The only way out of labyrinth of suffering is forgiveness
So I remember when we were driving, driving in your car. The speed so fast, I felt like I was drunk. City lights lay out before us and your arm felt nice wrapped 'round my shoulder. And I had a feeling that I belonged. And I had a feeling I could be someone, be someone, be someone. Δ
Soren & Heidi
Ma dernière rencontre avec Soren n’avait pas cessé de tourner en boucle dans ma tête. Je passais mon temps à essayer de comprendre comment on en était arrivés là, tous : Cléo, Soren, Elio, Kaecy et moi. A quel moment les choses étaient-elles devenues si compliquées au point qu’aujourd’hui nous ne parvenions plus à nous entendre alors qu’autrefois nous étions si proches ? Etait-ce seulement la présence de Matteo au sein de notre cercle d’ami qui avait permis à tout ce petit monde de se supporter, de vivre ensemble ? Et ses liens qu’on avait tissés en sa présence ne valaient-ils plus rien maintenant qu’il n’était plus des nôtres ? Ces questions qui restaient sans réponses, m’empêchaient de dormir jours après jours, me donnaient mal à la tête. J’étais moi-même bien trop têtue pour parvenir à faire les efforts que j’aurai pourtant dû faire. Je ne parvenais pas totalement à pardonner Cléo, bien que j’avais accepté d’enterrer la hache de guerre pour pouvoir voir Cami et passer du temps en compagnie de ma nièce. Pourtant, mes relations avec la jeune femme restaient bancales. Il était clair que Cléo et moi avions constamment l’impression de marcher sur des œufs quand nous nous adressions à l’autre et puis que de toute évidence le problème de base restait inchangé : Matteo n’était plus là et je n’acceptais pas la relation que celle-ci entretenait avec Soren. Il en allait de même avec Soren, la plupart du temps quand que je passais voir Cami dans l’après-midi, je ne le croisais pas, pour mon plus grand soulagement. Mais les quelques fois où je l’avais vu, je m’étais contenté de lui dire bonjour avant de trouver n’importe quel prétexte pour pouvoir quitter leur maison à Redcliffe. J’étais fatiguée de toutes ses tensions mais je me sentais littéralement coincée : j'avais beau faire tous les efforts du monde, je ne parvenais pas à être contente pour Cléo et Soren et chaque fois que j’y pensais j’avais l’impression que mon cœur se serrait. Le mieux que je pouvais faire, c’était fermer les yeux et tenter de faire comme si de rien n’était et pour le moment cela fonctionnait. Mais j’avais bien conscience (nous en avions tous conscience) ce ne pouvait pas être une situation permanente, ce n’était qu’une solution provisoire et tôt ou tard les tensions resurgiraient.
Pourtant, malgré la rancœur, l’incompréhension, je souffrais ne de pas pouvoir parler avec Soren. Son amitié avait toujours beaucoup compté pour moi et même si suite à la cérémonie d’adieu à Matteo je n’avais pas pris de ses nouvelles parce que c’était trop douloureux, je n’avais pas pour autant renoncé à notre amitié de façon définitive. Ce n’était qu’une mesure d’éloignement temporaire, le temps que je cicatrise et que je puisse de nouveau faire face à tout ce qui se rapprochait de près à mon frère. Et depuis que j’avais appris leur relation, depuis que ma mère m’en avait fait part alors que j’étais encore à Adelaide en compagnie de Dean, c’était un sentiment de trahison qui prenait le pas sur tous les autres sentiments que je pouvais éprouver à l’égard de Soren. Mais suite à la dernière fois que je l’avais vu, je m’étais rendue compte à quel point son amitié pouvait me manquer. J’avais besoin de le savoir auprès de moi, à mes côtés, pour m’aider à passer au travers de toute cette misère. Le seul soucis était que je n’arrivais plus à délier les sentiments positifs et les sentiments négatifs à son égard. C’était comme si tout ceci n’était qu’une grosse pelote de laine complètement emmêlée et le peu de fois où j’avais tenté d’y voir clair, j’avais uniquement gagné un mal de crâne carabiné. Soren était une énigme et je ressentais beaucoup trop d’émotions contradictoires en même temps en sa présence. De la colère au point d’avoir envie de le frapper, un attachement certain qui m’aurait poussé à le serrer dans mes bras et lui faire promettre de ne plus jamais me laisser m’en aller comme je l’avais fait, un sentiment de trahison qui était cuisant et quelque chose qui s’apparentait à de la jalousie sans que je parvienne à lui trouver une source. C’était épuisant et l’idée de devoir faire face à tout ceci à nouveau avait détruit le peu de volonté que j’avais d’engager avec lui une véritable discussion où je ne ferais pas que lui crier dessus en plein milieu d’un couloir d’université.
J’avais passé une journée épuisante. Je continuais mon travail d’assistante auprès de Kaecy à temps partiel et à côté, je passais mon temps à courir les agences immobilières de Brisbane à la recherche de la perle rare qui deviendrait plus tard le local qui accueillerait mon magasin de prêt-à-porter. J’avais une idée claire et nette de ce que je voulais dans ma tête et c’était ce qui rendait les choses encore plus difficiles, tant j’étais exigeante. C’était le but de ma vie : il fallait donc qu’il soit parfait. Les visites étaient épuisantes, à piétiner comme ça toute la journée. J’étais rentrée une heure plus tôt, épuisée. Je m’étais aussitôt jetée sous la douche brûlante pour tenter de me relaxer. Et je venais tout juste de me mettre à faire la cuisine, dans un t-shirt à Matteo, trop grand pour moi, à l’effigie des Radio Head qui me servait actuellement de pyjama quand quelqu’un sonna à la porte. Je restais un instant perplexe : je n’attendais aucune visite. J’avais vu ma mère le matin même, Kaecy était débordée entre son boulot et les enfants de la sœur d’Elio en ce moment et il me semblait qu’Ezra et moi n’avions pas convenu de nous retrouver pour une de nos soirées film ce soir. Qui cela pouvait-il bien être ? Je me dirigeais vers la porte, la cuillère en bois qui me servait à faire la cuisine encore dans la main et ouvrais la porte. Et je découvrais Soren sur le pas de la porte, l’air à la fois amusé et désolé. « Est-ce que je peux dormir chez toi ce soir ? Je me suis… Disons qu’il vaut mieux que je ne rentre pas à la maison ce soir. » tenta-t-il de m’expliquer. Et avant qu’il ait pu ajouter quoique ce soit d’autre, je lui refermais la porte au nez. Mais bon sang ! Pour qui se prenait-il celui-là ? Il croyait qu’il pouvait filer le parfait amour avec Cléo, tout en sachant ma désapprobation et ensuite venir me trouver quand il se prenait la tête avec elle ? J’étais retournée m’occuper de la cuisine, quand Soren insista lourdement sur la sonnette de mon appartement. « Il n’est pas croyable » soupirais-je en retournant lui ouvrir la porte. « Entre. Par contre, je te préviens, tu dors sur le canapé. Qui n’est pas très confortable, je te préviens » lâchais-je finalement après l’avoir fixé quelques instants de mes yeux noisette alors qu’il entrait dans mon appartement. Aussitôt Lago, qui le connaissait bien, se précipita vers lui en aboyant joyeusement. « Ah, ça fait plaisir, y en a au moins un qui est content de me voir » ironisa-t-il ce qui, malgré tous mes efforts pour rester froide, me tira un sourire amusé. C’était sûrement ça qui m’agaçait le plus chez Soren : je ne parvenais pas à être fâchée contre lui très longtemps et il me connaissait trop pour savoir comment me faire rire. Etait-ce seulement normal qu’une part de moi ne puisse s’empêcher d’être réellement contente de voir Soren me rendre visite ce soir ?
Vingt-deux kilomètres. C’était exactement la distance qu’avait parcouru en courant Soren aujourd’hui, en cette journée où le soleil était encore assez chaud pour ne pas attraper la mort lors d’un footing de fin d’après-midi. Ca faisait longtemps qu’il n’avait pas eu l’occasion de courir aussi longtemps, de courir même une distance aussi grande. D’habitude, il devait rentrer tôt, avait des copies à corriger, s’occuper de Cami le temps que Cléo puisse elle aussi de son côté avoir du temps pour elle. Une vie bien remplie qui parfois pouvait donner le tournis tellement il était facile de s’y perdre et de ne plus relever la tête du guidon. Soren ne s’en plaignait pas en revanche, loin de la même. C’était tout à fait le genre de vie dont il avait pu rêver. De plus, il avait maintenant Cléo à ses côtés et c’était un élément qui pesait énormément sur la balance. Elle avait toujours, depuis le jour où il l’avait rencontré, une personne spéciale à ses yeux. Pas un coup de foudre, non, mais dès qu’il la voyait il avait ce petit picotement au coeur - bon ou mauvais, il n’avait jamais réellement su. Depuis qu’il partageait sa vie, ce petit picotement était devenu clairement quelque-chose de positif. Mais leur vie à trois n’était pas toujours quelque-chose de facile. Pour Soren de plus, vivre aux côtés de Cléo lui rappelait sans cesse quelque-chose qu’il n’arriverait jamais à oublier: ça aurait du être lui. Son meilleur ami aurait du vivre cette vie, pas lui. Il aurait du être là à la naissance de Cami, il aurait du être là pour la voir grandir. Il aurait dû être celui qui serait au chevet de Cléo pour la rassurer lorsque sa fille pleurait la nuit alors que tout semblait aller bien, quand elle se demandait si elle ferait les choses biens pour Cléo, lorsque le boulot lui prenait la tête. Soren vivait sans un doute dans la culpabilité. Même s’il aimait cette nouvelle vie qu’ils reconstruisaient avec Cléo, il ne pouvait s’empêcher de s’en vouloir en sachant qu’il était à la place de Matteo et que ce dernier était mort à la guerre. Et en ce moment même, assis sur un des bancs du vestiaire du gymnase, il ne pouvait s’empêcher d’y penser une fois de plus. Il n’était plus dans leurs vies et malheureusement il faudrait qu’il s’y habitue un jour ou l’autre. Et s’était d’ailleurs à cause de ça, une fois de plus, qu’il avait ressenti le besoin d’aller courir aujourd’hui. Ca, et une dispute assez secouante qu’il avait eu avec Cléo à midi, lors de la pause déjeuner. C’était rare de les voir réellement se secouer les plumes mutuellement sur un sujet où leurs avis divergeaient, mais cependant lorsque ça arrivait, Soren finissait souvent par préférer s’éloigner pendant quelques heures voire quelques jours s’il le devait pour laisser le temps et l’espace nécessaire à Cléo pour respirer. Car il n’était peut-être pas toujours à l’aise avec la situation, mais Cléo avait des remords de son côté aussi de partager le même lit que le meilleur de son fiancé décédé. Et ça, Soren le comprenait parfaitement. Il savait exactement, depuis le temps, à quel moment il fallait qu’il soit là et à quel moment il fallait qu’il se retire pour un temps pour laisser le temps réparer les choses. Ce soir là, il ne savait juste pas ce qu’il allait faire de sa peau. Cléo lui avait très clairement fait comprendre qu’il n’était pas le bienvenu pour rentrer chez eux ce soir, et qu’il ferait mieux de ne pas prendre ses envies à la légère. Il ne disait pas qu’il approuvait la jeune femme, mais il n’oserait pas la blesser et elle savait qu’il n’irait pas en sens contraire de ses envies. Soupirant, il finit par se lever pour aller prendre une douche tout en réfléchissant à l’endroit où il pourrait dormir le soir. C’était donc la raison pour laquelle il se trouvait devant la porte de l’appartement d’Heidi, peut-être une demi-heure après être sorti du gymnase. Il hésitait encore à frapper à sa porte, car leur dernières entrevue n’avait pas forcément était des meilleurs - il avait en tous cas vu mieux et de loin. Cependant, parmi tous les gens qu’il avait à Brisbane, c’était vers elle qu’il s’était vu se tourner en premier. Malgré tout ce qu’il avait pu se passer, il ne se voyait pas aller voir une autre personne qu’elle. D’accord, elle lui en voulait énormément pour des choses dont Soren ne devait même pas connaître l’existence, mais elle restait une des personnes en qui il avait le plus confiance. Et alors qu’il n’était pas au top de sa forme - une dispute avec Cléo avait toujours le don de mettre ses nerfs légèrement à bout -, il ne se voyait pas exposer ce ressenti à n’importe qui. Qu’importe ce qu’il pourrait se passer au fil du temps, en revanche, entre Heidi et lui, il savait qu’il se serait jamais dérangé de lui montrer ce qu’il pouvait réellement ressentir - même si ça le faisait passer pour un faible, comme certains pourraient dire. Après ce temps d’hésitation, Soren finit par appuyer sur la sonnette de l’entrée. Il resta debout devant la porte sans avoir de réponse pendant une bonne dizaine de secondes si ce n’était pas une vingtaine avant que la porte ne s’ouvre sur la jeune femme. Elle portait un tee-shirt que Soren ne put que reconnaître au premier coup d’oeil, pour l’avoir vu porté de nombreuses fois par Matteo. L’incompréhension de voir Soren sur le pas de sa porte se vit rapidement dans le regard d’Heidi et le jeune homme ne put s’empêcher d’avoir une réaction faciale entre la petit moue et le sourire amusé. « Est-ce que je peux dormir chez toi ce soir ? Je me suis… Disons qu’il vaut mieux que je ne rentre pas à la maison ce soir. » Il jouait franc-jeu avec elle. Il savait que s’il ne voulait pas dormir dans sa voiture ce soir - ou alors s’il ne voulait pas arriver la queue entre les jambes chez son frère ou sa soeur comme un malheureux -, il fallait qu’il soit aussi franc que possible pour que Heidi cède à sa demande. C’était, il pensait, la façon la plus évidante pour qu’Heidi craque. Chose qui n’arriva pas directement malheureusement, Soren se voyant se faire claquer la porte au nez. Il soupira par la suite, espérant qu’elle venait de faire ça sur le coup de l’étonnement et du passage à l’improviste de Soren et non parce-qu’elle ne voulait réellement pas le voir. « Aller Heidi, s’il te plait… » Il parlait tout seul à voix basse dans le couloir, appuyant de nombreuses fois désormais, à la suite, sur la sonnette. Il savait qu’elle était présente dans l’appartement et mettait du temps à répondre uniquement pour l’emmerder. De plus, il avait clairement senti les odeurs émanant de la cuisine, ce qui voulait dire qu’il ne l’avait pas réveillé ou réellement dérangé. Elle céda finalement et vint lui rouvrir la porte - être chiant avait parfois des avantages, ne put s’empêcher de penser Soren. « Entre. Par contre, je te préviens, tu dors sur le canapé. Qui n’est pas très confortable, je te préviens » Grand sourire aux lèvres, Soren ne se fit pas prier plus longtemps et entra dans l’appartement de la jeune femme. Il eut à peine le temps de faire en sorte qu’elle puisse fermer la porte que Lago vint lui sauter dessus de suite. Ce qui fit grandement sourire le jeune homme. « Ah, ça fait plaisir, y en a au moins un qui est content de me voir. » Il finit par s’accroupir devant le chien pour pouvoir le caresser correctement. Après quelques secondes à s’occuper de lui, il se tourna vers Heidi, voyant qu’elle souriait. Ce n’était pas un de ces sourires les plus francs qu’il ait vu, mais c’était toujours ça. Il ne put s’empêcher d’avoir une tête amusée à son tour. « On me ferme la prote au nez maintenant, alors ? » Il savait qu’il s’aventurait sur un terrain dangereux en engageant la conversation de cette manière, mais maintenant qu’il était à l’intérieur de l’appartement, elle n’aurait pas assez de force pour le faire sortir de force, il était donc tranquille. Il savait aussi que c’était un sujet délicat car la dernière fois qu’ils avaient tenté d’avoir une discussion, Heidi avait été plutôt bien remontée contre lui, ce qui avait au passage bien blessé Soren. Il savait qu’elle avait gardé des choses pour elle depuis les deux dernières années écoulées, mais ce qu’elle lui avait avoué la dernière fois avait été au delà de ce que pouvait avoir pensé Soren. Le jeune homme finit par se relever pour enlever sa veste et venir s’asseoir sur le canapé.
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Soren & Heidi
En voyant ainsi Soren entrer dans mon appartement et se faire littéralement sauter dessus par mon chien, je comprenais soudainement pourquoi j’avais tant redouté de le rencontrer depuis mon retour à Brisbane. Voir mon chien si enthousiaste à l’idée de retrouver un visage connu me rappelait aussitôt toutes ses années que j’avais passé aux côtés de Soren, tous ses souvenirs partagés que j’entassais et que je tentais de refouler tant bien que mal. Soren n’était pas juste devenu un ami pendant toutes ses années, mais peu à peu il était devenu une partie de moi, tout comme l’étaient devenus Kaecy et Elio avant lui. Je ne pouvais pas juste arrêter de lui parler pour que cela règle le problème, parce que je savais que si je renonçais pour de bon à mon amitié avec Soren sans même tenter de lui donner une chance, de nous donner une chance, c’était au fond une partie de moi qui j’allais perdre avec. Je ne pouvais pas juste tirer un trait sur Soren pour espérer qu’il sorte de ma vie, surtout maintenant que j’étais à Brisbane. Pendant mon année à Adelaide, loin de tout ce qui se rattachait de près ou de loin à Matteo, j’avais essayé de croire que je n’avais qu’à couper le cordon pour que Soren arrête de me manquer, pour que j’arrête d’avoir besoin de lui dans ma vie. Mais ça n’avait pas marché. Ca n’aurait jamais pu marcher. Lorsque j’y pensais, j’avais tellement de souvenirs, bons comme mauvais, rattachés à Soren que j’en avais la tête qui tournait, sachant que j’avais dû en oublier plus de la moitié. Je levais doucement les yeux, en le regardant caresser un instant mon chien, alors qu’il se plaignait de mon manque d’enthousiasme à son égard et je me contentais de sourire en retour. Ca n’avait rien du sourire étincelant que je pouvais parfois arborer, parce que non seulement, je n’avais pas eu l’occasion de le faire depuis longtemps, à tel point que je n’étais même pas encore sûre de savoir comme je faisais à l’époque, mais également parce que je ne voulais pas laisser à Soren la satisfaction de gagner tout de suite ce bras de fer que j’avais entreprit à l’université l’autre jour. Appelez ça orgueil ou entêtement, de toute façon, Soren me connaissait suffisamment pour ne pas en être étonné plus que de mesure. Parce qu’au final, c’était ça le plus difficile, savoir que j’aurai pu retrouver tout ce qui me manquait avant, d’un simple claquement de doigts, avoir de nouveau droit au confort de savoir Soren à mes côtés, prêt à me soutenir, peu importe mes convictions et mes motivations mais également peu importe l’issue et mon état d’esprit, mon humeur. Mon amitié avec le jeune homme avec un confort que je n’avais presque jamais connu, sauf peut-être avec Chase, mais je ne me sentais obligée d’être quelqu’un d’autre que moi-même. Je ne me sentais pas emprisonnée dans une version de moi que je n’étais pas nécessairement, ou tout simplement plus. C’était par exemple là que se situait une des faiblesses de ma relation avec Elio : il ne se faisait pas à l’idée que j’avais pu changer, que si je restais pourtant bien Heidi, je ne réagissais plus nécessairement de la même façon que je l’aurai fait il y a cinq ans. Soren lui, semblait se contreficher de tout ceci, il semblait qu’il connaissait suffisamment la Heidi que j’étais tout au fond de moi pour ne jamais être surpris. Il m’acceptait dans toute mon imperfection et c’était ce que j’appréciais le plus dans sa compagnie.
« On me ferme la porte au nez maintenant, alors ? » dit-il en me regardant. Je souriais en coin tout en le regardant d’un air mi amusé, mi sérieux. « L’idée de t’écouter me supplier de bien vouloir te laisser entrer était bien trop tentante. » répliquais-je alors du tac au tac. J’avais de toute façon toujours agit de la sorte, sous mes airs de jeune fille sage se cachait quelqu’un qui appréciait particulièrement de taquiner ses amis, spécialement ceux que je connais sur le bout des doigts et qui avaient un minimum de répondant, ce qui était le cas de Soren. En répliquant de la sorte j’indiquais aussi de façon détournée à Soren que si je l’avais laissé entrer ce n’était pas pour que nous nous prenions la tête. J’étais fatiguée, lessivée de toutes ses tensions, de tous ses non-dits et ses rancœurs qui circulaient au sein de notre petit groupe. Je ne voulais pas clore le débat, parce qu’il était évident que nous avions tous les deux besoin d’avoir une discussion, mais je voulais que ce soit une discussion d’adultes responsables, une discussion calme où nous pourrions librement exposer nos points de vue, vider nos sacs et enfin crever l’abcès. Finalement, Soren se redressait laissant Lago vaquer à ses occupations et allait s’installer sur le canapé comme si c’était chez lui. Je le regardais faire, sans rien dire, retournant ensuite rapidement dans la cuisine pour aller chercher deux bouteilles de bières que je rapportais décapsulées. Je prenais place sur le canapé de mon petit salon aux côtés de Soren lui tendant une bouteille. « Je suppose que tu n’as pas mangé ? J’ai prévu des spaghetti bolognaise » lui demandais-je en le regardant. « Au fait, je ne compte pas changer de tenue, je suis consciente que je ne suis pas vraiment sur mon trente-et-un, mais il faut dire que je n’attendais pas vraiment de la visite. Et puis, cela dit, il n’y a rien que tu n’aies déjà vu. » ajoutais-je dans un demi sourire, comme amusée par ce que je venais de dire. « Ecoute, faisons une trêve d’accord ? Ce soir, on essaye d’agir en personnes civilisées, enfin surtout moi. Je suis lasse de tout ceci et je crois que j’ai besoin d’une soirée calme, comme avant. Parce que même si ça me tue littéralement de te l’avouer, tu me manques. Alors faisons une trêve ce soir, et demain je serais encore libre de t’envoyer sur les roses si jamais je me lève du pied gauche. J’ai bien envie de parler ce soir. » Et je venais doucement poser ma tête sur l’épaule de Soren avant de porter la bouteille de bière à mes lèvres, en écoutant ce qu’il avait à me répondre.
A la suite de sa question, Heidi ne put s’empêcher d’avoir un petit sourire, ce qui fit sourire Soren à son tour. « L’idée de t’écouter me supplier de bien vouloir te laisser entrer était bien trop tentante. » Soren leva alors les yeux au ciel. S’il ne savait pas se retenir pour agir en adulte, il aurait sûrement tiré la langue à Heidi, mais comme à la maison Cléo tentait de faire en sorte qu’il ne prenne pas trop cette habitude pour ne pas que Cami l’imite lorsqu’elle serait en âge de faire des mimiques à son tour, il se contenait. « Très drôle, Heidi. » Il ne perdait cependant pas son petit sourire et finit par aller s’installer dans le canapé, comme s’il était chez lui - ce qui était un peu le cas du point de vue de Soren. Il avait toujours été très à l’aise avec Heidi, et malgré qu’il sache qu’elle lui en veule pour pas mal de choses et malgré le temps qui avait passé depuis leur dernière vraie rencontre - celle à l’université étant une rencontre à part -, il n’avait pas perdu ses habitudes. Il avait toujours été lui même avec elle, n’ayant rien à lui cacher. C’était peut-être d’ailleurs l’une des rares personnes avec qui il ne portait pas de masques de temps à autres. S’il était mal, ça ne le dérangeait pas de l’être si Heidi était dans les parages. S’il était heureux, il partagerait sa joie avec elle aussi. Il vit d’ailleurs la jeune femme partir dans la cuisine, et il commença à observer l’appartement. C’était la première fois qu’il venait ici depuis qu’elle était de retour à Brisbane. « Sympa l’appartement, au fait. T’as pas eu trop de difficultés pour le trouver ? » Le marché de l’immobilier pouvait parfois se donner envie de s’arracher les cheveux lorsqu’il s’agissait de se trouver un toit. De plus en plus de personnes venaient s’installer en ville et parfois un appartement pouvait devenir un terrain de guerre entre plusieurs potentiels futurs locataires. Soren n’avait pas eu ce soucis depuis des années, vu qu’il avait toujours gardé le même appartement qu’il avait loué depuis qu’il était à l’université, avant d’emménager dans celui de Cléo quelques mois auparavant. Heidi revint de la cuisine avec deux bières et vint s’asseoir à ses côtés sur le canapé, lui tendant une boisson. « Je suppose que tu n’as pas mangé ? J’ai prévu des spaghetti bolognaise » Soren eut un petit sourire. « Je n’ai pas mangé non et je t’avoue avoir plutôt pas mal faim, je reviens d’aller courir, mon estomac est donc à sec ! Et ce menu me convient parfaitement, je n’aurai pas su faire mieux dans tous les cas. » Les deux jeunes gens trinquèrent et Soren but une gorgée de bière. Elle était fraiche et elle faisait du bien, surtout après la course qu’il avait enchainé avant de venir. « Au fait, je ne compte pas changer de tenue, je suis consciente que je ne suis pas vraiment sur mon trente-et-un, mais il faut dire que je n’attendais pas vraiment de la visite. Et puis, cela dit, il n’y a rien que tu n’aies déjà vu. » Heidi eut un demi-sourire, Soren lui eut un grand sourire franc. Il aimait cette façon qu’avait Heidi d’être très naturelle et très franche, c’était surement pour ça que leur amitié fonctionnait si bien. Il n’avait d’ailleurs pas réellement fait attention à la tenue qu’elle portait jusqu’à maintenant, et le simple t-shirt - qu’il supposait être à son frère vu la taille et les inscriptions qu’il portait - lui sciait plutôt bien. « Je ne m’en plaindrais pas, promis. Je n’ai pas de quoi de toutes façons. Et puis oui, ce n’est plus une tenue légère qui pourrait me choquer, portée par toi. » Leur amitié avait toujours eu quelque-chose de spéciale, il ne pouvait le nier, et cette nuit là où ils avaient cédé à la tentation de la chair n’avait fait que les rapprocher d’avantage. Là où une histoire de sexe brisantes liens forts, ça n’avait fait que resserrer les leurs. Soren en était d’ailleurs heureux, car si ça n’avait pas été le cas, à l’époque, Matteo comme Cléo se seraient aperçus de quelque-chose et il est probable que ces derniers eut fait un scandale à Soren. Matteo lui aurait probablement cassé toutes ses dents par la même occasion. Un petit silence accompagna les deux jeunes gens pendant quelques secondes avant qu’Heidi ne reprenne la parole. L’avantage aussi avec Heidi, c’était que même les silences avec elle n’ennuyaient pas Soren. « Ecoute, faisons une trêve d’accord ? Ce soir, on essaye d’agir en personnes civilisées, enfin surtout moi. Je suis lasse de tout ceci et je crois que j’ai besoin d’une soirée calme, comme avant. Parce que même si ça me tue littéralement de te l’avouer, tu me manques. Alors faisons une trêve ce soir, et demain je serais encore libre de t’envoyer sur les roses si jamais je me lève du pied gauche. J’ai bien envie de parler ce soir. » Et la jeune femme vint poser sa tête sur l’épaule de Soren. Dans cette position, elle ne pouvait plus voir les expressions que produisait le visage du jeune homme. Elle ne put donc pas voir ce sourire à la fois attendri et soulagé qu’eut Soren. Il vint par la suite poser sa propre tête sur celle d’Heidi, délicatement. Etre proche d’elle lui avait manqué aussi, mais il ne l’avouerait pas, il était bien trop pudique sur ses sentiments pour faire une chose pareille. « L’idée de me faire envoyer sur les roses demain ne m’enchante pas forcément, mais si ça me garantit la paix pour ce soir, ça me va. Et je pense qu’on a bien besoin de parler effectivement. » Il vint prendre une nouvelle gorgée de bière, tentant de ne pas s’en mettre partout en buvant la tête un peu de travers - même si l’idée d’en renverser plus ou moins malencontreusement sur Heidi était quelque-chose d’alléchant, il savait qu’il allait se faire jeter s’il faisait ça. Il décida de lancer une conversation sérieuse en contrepartie pour respecter l’accord qu’il venait de passer avec la jeune femme. « Je commence alors, et promets moi de pas me taper parce-que j’aurai parlé de ça. Dean ? » Il n’ajouta rien d’autre à sa question, il savait très bien qu’Heidi comprendrait.
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Soren & Heidi
« Sympa l’appartement, au fait. T’as pas eu trop de difficultés pour le trouver ? » me demanda Soren alors que j’étais encore dans la cuisine, pour ramener deux bouteilles de bière. « J’suis retournée habiter chez ma mère pendant deux semaines avant de trouver cet appartement. C’était un des derniers encore disponible et pas trop trop en mauvais état. Mais tu l’aurais vu au départ, il avait loin d’avoir ce cachet » J’avais en effet passé plusieurs jours d’affilés (et de nuits aussi) à tenter de remettre cet appart d’aplomb. La peinture était écaillée dans la majorité des pièces, il y avait une fuite d’eau dans la salle de bain et la cuisine était tout sauf fonctionnelle. « Ca m’a coûté pas mal d’argent de remettre tout ça au goût du jour, mais maintenant il est vraiment parfait et je pourrais le revendre pour le double du prix auquel je l’ai acheté, ce qui n’est pas si mal. » En effet, même si j’adorais cet appartement, je me doutais bien que je ne passerai pas toute ma vie ici et que tôt ou tard il allait falloir que je m’en sépare. A cause de mon bureau, qui était absolument indispensable, je n’avais qu’une chambre ici. Si jamais un jour je venais à avoir des enfants, nous nous marcherions dessus ici. Lorsque je revenais dans le salon, où je m’installais sur le canapé aux côtés de Soren lui tendant une bouteille, j’évoquais ce que j’avais prévu de faire à manger pour ce soir. « Je n’ai pas mangé non et je t’avoue avoir plutôt pas mal faim, je reviens d’aller courir, mon estomac est donc à sec ! Et ce menu me convient parfaitement, je n’aurai pas su faire mieux dans tous les cas. » « C’est vrai que j’ai toujours été meilleur cordon bleu que toi » lui glissais-je avec un petit sourire amusé alors que nous trinquions. C’est alors que je mettais sur le tapis le fait que je n’étais que très peu vêtue et que concrètement, je ne comptais pas changer de tenue de sitôt. « Je ne m’en plaindrais pas, promis. Je n’ai pas de quoi de toute façon. Et puis oui, ce n’est plus une tenue légère qui pourrait me choquer, portée par toi. » La réponse de Soren me tira un sourire amusé une fois de plus alors que je buvais une gorgée de ma bière. Je m’étais toujours sentie extrêmement proche et à l’aise ne présence de Soren et le fait que nous ayons couché ensemble une fois par le passé, ne faisait que renforcer ce sentiment. Etrangement, après ça, notre amitié ne s’en était pas retrouvée perturbée. Et puis rapidement de toute façon, j’avais rencontré Dean pour me mettre avec lui.
Alors que mes pensées suivaient leur cours, je finissais par me rendre à une évidence : je n’avais pas envie de me disputer avec Soren, je voulais retrouver notre complicité d’antan. Et je lui en faisais aussitôt part. « L’idée de me faire envoyer sur les roses demain ne m’enchante pas forcément, mais si ça me garantit la paix pour ce soir, ça me va. Et je pense qu’on a bien besoin de parler effectivement. » me répondit-il. « Rien ne garantit que tu te feras envoyer sur les roses demains. Peut-être que je ne te laisserai tout bonnement pas quitter cet appartement » plaisantais-je. « Je commence alors, et promets-moi de pas me taper parce-que j’aurai parlé de ça. Dean ? » Soren attaquait directement avec la question la plus compliquée. La question dont moi-même je n’étais pas sûre de connaître les réponses. Dès que j’évoquais Dean mon cœur se serrait, sans que je puisse réellement comprendre pourquoi puisqu’en dehors de ça, il ne me manquait pas réellement. « Il est à Adelaide, certainement en train de jouer aux fléchettes avec ma tête comme cible. Imagine la pire façon de quitter quelqu’un. Eh bien c’était encore pire. » répondis-je sombrement. Puis je mettais un peu de temps avant de poursuivre, cherchant comment exprimer ce que je ressentais clairement. « Je l’aimais. Enfin je crois. Tu vois, c’est ça le cœur du problème, c’est que bien sûr je tiens à lui, mais je ne suis pas sûre que ça soit pour les bonnes raisons. Et si je tenais à lui uniquement pour le confort que représentait une vie à ses côtés ? Et si je l’aimais encore uniquement parce que notre histoire durait depuis plus de 8 ans ? » Clairement, mes sentiments à l’égard de mon ex fiancé étaient encore bien nébuleux pour moi. « Tu sais, la mort de Matteo a cassé quelque chose en moi. Et sans réellement m’en rendre compte je me suis éloignée de lui. J’arrivais pas à parler de Matteo avec lui, pas plus qu’avec vous autres. Et je me dis que je suis folle, parce que Dean est parfait. Ca aurait fait un mari formidable, un père extraordinaire. Tout se passait bien entre nous. » D’aussi loin que je pouvais me souvenir, Dean et moi avions eu très très peu de grosses disputes et en général elles se terminaient toutes assez vite. Nous étions véritablement un couple heureux et solide. « Mais je ne suis pas parfaite, et je n’ai pas envie de l’être. J’ai pas envie de faire croire au monde que je suis parfaite et que je mérite parfaitement mon fiancé parfait. Je veux être moi, dans toute mon imperfection. Je veux une vie imparfaite, mais qui me ressemble. » Ce qui manquait clairement dans mon couple avec Dean était de la passion. Avec le temps, notre amour de jeunes adultes s’était transformé en tendresse. Aujourd’hui, je savais que j’avais besoin d’une relation plus forte que ça, peut-être plus douloureuse mais qui me permettait de me sentir vivante. Je voulais me disputer violemment avec celui que j’aimais, pour me réconcilier sur l’oreiller jusqu’au bout de la nuit. « Je me suis réveillée un jour et c’était comme si j’étouffais. Je ne me reconnaissais ni dans ma vie, ni dans celle que j’étais devenue. Alors je me suis levée, j’ai pris Lago, la voiture et je suis partie. En le laissant sur le pas de la porte, avec pour seule explication un : je suis désolée. Qui fait ça ? » Quand j’y songeais aujourd’hui, j’étais morte de honte à la façon dont j’avais traité Dean. « J’ai mis trois semaines avant de répondre à ses appels. Et je lui ai dit que j’avais besoin de réfléchir. » Au fur et à mesure que je parlais, ma voix devenait de plus en plus boudeuse, comme si je prenais peu à peu conscience du monstre que je pouvais être. « Et concrètement, ça fait 6 mois que je réfléchis. » Je buvais une gorgée de bière, comme si cela allait m’aider à oublier toute cette histoire sordide. « Et toi, Cléo ? »
Soren savait qu’il n’y avait pas été de main morte en parlant de Dean directement. Mais, secrètement, il était curieux de savoir pourquoi Heidi avait mis fin à cette relation. Aussi loin qu’il puisse s’en souvenir, elle avait toujours eu l’air heureux avec lui, il semblait être l’homme fait pour elle, celui qui prenait soin d’elle. Et du jour au lendemain, Soren apprenait qu’elle était de retour en ville, et seule. Il ne cacherait pas que ça l’avait grandement étonné. « Il est à Adelaide, certainement en train de jouer aux fléchettes avec ma tête comme cible. Imagine la pire façon de quitter quelqu’un. Eh bien c’était encore pire. » Il savait qu’Heidi avait du ctère, sans aucune doute, mais il ne s’était jamais réellement douté qu’elle pouvait faire du mal à quelqu’un. Psychologiquement. Et puis, le petit silence qu’elle laissa planer avant de continuer laissait le temps à Soren de s’imaginer la pire façon dont on pouvait quitter quelqu’un. Et indéniablement, il ne pouvait s’empêcher de repenser à Callie. Cette façon dont elle l’avait quitté, lui aussi, des années auparavant. Ce n’était pas un moment qu’il aimait particulièrement se souvenir, mais la façon dont Heidi venait de décrire la façon dont elle avait quitté Dean lui faisait énormément écho. De son côté, il n'avait jamais compris pourquoi Callie l’avait quitté, puisqu’elle ne lui avait jamais donné de réelles explications. Ni d’explications tout court. Soren en avait longtemps souffert, et même aujourd’hui il pouvait sentir son coeur légèrement se serrer à penser à elle. Comme quoi, qu’importe le temps qui peut passer, certaines personnes marquent vos vies pour toujours. « Je l’aimais. Enfin je crois. Tu vois, c’est ça le cœur du problème, c’est que bien sûr je tiens à lui, mais je ne suis pas sûre que ça soit pour les bonnes raisons. Et si je tenais à lui uniquement pour le confort que représentait une vie à ses côtés ? Et si je l’aimais encore uniquement parce que notre histoire durait depuis plus de 8 ans ? Tu sais, la mort de Matteo a cassé quelque chose en moi. Et sans réellement m’en rendre compte je me suis éloignée de lui. J’arrivais pas à parler de Matteo avec lui, pas plus qu’avec vous autres. Et je me dis que je suis folle, parce que Dean est parfait. Ca aurait fait un mari formidable, un père extraordinaire. Tout se passait bien entre nous. » « La mort de ton frère a cassé quelque-chose en nous tous, c’est sûr oui… » Il pensait plus à Cléo qu’à lui même, en disant ça. Bien sûr qu’il avait été énormément affecté par cette perte, mais dès qu’il repensait à la mort de Matteo, c’était le visage de Cléo couvert de larmes à l’enterrement qu’il revoyait. A ce moment aussi où il l’avait trouvé effondrée sous le porche de chez eux, comme si elle avait cessée à son tour de vivre. « Mais il est vrai que parfois, même quand tout le reste dans notre vie semble parfait, ça ne suffit plus. Cette partie là, je comprends plus que bien, crois moi. » Un léger soupire s’échappa des lèvres du jeunes hommes. Il était content que dans leur position, Heidi ne puisse pas voir son visage. Il ne voulait pas qu’elle y voit la tristesse qui avait emprunt le jeune homme en ce moment. Il voulait, étrangement, que personne ne le voit souffrir de nouveau à cause de la perte de Matteo et tous les changements que cette dernière avait entraîné. Il voulait que les gens voient en lui un homme qui avait su se relever et affronter les épreuves. Comme l’homme solide qui avait permis à Cléo d’aller mieux et d’avancer. Même s’il savait qu’au fond, ce n’était qu’un mensonge, un bon gros mensonge. Jamais il ne pourrait se remettre de cette mort, et de voir Cami, la fille de Matteo, tous les jours, de la prendre dans ses bras et de l’élever, ça n’arrangerait rien à sa culpabilité. La voix d’Heidi, heureusement, le sorti de ses pensées. « Mais je ne suis pas parfaite, et je n’ai pas envie de l’être. J’ai pas envie de faire croire au monde que je suis parfaite et que je mérite parfaitement mon fiancé parfait. Je veux être moi, dans toute mon imperfection. Je veux une vie imparfaite, mais qui me ressemble. Je me suis réveillée un jour et c’était comme si j’étouffais. Je ne me reconnaissais ni dans ma vie, ni dans celle que j’étais devenue. Alors je me suis levée, j’ai pris Lago, la voiture et je suis partie. En le laissant sur le pas de la porte, avec pour seule explication un : je suis désolée. Qui fait ça ? » Les paroles d’Heidi avaient laissé Soren sans mots. Et elles l’avaient touché, surtout. Dans chaque mot que venait de dire la jeune femme, il avait l’impression de se retrouver. Et ça lui faisait peur à quel point c’était le cas. Parfois, il se réveillait lui aussi le matin en ayant l’impression de ne pas se reconnaître dans sa vie. Il avait l’impression de se réveiller en plein rêve, comme si rien n’était vrai autour de lui. Parfois, il avait aussi l’impression que lorsqu’il regardait là, Cléo assise sur le canapé avec Cami, qu’il n’était qu’un simple spectateur de sa propre vie. Comme si parfois, le temps lui coulait entre les doigts et qu’il ne gérait plus trop ce qui l’entourait. C’était horrible, comme sensation, et il ne savait pour la plupart de ces moments que faire. « Tu… N’es pas la seule à avoir fait ça, crois moi, je sais de quoi je parle. » Là, il était question de Callie, une fois de plus. Et une fois de plus, les paroles de la jeune femme faisaient écho à la vie de Soren. Comme si elle était en train de lui raconter l’histoire de sa vie. Le monde était petit, il tentait de se dire. « J’ai mis trois semaines avant de répondre à ses appels. Et je lui ai dit que j’avais besoin de réfléchir. Et concrètement, ça fait 6 mois que je réfléchis. » La dernière phrase d’Heidi eut cette fois ci le don de tirer un petit rire de Soren. Pas très prononcé, mais un rire quand même. « On peut dire que tu prends ton temps. Et tu sais ce que tu veux faire maintenant, après six mois ? » Ils avaient promis d’avoir de vraies discussions ce soir, de parler en adultes, alors Soren se permettait de poser les questions qui lui passaient par la tête sans aucune gêne. Heidi finit par boire une gorgée de bière, et Soren en fit de même. Un petit silence régna entre eux pendant un instant, comme s’ils étaient plongés dans leurs pensées. « Et toi, Cléo ? » Il ne pouvait pas lui en vouloir de poser cette question. Après tout, c’était lui qui avait lancé les hostilités en parlant directement de Dean. Et lorsqu’il entendit le prénom de sa belle prononcé par Heidi, il trouva tout de même ça bizarre. Elles avaient beau toujours être belles-soeurs, en quelques sortes, il savait que leur relation s’était dégradé depuis qu’il avait apparition dans le décor. Il savait qu’Heidi en voulait toujours à Cléo d’avoir choisi de tomber dans ses bras alors que son frère, son fiancée à elle, était mort. Soren vint alors déloger délicatement la tête d’Heidi, qui était toujours posé sur son épaule, pour venir poser ses coudes sur ses genoux, finissant par croiser les mains. Il soupira. Par quoi commencer ? C’était une question courte, explicite, et pourtant la réponse ne semblait pas être aussi simple. « Cléo… Qui l’eut cru que j'allais parler de ma relation avec elle, avec toi ? » Il tentait de faire un peu d’humour pour se rassurer, mais ça ne fonctionna pas réellement. Il ne savait pas pourquoi, mais devoir parler de Cléo, ça le stressait. Surement parce-qu'il n’en avait pas l’habitude, la plupart des gens ne connaissaient pas leur histoire au complet, se contentant de les voir comme un couple, et ça allait très bien à Soren. Mais ici, avec Heidi, c’était différent. Elle était au courant de tout, elle. « C’est… Bizarre ? Je ne sais pas. Je l’aime, mais ça c’est pas nouveau. Mais… Ouais, c’est bizarre. Parfois, j’ai tellement l’impression que je suis pas à ma place à ses côtés. Et puis, l’instant d’après, quand elle me regarde, tous mes soucis partent en fumée. Elle a un super-pouvoir sur moi, je crois. Et ça me fait peur tu sais. » Soren releva son regard vers Heidi, un petit sourire résigné sur le visage. « J’ai peur qu’un jour elle se réveille et qu’elle comprenne qu’elle n’a plus besoin de moi, qu’elle est guérie, en quelques sortes. Qu’elle a fait le deuil… Et que je n’étais qu’un moyen d’y parvenir. » Il baissa la regard de nouveau. C’était la première fois qu’il parlait de toutes ces choses là à voix haute, et il se sentait bizarre de le faire. D’un côté, il avait l’impression de trahir Cléo que d’en parler à Heidi, car il n’avait jamais osé parler de ses ressentis à la jeune femme. Malgré le nombre de fois où elle lui ait demandé de le faire, de dire ce qu’il avait sur le coeur, il ne pouvait s’y résigner. Parce-que parler de ce qu’il avait sur le coeur, c’était tout ramener à Matteo. Et ils ne faisaient pas ça, ils ne faisaient plus ça en tous cas. Quand ils l’évoquaient, c’était parce-qu’ils parlaient de Cami la plus grande partie du temps. Mais depuis qu’ils étaient ensemble, c’était comme si par moment le prénom de Matteo était devenu tabou. Et ça faisait du mal à Soren, mais il avait l’impression que s’il voulait que leur couple marche, c'était ainsi qu’ils devaient se comporter. Et ça lui faisait d’autant plus mal car il avait l’impression de trahir deux fois plus Matteo dans ces moments là.
The only way out of labyrinth of suffering is forgiveness
So I remember when we were driving, driving in your car. The speed so fast, I felt like I was drunk. City lights lay out before us and your arm felt nice wrapped 'round my shoulder. And I had a feeling that I belonged. And I had a feeling I could be someone, be someone, be someone. Δ
Soren & Heidi
« La mort de ton frère a cassé quelque-chose en nous tous, c’est sûr oui… » ajoutait Soren, à ce que je venais de dire. J’haussais les épaules, dans un petit soupir. « C’est certain, mais vous ne saccagez pas votre vie suite à sa disparition pour autant » C’était clairement la façon dont je voyais les choses : je m’étais tirée une balle dans le pied en quittant Dean de cette façon. Je savais que rester avec lui en ce moment ne valait rien de bon, que ce soit pour lui ou pour moi. Il fallait avant tout que je m’occupe de mes démons intérieurs, que je prenne du temps pour moi, pour savoir qui j’étais et ce que je voulais et Dean ne pouvait pas m’accompagner pendant cette épreuve. Il fallait que lui mène sa vie de son côté pendant que je réglais mes comptes avec mon passé à Brisbane. En revanche, la façon dont j’avais mis fin à notre relation me laissait très peu de chances de le retrouver un jour si je parvenais à remettre de l’ordre dans ma vie. J’avais anéanti tout espoir de réel bonheur en le quittant de la sorte et j’étais condamnée à rester seule le reste de ma vie. C’était du moins la façon dont j’envisageais mon avenir à présent. « Mais il est vrai que parfois, même quand tout le reste dans notre vie semble parfait, ça ne suffit plus. Cette partie là, je comprends plus que bien, crois moi. » Je laissais un petit silence s’installer entre nous le temps de quelques secondes. « Sauf que je suis seule maintenant. Seule au monde. » Et alors que je sentais Soren prêt à rebondir sur ce que je venais de dire je l’interrompais aussitôt. « Non. Ne dis pas ce que tu t’apprêtes à dire parce que c’est faux. Certes, je ne suis pas seule seule à proprement parler. Mais je suis seule dans les faits. Toi, depuis que Matteo est mort tu as Cléo, Kaecy a toujours eu Elio. Moi, j’ai mon chien. » Je savais pertinemment que je n’étais pas seule au monde, Kaecy serait toujours là à mes côtés, comme Soren le serait toujours. Mais ce n’était pas de cette façon que je parlais. J’avais pris conscience en revenant à Brisbane que la seule personne qui aurait été capable d’abandonner tout le monde pour moi, la seule personne capable de se sacrifier littéralement pour moi n’était autre que celle que j’avais abandonné à Adelaide. Si Soren était là en cas de problème, il ne faisait aucun doute que le jour où il faudrait choisir entre Cléo et moi, je ne serais pas sa priorité et je ne pouvais pas lui en vouloir, je comprenais parfaitement ça. Je ne disais pas tout ça à Soren pour me faire plaindre ou l’entendre me dire qu’il tenait à moi parce que je le savais déjà, je lui disais uniquement parce que c’était la réalité et que nous étions actuellement en train de parler sérieusement de ce que nous ressentions et c’était exactement ce que je ressentais. Puis peu à peu, je continuais de parler de Dean, de la façon abominable dont je l’avais quitté. « Tu… N’es pas la seule à avoir fait ça, crois moi, je sais de quoi je parle. » Je soupirais lourdement. « Ce n’est pas ce qui rend mon geste plus pardonnable. J’ai jeté 8 ans de relation à la poubelle en trois secondes » Je venais alors boire une gorgée de bière, comme si cela allait m’aider à accepter la dure réalité de ma vie. « On peut dire que tu prends ton temps. Et tu sais ce que tu veux faire maintenant, après six mois ? » me demandait finalement Soren. « Je ne veux plus être seule. C’est tout ce que je sais. Mais clairement, ma relation avec Dean ne pourra pas reprendre avant que j’ai réglé tous les problèmes que j’ai ici. Je pense qu’il faut que je m’accomplisse, que je réalise mes propres rêves avant d’envisager quoique ce soit avec qui que ce soit. J’ai besoin de m’installer, de savoir ce que je veux. Et je pense qu’ensuite je serais prête à m’engager avec quelqu’un. Mais je pense qu’il faut que j’attende, même si la solitude me fait peur. » Clairement, après plus de 8 ans de vie commune c’était la solitude qui m’affectait le plus. Ce sentiment sans cesse d’être seule. Plus personne ne m’attendait le soir quand je rentrais à la maison, à l’exception de Lago qui heureusement semblait toujours aussi content de me voir.
Finalement, j’abordais le sujet de Cléo. Je suivais les conseils d’Adriel à la lettre. J’étais allée le trouver peu après ma première entrevue avec Soren et je lui avais fait part de mes soucis avec Soren et Cléo. Il m’avait aussitôt conseillé d’écouter le point de vue de Soren vis-à-vis de leur relation dès que je serai prête à l’écouter. Et bien que je ne fusse pas sûre à 100% d’être prête à écouter toute cette histoire, je savais qu’il était temps que j’essaye de le faire. Je le devais à Soren, au nom de notre ancienne amitié. « Cléo… Qui l’eut cru que j'allais parler de ma relation avec elle, avec toi ? » dit-il et je sourais un peu à sa petite blague, pas encore totalement prête à rire de cette situation. Je redoutais surtout ce qui allait suivre, allais-je être capable d’entendre tout ce qu’il avait à me dire ? « C’est… Bizarre ? Je ne sais pas. Je l’aime, mais ça c’est pas nouveau. Mais… Ouais, c’est bizarre. Parfois, j’ai tellement l’impression que je suis pas à ma place à ses côtés. Et puis, l’instant d’après, quand elle me regarde, tous mes soucis partent en fumée. Elle a un super-pouvoir sur moi, je crois. Et ça me fait peur tu sais. J’ai peur qu’un jour elle se réveille et qu’elle comprenne qu’elle n’a plus besoin de moi, qu’elle est guérie, en quelques sortes. Qu’elle a fait le deuil… Et que je n’étais qu’un moyen d’y parvenir. » racontait-il. Je l’écoutais sans rien dire, hochant la tête par moments pour l’encourager à continuer. En effet, ce n’était pas nouveau que Soren soit intéressé par Cléon, il l’avait toujours regardé de cette façon, de la même façon que Matteo la regardait, ce qui à l’époque avait tendance à m’agacer. Je n’avais jamais compris pourquoi Soren s’était accroché à cet amour impossible, pourquoi il était resté planté là, entre les deux, à regarder celle qu’il aimait partager la vie de son meilleur ami. J’aurai pour sûr, pété un plomb si j’avais été à sa place. « Si j’étais à la place de Cléo, je ne crois pas que je pourrais me passer de toi. Pas après la disparition de Matteo. Mine de rien aujourd’hui, tu es beaucoup plus qu’un moyen d’oublier Matteo tu sais, tu as pris une place dans sa vie en dehors de votre lien avec Matteo à tous les deux. Je ne vois pas trop ce qui pourrait la pousser à arrêter d’avoir besoin de toi. Hormis le retour de Matteo bien entendu, mais ce n’est pas comme si c’était quelque chose qui pouvait arriver alors je pense que tu devrais profiter juste de cette chance que tu as d’être avec elle. De toute façon, même si elle venait à te quitter un jour, ça sera toujours des moments passés avec elle que tu n’aurais normalement jamais pu passer avec elle si tout s’était passé comme prévu. C’est déjà une victoire en soi » C’était clairement le plus gros effort que je pouvais faire. Je ne disais pas que j’acceptais leur relation, ni que je l’approuvais. Je lui disais juste que je la tolérais et qu’une part de moi la comprenait. J’avais eu le temps de me mettre dans la peau de Cléo et je pouvais comprendre ce qui l’avait poussée à adopter ce choix de vie. Quant à Soren, vu ses antécédents vis-à-vis de Cléo, il était utopique de ma part de croire qu’il serait capable de la repousser par simple loyauté envers son ancien meilleur ami. « Tu ne te demandes jamais où nous en serions tous si Matteo était encore là ? » lui demandais-je pensivement, plantant mes yeux noisette dans les siens beaucoup plus clairs.
« C’est certain, mais vous ne saccagez pas votre vie suite à sa disparition pour autant » Soren se doutait qu’elle disait ça pour la situation qu’elle vivait encore avec Dean, à la vue de ce qu’elle venait de lui raconter, mais il ne put s’empêcher quand même de prendre sa réflexion pour lui. Après tout, ce n’était pas tout à fait faux le concernant. Matteo était peut-être parti, mais sa vie semblait se dérouler presque mieux que jamais. Après tout, il était avec la femme qu’il aimait depuis des années, ce qui était une grosse amélioration depuis la mort de Matteo. Même s’il aurait préféré que ça se passe autrement, très clairement. S’il fallait que tout le monde perde son meilleur ami pour avoir la femme de ses rêves, ce n’était vraiment pas une partie de plaisir. « Sauf que je suis seule maintenant. Seule au monde. » Le jeune homme fronça rapidement les sourcils. Il n’aimait pas entendre Heidi dire ça, comme si c’était effectivement vrai, alors que c’était plus que faux. Il était là lui, si elle avait besoin. Il l’avait toujours été, et c’était elle qui avait eu besoin de s’éloigner de tout ce qui la rattachait à Brisbane. Il s’apprêtait donc à rapidement lui répondre que c’était faux, mais il n’eut pas le temps de prononcer la moindre syllabe qu’Heidi reprenait déjà la parole. « Non. Ne dis pas ce que tu t’apprêtes à dire parce que c’est faux. Certes, je ne suis pas seule seule à proprement parler. Mais je suis seule dans les faits. Toi, depuis que Matteo est mort tu as Cléo, Kaecy a toujours eu Elio. Moi, j’ai mon chien. » Soren soupira. Il ne l’admettrait pas et ne le ferait sûrement jamais même, car ça lui ferait mal au coeur de devoir le faire, mais Heidi avait raison dans un sens. Même si Matteo n’était plus là, il semblait que chacun ait trouvé quelque-chose pour que la vie soit dite plus facile à vivre, même si ça dépassait parfois légèrement la morale. Mais en quittant Dean, Heidi avait pris la décision de se retrouver seule et c’était vrai que ce n’était pas forcément le genre de décision qui était facile à assumer derrière. Soren vint alors passer un bras autour des épaules de la jeune femme, pour montrer quand même que, malgré tout ce qu’elle pourrait dire et penser, il était là. « Je ne veux plus être seule. C’est tout ce que je sais. Mais clairement, ma relation avec Dean ne pourra pas reprendre avant que j’ai réglé tous les problèmes que j’ai ici. Je pense qu’il faut que je m’accomplisse, que je réalise mes propres rêves avant d’envisager quoique ce soit avec qui que ce soit. J’ai besoin de m’installer, de savoir ce que je veux. Et je pense qu’ensuite je serais prête à m’engager avec quelqu’un. Mais je pense qu’il faut que j’attende, même si la solitude me fait peur. » Le jeune homme était impressionné de voir le travail qu’avait fait Heidi sur elle même suite à cette décision. Il n’en aurait pas été capable, pour sa part. Il était toujours accro à la même femme depuis des années même lorsqu’elle s’était mise avec son meilleur ami, et il ne s’était jamais dit qu’il fallait peut-être qu’il laisse tomber. Mais il comprenait cependant Heidi sur un point: être seul, c’était nul. Même si c’était nécessaire, parfois ça faisait mal. Soren s’était retrouvé seul plusieurs fois au cours de sa vie, lorsqu’il n’arrivait pas à avoir une relation stable parce-que son coeur louchait en permanence sur Cleo. Et la seule relation réellement stable qu’il ait eu, avant qu’il ne se rende comptes de l’amour qu’il portait pour Cleo, l’avait laissé tomber comme une merde. Alors oui, il connaissait malheureusement la solitude et savait à quel point ça pouvait faire mal. Heidi, étonnement, l’écouta très attentivement par la suite lorsqu’il parla de Cleo justement. Elle qui avait envie de lui vomir dessus en temps normal lorsqu’il osait à peine l’évoquer semblait presque compatissante. C’était limite louche, mais Soren lui en était reconnaissant. Au moins, Heidi était au courant de toute l’histoire et il pouvait lui parler sans qu’elle lui pose douze mille questions de pourquoi ci et comment ça. Ca faisait du bien de parler à quelqu’un qui connaissait, tout simplement. « Si j’étais à la place de Cléo, je ne crois pas que je pourrais me passer de toi. Pas après la disparition de Matteo. Mine de rien aujourd’hui, tu es beaucoup plus qu’un moyen d’oublier Matteo tu sais, tu as pris une place dans sa vie en dehors de votre lien avec Matteo à tous les deux. Je ne vois pas trop ce qui pourrait la pousser à arrêter d’avoir besoin de toi. Hormis le retour de Matteo bien entendu, mais ce n’est pas comme si c’était quelque chose qui pouvait arriver alors je pense que tu devrais profiter juste de cette chance que tu as d’être avec elle. De toute façon, même si elle venait à te quitter un jour, ça sera toujours des moments passés avec elle que tu n’aurais normalement jamais pu passer avec elle si tout s’était passé comme prévu. C’est déjà une victoire en soi » Soren baissa le regard. Depuis qu’il s’était mis avec Cleo, personne ne lui avait dit des choses aussi gentilles. Et le fait qu’elles viennent d’Heidi le touchait deux fois plus. Et puis, elle avait tellement raison d’un côté dans ses paroles que ça en faisait mal à Soren de l’admettre. « Tu sais, parfois la douleur est tellement importante que ça brouille les idées et les sentiments. Et même si tu as raison, je pense que j’aurai toujours peur qu’un jour elle ne finisse par que m’associer à la mort de Matteo et qu’elle veuille tout simplement plus que ça, plus que moi. » Il soupira une fois de plus, prenant sa bière et la finissant d’une traite. Il ne s’était pas aperçu, à ne presque pas en parler, à quel point sa situation avec Cleo le peinait. Ce n’était pas mauvais, ça permettait qu’il en profite réellement, mais il avait quand même ce poids sur le coeur qui commençait à se faire sentir en parlant avec Heidi. « Mais tu as surement raison, il faut que j’en profite. Même si c’est compliqué… » Et il partit pendant quelques instants dans ses pensées, repensant à des moments qu’il avait eu avec Cleo, qui avaient été magnifiques et qu’il n’aurait pas eu si Matteo était toujours de ce monde. « Tu ne te demandes jamais où nous en serions tous si Matteo était encore là ? » Soren tourna le regard vers Heidi et tomba sur celui de la jeune femme. Pendant un instant, il s’y perdit, avant de s’adosser de nouveau au canapé et de soupirer. « Bien que ça fasse mal, si j’y pense parfois. » A chaque fois qu’il voyait Cami, à vrai dire, il se demandait comment ça serait si elle grandissait auprès de son vrai père, de Matteo. « Tu serais sûrement mariée et enceinte, ou même tu aurais déjà un enfant je pense. Il en aurait été le parrain. » Il fit un petit sourire tendre à l’attention d’Heidi avant de poursuivre dans sa vision d’un présent qui ne pourrait plus exister. « Cleo et Matteo seraient mariés aussi. Cami vivrait avec son père et j’aurai été parrain à mon tour. Je l’aurai couverte de cadeaux, beaucoup plus que maintenant. » Car la position qu’il avait par rapport à Cami était trop délicate et qu’il ne voulait pas par conséquent la couvrir de cadeaux. Il ne voulait pas que Cleo voit ça comme un moyen de se faire pardonner d’avoir pris la place du père de la petite ou quelque-chose comme ça, alors il ne faisait rien de spécial, il se contentait d’être là pour la petite le temps qu’elle soit assez grande pour comprendre la situation réelle. « Me concernant… J’en sais rien, je pense que je serai le cul entre deux chaises à tenter de trouver quelqu’un avec qui ça irait bien. » Soren finit par ponctuer sa phrase avec une petite moue.
❝ The only way out of labyrinth of suffering is forgiveness ❞
Soren & Heidi
So I remember when we were driving, driving in your car. The speed so fast, I felt like I was drunk. City lights lay out before us and your arm felt nice wrapped 'round my shoulder. And I had a feeling that I belonged. And I had a feeling I could be someone, be someone, be someone. △
Me confier à Soren n’avait jamais été une épreuve, bien au contraire. Je me sentais tellement à l’aise avec lui que je sentais que je pouvais lui dire ce que j’avais sur le cœur sans avoir la crainte d’être jugée ou de le décevoir. C’était une connexion entre nous qui ne s’expliquait pas mais que j’étais certaine que nous ressentions tous les deux, une sorte de contrat à l’amiable passé entre nous depuis des années. Pourtant ce n’était pas gagné, je n’avais jamais été du genre à trop facilement me confier, du moins pas sur les choses qui me touchaient réellement. Pourtant avec Soren, ça ne me demandait pas tant d’efforts que ça, même aujourd’hui alors que nous étions techniquement en froid tous les deux. C’était donc sans grande difficulté que j’en venais à parler à Soren de la façon dont je me sentais seule. J’étais pourtant entourée, ce n’était pas les amis qui me manquait mais cela ne comblait pas le vide qu’il y avait au fond de mon cœur. C’était un peu bête à dire et je me sentais parfois idiote en y pensant mais j’avais besoin de quelqu’un à mes côtés, de quelqu’un qui serait prêt à tout pour moi. Parfois j’arrivais à me convaincre que ce n’était qu’une question d’horloge biologique, que c’était l’angoisse d’atteindre les trente ans et de me voir finir ma vie seule. Parfois je me disais que c’était simplement parce que j’avais quitté Dean et que j’avais peur de ne jamais retrouver la stabilité que j’avais connu avec lui. Mais d’autres fois, je n’arrivais pas nécessaire à mettre un doigt sur ce qui clochait, sur ce qui me faisait peur et m’empêchait de dormir la nuit de temps à autre. Bien entendu, je connaissais suffisamment Soren pour savoir qu’il allait nier, qu’il allait me rassurer et me garantir qu’il serait là. Mais ce n’était pas d’une présence de cette façon dont je parlais alors que l’interrompais aussitôt. Il soupira alors, signe qu’au fond, il savait que je n’avais pas totalement tort. Sans un mot de sa part, il venait passer un bras autour de mes épaules et je me blottissais contre son torse, posant ma tête contre sa poitrine. J’avouais alors à Soren que la solitude commençait à me peser bien que j’étais consciente qu’il n’était pas possible pour moi d’envisager une relation stable avec qui que ce soit avant de savoir ce que je voulais réellement dans la vie. Peu à peu la conversation dérivait sur la relation de Matteo et de Cléo et Soren se laissait aller à évoquer à quel point il avait peur sans cesse de perdre Cléo, que celle-ci finisse par le laisser tomber parce qu’elle n’avait plus besoin de lui pour avancer dans la vie. Et chose incroyable, autant pour lui que pour moi, je venais alors à le rassurer. Parce que si je ne tolérais pas la relation qu’ils entretenaient, je connaissais suffisamment Soren pour savoir à quel point il était facile de s’attacher à lui, pour savoir à quel point ce n’était pas quelqu’un dont on se débarrassait en un claquement de doigt. Et j’avais suffisamment d’estime pour Cléo pour savoir qu’elle ne s’était pas mise avec Soren de façon purement intéressée. Si je devais faire preuve d’objectivité, je pouvais comprendre comment une telle épreuve avait pu rapprocher Soren et Cléo. Je regardais alors Soren qui baissait les yeux, signe qu’il était relativement touché parce que je venais de dire. « Tu sais, parfois la douleur est tellement importante que ça brouille les idées et les sentiments. Et même si tu as raison, je pense que j’aurai toujours peur qu’un jour elle ne finisse par que m’associer à la mort de Matteo et qu’elle veuille tout simplement plus que ça, plus que moi. » ajoutait-il avant de finir sa bière d’une traite. « Rien que toi c’est déjà beaucoup tu sais. Je pense que Cléo est suffisamment intelligente pour comprendre la chance qu’elle a de t’avoir à ses côtés. Il y a pleins de filles d’abord qui tuerait pour avoir rien que toi » dis-je alors avec un sourire en coin avant de venir embrasser la joue de Soren, affectueusement. « Mais tu as surement raison, il faut que j’en profite. Même si c’est compliqué… » disait-il alors que je nichais ma tête dans son cou, les yeux fermés. « Je suis certaine qu’avec le temps, les choses finiront par rentrer dans l’ordre. Bientôt, tu te sentiras épanoui dans cette relation je pense » Un petit silence finissait pas s’installer entre nous et sans que j’ouvre les yeux, je demandais à Soren s’il se demandait lui aussi où nous en serions si Matteo était encore là. « Bien que ça fasse mal, si j’y pense parfois. » répondait-il. « Tu serais sûrement mariée et enceinte, ou même tu aurais déjà un enfant je pense. Il en aurait été le parrain. » continuait-il. Evidemment, c’était également la vision que j’avais de mon avenir alternatif dans un monde où Matteo était encore là. En revanche, ce que ne me disait jamais cet vision, c’était si j’étais heureuse d’être mariée et mère, si c’était vraiment ce que je voulais dans la vie et si je n’avais pas la sensation de passer à côté de celle-ci comme j’en avais eu l’impression avant de revenir à Brisbane. « Cleo et Matteo seraient mariés aussi. Cami vivrait avec son père et j’aurai été parrain à mon tour. Je l’aurai couverte de cadeaux, beaucoup plus que maintenant. » poursuivait-il. Un petit sourire illuminait mon visage, c’était pour moi la vision du bonheur parfois pour ces trois personnes. « Me concernant… J’en sais rien, je pense que je serai le cul entre deux chaises à tenter de trouver quelqu’un avec qui ça irait bien. » disait-il. Une fois de plus l’absurdité de la situation me frappait : alors que certains, comme Cléo et moi, avaient tout perdu en perdant Matteo, Soren lui avait gagné une véritable vie à la suite de ça, bien sûr, il avait perdu son meilleur ami et bon nombre de ses relations en avaient pâtit mais il n’avait pas tout perdu au change. « On aurait pu tout bouleverser. Partir tous les deux après cette nuit-là, pour aller vivre d’amour et d’eau fraîche. Peut-être que ça aurait tout changé, peut-être que nous n’en serions pas là aujourd’hui » dis-je alors en me redressant un peu, ouvrant les yeux à nouveau pour regarder Soren. Un petit sourire étirait mes lèvres un instant. « Je vais voir où en est le repas » Je me levais alors, pour vérifier que rien n’avait brûlé et je mettais la table pour deux, rapidement, sortant également une bouteille de vin. « A table. » appelais-je alors Soren, en servant des pâtes dans chacune des assiettes.
« Rien que toi c’est déjà beaucoup tu sais. Je pense que Cléo est suffisamment intelligente pour comprendre la chance qu’elle a de t’avoir à ses côtés. Il y a pleins de filles d’abord qui tuerait pour avoir rien que toi. Je suis certaine qu’avec le temps, les choses finiront par rentrer dans l’ordre. Bientôt, tu te sentiras épanoui dans cette relation je pense. » Les quelques mots d’Heidi eurent le don de réussir quand même à réchauffer un peu le coeur de Soren. Oui, elle avait peut-être raison. Peut-être que dans quelques temps il comprendrait enfin que cette relation va bien voire très bien, que Cleo et lui seraient réellement heureux sans avoir l’impression qu’une ombre était en permanence en train de les suivre. Heidi lui demanda ensuite comment il voyait la vie si Matteo n’était pas parti. C’était une question compliquée et simple à la fois. Après tout, ce n’était pas ce qui s’était passé. Mais pendant un temps, c’était ce qu’il aurait du arriver. Pour le mieux, pour le pire, il ne savait pas mais il finit par réussir à décrire comment il aurait vu leurs vies. « On aurait pu tout bouleverser. Partir tous les deux après cette nuit-là, pour aller vivre d’amour et d’eau fraîche. Peut-être que ça aurait tout changé, peut-être que nous n’en serions pas là aujourd’hui » Heidi se redressa, regardant Soren qui fronçait légèrement les sourcils. Il n’arrivait pas à voir si elle était sérieuse ou si elle se fichait de lui. Mais comme après quelques secondes de regards échangés, il ne lui sembla pas que ce fut la deuxième option, il esquissa un léger sourire. « Tu es sérieuse en plus. Tu penses qu’on aurait du faire ça, alors ? Juste, partir tous les deux ? Heidi, tu étais presque encore qu’une enfant à l’époque, rappelles toi. » Il ne disait pas ça méchamment, loin de là, c’était qu’à ses yeux Heidi était toujours plus ou moins une enfant. Elle resterait toujours la petite soeur de Matteo, et même s’il avait franchi avec elle une étape qui était loin d’être celle d’une gamine, elle restait la petite de la bande quand même. « Je vais voir où en est le repas » Elle ne prit pas sur le moment le temps de répondre aux précédentes paroles de Soren, mais il n’oubliait pas ce qu’elle venait de lui dire. Car ça l’étonnait un peu. Quelques instants plus tard, ce fut avec une bouteille de vin et des assiettes bien remplies qu’Heidi indiqua à Soren qu’ils passaient à table. Il était toujours assis sur le canapé, penseur. Il vint s’asseoir à la dite table, prenant la bouteille de vin, la débouchant et servant deux verres, un pour Heidi et un pour lui même. Il leva alors son verre en direction d’Heidi. « A nos nouvelles vies alors ? » C’était surement la chose la plus juste à laquelle ils pouvaient trinquer. Après avoir bu une gorgée cependant, il reporta son attention sur la jeune femme. « Dis moi réellement Heidi, tu étais sérieuses avec tes paroles tout à l’heure ? » Ca le perturbait, car il n’avait jamais pu imaginer Heidi comme une compagne. Déjà, ils avaient eu une relation améliorée une fois et Soren trouvait que c’était beaucoup trop étrange pour eux. Pas qu’il regrettait, loin de là ils étaient même assez à l’aise pour en parler - sauf avec Matteo sinon ce serait Soren qui ne serait plus là pour en parler -, mais comme une compagne… C’était étrange. Et pourtant, elle venait très clairement de dire qu’ils auraient pu envisager de continuer leur route ensemble, à l’abri de toutes les autres personnes qu’ils avaient pu connaître. En paix, seuls et tranquilles, oui.
❝ The only way out of labyrinth of suffering is forgiveness ❞
Soren & Heidi
So I remember when we were driving, driving in your car. The speed so fast, I felt like I was drunk. City lights lay out before us and your arm felt nice wrapped 'round my shoulder. And I had a feeling that I belonged. And I had a feeling I could be someone, be someone, be someone. △
Sans trop savoir d’où cette idée m’était venue j’avais demandé à Soren d’imaginer nos vies dans le cas où Matteo ne nous aurait jamais quitté. Il s’était lancé dans une petite réflexion où il m’imaginait déjà presque mère aux côtés de Dean, Matteo et Cléo qui élevaient Cami et lui qui restait seul sur le côté de ce tableau qui semblait aujourd’hui bien trop parfait pour être vrai. Et alors que la réalité de la chose me heurtait violemment et où je réalisais que Soren avait gagné d’une certaine façon avec la disparition de Matteo, je venais dire à Soren qu’on aurait pu tout plaquer, tous les deux après cette fois où nous avions couché ensemble. Nous aurions pu bouleverser tous les évènements à venir. Peut-être que si nous étions partis tous les deux, Matteo ne serait pas mort, qu’il serait aux côtés de Cléo et de leur adorable fille. Je ne savais pas trop pourquoi j’avais dit ça, ni même d’où je le tenais. C’était venu comme ça, sans que j’ai à réfléchir et je n’avais pas jugé utile de garder ce genre de pensées pour moi, sur le coup. Je me redressais légèrement, pour regarder Soren en souriant doucement. Il m’observait, comme s’il cherchait à deviner ce à quoi je pensais, ce qui ne faisait qu’agrandir mon petit sourire. Il secouait finalement légèrement la tête en souriant avant de répondre : « Tu es sérieuse en plus. Tu penses qu’on aurait du faire ça, alors ? Juste, partir tous les deux ? Heidi, tu étais presque encore qu’une enfant à l’époque, rappelles toi. » Etais-je sérieuse ? C’était un bien grand mot, je n’avais pas pensé en disant un tel truc que Soren s’en inquièterait autant, ce n’était que des paroles en l’air, des hypothèses qui ne valaient plus rien à l’heure actuelle. Matteo était mort et notre vie était exactement ce qu’elle était alors. J’aurai pu me renfrogner un peu lorsque Soren disait que j’étais presque une enfant, parce que je n’étais pas totalement d’accord à ce propos. J’étais suffisamment adulte pour qu’on en arrive où nous en étions arrivés. Alors certes cinq ans d’écart ça pouvait paraître beaucoup par moment et dans certaines circonstances, mais lorsqu’il s’agissait de Soren et moi, ça ne me choquait pas. J’en oubliais même qu’il était si vieux par rapport à moi. Laissant le jeune homme un peu en plan sur le canapé, en proie visiblement à un certain conflit intérieur dont j’ignorais la raison, je décidais d’aller jeter un coup d’œil à ce qui mijotais dans la cuisine. Je remuais la sauce bolognaise, pensive un peu à mon tour. Etait-ce vraiment ce que j’avais dit qui perturbait Soren à ce point ? Y avait-il quelque chose que je n’avais pas bien dit, une subtilité que je n’avais pas saisie ? Je devais avouer que j’étais un peu perdue. Si j’avais su qu’en disant une telle chose, je jetterais une espèce de malaise entre nous, je me serais abstenue de tout commentaire. Non, vraiment, même en me refaisant la conversation dans ma tête, je ne voyais pas ce qu’il y avait de choquant dans ce que je venais de dire. Rapidement, je mettais la table après avoir éteint le feu sous les pâtes et j’indiquais à Soren que tout était prêt. Il se levait et me rejoignait dans la cuisine rapidement. Il nous servait un verre de vin à chacun avant de lever son verre face au mien. « A nos nouvelles vies alors ? » disait-il. « A nos nouvelles vies » répondis-je avec un petit sourire en coin, amusée, alors que je plantais mon regard dans le sien puis nous buvions chacun un peu de vin avant de reposer nos verres. Alors que je servais l’assiette de Soren puis la mienne avec les spaghettis bolognaise, je sentais le regard de Soren qui se posait de nouveau sur moi. Alors que j’allais lui demander si j’avais une tâche, celui-ci se mettait à parler : « Dis moi réellement Heidi, tu étais sérieuse avec tes paroles tout à l’heure ? » Je le regardais, posant la casserole alors que je pouffais de rire. J’étais grandement amusée par l’air si sérieux de Soren, à propos de ce que je venais de dire. Pourquoi fallait-il qu’il en fasse tout un fromage ? « Bon sang, je t’ai vraiment perturbé avec cette histoire » dis-je en riant un peu plus. « Je ne sais pas si j’étais sérieuse, j’ai pas réfléchis, c’est sorti comme ça. On parfait d’une vie alternative, et c’est vrai que ça aurait pu être notre vie, si on l’avait choisi. » Je voyais bien qu’il y avait quelque chose qui clochait pour Soren à ce propos, ça se lisait dans son regard. « Oh allez, mon âge n’avait vraiment pas l’air de te poser problème ce soir-là » lui dis-je avec un sourire complice en lui donnant un petit coup de coude dans les côtes pour essayer de le dérider. Mais je sentais bien que Soren continuait de cogiter. Y avait-il vraiment matière à se poser tant de questions ? Ou était-ce que le fait d’être avec moi qui lui semblait si improbable ? Tout à coup, je sentais la piqûre d’ego qui pointait le bout de son nez. « Ah bah merci, ça fait plaisir de se sentir désirée comme ça » dis-je dans une moue boudeuse exagérée (bien qu’elle reposait sur un fond de vérité). « Je ne savais pas que l’idée en elle-même pouvait autant te rebuter » dis-je avec une petite moue triste, étudiée pour jouer un peu sur la corde sensible. Cette conversation devenait de plus en plus étrange et je ne faisais rien pour arranger la chose puisque je persistais à ne pas la prendre avec sérieux, du moins, je ne laissais pas paraître grand-chose à ce sujet, ce qui devait être d’autant plus déroutant pour Soren.
Heidi se mit alors presque instantanément à pouffer de rire lorsque Soren lui demanda de nouveau si elle était réellement sérieuse de part sa question, quelques instants plus tôt. « Bon sang, je t’ai vraiment perturbé avec cette histoire » Et alors que ça semblait réellement la faire rire, lui ne leva qu’un sourcil. Il aurait aimé avec elle, mais lui était sérieux. Même s’il ne comprenait pas réellement pourquoi il était aussi sérieux, il tenait à le rester. Par principe. « Je ne sais pas si j’étais sérieuse, j’ai pas réfléchis, c’est sorti comme ça. On parfait d’une vie alternative, et c’est vrai que ça aurait pu être notre vie, si on l’avait choisi. » Et elle n’avait pas tord. Même si Soren ne l’avait jamais imaginé voire envisagé, s’ils l’avaient réellement voulu et si ça avait été leur souhait à ce moment là, ils auraient pu prendre la fuite tous les deux. « Oh allez, mon âge n’avait vraiment pas l’air de te poser problème ce soir-là » Son petit coup de coude dans les côtes pour tenter de le décoincer et son petit sourire complice arrachèrent quand même un sourire en retour de la part de Soren. Il était vrai que sur le moment, ce soir là, il ne s’était pas demandé une seule fois si l’âge d’Heidi pouvait le déranger. Quand vous avez un corps comme le sien entre vos mains, vous ne vous posez aucune question à vrai dire. « Loin de là, c’est vrai, j’avoue, je plaide coupable. » Il leva les mains un peu en l’air pour accompagner de gestes ses paroles, attrapant son verre de vin par la suite. La gorgée qu’il avala fut un peu trop conséquente par rapport à la situation, non adaptée à une dégustation de bonne cuvée ou à une soirée entre amis - plutôt la gorgée de celui qui tente de faire passer la pilule. Il commençait à se trouver limite ridicule de réagir de la sorte, mais un sentiment en lui persistait. Comme si les propos d’Heidi le dérangeaient d’un côté, car maintenant il ne pouvait s’empêcher d’imaginer comment aurait pu être une vie aux côtés d’Heidi. Douce, et tumultueuse surement, mais ça n’aurait pas été désagréable. Cependant, devant le peu de réponse de la part du jeune homme, elle ne put se retenir de réagir de nouveau. « Ah bah merci, ça fait plaisir de se sentir désirée comme ça » Il releva le regard vers Heidi qui abordait une de ces mines boudeuses qui le fit soupirer légèrement. « Je ne savais pas que l’idée en elle-même pouvait autant te rebuter » « Je n’ai absolument pas dit que cette idée n’était pas douce à penser. » Il vint d’adosser complètement à sa chaise, commençant à passer ses mains dans ses cheveux pour les laisser telles quelles, les deux bras en l’air - telles deux ailes de poulet, oui oui. « Mais tu me dis ça comme ça, alors forcément que je pense à ta phrase et à ce qu’elle aurait pu entrainer. Bien sur que t’es désirable, Heidi, je pense que si je disais le contraire je serai le pire des menteurs. Mais… » A force de verbaliser ses pensées, il pensait peut-être avoir trouvé le point qui le faisant tant cogiter. Sortant son téléphone de sa poche, il appuya sur un des boutons pour que l’écran puisse s’allumer et montrer l’image qui couvrait l’écran. Cleo et Soren touts sourires un dimanche après-midi, alors que Cleo attendait encore Cami. « Cette femme là, c’est tout ce que j’ai et qu’importe ce qui a pu se passer, je l’ai toujours aimé. Alors, quand je l’ai vu faire sa vie avec ton frère, je me suis toujours dit que je serai sur le banc de touche toute ma vie, quoi qu’il arrive. » Il rangea rapidement son téléphone. « Tu connais aussi bien que moi la suite de l’histoire. Pour moi, c’était elle ou jamais rien de sérieux dans ma vie. Alors quand tu me dis que dans une vie alternative j’aurai pu avoir une vie semblable avec toi, quelque-chose de sérieux… Forcément que ça me fait cogiter, je me dis que peut-être, si j’avais été plus ouvert, j’aurai pu connaître bien plus tôt une de ces histoires d’amour qui t’empêchent de dormir la nuit tellement elles font battre ton coeur fort. » Et prenant son verre, il le finit cul sec. Il avait surement beaucoup trop parlé, mais comme toujours avec Heidi. Elle avait ce don de le faire s’ouvrer avec un seul regard, il lui portait un de ces confiances aveugles qui parfois peuvent même faire peur. « Il va m’en falloir un autre je pense. »
❝ The only way out of labyrinth of suffering is forgiveness ❞
Soren & Heidi
So I remember when we were driving, driving in your car. The speed so fast, I felt like I was drunk. City lights lay out before us and your arm felt nice wrapped 'round my shoulder. And I had a feeling that I belonged. And I had a feeling I could be someone, be someone, be someone. △
En partant à la base d’un jeu totalement innocent, je venais de perturber Soren pour la soirée et je devais avouer que cela m’amusait beaucoup. Je n’avais pas spécialement compris pourquoi il était si perturbé par ce que j’avais lancé innocemment, sans même y réfléchir plus que ça et j’en jouais un peu, le taquinant ouvertement afin d’essayer de le dérider un peu. Il invoqua un instant le fait que je n’étais qu’une enfant à l’époque pour justifier son étonnement, je répliquais que mon âge n’était pas le centre de ces préoccupations le soir où nous avions couché ensemble. « Loin de là, c’est vrai, j’avoue, je plaide coupable. » et je souriais un peu, ne pouvant cacher que j’étais satisfaite par la réponse alors qu’il attrapait son verre de vin pour en boire une lampée de vin. « Je préfère ça » ajoutais-je en continuant de sourire malicieusement, décidant de ne faire aucun commentaire sur la consommation de vin de Soren (qui étais-je pour juger ? Et puis je venais de le perturber, je le sentais). Je voyais bien qu’il essayait de faire tous les efforts possibles pour essayer de faire comme si de rien n’était, mais je voyais bien qu’il était ailleurs. Je pouvais presque entendre les rouages de son cerveau qui s’actionnaient pour essayer d’éclaircir toute cette situation. Je sentais bien qu’il y avait quelque chose dans le fait d’imaginer vivre avec moi qui le dérangeait, le perturbait au point de lui faire perdre un peu ses moyens. Il resta silencieux un certain moment et bien que je restais patiente un moment pour le laisser digérer, je commençais à me poser de sérieuses questions. Etait-ce vraiment le fait de s’imaginer vivre avec moi qui pouvait le perturber à ce point ? L’idée même le rebutait-elle ? L’avais-je mis mal à l’aise parce qu’il ne comprenait pas comment je pouvais envisager une telle chose ? Je ne pouvais m’empêcher de me sentir un peu vexée à le voir aussi surpris, ce que je ne manquais pas de lui faire remarquer. « Je n’ai absolument pas dit que cette idée n’était pas douce à penser. » disait-il en s’adossant à sa chaise, passant sa main dans ses cheveux l’air toujours aussi pensif. « Ton enthousiasme parle de lui-même » dis-je alors du bout des lèvres avec une petite moue. « Mais tu me dis ça comme ça, alors forcément que je pense à ta phrase et à ce qu’elle aurait pu entrainer. Bien sur que t’es désirable, Heidi, je pense que si je disais le contraire je serai le pire des menteurs. Mais… » commençait-il. Je soupirais un peu, presque agacée de le voir ajouter un « mais » pourquoi fallait-il toujours des mais partout ? C’était agaçant à la fin, ne pouvait-il pas simplement se contenter de rester sur une note positive ? Néanmoins, je ne disais rien, je sentais que Soren allait reprendre la parole, ce qu’il ne tardait d’ailleurs pas à faire. « Cette femme là, c’est tout ce que j’ai et qu’importe ce qui a pu se passer, je l’ai toujours aimé. Alors, quand je l’ai vu faire sa vie avec ton frère, je me suis toujours dit que je serai sur le banc de touche toute ma vie, quoi qu’il arrive. » disait-il en brandissant sous mes yeux une photo de lui et Cléo. Je les regardais, admirais leur bonheur alors qu’un certain malaise s’installait au fond de moi. Au-delà du fait que j’observais mon ex belle-sœur avec le meilleur ami de mon frère, j’étais un peu décontenancée que Soren m’étale leur bonheur sous les yeux alors que nous parlions d’une utopique relation entre nous. Il semblait sentir mon malaise en rangeant son téléphone parce qu’il ne tardait pas à ajouter : « Tu connais aussi bien que moi la suite de l’histoire. Pour moi, c’était elle ou jamais rien de sérieux dans ma vie. Alors quand tu me dis que dans une vie alternative j’aurai pu avoir une vie semblable avec toi, quelque-chose de sérieux… Forcément que ça me fait cogiter, je me dis que peut-être, si j’avais été plus ouvert, j’aurai pu connaître bien plus tôt une de ces histoires d’amour qui t’empêchent de dormir la nuit tellement elles font battre ton coeur fort. » Et pour ponctuer sa tirade, il finit son verre de vin d’une traite. De mon côté, toute trace de malaise avait disparu, je comprenais enfin le point de vue de Soren et j’étais satisfaite qu’il m’en ait fait part.
Je l’observais un instant, avec un petit sourire amusé aux lèvres. « Tu ne t'en rends vraiment pas compte » murmurais-je et Soren me regardait sans comprendre où je voulais en venir. « De l’effet que tu fais » précisais-je face à son air d’incompréhension. Mais il ne semblait toujours pas percuter là où je voulais en venir alors après avoir bout une petite gorgée de vin pendant que je cherchais mes mots, j’enchaînais : « T’as toujours été trop aveuglé par Cléo pour remarquer l’effet que tu pouvais avoir sur les autres. Je veux dire… On est amis tu es bien d’accord ? Et bien même moi je l’ai senti. » Soren ne disait plus rien, attendant patiemment que j’en vienne au but, mais je peinais un peu à trouver les mots pour expliquer ce que j’essayais de lui faire comprendre. C’était davantage des impressions, des sentiments que des faits, ce qui rendait le tout plus ardu à verbaliser. « Je me souviens encore de la première fois où t’es arrivé à la maison, pour venir chercher Matteo. Je ne sais pas exactement si c’est tes yeux bleus pénétrants, ton sourire en coin ou ton air un peu désinvolte ou un savant mélange de tout ça, tout ce que je sais c’est que ça laisse assez peu de gens indifférents. Tu connais mes relations avec les garçons… » En effet, Soren connaissait à peu près tout de ma vie sentimentale. Si ma relation la plus notable avait été avec Dean, j’avais eu plusieurs petits copains au Lycée. Des histoires pas vraiment sérieuses, surtout de mon côté. J’avais un peu de mal à tomber amoureuse, je me lassais vite et dès qu’un garçon devenait un peu trop collant à mon goût, je m’éloignais. « J’ai jamais été ce genre de filles, enfin tu vois. Et pourtant ce jour-là, je pense que j’aurai été capable de tout pour que tu me remarques. Après les choses ont changé, on est devenus amis. Mais cette impression ne m’a jamais vraiment quitté. J’ai, encore aujourd’hui, toujours besoin de savoir que je suis importante pour toi. » Je me rendais compte que j’étais très peu claire, mais je n’arrivais pas à vraiment organiser mes idées pour rendre le tout compréhensible. « C’est un peu étrange à dire, mais tu as toujours représenté une sorte d’idéal masculin pour moi, un fantasme en quelques sortes » Evidemment, malgré ma relation fusionnelle avec Soren, je ne pouvais empêcher mes joues de rosir légèrement à l’évocation de cette vérité que je n’avais pourtant jamais avoué avant aujourd’hui,à qui que ce soit. « Tout ce que je veux dire par-là, c’est que des histoires, de belles histoires, t’auraient pu en avoir. Pas qu’avec moi, mais il y avait pleins d’autres filles qui te regardaient comme toi tu regardais Cléo » concluais-je alors, avant de me mordiller la lèvre inférieure. Décidemment, cette conversation devenait de plus en plus étrange. « Il va m’en falloir un autre je pense. » soupirais alors Soren et je ne pouvais m’empêcher de pouffer de rire avant de resservir nos deux verres et d’en boire une gorgée.
« Tu ne t'en rends vraiment pas compte » La première phrase prononcée par Heidi eut le don de surprendre rapidement Soren. Après tout ce qu’il venait de lui dire, elle aurait pu soit lui en vouloir de parler de sa relation avec Cleo de la sorte, car il savait très bien avec quel mauvais oeil elle voyait leur couple, soit lui dire qu’elle comprenait. En revanche, la phrase qu’elle prononça laissa le jeune homme perplexe. Il leva alors un regard perdu vers Heidi, ne comprenant absolument pas où elle voulait en venir. Elle dut le voir rapidement, car elle reprit la parole pour expliquer ses dires. « De l’effet que tu fais. T’as toujours été trop aveuglé par Cléo pour remarquer l’effet que tu pouvais avoir sur les autres. Je veux dire… On est amis tu es bien d’accord ? » Fronçant légèrement les sourcils, il hocha légèrement la tête à sa question. Bien sûr qu’ils étaient amis, il n’y avait jamais eu aucun doute là dessus. « Et bien même moi je l’ai senti. » Ce début d’explication le laissait toujours autant perplexe, mais plus pour les mêmes raisons. Quelques instants plus tôt, c’était parce-que la phrase d’Heidi était venue de nul part. Maintenant, c’était parce-qu’il attendait d’avoir la suite de son explication pour savoir où elle voulait réellement en venir. « Je me souviens encore de la première fois où t’es arrivé à la maison, pour venir chercher Matteo. Je ne sais pas exactement si c’est tes yeux bleus pénétrants, ton sourire en coin ou ton air un peu désinvolte ou un savant mélange de tout ça, tout ce que je sais c’est que ça laisse assez peu de gens indifférents. Tu connais mes relations avec les garçons… » Un petit sourire - qui aurait été moqueur s’ils n’étaient pas entrain de parler aussi sérieusement - se dessina pendant quelques instants sur le visage de Soren. Bien sûr qu’il connaissait ses histoires avec les garçons, comme Heidi connaissait en retour les siennes avec les filles. Parce-qu’ils se connaissaient au final maintenant depuis très longtemps et que même si Soren passait son temps à se moquer d’Heidi, ils se faisaient mutuellement confiance. Assez pour ne pas avoir de sujets tabous et pour pouvoir tout se raconter - ou ce qui valait la peine de l’être. « J’ai jamais été ce genre de filles, enfin tu vois. Et pourtant ce jour-là, je pense que j’aurai été capable de tout pour que tu me remarques. Après les choses ont changé, on est devenus amis. Mais cette impression ne m’a jamais vraiment quitté. J’ai, encore aujourd’hui, toujours besoin de savoir que je suis importante pour toi. » « Bien sûr que tu l’es, Heidi, sois pas idiote. » Sa réponse à lui était venue du tac au tac. Même si parfois, voire souvent, il agissait en sale gamin un peu trop capricieux, il ne voulait pas qu’Heidi pense qu’elle n’était pas importante pour lui. Malgré tout ce temps qu’ils avaient passé loin l’un de l’autre, ces années où ils avaient presque perdu contact, cette colère qu’elle avait exprimé à son égard lorsqu’elle était revenue à Brisbane. « C’est un peu étrange à dire, mais tu as toujours représenté une sorte d’idéal masculin pour moi, un fantasme en quelques sortes » Cette fois ci, ce fut réellement un sourire moqueur qui s’afficha sur le visage de Soren. Car comme il observait attentivement Heidi lui expliquer son point de vue, il ne put louper ses joues se tintant légèrement de rose alors qu’elle lui avouait l’avoir toujours considéré comme son idéal masculin. Il vint alors lui pincer légèrement la joue avant de rire. « N’aies pas honte, il faut avouer que je suis plutôt vraiment pas mal dans mon genre aussi. » « Tout ce que je veux dire par-là, c’est que des histoires, de belles histoires, t’auraient pu en avoir. Pas qu’avec moi, mais il y avait pleins d’autres filles qui te regardaient comme toi tu regardais Cléo » L’avantage c’était que plus l’explication d’Heidi avançait, plus il comprenait réellement où elle voulait en venir - même s’il devait aussi comprendre que, d’après la jeune femme, c’était uniquement sa faute à lui s’il avait attendu Cleo toutes ces années alors que plein d’autres belles histoires l’attendaient juste sous son nez. Il soupira alors, prévenant Heidi qu’il allait lui falloir beaucoup plus d’un seul verre de vin pour digérer la conversation qu’ils étaient entrain d’avoir. Heidi eut un petit rire avant de les resservirent tous les deux, et Soren ne perdit pas de temps pour reprendre une gorgée de breuvage. « J’me sens idiot, maintenant, tu sais ? Il aura fallu que ce soit une gamine comme toi qui m’ouvre les yeux. Même si je t’avoue que j’ai du mal à réellement te croire, les jolies filles qui te regardent, quand t’es un homme, tu les remarques aussi. » Enfin, c’était ce qu’il voulait croire. Mais en y réfléchissant de plus près, Heidi semblait avoir beaucoup plus raison que ce qu’il voulait. Il se rappelait maintenant de quelques soirées étudiantes, à l’université, où des filles avaient pu rester avec lui toute la soirée. Sur le moment, ça l’avait fait rire, mais dès que les filles en question tournaient le dos, lui son regard dérivait sur Cleo qui riait aux blagues de Matteo. Masochiste ? Surement, mais avec le temps il s’y était fait. « Enfin, normalement tu les remarques… » Son petit sourire commençait à s’effacer, lentement mais surement. « J’ai été si con que ça en fait ? Putain, j’aurai jamais cru que ça puisse m’arriver. » Il soupira, se levant de sa chaise, son verre de vin à la main. « Aller, viens fumer une clope avec moi. » Attrapant son paquet de clope dans sa veste, il fut rapidement sur le balcon d’Heidi. Lego en profita pour sortir lui aussi prendre l’air, cet air satisfait et complètement idiot que les chiens savent très bien porter. Il appuya rapidement grâce à ses coudes sur la rambarde. « Tu m’en veux toujours pour Cleo et moi ? » D’accord, c’était un peu brusque comme question. Et il savait pertinemment qu’Heidi n’était peut-être pas prête à en parler avec lui, de son point de vue à elle et pas d’un point de vue général comme elle l’avait fait quelques heures auparavant. Mais quitte à profiter de cette soirée trêve et discussion qu’ils avaient lancé, autant en profiter à fond. Il ouvrit alors son paquet de clope et le tendit à Heidi, qu’elle se sente libre d’en prendre une si ça lui faisait plaisir.
❝ The only way out of labyrinth of suffering is forgiveness ❞
Soren & Heidi
So I remember when we were driving, driving in your car. The speed so fast, I felt like I was drunk. City lights lay out before us and your arm felt nice wrapped 'round my shoulder. And I had a feeling that I belonged. And I had a feeling I could be someone, be someone, be someone. △
C’était une conversation tout à fait étrange que je me retrouvais à partager avec Soren. Comme suspendue dans le temps, hors de toutes ses histoires qui avaient compliquées nos relations depuis beaucoup trop longtemps, la discussion était aussi inédite qu’atypique. C’était un peu étrange d’avoir à expliquer à Soren l’effet qu’il produisait lorsqu’il entrait dans une pièce. Au-delà du fait que c’était assez inattendu comme conversation, j’avais surtout du mal à verbaliser mes sentiments à son égard. C’était un mélange un peu hétéroclite d’émotions assez floues et pas clairement définies. Néanmoins, j’essayais de lui expliquer tout ça, la façon dont il avait pris une importance capitale dans ma vie en dépit de toutes nos erreurs respectives. J’en venais même à lui avouer qu’il avait toujours représenté une sorte d’idéal masculin pour moi, un homme avec qui j’aurai voulu être sans pour autant jamais réellement le vouloir. J’avais gardé néanmoins certains détails pour moi, afin de ne pas totalement me ridiculiser devant lui, comme le fait que, peu après notre rencontre, j’avais cherché à retrouver un peu certains aspects de sa personne dans mes petits amis suivants. « N’aies pas honte, il faut avouer que je suis plutôt vraiment pas mal dans mon genre aussi. » se moquait-il, après ma petite révélation et je riais un levant les yeux au ciel. « Ca va les chevilles ? » J’enchaînais néanmoins, tachant de trouver les bons mots pour mener la conversation dans le sens où je voulais qu’elle aille, pour faire comprendre à Soren ce qu’il avait semblé ne pas remarquer : le fait qu’il avait sûrement manqué pas mal d’occasions de former un couple épanoui avec d’autres filles que Cléo. Après un bref instant où Soren avait bu un peu de vin, visiblement perturbé par ce que je venais de lui dire, il répondait : « J’me sens idiot, maintenant, tu sais ? Il aura fallu que ce soit une gamine comme toi qui m’ouvre les yeux. Même si je t’avoue que j’ai du mal à réellement te croire, les jolies filles qui te regardent, quand t’es un homme, tu les remarques aussi. » Je prenais un air profondément outré avant de lui asséner un coup de coude dans les côtes. « Une gamine ? Je croyais qu’on s’était mis d’accord pour dire que je n’en étais plus une ? » Il semblait néanmoins toujours dans ses pensées, à se triturer le cerveau pour essayer de voir si je disais vrai ou non. « Enfin, normalement tu les remarques… » ajoutait-il après un petit temps et je lui adressais un petit sourire tendre et compatissant. « J’ai été si con que ça en fait ? Putain, j’aurai jamais cru que ça puisse m’arriver. » J’avais ri un peu, avant de le regarder un peu plus de sérieux, comprenant que je l’avais vraiment perturbé. « Il n’est pas question d’avoir été con. Tu étais amoureux, un peu trop pour remarquer les autres filles et pour t’y intéresser. Mais on fait tous des erreurs et au final, ça aura été payant pour toi » Je faisais clairement allusion à sa relation avec Cléo, qui malgré tout avait fini par arriver, sa persévérance avait fini par lui permettre de partager la vie de celle qu’il avait toujours aimé.
Il soupirait un peu avant de se lever : « Aller, viens fumer une clope avec moi. » Je me levais pour le suivre, mon verre à la main alors qu’il ouvrait le balcon et s’installait sur celui-ci. Je m’installais à ses côtés alors que Lago décidait de s’allonger sur mes pieds, comme il lui arrivait souvent de faire, nous observant. « Tu m’en veux toujours pour Cleo et moi ? » Après la conversation que nous venions d’avoir je n’étais plus surprise par rien, ni même par le fait que Soren mettait sur la table un sujet particulièrement sensible entre nous et qui avait failli nous coûter notre amitié. « Je ne dis pas que j’approuve. J’ai toujours beaucoup de mal à vous imaginer et à accepter le fait que vous fermez une famille. Je ne suis pas certaine de pouvoir un jour réellement accepter votre situation même si individuellement je vous souhaite tout le meilleur du monde » lui avouais-je alors en tournant mon regard vers Soren. C’était fou, cette honnêteté qui avait toujours fait la richesse de notre relation et qui nous permettait encore aujourd’hui de parler librement même de sujets sensibles. « Mais je commence à comprendre doucement comment vous en êtes arrivés jusque-là. Je comprends de plus en plus ton point de vue et je t’en veux de moins en moins pour ça. » J’attrapais une cigarette dans son paquet avant de la porter à ma bouche. Soren, la sienne dans sa bouche, ne tardait pas à approcher le briquet de ma clope pour l’allumer. « Merci. » le remerciais-je avant de reprendre : « En fait, j’imagine ce que ça a pu être sans Matteo pour toi et elle. Le besoin de se sentir soutenus et d’éloigner cette impression d’abandon. J’imagine comment, dans une période de faiblesse émotionnelle telle que celle de la perte de ton meilleur ami, tu as pu céder à l’envie d’apporter du soutien à celle que tu as toujours aimé. » Là où nous avions tous tout perdu, Soren lui avait découvert la possibilité de vivre un avenir qu’il avait cru condamné à tout jamais. « Pourquoi elle ? Pourquoi elle et pas une autre ? » lui demandais-je alors, après tout, nous étions dans une soirée où nous crevions tous les abcès, autant en profiter pour lui demander ce qui faisait qu’il avait toujours convoité Cléo. « Parce que de toute évidence ce n’était même pas le fait qu’elle était inaccessible, parce que même avant que Matteo et elle ne se mettent ensemble, tu la regardais déjà comme ça » C’était un regard tout à fait particulier que Soren posait sur Cléo, celui d’un amour véritable et pur, qui n’avait échappé à aucun d’entre nous bien que nous avions tous fait comme si de rien n’était.