Nathan ... Ca faisait longtemps qu'elle ne l'avait pas vu. Longtemps qu'elle n'avait pas pris de ses nouvelles. Elle avait organisé un voyage à Londres en août mais il n'avait pas pu se libérer. Alors, elle était partie. Avec Henry. Avec sa nièce. Et Justin qui les avait rejoint en fin de séjour. Ca avait été des vacances de rêves. Surtout que ... Surtout que les choses s'étaient bien passées entre elle et Justin. Ils avaient fini par s'avouer des choses. Mais il avait fini par partir. A cause de l'accident de son père. Parfois, Jessy se demandait comment allait celui qu'elle considérait comme étant son meilleur ami. Et maintenant qu'il était parti, maintenant qu'elle n'avait plus réellement de nouvelles, il lui manquait. Terriblement. Mais elle devait faire avec. Alors, comment elle n'avait pas réellement eu de nouvelles, ces derniers temps, elle s'était dit qu'elle pouvait très bien reprendre contact. Surtout qu'ils avaient été très proches quand ils étaient petits. Son mari de bac à sable. C'était une bonne chose qu'elle le voit. Surtout qu'ils n'avaient jamais réellement eu l'occasion de parler de ce qui avait pu se passer à Londres. Enfin, elle n'était pas certaine qu'elle lui poserait la question aujourd'hui. Mais qui sait ? Peut-être qu'ils finiraient par en parler à un moment ou à un autre. En tout cas, Jessy avait proposé un rendez-vous à Nathan. Enfin, rendez-vous, façon de parler. Elle lui avait dit que ça faisait longtemps et qu'elle avait envie de le voir. Et qu'elle l'attendrait au parc, près du banc, non loin du marchand de glaces. Jessy espérait qu'il accepte de venir. Elle pourrait comprendre qu'il refuse. Parce que ça faisait un petit moment après tout. Et qu'il était temps de rattraper le temps perdu justement. Jessy était arrivée un petit peu en avance et elle s'était installée sur le banc. Téléphone en main, elle pianotait quelques petites choses. Et elle vérifiait, par la même occasion, les sms qu'elle pouvait réceptionner. Histoire de vérifier que Nathan allait pas lui envoyer un message qui lui dirait qu'il ne viendrait pas.
Je n'ai pas hésité longtemps avant d'accepté l'invitation de Jessy de cet après midi. Nous ne nous sommes revu que une ou deux fois après notre rencontre inopinée lors de ma première semaine à Brisbane. Nous sommes resté un tout petit peu en contact mais sans plus, tout deux ayant été occupé de notre côté. Ainsi, Jessy ne sait absolument pas ce que j'ai traversé ces derniers mois. Entre mon pétage de plomb en Août dernier, ma grosse dépression qui s'en est suivi puis celle après la mort de Daniel, mon instabilité psychologique. Mais aussi l'arrivée de Myrddin et surtout le fait que je peux à nouveau marcher. Je pense que c'est ce qui va le plus surprendre mon amie ! Elle n'est pas au courant que le fauteuil n'est de plus en plus qu'un simple souvenir.
Ainsi donc, même si s'est pour rejoindre le centre ville et que c'est donc un long chemin à parcourir, je prends les béquilles. De toute manière, j'ai calculé le chemin, avec le métro je devrais arriver assez proche du parc pour ne pas avoir à trop marcher. Même s'il m'arrive régulièrement de m'y rendre à pied directement. Peu importe, marcher ne me dérange absolument pas. On pourrait même peut-être faire un petit tour dans le parc adjacent. Enfin, on verra bien. Pour l'instant je découvre les joies du métro en tant que bipède ! C'est fou. C'est dans ces moments là que je me rends réellement compte qu'on est vraiment beaucoup plus libre quand on peu marcher. On prends bien moins de place et on les gens ne nous regardent pas avec un dédain certain. Dans le métro c'est autre chose. Il y a des moments où les gens me laisse leur place assise, d'autre non. Comme aujourd'hui. Et je manque de me casser la figure à chaque freinage violent du métro. Jusqu'au moment où un homme prend les choses en main et oblige un jeune de se lever pour me laisser m'asseoir. Je remercie l'inconnu et réussi enfin à me détendre pour les 8 stations qui me restent.
Une fois le métro complètement arrêté, je me lève et en sors. Je me dirige, par reflex mais aussi par nécessite, vers l'ascenseur. Il m'est encore impossible de monter et descendre les escaliers. Enfin, j'y arrive, mais je sais qu'il y a beaucoup de marche. Chez moi je monte un étage mais j'ai du mal à atteindre le bout. Et j'avoue qu'aujourd'hui je n'ai pas envie de me fatiguer de trop, sachant que j'ai encore un petit bout de chemin à parcourir et que je suis déjà en retard. Ainsi donc je monte avec l'ascenseur qui m'emmène à l'air libre et prends à droite pour aller au lieu de rendez-vous.
C'est sans problème que je remarque que Jessy est déjà sur place. Un petit sourire enjoue mes lèvres alors que je m'approche de plus en plus. Que va-t-elle dire ? Comment va-t-elle réagir ? Bien, mal ? Je pense qu'elle ne peut que bien réagir. « Salut Jessy !» lançais-je alors que je me trouve encore à deux pas la jeune femme.
Elle avait penché la tête légèrement en arrière. Comme si elle appréciait le brin de soleil qui venait toucher son visage. Elle savait qu'elle devait prendre un peu de couleurs. Seulement, elle avait l'habitude de ... Et bien, de cramer un peu. Elle avait la peau qui marquait facilement. Donc, quand elle se décidait à faire bronzette, c'était jamais bon pour elle. Du tout. Donc, oui, elle fuyait un peu le soleil. Pour éviter d'être rouge comme une tomate. Mais là, c'était pas les quelques minutes qu'elle allait rester au soleil qui allait lui cramer la peau. Ou du moins, elle n'espérait pas que ça arriverait. Mais passons. Elle attendait donc patiemment Nathan. Et elle bougea la tête quand on l'interpella. Enfin, c'était pas vraiment une interpellation. Mais on venait de la saluer. Pensant que c'était Nathan, elle ne songea pas réellement à redresser la tête. Parce que ... Et bien, parce qu'elle s'attendait à ce qu'il soit dans son fauteuil roulant. Que'elle ne fut pas sa surprise de découvrir que le fauteuil, c'était fini. Et elle avait cet air étonné sur le visage. La bouche légèrement ouverte. Comme si elle ne savait pas quoi dire. Mais c'était le cas. Elle ne savait pas quoi dire. "Nathan ... C'est ..." Elle cligna des yeux. C'était incroyable. Est-ce que c'était possible ? Est-ce qu'elle était en train de rêver ? Non, elle n'était pas en train de rêver. C'était vrai. C'était la réalité. Il était bien debout, sur ses deux jambes. Enfin, il était aidé par des béquilles. Ca allait mieux pour lui. Et c'était une bonne nouvelle. Une très bonne nouvelle. Elle avait fini par se lever pour le prendre dans ses bras afin de le saluer. "C'est incroyable." Elle avait serré son étreinte durant quelques instants avant de le relâcher. Parce qu'elle n'avait pas envie, non plus, qu'il reste debout longtemps. Elle n'avait pas envie qu'il se fatigue ou quoi qu ce soit dans le genre. "Ca fait longtemps que tu t'es sorti de ton fauteuil ?" Elle en vint à déduire qu'ils avaient plein de choses à se raconter tous les deux. "Assis-toi vite. Qu'on rattrape le temps perdu. Parce que c'est quelque ... chose de formidable ... que tu puisses remarcher." Surtout qu'il lui avait dit que c'était définitif. Comme quoi, rien n'est définitif.
Lorsque j’interpelle Jessy, celle-ci rouvre les yeux, redresse le visage et tourne la tête vers moi sans lever le regard. Elle est assise sur un banc et s’attend donc sans aucun doute à me voir à sa hauteur. Faut est, que non. Je suis bel et bien debout et donc plus grand qu’elle sur le coup. Je souris doucement en voyant son regard plus que surpris. Elle n’en trouve même pas ses mots si vous voulez savoir ! Mon sourire ne fait que s’agrandir, d’avantage encore lorsqu’elle se lève. Au final, elle n’est pas beaucoup plus petite que moi je dois avouer. Mais peu importe. Elle s’approche de moi et j’ai tout juste le temps de prendre mes béquilles dans une main et de me stabiliser un peu avant de passer mon bras autour de sa taille pour répondre à son étreinte. Je rigole doucement lorsqu’elle me dit que ce n’est pas croyable.
«Incroyable, mais vrai » souriais-je, amusé, avant de la relâcher. Je reprends une béquille dans chaque main. Elle se recule, m’observe un peu de haut en bas puis, souriant toujours, me demande si ça fait longtemps que je suis sorti de mon fauteuil. J’hausse les épaules « Longtemps, non. Enfin ça dépends. Je réapprends à marcher depuis septembre dernier. Mais ça doit faire un mois à peu plus que je n’utilise le fauteuil que pour le longues distances, comme pour aller au boulot par exemple ou quoique ce soit dans ce genre, tu vois ? »
Je fini par hocher la tête lorsqu’elle me dit de m’asseoir et fait donc comme demander. Une fois installé sur le banc, j’allonge ma jambe droite et remet un peu mon attelle en place. Elle devient de plus en plus désagréable à porter je dois dire. La prochaine fois que je vois mon kiné je le lui dirais et je prendrais éventuellement rendez-vous chez l’orthésiste. Je la desserre donc d’un trou au niveau de la cuisse puis me tourne vers Jessy qui a continué de parler, me disant que c’est quelque chose d’incroyable que je puisse remarcher.
« J’y croyais pas moi-même je dois t’avouer» souriais-je avant d’hausser les épaules «J’ai passé trois semaines en … à l’hôpital début septembre et c’est là que j’ai commencé à avoir des sensations dans les jambes à nouveau. Je pensais d’abord que c’était mon corps qui me jouait un tour, mais au final, non» je lui offre un large sourire « Je commence seulement maintenant que je peux me déplacer sur de plus longues distances à réaliser que … ouais, le fauteuil est de plus en plus un simple souvenir » je souris et me passe une main dans les cheveux « Je ne suis toujours pas totalement sortis d’affaire, mais quand je me dis que les médecins à Cambridge m’ont dit que le fauteuil était définitif pour moi … » je me tais un instant puis soupire doucement en me reculant contre le dossier du banc « Enfin bref» je tourne mon regard vers mon ami, jouant un peu avec mes béquilles «ça va toi ? » demandais-je.
C'était une bonne nouvelle. Une très bonne nouvelle à dire vrai ! Qu'il soit sur ses deux jambes, ouais, c'était top mine de rien. Qu'il puisse marcher à nouveau, c'était la meilleure des choses possibles. Surtout qu'il n'avait pas vécu des choses drôles depuis qu'il était dans son fauteuil roulant. Enfin, en même temps, Jessy ne connaissait pas tous les détails. Elle avait cherché à en savoir un petit peu plus. Mais sans forcément trop chercher à fouiner pour autant. Histoire de ne pas ... Et bien, histoire de ne pas le blesser ou lui rappeler des choses dont il n'avait pas envie de se souvenir. Mais c'était bien ... C'était bien qu'il puisse marcher. Le chemin était encore long, sans doute, avant qu'il se débarrasse totalement de ses béquilles. Mais déjà, c'était une belle victoire. Une bonne victoire. Jessy n'avait pas pu s'empêcher de le serrer dans ses bras. Oui, bon, elle avait fait attention. Parce qu'elle ne voulait pas non plus le faire tomber ou un truc dans le genre. Ca serait bête qu'il se retrouve blessé parce qu'elle l'avait serré un peu trop fort dans ses bras. "C'est pas croyable, c'est sûr. Mais je suis super contente pour toi." Elle avait eu un hochement de la tête. Et bien sûr, elle avait tout un tas de questions pour lui. Elle avait envie dégainer les questions aussi vite que possible. Elle voulait en savoir plus. La rééducation avait commencé en septembre. Et il marchait sur de courtes distances. C'était déjà mieux que rien. "Oui, je pense que je vois. Tu t'es pas encore totalement débarrassé du fauteuil mais ça arrivera bientôt. J'ai aucun doute là dessus." Non. Il était au stade des béquilles. Pour combien de temps il en aurait ? Quelques semaines ? Quelques mois ? Jessy n'en savait rien. Mais elle espérait que ça irait vite pour Nathan. En tout cas, il avait fini par s'asseoir à ses côtés. Parce que ça serait plus simple, et plus confortable pour lui de parler également. Il lui expliqua avoir passé du temps à l'hôpital et que c'était à ce moment qu'il avait eu les sensations dans ses jambes. Elle eut un sourire. Elle était ravie pour lui. "Ils t'ont fait croire à quelque chose. T'avais fini par t'y résoudre et maintenant, tu dois te faire à l'idée que tout va changer." Elle avait eu un léger hochement de la tête. Ca devait pas être facile mine de rien. Pour lui. De reconsidérer les choses. De voir autrement. "En tout cas, j'suis carrément contente pour toi. Si t'as besoin de quoi que ce soit, tu as mon numéro." Qu'il l'appelle quand il voulait. Bon, peut-être pas non plus à n'importe quelle heure de la nuit parce qu'elle n'était pas certaine qu'elle répondrait mais bon. S'il voulait en discuter, il pouvait toujours. "Moi ? Et bien écoute, ça va plutôt bien. J'suis en voie de changer de boulot." Elle pencha la tête légèrement sur le côté. "Enfin, plutôt de lieu d'enseignement. A la rentrée prochaine, c'est fini le collège pour moi. J'passe à quelque chose de plus ... sérieux." Enfin, sérieux, c'était pas vraiment le mot mais bon, oui, c'était différent. "J'vais enseigner à l'université. A des étudiants qui auront choisi la section art et qui seront donc intéressés par ce que je leur raconte." Et pas comme les petits collégiens qui s'en foutaient.