Le Mexique. Son soleil, ses plages, sa culture et l’héritage de sa civilisation. Des problèmes, politiques et sociaux, aussi, mais cette semaine ce n’était pas pour eux que Wyatt était présent. Il avait eu l’occasion de faire de l’investigation au pays des sombreros mais aujourd’hui il y était pour des vacances. Il avait réussi à poser des jours et il était bien décidé à en profiter. Il avait pris la décision de loger dans une auberge de jeunesse pendant toute la durée de son jour. Ça pouvait paraitre surprenant dans le sens où le producteur était un habitué de la qualité et du haut standing mais souvent, il préférait s’en passer quand il était à l’étranger. Ce n’était pas en restant enfermé dans le confort d’un cinq étoiles que vous alliez pouvoir profiter d’un pays. Et puis il s’était retrouvé dans un endroit sympathique, recommandé par un ami, il ne regrettait pas son choix. Même si il avait plutôt prévu de prendre ses déjeuners et diners en extérieur, Wyatt avait tout de même acheté de quoi se préparer à manger dans la cuisine commune et c’était à cet endroit précis qu’il se trouvait en ce moment, trop épuisée de sa journée pour avoir le courage de sortir. Il ne fallait pas trop lui en demander alors il avait décidé de faire dans la simplicité : pâtes bolognaise. Il s’était installé près des plaques de cuisson, la sauce en train de chauffer dans une casserole et l’eau pour les pâtes en train de bouillir à côté. Tout aurait du bien se passer, même les gosses de douze ans savaient se faire des pâtes, non ? Ouais. Sauf que la maladresse occasionnelle de monsieur avait fait des siennes et il avait réussi à se renverser de la sauce bouillante (les temps de cuisson ? il connait pas le producteur anglais) sur la main. « Hmmm, putain de merde. » Et il avait alterné jurements et grognements jusqu’à ce qu’il atteigne le lavabo et place le jet d’eau froide sur la brulure.
Dernière édition par Wyatt Spears le Mer 25 Mai 2016 - 19:45, édité 1 fois
Épuisée, je m'écroulai dans le canapé de la salle commune, saluant d'un signe de tête les quelques touristes déjà présents en ce début de soirée. Je n'avais pas encore eu l'occasion de discuter beaucoup avec eux depuis mon arrivée, j'avais été trop occupée à visiter la petite ville mexicaine et, surtout, à me vider l'esprit de tous mes soucis par de grandes heures de surf sur les spots à ma disposition. Thom avait beau dire ce qu'il voulait, je me sentais beaucoup plus détendue depuis que j'étais arrivée ici, deux jours plus tôt. Certes, j'aurais pu faire les mêmes activités à Brisbane, mais au moins j'étais sûre de ne pas croiser quelqu'un que je connaissais à l'autre bout du monde. En plus, je ne comptais pas me contenter des plages mexicaines, c'était juste le temps de m'acclimater un peu à la culture locale et d'oublier le reste. Et j'avais bien le droit de prendre quelques jours de vacances après tout ce qu'il s'était passé. Frustrée par ces pensées parasites, je m'obligeai à me lever et à me diriger vers la cuisine commune. Je pris le temps de bien me laver les mains avant de voir ce qu'il me restait de mes premières courses rapides. J'eus une grimace à la vue de la petite caisse presque vide. Il me restait de quoi me faire à manger pour ce soir et le lendemain midi, pas plus. « Hmmm, putain de merde. » Je me retournai avec un froncement de sourcils en entendant un bruit de casserole contre la gazinière et une voix qui continuait de jurer. Je lâchai ma boîte, m'avançai jusqu'au lavabo et passai un doigt sous le jet d'eau que faisait couler un homme sur sa main. « C'est trop froid, vous allez empirer votre blessure. » D'un geste précis, j'augmentai légèrement le jet d'eau chaude pour que sa peau ne subisse pas un choc thermique et vérifiai de nouveau la température. « Ça devrait être mieux comme ça. Qu'est-ce qu'il s'est passé ? »
Wyatt aurait dû le prévoir. Après tout, il se connaissait, il savait que la cuisine et lui avait une relation vouée à l’échec depuis des années. Mais il avait essayé. Parce qu’il avait la flemme de sortir et puis parce que c’était des pâtes à la bolognaise, merde, c’était pas censée être particulièrement compliqué. Le pire étant qu’il n’était pas spécialement maladroit d’ordinaire, juste pas doué en cuisine, mais son karma avait apparemment décidé de se foutre une nouvelle fois de sa gueule. Concentré sur sa main, Wyatt manqua de sursauter quand il entendit une voix féminine à ses côtés. «C'est trop froid, vous allez empirer votre blessure. » Il suivit sa main des yeux quand elle tourna sur un robinet afin d’augmenter la température du jet d’eau. Il était difficile pour le producteur de décider si oui ou non les choses s’étaient améliorées mais il n’avait pas plus mal alors il ne protesta pas. Eventuellement il quitta l’évier des yeux pour poser son regard sur l’inconnue qui avait l’air de lui vouloir du bien. « Ça devrait être mieux comme ça. Qu'est-ce qu'il s'est passé ? » Allez Wyatt, tu peux raconter la chose sans te sentir ridicule. L’anglais n’était pas le genre de personne qui se trouvait gêné facilement mais il fallait avouer qu’on l’avait déjà vu plus sûr de lui. « J’étais en train de me faire des pâtes à la bolognaise. Pour être honnête, je sais pas exactement ce qu’il s’est passé. J’ai attrapé la casserole et elle a dû glisser ou quelque chose comme ça et je me suis retrouvé avec la sauce brulante sur la main. Parce qu’évidemment ça n’aurait pas été drôle si je l’avais fait arrêter de chauffer au bon moment, sans doute quelques bonnes minutes plus tôt. » Non, Wyatt n’avait jamais su faire court quand il était question de se justifier. Et un peu d’ironie ne faisait jamais de mal. Il jeta un regard sur sa main gauche sur laquelle coulait toujours le filet d’eau. « Vous pensez que je peux la retirer ? » Oui, il préférait vérifier avant de se faire recommander de rallumer le robinet.
Après m'être assurée que l'eau ne se réchauffait pas trop, je relevai la tête vers le blessé au moment où il se lançait dans son explication. Plus il parlait et plus je me demandais s'il se moquait de moi. Je finis par tourner la tête vers la gazinière et vis une légère coulée de sauce sur la casserole en question. « Vous êtes en train de me dire que vous vous êtes brûlés avec de la sauce bolognaise ? Sérieusement ? » Je lui lançai un regard étonné avant d'éclater de rire. Je savais que ce n'était pas très malin de ma part, je risquais de le vexer, mais je ne pouvais pas m'en empêcher. « Je pensais que j'étais une catastrophe en cuisine, mais je crois que j'ai trouvé pire que moi. Félicitation ! » Encore une fois, j'aurais peut-être dû m'abstenir, mais un simple regard sur sa main me faisait comprendre qu'il ne s'était pas loupé. Une cloque commençait à faire son apparition sur sa peau, signe typique d'une brûlure au deuxième degré. « Vous pensez que je peux la retirer ? » Je fis une petite grimace, ne sachant pas trop comment lui répondre. La blessure n'était pas restée assez longtemps sous l'eau, mais je pouvais comprendre que ce n'était pas agréable pour lui de sentir la pression de l'eau sur sa peau. Je jetai un coup d’œil sur l'équipement à disposition dans la cuisine et allai récupérer un saladier. « Vous pouvez l'enlever, mais ne l'essuyez surtout pas ! » Alors qu'il s'éloignait légèrement de l'évier, je coupai l'eau chaude et attendis que le jet se refroidisse avant de remplir la moitié du récipient. « Venez avec moi. » Je m'éloignai du coin cuisine pour aller poser le saladier sur une des tables de la salle commune. « Et maintenant, vous n'avez plus qu'à laisser votre main dans l'eau froide pendant quinze minutes. C'est le strict minimum, parole de médecin. Comme ça, vous saurez qu'il faudra faire plus attention la prochaine fois ou, alors, vous faites comme moi, vous ne mangez que des plats qui se réchauffent au micro-onde. C'est toujours moins dégueulasse que tout ce que je peux essayer de préparer et ça a le mérite de ne pas être trop dangereux. » Je lui fis un sourire tout en m'asseyant sur un des tabourets disposés autour de la table.
« Vous êtes en train de me dire que vous vous êtes brûlés avec de la sauce bolognaise ? Sérieusement ? » La belle inconnue avait rigolé et Wyatt n’avait pas pu s’empêcher de la fusiller du regard gentiment. Au fond de lui-même il savait qu’il méritait qu’on se foute un peu de sa gueule. Honnêtement il l’aurait sans doute un peu fait si c’était arrivé à quelqu’un d’autre. « Ecoutez, on n’est pas tous des chefs étoilés. » Oui, les pâtes bolognaise c’était légèrement un classique mais là n’était pas le point. « Je pensais que j'étais une catastrophe en cuisine, mais je crois que j'ai trouvé pire que moi. Félicitation ! » Cette fois-ci, Wyatt réussit à esquisser un sourire face à l’étonnement de la brune. Il avait au moins réussi à faire du bien à l’égo d’une fille qu’il ne connaissait absolument pas, c’était toujours ça. La jeune femme grimaça quand il lui demanda s’il pouvait retirer sa main du jet d’eau et il décida de prendre une grande respiration pour se calmer. On n’aurait peut-être pas dit comme ça en le voyant, mais Wyatt pouvait se transformer en véritable gosse quand il se faisait mal et sa compagnie était plutôt à éviter quand il était malade. « Vous pouvez l'enlever, mais ne l'essuyez surtout pas ! » Yes. La température de l’eau lui faisait du bien mais l’action du jet et la position à tenir n’étaient pas ses meilleurs amis en l’instant présent. « Oui, chef. » L’inconnue avait définitivement l’air de s’y connaitre alors jusqu’à preuve du contraire, Wyatt allait l’écouter. « Venez avec moi. » Le producteur suivit la jeune femme et son saladier jusqu’à la salle commune et s’assit sur l’un des tabourets après qu’elle est décidée d’un endroit où déposer l’objet qu’elle avait en main. « Et maintenant, vous n'avez plus qu'à laisser votre main dans l'eau froide pendant quinze minutes. C'est le strict minimum, parole de médecin. Comme ça, vous saurez qu'il faudra faire plus attention la prochaine fois ou, alors, vous faites comme moi, vous ne mangez que des plats qui se réchauffent au micro-onde. C'est toujours moins dégueulasse que tout ce que je peux essayer de préparer et ça a le mérite de ne pas être trop dangereux. » Quinze minutes ?! Fantastique. Au-delà des consignes médicales, Wyatt avait aussi le droit à des conseils pour mieux réussir à survivre dans la vie. Et il ne put s’empêcher de rire quand il entendit l’inconnue lui décrire ce qu’il faisait littéralement tous les jours, en Australie. Sans attendre, il déposa sa main gauche au fond du saladier qui avait été placé devant lui, sa main droite le maintenant en place. « Vous savez que ça c’est mon quotidien ? Là j’ai voulu innover, faire un effort. Mais au final c’est peut-être mieux que ça m’arrive ici en votre présence plutôt que seul chez moi. » Enfin, il aurait réussi à se soigner tout seul chez lui, n’en doutez pas. Il aurait éventuellement abimé encore un peu plus sa main et mit plus longtemps à s’en remettre, mais il y serait arrivé. « Et du coup vous êtes médecin ? Vous êtes ici pour des vacances ou une sorte de mission humanitaire, un truc du style ? » Tant qu’à passer un quart d’heure en sa compagnie, il allait au moins s’intéresser un minimum à la jeune femme.
S'il m'avait fait comprendre qu'il n'avait pas trop aimé mes commentaires sur ses talents de cuisinier, il ne contesta aucun de mes ordres médicales, ce qui me soulagea grandement. Je n'avais aucune intention de le blesser, mais c'était juste tellement rare de croiser une personne encore plus médiocre que moi pour se faire à manger. C'était d'ailleurs pour cela que je lui donnais mon astuce qui consistait à ne jamais tenter un plat, qu'importe si la recette était des plus simples. J'avais beau être impulsive et me lancer dans un nombre incalculable d'activités à risques, je connaissais parfaitement mes limites en cuisine et elles étaient bien basses. Je regardai avec surprise l'inconnu alors qu'il rigolait à son tour. Était-ce à son tour de se moquer de moi ? Je ne lui en aurais pas voulu, il avait bien le droit de me retourner la faveur. Et puis, rien ne me disait qu'il n'avait pas eu un problème exceptionnel juste ce soir et qu'il savait parfaitement faire à manger normalement. « Vous savez que ça c’est mon quotidien ? Là j’ai voulu innover, faire un effort. Mais au final c’est peut-être mieux que ça m’arrive ici en votre présence plutôt que seul chez moi. » Finalement, il était au même niveau que moi, sauf qu'il avait apparemment encore l'espoir de réussir une recette un jour. Je lui fis un sourire en essayant de repenser à la dernière fois que j'avais fait un essai. « Je crois que j'ai arrêté mes efforts quand j'ai passé toute une nuit au-dessus des toilettes et que mon frère m'a bien fait comprendre qu'il ne voulait plus jamais être mon goûteur personnel. » Je grimaçai en me souvenant de cette soirée. Heureusement que nos invités avaient eu des problèmes de transport et qu'ils nous avaient seulement rejoints après le repas. « Si vous êtes aussi bon pour vous soigner que pour cuisiner, oui vaut mieux. Avec un peu de chance, vous devriez vite être guéri. » Je jetai un coup d’œil à sa main, mais il était encore beaucoup trop tôt pour passer à la suite de soins, alors je reposai mon regard sur son visage. « Et du coup vous êtes médecin ? Vous êtes ici pour des vacances ou une sorte de mission humanitaire, un truc du style ? » Je hochai vivement la tête pour répondre à sa première question avant d'attraper une mèche de cheveux et de commencer à jouer avec. « Oui, je suis médecin, mais je ne suis pas ici pour le travail. J'ai décidé de me prendre quelques jours de vacances avant de retourner en Australie. J'aurais sans doute pu en profiter pour visiter le reste du pays vu que je m'y suis installée il y a moins de deux mois, mais j'avais envie de découvrir d'autres paysages et il y avait de bonnes réductions sur les billets. » J'avais aussi eu envie de mettre de la distance entre moi et les problèmes qui s'accumulaient là-bas, mais je ne trouvais pas nécessaire d'en parler avec un parfait inconnu. « Et vous ? Vous faites quoi ? Vous êtes arrivé quand dans cette ville ? Je n'ai pas eu le temps de vraiment visiter, donc si vous avez des suggestions, je suis preneuse ! »
Wyatt n’apparaissait peut-être pas exactement sous son meilleur jour étant donné qu’il était un peu irrité parce qui venait de lui arriver mais il n’avait pas envie que la jeune femme ait une mauvaise image de lui pour autant. Après tout, elle était en train de prendre de son temps pour l’aider, il en était reconnaissant. « Je crois que j'ai arrêté mes efforts quand j'ai passé toute une nuit au-dessus des toilettes et que mon frère m'a bien fait comprendre qu'il ne voulait plus jamais être mon goûteur personnel. » Wyatt laissa s’échapper un léger rire, il n’était donc définitivement pas le seul dans la pièce avec des soucis en cuisine. « Ah, je tiens à dire que personnellement je n’ai jamais empoisonné personne. » Oui, il avait le droit d’en être fier. « Si vous êtes aussi bon pour vous soigner que pour cuisiner, oui vaut mieux. Avec un peu de chance, vous devriez vite être guéri. » Cette fois-ci, le producteur se contenta d’hocher de la tête. La remarque était à peine un tacle, et honnêtement il le méritait. Et même si ce n’était pas le plus grand blagueur de tous les temps, il savait rire, il vous remerciait. Discuter avec la jeune femme avait l’avantage de lui faire quelque peu oublier l’état de sa main, c’était appréciable. La douleur était toujours présente mais l’anglais avait l’impression que sa force avait arrêté de varier, se stabilisant autour de quelque chose de gênant mais plutôt supportable. « Oui, je suis médecin, mais je ne suis pas ici pour le travail. J'ai décidé de me prendre quelques jours de vacances avant de retourner en Australie. J'aurais sans doute pu en profiter pour visiter le reste du pays vu que je m'y suis installée il y a moins de deux mois, mais j'avais envie de découvrir d'autres paysages et il y avait de bonnes réductions sur les billets. » Les yeux de Wyatt s’ouvrirent un peu plus quand il entendit l’inconnue mentionner le pays où il avait élu résidence il y a plus de vingt ans, le monde était bien trop petit. Il sourit également à la dernière remarque. Il n’avait jamais réellement besoin de s’inquiéter du prix des billets d’avion mais il était conscient d’être quelque peu privilégié à ce niveau-là. Mais il avait travaillé pour alors non, ça ne le dérangeait absolument pas. « Et vous ? Vous faites quoi ? Vous êtes arrivé quand dans cette ville ? Je n'ai pas eu le temps de vraiment visiter, donc si vous avez des suggestions, je suis preneuse ! » Apparemment l’inconnue était aussi curieuse que lui ou tout du moins aussi enclin à apprendre à le connaitre, ça faisait plaisir. « Et bien vous allez rire mais je viens également d’Australie, de Brisbane pour être tout à fait exact. Je suis arrivé il y a… Vingt-deux ans après avoir quitté l’Angleterre. J’ai fait des études de journalisme et de commerce à Melbourne et aujourd’hui je suis producteur pour la chaine ABC News. Mais là je suis en vacances aussi. » Ce n’était pas exactement dans ses habitudes de déballer sa vie aussi facilement mais dans l’instant présent, installé dans une auberge mexicaine, il n’avait aucun soucis pour parler. « C’est pas exactement ma première fois à Mexico, j’aurais quelques bonnes adresses à vous donner. Après tout dépend des activités que vous recherchez mais je pense que j’aurais des trucs pour vous. »
J'avais encore trop parlé, je m'en rendais compte maintenant que j'attendais sa réponse. Je le savais pourtant que je devais faire plus attention quand je rencontrais de nouvelles personnes, je me connaissais assez pour savoir que je pouvais vite me laisser aller et que ça dérangeait parfois mes interlocuteurs. Pourtant, le maladroit ne semblait pas plus contrarié que ça, pas à la vue de son sourire après ma longue réponse. Avec un peu de chance, j'étais tombé sur une personne qui appréciait échanger, ce qui me plairait grandement. « Et bien vous allez rire mais je viens également d’Australie, de Brisbane pour être tout à fait exact. Je suis arrivé il y a… Vingt-deux ans après avoir quitté l’Angleterre. J’ai fait des études de journalisme et de commerce à Melbourne et aujourd’hui je suis producteur pour la chaine ABC News. Mais là je suis en vacances aussi. » Je fus légèrement surprise de savoir qu'il venait lui aussi d'Australie, mais ce fut la ville même qui me laissa bouche bée. Je ne le coupai pas dans ses explications, voyant bien qu'il n'en avait pas fini. A la place, je me mis à le dévisager un peu plus, comme si j'essayais de me rappeler si je l'avais croisé ces dernières semaines. C'était un peu stupide considérant que Brisbane était une très grande ville, pourtant un doute s’insinua en moi. « C’est pas exactement ma première fois à Mexico, j’aurais quelques bonnes adresses à vous donner. Après tout dépend des activités que vous recherchez mais je pense que j’aurais des trucs pour vous. » Je fronçai les sourcils, ne comprenant pas trop de quoi il me parlait, avant de me souvenir que je lui avais demandé ces informations. Ce hasard incroyable m'avait tellement perturbée que j'en avais oublié mes propres paroles. « Je n'ai pas réfléchi à ce que je voulais faire, c'était plus un voyage sur un coup de tête. Je veux bien toutes les idées que vous avez, je ferai le tri après. » Je lui fis un sourire tout en continuant à l'observer attentivement. Sa tête me disait bien quelque chose maintenant que je savais d'où il venait, mais je n'avais aucune idée de l'endroit où j'avais pu l'apercevoir. Il ne pouvait pas être un de mes patients, je m'en serais tout de suite souvenue. Je ne voyais pas non plus où j'aurais pu croiser un producteur, je n'étais pas dans la bonne classe sociale pour fréquenter ce genre de personne. La dernière fois que j'avais parlé avec un homme avec un salaire avantageux, ça avait été assez compliqué à gérer, ma mauvaise manie de trop parler ne lui plaisait pas trop. Soudain, mes yeux s'écarquillèrent et je me mis à le fixer sans gêne. « Vous n'auriez pas fait une manifestation à Brisbane par hasard ? Il y a quoi… une dizaine ou quinzaine de jours ? Ou, si vous n'y étiez pas pour la manif, vous ne vous êtes pas fait arrêter par erreur ? » Je n'étais pas sûre de moi, je me trompais peut-être avec une autre personne. Après tout, il y avait eu tellement d'allers et venues cette nuit-là que je n'avais pas pu retenir tous les visages. « J'avoue, c'est complètement fou, mais je viens aussi de Brisbane et votre visage me dit vraiment quelque chose. Sauf que je ne vois pas comment j'aurais pu croiser un producteur là-bas. » Si je l'avais dit comme une simple constatation, je haussai les épaules pour appuyer mes paroles.
La réaction du médecin à la réponse de Wyatt fut quelque peu… Déconcertante ? C’était possiblement le mot à utiliser. Elle n’aurait peut-être pas choqué tout le monde mais quand il était face à des personnes qui l’intéressaient un minimum, il avait tendance à facilement étudier leur langage corporel. Et dans le cas présent, il était difficile de ne pas remarquer le regard de l’inconnue qui se faisait un peu dévisageant, pour être honnête. « Je n'ai pas réfléchi à ce que je voulais faire, c'était plus un voyage sur un coup de tête. Je veux bien toutes les idées que vous avez, je ferai le tri après. » Wyatt hocha de la tête et répondit à son sourire. « Il y a pas de soucis. La plupart des informations sont sur mon portable, je vous les noterais sur une feuille ou vous les enverrais un peu plus tard. » Un peu plus tard quand la main qu’il utilisait pour écrire et utiliser son téléphone irait mieux. En l’instant présent il avait comme une sensation de lancement quand il bougeait un peu son pouce alors il allait définitivement attendre encore un moment. Si il avait été un peu plus manuel et artistique, Wyatt aurait sans doute pu se créer un carnet de voyages dans lequel il aurait pu coller des photos et inscrire les bonnes adresses des nombreuses villes qu’il avait eu l’occasion de visiter. Mais non, le producteur était plutôt un adepte de la technologie et le disque dur de son ordinateur ainsi que son cher Drive contenaient toutes ses photos et bons plans. « Vous n'auriez pas fait une manifestation à Brisbane par hasard ? Il y a quoi… une dizaine ou quinzaine de jours ? Ou, si vous n'y étiez pas pour la manif, vous ne vous êtes pas fait arrêter par erreur ? » Et là, c’était au tour de Wyatt d’écarquiller les yeux et de dévisager la jeune femme. Merde, le monde était définitivement trop petit. « J’ai été envoyé en reportage sur une manifestation pour le mariage homosexuel qui avait lieu dans le centre-ville de Brisbane il y a une quinzaine de jours oui. » Wyatt avait une assez bonne mémoire des visages, d’ordinaire. Ça avait tendance à plutôt servir quand on vous avait répété pendant des années que ce qui était important c’était le réseau et que vous vous deviez d’être bon dans le relationnel avec les gens. Mais le producteur avait accessoirement passé sa soirée au poste à essayer d’éviter de regarder les autres gens présents dans la cellule pour ne pas être agacé par leur comportement. Il avait eu la chance –au final– de retrouver Janis et ça l’avait bien occupé. « J'avoue, c'est complètement fou, mais je viens aussi de Brisbane et votre visage me dit vraiment quelque chose. Sauf que je ne vois pas comment j'aurais pu croiser un producteur là-bas. » Et de son côté, Wyatt n’avait pas le souvenir d’avoir rencontré une médecin. Il fallait donc se rendre à l’évidence. « Avec mon équipe on a voulu s’approcher d’une bagarre qui avait éclaté, poser des questions. Sauf que ça s’est mal passé et j’ai fini au poste de police. J’imagine qu’on a atterri dans la même cellule. A un moment donné il y a une fille qui a fait un malaise et c’est là qu’on nous a apporté à manger. » Le producteur imaginait que si d’autres cellules avaient été remplis avec des gens de la manifestation, ce détail suffirait à vérifier que la jeune femme était avec lui. Ou pas quand on considérait le flux de personnes entrant dans la cellule qui avait passé son temps à varier au cours de la soirée. « Mais je vous avoue que je suis arrivé un peu après la plupart des gens et après avoir fait le tour des têtes pour voir si je connaissais quelqu’un, j’ai pas trop fait attention aux autres. Vous étiez à la manifestation aussi du coup ? » Si sur place il n’avait pas fait l’effort de s’intéresser à l’histoire de ses codétenues en dehors de celle de Janis, il allait corriger un peu le tir aujourd’hui.
« Il y a pas de soucis. La plupart des informations sont sur mon portable, je vous les noterais sur une feuille ou vous les enverrais un peu plus tard. » « Pas de soucis, on a le temps. On est en vacances après tout. » Je gardai le sourire, pas si préoccupée que cela de ce que j'allais bien pouvoir faire le lendemain. J'avais l'habitude de ne rien prévoir lors de mes voyages, me laissant surprendre par les événements qui s'offraient à moi. Apparemment, j'avais encore eu une fois bien fait vu qu'il allait me donner plusieurs idées. Et même si on oubliait d'ici la fin de la soirée, je trouverai bien une occupation d'une façon ou d'une autre, je ne m'inquiétais pas pour cela. Ce qui me perturbait par contre, c'était bien de comprendre si je l'avais déjà vu avant ou non. Après plusieurs minutes, j'eus la sensation de me rappeler de lui, mais je n'en étais pas totalement sûre, alors je tentai d'en savoir plus. Aussitôt, son visage changea d'expression et je vis l'étonnement déformer ses traits. « J’ai été envoyé en reportage sur une manifestation pour le mariage homosexuel qui avait lieu dans le centre-ville de Brisbane il y a une quinzaine de jours oui. » Je fronçai de nouveau les sourcils, ce n'était pas exactement ce que j'avais en tête. Je n'avais même pas vu les caméras lors de la manifestation, j'avais été trop au milieu de la foule pour cela. Et comme j'avais rapidement été arrêtée et que les policiers avaient clairement refusé toutes vidéos près de leur poste, je n'avais pas eu l'occasion de croiser des reporteurs. Je n'avais donc peut-être pas eu la bonne intuition, alors je lui expliquai simplement que son visage me disait quelque chose, même si je ne voyais pas comment j'aurais pu être en contact avec lui. « Avec mon équipe on a voulu s’approcher d’une bagarre qui avait éclaté, poser des questions. Sauf que ça s’est mal passé et j’ai fini au poste de police. J’imagine qu’on a atterri dans la même cellule. A un moment donné il y a une fille qui a fait un malaise et c’est là qu’on nous a apporté à manger. » Je ne me souvenais d'aucun malaise dans ma cellule et, pourtant, j'étais la mieux placée pour avoir cette information essentielle. Dès le début de mon séjour au poste, j'avais commencé quelques petits soins, les autres m'auraient donc prévenue si quelqu'un s'était senti moins bien. « Mais je vous avoue que je suis arrivé un peu après la plupart des gens et après avoir fait le tour des têtes pour voir si je connaissais quelqu’un, j’ai pas trop fait attention aux autres. Vous étiez à la manifestation aussi du coup ? » Mais bien sûr, c'était évident maintenant, je revoyais parfaitement sa tête. « Oui, j'y étais. Je me suis retrouvée en plein milieu de la bagarre. Bon, j'avoue que j'ai fini par craquer et mettre une gifle à un gars juste avant que tout dégénère, mais il m'avait harcelée pendant une dizaine de minutes et il avait fini par me mettre une main aux fesses. Petit conseil : ne jamais me faire ça si vous voulez rester entier ! » Je lui lançai un soi-disant regard menaçant avant de rire. Il n'avait pas l'air d'être comme ces idiots qui avaient décidé de pourrir cette journée-là, loin de là. « Après, j'ai pas tout compris, je me suis prise une pancarte dans le ventre et j'ai fini au poste. J'étais dans les tous premiers a être envoyée en cellule. Ça a été assez… folklorique avant votre arrivée, du coup je n'ai pas fait plus attention que ça, mais, si je ne me trompe pas, vous êtes installé à côté de Kyrah au tout début, non ? Une fille avec une blessure au-dessus de l'arcade ? Je n'ai vu qu'à ce moment-là qu'elle était blessée et on est parties dans une autre salle pour pouvoir la soigner. On est restées un petit moment là-bas, du coup, on n'est revenues qu'après la distribution de sandwichs. Je ne savais même pas qu'il y avait eu un malaise pendant mon absence. C'était vraiment n'importe quoi cette arrestation. » Je secouai la tête en me souvenant de cet emprisonnement. Je n'avais pas trop appréciée d'être enfermée avec une quinzaine de personnes dans une pièce beaucoup trop petite, sans parler du mauvais traitement qu'on avait eu le droit.
« Oui, j'y étais. Je me suis retrouvée en plein milieu de la bagarre. Bon, j'avoue que j'ai fini par craquer et mettre une gifle à un gars juste avant que tout dégénère, mais il m'avait harcelée pendant une dizaine de minutes et il avait fini par me mettre une main aux fesses. Petit conseil : ne jamais me faire ça si vous voulez rester entier ! » Ah oui quand même. Il y avait donc bien eu dans la cellule des personnes ayant participé à la bagarre et qui n’en était pas juste des dommages collatéraux. Mais d’après ce qu’elle lui racontait, la jeune femme n’avait eu aucune envie de se battre et n’avait fait que se défendre face à un mec qui aurait bien mieux fait de rester chez lui. En soi, elle n’avait pas non plus mérité sa place au poste. Mais ça, pour que les policiers le réalisent il aurait fallu qu’ils prennent le temps de bien tous les interroger correctement et ça n’avait pas franchement été fait. Il répondit au faux regard menaçant de la brune par un sourire. « Vous inquiétez pas pour ça, ça me viendrait même pas à l’esprit. » C’était loin d’être une pratique qu’il validait, il avait même plutôt tendance à la condamner pour être honnête. « Après, j'ai pas tout compris, je me suis prise une pancarte dans le ventre et j'ai fini au poste. J'étais dans les tous premiers à être envoyée en cellule. Ça a été assez… folklorique avant votre arrivée, du coup je n'ai pas fait plus attention que ça, mais, si je ne me trompe pas, vous êtes installé à côté de Kyrah au tout début, non ? Une fille avec une blessure au-dessus de l'arcade ? Je n'ai vu qu'à ce moment-là qu'elle était blessée et on est parties dans une autre salle pour pouvoir la soigner. On est restées un petit moment là-bas, du coup, on n'est revenues qu'après la distribution de sandwichs. Je ne savais même pas qu'il y avait eu un malaise pendant mon absence. C'était vraiment n'importe quoi cette arrestation. » Au fur et à mesure que la jeune femme parlait, Wyatt essayait de se remémorer les évènements de la soirée. Il avait demandé à une inconnue –qui se prénommait Kyrah apparemment, il n’avait pas exactement pris le temps de lui demander son nom– de lui résumer un peu ce qui s’était passé dans la cellule avant son arrivée et il avait eu le droit à une succession d’actions tous aussi étranges les unes que les autres. Il ne se souvenait pas du tout mais il avait encore en tête un mec fou, un papa et sa pote avocate, un jeu de séduction…Une histoire de télé-réalité aussi ? A peine arrivé il avait su que les heures à venir allaient être longues. « Exact. Enfin je sais pas si elle s’appelait Kyrah mais je me souviens de sa blessure et maintenant que vous le dites, je vous revois en train de l’examiner avant de partir avec elle. Pendant votre absence à un moment donné un peu tout le monde à commencer à avoir faim et puis il y a une brune –Adaline, je sais pas si vous allez voir qui c’est– qui a fait un malaise et les gardiens ont dû comprendre qu’il était temps de nous nourrir. » Enfin, personnellement Wyatt aurait pu tenir quelques heures de plus sans manger, il y avait une grosse différence entre avoir faim et s’écrouler à cause d’un manque d’énergie, mais il avait tout de même apprécié l’arrivée de son sandwich. « Mais ça va mieux votre ventre du coup ? J’imagine que la pancarte n’a pas dû faire de bien. Je crois que j’ai vu d’autres personnes un peu amochées, notamment parmi celles qui sont arrivées après moi, Kyrah a eu de la chance que vous soyez là. On pourrait presque croire que vous attirez les blessés en fait. » Wyatt avait ri, joueur. Il ne le pensait pas et se demandait surtout si la jeune femme n’en avait pas marre de se retrouver à travailler sur ses heures de loisir. « Au fait, je m’appelle Wyatt. Wyatt Spears. » Après ce qu’ils avaient partagé, il était peut-être temps de se présenter.
Cette fois-ci, j'avais été un peu plus attentive aux réactions du blessé et j'eus l'impression qu'il essayait de relier mon histoire à ses souvenirs. Je n'en étais pas certaine, mais il y avait quelque chose dans son regard montrant qu'il n'était pas totalement présent avec moi. « Exact. Enfin je sais pas si elle s’appelait Kyrah mais je me souviens de sa blessure et maintenant que vous le dites, je vous revois en train de l’examiner avant de partir avec elle. Pendant votre absence à un moment donné un peu tout le monde à commencer à avoir faim et puis il y a une brune –Adaline, je sais pas si vous allez voir qui c’est– qui a fait un malaise et les gardiens ont dû comprendre qu’il était temps de nous nourrir. » C'était donc elle qui avait eu un étourdissement. Dans le fond, ça ne m'étonnait pas trop. Avec sa manie de vouloir bouger dans tous les sens et parler sans arrêt, elle avait fini par dépenser toute son énergie et elle en avait subi les conséquences. Certes, les policiers n'avaient pas été très malins de tous nous placer au même endroit, mais quand on ne sait pas combien de temps une mauvaise situation va durer, on essaye de s'économiser au maximum. « Oui, oui, je vois très bien de qui vous parlez. Avant que vous nous rejoigniez, elle a beaucoup parlé pour nous dire comment réagir ou je ne sais pas trop quoi. J'ai fini par arrêter de l'écouter à un moment donné et j'ai essayé d'attirer l'attention d'un garde. Bon, on m'a sans doute prise pour une folle après ça, mais fallait bien tenter quelque chose pour sortir de là. » Je me mis à rire en me rappelant de mon petit numéro. Encore aujourd'hui, je ne savais pas pourquoi j'avais réagi ainsi, ça me paraissait complètement absurde. Tellement absurde que j'avais réussi à obtenir un appel, même si celui-ci n'avait servi à rien au final. « Mais ça va mieux votre ventre du coup ? J’imagine que la pancarte n’a pas dû faire de bien. Je crois que j’ai vu d’autres personnes un peu amochées, notamment parmi celles qui sont arrivées après moi, Kyrah a eu de la chance que vous soyez là. On pourrait presque croire que vous attirez les blessés en fait. » Instinctivement, je posai une main à l'endroit où j'avais eu un bel hématome. On ne pourrait plus le distinguer maintenant, il n'en restait qu'une toute petite touche de bleu, mais ça n'avait pas toujours été le cas. « Au fait, je m’appelle Wyatt. Wyatt Spears. » Je relevai la tête vers lui, étonnée de me rendre compte seulement maintenant que je ne connaissais pas son prénom avant. On avait parlé tellement naturellement que ça ne m'était pas venu à l'esprit de me présenter, comme si on s'était déjà croisés plusieurs fois avant. « Enchantée ! Moi, c'est Eden Gauthier. Et oui, ça va beaucoup mieux maintenant, merci de vous en inquiéter. Ce n'était pas très beau à voir les jours suivants, mais ce n'était pas si méchant que ça au final. Fallait juste que je fasse attention à ce que l'hématome ne s'empire pas. » Je haussai les épaules comme si c'était la chose la plus naturelle au monde. En même temps, j'avais l'habitude de ce genre de blessure, j'en avais eu un sacré nombre de fois avec toutes mes activités à sensation. « Vous n'étiez pas blessé vous au moins ? J'étais tellement préoccupée par Kyrah que je n'ai pas fait plus attention que ça… Je suis désolée si c'était le cas, comme les autres savaient que j'étais médecin, je me suis dis qu'on m’appellerait au besoin. » Je le regardai presque avec inquiétude. Je ne supportais pas l'idée de ne pas être venue au secours d'une personne dans le besoin, c'était même impensable. Je ne pouvais peut-être pas être partout à la fois, mais, si je le pouvais, je voulais pouvoir aider les autres. Ce fut sur cette pensée que je plongeai une main dans le saladier pour sortir doucement la sienne, regardant d'un peu plus près la brûlure. Je la regardai sous plusieurs angles avant de me laisser aller au soulagement et de la reposer dans l'eau fraîche. « Vous avez de la chance d'être assez réactif, vous n'avez qu'une brûlure au deuxième degré superficielle. Il faut la laisser encore quelques minutes dans l'eau et après je vous appliquerai une pommade. Je vous expliquerai comment faire pour les prochains jours. » Je posai mon poignet contre la table pour éviter de tremper le sol avec ma main mouillée et lui fis un grand sourire. J'aimais bien me sentir aussi utile.
Si des gens observaient leur échange sans pour autant pouvoir entendre le contenu de leur conversation, ils allaient sans doute les prendre pour des fous. La main de Wyatt dans un saladier rempli d’eau n’aidait déjà pas mais en plus de ça il y avait leurs expressions de personnes complètement perdues qui avaient fini par réaliser qu’elles se connaissaient. Le coup de hasard était tellement surréaliste que ça en devenait presque un spectacle. « Oui, oui, je vois très bien de qui vous parlez. Avant que vous nous rejoigniez, elle a beaucoup parlé pour nous dire comment réagir ou je ne sais pas trop quoi. J'ai fini par arrêter de l'écouter à un moment donné et j'ai essayé d'attirer l'attention d'un garde. Bon, on m'a sans doute prise pour une folle après ça, mais fallait bien tenter quelque chose pour sortir de là. » Encore une fois, Wyatt n’avait pas spécialement fait attention au comportement d’Adaline lors de leur nuit en prison mais suite au rendez-vous qu’ils avaient eu, cette description de comportement ne le surprenait pas. La jeune femme semblait être une personne qui aimait que les choses se déroulent comme elle le voulait et le producteur savait que l’écrivaine n’avait aucun problème pour partager ce qu’il y avait dans sa tête. Wyatt tiqua quelques secondes sur la dernière phrase de la brune. Bon, on m'a sans doute prise pour une folle après ça, mais fallait bien tenter quelque chose pour sortir de là. Wyatt avait essayé de discuter avec les policiers avant son entrée dans la cellule mais en dehors de ces quelques paroles il n’avait rien tenté pour les sortir de là. Le regrettait-il aujourd’hui ? Non pas spécialement. Apparemment une avocate n’avait pas réussi à les sortir de là et même avec ses contacts, il n’était pas non plus président. « Enchantée ! Moi, c'est Eden Gauthier. Et oui, ça va beaucoup mieux maintenant, merci de vous en inquiéter. Ce n'était pas très beau à voir les jours suivants, mais ce n'était pas si méchant que ça au final. Fallait juste que je fasse attention à ce que l'hématome ne s'empire pas. » Wyatt n’était même pas au courant que les hématomes pouvaient empirer. C’était quelque chose qu’on lui avait déjà dit mais tant qu’il n’aurait pas pu observer le phénomène par lui-même, les hématomes resteraient pour lui ces choses qui passaient par toutes les teintes dégueulasses du monde avant de disparaitre. « Je suis heureux de l’apprendre. Vous méritiez pas de finir comme ça. » Non, Wyatt n’avait aucun soucis à dire qu’il aurait largement préféré que ce soit les gars qui avait embêté Eden qui finissent avec des sales bleus, il fallait bien un peu de justice dans ce monde. « Vous n'étiez pas blessé vous au moins ? J'étais tellement préoccupée par Kyrah que je n'ai pas fait plus attention que ça… Je suis désolée si c'était le cas, comme les autres savaient que j'étais médecin, je me suis dit qu'on m’appellerait au besoin. » Un sourire se glissa sur les lèvres du producteur alors que la médecin s’inquiétait presque pour lui. Il n’en avait jamais vraiment douté mais la jeune femme n’avait pas que l’air d’avoir un bon fond. Il posa sa main droite sur le bras de la jeune femme et capta son regard pour la rassurer. « Non, vous inquiétez pas. Aussi miraculeux que ça puisse paraitre, j’ai réussi à me sortir indemne de la situation. » Il avait ressenti une gêne dans les bras suite à la force que les policiers avaient utilisé pour l’attraper mais globalement, il s’en était très bien sorti. A croire que monsieur le karma avait attendu aujourd’hui pour être un peu plus violent. Instinctivement, le regard de Wyatt se posa sur sa main alors qu’Eden l’examina avant de la replonger dans le saladier. « Vous avez de la chance d'être assez réactif, vous n'avez qu'une brûlure au deuxième degré superficielle. Il faut la laisser encore quelques minutes dans l'eau et après je vous appliquerai une pommade. Je vous expliquerai comment faire pour les prochains jours. » Parce qu’il y avait des gens qui restait regarder leur brulure sans faire quoi que ce soit pour soulager la douleur ? L’espèce humaine ne cesserait de le surprendre. « D’accord. J’imagine qu’idéalement faudra la laisser respirer mais qu’elle va pas trop apprécier le soleil mexicain ? C’est pas pire qu’une entorse dix heures après être arrivé en Egypte vous me direz. Je survivrais. » Et non, le producteur n’avait pas deux pieds gauches en plus d’avoir des mains occasionnellement pas douées, il tenait à le dire. Il y avait juste eu un petit accident de chameau dans le désert, ça arrivait à tout le monde. « Sinon, ça vous arrive souvent de faire des voyages sur des coups de tête comme ça ? Vous avez le droit de me dire que vous vouliez juste être dans un pays où on vous mettrais pas en garde à vue pour rien, je comprendrais. » Wyatt ponctua sa remarque d’un léger rire. Il y a quelques semaines il n’aurait pas pensé possible de s’amuser de cette soirée là mais il s’était prouvé tout seul qu’il avait eu tort.
Après avoir soigné Kyrah et être revenue dans la cellule, j’avais aperçu une de mes nouvelles connaissances et je n’avais plus vraiment fait attention aux autres. Ce n’était qu’en parlant avec Wyatt que je me rendis compte que j’avais peut-être manqué à mon engagement de médecin. Pourtant, ce n’était pas du tout volontaire, c’était juste la fatigue qui avait fini par m’emporter et l’adrénaline était vite retombée. Alors, quand je le vis poser une main sur moi, je relevai les yeux pour croiser mon regard et me sentis rassurée par la douceur qu’il dégageait. « Non, vous inquiétez pas. Aussi miraculeux que ça puisse paraître, j’ai réussi à me sortir indemne de la situation. » « Tant mieux. On a au moins un point plus ou moins positif pour cette longue journée. » Une pointe de frustration avait réussi à se mêler à ma bonne humeur à cette pensée. A cause de ce débordement dans la manifestation, certains australiens semblaient moins enclins à nous aider dans notre projet et, malgré toutes nos bonnes idées, on avait plus de mal à les mettre en place. Mais je n’étais pas venue m’isoler au Mexique pour m’énerver, au contraire, alors je fis en sorte de supprimer ces problèmes de mon esprit et examinai de nouveau la main de Wyatt. « D’accord. J’imagine qu’idéalement faudra la laisser respirer mais qu’elle va pas trop apprécier le soleil mexicain ? C’est pas pire qu’une entorse dix heures après être arrivé en Egypte vous me direz. Je survivrais. » Je levai mes yeux vers lui en relevant un sourcil pour montrer ma surprise. J’avais compris qu’il était aussi maladroit que moi en cuisine, mais je pensais que ça s’arrêtait là. « Qu’est-ce que vous avez fait pour avoir une entorse dès le début de vos vacances ? Ne me dites pas que ça a un rapport avec la cuisine quand même ? » J’aurais du mal à relier les deux, mais s’il était aussi doué que moi, on ne savait jamais. Il suffisait d’essayer de faire un plat un peu trop complexe et de glisser en voulant faire deux choses en même temps. « Pour la brûlure, c’est vrai que c’est mieux de la laisser respirer, mais ce n’est la ville la plus propre. Il vaut mieux que vous mettiez un bandage la journée et cette nuit aussi. Pour les autres nuits, il faudrait voir comment elle cicatrise. » Je n’avais pas envie de lui donner trop d’indications précises, je ne connaissais pas assez ce pays pour savoir comment une blessure allait évoluer. S’il était du genre à écouter à la lettre mes indications, il était possible que ça ne se passe pas bien à cause d’une réaction inattendue. J’avais déjà pu remarquer lors de plusieurs voyages que mes coupures ne guérissaient pas à la même vitesse, ce qui me demandait des soins un peu plus attentifs à chaque fois. Mais c’était aussi grâce à ces expériences que j’avais pu rapidement m’adapter au climat australien et à soigner correctement mes patients en m’adaptant aux conditions de Brisbane. « Sinon, ça vous arrive souvent de faire des voyages sur des coups de tête comme ça ? Vous avez le droit de me dire que vous vouliez juste être dans un pays où on vous mettrais pas en garde à vue pour rien, je comprendrais. » Je ne pus m’empêcher de me laisser contaminer par son rire. Les conséquences du débordement avaient beau m’énerver, cette soirée avait fini par devenir une bonne anecdote à raconter lors des soirées, même si j’avais eu le droit à un certain nombre de moqueries après coup. « Je ne peux pas trop râler là-dessus, c’est pas forcément mieux en France. C’est même pire en ce moment, ça fait presque peur. Mais c’est le risque quand on veut se faire entendre par le gouvernement, il n’est pas toujours prêt à nous écouter. » Je suivais l’actualité de la capitale avec tous les statuts que postaient mes amis ou même en discutant avec eux et j’étais plutôt contente d’avoir déménagé avant que ça ne dégénère. « Sinon, j’adore voyager. Mes parents m’ont donné le virus quand j’étais petite et, pendant mes études, une amie est partie faire le tour du monde et elle m’envoyait des cartes postales à chaque nouvelle destination. Ça m’a donné envie de faire la même chose. J’en profite dès que j’ai assez de jours de repos et d’argent aussi. Et vous ? Vous avez été où en dehors de l’Australie, de l’Egypte et du Mexique ? » Il n’avait jamais dit qu’il avait fait d’autres voyages, mais je sentais que c’était loin d’être une exception pour lui. En plus, avec son travail, il devait avoir plus d’occasions que moi de partir. Et, si j’adorais voyager, j’adorais aussi entendre les aventures des autres, ça accentuait mon envie de partir et de faire de nouvelles découvertes.
Wyatt devait dire que l’attitude de la jeune femme était très honorable. Le fait qu’elle s’inquiète de l’hypothèse de ne pas s’être occupé de tous les blessés lors de leur nuit en garde à vue et le fait qu’elle était en train de s’occuper de lui en ce moment-même alors qu’elle était en vacances. A sa place, il n’en aurait probablement pas été capable. Mais il aurait aussi tout bonnement été incapable d’être médecin, alors, la question ne se posait même pas. De un, parce que la médecine ne l’intéréssait absolument pas et de deux parce qu’il aurait été incapable de s’occuper d’autres personnes et de faire preuve de patience et d’empathie quand c’était nécessaire. Après il était parfaitement conscient qu’il existait des docteurs qui étaient aussi de parfaits connards, mais là n’était pas la question. « Qu’est-ce que vous avez fait pour avoir une entorse dès le début de vos vacances ? Ne me dites pas que ça a un rapport avec la cuisine quand même ? » Wyatt se mordit la lèvre à la première question d’Eden et il lâcha un léger rire à la deuxième. Lui qui avait pourtant l’habitude de réfléchir avant de parler, il aurait peut-être dû attendre avant d’ouvrir sa bouche. « Rien à voir, je vous rassure. Je suis mal tombé en voulant descendre d’un chameau. J’ai atterri sur un caillou, je suis tombé, ma cheville a pas apprécié. C’était juste de la malchance et un mauvais concours de circonstances, en vrai. » Et accessoirement c’était une histoire qu’il évitait de raconter mais il devait avouer qu’il avait tendu une perche à la brune, c’était de sa faute. Et maintenant qu’elle l’avait vu se bruler en essayant de faire à manger… Elle commençait à connaitre le personnage. « Pour la brûlure, c’est vrai que c’est mieux de la laisser respirer, mais ce n’est la ville la plus propre. Il vaut mieux que vous mettiez un bandage la journée et cette nuit aussi. Pour les autres nuits, il faudrait voir comment elle cicatrise. » Le producteur hocha de la tête et confirma qu’il avait bien compris les consignes avec un simple « Okay, d’accord. » . En toute honnêteté, ça ressemblait à ce qu’il aurait fait s’il avait dû se débrouiller tout seul. Enfin, ça c’est ce qu’il disait maintenant mais la perspective de se bander se main dominante sans aucune aide ne promettait pas du joli joli. Eden réussit à rigoler avec lui quand il lui demanda si elle avait quitté momentanément l’Australie pour échapper aux postes de police. C’était bon de voir qu’elle aussi arrivait maintenant à rire de cette fameuse nuit. « Je ne peux pas trop râler là-dessus, c’est pas forcément mieux en France. C’est même pire en ce moment, ça fait presque peur. Mais c’est le risque quand on veut se faire entendre par le gouvernement, il n’est pas toujours prêt à nous écouter. » De nouveau un hochement de la tête, accompagné cette fois-ci d’un sourire étonné. « Ah, vous êtes française du coup de base ? Je dois dire que votre accent s’entend à peine. Et je peux que approuver ce que vous dites, c’est malheureusement trop souvent le cas. Et c’est moche, surtout quand ça concerne des droits aussi basiques que celui défendu il y a quelques semaines. » Il ne planifiait pas de se marier avec un homme (ou de se remarier tout court, en fait) d’ici les mois à venir mais cela n’empêchait. Les manifestations n’étaient pas exactement son fort mais elles restaient un moyen de communication qu’il approuvait –quand il était bien exécuté– en tant que défenseur de la liberté d’expression. « Sinon, j’adore voyager. Mes parents m’ont donné le virus quand j’étais petite et, pendant mes études, une amie est partie faire le tour du monde et elle m’envoyait des cartes postales à chaque nouvelle destination. Ça m’a donné envie de faire la même chose. J’en profite dès que j’ai assez de jours de repos et d’argent aussi. Et vous ? Vous avez été où en dehors de l’Australie, de l’Egypte et du Mexique ? » Ce n’était pas compliqué de deviner qu’il avait eu l’occasion de visiter d’autres pays mais Wyatt tenait quand même à saluer la déduction d’Eden. « C’est cool ça. Moi aussi la passion est en partie née grâce à mes parents. Ils ne voyageaient pas forcément beaucoup mais ils ont toujours considéré que me faire voir autre chose que l’Angleterre me ferait grandir. J’ai eu l’occasion de découvrir des endroits fantastiques grâce à mon boulot, je dois dire que c’est un de ses grands avantages. Je reste beaucoup en Australie maintenant mais à l’époque où j’étais reporter je bougeais énormément, c’était génial. » Encore aujourd’hui, Wyatt gardait de très bons souvenirs de l’époque. La vie de producteur possédait d’autres aspects tout aussi intéressants mais il ne regrettait à aucun moment l’expérience qu’il avait pu acquérir en tant que journaliste dans ses plus jeunes années. « Après il y a du loisir aussi, quand j’ai le temps. Je pense qu’il faudrait que j’aie une carte devant les yeux pour ne pas oublier de pays. Mais je dois dire que j’ai un réel coup de cœur pour l’Amérique Centrale et l’Amérique du Sud. Le Costa Rica, la Colombie, le Honduras, Cuba, le Pérou… Si vous aimez l’astronomie, le Chili est fantastique à faire. Je pourrais vous faire une liste de pays à visiter en plus de la liste des choses à faire ici si vous voulez. J’aurais des photos sympas à vous montrer aussi. Vous retournez souvent en France ? » C’est bon, on avait atteint le stade où Wyatt était inarrêtable, comme c’était souvent le cas quand on le lançait sur un sujet qui le passionnait. Il s’était tellement enthousiasmé qu’il s’était mis à parler un peu trop avec ses mains, éjectant un peu d’eau en dehors du saladier. Le liquide sur la table ramena son attention sur le récipient. Ah oui, sa main. Il avait réussi à l’oublier pour le coup.