Quatre jours. C'était le nombre de jours qui s'étaient écoulés depuis que Gabriel avait revu Adaline pour la première fois depuis dix ans et demi. Le lendemain qui avait suivi ces « retrouvailles », Gabriel avait demandé à sa secrétaire qu'elle installe un logiciel du nom de « skype » sur son ordinateur. Il n'avait pas donner de raison précise mais elle l'avait fait, elle pensait d'ailleurs que c'était un très bon moyen de communication pour d'éventuels acheteurs qui se trouveraient n'importe où dans le monde. Gabriel avait simplement acquiescé et lorsqu'elle était parti le soir, il avait entrer dans le logiciel l'adresse de Lyam. Il avait écrit un message puis effacer, puis écrit un nouveau qu'il avait encore effacer pour en venir à ce message final :
« Bonjour Lyam… (Où bonsoir, selon ton fuseau horaire, il faudrait que tu m'expliques la différence pour que je sache à quelle heure t'écrire.) Je ne suis pas vraiment sûr de ce que je vais écrire dans ce message mais je sais que si je ne le fais pas, je vais le regretter toute ma vie. J'ai vu la vidéo que tu as faite et normalement je dois récupéré les lettres cette semaine, ta maman doit me les apporter alors j'attends patiemment dans ma galerie d'art. C'est de là où je t'écris, c'est le seul endroit où je me sens vraiment bien. J'aurais aimé savoir que tu existais un peu plus tôt, là j'ai l'impression d'avoir tout rater et j'en suis désolé. Peut-être qu'on pourra se voir un jour, en vrai et non à travers un écran. Je vais te laisser, j'ai encore du travail. - Gabriel. »
Il avait mit un certain temps avant d'appuyer sur le touche « entrée » mais finalement il l'avait fait. Tout de suite après, il s'était empressé d'éteindre son ordinateur de peur sûrement que Lyam lui réponde dans la seconde. Après ça, il était parti peindre une peinture plutôt sombre, on ne pouvait pas dire que son moral était au top cette journée là.
Le deuxième était passé plus rapidement, Gabriel s'était concentré dans son travail. Il devait exposé pour un vernissage et il avait donc choisi des peintures, qu'il avait protégé et emmené dans la salle d'exposition dans le centre de Brisbane. Ça lui avait occupé toute sa journée. Le troisième jour, il s'était levé et était tombé sur toutes cette pile de livre qu'Adaline avait écrit et qu'il avait acheté durant ses dernières années. Il avait soupiré en constatant qu'il avait parfois trois exemplaires du même livre. Il n'en avait plus acheter depuis deux ans maintenant. C'était sûrement sa façon à lui de « passer à autre chose ». Il avait même un exemplaire qui avait été dédicacé, d'après là où il l'avait acheté l'exemplaire avait été signé en France, quelque part aux alentours de Paris. Étrangement cette journée, il l'avait passé à se rappeler de tout ce qu'il avait pu faire avec Adaline en Amérique. Il n'avait pas encore vérifier si Lyam lui avait répondu sur l'ordinateur, il avait envie de le faire et pourtant plus il y pensait et plus il se disait qu'Adaline ne reviendrait pas lui donner ces lettres. Peut-être qu'elle avait prit le premier avion pour retourner au Canada et qu'une fois de plus, il ne la reverrait pas.
C'était le quatrième jour et Gabriel peignait une nouvelle toile dans son atelier. C'était une journée plutôt calme et il n'avait pas beaucoup entendu la porte de sa galerie s'ouvrir. Il avait mit de la musique, il avait une vieille platine tourne-disque qu'il avait acheté à une amie antiquaire, il l'adorait. Dessus il avait posé un vinyle des Beatles. Il adorait ce groupe depuis des années et il regrettait amèrement ne pas être né plus tôt pour pouvoir vivre toute cette époque là en direct. Alors qu'il était plutôt de bonne humeur un pinceau à moitié dans la bouche, il entendit la porte de sa galerie s'ouvrir. Il reposa ses deux pinceaux en se levant de son tabouret puis il ôta ses lunettes dont tout le monde ignorait l’existence mais qu'il utilisait de temps à autre surtout en période de fatigue.
Je claque la porte de ma chambre, en furie. Je saute sur mon lit, écrasant par le même coup une construction en lego que j’ai fait cette après-midi. Catherine m’énerve, elle tente toujours d’agir comme maman et ça me fâche. Fait si Lyam, range ton linge Lyam, mange, prend ta douche. Elle n’a jamais été ma mère, et pourtant elle se permet d’agir comme si elle était. Je frappe mon mur en criant. Je veux que maman revienne, cela fait déjà deux mois et c’est assez long comme ça. Pourquoi elle ne comprenait pas ? Pourquoi elle me laissait ici, dans ce trou à rats, dans ce cirque avec ma tante ? Je n’ai jamais compris la révulsion de ma mère contre moi. Alors que ma colère se transforme tranquillement en tristesse, je tombe sur mon lit, maussade. Je commence à me balancer d’en avant en arrière en tentant de retrouver mes esprits. Ce n’est pas en agissant ainsi que maman va vouloir s’occuper de moi, je dois devenir plus mature encore…
L’écran de mon ordi s’allume, avec un message de skype en premier plan. Je saute d’excitation pour me diriger vers mon écran, puis je reste figé devant le message. J’avais reçu un message de maman quelques jours plus tôt, et nous avions parlé pendant quelques heures. Je l’avais supplié de venir vivre avec elle à Brisbane, mais elle avait insisté que ma vie était ici et qu’elle serait de retour bientôt. Je ne la crois pas, je suis convaincu qu’elle va rester à Brisbane et que je vais pourrir chez ma tante jusqu’à mes 18 ans. Au moins, dans 8 ans je pourrai me payer un billet d’avion et aller m’imposer chez ma mère…
Mais recevoir un message de mon père ? Jamais je n’aurais cru qu’une telle chose pouvait exister. Je lis le message, comme si je lisais le messie. Mes yeux sont remplis de larmes, et j’ai de la difficulté à continuer le message. Maman n’a pas menti…Elle a vraiment retrouver mon père ! Et si je pouvais vivre en famille pour une fois ? Et si je pouvais avoir mes deux parents comme un enfant normal ? Est-ce que mes camarades de classe arrêteraient de passer des commentaires ? Est-ce que je me sentirais aimer ? Ma tête tourne, et les larmes aux joues je tente de formuler une réponse qui semble satisfaisante. Je me sens impuissant avec mes petites mains dans ce petit corps, me prendra-t-il au sérieux ?
"C’est donc Gabriel ton nom ? Est-ce que je peux t’appeler papa quand même ? Non…Je suppose que tu ne voudras pas. Est-ce que tu as d’autres enfants ? Est-ce que j’ai des demi-frères ou demies-sœurs ? Je me demande ce que ça fait…
Pour le décollage horaire, tu dois ajouter 9h30 à ton heure actuelle."
J’envoie mon message, sans vraiment y penser. Je le regrette tout de suite. Et si j’avais dit quelque chose qu’il ne fallait pas ? Et s’il refusait de me parler après tout ?
Je retourne dans mon lit, assis contre le mur et je serre mon ours en peluche contre moi. Et si j’étais seul maintenant ? Et si maman ne revenait pas ?
Je tourne en ronds dans la villa, sous le regard de ma femme de ménage. Elle me suit des yeux, son balai à la main. Je tiens dans les miennes une pile de lettres aussi précieuses à mes yeux que toute l’or que j’ai pu obtenir depuis quelques jours. Je suis riche maintenant, et pourtant toute l’or du monde ne vaut pas ce que je tiens dans mes mains. Elles sont si précieuses pour moi, et pourtant elles ne me sont pas destinées. Je m’arrête, à quelques mètres de ma femme de ménage
- J’ai le choix entre mettre Lyam en colère, ou aller voir Gabriel… La femme s’arrête, et m’observe de ses yeux bridés. Je sais qu’elle ne m’apprécie pas beaucoup, surtout depuis que Francisco est décédé. Elle m’en veut de l’avoir accompagné et d’avoir accepté qu’il soit euthanasié, mais je tente de mon mieux de reconstruire les ponts entre nous. C’est en partie une des dernières personnes qui me connecte à Cisco. Une boule se forme dans la forme. Je ne peux pas penser à lui maintenant. Je dois me concentrer sur mon fils et mon ancien amant. Dois-je vraiment l’appeler ainsi ?
- Madame, vous êtes une adulte. Est-ce votre enfant peut vraiment vous affecter à ce point ? Et puis, que peut-il faire ce Gabriel qui pourrait vous faire autant peur ?
L’accent asiatique de ma femme de ménage m’empêche parfois de comprendre tout ce qu’elle dit. Je me concentre en plissant les yeux.
- Je ne sais pas, je crois que j’ai plutôt peur de moi-même…
Elle penche la tête de côté, impartiale. Parfois, elle me fait penser à un robot sans émotions. C’est peut-être pour cela que je lui demande son opinion. Parce qu’elle n’est pas influencée par la peur constante qui m’habite depuis quatre jours. Et s’il apprenait tous mes secrets ? Et si je donnais de faux espoirs à Lyam? Et si…Ahhhhh, je n’en peux plus.
Je lance les lettres sur le sol, irritée. Je ne peux pas vivre dans une confusion pareille, c’est inhumain. Ma femme de ménage se penche pour ramasser les lettres, avec une précaution qui lui est propre. Je la remercie timidement, me sentait soudain très coupable d’avoir agi ainsi. Je dois aller le voir, et lui donne ses putains de carte. Après tout, elles ne m’appartiennent pas. Maintenant que je sais que Lyam va emménager sous mon toit dans moins d’une semaine, je ne pouvais plus me sauver comme je le faisais avant. Si je garde ses lettres, il va finir par le savoir et je préfère éviter la crise de colère qu’il pourrait avoir. La colère, il l’a de son père et non de moi…Ça, j’en suis convaincue.
Je la remercie une dernière fois avant de lui confier la villa. Je prends rapidement place dans ma Volt, en inspirant l’odeur qu’il en ressort. Elle sent le neuf…
Je sais où se trouve l’atelier de Gabriel, et malgré mon sens pourrie de la direction, je réussi à me stationner une demi-heure plus tard devant son atelier sans l’aide de mon gps. Je me flatte un peu les épaules de cet exploit, avant de sortir affronter ma vie. Ah si, c’est le cas de le dire. Ma vie est une constante confrontation depuis quelques mois, et j’en avais marre.
J’entre donc, munie d’une pile de lettres et de dessins. Cela doit faire 5 ans que Lyam collectionne des écrits pour Gabriel, c’est relativement impressionnant lorsqu’on les voit pour la première fois. Mais lorsque j’entends sa voix, la consistance de mes bras et mes jambes se transforme en bouillie, et je perds mes moyens pendant quelques instants. Mon cœur se sert violement, et j’échappe les lettres sur le sol de son atelier. Ah non ! Pas encore ! Je me penche rapidement pour les ramasser, lorsque je sens la main de Gabriel sur la mienne. Je frissonne en relevant la tête pour m’apercevoir qu’il est accroupi devant moi, si proche que nos nez se cognent ensemble. Je recule un peu, me touchant le nez. Ah, quelle entrée Adaline, bravo!
Lorsque Gabriel passa la porte, il reconnu immédiatement Adaline. Il n'eut pas le temps de ressentir quoi que se soit puisqu'elle fit tombé les fameuses lettres qui appartenaient sûrement à Lyam et en bon gentleman, il accouru pour l'aider à les ramasser. La proximité entre leurs deux visages le rappela à l'ordre et attrapant quelques lettres entre ses mains, il releva son visage pour ensuite se relever frôlant ainsi sans faire exprès le nez d'Adaline avec le sien. Son première réflexe fut de cligner des yeux puis son coeur s'emballa légèrement, la situation était gênante en vu de leur passé et surtout de leur présent. Par réflexe, il lui tendit les lettres alors que normalement elles étaient toutes pour lui.
- Hum… Désolé… Pour le choc.
Un bref sourire se dessina sur ses lèvres puis il l'invita à entrer dans sa galerie, elle était resté juste devant l'entrée et pour parler, il serait beaucoup mieux à l'intérieur, loin du bruit de l'extérieur. Encore une fois, Gabriel était partagé entre deux sentiments. Il était d'abord heureux de revoir Adaline parce qu'elle avait quelque chose pour lui et qu'après tout c'était bon de la revoir. Elle le ramenait à une partie de son passé qu'il avait beaucoup aimé. La découverte de l'Amérique. Toutes les opportunités qu'il avait pu avoir là-bas, il ne les auraient jamais eux à Brisbane, du moins il en doutait. Ses parents lui disaient en boucle de faire un vrai métier et qu'il ne pourrait jamais vivre de ses « dessins ». Même si sa mère le soutenait aujourd'hui, son père n'était toujours pas d'accord avec le fait que son aîné soit un artiste. Aux États-Unis, il n'avait eu aucun frein que des personnes qui l'encourageaient et en particulier Adaline. Si il avait bien des remords contre elle, il ne pouvait que lui dire merci pour tout ce qu'il avait construit aujourd'hui. Mais d'un autre coté, elle avait eu beaucoup de secrets et la voir débarquer ici, dans sa galerie lui faisait pensé qu'elle aurait encore des choses à lui avouer et il n'était pas prêt pour ça. Gabriel tentait tant bien que mal d'accepter le fait d'être père, d'ailleurs il n'avait toujours pas regarder sur l'ordinateur si Lyam lui avait répondu, sûrement par peur de ce qui pourrait arrivé. Et si un jour Lyam se trouvait devant lui ? Qu'est ce qu'il pourrait bien lui dire… Dans l'immédiat ce n'était pas le plus urgent, il avait terriblement envie de lire ces lettres.
- Tu m'as apporté les lettres de Lyam ?
Il baissa son regard sur les mains d'Adaline qui tenaient nerveusement le petit paquet de lettres. Gabriel regarda autours de lui, d'autres personnes entraient dans la galerie et sa secrétaire écoutait tout ce qu'il disait. Pour le moment, il n'avait pas envie de s'expliquer sur sa vie et il n'avait pas non plus envie de rendre des comptes. Alors il se dirigea vers sa secrétaire en lui disant qu'il montait chez lui quelques instants et qu'elle devait l'appeler en cas d'urgence. Il invita ensuite Adaline à le suivre. Il passa un petit portail en bas des escaliers avec une affichette « Privé, ne pas entrer » et se mit à monter. Le mur de l'escalier était en réalité une bibliothèque avec un nombre infini le livres en tout genre. C'était le seul endroit où il n'y avait pas de peinture bien que beaucoup de ces livres ne parlait. En arrivant en haut de son loft il y avait un petit coin avec tous les livres qu'il avait acheté d'Adaline, en plusieurs exemplaires parfois ou même dédicacer. Il n'en avait plus acheter depuis deux ans mais quelle importance ?
- On sera plus à l'aise ici pour parler, te voila chez moi. Tu veux boire quelque chose ?
La proximité en soit n’est pas quelque chose qui me dérange. La proximité avec Gabriel est tout autre chose. Cela éveille en moi des envies que je préférais garder cacher, et je n’ai aucune intention de céder à ces dites envies pour le moment. J’avais beaucoup sur les bras présentement avec le décès de Francisco, l’arrivée de mon fils à Brisbane ainsi que mes rencontres avec Gabriel. Une fois les lettres en ma possession, je les sers contre moi pour ne pas les échapper à nouveau. J’aperçois du coin de l’œil Isabelle qui me fait un clin d’œil rapide. Je m’empourpre, sachant très bien qu’elle connait l’histoire derrière moi et Gabriel. Nous nous sommes rencontré la semaine dernière alors que j’ignorais qu’elle travaillait pour Gabriel. Quelle surprise lorsque j’avais découvert la vérité! Alors me voilà, gênée comme une gamine, sous le regard d’Isabelle. Je tente de me faire petite pour ne pas qu’elle remarque mon malaise, mais elle n’est pas dupe.
Je tente de porter mon attention sur Gabriel, qui me demande si ce sont les lettres de Lyam. J’acquiese en silence, tentant de ne pas trop parler en face de sa secrétaire. Le fait qu’il y ait d’autres clients m’importune un peu, mais je tente de me concentrer sur son beau visage...Et son nez…Ah! Focus. Je regarde le mur pour me concentrer.
Gabriel me propose de monter à l’étage, ce qui me soulage légèrement. Je le suis sans dire un mot, alors qu’Isabelle me fait un pouce en l’air. Je lui fais une grimace subtile, elle me sourit et se retourne. Je soupire intérieurement en me disant que je suis mal foutue, mais mon attention est portée ailleurs alors que je découvre la splendide collection de livres de Gabriel. Je me sens alors excitée, ralentissant devant chaque titre intéressant. Gabriel arrive bien avant moi en haut de l’escalier, et il observe mon émerveillement du haut de son podium.
- Ta collection est magnifique!
Je lui souris tendrement en montant les dernières marches qui me séparent de lui.
- Merci pour l’intimité, les regards me gênaient un peu. Je te prendrais bien un thé, si tu en as!
Un chai latte, c’est mon thé préféré. Je décide de ne rien dire, me demandant si Gabriel va se souvenir de ce détail. Peut-être que je lui en demande trop, qui sait… En fait, je trouve cela un peu étrange de me retrouver seule avec Gabriel dans son appartement, mais nous sommes des adultes non? Lui-même l'a dit à notre dernière rencontre. Je le suis dans sa cuisine, déposant les lettres sur la table de cuisine. Lyam m’a informé qu’il avait envoyé un message à Gabriel sans recevoir de réponse. Je veux éclaircir ce détail avant de lui donner ses lettres. Après tout, elles doivent se mériter.
- As-tu reçu le message de Lyam? Il m’a dit qu’il t’avait répondu cette semaine. J’ouvre une des lettres de Lyam, qui est en fait un dessin de composante électronique avec une copie de ses notes scolaires. Il voulait que son père soit fier, je suppose.
- En passant, je suis désolé de mon délai. J’ai eu quelques problèmes cette semaine qui m’a vidé de mon énergie. J’ai dû partir en Suisse quelques jours, cela ne fait d’un jour que je suis de retour. Je suis venue dès que j’ai pu.
Je me tourne vers Gabriel, les notes de Lyam toujours en main. Je lui souris, alors qu’il me regarde, curieux de connaitre la suite. Je sais qu’il va vouloir savoir ce qui est arrivé, mais je ne sais pas s’il va vraiment apprécier. Après tout, j’allais devoir lui dire la vérité pour Lyam. Sur le fait qu’il va nous rejoindre à Brisbane la semaine prochaine. J’appréhende sa réaction, mais je ne peux pas lui cacher cela. Non, je ne peux plus lui cacher la vérité.
Gabriel ignorait tout ce qui s'était passé ces derniers jours pour Adaline. Pour lui, la semaine était juste parue comme interminable à cause de son absence et du fait qu'il ne savait s'il la reverrait et s'il aurait ces fameuses lettres. Elle avait tenue promesse et elle était là alors il ne lui en porterait pas rigueur mais ça aurait été vraiment mal de lui en vouloir alors qu'elle venait de perdre un être cher. C'était tout le problème lorsqu'on manquait parfois d'information. Un jugement pouvait être très vite établie alors qu'on ignorait tout un tas d'autres choses. Mais elle était là devant lui alors il oublia le reste. Alors qu'il regardait les lettres entre les mains d'Adaline, il ne remarqua pas son coup d'oeil à sa secrétaire. Gabriel était quelqu'un de très réserver sur sa vie privée mais il n'avait pas du tout parler de cette histoire avec Isabelle, il était loin de se douter qu'elle connaissait toute l'histoire du point de vue d'Adaline bien sûr. Proposant de monter à l'étage, il fit un simple signe à Isabelle puis il fut vite rendu en haut des marches pour cause, sa bibliothèque, il la connaissait par coeur mais lorsqu'il se retourna vers Adaline, il la vit observé les livres. Il lui répondit en souriant.
- Merci. Oui, je dois avoir ça.
Lui faisant signe de le suivre, il traversa le couloir, à gauche il y avait sa chambre mais la porte était poussé et on pouvait à peine apercevoir l'intérieur. Ensuite il y avait le salon avec une salle à manger et une cuisine ouverte. En définitive c'était une très grande pièce qui réunissait cuisine et salon. Il se dirigea vers les placards, sortant de quoi faire deux thés. Il n'avait jamais été trop café, il était bien trop calme pour boire ce genre d'excitant. Enfin, calme comme il ne s'énervait pas mais pour le coup, Gabriel n'avait pas besoin de café non plus dans ces cas là. Il sortit tout une boite avec plusieurs parfums pour le thé, lui laissant choisir celui qu'elle voulait puis il mit l'eau à bouillir. Lorsque Adaline se remit à parler il la regarda dans les yeux.
- Oh vraiment ? Non je n'ai pas encore regarder mais si tu me dis qu'il a répondu, j'irais voir très vite. Je ne suis pas encore très adepte de l'informatique, c'est le travail de ma secrétaire habituellement.
Gabriel vivait avec son temps mais il y avait beaucoup de choses dont il ne voyait pas trop l'intérêt, des nouvelles technologies qui visiblement n'était pas nécessaire à sa survie en même temps avec lui, un tube de peinture et ça lui suffit. Son téléphone portable était récent mais il n'y avait presque aucune application dessus, à part un jeu un peu énervant pour passer le temps durant les files d'attentes. Son regard se posa sur la lettre qu'elle était entrains d'ouvrir.
- Pas de soucis. La Suisse… Ce n'est pas à coté, tu étais presque plus proche de Lyam que de l'Australie.
Même s'il voulait savoir pourquoi elle avait été là-bas, il ne posa pas la question. C'était le genre de chose qui ne le regardait plus désormais. Lorsque la bouilloire sauta, il se releva pour aller la chercher et remplir deux tasses d'eau chaude.
L’appartement de Gabriel est tout ce qu’il y a de plus paisible. En outre, il ressemble un peu à celui que nous avions à New York...Sans la pollution, et en beaucoup plus grand. Je ne regrette pas d’être venue, mais je dois avouer que je me pose certaines questions. Premièrement, pourquoi m’attire-t-il autant? Après si longtemps, je me sens toujours envoutée par sa présence. C’est une sensation que je tente d’ignorer tandis qu’il met l’eau sur le feu, mais elle refait surface dès qu’il se met à parler. Je souris tandis qu’il mentionne son manque de connaissances en informatique. Ça, je le savais déjà.
- Tu n’as jamais été très doué là-dedans… Mais ton fils pourrait t’en apprendre beaucoup! Je ris, un peu inconfortable. Cela me fait étrange de parler ainsi de Lyam avec lui. Je sais que je dois m’y faire, mais une partie de moi-même aimerait bien rester douce et innocente jusqu’à ma mort. La blague de Gabriel me détend, mais je reste silencieuse. Gabriel avait toujours su me rendre à l'aise dans les pires moments, et c'est une qualité qui m'avait toujours plu chez lui. Perdue dans mes pensées, je me demande comment aborder la situation. Utiliser le sarcasme comme il vient de le faire serait plus simple, mais pour une raison que j'ignore, je n'ai pas envie de rigoler. Pour une rare fois, j'ai l'intention d'être sérieuse. Peut-être avais-je passer trop d'années à carburer sur l'humour que j'en suis arrivée à l'épuisement de mes ressources... Le plus simple serait de lui expliquer ce qui a découlé des derniers évènements pour en aboutir à ma décision finale, mais je me demande si c’est vraiment nécessaire. Après mure réflexion, je décide de me lancer dans un monologue.
- Tu dois avoir quelques questions pour moi… Eh bien, laisse-moi t’expliquer ma superbe semaine pour commencer.
J’attends que Gabriel vienne s’asseoir à la table avec nos thés avant de débuter. Je ne veux pas qu’il soit distrait pendant que je lui parle. Après tout, là-dessus il est comme moi, nous sommes facilement distraits.
- À mon arrivée à Brisbane, un homme que je connais depuis quelques années du nom de Francisco Alvarès a proposé de m’héberger chez lui pour le temps de mon voyage. Il y a quelques semaines, j’ai appris que Francisco était atteint d’un cancer au cerveau. Il m’a demandé de l’accompagner en Suisse car il souhaitait se faire euthanasier au lieu de mourir à petit feu. Il commencait déjà a avoir certains problèmes comme des troubles de mémoire et de coordination. Donc, la semaine passée, j’ai quitté avec Cisco pour la Suisse. Dans l’avion, il m’a confié qu’il n’avait aucune famille, et donc qu’il me léguait sa villa et sa fortune. Quelques jours plus tard, je reviens à Brisbane sans savoir quoi faire avec tout cela…
Je prends une pause le temps de respirer et de goûter au thé qui infuse devant moi. Je souris lorsque les épices du thé chai me picotent la langue. Voilà, on y est.
- Après mure réflexion, j’ai décidé qu’il était temps pour moi de m’installer de façon définitive et de prendre les responsabilités de la vie adulte. J’ai donc pris la décision de m’installer à Brisbane, et de m’occuper de Lyam comme la mère que je devrais être. Je prends une autre gorgée, redoutant le moment tant attendu
- Le billet d’avion est déjà acheté. Lyam arrive mercredi prochain…
Je pose mes mains sur la tasse pour les réchauffer. Je n’ose pas regarder Gabriel, alors je fixe mon regard sur la fumée qui se dégage de mon thé. Tic tac, tic tac, vas-tu exploser?
Le fait qu'il ne soit pas doué en informatique le déranger peu car jusqu'à présent il n'en avait pas réellement eu besoin. C'était que récemment qu'il avait prit une secrétaire/assistante, pour qu'elle s'occupe de la communication à ce niveau là mais pour ce qui était de communiquer, Gabriel trouvait qu'internet et toutes autres technologies rompaient les vrais liens. Parler à quelqu'un derrière un écran n'était pas du tout pareil que parler à la personne en face. Humainement parlant, ce n'était pas ce qu'il préférait et il ne s'en cacher pas.
- Je confirme que cela n'a jamais été vraiment mon truc.
Une fois que Gabriel eut fini de s'activer pour préparer les deux thés, il s'installa en face d'Adaline. L'air sérieux qui pointait le bout de son nez sur son visage l'inquiétait un peu mais que pouvait-il faire ? Après l'avoir inviter à monter, il ne pouvait pas la mettre dehors mais cette situation l'angoissait un peu car il se sentait vraiment très faible face à elle et ça avait été toujours le cas. C'est bien pour ça qu'il l'avait laissé partir en Amérique, il avait été trop faible pour l’inciter à rester et trop fatiguer de se battre pour quelque chose qu'il voyait de briser, comme si quelque chose était arrivé entre eux, quelque chose qu'il n'avait jamais prévu mais qui était quand même arriver. Gabriel n'avait jamais su quoi. Il fut un peu surpris de l'histoire qu'elle lui racontait en ce moment même. Elle était à la fois choquante et triste. Les démarches pour faire ce genre de chose en Suisse était très complexe, il fallait quelque part être armé mentalement pour prendre ce genre de décision qui était tout de même honorable. Adaline finit par en venir aux faits et Gabriel eut un moment d'égarement où il se demandait s'il devait être heureux ou non. Adaline était entrains de lui dire qu'elle allait donc emménager à Brisbane. Il serra les dents, ne sachant pas où tout cela allait le mener, ça aller juste mettre le gros bazar dans sa vie qui était jusqu'à présent bien rangé.
- Qu...Quoi ? Tu vas… Non… Tu habites donc à Brisbane maintenant ?
Elle hocha la tête mais elle n'avait pas fini de parler et Gabriel fermera sa bouche d'un coup. Mercredi prochain, il restait quoi ? Quatre jours à tout casser avant que Lyam arrive et il ne lui avait même pas répondu par internet. Elle lui lâchait littéralement une bombe dans les mains. Elle s'attendait à quoi au juste ? Qu'il saute de joie alors qu'il n'était pas prêt du tout à le rencontrer ? Gabriel ne pourrait pourtant pas y échapper car Lyam voulait beaucoup le rencontrer et se serait vraiment horrible de lui refuser ce plaisir, quelque part, il en avait envie également. Ils avaient tant de choses à rattraper tous les deux. Malgré que son coeur se soit légèrement emballé un instant, il resta calme tout en répondant.
- Et qu'attends-tu de moi au juste ? Il y a une semaine je ne savais pas que j'avais un fils et aujourd'hui, deux semaines plus tard tu es entrains de me dire qu'il va venir habitait avec toi ici à Brisbane. Je dois faire quoi au juste ?
Gabriel passa sa main sur son front, sentant une légère pression pesé sur ses épaules et sa tête désormais. Il avait peur et c'était sûrement légitime de ressentir cette peur là, celle de l'inconnue. Après tout, il y avait encore beaucoup de choses en suspens. Sur leurs vies à tous les deux depuis ces huit dernières années.
Mon attention est uniquement portée à la réaction de Gabriel suite à mon annonce. Je crains sa réaction, aussi imprévisible qu’elle puisse être. Il n’a jamais aimé les surprises, et cela n’a certainement pas changé avec les années. Sa réaction fut meilleure que je t’attendais. De l’étonnement. Sans se fâcher contre moi ou crier à la conspiration, il est tout simplement surpris. Je pousse un profond soupir de soulagement en l’entendant marmonner. Je suis beaucoup plus à l’aise de gérer ce genre de réaction qu’une explosion de colère imprévisible.
- Officiellement, je devrais recevoir mes papiers d’ici quelques semaines. T’inquiète, ce fut une surprise pour moi aussi. Je n’avais prévu qu’un séjour de quelques mois et voilà que je me retrouve millionnaire.
J’hésite avant de poursuivre. J’aurais très pu vendre la villa et rejoindre mon fils au Québec. Alors pourquoi m’installer à Brisbane et changer de vie du jour au lendemain ? C’est une question que je ne me suis jamais vraiment poser en prenant ma décision. Lorsque je l’ai prise, il me semblait n’y avoir aucune autre alternative. Peut-être était-ce ce sentiment constant de solitude qui m’a poussé à m’installer ici ?
- Je n’ai pas pris cette décision par rapport à notre rencontre. Je crois simplement que j’avais besoin de démarrer sur de meilleures bases maintenant que j’ai les moyens de faire ce que je veux.
Je crois que c’est une réponse censée. Ou en fait, c’est la réponse escomptée. Peut-être que la présence de Gabriel m’a influencé indirectement à prendre ma décision, mais je ne suis pas prête d’affirmer une telle chose. Gabriel semble avoir repris son calme lorsqu’il reprend la parole. J’hoche lentement la tête en l’écoutant, me permettant de prendre une gorgée de thé avant de lui répondre. Je suis soulagée autant par sa réaction que sa réponse. C’est un terrain glissant, mais je suis habituée d’y glisser.
- Je ne m’attends à rien de toi. Que voudrais-tu que je te demande alors que tu ne fais plus de ma vie ? Peut-être que tu as une femme, des enfants. Peut-être que tu es homosexuel maintenant ! Je ne connais que ton fantôme, alors que voudrais-tu que je te demande ?
L’idée de Gabriel en tant qu’homosexuel me fait rigoler, mais je chasse cette idée dans un coin refoulé de mon esprit.
- Je t’avertis aujourd’hui car j’en ai marre de te cacher la vérité sur Lyam. Et si je ne te l’avais pas dit et qu’il se pointe la semaine prochaine à ta porte ? Qu’aurais-tu fait ? Tu m’en aurais voulu de ne pas t’avoir prévenu.
Ça, j’en suis convaincue. Il est temps que je fasse face à mes remords.
- Ma porte sera toujours ouverte. Tu as la permission de voir ton fils autant de fois que tu le voudras, ou pas du tout si c’est ce que tu désires
J’hésite en terminant ma phrase. Je ne crois pas que ce soit véritable de dire cela.
- Mais je ne crois pas que ce soit le cas.
Je prends une longue pause, durant laquelle je savoure la chaleur de mon thé (tiède à présent, mais les aromes ne font que ressortir d’avantage) Je ne veux pas que Gabriel se sente sous pression, même si c’est probablement son cas présentement.
- Or, je ne peux pas t’en dire autant pour Lyam. Il a ses attentes…Et si tu veux bien de mon aide, je suis prête à t’aider afin de t’adapter à lui…Si tu veux de lui, ça va me faire plaisir de t’aider Gabriel…
J’hésite encore avant de poursuivre. Je marche sur un terrain délicat et je me dois de peser mes mots.
- Je comprends comment tu peux te sentir en ce moment. Je ressens cette sensation depuis bientôt 9 ans maintenant…
La nouvelle était difficile à accepter pour Gabriel pour la simple raison qu'il était passé à autre chose. Il avait accepté le fait qu'il ne reverrait jamais Adaline et que c'était comme ça. Oh ça avait mit du temps, un sacré moment même mais c'était du passé. Sauf qu'il n'avait jamais imaginer être père d'un petit garçon qu'il n'avait finalement jamais reconnu aux yeux de la loi. C'était terrible quelque part d'être victime de ce genre de situation. De ne pas savoir et de ne pas avoir le choix. Là, tout de suite, il ne voyait pas de raison pour crier. Il n'allait quand même pas mettre Adaline dehors, en lui demandant de quitter Brisbane, la ville ne lui appartenait pas et puis c'était quand même bon de la revoir, même s'il ne l’admettrait pas avant un certain temps sûrement.
- Tu as raison. De vouloir recommencer ici. Brisbane est une chouette ville, tu devrais pouvoir trouver ton bonheur avec Lyam.
Gabriel ne pu s'échapper un léger rire quand Adaline mentionna une potentiel famille ou un changement de bord. Elle connaissait son fantôme et pourtant il n'avait pas vraiment changé depuis toutes ces années. Quand il y pensait vraiment, c'était plutôt triste mais la plus part du temps, il aimait sa vie comme elle était. Être un artiste, libre de ses pensés, libres dans ses gestes, lui allait parfaitement.
- Non, je ne suis rien de tout ça… Enfin je ne suis pas marié et je ne suis pas non plus gay.
Il ne parlerait pas de Rebecca puisqu'il était incapable de pouvoir résumer ce qui se passer entre eux. Ils n'étaient pas ensemble mais elle occupait beaucoup trop de place ces derniers temps dans son esprit. Elle avait raison sur un point, s'il avait découvert Lyam sur le palier de sa porte un matin sans avoir était prévenu avant, il en aurait beaucoup voulu à Adaline mais ce n'était qu'un enfant, qui avait toutes les meilleurs raisons sur monde à vouloir venir ici, le voir et quelque part le contraire l'aurait blessé. En imaginant qu'Adaline lui aurait annoncé qu'il avait bien un fils mais qu'il ne voulait pas le voir.
- Tu as bien raison sur ce point, je t'en aurais voulu. Je t'en veux même encore un peu d'avoir attendu tout ce temps pour me dire que tu… Enfin qu'on avait un fils ensemble.
Autant être honnête. Par contre, elle avait raison. Les premières fois risqués d'être un peu tendu mais quand Lyam et Gabriel commenceraient à avoir une vraie relation, il y avait peu de chance pour qu'il refuse de le voir. Bien au contraire. Il acquiesça simplement la tête en guise de réponse puisque c'était assez logique et même s'il s'était écoulé pas mal d'années, il n'avait pas changer à ce point. Son regard se posa dans celui d'Adaline.
- Des attentes ? De quel type ?
Ce n'était pas lui mettre la pression, lui qui n'avait aucune expérience avec les enfants. Mais bon, peut-être que ça viendrait tout seul comme un dé-clique en le voyant après tout c'était son fils et donc ils étaient liés d'une quelconque manière mais c'était quand même un peu flippant, les attentes d'un petit garçon de neuf ans.
- Oui, je comprends. Enfin, c'est quand même compliqué mais je ferais de mon mieux pour lui.
Gabriel en avait complètement oublié son thé et ça lui était bien égal. Tout ce bousculer dans sa tête laissant un bazar total. Mais pour le coup, il n'était plus énerver ou quoi. Il était même étrangement détendu. Quoi que son coeur battait un peu vite pour un mec totalement bien dans sa peau mais ça passerait.
J’écoute ses paroles en portant la tasse de thé à ma bouche. Je réalise avec déception que celle-ci est presque vide. Je décide donc de me lever pour aller la porter dans l’évier tout en ne pouvant m’empêcher de sourire à son commentaire sur Brisbane. Je me retourne vers lui et m’appuies contre le comptoir en jouant avec mes mains.
- Je n’en doute pas. Brisbane regorge de personnes merveilleuses!
Je n’ai pas dit cela au hasard. Mon commentaire le concernait, et je crois bien qu’il a compris la nuance dans ma phrase.
- Et ne t’inquiète pas, Lyam ne peut être plus heureux qu’en ce moment!
Encore là, c’est en partie grâce à lui. Oui, car il a accepté son nouveau rôle de père sans broncher et ce simple fait compte beaucoup aux yeux de mon fils. Que j’accepte de le prendre sous mon aile fait aussi partie de sa petite dose de bonheur quotidienne depuis quelques jours, mais donnons beaucoup de crédit à l’apparition miraculeuse de son père dans sa vie. Lorsque Gabriel me dit qu’il n’a pas de femme dans sa vie, je me sens immédiatement soulagé. Enfin, je ne comprends pas pourquoi ce simple fait me rassure autant, il ne m’appartient plus depuis 10 ans. Pincement de cœur. Nostalgie. Changement de sujet pour éviter d’aborder la question plus en profondeur. Pour un homme qui dit avoir encore de la rancune à un égard, je le trouve bien calme en ma présence. Autre pincement de cœur. Je ne peux pas dire que cela ne me fait rien.
- J’ai pris peur. Et m’en vouloir est une réaction normale je crois. Je ne te demande pas d’avoir confiance en moi ou même de me pardonner. Je sais assumer les conséquences de mes actes…
C’est pour cela que j’aime mieux préciser à Gabriel que je n’ai pas vraiment d’attentes envers lui. Ce serait plutôt égoïste de ma part. Enfin, ce n’est pas mon cas mais c’est celui de mon fils. J’aimerais bien pouvoir avoir une bonne relation avec Gabriel pour le bien de notre fils, mais si ce n’est pas son cas je n’insisterai pas. Après tout, légalement je suis encore le seul parent de Lyam.
- Il faut que tu comprennes que Lyam idéalise une figure paternelle depuis sa tendre enfance. Il m’a toujours dit depuis qu’il a appris la vérité, qu’il allait retrouver son père un de ses jours et le forcer à devenir son père. Je suppose que dans un sens il a réussi… Il est intelligent, il va donc comprendre que tu n’es pas à l’aise avec lui au début. Tente de lui monter tes expositions, de peinturer avec lui, de faire des activités père-fils. Il n’a jamais vraiment eu de figure masculine dans son enfance et je crois que c’est une grosse lacune et c’est en grande partie de ma faute…
Plus je parle de Lyam, plus j’hésite à ajouter d’autres mots. Depuis notre première rencontre, je ne fais que parler en bien de Lyam. Or, il est difficile de vivre avec lui. Non pas parce qu’il est un enfant-roi ou un enfant capricieux et difficile, mais plutôt parce que son génie hors du commun a apporté quelques lacunes sociales très difficiles à contrôler. Malgré les suivis psychologiques dans son enfance, cela n’a jamais régler la question. Je décide qu’il est temps de lui en parler, même si j’ai peur que cela le fasse changer d’avis. Je trouverais cela dommage qu’il prenne peur, mais je ne peux pas non plus lui cacher la vérité ou bien il risque de l’apprendre à ses risques et périls en présence de son fils. Non, je dois le prévenir.
- Écoute, je dois te parler de quelque chose à propos de Lyam… Ce n’est pas vraiment un ange, et loin d’être parfait…
Alors que Adaline se leva pour rejoindre son évier, Gabriel resta assit sur son tabouret la suivant simplement du regard en tournant son buste vers elle. Il ne perdait pas une miette de ce qu'elle pouvait dire puisque chaque mot avait de l'importance. Il eut un bref sourire à sa remarque sur les personnes merveilleuses qui habitaient la ville. Gabriel comprit qu'il était lui aussi dans le lot de ces personnes là. De toute façon, ne pas se plaire à Brisbane s'était impossible, sinon, il serait parti depuis longtemps et pour de bon. Pour ce qui en était de Lyam, il lui faisait peur. Pas à cause de ce qu'il pouvait être mais de tout ce qu'il attendait de Gabriel. Pour le moment, il n'était pas prêt à pardonner Adaline pour lui avoir cacher son existence et il n'arrivait pas à se montrer très sympathique. Disons qu'il était sur la réserve au cas où elle lui sortirait encore autre chose dans le genre révélation.
- Je comprends sans réellement comprendre en réalité. Je pense pouvoir me mettre à ta place et comprendre pourquoi tu ne me l'as pas dit. Mais d'un autre coté, j'avais le droit de savoir et pas neuf ans plus tard… Je sais que ce que je ressens passera mais il me faudra un peu de temps, je suis désolé.
Gabriel était sincère dans ses paroles. Il était vraiment désolé de ressentir cette rancœur mais il ne pouvait pas non plus l'ignorer. Enfin il ferait un effort si Lyam se trouvait en leur présence, histoire que lui ne ressente pas ça au travers de lui. Lorsque le sujet de leur conversation se recentra sur Lyam, les battements de son coeur se mirent à s'accélérer franchement. Là, il avait vraiment peur de ne pas être à la hauteur. Normalement, il aurait imaginé que tout viendrait naturellement mais apparemment cela semblait un peu plus compliquer puisque Lyam y avait réfléchit toute sa vie alors que Gabriel n'y pensait que depuis une semaine. Toute la différence était là.
- Je vois… Il a vraiment tout imaginer dans sa tête. Si je ne suis pas à la hauteur tu n'auras plus cas trouver un charmant mari pour prendre ma place.
Bien sûr, c'était pour plaisanter. Gabriel échappa même un rire plutôt nerveux. Mais ce n'était pas tout, la voici, la voila dans toute sa splendeur, une nouvelle révélation allait sortir de la bouche d'Adaline. Il aurait presque pu la prévoir et honnêtement ? Peut-être que celle-ci allait lui filer une crise cardiaque. Mais quand elle eut fini sa phrase, il se sentit presque soulager. Non pas d'apprendre que son fils était peut-être un démon mais qu'au moins il n'était pas totalement parfait parce que Gabriel était loin de l'être. Depuis tout petit, le pauvre Lyam avait donc récolté tous les gênes pourris de son père, la belle affaire !
- Parce que tu trouves que je suis parfait ? Je n'étais pas vraiment un ange non plus, je ne le suis toujours pas même si ça ne se lit pas sur mon front. Gamin j'avais pas beaucoup d'amis et je m'en suis quand même sortie. Ca ne pourra pas être pire pour lui, c'est un petit génie.
Je ne sais pas vraiment comment lui expliquer ce qui va suivre, même si je l’écoute parler je sais qu’il n’a pas compris l’ampleur de ce que je vais lui dire par la suite. Je sens mon cœur s’accélérer et ma bouche devient soudainement sèche. Je reste debout sur le rebord de sa cuisine tout en laissant un moment de silence entre la fin de sa réponse et la mienne. Je prends une grande inspiration avant de me lancer dans ce qui pourrait être la fin de la nouvelle relation entre Gabriel et son fils.
- Je sais que tu n’étais pas rose lorsque tu étais jeune, mais Lyam est différent. Très différent. Depuis son très jeune, c’est un enfant qui était exclu par les autres, et il a commencé à faire de violentes crises de colère au point que nous avons dû attacher sa porte pour éviter qu’il nous blesse et enlever les objets fragiles dans sa chambre pour éviter qu’il les brise. De plus, il est suivi par une équipe de psychologues depuis quelques années car en plus d’être colérique, il a un trouble antisocial, un problème d’anxiété généralisé ainsi que de l’agoraphobie. Incapable de gérer cela à la maison, j’ai dû demander de l’aide auprès de certains services. Or, intelligent comme il est, il a réussi à manipuler son ancienne psychologue au point qu’elle a refusé de continuer son suivi par la suite. Il…est difficile à maitriser, et j’ai parfois de la difficulté à le comprendre. Pour l’aider, nous avons instauré un jeu lorsque nous sommes en public. Il doit tenter de deviner ce que les gens disent en lisant sur leurs lèvres. Cela semble marcher la plupart du temps…
Je soupire profondément tout en regardant le visage perdu et déconfit de Gabriel. Je tente d’ajouter un peu d’humour pour alléger l’atmosphère
- Me comprends-tu un peu mieux pourquoi j’ai attendu 9 ans avant de t’en parler ? Ton fils est loin d’être un ange, et j’ai dû laisser sa garde à Catherine car j’étais en dépression à cause de lui. C’est un enfant, il ne veut pas malfaire, mais il fait du mal autour de lui sans vraiment le réaliser même avec le génie qu’il a…
Dire ses mots est douloureux pour moi, mais je me sens dans l’obligation de m’ouvrir ainsi devant Gabriel. Au-delà de cette obligation, je sais qu’il ne me pourra pas me juger pour mes choix ; non parce qu’il a pitié de moi mais plutôt parce que malgré toutes ses années j’ai toujours autant confiance en lui. Un premier amour ne s’oublie pas, il fait simplement se cacher au plus profond de nous pour nous hanter à tout jamais.
Lorsque Adaline lui fit toutes ces révélations sur leur fils, Gabriel se sentit submergé par un tas d'émotions. Il ne savait pas s'il pourrait être à la hauteur de tout ça et il ne savait plus s'il avait réellement envie de le rencontrer. Quelque part il casserait cette image parfaite que Lyam s'était fait sur son père depuis neuf ans et ce n'était sûrement pas une bonne chose à faire. Mais il ne pouvait pas ignorer le fait d'avoir un fils. C'était vraiment difficile pour lui et Adaline ne l'aidait pas vraiment en lui disant tout ça. Il prit une grande inspiration en regardant Adaline.
- On dirait vraiment que tu essaies de me faire peur. Je vais y réfléchir et nous verrons quand il sera à Brisbane, tu veux bien ?
Ce n'était pas vraiment une question car il ne pourrait pas dire aujourd'hui même s'il voulait ou non le voir. Il pensait quelque part que tout cela se débloquerait pour lui, le jour où on le mettrait face à face avec ses responsabilités. Autant dire, face à face avec Lyam. Il leva la tête regardant l'heure à la pendule. Gabriel ne voulait pas vraiment inventé une sorte de mensonge pour faire partir Adaline mais il avait besoin de prendre du recul. Il ne voulait pas être impoli non plus puisqu'elle avait été franche avec lui en lui disant la vérité.
- Je suis désolé. Je n'ai pas envie de te mettre dehors mais je dois mettre de l'ordre dans ma galerie avant de fermer et j'ai surtout besoin de réfléchir à tout ça… Et ta présence ne m'aide pas vraiment à le faire.
Oui, Adaline avait toujours était déstabilisante. C'était aussi ça qui lui avait plus tout de suite. Gabriel avait toujours le don de craquer pour une fille qui lui faisait perdre tous ses moyens. Il gardait la face mais au fond de lui, il était complètement perdu. Il l'a raccompagna à la porte de sa galerie en bas de son appartement en lui faisant une légère accolade. Il lui souhaita une bonne soirée et Gabriel retourna ensuite à ses activités en ne cessant de penser à sa visite.
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