Même si les sentiments n'étaient plus là, les mots de Jamie avaient marqué Joanne. Il confirmait que oui, elle n'était pas la bonne, que oui, il ne regrettait pas d'avoir rompu avec elle alors qu'il ramait depuis dans l'espoir de trouver une vie sentimentale plus stable. A croire qu'il aimait patauger. Mais les jours avaient défilé. Elle y repensait de temps en temps mais ça avait fini par lui passer par-dessus la tête. Se retrouver au musée lui permettait de s'éloigner de tout ça, de penser à autre chose, d'en profiter. Joanne s'en sortait après tout, elle le vivait bien. Etre mère célibataire n'était pas facile tous les jours, il n'y avait jamais vraiment de pause, mais elle ne s'en plaignait. S'occuper de Daniel était un véritable bonheur et le petit continuait de faire des progrès incroyables, surtout depuis qu'il est à la crèche. Il apprend de ses congénères, il apprend la vie en société, en communauté. Elle venait de le coucher, et comptait bien profiter du calme pour regarder un film à la télévision. Joanne avait tout préparé : thé, pop corn, et une couverture pour se recouvrir les jambes. Mais après les dix premières minutes de visionnage, elle se sentait subitement bien fatiguée et n'avait plus de réelle motivation à profiter de cette soirée. Assez blasée, elle finit par se coucher, se disant qu'elle avait certainement grand besoin de repos. Seulement, dès qu'elle fermait les yeux, elle faisait des rêves étranges, qui la plongeaient dans un inconfort et un malaise grandissant. S'en suivit des épisodes de sueur froides et de frissons, qui duraient de plus en plus longtemps. Les membres engourdis, elle parvint à faire quelques pas jusqu'à sa salle de bains pour chercher de quoi soulager sa fièvre. Quelques minutes plus tard, elle ne se souvenait même plus d'avoir fait l'aller-retour. Elle était nauséeuse. Elle avait enfilé un gilet, avait rajouté une couverture sur elle, mais rien n'y faisait. Elle continuait de greloter, et elle sentait ses muscles se courbaturer. Chaque minute semblait durer des heures, la nuit, l'obscurité, semblait se prolonger indéfiniment alors que Joanne n'attendait qu'à ce que le jour ne se lève, avec l'espoir qu'elle se porte mieux. Elle avait la bouche sèche, mais rien que le verre d'eau posé sur sa table de nuit lui donner des nausées. La jeune femme regardait régulièrement l'heure sur son portable. Une heure, deux heures, trois heures... Non, le temps ne passait pas, et elle ne se sentait pas mieux. Oui, Joanne avait la santé fragile. Elle ne tombait pas régulièrement malade non plus - ne comptant pas ces situations d'anxiété qui l'empêchaient parfois de respirer -, mais lorsque c'était le cas, son système immunitaire semblait se faire la malle. Vers cinq heures du matin, elle saisit son portable pour envoyer un SMS à Jamie. [Salut Jamie, wst-ce que t peux venir surveill Daniel cw matin, je suis malade, j'arriverai ps à mr levwr] Sa vision était tellement trouble qu'elle n'arrivait même plus à écrire un SMS aussi court correctement. La moindre source de lumière générait un mal de crâne à s’en taper la tête contre un mur.Elle voulait poser son portable sur la table de nuit, mais elle l'avait trop posé sur le bord, et le mobile tombait par terre. C'était bien le cadet de ses soucis. Elle toussait par intermittence, elle sentait qu’elle était couverte de sueur. Elle espérait que Daniel ne se réveille pas la nuit. C’était peu probable, mais ça aurait très bien pu être la nuit où il avait fait un mauvais rêve, ou que lui à son tour tombe malade. Ce serait la cerise sur le gâteau. Mais par chance, il était sage et dormait paisiblement. Joanne aurait bien trop peur de s’occuper de lui alors qu’elle était malade. Elle avait une peur bleue de lui transmettre ses germes, alors qu’il y avait bien assez d’échanges de ce genre qui se faisaient en crèche. Elle espérait juste que Jamie n’ait rien de prévu et qu’il puisse se libérer. Techniquement, elle était à la maison, donc il ne risquait pas de se mettre dans le pétrin en lui demandant ce service. Joanne ne voulait pas faire affaire avec ses parents. Encore une fois, ceux-ci, surtout son père, avait un comportement déplacé et elle était contrariée à cause d’eux. Hassan avait sûrement autre chose à faire, et il ne lui serait pas vraiment venu à l’idée de lui demander ce genre de services. Que Jamie vienne quand il peut, s’il le peut. Lorsqu’elle avait un élan de force -et encore, elle était prise de nombreux vertiges à ce moment là-, elle descendit au rez-de-chaussée pour ouvrir à clé la porte d’entrée. Puis, comme un zombie, elle retournait au lit, épuisée par cet effort minime. Non, Joanne n’allait vraiment pas bien.
Sea winds brought her to me A butterfly, mere one-day miracle of life And all the poetry in the world Finally makes sense to me
[J’arrive dans une heure] Un grognement, un soupir, le téléphone qui retombe sur la table de chevet et mon visage qui s’enfonce dans l’oreiller. Je suppose que c’est dans les règles, d’aller donner un coup de main à Joanne pour prendre soin de notre fils lorsque celle-ci est malade. Cela ne me dérange pas. C’est mon corps qui me fait comprendre qu’entre la courte nuit et quelques courbatures suite au défouloir sportif de la veille, une longue grasse matinée n’aurait pas été de refus. Je m’étire, me motive. Je n’ai même pas la moindre idée de l’heure qu’il est. Après avoir trainé des pieds jusqu’à la salle de bains et passé de longues minutes sous le jet d’eau chaude, j’en ressors réveillé, mais pas forcément prêt à attaquer une journée en la présence de Joanne. Depuis notre dernière conversation, je me maudis pour chaque mot que j’ai pu prononcer. Je ne peux plus la considérer comme une confidente, m’ouvrir de cette manière. Je ne devrais pas la laisser voir que, oui, cette rupture m’a mis sur le carreau, que je ne remonte pas à la surface. J’ai toujours été celui qui retombe sur ses pattes, quasiment dans toutes les circonstances. Je suis supposé être celui qui s’en sort. Mais tout ce que je vois dans le miroir, c’est un peu plus de gris sur mes tempes, c’est de la lassitude, c’est un sourire disparu. Vêtu simplement, nourri d’œufs brouillés et encouragé par un thé qui accompagne les cachets quotidiens, une fois les chiens nourris et sortis machinalement, je quitte ma maison à contrecoeur. Pas la patience d’attendre qu’un chauffeur vienne, je me mets derrière le volant. Joanne et moi vivons pour ainsi dire chacun à un opposé de la ville. Et Dieu merci, il est encore trop tôt pour les embouteillages. Ainsi, j’arrive en une vingtaine de minutes. La porte est ouverte, Nunki et Sirius sont réveillés et bien énergiques. Une sortie ne serait pas de refus pour eux aussi. « Joanne ? C’est moi ! » je lance à travers la maison, ne sachant pas qui est encore vivant ou qui a trépassé entre le moment où j’ai reçu le texto et mon arrivée. Ce n’est pas la jeune femme qui me répond, mais un petit cri de Daniel devant être l’équivalent d’un bonjour ainsi que le son de monsieur secouant les barreaux de son lit, impatient d’entamer la journée. J’ouvre une porte-fenêtre pour que les chiens filent dans le jardin de derrière avant de retirer mes chaussures pour me rendre à l’étage. Le petit m’accueille avec un grand sourire et un « papa ! » ravi. « Surprise ! » Je le prends dans mes bras et colle un long baiser sur sa joue. La douce odeur de la couche sale matinale me caresse les narines, ce dont je m’occupe avant quoi que ce soit d’autre –et surtout avant que Daniel réalise cette gêne et soit tenté de lâcher quelques cris à ce sujet. « Je vais voir maman juste à côté, très rapidement. Je reviens et tu auras ton petit-déjeuner, ok ? » De retour au fond de son lit, il fait la moue et me regarde quitter la chambre avec un peu de contrariété. D’ailleurs, où est maman ? Faute de sa présence, il s’occupe avec son doudou pendant ce temps. Timidement, je pousse la porte de la chambre de Joanne. Je la trouve bien entendu emmitouflée dans une montagne de couvertures. J’approche afin de m’assurer qu’elle se repose, mais le simple frottement de mes chaussettes sur le sol suffit à la sortir de sa somnolence. A voir les valises sous ses yeux, non, elle ne dormait pas, et à vrai dire, elle n’a pas dormi du tout. Pâle, son teint flirte avec le gris dans la pénombre. Son front est couvert de sueur. Rares sont les fois où Joanne est tombée malade lorsque nous étions ensemble, mais lorsque cela arrive, la jeune femme ne fait pas semblant. « T’as bonne mine. » dis-je pour plaisanter. Plutôt que de grignoter l’espace vital dont elle a bien besoin, je m’accroupis près d’elle. « Je n’ai rien de prévu aujourd’hui alors je peux prendre soin de Daniel toute la journée si besoin. Nous serons juste en bas, on ne bouge pas, et je passerai voir si tu as besoin de quelque chose régulièrement. » je lui assure afin qu’elle ne s’inquiète de rien. Le garçon a l’air plutôt content de me voir, et cela rattrapera les jours où je ne suis pas venu rendre visite. Ils se raréfient, non pas à cause de ma relation avec sa mère, mais parce que le traitement aspire l’énergie que je pourrais lui consacrer. Période d’accoutumance, mon œil. « Tu sais ce qu’il te faut dans l’immédiat ? Un thé. Et un médecin. Est-ce que tu veux que j’en appelle un ? »
Les cachets que Joanne voulaient prendre la veille traînaient encore sur la table de nuit, à côté de son verre d'eau encore bien plein. Elle n'y avait pas touché. L'esprit embrouillé, elle ne savait même plus quelle heure il était, son horloge biologique était totalement perturbé et son corps ne s'adaptait pas à tous ces changements qui bouleversaient l'équilibre de son organisme. Elle avait chaud et froid à la fois. C'était forcément au moment où elle somnolait qu'elle entendait au loin la voix de Jamie. Quoi ? Quelle heure était-il ? Elle cherchait son portable sur la table de nuit, puis par terre. Elle finit par le saisir et regardait avec nonchalance l'écran de son portable. Elle pouvait ainsi lire la réponse de son ex. Il était là, c'était l'essentiel. Daniel était entre de bonnes mains, c'était ce qu'il y avait de plus important. Les voix lui semblaient particulièrement lointaines, comme un écho qui remplissait son crâne, c'était insupportable. Elle se fichait qu'il vienne la voir ou non, tant qu'il prenait soin de Daniel. Mais le bel homme pénétrait tout de même dans sa chambre. Joanne sentait son front et ses joues brûler alors qu'elle continuait de frisonner. Elle avait entendu le bruit de ses pas dans sa chambre. Et dire qu'elle pensait qu'il n'entrerait jamais dans cette chambre. Il tentait de faire un peu d'humour, mais Joanne ne parvenait pas à arracher un sourire sur son visage de porcelaine. Elle peinait même à maintenir ses yeux ouverts pour pouvoir le regarder. Ceux-ci étaient injectés de sang. "Je veux pas non plus que tu bloques toute ta journée pour ça non plus. Ca m'embête, pour toi." parvint-elle à articuler tout bas. Il avait certainement autre chose à faire que ça, même s'il apprécierait certainement le temps passé avec Daniel - tout ça juste parce qu'elle en était incapable. La jeune femme grimaça lorsqu'il parlait de thé. "Rien que le mot me donne envie de vomir." dit-elle en secouant négativement. Déjà qu'elle n'arrivait pas à boire quelques gorgées d'eau pour un comprimé qui faisait baisser la fièvre. "Je sais pas pour le médecin... Y'a des moments où je me dis que ça ira mieux, et d'autres où je ferai n'importe quoi pour dormir paisiblement." A vrai dire, Joanne était terrorisée à l'idée de voir un médecin."J'ai commencé à tousser, après t'avoir envoyé le SMS, j'ai la gorge en feu à force, et je sens que je suis toute encombrée." Joanne avait horreur d'être malade. Ca l'énervait tellement d'être aussi faible, c'était un cercle vicieux qui ne faisait qu'empirer. Entre la fatigue, cette colère à l'idée d'être moins que rien, inutile pour tout le monde à ce moment précis fit monter quelques larmes au bord des yeux. "Il suffit de voir ce qu'il m'est déjà arrivé pour qu'ils aient envie de me faire faire un aller-simple à l'hôpital. Et leur fichu oxygène." Peut-être qu'elle lançait des plans sur la comète mais c'était réaliste. Une femme qui faisait des détresses respiratoires et qui commençait à s'encombrer et avoir une nuit entière avec une fièvre importante, ça avait de quoi inquiéter. Elle dramatisait peut-être, mais ça l'effrayait. Qui allait s'occuper de Daniel si elle ne pouvait pas rester à la maison ? "J'en sais rien, de ce qu'il faut faire..." dit-elle en essuyant ses larmes. Elle n'était pas en mesure de réfléchir, ni même de penser, encore moins pour prendre la meilleure décision quant à son état. Joanne refusait de boire, ayant constamment des nausées, elle allait finir par se déshydrater si elle continuait de refuser d'avaler quoi que ce soit. Elle fut prise une vive quinte de toux pendant plusieurs dizaines de seconde avant de retrouver son calme. "Occupe-toi de Daniel, c'est le plus important. S'il te plaît." dit-elle en laissant tomber son bras du lit, et en cherchant sa main pour la saisir avec le peu de force dont elle disposait. "Il sera content de passer du temps avec toi, je sais que tu lui manques beaucoup. Merci d'avoir accepté de venir." On entendait d'ailleurs Daniel commencer à se manifester, étant lassé de rester dans son berceau alors que le soleil était déjà bien levé, et qu'une belle journée l'attendait. Le son de sa voix semblait être dupliqué et faire écho dans la tête de Joanne, c'était bien désagréable. "Ca va aller." souffla-t-elle tout bas, totalement somnolente. Cela dit, il n'était pas certain que ce soit un sommeil agréable qui attende Joanne. Bizarreries, cauchemars, son corps manifestait son mal-être comme il le pouvait, ce qui rendait chaque minute de cet instant particulièrement désagréable.
Sea winds brought her to me A butterfly, mere one-day miracle of life And all the poetry in the world Finally makes sense to me
En étant appelé à la rescousse chez Joanne, j'avoue que je ne m'attendais pas à la voir aussi mal. Un peu de fièvre et de fatigue accumulée tout au plus, le lot d'une mère célibataire et son bagage de stress au quotidien qui, parfois, prend le dessus sur le système immunitaire. Une journée de pause, et elle serait repartie. En m'approchant, je viens à en douter. Je ne me montre pas trop inquiet, je compte sur le bon sens de Joanne pour savoir quand il est nécessaire de se rendre à l'hôpital, pour ne pas jouer avec sa vie. Même si fumer en soirée n'est pas la décisions la plus censée que je l'ai vu avoir, je suppose qu'elle ne réitère pas l'expérience tous les jours vu l'aversion qu'elle a montré pour ma propre minuscule consommation -à laquelle j'ai bien été obligé de mettre fin. « Et moi je ne suis pas du tout embêté à l’idée d’être avec mon fils toute la journée, ni de m’assurer que tu vas bien. » je la corrige avec un léger sourire. Quelle idée. Le thé la dégoûte, peut-être plus tard. Elle ne doit pas laisser sa maladie la pousser à s'affaiblir encore plus en revanche. Quant-à faire appel à un docteur, l'idée ne l'enchante pas non plus. Ou plutôt, elle ne parvient pas à se décider et se montre particulièrement angoissée. « Allons, allons… » Je sèche délicatement les larmes de la jeune femme du revers de la main. Il n'y a pas de quoi pleurer. Ce n’est qu'une petite maladie de rien du tout qui profite de la fatigue et de la fragilité de la petite blonde. « Bien sûr que ça va aller. » Je lui souris toujours un peu. Notre conversation au musée de met tout naturellement de côté afin de nous épargner un malaise et me permettre de veiller sur elle. C'est devenu tout ce qui importe. Daniel s'impatiente dans la chambre d'à côté, mais il devra attendre encore un peu. Je me rends rapidement dans la salle de bains et reviens avec de quoi prendre la température de Joanne ainsi qu'un gant de toilette froid à lui déposer sur le front. Il semble se réchauffer instantanément. La température, elle, n’est pas encore affolante concrètement. « Faisons un marché. Si j’estime que ton état s’est aggravé d’ici la fin de la matinée, j’appelle un médecin. Juste pour savoir ce que tu as et avoir quelques conseils pour t’aider à aller mieux. Si je trouve ton état vraiment inquiétant, je te conduis à l’hôpital. Je ne dramatise pas, et tu ne minimise pas. Si rien ne change, je reste cette nuit. Tu ne dois pas être seule si tu te sens soudainement vraiment mal au milieu de la nuit. Je ne pars que s'il y a de l'amélioration. Ou si tu me jettes dehors, mais tu n’es pas vraiment en état pour ça. » Je ne compte pas la laisser tant qu'elle ne m’assurera pas de manière convaincante qu'elle peut être seule avec Daniel. Douce ironie. “Je ne suis qu'un homme, mais je peux m'occuper de Daniel et de toi en même temps.” j'assure avant qu'elle n’objecte. De toute manière elle n’a pas le choix. D'ailleurs, délicatement, je l'aide à redresser le haut de son corps et à porter le verre d'eau à ses lèvres. “Bois un peu. Au moins une gorgée-test.” Même si l'eau l'écoeure, il y a peu de chances qu'elle rende ses tripes à cause de cela. Une gorgée ne peut définitivement pas lui faire de mal. “Papaaaaaa !” s'impatiente encore Daniel qui secoue ses barreaux comme un condamné à mort. “Tu l’as nourri après minuit ?” je demande avec un petit rire -mais je ne m'attends pas à plus de réceptivité que lors de ma première plaisante. Une fois Joanne rallongée, bien installée, je me décide à la laisser seule afin de se reposer. “Je reviens dans une heure.” dis-je avant de quitter la chambre, laissant la porte ouverte derrière moi au cas où. Enfin, je tire Daniel de son lit. Je prends un air sérieux et sévère, histoire qu'il ne s'en sorte pas avec ses exigences. “C’est quoi ce caprice ?” Le ton, ferme, suffit pour qu'il ne fasse plus le fier. Mon visage fermé et mes sourcils froncés ne lui plaisent pas beaucoup. Il tente de se faire pardonner en se jetant contre moi pour un câlin. “Maman est malade aujourd'hui, elle est très fatiguée, alors on ne fait pas trop de bruit. On ne crie pas.” j’explique pendant que nous descendons les escaliers. Daniel n’émet qu’un babillage plaintif. “Je sais que tu as faim bonhomme. On va remédier à ça.” Plus doux, je lui donne un baiser sur le front. Je n'ai pas la moindre idée de la manière dont Joanne organisé sa cuisine, mais ce doit bien être à ma portée, n'est-ce pas ? En tout cas, Daniel sait où sont les gâteaux et me les montre avec gourmandise, s'en léchant déjà les doigts.
CODE ☙ LOONYWALTZ
Dernière édition par Jamie Keynes le Mar 28 Fév 2017 - 23:09, édité 1 fois
Jamie semblait véritablement tenir à prendre tout en main ce jour là. Certains crieraient que c'est bien facile de dire ça, parce qu'il n'avait pas le choix. Mais malgré sa fatigue, Joanne devinait une bonne volonté de sa part, une envie de bien faire les choses. Peut-être pour se prouver qu'il était capable de s'occuper de deux personnes ayant besoin de soins et d'attention. Il souriait même, son était agréable. Sur le coup, la jeune femme oubliait totalement leur précédente conversation, ces confidences qui n'avaient peut-être pas leur place au sein de leur relation. Il cherchait déjà trouver quelques solutions; lui proposer de boire du thé, de voir un médecin. Aucun des deux ne l'inspirait véritablement. Joanne était surtout très angoissée à l'idée de voir un médecin. Ou plutôt, elle avait une peur bleue d'un diagnostic. Elle préférait penser que c'était quelque chose de grave et qu'après l'auscultation, le professionnel de santé se montre optimiste en disant que ce n'était par exemple qu'un syndrome grippal plutôt que de partir du fait que ce soit quelque chose d'anodin, qui finalement, s'avère bien plus compliqué que ça. Cette manière de penser n'était pas mauvaise en soi, mais il y avait une poussée d'angoisse dès le début, que Jamie tentait d'apaiser. Il avait même essuyé avec délicatesse ses joues humides, où les larmes s'étaient mêlées aux gouttes de sueur. Il semblait être optimiste, à garder constamment ce petit sourire sur ses lèvres - sourire qui l'avait longuement charmé. Elle ne savait pas pourquoi elle se disait ça, à ce moment. Ca devait être la température qui jouait des tours avec son esprit. Il fit ensuite un bref aller-retour pour aller récupérer un gant de toilettes trempé dans de l'eau froide. Cette fraîcheur fit le plus grand bien à Joanne, mais ce petit soulagement fut de courte durée car le gant de toilettes absorbait rapidement la température corporelle de la jeune femme. Jamie proposait alors un marché. Cela lui semblait honnête mais elle n'était pas certaine d'être capable de ne pas minimiser. Elle ne voulait juste pas retourner à l'hôpital. "C'est entendu." souffla-t-elle tout bas. Et puis même si leur relation était un peu compliquée, Jamie semblait véritablement soucieux de l'état de la jeune femme et était bien déterminé à ne pas partir tant qu'elle n'allait pas mieux - pour son bien, et pour celui de Daniel aussi. "C'est vraiment gentil... que tu acceptes de sacrifier ta journée, peut-être même ton weekend, juste à cause de ça." dit-elle en parvenant à esquisser un sourire reconnaissant. Sans avoir trop le choix, elle but une fine gorgée d'eau fraîche. "Rien que ça, ça me retourne l'estomac." dit-elle en sentant le liquide couler le long de sa gorge jusqu'à se déposer dans l'organe qui lui faisait aussi des misères. Daniel, lui commençait à perdre patience dans sa chambre, surtout en sachant que son papa était là. "Il y en a un qui s'impatiente, je crois." Elle soupira, ses cris lui faisaient mal à la tête. Elle rit tout de même doucement à la petite référence cinématographique de Jamie, mais cela enclencha une nouvelle quinte de toux, elle était toujours bien encombrée. Il finit par s'absenter pour s'occuper du petit homme. La petite blonde retrouvait une position allongée et ferma automatiquement les yeux, n'ayant plus beaucoup de force pour maintenir ses paupières ouvertes. Immédiatement après, ses rêves étranges reprirent de plus belle. Elle ne s'en souvenait pas, mais elle savait combien ces mauvais rêves étaient désagréables et mettaient mal à l'aise. Elle jurerait avoir vu Jamie à un moment donné, mais elle n'en savait trop rien. Joanne savait juste qu'elle mourriat de chaud et de froid à la fois. Elle entendait Jamie et Daniel au loin, c'était bon signe, c'était que tout se passait bien, là en bas. Le temps lui semblait être interminable et Joanne aurait fait n'importe quoi pour se sentir mieux. Mais elle avait l'impression que la courbe allait dans l'autre sens. Lorsqu'elle avait un moment de conscience, elle se demandait où et quand elle aurait pu attraper ces germes. Ensuite elle maudissait sa propre santé, et espérait qu'elle soit aussi solide que Jamie. Tous ses membres étaient si lourds, elle avait l'impression que ses muscles étaient faits de plomb. Non, son état ne semblait pas vouloir s'améliorer pour le moment. Même éveillée, Joanne continuait de rêver, perdue avec cet esprit embrumé qui lui empêchait d'avoir les idées claires. C'était pénible. Autant Joanne adorait traîner avec Jamie -ou avec Hassan- au lit le matin, à se câliner, à s'embrasser pour se câliner encore plus jusqu'à ce que ce ne soit plus vraiment une étreinte. Oui, dans ces cas-là, elle aimait bien rester au lit. Mais pas en étant malade comme ça. Et puis, pourquoi se mettait-elle à penser ça, maintenant ?
Sea winds brought her to me A butterfly, mere one-day miracle of life And all the poetry in the world Finally makes sense to me
L'accord est scellé. Je compte sur Joanne pour remplir sa part ; être objective par rapport à son état, ne pas tenter le diable, et me laisser prendre les choses en main si besoin. J'espère qu'elle a conscience que je ne veux que son bien. Je ne me réjouis pas d'avance à l'idée de m'entendre dire par un médecin que nous devons aller à l'hôpital parce que la condition de la jeune femme pourrait être aggravée par cette maladie, quelle qu'elle soit. Juste une grippe, autre chose ? J'aimerais au moins savoir. Mais nous attendrons un peu, comme je le lui ai dit, afin de ne pas s'alarmer pour rien. Un corps fatigué, à bout de nerfs, peut se mettre dans un état incroyable parfois, lui tout seul. Peut-être n'a-t-elle que besoin de se reposer. Je vois bien que le sommeil n'est pas réparateur, mais la léthargie est une solution en soi. Ne rien faire, fermer les yeux, somnoler, attendre que le temps passe. Ce n'est pas si mal lorsque c'est le corps et la tête qui le réclament. « Je ne sacrifie rien du tout, je te l'ai dit, je n'avais rien de prévu. » Que Joanne n'aille pas s'encombrer de culpabilité, c'est inutile, et elle n'en a vraiment pas besoin à cet instant. Est-ce que j'ai l'air de subir une corvée ? Qu'elle se laisse donc rassurer par le léger sourire que je garde au coin de mes lèvres. Elle sait bien, après tout, que j'aime prendre soin de mes proches, les gâter, être présent pour eux, et cela compte toujours pour elle. Malgré tout. « J'entends bien, mais je ne compte pas te laisser te déshydrater. Juste le minimum. » dis-je alors qu'elle se plaint que même l'eau lui paraît indigeste. Quelque chose me dit qu'elle ne touchera pas à se verre d'ici à mon retour à ses côtés dans une heure. D'ici là, j'ai un petit garçon qui attend que son père s'occupe de lui. Il n'a toujours rien mangé et son estomac commence à grogner. « Plus tard les gâteaux Daniel, si je te fais manger des cochonneries ta mère ne sera pas contente. » Elle n'a pas besoin de le savoir, c'est vrai. Bon, juste un. Cela le fera patienter pendant que je trouve de quoi réellement le nourrir. « Mamamaman... » babille-t-il pendant qu'il mordille son boudoir. « Oui trésor, elle se repose. Nous allons avoir une journée entre hommes. » C'est ainsi que Joanne appelait ces moments où je me dédiais à lui lorsque nous étions ensemble. Elle s'éclipsait et nous laissait tous les deux. Elle y tenait, moi pas vraiment. J'aimais que nous soyons tous ensemble. Mais la jeune femme avait bien droit à du temps pour elle seule. Daniel engloutit son petit-déjeuner, et s'en suivent de nombreux va chercher avec les chiens dans le jardin tant que le soleil ne cogne pas trop sur le crâne du garçon. L'heure passe rapidement. Je ne laisse pas Daniel seul longtemps. Lorsque je monte voir comment se porte Joanne, elle paraît endormie. D'un sommeil agité, certes. Discrètement, je me contente de refroidir le gant de toilette et de se replacer sur son front. Je n'ose pas la réveiller. Je reviens au bout d'une heure supplémentaire, lorsque le petit est tellement absorbé par la piscine à balles qu'il ne remarque même pas que je m'éclipse. Je m'assois en tailleur face à Joanne après avoir disposé un yaourt, un fruit et une barrette de chocolat sur la table de chevet. « Hey. Je t'ai ramené deux trois trucs à manger, si jamais ton estomac se sent inspiré plus tard. » Mes lèvres se pincent. Il n'y a pas grand-chose à dire, et la jeune femme n'est pas en état de discuter. « Tu sais si c'est une gueule de bois tu peux me l'avouer. » dis-je pour plaisanter. Puis mon regard tombe sur le thermomètre ; machinalement, je reprends la température de la jeune femme afin de savoir s'il y a une évolution. Lorsque les numéros s'affichent, je soupire et affiche un sourire résigné. « Félicitations, tu viens de gagner un demi-degré. » Ca ne va pas mieux. A vrai dire, pas besoin de prendre la température pour le constater. Et me voilà bien impuissant, ne sachant pas comment l'aider. « Et si tu prenais une douche, est-ce que ça aiderais, tu penses ? » Je me souviens qu'un jour, lorsque j'étais enfant, une de mes rares maladies qui m'avait terrassé. Ma fièvre crevait le plafond. Alors ma nanny de l'époque m'avait fait prendre un bain tiède, mais qui paraissait gelé pour mon corps brûlant. Cela n'avait pas été agréable sur le moment. Au fil des minutes, je me sentais un peu mieux. Au moins n'avais-je plus l'impression que mon cerveau fondait dans la fournaise de mon crâne. J'eus un moment de répits avant que le médecin puisse se déplacer jusqu'à moi. Alors, à un juger par cette maigre expérience, je pense que Joanne pourrait tirer le même soulagement un passage sous l'eau tiède. Au moins sera-t-elle débarrassée de la sueur sèche de la nuit dernière collée à sa peau.
Si elle en avait eu la force, Joanne aurait pu être surprise de savoir que Jamie avait un weekend entièrement libre. Pas de soirée mondaine, pas de travail, pas d'Emma, rien de tout ça. Il disait être libre pendant deux journées complètes et cela frôlait l'exploit quand on s'appelait Jamie Keynes. Il préférait insister sur ce fait là, qu'il ne renonçait à rien du tout en passant la journée, ou le weekend, avec elle. Il n'avait rien à mieux à faire que de s'occuper d'elle et de leur fils. Le bel homme invita Joanne à boire, mais la seule petite gorgée d'eau qu'elle put avaler l'écoeurait et la rendait nauséeuse. Mais voilà, elle venait de boire le minimum, juste une petite gorgée. L'on pourrait croire à un caprice d'enfant, mais dans cet état là, qui ne le devenait pas ? Qui ne voudrait pas pouvoir compter et se faire bichonner par quelqu'un alors que l'on était au plus mal ? Jamie était parti prendre le relais concernant la surveillance de Daniel et Joanne tentait de s'assoupir. Ce n'était que des cauchemars, elle commençait même à peiner à discerner le rêve de la réalité. Elle ne saurait dire combien d'heures elle avait dormi, ni combien de fois le bel homme était passé la voir pour s'assurer si tout allait bien. Elle entendait parfois des bruits discrets, des voix, mais elle ne saurait dire si c'était son imagination ou non. Mais lorsqu'elle rouvrit les yeux, Jamie était là. Il était plus prudent que le petit ne rentre pas dans cette pièce, qu'il ne court pas le risque de tomber malade également. Ca allait certainement très étrange pour lui de ne pas voir sa mère durant toute une journée et il n'était pas en âge de comprendre pourquoi, malheureusement. Jamie était assis juste en face d'elle, de sorte à ce qu'elle l'ait dans son champ de vision. Il lui avait ramené quelques aliments pour se nourrir mais l'appétit n'était toujours pas au rendez-vous. "Une gueule de bois ? Moi ?" lança-t-elle avec un vague sourire. "Il paraît que je suis plus solide dans ce domaine là qu'on ne pourrait le croire. Pourtant, je ne suis pas une très grande consommatrice." Autant dire que très rarement une bouteille d'alcool qui traînait chez elle. Souvent, elle achetait ses bouteilles de vin pour faire des viandes en sauce, et elle sirotait tranquillement ce qu'il restait au fond de la bouteille. "En général, on dit que la crèche est un nid à microbes. Mais au lieu que ce soit Daniel qui trinque, c'est moi. On peut pas faire une mère plus dévouée." plaisanta-t-elle à son tour, trouvant un léger entrain pour sourire. Mais ce moment fut de courte durée. Joanne avait gagné en fièvre, ce n'était pas un signe d'amélioration. Le bel homme suggéra une douche, afin de rafraîchir son corps bien trop chaud pour qu'il puisse fonctionner. "Peut-être bien, oui. Ca vaut le coup d'essayer." Mais pour essayer, la petite blonde devait dans un premier temps parvenir à se découvrir, à se redresser, à s'asseoir au bord du lit et à se lever sans trop avoir de vertiges et de sensations de tomber dans les pommes pour pouvoir mettre un pied devant l'autre. Elle tentait d'étirer ses membres engourdis et courbaturés, puis réunit tout son courage pour se défaire de sa couette. Forcément, elle avait froid à ce moment et se mit à greloter. Joanne s'installa au bord du lit, et les premiers vertiges firent leur apparition. "Tu me vois dans mon heure de gloire. Petit veinard." ironisa-t-elle. "Je sais pas si je vais arriver à me lever, j'ai déjà l'impression de me trouver dans un carrousel." dit-elle en appuyant ses coudes sur ses cuisses, son front entre ses deux mains. "Tu veux bien m'aider à me lever ?" demanda-t-elle. Jamie l'aida. Fort heureusement, Joanne ne pesait pas bien lourd, parce qu'il devait supporter une certaine partie de son poids alors qu'elle marchait péniblement jusqu'à la salle de bain. "Je crois que je vais pouvoir me débrouiller à partir de là." dit-elle lorsqu'elle s'appuya sur le vasque, offrant un sourire qui se voulait rassurant à Jamie - mais il ne l'était certainement pas. Il fermait la porte derrière lui, afin de respecter son intimité. Joanne retira dans un premier temps son gilet, tout ce qu'elle avait mis pour se recouvrir jusqu'à retrouver la tenue initiale pour se coucher, sa nuisette. Elle avait tellement froid. Et là, nouveau moment de vertiges, ses jambes devenaient à nouveau du coton, comme si par le simple fait de se déshabiller, elle avait épuisé toutes ses ressources pour ça. Alors elle s'appuya à nouveau sur le vasque encastré. "Jamie, ça va pas." dit-elle alors, tentant de faire de son mieux pour ne pas s'effondrer à terre. Elle se damnait de ne même pas être capable de prendre une douche tranquillement, seule.
Sea winds brought her to me A butterfly, mere one-day miracle of life And all the poetry in the world Finally makes sense to me
Peut-être qu'il existe une étude très sérieuse dans je ne sais quelle revue scientifique qui prouve que rire en peu pendant que l'on est alité aide à guérir, ou que cela ne change rien du tout. En tout cas, cela ne peut pas faire de mal à Joanne, alors je m'emploie à lui arracher un sourire de temps en temps autant que je le peu. Une plaisanterie ici et là, de quoi la faire dédramatiser de temps en temps, oublier la fièvre juste le temps qu'un discret éclat de voix. De manière générale, les hommes aiment faire sourire une femme. Il y a une certain efierté à être à l'origine d'un rictus amusé ou flatté. C'est une manière de toucher le coeur, de nouer du lien. De se souvenir qu'il y en a eu un entre nos deux coeurs un jour. « Je sais, je t'ai déjà vu t'enfiler une dizaine de coupes de champagne et toujours tenir sur tes talons. » je réponds avec un rire également à une Joanne tout à fait consciente qu'elle tient l'alcool, sûrement mieux que moi. En comparaison avec n'importe quelle autre homme de mon âge, ma consommation est particulièrement récente et rare, ainsi mon corps n'a pas le temps de s'habituer à quoi que ce soit. Deux coupes suffisent à me rendre particulièrement souriant et jovial. Je ne suis pas peu content d'entendre la petit blonde articuler une petite blague à son tour. « Je suis certain que Daniel t'es très reconnaissant. » Ou en tout cas, il le sera un jour, et Joanne poura l'ajouter à la future très longue liste de choses qu'elle a faites pour lui depuis sa naissance, à lui ressortir lorsqu'il sera grand et osera désobéir. Technique parentale très connue que l'on méprise tous jusqu'au jour où il est nécessaire de l'employer par manque d'autres options. L'idée de la douche convient à Joanne qui trouve là une motivation pour s'arracher à son lit. Lentement, difficilement, elle se redresse et s'assoit. Avec mon aide, elle se lève et se traîne jusqu'à la salle de bains. Entrée interdite à l'ex bien sûr, je la laisse se débrouiller seule à partir de là et ferme la porte sans pour autant m'éloigner. Ma main reste même sur la poignée. Il ne faut qu'une minute avant que la jeune femme m'appelle à l'aide ; alors j'entre sans me demander dans quelle tenue de la trouverai et la prend dans mes bras pour prévenir la moindre chute. Je récupère une Joanne grelottante, fébrile au possible. « Je suis là. » je murmure, la devinant bien angoissée par sa propre faiblesse. Nous savons tous les deux que cet état la mènera à l'hôpital à la fin de la journée. « Bon, nous allons procéder autrement. » Je réfléchis rapidement ; sans lâcher Joanne, je me penche pour atteindre son cardigan et le lui pose sur les épaules, dans l'espoir d'un effet placebo qui calmerait ses frissons. Puis je l'invite à s'asseoir sur le bord de la baignoire dont j'active le jet d'eau afin de commencer à la remplir. Une pensée pour la pudeur tenace de la petite blonde me fait verser du bain moussant ; ainsi je ne la verrai pas complètement nue. Pendant une poignée de minutes, je garde ainsi Joanne dans mes bras. Et c'est assurément le plus long contact physique que nous ayons eu depuis notre séparation. Je ne le réalise pas sur moment, concentré sur le niveau et la température de l'eau à vérifier régulièrement. Lorsque la baignoire à pleine à moitié, et qu'une bonne couche de mousse flotte à la surface, j'aide Joanne à se déshabiller et immédiatement se réfugier dans les bulles. « Papapapaaaaaaaaaaa ! » hurle un certain petit garçon en bas, laissé seul depuis trop longtemps à son goût. Je lâche un long soupir. « Je reviens tout de suite. Ne te noie pas, d'accord ? » C'est en trottant dans le couloir et l'escalier que je rejoins Daniel. Il a précautionneusement jeté chacune des balles de sa piscine hors de celle-ci pour souligner dignement son mécontentement face à la solitude. Ce sont les chiens qui s'amusent avec désormais. Fort bien. Je prends le petit avec moi, monte à l'étage et le dépose dans son lit avec une douzaine de doudous pour lui tenir compagnie. Cela devrait au moins l'occuper dix minutes. « Trésor, papa doit s'occuper de maman pour le moment, sois sage. » Déjà absorbé par sa grande conversation avec le petit panda que lui a offert sa marraine, Daniel m'autorise donc à repartir auprès de sa mère -toujours en vie. Accroupi à côté de la baignoire, je lui adresse ce regard de parent coupable de soumission aux caprices de son enfant en tout conscience. J'ai presque l'impression de perdre la main en tant que père à force de voir mon fils plus rarement. Est-ce un domaine à mettre dans la même catégorie que le vélo ? Qu'importe, maintenant que je n'ai pas de crise à gérer, je me dédie à nouveau à Joanne. Délicatement, je lui mouille les cheveux avec le pommeau de douche, comme je le faisais lorsque nous partagions un bain, avant. Mes doigts passent entre ses mèches, massent légèrement son crâne chaud. « Je suis passé dans ta chambre plus tôt, tu dormais. Tu avais l'air de faire un mauvais rêve. Quelque chose te travaille en ce moment ? »
CODE ☙ LOONYWALTZ
Dernière édition par Jamie Keynes le Mer 1 Mar 2017 - 14:15, édité 1 fois
Joanne s'était toujours amusée du fait que son ex-fiancé ne tenait absolument pas l'alcool. Globalement, il avait l'alcool joyeux. Il se désinhibait un peu plus, et, il ne fallait pas mentir, leurs ébats sexuels qui suivaient cette maigre consommation valait le coup. Le fait de tenir l'alcool n'octroyait pas à Joanne un sentiment de supériorité, mais elle se délectait d'avoir tout le loisir de voir son compagnon bien imbibé avant qu'elle ne commence à l'être. Jamie semblait un brin admiratif en n'ayant pas oublié que la jeune femme tenait parfaitement sur ses hauts escarpins, qu'importe sa consommation d'alcool. En soi, c'était un exploit. Quelques traits d'humour ici et là permettait à la jeune femme d'oublier une fraction de seconde à quel point elle était dans le mal. Elle finit enfin par accepter une des suggestions de Jamie, qui est de prendre une douche. Le trajet jusqu'à la salle d'eau, aussi court pouvait-il être, fut particulièrement laborieux. Joanne pensait pouvoir se débrouiller seule à partir du moment où elle était arrivée à destination, mais elle avait bien tort. Il suffisait qu'elle se déshabille un peu pour qu'elle ait à nouveau l'impression d'être dans un bateau en train de tanguer. Le monde tournait autour d'elle, c'était à en avoir des nausées. Dès qu'elle se sentait partir, elle appelait Jamie, qui avait eu la bonne idée de rester à proximité. Il avait certainement senti que ça n'allait pas aller, il avait toujours de bons pressentiments lorsqu'il s'agissait de Joanne, étrangement. Il savait lorsque ça n'allait, ou lorsque ça n'allait pas. Alors il intervint rapidement, en la prenant dans ses bras pour la maintenir debout. Il arrivait un moment où elle se laissait totalement portée par lui. Il recouvrait ses épaules, la fit s'asseoir sur le rebord de la baignoire afin de remplir cette dernière. Aussitôt déshabillée, il plongea le frêle petit corps de Joanne dans l'eau. Elle grelottait intensément dans un premier temps. Les bains chauds lui manquaient. Elle ne s'était jamais permise de s'en faire couler un depuis qu'elle avait aménagé dans cette maison. Forcément, Daniel n'acceptait pas d'être délaissé et savait comment faire pour se manifester et montrer son mécontentement. Mais Jamie réapparu soudainement auprès de la jeune femme, quand il avait un peu géré son fils à côté. "Tu as le regard du père qui a fait quelque chose pour faire plaisir pour son fils, alors qu'ils savaient tous les deux que la mère ne serait pas d'accord." dit-elle avec un léger sourire, alors qu'il s'accroupissait juste à côté d'elle. Joanne avait remarqué l'attention qu'il avait porté sur sa pudeur. Joanne se redressa, pour passer ses bras autour de ses genoux. Ainsi, elle laissait Jamie lui masser avec attention les cheveux. Elle penchait légèrement la tête en arrière, adorait sentir l'eau couler le long de son échine, emmenant avec elle la mousse qui s'était déposée sur sa peau de porcelaine. Ses yeux étaient fermés. Elle frissonnait à nouveau. Elle devait avoir froid, mais il n'y avait que ça. Impossible de ne pas se remémorer le temps qu'ils passaient dans le bain tous les deux, et ce qui se passait systématiquement juste après. Cela éveillait leur sens, donnait envie de sentir plus. C'était la voix de Jamie qui l'extirpa de ce moment de flottement. Elle rouvrit les yeux. "Des détails... de souvenirs." souffla-t-elle tout bas. Elle le disait surtout pour elle-même, cela ne collait pas à la question qu'il venait de lui poser. "Dès que je suis malade, je cauchemarde. C'est systématique. Dès que je ferme les yeux tout devient si angoissant, au point de ne plus savoir si je préfère restée éveillée ou pas. Je ne m'en souviens jamais, la seule chose que je retiens. C'est que c'est effrayant, angoissant, pire que tout. Comme si mes propres pensées se jouaient. A juste charge de revanche. Ou peut-être que c'est le seul moyen trouvé pour évacuer tout ce que je garde pour moi, je n'en sais rien." Elle sourit tristement. "Les souvenirs. Ce sont les souvenirs qui doivent générer toutes ces angoisses. Dit comme ça, ça n'a l'air de rien, je suis même incapable de te décrire le moindre de mes rêves, alors qu'ils sont terrifiants. On devrait se souvenir, des choses qui nous font si peur, non ? Je trouve que ça rend ça encore plus angoissant, de ne pas savoir ce qui nous a tant effrayé." Joanne sentait qu'elle pouvait s'endormir lorsqu'il lui massait ainsi le cuir chevelu, elle adorait lorsqu'on lui faisait ça. Ses iris bleus regardaient la mousse qui flottait. Peu à peu, celle-ci commençait à s'amenuiser. Joanne eut un moment d'absence, absorbé par ses rêves éveillés qui l'angoissaient tant. Et elle redescendait sur terre, quelques instants plus tard, elle ne savait pas combien de temps. "Ca ne t'arrive jamais, toi ? Quand tu es malade, de faire ces rêves là ?" lui demanda-t-elle alors. "Si non, je dois être celle qui doit être la moins saine d'esprit de nous deux. Ce serait pas étonnant." ajouta-t-elle avec un sourire amusé, sachant très bien qu'ils n'étaient pas tous les deux mentalement stables.
Sea winds brought her to me A butterfly, mere one-day miracle of life And all the poetry in the world Finally makes sense to me
Il ne faut qu’un coup d’œil à Joanne pour deviner que mes techniques parentales me laissent moi-même perplexe. Je ris un peu, nerveusement. Il a toujours été évident que je serai de nous deux celui qui ne sait jamais dire non, qui gâte trop son petit. Qui ne sait absolument pas s’y prendre. « Disons que j’ai tellement couvert notre fils sous les peluches pour l’occuper qu’il a disparu dans la marée. » dis-je avec un air coupable. Il n’y a pas de raison pour que Joanne désapprouve, mais j’avoue avoir opté pour la facilité dans un moment il je devais agir rapidement pour m’occuper de chacun. Tant que Daniel peut s’occuper seul avec les jouets qui lui sont confiés, je peux prendre soin de sa mère et m’assurer que son état ne devienne pas inquiétant. L’eau tiède arrose ses mèches blondes. La jeune femme semble en profiter, les yeux fermés, le visage levé. Elle est un peu ailleurs, un peu confuse. Dans son cerveau qui bout, ses pensées macèrent. Des souvenirs qui remontent à la surface. Je ne me fais pas plus indiscret, ces souvenirs, ces cauchemars ne me regardent sûrement pas. « Ou peut-être que ton esprit t’en protège pour que tu puisses penser à autre chose pendant que tu es éveillée. » dis-je tout bas, mais Joanne ne paraît guère attentive, perdue dans ses songes. Un long silence s’installe pendant lequel seuls jet d’eau et le clapotis des gouttes qui rejoignent le bain résonnent dans la pièce. Je m’applique à soulager sn crâne, et à ne pas faire attention à la courbe son cou, son dos nu, la mousse qui glisse sur sa peau ici et là, la douceur de cet épiderme pâle, de ces cheveux blonds. Tout cela, je l’entrepose dans une boîte nommée « pensées inappropriées » et je l’enfouis dans un coin fort reculé de mon cerveau. « Je ne savais pas qu’il y avait une compétition. » dis-je avec un petit rire. J’ajouterais bien que je doute que ses cauchemars dus à la fièvre valent mon quotidien, mais comme je viens de le lui dire, à mes yeux il n’y a pas de compétition. « Qui est le plus fou » n’est pas le genre de jeu auquel j’aime jouer. Alors je me contente de répondre à la question ; « Je rêve rarement, malade ou non. Ou en tout cas, je ne m’en souviens jamais. La nuit est juste un long moment d’obscurité. Ca doit être pour ça que j’ai le sommeil si lourd. » Et ce n’est pas si mal, d’avoir un moment où tout mon être est déconnecté du monde. Pas de pensées, pas de ressentis, uniquement du repos. Je laisse les tracas, les crises, les tourments aux journées qu’ils rendent parfois difficiles. La nuit est mon moment de répit, sûrement le seul que j’ai, et j’espère que cela ne changera pas. « Allez, viens. » Il n’est pas non plus question de rester dans cette baignoire toute la journée. Je sécurise les efforts de Joanne pour se relever afin qu’elle ne glisse pas et ne la laisse qu’une seconde pour attraper la première serviette que je trouve sur le côté. Prenant soin de garder le regard bas, je couvre immédiatement la jeune femme et la sèche succinctement. Une fois débarrassée de la mousse restante, je la prends dans mes bras et la porte jusqu’à son lit. Elle frisonne un peu, je ne saurais dire si c’est de chaud ou de froid. Une fois assise sur le bord du matelas, je pose rapidement ma main sur son front. La température me paraît un peu moins inquiétante, mais qui sait combien de temps cela durera ? Pendant que Joanne reste emmitouflée dans la serviette et sèche petit à petit, après lui avoir déposé le verre d’eau dans une main afin qu’elle tente d’en prendre quelques gorgées, je me tourne vers son armoire pour trouver quelques vêtements propres et confortables à lui proposer. « Comment tu te sens maintenant ? Un peu mieux ? » je demande pendant que je fouille. Je dégaine un de ces gilets qu’elle adore pour traîner à la maison, un short molletonné, des sous-vêtements… et je tombe sur ce t-shirt que je reconnais à sa simple couleur. Beaucoup trop grand pour elle. Pour cause, il s’agit de l’un des miens. J’imagine qu’elle n’a même pas conscience qu’elle l’a encore entre ses affaires, mais cela me pince le cœur tout de même. Mes doigts attrapent le haut juste à côté, qui paraît faire l’affaire, puis je lui tends le tout. « Tiens. Je… » Les mots ne s’articulent pas, mais elle comprend que je vais la laisser se changer seule, et faire un tour par la chambre de Daniel pour m’assurer que tout va bien pour lui aussi.
Bien qu'elle était malade et pas en état de réfléchir, Joanne savait qu'il faisait de son mieux pour parvenir à s'occuper d'un enfant d'un an et de sa mère, bien trop malade pour pouvoir être laissée seule. Jamie était véritablement aux petits soins pour elle, à l'aider à prendre son bain, à lui masser délicatement ses cheveux blonds. Bien que la fièvre l'embrouillait, elle se rendait compte à quel point ce contact était agréable. Sa voix n'était qu'un écho pendant que ses yeux étaient fermés, mais le timbre lui était particulièrement agréable. Elle ne savait qu'en penser exactement, elle ne parvenait pas à réaliser qu'elle avait tort de se rappeler de telles choses sans prendre conscience qu'une fois revenue de sa maladie, elle devait les oublier. Ou peut-être qu'elle n'allait pas s'en souvenir, c'était aussi possible. Mais elle ne se posait pas la question pour le moment. Jamie confiait que lui ne rêvait pas. Quand il dormait, son corps ne faisait que se reposer, son esprit à la mettre en veilleuse pour quelques heures. Joanne aimerait bien pouvoir faire pareil, mais on n'avait jamais la main mise sur son inconscient, n'est-ce pas ? Elle avait toujours beaucoup rêvé - que ce soit durant son sommeil ou non, d'ailleurs. "J'aimerais avoir le même sommeil que toi, parfois. Ca doit être si reposant." dit-elle en soupirant. Elle n'avait jamais eu le sommeil bien lourd. On ne pouvait pas dire que les choses pouvaient s'améliorer depuis son divorce avec Hassan, loin de loin. Lorsqu'il était temps de sortir de la baignoire, Joanne n'était même pas en mesure de se soucier de sa pudeur. Elle ne faisait pas attention au regard bas de Jamie, qui faisait de son mieux pour respecter la timidité de la jeune femme. Désireux de s'occuper d'elle comme il le fallait, il l'avait emmitouflé dans un drap de bain et l'avait porté jusque dans sa chambre. Il lui avait remis le verre d'eau entre les mains afin qu'elle tente une nouvelle fois de s'hydrater, sachant qu'elle n'avait bu qu'une gorgée depuis la veille. Sa tête tournait de nouveau, elle était de nouveau prise de légers vertiges. Elle s'essayait tout de même à boire deux gorgées, mais c'était largement suffisant pour qu'elle ait de nouvelles nausées. Elle tendait le bras pour poser le verre sur sa table de chevet. "Un peu oui." reconnut-elle. A vrai dire, c'était surtout le massage capillaire qui lui avait plu dans cette histoire. Mais elle avait cet instant de clarté d'esprit de ne pas le lui dire bien que ça lui brûlait les lèvres - alors que c'était la fièvre qui les lui brûlait ? Jamie donnait les vêtements qu'il avait trouvé dans son armoire avant de s'absenter pour s'occuper de Daniel. L'eau du bain semblait être fraîche pour Joanne, mais l'air de la chambre lui semblait soudaine brûlant. Elle frissonnait malgré tout, et recommençait à transpirer. Elle soupira, énervée contre son propre système immunitaire. Ca épuisait son organisme et elle n'arrivait même plus à tenir assise. Elle lâchait les vêtements que le bel homme lui avait confié et elle s'allongea par-dessus la couverture. Il n'y avait finalement que la serviette qui la recouvrait, et encore. Mais elle avait tellement chaud. Et malgré cette température qui lui semblait insupportable, elle parvint à fermer les yeux, et à s'endormir. Son dos s'était découvert, ses jambes ne l'avaient jamais été. Encore ces rêves. Ca l'angoissait, mais il y avait des moments de sérénité. Des souvenirs, encore. Juste quelques images, des moments qui ne duraient que quelques secondes, ô combien agréables, qui s'alternaient avec ses mauvais rêves, donnant un pot pourri particulièrement déroutant. Ses cheveux étaient encore humides et mouillaient l'oreiller sur lesquels sa tête était posée. Elle entendant Jamie et Daniel discuter un peu au loin. C'était rassurant, d'entendre qu'il y avait de la vie dans cette maison. Ca aussi, ça lui rappelait des souvenirs. Une maison remplie, une vie de famille. A un moment donné, elle se demandait si ces derniers mois n'avaient été finalement qu'un rêve. Peut-être qu'il n'y avait jamais eu de rupture, jamais eu de rapprochement compliqué avec Hassan, que leur maison secondaire n'était pas vendue. Elle ne savait plus trop où elle en était, quelle date, où elle se trouvait. Joanne ne savait plus rien de tout ça. Quasiment dénuée, elle appréciait le courant d'air frais qui glissait le long de son échine et qui semblait la refroidir un peu alors qu'elle avait terriblement chaud. La fièvre n'avait certainement pas baissé tant que ça, mais elle sentait que son corps était épuisé, et elle avait bien besoin de dormir un peu, quitte à subir ces rêves qui ne faisaient que gagner en étrangeté, encore et encore.
Sea winds brought her to me A butterfly, mere one-day miracle of life And all the poetry in the world Finally makes sense to me
« C’est un nouveau jeu, c’est ça ? Daniel lance ses jouets et papa ramasse ? » A le voir s’esclaffer à chaque aller-retour que j’effectue entre une peluche et son lit, ou lorsqu’il rejette de plus belle un doudou que je viens de lui rendre, je dirais que oui, j’ai plutôt bien saisi les règles de ce jeu. L’ours, le lapin, le panda, le koala, tous retrouvent enfin leur place, et avant que le petit ait la bonne idée de recommencer une partie, je prends sa couverture et la pause au-dessus du parc. Daniel, intrigué par le soudain manque de lumière, lève la tête et comprend le piège ; avec ça au-dessus de la tête, il ne peut plus rien lancer hors du lit. Etrangement, il rit à nouveau. Le nouveau s’intitule « trouver tous les moyens possible de mettre les peluches dehors ». « Vas-y, essaye. » dis-je en m’asseyant par terre, le défiant du regard. C’est tout naturellement que le petit malin, bien entraîné par le cadeau d’anniversaire de sa mère, attrape le premier doudou et le glisse tout simplement entre deux barreaux, quitte à forcer un peu pour le faire passer. Et le voilà qui ricane. Le bonhomme pense même à utiliser les barreaux pour se dresser sur ses jambes, puisqu’il a de plus en plus d’équilibre, puis à tendre la main pour attraper la couverture et la faire tomber dans le parc. Ma seule victoire est qu’elle lui tombe dessus et que lui-même, étonné, atterrit sur les fesses. Sous le drap, on devine sa tête regarder à droite à gauche, se demander pourquoi il fait noir tout à coup, puis chercher la sortie. Un enfant est un spectacle à lui seul. Finalement, Daniel réclame d’être porté, un droit qu’il a gagné. Je le prends alors dans mes bras un moment et fait les cent pas dans sa chambre. « De quoi elle rêve ta maman, hm ? Tu sais toi ? » Non bien sûr, il n’en sait pas plus que moi. Même si Joanne lui en parlerait, il n’y comprendrait rien. Et il serait encore moins en mesure de me le rapporter. « Et toi tu te retrouves tout seul. Je sais que c’est pas drôle. » Mes pas nous mènent jusqu’à la porte de la chambre de Joanne. Il n’est pas question d’approcher Daniel et de risquer de le faire tomber malade également, uniquement de jeter un coup d’œil à l’intérieur pour savoir comment elle se porte, si elle s’est rallongée. Et c’est le cas. « Jo-… » Je me stoppe net dès que mon regard tombe sur la silhouette dénudée de la jeune femme. Si je ne devinais pas sa respiration, il serait facile de la croire morte. Elle ne réagit pas au son de la porte, ni à ma voix, même si celle-ci s’est effacée immédiatement. Elle dort. Mon cœur se serre, ma propre respiration s’est, elle, interrompue. Je ne saurais pas dire pendant combien de temps je l’observe, cela semble être à la fois une heure et une seconde. Ce sont les gigotements de Daniel qui me font revenir à moi. Papa est un voyeur. Je referme la porte, me demande ce qu’il vient juste de se passer. Un peu de rose teinte mes joues. Des pensées claires et cohérentes peinent à cheminer jusqu’à mon cerveau. Laisse-la se reposer. Va t’occuper de Daniel. Bonne idée. Je passe plusieurs fois au cours de la journée, jeter un coup d’œil dans la chambre pour savoir comment se porte Joanne. Je fais au mieux pour ne pas noter sa nudité, mais je n’ose pas entrer. Un véritable adolescent. Ainsi, je passe de nombreuses heures avec mon fils. Lorsqu’il s’amuse seul, j’emprunte un livre parmi ceux de sa mère pour m’occuper. Nous déjeunons en tête-à-tête, même si pour ma part je ne pioche pas grand-chose dans les placards et le frigo de Joanne. Je me contente surtout de litres de thé. La fin d’après-midi approche. Comme à chaque heure, je m’assure que la jeune femme se repose toujours. Mais cette fois, j’entre dans la chambre et m’approche d’elle. « Joanne… » je souffle en posant timidement une main sur son épaule afin de la tirer doucement de sa léthargie. « Tu dois te mettre quelque chose sur le dos, un médecin va arriver. » J’ai appelé il y a une heure, cela ne devrait pas tarder désormais. Lorsqu’il n’y a pas d’urgence, les délais peuvent parfois s’allonger, néanmoins j’anticipe. « Tu ne vas pas mieux. » je murmure pour justifier ma décision de faire appel à un docteur. Je pense qu’elle peut le constater elle-même. Après une journée de maladie, il est temps de savoir ce qu’il en est et de savoir comment la soulager.
CODE ☙ LOONYWALTZ
Dernière édition par Jamie Keynes le Mer 1 Mar 2017 - 19:42, édité 1 fois
Il y avait des moments où Joanne avait de nouveau froid. Mais elle se sentait incapable de solliciter le moindre muscle pour songer à se couvrir, elle n'arrivait même plus à ouvrir les yeux. Qu'importe. Elle restait immobile, la serviette la recouvrant succinctement. Elle avait perdu toute notion de temps et ne savait si c'était des secondes ou des heures qui s'écoulaient. Elle dormait, plus ou moins profondément, ça variait beaucoup, au fil des heures. Elle n'entendait pas toutes les fois où Jamie était passé. Tout comme elle n'avait pas senti lorsqu'il était là, à la regarder pour une durée difficile à déterminer. Par moment, elle avait l'impression que sa tête allait exploser, qu'il y avait une pression impressionnante qui engendrait des maux de tête. Parfois, ses rêves l'angoissaient tellement qu'elle en pleurait. Elle avait horreur d'être dans cet état là. Comme une larve, incapable de faire quoi que ce soit. C'était la main chaude de Jamie qui la sortait de son sommeil - si l'on pouvait pas appeler ça comme ça. Il avait fait appel à un médecin, ayant constaté qu'elle n'allait vraiment pas mieux, malgré quelques heures de repos. Elle ouvrait à peine les yeux et grimaça. Elle tentait de s'étirer un peu, ses muscles semblaient être atrophiés tant c'était douloureux. Jamie lui tendit les vêtements qu'il lui avait sorti plus tôt dans la journée. La tête dans le brouillard, elle réunit tout ce qui lui restait comme force pour faire un dernier effort et se redresser pour s'habiller. Elle était tellement ailleurs, dans son propre monde - mais ce monde là, elle n'en voulait -, qu'elle ne faisait absolument plus attention à sa nudité face à son ex. Elle avait l'allure d'un zombie. Elle enfila son haut, son gilet, et le short avant de s'allonger sous la couette. Et la voilà à nouveau particulièrement épuisée. Allongée sur le côté, elle pouvait deviner la silhouette de Jamie avec sa vision bien trouble. "Faites que ça ne dure pas longtemps. Je travaille que jeudi prochain, ça me laisse le temps, mais... Je peux pas me permettre d'être arrêtée, Jamie. Pas maintenant, je viens à peine de commencer, je peux pas passer à côté de ce poste." Voilà, une toute nouvelle source d'angoisse. Et ce n'était pas dénué de sens, bien que Joanne pouvait être dans une sorte de délire à force d'avoir tant de fièvre. Elle versait quelques larmes, entre ses appréhensions et la fatigue, elle ne parvenait pas à se contenir. "Daniel va bien ?" demanda-t-elle. Quelques minutes plus tard, on sonnait à la porte, le médecin était là. Ce n'était pas le Dr. Winters, mais un médecin de ville âgé d'une cinquantaine d'années. Il ausculta longuement la jeune femme puis se présenta à Jamie. "Miss Prescott a la grippe. C'est peu commun de l'attraper en cette saison, mais vu les changements climatiques, certains germes persistent et profitent de certains systèmes immunitaires. Il n'y a pas vraiment de traitement, si ce n'est les médicaments pour atténuer les symptômes : fièvre, nausées, la toux. Beaucoup de repos, elle doit penser à bien s'hydrater, mais elle me semble déjà bien affaiblie. Mais j'ai consulté son dossier médical et si son état ne semble pas s'améliorer dans les prochains jours, il faudra se demander s'il n'es pas nécessaire pour l'hospitaliser. Mais j'ai bon espoir qu'elle se rétablisse d'elle-même." Il tendit une ordonnance des divers traitements à prendre si besoin, ainsi que ses coordonnées s'il avait besoin d'être rappelé. Joanne quant à elle, somnolait à moitié. Elle commençait à avoir la bouche très sèche et c'était seulement cet inconfort qui la motivait de boire quelques gorgées d'eau, qu'importe l'était de son estomac par la suite. La petite blonde enlevait puis remettait sa couette, sa fièvre lui en faisait voir de toutes les couleurs, c'en était insupportable. Parfois, elle voulait se lever faire quelques pas, mais rien que cette idée lui donnait des vertiges. Elle mourrait d'envie de serrer Daniel dans ses bras, mais elle ne le pouvait pas. Elle finit par s'asseoir dans le lit, genoux pliés et sa tête posée dessus. Elle entendait Jamie revenir auprès d'elle. "Allongée, j'ai des nausées. Assise, j'ai mal partout, je tiens même pas debout." En somme, aucune position ne lui convenait, il n'y avait plus grand chose qui allait. "Merci d'être là." dit-elle avec un faible sourire. Elle peinait à discerner la réalité du rêve. "J'ai horreur d'être malade, de ne rien pouvoir faire. J'aimerais tant jouer avec Daniel, passer un moment avec..." Avec qui ? Avec lui ? Avec Hassan ? Avec quelqu'un d'autre ? Même elle ne savait plus. n'avait certainement pas baissé tant que ça, mais elle sentait que son corps était épuisé, et elle avait bien besoin de dormir un peu, quitte à subir ces rêves qui ne faisaient que gagner en étrangeté, encore et encore.
Sea winds brought her to me A butterfly, mere one-day miracle of life And all the poetry in the world Finally makes sense to me
C'est sans aucune gêne, sans même penser à l'éventualité de devoir être gênée d'ailleurs, que Joanne sort difficilement de son lit, nue comme un vers, et se saisit des vêtements pour se couvrir. Surpris, mon regard s'est immédiatement détourné, et mon visage tourné pour dissimuler mes joues enflammées. Cela ne fait plus partie de mes privilèges, la voir dans son plus simple appareil. Cela me rend même plus nerveux qu'elle, dont l'unique priorité est d'en finir vite et bien pour se rallonger. Il n’y a pas vraiment de raisons d'être aussi mal à l'aise, j'ai pu voir Joanne nue de nombreuses fois, je l'ai moi-même aidée à apprendre à s'apprécier dans sa tenue d’Eve. Et elle est malade, cela n’a définitivement rien d'attirant. Mais ses courbes restent celles que j'ai aimé. Son petit corps frêle est celui que j'ai adoré prendre dans mes bras et serrer contre moi. Sa peau est celle que j'ai parcouru du bout des lèvres des dizaines et des dizaines de fois. Dieu seul sait combien de baisers se sont imprégnés là, sur son cou, sa poitrine, son ventre, ou combien de fois j'ai longé ses jambes. Tout cela est hors de portée désormais. Mon regard ne peut plus se poser dessus. Mes pensées s'entassent dans un placard fermé à clé. Rallongée, planquée sous la couette, Joanne paraît toujours aussi mal en point. Cette léthargie la panique un peu. « Personne ne t'en voudra d'être malade. Ca arrive. L'important c'est la qualité du travail que tu fais quand tu es là. S'ils te pénalisent parce que tu n'as pas eu de chance, alors tu ne manqueras vraiment rien comme environnement de travail, et eux passeront à côté d'une personne qui a de la valeur. » Je sèche ses joues qu'elle mouille de quelques larmes, épuisée malgré les heures de sommeil qu'elle a réussi à s'octroyer. « Tu ne bois pas assez d'eau pour avoir le droit de pleurer, tu ne vas que te déshydrater encore plus. » j'ajoute avec un sourire. « Daniel va très bien. Je pensais qu'il ne se fatiguerait jamais, jusqu'à ce qu'il s'endorme d'un coup, échoué sur le canapé, étalé comme une étoile de mer. » Je lui montre la photo que j'ai prise du bonhomme dans toute sa splendeur. Avant de pouvoir en dire plus, on frappe à la porte d'entrée. Le médecin ne reste pas bien longtemps, à ses yeux il n’y a pas de mystère et le diagnostic est sans appel ; simple grippe qui devrait passer d'ici quelques jours, mais à surveiller dans le cas de la jeune femme connue pour sa santé fragile. L’hospitalisation n’est pas mise de côté, ce qui ne doit pas rassurer Joanne. “Je suis sûr que ça ne sera pas nécessaire.” dis-je calmement. Je récupère l'ordonnance longue comme le bras de médicaments visant à chacun soulager un symptôme. Lorsque je demande conseil au docteur concernant le sommeil agité de mon ex-fiancée, il ne me propose rien d'autre que des somnifères, ce qu'elle n’a jamais accepté de prendre. Pas la peine d'essayer. Voyant l’heure, je décide de m’absenter une dizaine de minutes, juste le temps de trouver une pharmacie en bas de la rue pour me procurer tout ce dont Joanne a besoin. La jeune femme n’a pas eu le temps de remarquer mon absence. Je reviens auprès d'elle ; assise, recroquevillée, la petite blonde cherche désespérément la position qui lui sera la plus confortable et lui offrira un court répis. « C'est normal. » je réponds à ses remerciements, haussant les épaules. Ce que je ne comprends pas c'est pourquoi Joanne a fait appel à moi et non pas à ses parents, mais j'imagine que si le choix s'est porté sur moi c'est qu'elle n’avait pas le choix. Et je ne peux pas vraiment me plaindre d'être une simple roue de secours pour moments désespérés et urgences de dernière minute. « Eh bien, la bonne nouvelle c'est que tu n'es pas mourante, alors dis-toi que tout ça attendra juste que tu te rétablisses. » Dans quelques jours, elle ira mieux et pourra jouer avec Daniel, les chiens, retourner au travail comme si de rien n'était. Elle dramatise bien trop. « Je suis allé à la pharmacie avant que ça ne ferme. Tout est là. » dis-je en déposant le sachet en plastique sur la table de chevet. L’ordonnance est à l'intérieur avec toutes les instructions. Le tout maintenant est que Joanne fasse un petit effort pour gober les cachets avec de l'eau quand cela est nécessaire. “Et je t’ai pris ceci.” j’ajoute avec un large sourire en dégainant le babyphone de Daniel que je pose également près d'elle. “Comme ça, votre Majesté, si vous avez besoin de quoi que ce soit pendant la courte sieste que je compte m'octroyer sur le canapé, il vous suffira de sonner et je serai là instantanément.” Je passe délicatement une main dans ses cheveux. Sa tête est toujours bien chaude, mais mon sourire se veut rassurant. Je frôle sa joue avec mon pouce pour effacer les dernières traces d'éventuelles larmes. Je l'aurais embrassée sur le front si je le pouvais.
Joanne n'avait pas la force de se soucier de ce que son ex pourrait penser en la voyant complètement nue, bien que ce n'était que le temps qu'elle enfile des vêtements propres. Certes, ça devait être un peu déroutant. Mais elle n'avait certainement pas trop changé depuis la dernière fois, si ce n'est cette extrême pâleur qui était en rapport avec son état actuel. Elle n'avait pas vu ses joues rougir, elle ne s'imaginait que lui pouvait se rappeler le nombre de fois où il avait pu effleurer ou toucher sa peau. Des courbes et une douceur qu'il connaissait pas coeur. Mais peut-être qu'il ne s'en souvenait plus vraiment, peut-être que parfois, l'espace d'un instant, il rêvait de l'effleurer encore une fois, juste pour se souvenir. La jeune femme s'en voulait beaucoup d'être malade, elle craignait de devoir se mettre en arrêt et de perdre son travail à cause de cette maladie. Jamie estimait que si on ne lui pardonnait pas de ne pas être en état de travailler, c'est que le musée n'était pas vraiment digne de l'avoir comme employée. Joanne était passionnée par son métier, ce qui la rendait encore plus efficace dans tout ce qu'elle entreprenait. De ses doigts, il séchait délicatement ses joues humides de larmes. Elle était rassurée d'entendre que son fils allait bien. Après tout, il restait prioritaire aux yeux de la jeune femme, qu'importe son propre état de santé. Jamie avait pris une photo de lui pendant sa sieste. "Il est adorable." souffla-t-elle tout bas en regardant d'un air tendre le cliché qu'il était en train de lui montrer. Suite à quoi, le médecin fit son apparition pour pouvoir poser un diagnostic. Jamie réapparut quelques temps plus tard, avec un sachet de médicaments qu'il déposa auprès d'elle. Encore une fois, elle le remerciait d'avoir pu venir s'occuper de Daniel - quoi qu'il la bichonnait bien plus elle que son fils pour le moment. Ca n'avait pas l'air de le gêner plus que ça. "Merci beaucoup." dit-elle lorsqu'il disait avoir fait un rapide détour vers la pharmacie pour prendre tout ce dont elle avait besoin. Et sans trop attendre, Joanne fouillait dans le petit sac pour trouver ce dont elle avait besoin pour baisser la fièvre, parce que c'était bien ça qui l'handicapait le plus pour le moment. Elle prit de gélules qu'elle but avec une grosse gorgée d'eau, avant de s'emmitoufler à nouveau dans sa couverture. Il avait pensé à ramener le babyphone afin qu'elle puisse pouvoir l'appeler en cas de besoin. Elle rit doucement en saisissant le petit objet dans sa main. "Votre Majesté ? Je suis montée en grade ?" lança-t-elle avec un rire amusé. La petite blonde fermait les yeux dès que Jamie faisait glisser ses doigts entre ses mèches de cheveux. Elle profitait même de ce contact, elle était très loin d'être contre. "Va te reposer." souffla-t-elle tout bas, en rouvrant les yeux quelques minutes plus tard afin de pouvoir le regarder. "Je pense pouvoir être capable de ne pas t'appeler le temps de ta sieste, qu'importe si elle est longue ou courte." lui dit-elle avec un vague sourire. "Ca devrait aller, je vais essayer de prendre d'autres médicaments un peu plus tard. Ca va le faire." Joanne ne voulait pas se permettre de prendre trop de temps à se rétablir. Jamie finit par partir, et elle s'endormit. Une heure plus tard, elle fut prise de vives bouffées de chaleur, ce qui en soi, n'était pas une mauvaise nouvelle. Elle évacuait en gros le trop plein de chaleur afin de pouvoir baisser la température du corps. C'était toute transpirante qu'elle se réveillait, et elle en profita pour avaler d'autres cachets - rien de tout ceci ne pouvait lui faire de mal. De plus, ça la faisait boire, même si ce n'était quelques gorgées à chaque fois. Elle s'était découverte et avait fini par s'assoupir. Joanne se réveillait quelques temps plus tard. Elle avait un peu d'appétit. Rien d'extraordinaire, mais elle avait bien envie d'avaler quelque chose de chaud. Un thé, une soupe, quelque chose comme ça. Joanne finit par se lever. Les vertiges étaient toujours bien présents, les courbatures aussi, mais elle voulait quand même descendre au rez-de-chaussée. Au salon, Daniel était déjà en pyjama, avec son père. "Coucou mon chéri." dit-elle à son fils, de là où elle était. Ca devait être particulièrement frustrant pour lui de ne pas comprendre pourquoi il ne pouvait pas approcher sa mère pour le moment. "Je vais juste me faire un peu de soupe, ou du thé, je sais pas. Quelque chose de chaud." expliqua-t-elle à Jamie, supposant qu'il n'approuverait pas qu'elle sorte déjà de son lit, alors que les signes de fatigue et de maladie étaient encore bien présents. Elle marchait encore un peu au radar jusqu'à la cuisine pour chercher dans ses placard et voir ce qu'elle avait. Une brique de soupe, n'importe quoi. Même si ce n'était que pour quelques gorgées.