise toujours pas à la voir, donc. J’imagine que l’état actuel de son corps est loin de lui plaire, et qu’elle n’imagine pas qu’il puisse me plaire non plus. « Je vois… » Je me lève et m’approche de Joanne, mes mains se posent sur sa taille. Je l’embrasse une nouvelle fois avec délicatesse, essayant de la rassurer. Néanmoins, je connais bien ma fiancée. Je savais d’avance que le chemin sera long et lent à parcourir avant que mes doigts aient le droit de parcourir pleinement son corps de nouveau. C’est tout un travail qui recommence désormais. « Pourquoi je ne voudrais pas voir ça ? » je demande, même si j’en connais la réponse. Je caresse l’arrête de son nez avec le bout du mien, tout doucement. « J’ai vu ton corps changer pendant des mois pour accueillir notre fils, je t’ai vu lui donner naissance. Je sais à quoi m’attendre. » Je ne me fais aucune image idéaliste à ce sujet. Je n’attends pas d’elle qu’elle retrouve sa silhouette frêle en une semaine. Elle a fait des miracles, et les miracles coûtent un peu. Cela a été un effort considérable pour elle pendant des mois. Il faudra un peu de temps et de patience pour revenir à la normale. « Tu es maman. Il n’y a rien qui puisse être laid là-dedans. Au contraire. Tu restes belle. » Même fatiguée et malgré un corps encore déformé par la grossesse. Je ne cesse pas de l’aimer. Ca reste elle, la femme que j’aime, et je l’aime toute entière, tel qu’elle doit être après avoir donné la vie. « Je ne te force pas la main. » dis-je finalement en l’embrassant sur le front. « Je te laisse tranquille. Appelles-moi si tu as besoin de quoi que ce soit. » Je lui adresse un fin sourire, un baiser sur la joue, et quitte la pièce pour retourner veiller sur Daniel.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Jamie avait très vite compris quels attitudes adopter auprès de la femme qu'il aimait. Quel ton il fallait employer, dans quelles circonstances. Il connaissait très bien ses complexes, et savait comment s'en défaire bien que tout ceci s'apparente à un véritable parcours du combattant. Il savait comment la soudoyer par amusement, comment lui donner envie. Il avait énormément de contrôle et d'influence sur elle, ce qui ne fait que prouver à quel point il était parvenu à la connaître et à la comprendre. Et ça, ce n'était pas donné à tout le monde. Encore une fois, il usait de ce pouvoir là pour savoir ce qui travaillait sa belle, ce qui l'empêchait de parler distinctement. Son ton était ferme, mais pas dur. Il laissait simplement comprendre à la jeune femme qu'elle ne s'en sortirait pas tant qu'elle n'aura pas donné d'explications à son malaise. Il avait suffi d'une phrase pour qu'il comprenne ce qui posait problème et s'approcha de sa future femme en déposant sans gêne ses mains sur sa taille. Il avait un de ces regards dont elle ne parvenait pas à se détacher, qui lui coupait presque le souffle, tellement c'était intense. Il ne lui laissait pas vraiment le temps de répondre à sa question qu'il embraya sur ses arguments, qu'il allait certainement devoir répéter plus d'une fois. Il disait savoir à quoi s'attendre. Joanne ne savait pas. Un ventre rond, sachant qu'un bébé grandissant sur cette peau douce et lisse, n'avait pas la même allure qu'après l'accouchement, c'était beaucoup moins beau à voir, visuellement. Jamie y voyait certainement, et surtout, l'histoire qui se cachait derrière cette peau un peu meurtrie. Elle restait belle à ses yeux, c'était ce qu'il disait. Ca la rassurait, mais ça n'allait pas être suffisant. Jamie devait certainement le savoir. Il ne voulait pas la mettre mal à l'aise dès le début et préférait respecter son choix de prendre un bain seule. Il l'embrassa affectueusement sur le front avant de filer en dehors la pièce. "Jamie." Elle l'appelait de sa voix douce avant qu'il ne passe la porte de la salle de bains. "Une autre fois." lui dit-elle avec un léger sourire. Ils avaient toujours tellement aimé prendre des bains ensemble, elle espérait qu'au bout d'un temps, elle accepterait qu'il la regarde à nouveau et qu'ils reprennent bientôt cette habitude là. Son fiancé la laissait finalement seule avec elle-même. L'ambiance agréable et la lumière tamisée de la pièce rendaient tout plus agréable. Elle finit par couper l'eau, la baignoire étant suffisamment remplie. Jamie avait déjà les produits parfumés dans l'eau, qui embaumait toute la pièce. De légers parfums de fleurs, notamment de tiaré. Elle se déshabilla, prenant tout son temps, et déposa ses habits sur une chaise. Elle fit tout pour éviter de voir son reflet dans le miroir de la pièce. Joanne entrait dans la baignoire et l'eau chaude du bain lui fit énormément de bain. Tous les muscles qui avaient oublié de se décontracter se détendirent sans soucis. Elle appuyait sa tête contre le rebord et fermait les yeux. Si elle était contre Jamie, elle se serait certainement endormie. Là, elle somnolait simplement, profitant d'une sérénité qui n'avait pas été dans cette maison depuis bien longtemps. Elle avait aussi trempé ses cheveux. Joanne ne savait pas combien de temps elle était restée là. Elle finit par sortir et s'essuyer avant d'aller chercher de nouveaux habits dans le dressing, prenant bien soin de mettre une serviette autour de sa poitrine. Elle prit une robe dans la quelle elle était toujours à l'aise dedans, et le gilet qu'elle avait toujours. C'était les cheveux encore humides qu'elle retrouva Jamie, assis dans la chaise à bascule, veillant attentivement à son enfant. D'avoir les deux hommes de sa vie dans son champ de vision la fit tout de suite sourire. Elle s'approcha de Jamie et s'installa par terre sur le tapis, afin de pouvoir appuyer sa tête contre sa cuisse, les yeux également rivés sur Daniel. "Il est si paisible." dit-elle tout bas afin de ne pas le réveiller. On aurait pu s'attendre à ce qu'il ne se fasse pas tout de suite à son nouvelle environnement, qu'il prenne peur à cause de la présence des chiens. Ceux-ci n'allaient de toute façon pas entrer dans cette chambre, du moins pour les premiers mois. "Même la nuit, il ne se réveille vraiment que lorsqu'il a faim. Et encore, ce ne sont pas des gros pleurs. Il s'agite un petit peu et pousse des petits cris, mais ce n'est pas fort. Mais largement suffisant pour me réveiller." Lorsqu'elle allaitait la nuit, elle entendait d'autres bébés qui étaient apparemment beaucoup moins faciles à satisfaire, et elle s'avouait assez chanceuse que Daniel ne soit pas comme les autres. Il était parfait. "Et il est réglé comme une horloge concernant les repas." ajouta-t-elle avec un petit rire. Elle redressa sa tête afin de pouvoir regarder Jamie. "On a encore deux bonnes heures devant nous."
Sur le pas de la porte, je m’arrête un temps. J’adresse un regard à Joanne qui m’assure que ce moment d’intimité n’est que partie remise et lui souris tendrement. Plus tard. Un autre jour. Sûrement dans de longues semaines. J’ai déjà fait ce cheminement une fois, je suis parvenu à mes fins petit à petit. Même si j’aurais aimé que tout soit facile, je n’ai pas peur de renouveler l’opération. Cela me semble presque normal. Nous retrouvons notre relation comme à ses débuts face à ce nouveau chapitre, et à plus d’un titre nous avons des choses à réapprendre pour reconstruire notre couple après une grande période à vide. Réapprendre la confiance, le dialogue, à se livrer l’un à l’autre. Comme toujours, nous sortirons plus forts de nos expériences et de nos déboires. Nous saurons former un couple et une famille unie. C’est ce pourquoi nous sommes faits. Je laisse donc Joanne seule dans la salle de bain, autant de temps qu’elle le souhaite. Elle a bien besoin de se retrouver, d’autant plus qu’à l’avenir, ces moments rien qu’à elle peuvent se faire de plus en plus rares. Autant en profiter tant qu’elle le peut. Pour la part, je retourne auprès de notre fils. Sa sieste a pris fin pour le moment, ses grands yeux bleus sont ouverts et se posent sur ce nouveau monde qui s’offre à lui. Il gigote ses petits membres au fond de son berceau. Je ne sais pas s’il peut me voir, comprendre ce que je suis, qui je suis, mais nos regards se croisent et il observe cette grande ombre penchée au-dessus de lui avec une vive curiosité. Il semble avoir un peu chaud, alors je le tire de son drap et le prend dans mes bras. Il chouine sur le moment. Je le tiens sûrement mal. Un ou deux essais plus tard, le petit est plus confortablement installé. Mon cœur s’est accéléré, un peu paniqué à la seule idée de faire quelque chose de travers, de lui faire mal. Je me trouve si maladroit. Assis dans la chaise à bascule, je berce un peu Daniel et s’est pris d’affection pour mon index. Il ne le lâcherait pour rien au monde. Il est adorable. Il est si étrange de se dire qu’il y a un peu de Joanne et un peu de moi dans ce petit être. Que nous avons créé la vie, et qu’il est juste là. C’est encore un peu irréel. Pourtant je pose mes yeux dessus, je le tiens, il respire entre mes bras, il me regarde avec ses magnifiques yeux brillants. J’approche mon visage de sa bouille et glisse le bout de mon nez sur le sien, puis dépose un baiser sur ses petits doigts qui serrent fort le mien. Cela semble lui plaire, car Dan affiche soudainement un large sourire amusé qui illumine tous ses traits de bébé. Qu’il est beau, mon petit ange. C’est bien la première fois qu’il m’adresse un tel sourire. Tout son petit corps semble déborder d’amour par tous les pores. De tout l’amour que sa mère et moi nous portons l’un à l’autre, et que nous avons mis si longtemps à comprendre et canaliser. Seigneur, qu’il est beau. Je sursaute un peu lorsque la porte s’ouvre sur Joanne qui nous rejoint. Elle s’assied près de nous, par terre, et complète le tableau à la perfection. D’après elle, Daniel est un de ces bébés modèles qui pleure peu, calme. « Il tient beaucoup de toi alors. » dis-je avec un sourire. Il nous reste deux heures avant que le petit ne réclame le sein de sa mère, et qu’il soit temps pour nous aussi de nous faire plaisir en dégustant un goûter. La pâte à crêpes est déjà prête dans le frigo. « Il est si petit, j’ai toujours peur de mal m’y prendre et de l’écraser. » dis-je au bout d’un moment, avec un rire nerveux. Il ne lâche toujours pas mon doigt et garde mon regard bien prisonnier du sien. Impossible de se détourner de ces deux pépites bleues qui ne font que réclamer de la tendresse. « Tu aurais vu le joli sourire qu’il m’a fait tout à l’heure… » Mais il s’est remis à somnoler maintenant. Faire partie des vivants demander déjà beaucoup d’énergie à ce petit bout, et cela le fatigue bien rapidement. Il semble bailler à travers sa petite bouche entrouverte. « Je pense que je vais encore prendre quelques jours de congé. » dis-je finalement, le sujet n’ayant pas quitté mon esprit depuis que nous sommes rentrés. Il est encore trop tôt pour que je retourne à la radio. Mon travail de père commence tout juste. « On a plus besoin de moi ici que là-bas. » j’ajoute en posant mon regard sur Joanne, un sourire ne me quittant pas. On ne peut pas faire plus comblé à cet instant. Tout est parfait. Parfait, et pourtant. « J’aurais aimé qu’Oliver le voie. » je murmure avec un peu d’émotion dans la voix.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Jamie tenait le petit dans les bras, il semblait bien s'y prendre. Elle venait tout juste de s'installer à ses côté, par terre, appuyant sa tête contre sa jambe, les regardant avec beaucoup d'amour et de tendresse. Il était persuadé que Daniel tenait beaucoup de sa mère. "Il te ressemble déjà beaucoup, il fallait bien qu'il y ait un petit peu de moi dans ce petit bout d'homme, aussi." dit-elle avec un sourire amusé et pétillant. "Tous les parents doivent dire ça de leur bébé, mais je le trouve tellement beau. Tous ses traits, tout..." Elle se mit à genoux pour pouvoir caresser la joue du bébé, en le regardant d'un air tendre. Elle admirait l'échange de regard qu'il y avait entre le père et le fils. "Tu t'en sors très bien, je trouve." lui dit-elle tout bas. Lui qui appréhendait tellement mal à faire, faire les choses de travers, blesser le petit. "Ca vient tout seul, tu vois ?" ajouta-t-elle, avec un air encourageant. Etrangement, Joanne trouvait son fiancé encore plus beau et séduisant qu'avant. Peut-être était-ce à cause du renouveau de leur relation, de cette nouvelle découverte de l'autre, peut-être était-ce le fait qu'il porte aussi le titre de père désormais. Beaucoup de facteurs entraient en jeu. "C'est vrai ?" demanda-t-elle lorsqu'il dit qu'il l'avait vu sourire. "Je dormais beaucoup en même temps que lui, mais il y avait tu sais, la nuit où je ne trouvais pas trop le sommeil malgré la fatigue. Et je pense qu'il rêvait déjà parce qu'il faisait des tout petits sourires en coin. Mais je n'ai pas encore eu droit à un large de sourire." dit-elle d'un air tendre. "Tu es chanceux. Je suis presque jalouse." ajouta-t-elle d'un air amusé. Jamie était totalement sous le charme de son fils, et c'était l'une des plus belles choses que l'on pouvait voir. Elle photographia cette image là dans sa tête, et y restait gravé à jamais. Son coeur s'emballa lorsqu'il dit qu'il comptait bien prolonger ses congés. Son regard s'illumina et elle se redressa. "C'est vrai ?" dit-elle une nouvelle fois, comme si elle craignait qu'on lui faisait une mauvaises blague. Joanne ne put s'empêcher de sourire ensuite. Il considérait qu'il avait bien plus d'importance à la maison qu'à son travail. Pendant une période, il pensait peut-être le contraire. Joanne se leva et se pencha sur son fiancé afin de pouvoir l'embrasser tendrement. Il aurait aimé qu'Oliver soit là. Qu'il voit le fils de son jeune frère. Joanne lui caressa tendrement la joue. "Il le voit, d'où il est." lui dit-elle, sûre d'elle. Jamie avait toujours ces moments où son frère lui manquait horriblement. Certainement encore plus pour un si grand événement dans sa vie. Un miracle inespéré, un bonheur qu'il ne pensait pas pouvoir connaître. Oliver aurait certainement apprécié voir son frère s'épanouir autant, alors que leurs parents ne lui auraient jamais permis ce bonheur là. Elle l'embrassa au niveau de la tempe et prit ensuite délicatement le bébé de ses bras. "On va le laisser dormir un peu. Ca épuise, de recevoir autant d'amour." Joanne gardait Daniel tout contre elle quelques secondes, ne cessant de lui dire à quel point elle l'aimait, que c'était son petit trésor. Elle le couvrait de quelques baisers avant de bien vouloir le remettre dans son berceau. Il dormait déjà profondément, imperturbable. Joanne prit en main le babyphone, se disant que c'était une excellente occasion de tester ce gadget. Elle laissait tout de même la porte entre-ouverte derrière elle, avant de descendre au rez-de-chaussée avec Jamie. Elle posa le petit engin sur le bar, alors que Jamie commençait déjà à préparer les crêpes, sans laisser trop le choix à sa belle. C'était elle qui était aux petits soins et elle ne devait rien faire. Joanne n'avait pas l'habitude, elle ne savait pas quoi faire de ses deux mains. Alors elle le regardait faire. "Tu vas prendre combien de jours de congés, du coup ?" demanda-t-elle, curieuse. Elle s'installa sur l'une des chaises du bar, ses jambes se fatiguaient encore un peu rapidement. Un silence s'installa, mais il n'était pas embêtant. L'odeur des crêpes déjà cuites envahissait tout le séjour. Jamie en faisait des grandes à la poêle, et les empila sur une assiette afin qu'ils puissent ensuite les déguster dans leur petit cocon. "Tu m'as beaucoup manquée." finit-elle par dire, en l'admirant cuisiner. Il savait très bien de quoi elle parlait, pourquoi elle le disait. Ils étaient là mais sans être là, ils connaissaient bien tous les deux cette sensation là et l'avaient déjà vécu une fois. Quelque, il lui manquait toujours un peu, parce qu'ils ne s'étaient pas encore complètement retrouvé tous les deux, comme ils devraient le faire. Joanne ne put s'empêcher par finir de se lever. Elle prit un plateau où elle disposa de quoi garnir les crêpes : sucre, confiture, sirop d'érable, chantilly... Il y en avait pour tous les goûts. Elle fit également chauffer de l'eau pour boire du thé avec cette gourmandise. Joanne ramena le tout dans leur petit salon rien qu'à eux et Jamie ne tarda pas à venir avec une assiette sur laquelle il y avait une pile de crêpes - de quoi faire un goûter des plus copieux.
A mes yeux, il est toujours bien trop tôt pour dire que notre Daniel me ressemble tant que ça. Mais nous pouvons dire sans hésiter que jusqu’à présent, il tient beaucoup du caractère de sa mère, ce qui est un véritable soulagement pour moi. Qui sait si cela changera avec le temps, si sa personnalité révélera quelques-uns des mauvais traits de son paternel. Néanmoins, il promet de ne pas être un bébé difficile, et c’est tout ce que je souhaite à sa maman qui sera à la maison pour prendre soin de lui. Je l’imagine bien, elle aussi, perdre des heures juste à l’observer, admirer son petit miracle. « Il fera des ravages plus tard, ce petit. » dis-je avec un petit rire amusé. Il a déjà fait tomber ses parents sous son charme, je suis certain qu’il rendra gaga tout son entourage. Un bébé de rêve, aussi doux et calme, avec de grands yeux curieux, fait forcément craquer tout le monde. Pour Joanne, je m’en sors bien avec le petit. Mais c’est bien parce qu’elle ne m’a pas vu peiner à retrouver la bonne manière de prendre dans mes bras comme me l’avait montré la sage-femme. Cela est bien loin de me venir tout naturellement. « Oh non, je m’y reprends toujours à plusieurs fois avant de bien le tenir… » dis-je en laissant voir que cela me contrarie un peu. Peut-être est-ce le lot de tous les pères, d’apprendre lentement et de faire toutes les erreurs que les mères ne font pas. Après tout, elles ont eu neuf mois pour faire amplement connaissance avec leur enfant, et nous, nous ne le découvrons qu’une fois sa venue au monde. « Je n’ai pas la même fibre que toi. » j’ajoute en haussant les épaules. Cela viendra avec le temps. Je l’espère. Avoir droit à un aussi joli sourire comme celui qu’il m’a adressé plus tôt est bien assez motivant pour se donner du mal. Je ris bouche fermée en entendant Joanne se dire jalouse. « Tu auras tout le temps d’en profiter et d’avoir ses sourires que pour toi. » Si elle souhaite toujours être maman à temps plein. Après tout, suite à neuf mois cloîtrée à la maison, je comprendrais qu’elle ait changé d’avis et qu’elle n’ait qu’une hâte : retrouver le musée, ses collègues, son travail, ses journées bien pleines et loin de l’ennui. Néanmoins, le comprendre ne veut pas dire être d’accord. A mes yeux, sa place reste auprès de Daniel. Son enthousiasme est palpable quand je lui avoue que je pense prolonger mon absence à la radio pour être auprès d’elle et de notre fils. Je lui avais pourtant dit que cela ne serait pas envisageable. Aujourd’hui, face au fait accompli, ça l’est. « Peut-être que je travaillerai un peu de la maison, mais en tout cas, j’aimerais rester un peu plus longtemps avec vous deux. Prendre soin de vous. » Continuer de dorloter ma fiancée, passer des heures à observer notre bébé. Nous pourrions enfin nous mettre à la recherche de cette maison de campagne dont nous parlions à Perth, histoire d’emmener Dan au grand air. Quand il sera plus grand, nous irons en Angleterre avec lui, visiter la grande bâtisse où j’ai vécu ma propre enfance, à quelques heures de Londres. Là où Oliver et moi avons vécu nos plus beaux moments, avant d’emménager dans la capitale, et que nos vies dégringolent. Il n’est pas là pour rencontrer mon fils aujourd’hui, et cela m’attriste profondément. Dans ces moments-là, il me manque plus que jamais. « Sûrement, oui… » je murmure quand Joanne m’assure que mon frère peut observer son neveu depuis l’au-delà. Je me dis qu’il veillera sur lui, même de là-bas. La jeune femme récupère le petit bout dans ses bras pour le déposer dans son berceau. Le voilà déjà quasiment rendormi. Nous quittons la chambre avec le babyphone afin de surveiller Daniel depuis le rez-de-chaussée. Le temps pour moi de faire cuire la montagne de crêpes, il sera l’heure de grignoter – et sûrement le bébé aura également faim. Je m’atèle à la tâche, Joanne assise près de moi. Etant resté très évasif au sujet de la poursuite de mon congé, elle souhaite en savoir un peu plus. « Je ne sais pas trop… » dis-je dans un premier temps, concentré à faire tourner une crêpe dans la poêle. « Je me dis que toute une semaine ne serait pas de trop. » Il faut au moins ça pour démarrer notre vie tous les trois, s’accommoder de quelques changements, avant de reprendre une vie normale. « Je laisserai Logan s’occuper de la partie rédaction en chef, il s’en sortira très bien seul quelques jours de plus. » Après tout, il ne fera que remplir le rôle que je remplissais lorsque je n’avais pas encore son aide. Il comprendra bien vite pourquoi il a été embauché. « En revanche, j’aimerais pouvoir travailler sur mon émission quand même, depuis la maison, et me rendre à la radio juste pour être à l’antenne. » Quelques petites mains sur place m’aideront à préparer tout cela. J’aurai certes le nez devant l’ordinateur, mais je resterai pleinement disponible pour Joanne et Daniel. « Je ne serais absent que trois heures par jour au maximum. » j’ajoute. Entre le temps d’antenne et le trajet jusqu’à la station, cela ne devrait pas prendre plus de temps que cela. C’est un bon compromis d’après moi. « Ca te conviendrait ? » je demande tout de même à la jeune femme. Je sais qu’elle n’osera pas dire non, je la connais. Mais je connais les expressions de son visage aussi, et je sais parfois déceler ce qui se cache derrière ses réponses conciliantes. La pile de crêpes continue son ascension à côté de moi. L’odeur fait terriblement envie. Je me dis qu’il est assez paradoxal pour de jeunes parents de se retrouver autour d’un goûter de gosses. Mais c’est quelque chose bien à nous, et je pense que nous avons besoin d’être réunis autour de ce que nous adorons tous les deux, continuer de nous rappeler tout ce qui fait que nous sommes bien l’un avec l’autre. Cela me rappelle un peu les gaufres que nous avions dégustées à Londres, les loukoums chez elle, entre autres fois où nous avons ri autour de ces gourmandises. « Tu m’as manqué aussi. » je réponds à Joanne avec un sourire tendre. Il reste un peu de chemin à faire, mais nous sommes sur la bonne voie. Je suis confiant. Joanne s’occupe de réunir sur un plateau tout ce qui peut garnir des crêpes. Nous apportons le tout sur la petite table –neuve, ronde et basse en bois massif- qui orne notre cocon. « Dan a intérêt à être aussi amateur de gaufres et de crêpes que nous. Imagine les goûters que nous pourrons nous faire ensemble. » dis-je en nous voyant aisément tous ensemble autour d’une table. Qui sait si d’autres bambins nous auront rejoints d’ici là. Je m’offre une entrée en matière en douceur avec une crêpe au sucre. « Où est-ce que tu en es de ta lecture du journal de Lucy ? » je demande, curieux. Ce n’est pas après avoir donné la vie que la jeune mère s’est trouvée d’humeur à lire des récits de guerre, nous nous étions donc entendus sur le fait qu’elle lirait le journal de l’infirmière en premier, de son côté, pendant que je me pencherais sur celui du soldat.
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"Comme son papa." dit-elle tout doucement en regardant son futur mari avec un large sourire. Il ne la croyait jamais lorsque Joanne disait que c'était une belle personne, autant physiquement qu'à l'intérieur, et qu'il ne laissait aucune femme indifférente. Mais lui restait persuadé du contraire, ne voyant que du mauvais en lui. Jamie avait absolument tout pour plaire, la jeune femme n'en avait jamais douté une seconde. Il lui arrivait de se dire qu'elle ne le méritait pas, d'autant plus avec les derniers événements. "Jamie, il a tout juste une semaine. Une petite semaine. C'est normal d'avoir encore quelques maladresses et tu arrives toujours à te réajuster." Il fallait déjà se rendre compte que l'on ne faisait pas les choses bien, avant de vouloir rectifier le tir. "Je trouve que tu te débrouilles très bien." ajouta-t-elle en venant lui caresser tendrement la joue. Joanne avait hâte de voir Daniel sourire comme Jamie venait de le décrire. Il rit doucement lorsqu'elle se disait être jalouse. Il était vrai qu'elle allait avoir tout le loisir de le voir sourire et s'épanouir en découvrant ce monde nouveau qui s'étendait devant ses yeux curieux. Les rôles allaient très certainement s'inverser car la jeune femme savait que la roue allait tourner et que dans une poignée de jours, la routine qu'il y avait avant qu'elle n'accouche allait s'imposer d'elle-même. Ca n'allait pas être facile. Le bon point que la jeune maman en tirait était qu'elle avait désormais largement de quoi s'occuper. Son bonheur ne se résumait plus qu'à ça ; être aimée par Jamie et l'aimer en retour, et être maman. Elle n'en demandait pas plus, et elle avait tout ceci. Il n'y avait plus aucune raison qu'elle ne vienne se plaindre. Bien sûr, cela aurait été trop beau que Jamie dispose d'une semaine complète de congés supplémentaires. Une partie de lui reviendra malgré tout au travail. La dernière fois que cela avait été le cas, Jamie restait collé sur son ordinateur - et leur couple battait aussi de l'aile à cette époque là. Mais Jamie disait vouloir prendre soin de sa famille profiter encore de leur présence avant de retomber directement dans l'ABC. Il ne pouvait s'empêcher de penser à son frère devant pareil bonheur. Une réaction des plus normales, aux yeux de la jeune femme. Elle le laissait un peu dans ses pensées, à se rappeler de lui d'autant qu'il le voulait avant de récupérer Daniel afin de le laisser dormir tranquillement. Lorsque le couple était descendu au rez-de-chaussée, la belle blonde revint sur le sujet des congés que Jamie voulaient prolongés. Ses yeux s'illuminèrent quand il parlait d'une semaine entière et elle ne put s'empêcher de sourire un peu. Joanne désenchanta lorsqu'il disait tout de même vouloir reprendre son émission. Trois heures d'absence complète par jour, sans passer le temps qu'il passera à l'ordinateur. Autant de temps où il ne verra pas le temps de passer et où elle n'osera pas le déranger parce qu'elle savait à quel point il adorait faire de la radio. Ce serait une transition raisonnable avant qu'il ne revienne à son rythme habituel de travail, lui dirait-on. Jamie finit par lui demander son avis, savoir si ça lui conviendrait. Joanne lui sourit en toute franchise. "Oui, bien sûr." Elle n'avait certainement pas encore la position d'exiger quoi que ce soit ou d'en demander plus. Initialement, il aurait du reprendre le travail directement. Mais elle appréhendait le temps qu'il allait devoir passer devant l'ordinateur pour préparer son émission. Ce genre de choses ne s'organisaient pas en une demi-heure, Joanne le savait très bien."Et après, ce sera le même rythme qu'avant ?" demanda-t-elle, même si elle connaissait déjà la réponse à sa question. Elle s'était ensuite installée au salon après avoir emmener de quoi garnir les crêpes, et Jamie la rejoignit sans trop tard. Il espérait que leur fils soit aussi gourmand de gaufres et de crêpes qu'eux. Joanne sourit tendrement. "Ce n'est pas le genre de choses qui soit très difficile à aimer." Elle commença par prendre une crêpe nature, qu'elle enroula et elle prit ensuite une bouchée. Jamie avait réussi à la convaincre de lire un des journeaux, il avait énormément insisté pour cela et elle avait fini par céder. "Je l'ai terminé." avoua-t-elle avec un sourire timide. "Ca se lit tout seul, on tombe très facilement dans son univers, je trouve." commença-t-elle par expliquant tout en mettant un peu de confiture sur une deuxième crêpe. "Elle était très rêveuse, elle avait son petit monde bourré d'innocence qu'elle s'était créée et il semblerait que tout le monde faisait en sorte que ça ne change pas, malgré la guerre." Elle but une gorgée de son thé, et reprit. "Il y a quelque chose qui l'a beaucoup marqué et qu'elle ne cesse de mentionner depuis qu'elle avait rencontré Dan. Il y avait ce soldat qu'elle avait vu mourir à l'hôpital et qui disait partir sereinement parce qu'il savait qu'il allait retrouver celle qu'il aimait dans la vie suivante. Elle était persuadée que c'était son cas, avec Dan. Qu'ils se connaissaient déjà depuis très longtemps et qu'ils se retrouveraient tôt ou tard. Elle a eu un véritable coup de foudre avec lui." Les écrits de Lucy débordaient de romantisme depuis qu'elle avait rencontré le soldat. Avant cela, elle ne racontait que son quotidien, les choses un petit peu singulières qu'elle vivait dans sa vie de tous les jours. "Elle l'aimait de manière inconditionnelle, elle n'avait d'yeux que pour lui. Elle était particulièrement bouleversée lorsqu'il a du repartir sur le front. Dans ce qu'elle écrit, je trouve qu'on ressent assez facilement à quel point elle s'était isolée. Elle ne parlait plus de ses sorties avec ses amis ou de ses parents, juste de lui et de son impatience à recevoir une nouvelle lettre." Joanne appuya sa tête contre le dos de ses doigts, son coude s'appuyant lui même contre le dossier du canapé, regardant tendrement son fiancé. "Elle a arrêté d'écrire le jour juste avant que Dan ne revienne." finit-elle par dire. "Elle était certainement bien trop occupée à l'aimer et à soigner ses blessures."
Retourner au travail dès demain me semble impossible. Pas après avoir passé si peu de temps avec ma fiancée et mon fils tout juste sortis de la maternité. Un retour à la vie normale en douceur semble nécessaire, étape par étape. Travailler uniquement sur mon émission depuis la maison me semble être un parfait compromis. Je ne veux pas abandonner l'antenne plus longtemps, pas lorsque cela commence à peine à réellement prendre de l'ampleur. C'est important, je pense que Joanne le sait. Son sourire semble sincère quand elle approuve mon choix. « Bien. J'appellerai Logan pour le prévenir tout à l'heure. » Lui aussi comprendra certainement que je ne veuille pas m'enfermer dans mon bureau de nouveau dans l'immédiat. « La vie reprendra son cours, oui. » je réponds à ma fiancée avec un léger haussement d'épaules. Le rythme sera le même qu'avant, je n'y peux pas grand-chose, c'est ainsi. Je ferai de mon mieux pour être présent, elle sait à quel point être un père absent fait partie de mes hantises. Un temps d'adaptation sera sûrement nécessaire. Nous nous installons dans notre petit salon avec nos crêpes, parés à enfin avoir un moment pour nous, discuter en tête-à-tête, et essayer de poursuivre sur cette ambiance complice qui reprend peu à peu le dessus sur tout le reste. Parler des vieux journaux me semblait être une bonne idée, cela nous passionne tous les deux après tout. J'écoute donc Joanne me raconter ce qu'elle a appris du journal de l'infirmière, Lucy. Sa description du caractère de la jeune femme me fait sourire. « Ca me rappelle quelqu'un. » dis-je en observant ma fiancée, le regard rieur. Elle aussi est une grande rêveuse, romantique, dans un monde dans lequel son entourage cherche à la garder, la préservant des dangers de l'extérieur malgré elle. La demoiselle avait cette conviction de connaître le soldat de bien avant leur rencontre, et que la mort n'allait pas les séparer. Une croyance tirée d'un autre soldat. Son petit univers a quand même été mis à mal par le départ de son bien aimé pour la guerre. J'imagine que la séparation a été rude. Je me souviens de sa dernière lettre, elle avait l'air si paniquée à l'idée de le retrouver en si mauvais état. Elle ne voulait que le guérir. « Il en a eu bien besoin, vu à quel point il a été blessé. » dis-je tout bas. La lettre qu'il avait envoyé à Lucy pour lui expliquer ce qui lui était arrivée était fort romancée par rapport à la version de son journal. Il ne voulait pas qu'elle sache à quel point il avait mal, mais son écriture devenue bien plus nerveuse et tremblante laissait à elle seule deviner qu'il souffrait énormément. « C'est si triste de se dire qu'il a survécu à tellement de choses, qu'ils se sont retrouvés, et finalement, ils n'ont pas pu vivre ensemble malgré tout. Il rentre chez lui, et la guerre vient à lui tout de même. » Elle termine le travail, comme s'il était destiné à mourir sous les bombes, sans aucune possibilité de lui échapper. Cela est si injuste. Ils avaient mérité d'être heureux ensemble. « J'ai aussi terminé le journal de Dan. Il a encore un peu écrit une fois de retour du front, il n'arrivait pas à dormir, et ses brûlures le faisaient pas mal souffrir. Ce sont surtout des récits de guerre, des résumés tristes des journées sur le front, et beaucoup de prières. Je pense que tout écrire en étant fidèle à la brutalité des événements était une manière de l'évacuer. » Dans ses lettres, le soldat semblait être quelqu'un d'optimiste et jovial, même si la mort de son ami lui avait mis un sacré coup au moral. Son journal est le reflet du côté sombre qu'il ne souhaitait montrer à personne, un exutoire ; une fois sur le papier, les événements retracés par ses mots ne pouvaient plus l'atteindre, alors il pouvait sourire de nouveau et retrouver toute sa joie de vivre. « Il était très amoureux de Lucy aussi. Quand il raconte leur rencontre, il parle d'un lien immuable qui s'est formé dès le premier regard. Elle lui avait appris à rêver du futur, de leur maison, de leurs enfants. C'était son épouse, et il l'aimait plus que tout. » Sa demande en mariage, ou plutôt, l'évidence de leur futur mariage, m'avait bien fait rire. Il était impensable qu'elle refuse pour lui. Ils s'étaient déjà promis l'un à l'autre dans leur chair. J'aurais aimé voir la bague qu'il lui avait envoyée. « Je sais aussi comment les lettres ont quitté la ville. » j'ajoute, sachant que cela piquera forcément la curiosité de Joanne. « Mais je devrais te laisser le découvrir par toi-même en lisant le journal à ton tour. Les spoilers sont un des fléaux de notre société après tout. » j'ajoute avec un sourire narquois, avant de fourrer le dernier bout de ma crêpe dans ma bouche, très fier de laisser Joanne sur sa faim. Près de nous, le petit baby phone s'active. Les grésillements laissent deviner les discrets hoquets et chouinements utilisés par notre fils pour manifester son mécontentement et réclamer sa mère. Nous attendons quelques secondes pour déterminer s'il s'agit d'une fausse alerte et s'il compte se rendormir dans la minute, ou s'il persiste. « Je crois que notre Dan a faim. » dis-je au bout d'un moment, comprenant que l'heure du goûter est aussi arrivée pour lui.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Elle savait déjà qu'elle n'allait pas aimer le jour de la reprise complète du travail de Jamie, et retourner au rythme d'avant. Certes, il y avait un bébé en plus, mais ce n'était pas une garantie qu'il parvienne à rentrer plus tôt le soir, à envisager de partir un peu plus tard le matin. Joanne ne doutait pas de ses capacités, ni de l'envie d'être présent pour son enfant. Il craignait devenir un père absent par dessus-tout. Mais déjà que leur vie de couple sortait à peine la tête de l'eau, qu'il se replonge aussi passionnément dans son travail n'allait que les noyer à nouveau. La famille allait être solide, à n'en pas douter. Leur couple, beaucoup moins. Elle appréhendait d'autant plus qu'avant qu'elle n'accouche, ses absences et le fait qu'il ne lui avait pas pardonné rendait ses journées invivables. Elle avait été si malheureuse, si triste. Joanne avait peur que ces émotions ne reviennent même si Daniel allait clairement égayer ses journées. La jeune femme baissa les yeux et n'ajouta pas un mot, avant d'aller au salon. Ils avaient alors commencé à parler des journaux des deux amants, de ce qu'ils racontaient. Lucy avait été restée très rêveuse jusqu'au départ de Dan au front, ce qui lui avait été brutal et fatal. Sa manière d'écrire avait alors subitement changé. Jamie semblait dire qu'il retrouvait beaucoup de l'infirmière en sa fiancée. Celle-ci le regardait d'un air interrogateur et perplexe. Elle haussa les épaules, ne voyant pas en quoi elle pouvait lui ressembler. A vrai dire, Joanne trouvait que Lucy était bien mieux qu'elle, en tout. L'infirmière semblait être d'une incroyable gentillesse, en toute circonstance. "C'est le genre de périodes où il n'y a pas de justice. Pas même pour ceux qui avaient toutes les raisons du monde de continuer à vivre." lui répondit-elle, tristement. Tout ce que l'ennemi voulait, c'était de détruire les points stratétigues, se fichant bien du nombre de victimes, à se demander combien de familles ils allaient détruire. C'était bien le cadet de leur soucis. Jamie en disait également un peu plus sur le soldat, qui se déchargeait dans ses écrits. Il y avait une étrange similitude entre ce couple et le leur, lorsque Lucy, comme Joanne, avait réussi à faire rêver l'être-aimé. Il y avait cette part de vérité entre Jamie et Joanne qui la troublait beaucoup. Une étrange coïncidence qui la fit sourire. Le bel Anglais sut parfaitement comment intriguer sa belle en disant qu'il savait comment les lettres avaient quitter Darwin. Le sourire de Joanne s'élargit à ces propos, intriguée bien comme il fallait. Le babyphone ne tarda pas à grésiller, laissant deviner qu'il y en avait un qui commençait à avoir faim. "Je n'en ai pas pour longtemps." dit-elle en tout bas avant de filer à l'étage d'un pas léger. Elle ouvrit la porte afin qu'il y ait suffisamment de lumière dans la pièce pour y voir clair, et sans brusquer les yeux du bébé. "Je suis là, mon trésor." dit-elle doucement en s'approchant du berceau. Daniel commençait peu à peu à agiter ses petits bras, cherchant le têton de sa mère. Il chouinait un petit peu. Joanne le prit dans ses bras, laissant sa tête s'appuyer cotre son épaule. Elle s'installa sur la chaise à bascule, abaissa la bretelle de sa robe et de son soutien-gorge pour que Daniel puisse se nourrir. Il n'avait aucun mal pour comprendre comment ça se passait. Pendant ce temps, Joanne lui caressait tendrement les cheveux. Au bout de quelques minutes, le nouveau né s'endormit au sein de sa mère. "Daniel..." dit-elle tout bas en lui caressant la joue du dos de ses doigts. Il suffisait de le stimuler un peu pour qu'il reprenne de plus belle. "Sinon tu auras de nouveau faim dans une demi-heure..." lui dit-elle tout bas, tout sourire. Quelques minutes plus tard, il semblait repu. Joanne se rhabilla et gardait son bébé tout contre elle, lui caressant le dos en attendant son rôt. "Je t'aime tellement, Daniel. Si tu savais combien je t'aime." lui dit-elle tout bas, alors qu'il s'endormait déjà sur son épaule. Elle le gardait encore quelques minutes dans ses bras en lui chantant une berceuse avant de le réallonger dans le lit, paisible. Joanne redescendit rapidement les escaliers et se réinstalla sur le canapé. "Il s'était endormi pendant qu'il mangeait." dit-elle à Jamie avec un petit rire.
Lucy et Dan méritaient de vivre plus que n'importe qui. Ils méritaient d'être heureux, de concrétiser leurs rêves. Leurs lettres et leurs journaux les avaient rendus si attachants, il est si simple de se sentir particulièrement proches d'eux. Ils sont peu à peu devenus comme des amis ou des membres éloignés de la famille dont le destin tragique nous touche et nous rappelle l'injustice dont fait parfois preuve le monde. Et à côté, il y a nous et notre récent bonheur, notre fils, notre petit miracle, son arrivée surprise, sa naissance inespérée. Nous avons tellement de chance, me dis-je. Nous avons tout pour nous. Nous ne devrions rien en gâcher. Pas une miette. « A ton avis, qu'est-ce qu'il y a eu après eux ? » je demande, pensif. Je prends une nouvelle crêpe du tas -il y en a bien assez pour qu'il en reste pour demain- et la couvre de confiture de fruits rouges. « Tu crois qu'il y a eu d'autres histoires entre eux et nous ? » Ces histoires d'autres vies me semblent si étranges parfois et sont capables de me mettre assez mal à l'aise. Les ressemblances, les coïncidences. Je ne peux pas m'empêcher d'y croire, c'est une si jolie fable, si réconfortante et agréable à se raconter à soi-même. Il y a seulement une partie de moi qui appréhende chaque découverte. Pourtant, tout ceci me rend follement curieux. Obsessionnel par moments. Je veux tout savoir de ces prétendus autre nous. Est-ce qu'il y en a des traces ailleurs ? Qui étaient-ils, à quelle époque vivaient-ils, étaient-ils eux aussi si proches de nous ? Est-ce qu'une histoire débute quand une autre prend fin, ou y a-t-il une autre logique, y a-t-il de ratés ? Suite à la mort des amants à la fin de la guerre, faut-il chercher des traces d'une autre de ces histoires quelque part dans les années soixante ? Seront-ils allés plus loin que les précédents ? Tant de questions peuvent faire chauffer mon cerveau comme une cocotte minute. Mais je dois savoir, j'ai besoin de savoir. Il est si facile et tentant pour quelqu'un comme moi, quelqu'un à qui l'on a volé autant son identité que sa personnalité, de se raccrocher à ces alter ego. Pour avoir des réponses, des indices. Les couinements de Daniel nous sortent de notre conversation. Joanne file à l'étage pour le nourrir pendant que je termine une nouvelle crêpe. Si cela ne tenait qu'à moi et ma gourmandise sans limites, je finirais toute la pile. J'attrape le baby phone et tends l'oreille pour entendre ce qu'il se passe dans la chambre du petit. J'écoute la jeune maman murmurer des mots d'amour à son petit bout avec un sourire attendri. Je ne me risque même pas à imaginer tout l'amour qu'elle doit lui porter. Ce petit être qu'elle pensait ne jamais pouvoir porter et avoir dans ses bras un jour. Silencieux, j'écoute également la petite berceuse qu'elle lui chante tendrement. Elle est déjà une maman parfaite. De retour, Joanne reprend sa place sur le canapé. Je ris un peu à l'idée que Dan ait pu s'endormir au sein de sa mère. « C'est fascinant de devenir parents, je trouve. » Il y a tellement de choses qui changent, tant de choses à penser. Au delà de la responsabilité que cela représente, c'est surtout un être humain à découvrir et voir grandir. « Je me demande quel sera son caractère, pour quelles choses il se passionnera, ce qu'il voudra faire dans la vie, ou encore quel sera le son de sa voix. Ce qu'il tiendra de toi, de moi, et ce qui lui sera propre, spontané. » Oui, vraiment fascinant. Il apprendra de nous, et nous apprendrons de lui. Si nous avons la chance de lui offrir des frères et des sœurs, nous auront aussi ce bonheur de les voir grandir ensemble. La maison deviendra finalement de plus en plus étroite. Il faudra faire pousser des murs, créer des chambres. « Nous devrions commencer à chercher la maison de campagne dont nous avions parlé, qu'en dis-tu ? » je demande à cette idée, me disant qu'il faudra en trouver une assez grande pour accueillir tous nos projets. Je m'approche de Joanne, toujours malicieux, et caresse doucement sa joue, son regard dans le mien. « A moins que tu ne préfères parler mariage ? » j'ajoute après un long baiser tendre. Maintenant que le bébé est là, c'est une étape qui peut, peut-être, enfin aboutir.