Il regardait l'entrée du pub avec anxiété. Cela devait faire une bonne demi-heure qu'il était devant et il ne s'était toujours pas décidé à entrer dans le bâtiment. S'il fumait, il aurait sûrement grillé une dizaine de clopes dont les mégots seraient à présent éparpillés sur le bitume. Au lieu de ça, il était là, posé contre le mur de cette boutique fermé, observant le pub de loin, ses écouteurs dans les oreilles. Une bonne chanson rock envahissait ses tympans, une des meilleures : Highway to hell... Est-ce que c'était prophétique ? Kael n'en savait rien. Il n'aimait pas ce qu'il faisait depuis son arrivée. Espionner comme ça, ce n'était vraiment pas lui. Mais il n'avait pas le choix. Depuis qu'il savait, il ne pouvait pas s'enlever cette histoire de la tête. Il arrivait même à ne pas en fermer l’œil de la nuit... Il fallait qu'il sache. Il devait arrêter de se poser des questions. Mais au contraire, allait à la pèche aux informations. Parce que ce n'était pas en observant, en restant en retrait qu'il allait en apprendre plus sur cette seconde famille. Malgré tout, il ne savait pas en fin de compte s'il voulait savoir. Il pourrait fermer les yeux. Lui, cela ne le dérangeait pas. Pour le peu de relation qu'il avait avec son paternel, cela n'allait rien changer à sa vie. Mais il pensait à sa mère. A celle qui l'avait mise au monde, qui s'était occupé de lui, avec toujours ce sourire aimant et réconfortant. Le même qu'elle posait sur ses sœurs. Pour elle, il ne pouvait pas rester en retrait. Sa mère avait le droit de savoir. Savoir pourquoi l'homme qui partageait sa vie depuis près de trente ans, refusait de lui passer la bague au doigts. Kael soupira. Il se redressa et retira les écouteurs qu'il avait aux oreilles. Il fourra les cordons dans la poche de sa veste en jean brut avant de traverser la grande rue qui le séparait du pub. Ce n'était pas la première fois qu'il y venait. Et l'américain devait admettre qu'il aimait bien l'endroit. Et qu'en dehors de cette histoire, s'il était venu à l'improviste ici, il aurait sûrement posé son cul sur une des chaises. Certainement. Mais d'autres motifs l'avaient conduis jusqu'ici. Encore ce soir-là quand il poussa les deux grosses portes de l'entrée. Kael fut tout de suite accueilli par une bonne ambiance et un bon son de guitare acoustique. Il jeta un œil sur la scène. Les visages ne lui étaient pas familiers. Il posa son regard sur les alentours avant de se diriger vers le bar. Il fouilla un peu dans ses poches pour trouver de quoi se payer un verre. Il tira le billet et le garda en main jusqu'à ce qu'il le donne au barman pour payer sa bière. Installé sur le tabouret en bois, il retira sa veste. Il jeta un œil à son téléphone. Il devait téléphoner à sa jumelle mais pour l'instant, il imaginait bien qu'elle n'avait pas trop envie de lui parler. A cause de cette histoire, il s'était fâché avec sa sœur. Ce qui arrivait rarement et toujours à cause de la même personne... Il soupira en constatant qu'il n'avait pas non plus de messages. Il rangea son téléphone. Sa sœur lui avait demandé à plusieurs reprises de rester à Chicago et il avait refusé. Kara lui avait bien fait comprendre qu'elle n'était pas d'accord avec lui. Mais il espérait qu'elle allait finir par comprendre. Et puis en même temps, il la comprenait. Ce qu'il faisait là, mettait sa famille en péril. Mais Kael avait besoin de réponses. Et il espérait que sa sœur puisse finalement le comprendre. Cela faisait plus d'un mois qu'il était là et il n'avait eu aucune conversation entre eux. Et c'était la première fois que ça arrivait. Alors qu'ils avaient toujours eu l'habitude de se parler chaque jour. De se téléphoner quand ils ne pouvaient pas se voir mais là. C'était le silence total. Et l'américain n'aimait pas trop ça. Il releva ses yeux sur la foule et c'est là qu'il le remarqua. Bien sûr qu'il était là. Il bossait ici, crétin. Il détourna son regard et attrapa la bière que le barman venait de lui poser sur le comptoir. Il en avala une gorgée avant de reposer son regard brun sur l'autre Harrington. Ils s'étaient croisés plusieurs fois dans le pub sans vraiment s'adresser la parole. Et là, Kael ne savait pas comment agir, ni quoi faire... Mentir, dissimuler les choses, ce n'était vraiment pas son truc. Mais c'était ce qu'il avait fait depuis son arrivée. Il ne pouvait plus sortir de ce rôle qu'il avait endossé malgré lui. Elio était à présent près de lui. Il le salua de la tête. « Salut... » Bon il y avait clairement mieux comme approche. Mais c'était un bon début pour lui. « Je t'ai entendu l'autre soir. C'était plutôt bon. » Plutôt bon ? Sérieusement. Kael aurait pu se frapper tellement sa phrase sonnait prétentieux. Mais ce n'était pas du tout le cas. Sauf que lui le savait, peut-être pas l'autre à côté de lui. Il se passa une main dans sa tignasse. Peut-être qu'il devrait l'observer encore un peu avant de passer à l'étape suivante.
« Elio je crois qu’on a un problème avec le branchement de la guitare électrique tu peux aller regarder ? » Opinant du chef j’avais quitté mon bar pour me glisser sur la scène. Mon endroit préféré dans ce pub – c’est ici que j’avais connu mes premiers succès – et mes seuls pour être tout à fait honnête. Que j’avais parfois conquis le publique – d’autre fois moins. J’aimais ce pub et ce qu’il m’offrait – j’aimais aussi mon boulot de barman se contact très spécial avec les gens – ses quelques confidences qui parfois feraient mieux de rester secrètes. Je n’avais pas à me plaindre. Même les horaires me convenaient pour un papillon de nuit comme moi je ne demandais pas plus. Parfois pourtant je ne pouvais m’empêcher de penser un peu plus loin – d’imaginer ce que ma vie aurait pu être si ma sœur n’était pas décédée – si je n’avais pas hérité de la garde des jumeaux et de toutes les responsabilités qui vont avec. Souvent je chasse ces idées mais parfois –parfois je les laisse se faire leur place j’imagine les endroit où j’aurais pu jouer – ce que j’aurais voulu faire de ma vie et puis j’oublie – je reviens sur terre je monte sur cette petite scène dans ce petit bar et je trouve que c’est déjà bien – c’est assez pour me rendre heureux. Je crois qu’il ne faut pas trop en demander dans la vie.
Une fois les branchements de la guitare remis en place je quitte la scène pour me diriger à nouveau vers le bar. La soirée est tranquille – pas trop de monde surtout quelques habitués et c’est d’ailleurs l’un d’entre eux que je vois de loin accoudé au bar. Un nouvel habitué mais qui est venu plus d’une fois ces derniers temps. Je lui fais un sourire amical alors que je passe près de lui. « Salut... » « Salut mon pote. » J’ai toujours eu une certaine proximité avec les clients du bar – les traitant comme des amis alors même que l’on se connaît à peine. La plus part s’en accommode je crois même que ça leur plait bien et pour ceux que ça dérange ils se font servir par quelqu’un d’autre. Je ne compte pas changer pour ça. Je saute derrière le bar pour retrouver ma place. Encore quelques minutes puis ça sera à mon tour de monter sur scène. « Je t'ai entendu l'autre soir. C'était plutôt bon. » J’ouvre les yeux un peu étonné du compliment. Je ne suis pas habitué à en avoir des gratuits comme ça alors même que je n’ai pas encore joué. « Whoua et bien… Merci ! » Je lui adressais un signe de tête reconnaissant reluquant un peu le jeune homme. Plutôt mignon il pourrait bien être à mon gout… Mais je doute qu’il aime les hommes. Pour autant je me dis que qui ne tente rien n’a rien. Je finis donc par lui tendre une poignée de main amicale. « Je m’appelle Elio au fait ! J’ai vu que tu trainais souvent pas ici ces derniers temps… Je peux comprendre l’endroit est addictif. » A son accent j’ai vite pu deviner qu’il n’est pas du coin mais je me garde la question pour plus tard. J’aime en apprendre plus sur les clients récurrents qui viennent se poser ici – la plus part d’entre eux me ressemblant sur bien des points. « Tu t’y connais un peu en musique ? » Le terme plutôt bon qu’il avait utilisé me laissait deviner que c’était le cas. C’était le genre de phrases qui laissait deviner qu’on avait déjà un petit bagage musical sous la main – de quoi comparer tout du moins.
Pour une première approche, ce n'était pas si mal. Bien qu'il se serait quand même donné des claques pour sa tournure de phrase. Mais apparemment cela n'avait pas gêné son interlocuteur qui le gratifia d'un « mon pote ». Bon en même temps, il était barman. Alors il avait plutôt intérêt à être agréable ou tout au moins, amical avec les clients. Cela lui assurait quelques billets de plus. Et ce n'était jamais désagréable ça. Kael en était le premier conscient. Seulement, cela l'aurait arrangé un peu que le type en face de lui, soit plus taciturne. Peut-être alors qu'il aurait eu moins de remord à jouer ainsi la comédie... quoique là, il ne jouait pas. L'américain ne mentait pas. Pas pour l'instant en tout cas. Et ça, c'était déjà un poids en moi sur sa conscience. Parce que oui, il en avait une. Kael observa le barman se remettre derrière le comptoir. Il avait posé ses doigts autour de sa bière. Il la faisait doucement tourner tout en observant ce qui se passait devant lui. La conversation était donc engagée. Et c'était la première fois depuis son arrivée. Cela aurait arrangé le jeune homme si celui qui se tenait en face de lui, était exécrable. Sauf que ce n'était apparemment pas le cas. Ou alors il jouait bien le jeu. Il n'en savait rien. Il ne pouvait pas se faire une opinion en si peu de temps. Et ce n'était pas son genre, juger sur les apparences. Il attendait de le connaître pour ça. S'il avait le temps pour ça. L'avenir seul pouvait donner une réponse à cette interrogation. Aux mots d'Elio, Kael reporta son attention sur lui. Apparemment, il n'était pas habitué aux compliments. Pourtant, le cadreur n'avait dit que la vérité. Il n'était pas du genre prétentieux et reconnaissait bien volontiers le travail des personnes qui pouvaient l'entourer. Et c'était normal. Pour lui, ça permettait de s'améliorer, d'aller de l'avant. Et puis, ça permettait de souder les relations. Les amitiés débutaient souvent de cette façon. « Y'a pas de quoi. » Kael avait simplement souligné ce qu'il avait observé et surtout, entendu. Même si cela l'ennuyait de se dire qu'ils avaient ça en commun. « C'est mérité. » Il baissa les yeux sur sa bouteille. S'il s'écoutait, il pourrait la boire d'un trait et quitter tout de suite le pub. Mais il ne pouvait pas. Lui, il était la raison de sa venue ici. C'était pour ça qu'il avait traversé un océan. Pour ça, qu'il s'était fâché avec sa sœur. Alors il devait aller jusqu'au bout. Et puis ce n'était pas comme si la conversation s'annonçait ennuyeuse. Ils avaient des goûts en commun même si ça, Kael préférerait s'étouffer avec sa bière plutôt que de l'admettre. Il suivit ensuite le regard de son interlocuteur avant que ce dernier ne vienne à lui tendre la main. L'américain s'en empara alors qu'il se présentait. « Kael. » Il traînait ? Oui c'était probablement l'imagine qu'il donnait. Il squattait souvent l'endroit ces derniers temps. Et pour une bonne raison mais ça, il ne pouvait pas le dire. « Je confirme. L'endroit est pas mal. La bière n'est pas mauvaise et la musique est bonne. » Un sourire flotta sur ses lèvres du cadreur. Là non plus, il ne mentait pas. A Chicago, il avait l'habitude de passer du temps dans des pubs irlandais. Et il n'arrivait pas à retrouver ce genre d'ambiance. Ici, il se sentait encore un peu étranger à tout. Et ça devait se sentir et surtout s'entendre à son accent. Il avala une nouvelle gorgée de sa bière alors qu'Elio lui posait une autre question. Il releva ses yeux sur lui et répondit tout en reposant sa bière sur le bois du comptoir. « Je me débrouille... » Il se passa une main dans les cheveux. « Ma mère est musicienne. Elle est pianiste. Je crois qu'elle m'a transmis sa passion. » Oh, il n'irait pas dire qu'il était aussi doué qu'elle. C'était même bien loin d'être le cas. Sa mère était une véritable artiste. Lui, il pensait qu'il avait ça dans le sang. Mais l'avoir dans le sang, ne signifiait pas pour autant être virtuose. A vrai dire, il avait même très peu pratiqué le piano ces derniers temps. « Je joue aussi de la guitare et de la batterie. » Il arrivait souvent quand il était plus jeune, de retrouver Carter, James et Ashton pour faire des répétitions dans le garage de ce dernier. C'étaient de bons souvenirs. Cela lui manquait. « Quand je voyage, il m'arrive de prendre ma guitare. » Sauf là, parce qu'il avait déjà un gros sac et que franchement, il avait pensé à autre chose qu'à sa guitare. Mais elle lui manquait, vraiment. Kael esquissa un nouveau sourire avant d'ajouter : « La musique me manque un peu. C'est peut-être pour ça que je traîne souvent ici. » Il reprenait un peu les paroles d'Elio. Ça le faisait marrer à vrai dire. Mais ça prouvait qu'il n'était pas passé inaperçu et qu'il avait eu raison d'y aller tout doucement.
Ca fait toujours du bien, d’entendre que ma musique plait – ou du moins qu’elle est appréciée pour ce qu’elle de la musique pas trop mauvaise. De plus j’aime bien la tête de ce mec, je ne m’explique pas trop pourquoi – il me fait penser à quelqu’un mais impossible de remettre un nom sur cette personne alors je laisse couler. Il a l’air un peu stressé peut-être ce qui devrait attirer mon attention mais je n’ai jamais été très méfiant envers les gens – puis si ça se trouve il vient de débarquer en ville et je sais ce que c’est que d’être un petit nouveau, de découvrir les choses. Heureusement pour lui il est tombé au bon endroit – un bar sympa ou il peut écouter de la bonne musique et boire un bière tranquillement – du moins pour peu qu’il ne vienne pas le vendredi et le samedi soir car là l’ambiance est un peu différente et le pub bien plus bondé. « Kael. » « Enchanté Kael. » Une vieille habitude de répéter le prénom une fois que je l’ai entendu. J’ai vu dans un documentaire random que ça permettait de mémoriser les prénoms plus facilement. Je suis pas sûr que ça marche mais il se trouve que j’oublie assez peu souvent un prénom quand on me l’a dit. Ce n’est peut-être pas une coïncidence. « Je confirme. L'endroit est pas mal. La bière n'est pas mauvaise et la musique est bonne. » Au moins on est d’accord sur ce point. « J’ai même entendu dire que le barman était cool. » Je rigole un peu me lançant des fleurs pour détendre un peu l’atmosphère alors que je jette un regard vers le musicien sur la scène. Qui se débrouille pas si mal il faut bien l’avouer me demandant si le jeune homme en face de moi est lui aussi un amateur. « Je me débrouille... Ma mère est musicienne. Elle est pianiste. Je crois qu'elle m'a transmis sa passion. » Un sourire sincère c’était installé sur mes lèvres alors que j’écoutais Kael me parler de cette passion que nous avions de tous évidence en commun. « Ah les mères… » Je ne pouvais que le comprendre. « Je vois tout à fait le genre… Ma belle mère est une férue d’art ! Je pense qu’elle m’a bien aidé pour suivre cette voix aussi. Sans elle je serais sans doute pas là ce soir. » C’est sûr que ce n’est pas le paternel qui aurait approuvé bien au contraire. Combien de fois l’avais-je entendu me dire que la musique était futile tout comme moi et qu’il me voyait destiné à plus grand que ça ? Il n’avait jamais rien compris et ne comprendrais sans doute jamais. Je m’étais fait une raison. « Je joue aussi de la guitare et de la batterie. » C’était plutôt honorable, j’avais pour ma part à mon actif bien plus d’instruments que ça mais au final je me tournais le plus souvent vers le piano et la guitare. Les classiques. « Quand je voyage, il m'arrive de prendre ma guitare. » Je ne pouvais que comprendre j’avais fait le tour du monde accompagné uniquement de ma guitare peut être une des seules choses que j’avais emporté partout avec moi. « Et c’est le cas là ? » Je n’étais en fait pas vraiment persuadé qu’il soit en voyage. Il pouvait bien être installé ici depuis longtemps. « Enfin j’ai imaginé que tu étais en voyage par ici puisque je ne t’ai jamais vu avant et que, clairement, tu n’es pas du coin vu le jolie accent que tu traines. » J’avais de la peine à savoir d’où il venait mais au moins la certitude que c’était du continent américain. J’avais passé assez de temps là-bas pour le savoir. « La musique me manque un peu. C'est peut-être pour ça que je traîne souvent ici. » Je lui tapotais vaguement l’épaule pour lui dire que je pouvais comprendre. « Tu prêches un convaincu, je ne peux pas vivre sans la musique. » Une demoiselle venait de s’approcher du bar et je prenais sa commande délaissant pour un moment le jeune homme avant de revenir vers lui. J’aimais bien notre conversation, et quelque chose m’intriguait chez lui sans que je puisse identifier ce que c’était. Peut-être qu’il me plaisait – mais ce n’était pas vraiment la même sensation que celle que j’ai quand je sens un bon feeling avec un homme ou une femme. Peut-être juste la passion commune qui nous liait. « Je vais jouer après… Si tu connais une des musiques je peux bien t’inviter sur scène. Un passionné de musique devrait pas s’en passer plus de quelques jours si tu veux mon avis. » Je savais aussi que j’avais une vieille guitare qui trainait dans un coin chez moi… Je pouvais toujours la lui vendre pour des pâquerettes. Entre passionnés il faut bien s’aider. « T’as déjà fait un peu de scène ? » Habituellement je jouais plutôt mes compositions mais ce n’aurait pas été la première fois que je partageais la scène avec un musicien du pub. Je sais que parfois ça passe – parfois ça casse mais au pire ce n’est que le temps d’une chanson les gens s’en remettent et quand c’est bien – et bien tout le monde apprécie.
« De même. » Ce serait tellement plus facile s'il était désagréable. S'il était son portrait craché. Mais plus il le regardait, plus il lui parlait et plus Kael commençait se dire qu'il n'était pas comme il se l'était imaginé. Bien sûr, il avait évité de se faire une idée sur lui avant de le rencontrer. Mais son esprit malgré lui, avait fomenté plusieurs hypothèse. Il était comme sa mère ou comme lui, ce géniteur qui les liait tous les deux sans le vouloir ? L'américain ne savait pas à quoi s'attendre. Depuis toujours, il s'était dit qu'il ne ressemblait pas à son père. Qu'il avait davantage le caractère de sa mère. Qu'avait-il de William ? Rien à vrai dire. Même physiquement, il ressemblait à Rachel. Même yeux sombre, même nez, bref... il n'avait rien d'Harrington. Et depuis qu'il était gosse il s'en féliciter. Alors quand ses prunelles avaient croisé Elio, ce soir il y a quelques jours. Il s'était dit que lui, devait lui ressembler. Peut-être pas physiquement, mais psychologiquement. Mais plus il parlait avec le barman et plus il en venait à se dire que non, lui non plus n'avait pas trop hérité de leur géniteur. Et c'était tant mieux pour lui. Tout ce qu'il savait de son père, il n'en était pas fier. C'était le genre d'homme qui n'hésitait pas à vous écraser si vous étiez sur son chemin... Et surtout pas le genre d'homme qui faisait souvent des compliments, loin de là même. Puis à la nouvelle remarque de son interlocuteur, Kael jeta un œil le long du comptoir. « Ah bon ? Quel barman ? » Un sourire amusé s'afficha sur les lèvres de l'américain, faisant comprendre à son acolyte qu'il plaisantait. C'est vrai, il était plutôt cool. Enfin pour l'instant. La conversation ne faisait que commencer. Mais il avait un bon feeling. Et ça, Kael ne savait pas comment le gérer... Quand il avait appris pour cette seconde famille, il avait été furieux. Il avait été blessé aussi. Parce qu'il s'était dit que si son père ne lui avait jamais vraiment accordé la moindre importance, c'est parce que ce premier fils était tout ce qu'il attendait. C'était sûrement ça. Elio avait réussi là où il avait échoué. Il n'avait pas fait de longues études. Il n'avait jamais été assez brillant à l'école. Il était plutôt artiste, que col blanc. Mais il était comme ça. Kael ne pouvait pas changé. Et il n'avait pas envie de changer. Aucun parent ne devrait demandé à son enfant de changer, pour être quelqu'un qu'il n'était pas. L'américain prit une gorgée de sa bière alors qu'Elio reprenait la parole. Il était un peu étonné que ce dernier parle de belle-mère et non de mère. Est-ce que son père avait divorcé sans qu'il le sache... Attendez là... est-ce que cela voulait dire qu'il avait épousé une seconde femme alors qu'il refusait la main de sa mère depuis près de trente ans ?? Cette information perturba un peu Kael même s'il ne le montra pas. Il baissa son visage sur sa bouteille alors que le barman continuait la conversation. « Étrange que les femmes de notre famille ont une influence sur nous, sans qu'on le désire vraiment... » Il était influencé par sa belle-mère et Kael, par sa mère. Ils avaient fait confiance à des femmes, à défaut d'avoir des hommes qui méritaient cette attention. Encore une fois, sans le vouloir, ils étaient pareils. L'américain porta son attention sur les musiciens qui étaient sur scène. La musique était bonne et l'espace d'un instant, il oublia pourquoi il était là. Mais les paroles d'Elio le ramenaient sur terre. Il reporta son regard mordoré sur lui. « Pas vraiment. Je suis ici pour le boulot. Je suis cadreur. On m'a proposé un poste dans un label musical. Je m'occupe de leurs clips et de leur communication télévisuelle. » Et dire qu'il faisait du freelance jusque là... Il avait accepté cette offre parce que c'était un nouveau challenge. Et que le jeune Harrington aimait ça. Mais cela lui permettait aussi de mettre un pied à Brisbane. Ce qui était plutôt utile pour faire ses recherches. « Je suis américain. Je suis né à Boston. » L'accent de Kael plaisait, surtout aux femmes. Il n'était pas tellement prononcé même s'il venait du nord. Mais on ne pouvait pas dire en effet qu'il avait l'accent du coin. Kael n'avait pas parlé de Chicago. Parce que pour l'instant, il ne voulait pas se dévoiler. Il ne voulait pas dire quelque chose qui pourrait permettre à Elio de remonter jusqu'à sa famille. Peut-être qu'il avait tort. Mais il pensait d'abord à elles, comme il l'avait toujours fait. Mais ces petits mensonges ici et là, commençaient à l'ennuyer. Jamais il n'avait joué un rôle. Et à vrai dire, il n'en jouait pas là. Sauf qu'il n'était pas franc et ça, ça l'énervait. Il perdait peu à peu son sourire avant qu'Elio ne reprenne la parole. Il ne pouvait pas vivre sans musique, tout comme lui. Un nouveau sourire se dessina sur les lèvres de l'américain. « Quand j'étais gosse, je faisais parti d'un groupe avec des potes. Je jouais ou je chantais, parfois les deux. On répétait après les cours. Je ne voyais jamais l'heure passer. » Il se passa à nouveau une main dans les cheveux. C'était sa mère qui venait le rechercher, ou Kara, furieuse. Il se souvenait de ces moments-là. Mais la musique était la seule chose qu'il ne partageait pas avec sa sœur. Sa jumelle n'était pas musicienne. Elle ne jouait d'aucun instrument. Et ça lui avait toujours manqué à Kael. Alors la proposition d'Elio de le rejoindre sur scène, l'étonnait. « C'est une chouette proposition... mais je voudrais pas m'imposer. Je ne t'ai pas raconté tout ça dans ce but. » Mais ça le faisait sourire. C'était sympa qu'Elio pense à lui. Cette proposition lui faisait envie, comme il la redoutait en même temps. Kael n'était pas venu aux États-Unis pour faire ami-ami avec Elio... Enfin, il ne savait plus ce qu'il était venu chercher. Des réponses, c'était certain. Mais là en parlant avec lui, il se rendait compte qu'ils avaient beaucoup de points communs. Et ça, c'était perturbant. « Tu joues quoi comme musique ? » Il l'avait déjà entendu oui, mais il ne connaissait pas tout de son registre non plus. La proposition le tentait oui. Et si leurs registres concordaient, peut-être qu'il pourrait monter sur scène avec lui, sans craindre de faire un flop. « Pas vraiment. Enfin avec des potes, on joue parfois. On passe de bons moments. Mais ce sont des amis avec qui j'ai grandi. » Ce n'étaient pas des inconnus. Ils faisaient de la musique pour eux, c'est tout. Il ne s'était jamais demandé si sa musique pouvait plaire à quelqu'un d'autre.
C’est une des raisons qui me fait aimer ce boulot. Le fait d’avoir quand les soirées sont plus calmes le temps de me poser et de parler simplement. Ce n’est pas donné à tous et certain s’en plaindraient peut-être mais quelque chose me fascinait dans la nature humain. Je dois l’avouer le plus souvent les habitués du bar avaient une moyenne d’âge un peu plus élevé que Kael et une vie plutôt dramatique ce qui les poussait bien souvent à venir noyer leur chagrin dans l’alcool. Et si certaines histoire m’avaient mises plus d’une fois mal à l’aise elles faisaient au final relativiser un peu. Ma peine de cœur n’était rien de plus que ce qu’elle était. Kyrah m’avait quitté – elle avait préféré une autre à moi et certes, j’avais le cœur en miette mais comparé aux histoires rocambolesques que je pouvais entendre je devais sans doute m’estimer chanceux. Mais c’était aussi intéressant d’avoir en face de moi un garçon qui de toute évidence devait avoir à peu près mon âge et des centres d’intérêts communs aux miens. « Étrange que les femmes de notre famille ont une influence sur nous, sans qu'on le désire vraiment... » Je rigolais sincèrement en nous imaginant tous deux comme des jeunes garçons influencés par leur mère. « Le pouvoir des femmes mon pote… Elles nous font faire ce qu’elles veulent c’est bien connu. » Je rigolais évidement bien que je ne sois pas si loin de la vérité, et sans parler de ma belle mère la plus part des femmes que j’avais laissé rentrer dans ma vie avait eu une certaine emprise sur moi. Et si je me plaisais à croire que j’usais de mon libre arbitre certaines d’entre elles avaient su user de leur charme pour me faire dévier de mes convictions. Ce n’était pas le cas avec la musique – elle et moi nous étions choisis il y a longtemps mais si je devais être honnête, à l’époque déjà ce qui m’avait plus dans la musique c’était cette capacité qu’elle me donnait de communiquer avec Kaecy… La jeune femme avait beau être devenue au fil des ans ma meilleure amie je restais persuadé qu’elle n’était pas pour rien non plus dans mes choix de vie. « Pas vraiment. Je suis ici pour le boulot. Je suis cadreur. On m'a proposé un poste dans un label musical. Je m'occupe de leurs clips et de leur communication télévisuelle. » Hochement de tête convaincu j’étais plutôt impressionné je devais bien l’avouer. « Wouah jolie job ! J’imagine que tu dois côtoyer du beau monde. » Le milieu de la musique étant une industrie bien a elle, et pas si ouverte j’étais là pour en témoigner. « Je suis américain. Je suis né à Boston. » « Et tu as fait tous ce chemin pour venir travailler ici ! Plutôt courageux. C’est pas la porte à côté. » Je pense qu’aujourd’hui je ne pourrais plus tout quitter et surtout pas pour un job. Mais à l’époque je n’aurais sans doute pas hésité une seconde – cette époque où j’étais libre comme l’air et qui était belle et bien révolue aujourd’hui. « Boston c’est une jolie ville. Le Massachusetts on ne rigole pas là bas. » Ou au contraire on rigole bien. « J’y ai vécu pendant quelques mois il y a plusieurs années maintenant. A la base j’y allais pour l’ambiance musicale qui y règne et j’avoue que je n’ai pas été déçu. Ils savent ce que c’est que de la bonne musique. J’ai aussi participé à un gay pride… Je dois dire que les gens étaient plutôt… Déchaîné. Je suis pas prêt d’oublier cette soirée. » Je rigolais un peu, parler de ma bisexualité n’a jamais été un soucis pour moi – même si je peux souvent voir que le sujet met les gens un peu mal à l’aise, ou leur donne une vison un peu différente de moi. Il faut bien le dire au première abord on imagine que mon truc c’est les femmes – et on a pas tout tord j’ai connu bien plus de femmes qu’homme. Mais je ne vois pas pourquoi je me contenterais de ça sous prétexte que c’est ce que la société attend de moi. « Quand j'étais gosse, je faisais parti d'un groupe avec des potes. Je jouais ou je chantais, parfois les deux. On répétait après les cours. Je ne voyais jamais l'heure passer. » Je reconnaissais bien sur son visage cette sensation très spéciale que la musique crée. Et je pouvais aisément deviner que comme moi Kael avait besoin de ça dans sa vie pour exister. Pour donner un sens. C’était donc une logique pour moi que de l’inviter sur scène. « C'est une chouette proposition... mais je voudrais pas m'imposer. Je ne t'ai pas raconté tout ça dans ce but. » « Je sais bien et crois moi, je ne me sens pas du tout obligé de te demander ça ! » Loin de là j’étais mettre de moi et ce n’était pas la première fois que je rencontrais un musicien, jamais je ne m’étais obligé a en inviter un avec moi. Mais je ne sais pas il y avait quelque chose qui me plaisait chez le jeune homme, peut être la fraicheur ou la passion que je lisais dans son regard et qui faisait écho à la mienne. « Mais ça me ferait plaisir. La musique est faite pour être partagée non ? » C’était du moins ma philosophie. Et si ça pouvait en plus de ça faire passer un bon moment à tout le monde j’étais pour. « Tu joues quoi comme musique ? » « Honnêtement un peu de tout, j’ai une formation plutôt classique mais ici ce qui plait le plus c’est le vieux rock. Je dois avoir quelques partitions dans le coin. Deep Purple, AC/DC, Jimi Hendrix, les Pink Floyd j’ai même quelques chansons de Queen. Mec si tu veux mon avis ce groupe est orgasmique. Freddie Mercury c’est l’idole de ma jeunesse. » Je me souviens de la tête de mon père quand je lui avais annoncé que je voulais être comme lui. Autant vous dire qu’il m’a bien fait comprendre que si je voulais « to break free » ça serait hors de sa maison et sans oser me travestir. A l’époque j’avais plié, mais la passion n’était pas passée. « Pas vraiment. Enfin avec des potes, on joue parfois. On passe de bons moments. Mais ce sont des amis avec qui j'ai grandi. » Je comprenais bien, pour ma part partagé ma musique avait toujours été un besoin mais chacun était libre de vivre sa passion comme il l’entendait. « Tu sais ici on est presque entre amis – et c’est calme ce soir donc… Ca peut être une bonne expérience. Je te force pas mais si ça te tente. J’ai une guitare toute prête pour toi. Et je suis sûr que ça pourrait être sympa. » Je ne voulais pas non plus qu’il ait l’impression que je lui forçais la main. Au pire j’irais seul, comme à mon habitude.
Spoiler:
Mon dieu cet avatar ! Tellement canon ! Si t'étais pas mon frère
La bouteille de bière en main, Kael observait le jeune homme qui lui faisait face. Plus la conversation avançait et plus il se trouvait des points communs avec lui. Même passion pour l'art, pour la musique. C'était étrange pour l'américain. Jusque là, les seules personnes avec lesquelles il avait été proche, étaient ses sœurs, sa mère et quelques uns de ses amis qu'il avait laissé entrer dans sa bulle. Et là, il se rendait compte qu'Elio était un peu comme lui. C'était déstabilisant et à la fois, ça le rendait encore plus curieux. Il se demandait alors s'ils avaient plus que ça en commun. Mais pour l'instant, il ne pouvait pas se permettre de trop le questionner. Il ne pouvait pas. Il devait au contraire prendre son temps. Parce que finalement, il n'était pas certain de vouloir tout savoir sur lui et sur sa famille. Parce qu'il n'était pas là pour faire ami ami... enfin ce n'était pas son but. A vrai dire, il était encore sous le choc de la vérité qu'il avait découvert. Il se sentait encore blessé et trahi par son propre sang. Et ça, ça le rendait encore plus suspicieux envers les autres. Sa confiance, il ne la donnait pas si facilement. Et les récents événements l'avaient confirmé dans son volonté de rester un peu en retrait. Il ne savait même pas ce qu'il était censé faire. Il devrait dire la vérité à Elio, là tout de suite. Seulement dans cette foutue histoire, il n'était pas seul. Il y avait Kael, mais surtout ses sœurs, sa mère. L'américain ne voulait pas leur faire le moindre tort. Parce qu'après tout, il ne connaissait pas Elio. Peut-être que ce dernier pouvait faire un scandale, foutre le bordel, avertir son père et ne pas laisser à Kael le temps de préparer moralement sa mère. Ça ce n'était pas une décision facile à prendre. Alors jusqu'à ce qu'il puisse se faire une opinion sur l'autre Harrington, Kael continuera à garder ses distances. C'était ce qu'il pensait le plus judicieux à ce moment de leur rencontre. Les paroles d'Elio le firent légèrement sourire. « Elles voudraient que l'on fasse ce qu'elles veulent, il y a une différence. » Il ne savait pas pour le barman, mais lui il était un électron libre. A part sa mère et ses sœurs aucune autre femme n'avait réussi à lui passer une corde autour du cou. Il n'avait eu qu'une histoire sérieuse, enfin si à cette époque, on pouvait dire ça. Kael n'était pas vraiment prêt à vivre une vie à deux. Il aimait trop sa liberté pour ça. Il aimait trop pouvoir partir du jour au lendemain sans avoir de raison à donner à qui que ce soit. C'était ça la liberté pour lui. Et il y tenait beaucoup. Par contre, ça semblait différent pour Elio. Il ne savait pas comment ça se passait avec la gente féminine. Et à vrai dire, il n'était pas trop curieux pour avoir envie de savoir. C'était sa vie privée. « Ça m'arrive. Enfin j'ai rencontré quelques stars mais franchement, ce n'est pas vraiment ce que je recherche dans mon boulot. » Oh non, c'était même loin d'être le cas. Kael n'était pas fan de quoique ce soit, sauf peut-être de Slash... mais ça c'était vraiment l'exception. C'est parce que Slash était un dieu en même temps. Kael n'était pas objectif quand on parlait de lui. Combien de fois, il l'avait imité. C'était en regardant ses vidéos sur internet qu'il s'était amélioré dans son maniement de la guitare. « Je ne pense pas que ce soit courageux. J'ai toujours aimé voyager. Et puis je me dis que si je ne le fais pas maintenant, je ne le ferais jamais. Et je ne suis pas du genre à vivre avec des regrets. Une vie, on en a qu'une. » C'était un peu son leitmotiv. Il fallait vivre sa vie et non la rêver ou la lire dans les bouquins. Sinon on se réveillait un peu matin à soixante-dix balais, des regrets plein la tête. Non merci. « Vraiment ? On aurait pu se croiser avant alors. » C'était étrange comme sensation. Peut-être qu'ils s'étaient déjà vus sans le savoir. Mais Elio avait raison sur un point, la région était fantastique. Ses tantes vivaient à Boston et il passait quelques vacances là bas. A l'évocation de la gay pride, l'américain sourit un peu plus. « Oui, j'imagine. Ce n'est pas le genre d’événement qu'on arrive à oublier. » Kael avait des amis homo ou bi, ce genre de propos ne le choquaient pas. « Surtout si on trouve les bonnes personnes avec qui s'amuser. » Parce que bon, Boston était aussi surnommée la ville puritaine. Il y a encore une bonne part de la population qui avaient un état d'esprit rétrograde. Kael prit une nouvelle gorgée de sa bière. Ils parlaient à nouveau de la possibilité pour Kae' d'aller sur scène. Ça le tentait vraiment... Il avait envie d'accepter. Mais dans un autre sens, il ne voulait pas être trop proche du barman. Depuis le début, il se disait qu'il n'était pas là pour lier amitié, juste pour avoir des réponses à ses questions. Mais tout cela semblait plus compliqué. Surtout qu'il avait un bon feeling avec Elio. Il devait l'avouer. Il le regardait et il se disait : « Bon sang, c'est mon frère ! » Et ça, ça lui tordait l'estomac. Il avait toujours un peu de rancune en lui. Mais il se disait qu'Elio n'était sûrement pas au courant de tout ça... ou peut-être que si. En fait, il n'en savait rien. Peut-être qu'il était dans la même galère que lui. Kael reporta son attention sur lui quand il aborda le sujet de ses références musicales. Et là aussi, l'américain ne pouvait que constater que sur ce plan-là aussi, ils étaient pareils... Lui aussi, il ne jurait que par le bon vieux rock. Celui qu'il écoutait quand il était gosse, qui a bercé son enfance, son adolescence et jusqu' à maintenant, quand il voyageait, il n'écoutait que ça. Kael était un grand fan d'Ac/Dc, mais aussi des Red hot, Gun's N' Roses bien sûr, Metallica et bien sûr Queen aussi. Malgré lui, Kael esquissa un autre sourire. « Je n'écoute que du rock. Et tous les artistes que tu viens de citer, ont bercé mon enfance. Et je confirme pour Queen. J'aurais adoré les voir en concert. » Seulement il était né en 1988 et Freddie était mort trois ans plus tard. « Enfin je me suis rattrapé avec d'autres groupes. Mais un de leur concert, ça devait être énorme. J'aurais tout donné pour être à celui de Wembley en juillet 1986. » Toutes les chansons de Queen étaient devenues cultes. Et l'américain n'avait pas encore croisé une personne qui ne les aimait pas. Ça n'existait pas à moins de ne jamais avoir entendu une de leurs chansons. A la nouvelle proposition d'Elio, il haussa un peu les épaules. « Pourquoi pas. Si en plus, une guitare m'attend. Je ne peux pas refuser. » Après tout, qu'est-ce qu'il risquait ?
Peut-être que j’étais un peu jaloux. Jaloux de ce mec que je ne connaissais même pas et dont je ne pouvais qu’imaginer la vie. C’est sa liberté qui me faisait de l’œil le fait qu’il puisse se trouver ici seul et loin de chez lui sans se poser plus de question. Qu’il puisse juste boire une bière et profiter du moment sans avoir l’air d’être tenu par des obligations. « Je ne pense pas que ce soit courageux. J'ai toujours aimé voyager. Et puis je me dis que si je ne le fais pas maintenant, je ne le ferais jamais. Et je ne suis pas du genre à vivre avec des regrets. Une vie, on en a qu'une. » Un sourire un peu triste sur le visage j’essuie mon bars avec une pâte comme pour essuyer certains de mes propres regrets. « T’as bien raison… Tant que tu peux le faire il faut en profiter. » Au fond je l’ai fait moi aussi, j’ai vécu presque 8ans en voyageant un peu partout dans le monde, en dilapidant un héritage que je n’avais même pas mérité. Je n’ai pas eu besoin de travailler, pas eu besoin de me poser de question. J’ai eu ma belle époque aujourd’hui ma vie est faite autrement mais je peux aussi y trouver du bonheur. C’est parfois difficile mais vivre avec les jumeaux apporte bien plus de joie que ce que j’aurais pu imaginer, et puis Kaecy est la partenaire parfaite pour m’y aider. Je n’ai pas à me plaindre, c’était aussi le moment sans doute, celui de me poser, d’arrêter de faire des conneries avant de finir dans une tombe. J’aurais juste aimé que ma sœur ne meure pas au milieu de cette histoire. « Vraiment ? On aurait pu se croiser avant alors. » Haussant légèrement les épaules j’avais finalement posé ma pâte pour poser mes deux mains sur le comptoir. « Qui sait, c’est peut-être même déjà arrivé. » Le monde est petit j’en ai plus d’une preuve. Et le destin peu parfois avoir un drôle d’humour. Vu sa réponse je doutais de l’avoir croisé à la gay pride et encore plus qu’il soit lui aussi intéressé par les hommes. J’avais lancé une perche pour m’en assuré et de toute évidence il ne l’avait pas saisi, j’avais là ma confirmation que Kael ne m’avait pas abordé dans le but de me draguer, ne sachant pas trop si j’étais déçu ou pas. Il y avait un feeling un peu étrange entre nous deux, comme si le courant passait bien mais qu’il y avait une certaine retenu de son côté. Je ne pouvais pas l’en blâmer, faire ami-ami avec les barmans ce n’est pas une habitude pour tout le monde – ça peut même en rendre certain mal à l’aise quand je leur parle.
Je devais l’avouer plus le temps passait et plus j’avais l’envie que le jeune homme monte avec moi sur scène, j’avais comme un bon pressentiment et en général mon instinct ne trompait que rarement. « Je n'écoute que du rock. Et tous les artistes que tu viens de citer, ont bercé mon enfance. Et je confirme pour Queen. J'aurais adoré les voir en concert. » C’était aussi un de mes grand regret, mais je m’étais rattrapé en regardant tous les lives que j’avais pu trouver et en passant en boucle leurs album. « Enfin je me suis rattrapé avec d'autres groupes. Mais un de leur concert, ça devait être énorme. J'aurais tout donné pour être à celui de Wembley en juillet 1986. » « M’en parle pas… » De toute évidence lui et moi avions les même références ce qui ne faisait que d’accentuer mon sentiment amical et mon envie de la voir accepter la proposition. « Pourquoi pas. Si en plus, une guitare m'attend. Je ne peux pas refuser. » C’est un sourire sincère cette fois qui était apparu sur mon visage alors que je passais à nouveau de l’autre côté du bar. « Parfait ! Je vais préparer ça je reviens. » Quittant mon acolyte j’étais allé m’assurer que j’avais ce que je venais de lui promettre et prévenir le patron que je ne serais pas seul ce soir. Revenant vers lui j’avais posé une main avenante sur son épaule. « Ca sera à nous d’ici quelques minutes à peine ! » Un sourire un peu amusé sur le visage je me réjouissais de pouvoir partager ce moment avec quelqu’un. « Je pensais à ‘Under pression’, je la connais par cœur mais il doit y avoir une partition dans le coin si besoin, t’en pense quoi ? » J’avais plus d’une proposition à lui faire mais je savais la chanson plutôt adaptée à un duo, David Bownie et Queen nous en avaient donné la preuve. « Enfin si tu as des propositions je suis preneur aussi ! Faut savoir sortir de son confort parfois. » Je lui avais fait un clin d’œil alors que l’actuel artiste sur scène finissait sa dernière chanson. Ca allait être notre tour.
Bien qu'il avait toujours en tête le bonheur et l'intérêt premier pour sa famille, pour ses sœurs, Kael avait toujours été du genre à écouter son cœur et ses envies. Et il adorait voyager. Rencontrer de nouvelles personnes, découvrir des lieux nouveaux, parfois insolites, il adorait ça. C'était une façon pour lui de repousser ses limites et de prendre à chaque fois conscience que la vie, il fallait en profiter, qu'il était encore jeune. Ou qu'il pouvait tout simplement encore le faire. Il était en bonne santé. Il avait encore un peu d'économie sur son compte en banque alors pourquoi pas. C'était sa philosophie. Et s'il pouvait, il en ferait profiter ses sœurs mais il fallait encore plus d'argent pour ça. Ce qu'il ne pouvait pas encore se permettre pour l'instant. Et puis certaines étaient encore trop petite. Kiara n'avait que cinq ans. Son monde merveilleux s'arrêtait au palais d'Elsa à Disneyland. Mais peut-être qu'un jour, il pourra leur faire partager cette passion. D'ailleurs, il songeait soudainement à sa sœur. Celle-ci lui manquait. Il n'aimait pas quand ils restaient trop longtemps fâchés. Et il se promettait de lui téléphoner après cette soirée. Il avait vraiment besoin d'entendre sa voix. Même si c'était pour qu'elle lui crie dessus. C'était pas bien grave. Parce qu'il n'y avait qu'avec elle, que Kael se semblait complet. Elle était sa moitié et ils formaient un tout. Sans elle, il était un peu perdu. Surtout quand il était face à Elio et que ce dernier, malgré le fait qu'ils étaient deux étrangers l'un pour l'autre, faisait tout pour le mettre à l'aise. Et ça, ça ne l'arrangeait pas vraiment l'américain. Enfin, dans un sens il appréciait ça. Parce que malgré lui et malgré les circonstances, Elio semblait être sur la même longueur d'ondes que lui... Et même si ça contrariait Kael, ça lui tordait un peu l'estomac. Parce qu'ils se ressemblaient... Parce qu'ils étaient frères. C'était ce que se disait le cadreur depuis plusieurs minutes. Ils avaient beaucoup de points communs. Mais en même temps, ils avaient à peu près le même âge, ils avaient baigné dans la même culture. C'était ce que se disait Kael. Comme pour se rassurer et repoussait loin devant lui, que la seule explication plausible à cette similitude entre eux, était une fraternité non désirée.
Et le pire, c'était que finalement, ce bon feeling, le cadreur le ressentait. Alors il avait encore plus de mal à savoir comment il devait réagir. Peut-être que sa jumelle avait raison et qu'il aurait du rester à Chicago et ne pas chercher à connaître Elio... Peut-être mais l'américain se disait aussi que finalement, Elio aussi avait le droit de connaître la vérité. Kael n'avait pas eu le choix. Il l'avait eu en pleine figure, de plein fouet, comme un direct du droit qui vous envoie fatalement au tapis. C'était cette sensation que Kael avait ressenti en découvrant que son géniteur avait une autre famille. Et à ce moment-là, plusieurs questions trouvèrent enfin une réponse. Même si c'était douloureux. Finalement, Kael préférait savoir... Il pensait surtout à sa mère et à ses sœurs. Les plus petites avaient encore besoin de leur père... enfin pour jusque là, c'était le cadreur qui avait assumé toutes les responsabilités. Mais un père, même merdique, on en avait qu'un... Alors qu'il acceptait de monter sur scène, il voyait Elio quitter son bar pour aller préparer les instruments. Le cœur de l'américain battait la chamade. Et il soupira intérieurement. Il se sentait nerveux. Et ce n'était pas à cause de la scène non. C'était à cause de quelque chose de plus profond, de plus personnel...
Aux paroles d'Elio qui était revenu vers lui, Kael hocha doucement de la tête. « Under pressure est un très bon choix. Et pas besoin de partition. Je pourrais la jouer les yeux fermés. » J'aimais beaucoup cette chanson et ce duo qu'il y avait eu avec David Bowie. Un moment unique dans l'histoire du rock et des artistes. Puis à la question d'Elio, l'américain mit un instant pour réfléchir à tout ça. « Hummm... on pourrait jouer quelque chose de récent comme Biffy Clyro, The Black Keys ou encore Black rebel motorcycle club avec Shadow's keeper. Tu connais ? » Bon ce n'était pas les dernières chansons du groupe mais elle faisait partie des préférés de l'américain. Une chanson qu'il avait joué et rejoué, que ce soit seul ou avec ses potes.
Certaines similitudes auraient pu attirer mon attention – certains regards aussi – ceux qu’il posait sur moi me dévisageant comme si il cherchait quelques chose qu’il n’arrivait pas à trouver. J’aurais pu le voir oui, si j’avais été plus attentif ou quelqu’un de plus soupçonneux, mais ça n’était pas mon cas. J’aimais partager avec les gens – être là dans ce bar à parler avec un parfait inconnu de notre passion commune avait quelque chose de plaisant et je ne cherchais pas plus loin « Under pressure est un très bon choix. Et pas besoin de partition. Je pourrais la jouer les yeux fermés. » Je crois qu’on est plutôt similaire sur ce point – et je sens qu’on va bien s’entendre sur scène. J’ai un bon feeling. « Hummm... on pourrait jouer quelque chose de récent comme Biffy Clyro, The Black Keys ou encore Black rebel motorcycle club avec Shadow's keeper. Tu connais ? » J’étais agréablement surpris des propositions du jeune homme levant un regard conciliant vers lui. « Biffy Clyro ! Ils sont bons j’avoue ! Par contre pour ma part impossible de jouer sans partition… » Je suis un peu déçu mais j’ai une bonne idée pour y remédier. « Je crois bien que tu vas être obligé de revenir une seconde fois pour remédier à ça. » Je lui fais un sourire un peu amusé – je devrais sans doute attendre que l’on ait joué ensemble avant de parler mais c’est plus fort que moi. D’ailleurs on me fait signe que ça va être à mon tour. « T’es prêt ? » Je ne lui laisse pas vraiment le choix de toute façon. Nous nous levons et nous rendons sur la petite scène. Je lui passe la fameuse guitare et nous prenons quelques secondes pour nous accorder. L’un des employés amène un micro à Kael et je me demande si il chante aussi – on verra bien. Je me rapproche un peu du mien pour nous présenter et expliquer un peu la situation – il y n’y a pas beaucoup de monde ce soir de toute façon et si certains sont attentifs, la plus part boivent leur bière de leur côté sans trop faire attention. J’annonce la chanson et jette un coup d’œil au jeune homme qui me prévient qu’il est prêt… Quelques accords de base et nous sommes partis. « Pressure pushing down on me. Pressing down on you, no man ask for. » Mes mains s’occupent de ma guitare alors que mon regard va trouver celui du jeune homme et que je me reconnais un peu en lui – je vois qu’on a cette passion commune – cette envie de bien faire et cette facilité à trouver la musicalité en nous. Nos accords se mêlent à merveille alors que la musique continue de se faire entendre. Certaines têtes se tournent pour nous donner un peu plus d’attention ce qui n’est pas pour me déplaire, j’ai l’impression qu’il y a vraiment quelque chose qui passe entre nous et je me félicite de lui avoir proposé ce duo. A la fin de la chanson je tape amicalement sur son épaule pour le remercier lui demandant si il veut remettre ça avec une autre chanson ? Nous continuons donc avec deux autres classiques qu’il connaît par cœur et à la fin de la 3ème chansons je laisse tomber la guitare pour laisser ma place sur scène et nous descendons. Je suis sur un petit nuage. « Je crois que tu ne vas pas avoir le choix de revenir ! T’es vraiment bon en fait ! Et bien trop modeste ! » Nous allons vers le bar et le travail obligeant je repasse derrière pour servir ou un deux clients avant de revenir vers lui. « Je peux t’offrir quelques chose pour nous féliciter ? » Je ne sais pas si il y a vraiment de quoi fêter mais j’ai vraiment apprécié et les gens présents aussi alors tout est bonne excuse pour boire un coup ensemble.
Il aurait préféré détester. Oui il aurait préférer que ça ne colle pas. Qu'ils fassent un fiasco. Mais en fait, leur duo avait bien fonctionné. Ils se complétaient à merveille. Et ça, Kael ne s'y attendait pas. Oui, ils étaient deux musiciens et alors ? Ils n'étaient pas les seuls à avoir cette passion... Sauf qu'ils n'étaient pas des étrangers tous les deux. Même si l'un, n'était pas encore au courant de tout ça. Kael avait été un peu perturbé au début du live. Il avait mis quelques secondes à se reprendre. Elio pourrait mettre tout ça sur le coup du trac, du stress. Même si en fait, c'était loin d'être tout ça. Kael avait déjà joué devant un public. Et il n'était pas timide pour un sou. Non ce qui le perturbait, c'était de voir à quel point, ils s'accordaient bien avec l'autre entité de son binôme. Et ça clairement, ça l'ennuyait. Parce que ça lui rappelait une seconde fois, qu'ils étaient pareils. Qu'ils avaient des points communs. Et Kael ne voulait pas encore s'en rendre compte. Il les voyait, sans les voir réellement. C'était utile pour l'instant. Ça lui évitait de trop cogiter et de ressentir cette culpabilité qui lui étreignait le corps à chaque fois qu'il posait ses yeux sur Elio. Il se demandait s'il avait pris la bonne décision. S'il n'aurait pas du garder ses distances, comme lui avait demandé sa jumelle. Elle avait peut-être raison. Kael se rendait compte qu'il était entrain de se mettre dans une position délicate, autant pour lui que pour Elio. A la base, il ne voulait pas jouer cette comédie. Mais il n'avait trouvé que cette solution. Il ne mentait pas, mais il lui dissimulait pas mal de choses. Et ça, c'était pas correct. Son géniteur l'obligeait à agir de cette façon. Et il le détestait aussi pour ça. Parce que même en étant pas là, il faisait de sa vie, un véritable capharnaüm. Plus les notes avançaient, les accords, plus Kael se sentait bien. La musique avait toujours eu le temps de le rendre moins nerveux. De lui faire oublier ce qui n'allait pas dans sa vie. Et là, ça ne déroger pas à cette habitude. Pendant quelques instants, il avait oublié qui il était, où il se trouvait. Et cela lui avait fait un bien fou. Seulement dès que la musique s'était arrêtée, il était revenu sur terre, de la façon la plus abrupte qui soit. Il n'a pas le temps de réaliser que deux autres chansons s’enchaînaient. Il était un automate et il agissait par instinct. C'était ce qui fonctionnait le mieux en ce moment avec lui. Il évitait de se poser trop de questions. Et c'était reparti, la musique rythmait à nouveau ses gestes. Il coinçait les cordes de la guitare entre ses doigts, comme il l'avait déjà fait des milliers de fois. La musique, c'était une partie importante de sa vie. Encore plus quand il était loin de chez lui. A la fin du mini concert, Elio l’entraînait une nouvelle fois vers le bar. Il avait du mal à remettre ses idées dans l'ordre. Ce duo l'avait plus déstabilisé qu'il ne le croyait. Il avait l'impression d'agir comme son géniteur. Il était comme lui ! Et il refusait cette idée. Il refusait cette comédie, cette mascarade. Il posait ses yeux sur Elio quand ce dernier reprenait la parole. Il l'observait. Il ne faisait même pas attention aux compliments du barman, ni au reste de ses paroles à vrai dire. « Écoute... c'était très sympa... » Il devait sortir d'ici et prendre l'air. Il en avait besoin. Besoin de mettre certaines distances entre l'australien et lui. « Mais faut que j'y aille. » Il reprenait la veste qu'il avait posé sur le comptoir et sortait quelques billets de sa poche pour payer ses consommations. Il ne voulait rien lui devoir, absolument rien.