≈ ≈ ≈
{ mad sounds in your ears,
they make you get up and dance }
kane ✰ andrina

C'est le septième gobelet de bière que je vide à cause de nos jeux de gamins. Avec les potes, on s'est un peu isolés du centre de la fête pour rester entre nous et puis, au milieu d'une discussion, quelqu'un a proposé un jeu d'alcool alors j'enchaîne verre sur verre. J'ai du mal à garder les yeux ouverts, je ris pour rien et à chaque éclat de rire, je me penche en avant sans pouvoir me contrôler. Pour l'instant, mes réflexes d'équilibre sont encore fonctionnels, m'évitant de m'écraser ventre par terre. Heureusement que je suis assise. L'esprit barbouillé, je nage dans le flou mais j'arrive à comprendre quand on s'adresse à moi. Seulement, il me faut quelques minutes pour percuter pourquoi les garçons se lèvent tous et que notre cercle se vide peu à peu, me laissant à jouer toute seule. Je repasse le fil de la conversation, capte les mots-clefs musique, meufs, danse, pécho. OK. Mes potes m'ont carrément abandonné là pour aller draguer des p'tites nénettes et si je n'étais pas autant dans le flou, j'aurai gueulé, sûrement... mais je les aurai laissé faire parce que je ne suis pas leur maman. J'ai le moral un peu un plat mais je prétends m'amuser pour oublier ma boule au ventre et je bois, sans raison, sans y réfléchir à deux fois quand je porte le verre à mes lèvres. Je me risque à me lever puis à faire quelques pas qui m'emmènent sur la piste de danse. Il n'y a aucune personne que je connais, enfin je crois, puisque j'ai bien du mal à distinguer tous les visages présents. J'aperçois juste quelques copains, en tête à tête avec des filles mignonnes comme des fleurs et ça me fait sourire dans mon coin. Au milieu de la foule, je ferme les yeux, portée par le rythme et la mélodie. Un sourire béat sur les lèvres, je ne suis plus assez sobre pour m'inquiéter si j'ai l'air ridicule ou non. Vient le pont après le refrain, un glissement de basse et je me sens voler. Je tournoie sur moi-même avec la facilité d'une toupie mais la légèreté d'un ouragan... C'était prévisible, je percute plusieurs personnes et je trébuche sur un objet non-identifié au sol. Sans paniquer, je ne cherche même pas à me rattraper à quelque chose, appréciant la sensation de chute et de vertige. Le plaisir est de courte durée parce que je me sens tomber contre une masse, un corps dont il émane une odeur divine. Je souris trop, cligne plusieurs fois des yeux pour distinguer le visage du sauveur.  « Appelez une ambulance, ramenez la civière, je crois que je viens de tomber... » Mes bras entourent le cou de l'ange blond qui m'a rattrapé, l'ange a quelque chose de familier mais je ne suis pas en état de réfléchir.  « ... amoureuse. » Je ne me rends pas compte de mes paroles et quelques secondes plus tard, j'ignore déjà ce qui me fait autant rire.

Ca fait une dizaine de minutes que Angelina est en train de parler enfants avec un collègue et sa femme. Je dois avouer que ce n’est pas mon sujet de prédilection. Je m’y connais un peu en gosse parce que j’ai des petits neveux et nièces mais je ne suis pas un expert. Par dessus tout, ce n’est pas vraiment un sujet qui m’intéresse. Je n’ai pas les mêmes soucis qu’eux à ce niveau là. Du coup je laisse mon esprit vagabonder et je regarde un peu les gens autour de moi dans la salle. Je remarque Nina sur la piste de danse. Je l’ai remarqué un peu plus tôt et je me suis dit qu’il fallait que j’aille lui dire bonjour à un moment dans la soirée. J’ai été pas mal pris et je n’ai pas encore eu le temps de le faire. La soirée est bien avancée à présent mais elle est toujours là. Je fais un sourire à mes compères et je leur fausse compagnie sans honte. Ca fait déjà un moment que je ne participe pas à la conversation. Une fois debout je réalise qu’il va falloir que j’aille sur la piste de danse pour aller à la rencontre de Nina car c’est là qu’elle se trouve. Je ne sais pas si je suis chaud pour danser en fait. Je crois que je me suis levé trop vite, j’aurai dû attendre un moment plus opportun. Je regarde autour de moi si je trouve un collègue pour discuter et pas rester debout à rien faire. Mon regard est rapidement attiré par Nina. Elle est toute souriante, je l’observe un moment et je ne me rends pas compte que je me suis rapproché. Je suis certainement le seul sur la piste de danse à ne pas danser. Je me dis que je peux aller l’interrompre et lui dire bonjour même si elle est en train de s’amuser. Ouais. Ca ne la dérangera pas. Enfin j’espère. Mais elle a l’air tellement bien lancée que je sens qu’elle ne va pas quitter la piste de si tôt et je vais louper encore ma chance de la saluer ce soir. Et ça je n’en ai pas envie. Je m’approche jusqu’à elle et je me retrouve au bon moment au bon endroit, parce qu’elle finit dans mes bras après avoir trébuché. Ca me fait sourire parce que j’aime beaucoup le contact et je me sens un peu comme un ninja de l’avoir rattrapé comme ça. Elle a l’air un peu à l’ouest, elle s’accroche à mon cou et je souris beaucoup plus quand elle dit être tombée amoureuse. Elle est tombée, ça c’est indéniable. Amoureuse, ça c’est une sacrée nouvelle. Surtout si c’est de moi dont elle parle. Je la redresse mais je reste tout proche d’elle, j’aime beaucoup cette proximité. Elle éclate de rire et ça me fait beaucoup rire de la voir comme ça.

« Amoureuse, carrément ? »

Mais ça me plaît. Clairement ça me plaît.

« Moi je venais juste te dire bonsoir, je ne m’attendais pas à ce que tu tombes amoureuse. »

Parce que oui je sous entends que c’est de moi qu’elle est tombée amoureuse. Je fais peut être fausse route. Je vois à son air qu’elle a dû bien boire ce soir. Ce qui n’est pas mon cas, j’ai préféré resté maître de la situation.

« J’allais te proposer de prendre un verre avec moi mais peut être que ce n’est pas une bonne idée. Ou bien un verre d’eau pétillante peut être. »

Je n’ai pas envie de rester sur la piste de danse en fait. Je ne suis pas le plus à l'aise dans mon pantalon de costume foncé et ma chemise noire. Je porte ce genre de fringues qu'en cas d'occasions spéciales. Oui en fait ce n'est qu'une excuse, même en jeans je n'aurai pas eu envie de danser.

Trop de chance. Ma bonne fortune me fait rater une occasion de rejeter l'alcool à tout jamais parce qu'il m'aurait donné la honte de ma vie. Mieux que de ne pas embrasser le sol avec toute l'élégance d'une pomme de terre, je tombe dans de beaux bras. Ça fait naître un sourire béat sur mon visage et je n'ai plus aucun filtre, en témoignent les premières paroles à l'intention de mon sauveur. Je me remets sur pied et toujours aussi guillerette, je n'arrête pas de rire... sans raison. L'alcool me rend différente, c'est certain, moins hautaine, plus abordable, peut-être même carrément plus adorable parce que mon preux chevalier me dit lui-même, il venait pour me voir moi. « Me dire 'bonsoir' ? Mais on est la nuit! »  Je pouffe. J'ai l'esprit trop embrumé pour m'apercevoir que je dis des bêtises et que je suis plus gênante que drôle. Mais moi, je me trouvais hilarante ce soir et mes blagues vaseuses n'avaient pas l'air de vouloir faire fuir... Kane. J'ai un élan de lucidité quand je relève la tête vers lui et que je le reconnais enfin. Un rire nerveux m'echappe. « Je ne t'avais pas reconnu, Kane. » Je me sens toute bête devant son regard amusé mais toujours plein de bienveillance. Les secondes s'étirent, c'est plaisant d'être là, accrochée à son cou. Tous deux immobiles alors  que la foule s'agite autour de nous, je ne réagis même pas quand on me bouscule mais cela a le mérite de me faire revenir sur Terre, à temps pour écouter sa proposition. Il n'y a rien de drôle mais je trouve encore le moyen de glousser. « Niveau hydratation, je suis OK, chef. Tout ce que je veux, c'est danser !   » Sans demander, je prends sa main quand je me détache de lui et je passe son bras au-dessus de ma tête pour me faire tournoyer toute seule. J'ai le même air niaisement joyeux que les acteurs d'high school musical. Je prierai bien pour ne pas être filmée... Même si mon image en prend un coup, si je m'en fichais royalement, à cet instant. Je reviens me coller contre lui pour lui souffler à l'oreille : « Tu sais que j'aurais l'air beaucoup moins ridicule si tu - mon index rebondit contre sa poitrine - dansais avec moi ?   »

Elle a l’air outré que je veuille lui dire bonsoir à une heure si avancé et ça me fait sourire. Elle est clairement très alcoolisé et elle est très drôle comme ça. Une partie de moi se demande quand même comment elle compte rentrer chez elle. J’espère qu’elle est accompagné parce que sinon ça risque d’être compliqué. Oui je m’inquiète un peu. Quelques instants d’après elle avoue ne pas m’avoir reconnu tout de suite et j’ouvre grand la bouche, je fais celui qui est choqué.

« Je pourrais me vexer ! »

Mais je suis très amusé par la situation et ça se voit sur mon visage. Je ne lui en veux pas le moins du monde, je fais juste l’acteur pour essayer de me faire plaindre. J’ai un bras toujours autour d’elle et je ne compte pas me détacher tant qu’elle ne le fait pas. Moi je suis bien comme ça. Je lui propose un verre et elle me répond en m’appelant chef. Ca me fait rire. Elle veut danser. Ca me fait moins rire. Je fais une petite moue comme pour l’amadouer.

« Danser ? T’es sûre ? »

Elle se décolle de moi, prend ma main et fait un tour sur elle même. Je la regarde faire. Si c’est ça danser ça me va. Je n’ai rien à faire. Je ne fais pas plus de remarque à propos de la danse et elle vient se remettre contre moi. Je repasse un bras autour d’elle naturellement et je la regarde tout près. Elle insiste pour que je danse avec elle et je refais ma petite moue.

« J’ai pas assez bu pour danser. »

Mais je ne refuse pas pour autant.

« Juste pour une chanson alors. »

Je commence à bouger un peu mon corps mais je me sens vraiment pas à l’aise. En plus je n’aime pas spécialement la chanson qui passe, même si je la connais. C’est déjà ça au moins. Je déteste danser sur des chansons que j’ai jamais entendu. Alors que je « danse » je garde un bras autour d’elle afin de garder cette proximité. Je la quitte pas des yeux et je me concentre sur elle plutôt que sur mes pas de danses. Oui c’est vraiment pas extra ordinaire comment je bouge, je fais le strict minimum. La chanson se termine et j’arrête de danser.

« T’as pas envie d’aller prendre l’air ? »

Tout pour partir de cette piste de danse.

Quand il rit, je ris à sa suite et ça me fait du bien. Je flirte plus ou moins volontairement avec lui et mon comportement influencé par l'alcool suffit à installer de la familiarité entre nous. J'ai laissé tomber mes manières habituelles, ce soir, je suis juste Andrina, sautillant en rythme, me donnant en spectacle sans vergogne devant Kane, je m'amuse comme une petite folle. Lui aussi se prend au jeu, je ris de son air outré. Mes deux paumes se posent sur ses joues et je prends un air chagriné. « Moh... fais pas la tête. Je te suis reconnaissante de m'avoir sauvée ! » je lui lance, toute sourire. Il arrête de faire la tête mais ce n'est pas pour autant qu'il a l'air très enthousiaste quand j'insiste pour danser. Je n'ai pas conscience de tous mes sens mais une chose est certaine, j'aime la façon dont il me garde auprès du lui. C'est peut-être pour que je gigote moins qu'il enveloppe mon corps de son bras mais peu importe, ça me déplaît pas du tout d'être là. Je suis contente qu'il cède et ma gratitude me retient de me moquer de lui, enfin, surtout de sa façon de danser. Moi-même, je ne danse pas vraiment, j'ai plutôt l'air d'être montée sur un ressort mais comme j'ai l'air de m'éclater, ça passe. Je bouge ma tête, secoue mes cheveux dans tous les sens en riant, des que le rythme ralentit ou que je désire reprendre mon souffle, mon attention revient sur lui. À petite dose seulement, j'ose le fixer. C'est dur de soutenir son regard parce qu'il est bien trop adorable et que je me connais, aussi alcoolisée, il suffisait d'un coup de tête pour que je finisse par lui sauter dessus. Le temps de cette chanson passe trop vite à mon goût mais comme il a fait un petit effort pour moi, je suis prête à le suivre. J'acquiesce d'un mouvement de tête, prête à me laisser guider. J'ai juste à suivre ses pas quand il se fraye un chemin à travers la foule pour sortir de la grande salle, je n'ai pas à jouer des coudes et cela m'évitera une chute. Je récupère juste mon manteau que j'avais laissé accroché à une rambarde avant de souffler un grand coup, puis d'inspirer à plein poumons l'air hivernal et sa fraîcheur nocturne. Je m'adosse contre un arbre, je lui souris. « C'était cool ! » Je reprends faiblement mes esprits, je me pense capable de pouvoir lui faire la conversation. « Mais je suis déçue de toi Kane, tu aurais pu mettre l'uniforme... pour mieux le faire tomber. Comme ça ! » Pour illustrer mes paroles, je prends les deux pans de mon manteau et écarte grand mes bras, style exhibitionniste. Mes propres pitreries me font rire. « On marche un peu, chef ? »

Je ne tiens pas ma moue bien longtemps quand elle vient poser ses mains sur mes joues. Je ne m’y attendais pas. Je souris quand elle dit être reconnaissante de mon sauvetage. Je ne le dirai pas mais c’était vraiment de la chance pour le coup. Je me dis qu’il faudrait que je joue au loto parce que j’ai l’air d’être en veine ce soir.

Je me sens vraiment con en train de « danser » mais la regarder s’amuser aide à faire passer le moment. Elle s’amuse clairement. Je me demande si elle aime la musique qui passe ou si elle arrive à danser sur tout. Oui ça m’intrigue ce genre de chose, j’y pense de temps en temps. J’y pense maintenant.

Je crierai presque un petit « YES » quand elle accepte de quitter la piste de danse. Mission accomplie ! Je prends sa main pour sortir de la piste de danse. Histoire de ne pas se perdre. Oui toutes les excuses sont bonnes pour rester en contact avec elle. L’air est bien frais, j’ai juste une chemise et une veste de costume sur moi, ça ira, je ne suis pas du genre frileux. Je la regarde se poser contre un arbre et je reste planté en face d’elle. Ma main maintenant lâchée. Je souris quand elle dit que c’était cool.

« Tu as pu voir mes exploits en danse. »

Je me moque de moi bien évidemment. Elle est trop gentille pour oser se moquer ouvertement et j’apprécie. Elle parle de mon uniforme et c’est vrai que je me suis posé la question s’il fallait que je vienne en tenue, mais comme la fête ne se fait pas dans notre caserne, ça n’était pas de mise. Elle me fait rire avec ses pitreries mais j’en ai bien profiter pour regarder son corps, même s’il est tout vêtu. Je n’ai pas le temps de dire quoi que ce soit parce que je suis trop captivée par elle. Elle reprend la parole et propose de marcher, je fais oui de la tête et je commence à marcher à ses côtés.

« Alors comme ça tu veux me voir faire tomber mon uniforme ? »

Je lui jette un coup d’oeil avec un sourire amusé. Oui je reviens sur le sujet parce que ça m’a bien plut. J’ai bien envie de savoir le fond de sa pensée, parce que ça m’intéresse.

« Tu dois dire ça juste parce que t’as trop bu… A moins que ce soit la raison première de ta venue ici ce soir ? »

Je me fais les questions et les réponses tout seul, je le vis bien. C’est pas rare que les filles se pointent au bal des pompiers juste pour draguer des soldats du feu.

Je ne suis pas consciente de tout ce que je fais ou dis, mais rire à gorge déployée et mouvoir mon corps au rythme de la musique me font oublier que je ne contrôle plus rien. Je me laisse guider ce soir, par mon instinct, par la musique, par la foule, puis par Kane, maintenant. À ma grande surprise, j'arrive à mettre un pied devant l'autre avec assurance mais je suis certaine que j'aurai moins fait la maline sans cette main, celle de mon guide. On aurait pu penser que je me serai calmée, une fois dehors mais j'ai passé le point de non retour pour ce soir, je suis toujours aussi déchainée. Il fait preuve d'auto-dérision, c'est amusant. « Je te donnerai des cours, si tu veux. Je connais un très bon professeur. » je lui fais, en pointant un index sur moi. Dans ma tête, si les pompiers réorganisent un bal, Kane ferait peut-être partie du show après mes leçons. Je me voyais déjà toute fière devant les minettes qui baveraient que c'est moi qui lui ai tout appris et qui l'ait aidé à révéler son côté... enflammé. Je pouffe toute seule devant les images que m'envoie mon imagination, marcher m'aidera à arrêter de fantasmer sur place. Je souris quand il revient sur mes paroles. Espiègle, je ne réponds rien et me contente d'un haussement d'épaules qu'il ne verra sûrement pas. Sa suggestion me fait rire, ç'aurait pu mais comme on n'était pas restés en contact depuis la conférence à l'université, j'ignorais qu'il serait là ce soir. Cependant, je joue volontiers avec lui. D'un pas vers droite, je m'accole contre lui et laisse mon bras replié sur son épaule. Je lui souffle à l'oreille. « You'll never know... » Je le fixe, une petite lueur amusée dans le regard pendant que je joue les mystérieuse. Je laisse échapper un petit rire léger avant de revenir à ses côtés. « Avez-vous beaucoup été courtisé, ce soir, M. le pompier ? » Kane a le droit à mes surnoms nuls, nuls mais affectueux. « Ou vous êtes venu avec une demoiselle chère à votre cœur ? »

Des cours de danse par elle, je dirai pas non. Faudrait peut être que je me calme, elle n’a que 20 ans d’après mes calculs. Enfin c’est toujours mieux que 16 ans comme à l’époque. Il y a toujours un truc qui me plaît chez cette fille et avec le temps ça ne s’en est pas allé. 20 ans c’est correct. Elle est une femme. Une adulte. Oui j’essaie de me convaincre.

« Pourquoi pas. »

Oui c’est trop tentant d’avoir une autre raison de la voir après ce soir. Enfin je suis sûr que ce ne sont que des paroles en l’air sous le coup de l’excitation et de l’abus d’alcool, mais je le tente quand même. Elle reste vague quant à son bon vouloir de faire tomber mon uniforme. J’insiste en disant que c’est pour ça qu’elle est venue et elle se rapproche de moi, me susurrant quelques mots à l’oreille. Naturellement je passe un bras autour de sa taille comme pour la maintenir. Oui en fait c’est juste pour la toucher. J’avoue tout. Elle ne répond pas à ma question et ça me fait sourire. Elle m’amuse avec son petit jeu. Elle se détache et j’enlève ma main de sa taille. Je ris à sa question.

« Je suis venu avec Angelina. Du coup les filles ont dû me penser pris. »

Je me retiens de dire que Angie est une bombe, laissant presque aucune chance aux autres.

« Et du coup j’ai pas été courtisé non. »

Je fais une petite moue, oui j’ai envie qu’on me plaigne. Je reprends la parole avec un air normal sur le visage.

« Alors que je dois être un des rares pompiers encore sur le marché. En tout cas dans ma caserne. »

C’est vrai qu’il n’y a pas que nous ce soir, mais moi je parle de ce que je connais.

« J’ai beaucoup de collègues qui sont mariés avec des gosses. Je suis encore bien loin de tout ça. D’ailleurs j’ai faussé compagnie à Angie parce qu’ils arrêtaient pas de parler gosses. Je suis pas du tout dans le sujet. »

Je suis aveuglée par mes émotions, ce soir, l'alcool a grillé les derniers quotas de neurones disponibles pour aujourd'hui alors je me laisse aller. Je ris, je minaude, j'initie les contacts avec Kane qui est parfaitement réceptif. « J'aime bien quand tu fais ça. » laissais-je échapper, en riant. Je fais référence à son bras qui entoure ma taille quand je me colle à lui et il ne le fait que pour m'empêcher de tomber, sûrement, mais j'ai plus de filtre. Et ça me fait encore plus rire, pas gênée du tout par cet aveu. Par contre, je ne sais pas pourquoi, mon cerveau fait un truc bizarre (je le sens dans ma tête) quand il m'annonce l'identité de sa cavalière. C'est peut-être parce que je n'ai jamais connu que la Angelina post-Abel donc je ne sais pas comment il a fait pour sortir Angie de sa tanière mais ça tient du miracle. « En même temps, qui pourrait rivaliser avec Angelina ? » lâchai-je, amusée. Normal que cela fasse fuir les autres filles. Bon, cela ne m'avait pas arrêté quelques années plus tôt, quand je voulais lui mettre le grappin dessus en pensant qu'il sortait avec Angelina, cet épisode témoignant à quel point j'étais prétentieuse. Encore adolescente, je pensais sérieusement pour concurrencer la Gilmore girl. J'allais demander si la nature de leurs relations avait changé mais il poursuit et j'ai la réponse à ma question. Je l'écoute, avec toute l'attention donc je suis capable ce soir, avant de rire quand il évoque le mode maman de la brunette. « Je te plains sur ce coup-là, je sais à quel point elle peut être passionnée quand on la lance sur Abel. » Parole de sœur adoptive. Je prends la main de Kane pour le stopper et le fixe, une lueur de malice dans le regard. « Comme tu as été un peu délaissé, ce soir, on pourrait se mettre à la recherche d'une jolie fille maintenant ! Quelles sont celles qui attirent ton regard ? » Mon idée semble beaucoup moins enthousiasmante au fur et à mesure que j'attends sa réponse, bien sûr que tout le monde rêve de la fille parfaite, belle et gentille... mais elles doivent toutes être dans un état semblable au mien, ce serait un désastre, je me dis. Heureusement, j'ai de la suite dans les idées. « En fait non, laisse tomber les filles, Kane. Elles ne t'amèneront que des problèmes. Mais je suis sûre que tu le savais déjà. » Je ris puis je lui fais un grand sourire, une joie enfantine illumine mon visage. Je passe mon bras autour de ses épaules, comme si on était de bons copains, toute contente, avant de reprendre la marche. « Tu ne fréquentes vraiment personne en ce-moment ? »

Je resserre mon bras autour d’elle quand elle dit apprécier ce geste. Je n’ai pas envie de me détacher. Je lui avoue que je suis venu avec Angelina. J’ose espérer que ça ne la dérangera pas, il n’y a pas de raison. Angie et moi nous ne sommes que des amis. Elle le sait très bien. Je ne sais pas par contre si elle est au courant de l’historique qu’il y a entre Angie et moi. Car oui on a été plus que des amis, mais pas vraiment au fond. Ce n’était que physique entre nous. Des potes qui couchaient ensemble. Ca remonte à bien longtemps tout ça. Ca n’a plus d’importance. Elle est du même avis que moi en ce qui concerne la bombe Gilmore. Personne ne peut rivaliser avec elle. En tout cas à mon humble avis et celui de Nina. Cette dernière se met à rire quand je parle de la conversation de gosse que j’ai fuis sans honte. Ca me fait sourire de la voir comme ça. Elle compatit parce qu’elle connait le ressenti. Je me sens moins seul. Je ne fais cependant pas de commentaire sur le sujet, je n’ai pas envie de parler gosse. Ce que Nina rajoute ensuite me surprend, elle veut qu’on cherche une jeune fille pour moi. Elle demande quelles sont celles qui attirent mon regard et je soutiens son regard. Je ne sais pas si je suis assez clair, sûrement pas, mais je ne trouve pas de truc intelligent à dire sur le moment. J’ai peur d’être trop direct et je ne sais pas si c’est une bonne chose. Je réfléchis bien trop et je n’ai pas le temps de dire quelque chose qu’elle reprend la parole, revenant sur ce qu’elle a dit. Je souris quand elle parle de filles et de problèmes.

« C’est pas forcément synonyme de problèmes… »

Avec ma première petite amie c’était plutôt très simple. On était jeune aussi, on avait pas les mêmes soucis que maintenant. Je n’ai pas eu de relation assez sérieuse ces dernières années pour pouvoir affirmer que ce n’est que des problèmes. Nina me demande confirmation si je suis célibataire et j’hoche la tête, passant naturellement mon bras autour de sa taille pour suivre son geste.

« Personne. C’est si difficile à croire ? »

Ca me fait un peu rire. Je viens juste, il y a quelques jours, de laisser tomber l’idée Wendy. Mais je ne vais pas lui donner tous ces détails. Elle ne sait même pas qui est Wendy.

« Et toi ? »

Voilà une question qui est bien. Ca va m’avancer dans mes réflexions cette information. Bien que je la trouve bien trop tactile pour qu’elle n’ait rien de particulier en tête. Une confirmation de la situation c’est toujours bien. Je jette un coup d’oeil vers l’intérieur, mais on n’y voit pas grand chose de là où on est. J’espère que Angelina est toujours en grande conversation avec mes collègues. Je n’ai pas envie de la délaisser. Faudrait peut être que je coupe court à ce moment avec Nina, mais je n’en ai pas envie.

« T’es venue avec des amis ? »

Pour savoir si elle compte rentrer seule dans son état. Ce serait pas raisonnable.

« Je peux te raccompagner si jamais… »

Bon ce sera du covoiturage avec Angelina mais c’est quand même une gentille proposition si elle a besoin.

Je ne sais pas ce que Kane est, pour moi. Je ne le connais pas vraiment, nous ne sommes pas amis, même pas bons copains, je ne sais rien de lui. Mais il y a toujours eu de l'alchimie entre nous, une complicité plus qu'amicale, vu notre façon de chercher le contact de l'autre... ou bien c'est juste ma solitude qui me laisse penser ça. Il est beau, encore plus que d'habitude dans son costume, je le complimenterai, si cela ne me laissait pas aussi confuse. En tout cas, lui n'a pas l'air de me reprocher les paroles et les actes insensés dûs à l'alcool qui se mêle dans mes veines et qui a atteint mon cerveau. C'est lui qui me souffle de jouer les Cupidon à une heure aussi avancée de la nuit pour aussitôt se raviser. Je n'ai pas envie qu'il se détourne de moi, je voulais garder son attention et c'est ce qui nous fait marcher en se prenant les épaules. Je regarde mes pieds, avec mes bottines à talons, j'ai la hauteur idéale pour suivre son pas, la tête dans le creux de son épaule. La tête me tourne moins mais c'est toujours brumeux là-haut, je ne contrôle rien, je me laisse aller mais je devrais peut-être pas. Je sais que j'ai de drôles d'impulsion qui me prennent et qui me font faire des choses que je regrette mille fois après. Comme maintenant. Il suffit qu'il m'annonce qu'il est célibataire pour que ça fasse des étincelles dans ma tête, ça tourne pas rond dans ma caboche. Je ne relève même pas qu'il m'a retourné la question. C'est comme si je me voyais de l'extérieur l'arrêter, glousser comme une dinde avant de lancer, toujours espiègle : « Si t'es célibataire, personne ne m'en voudra si je fais ça ? » Toujours comme si je regardai un film, je me vois prendre les deux pans de sa veste et le tirer contre moi – un miracle qu'aucun des deux ne se soit cassé le nez – et mes lèvres trouvent les siennes. Je souris contre sa bouche. La douceur de mon baiser doit trancher avec cette démonstration d'autorité. Malgré tout, cela ne doit pas être aussi agréable pour lui que pour moi car cela ne dure pas bien longtemps et quand je suis loin de lui, je suis toute perdue. Je crois qu'il m'a repoussé ou c'est moi qui ai un élan de lucidité et qui réalise ce que je viens de faire. Je me pince les lèvres, incapable de dire quoi que ce soit. J'ai rendu le moment gênant avec mes bêtises de gamine ivre et je suis incapable de réfléchir pour trouver une solution. Il brise le silence, de la pire façon qu'il soit, je percute son sous-entendus. Je baisse la tête moins par honte que pour essayer de fixer mon attention sur autre chose que son visage. Le bout de mes chaussures, c'est bien ça. « Avec mes copains d'université. » marmonnai-je, faiblement. « Ça ira... » Je ne retiens pas mon envie de m'isoler pour tenter de regrouper mes idées, je m'exécute de la façon la plus enfantine qu'il soit. Je plie mes genoux et m'accroupis, les bras entourant les jambes, tête rentrée, je suis comme une boule aux pieds de Kane. Je m'en fiche s'il trouve ça bizarre, j'avais besoin de réfléchir. J'avais besoin d'oublier, aussi, que j'avais encore envie de l'embrasser.

Quand je lui avoue être célibataire sa réaction se fait pas attendre. Elle me prend par le col et elle pose ses lèvres sur les miennes, pas très tendrement. Cependant le baiser, bien que bref, se trouve être très doux et j’apprécie énormément. Je suis content de voir qu’elle a l’air d’avoir de la suite dans les idées, un peu comme moi. Seulement il faut que je me souvienne qu’elle est très alcoolisé et que ça risque d’être une autre histoire une fois sobre. Enfin, on est souvent plus honnête avec soit même quand on est ivre, donc ça doit être plutôt bon signe pour moi ça. J’avais pas imaginé un baiser si bref pour un premier baiser avec Nina. Ok, ce n’est techniquement pas le premier baiser car nous deux ça remonte à plusieurs années. Je l’avais raccompagné chez elle après notre premier rendez vous et tel un cliché, je l’ai embrassé devant chez elle.

Je la regarde une fois le baiser rompu et je me promets d’essayer de l’embrasser de nouveau ce soir. C’est pas trop gagné vu qu’il faudrait que je retourne voir Angelina. Je sens que cette promesse silencieuse que je me suis faite va tomber à l’eau. Elle a l’air un peu gêné après le moment et je repasse mon bras correctement autour d’elle, histoire de lui faire comprendre que je n’ai pas été dérangé par son geste. Un léger silence s’installe et je le brise presque aussitôt. Elle me répond qu’elle est venue avec des potes. C’est déjà ça, elle n’est pas seule. Elle n’a pas l’air très branché pour que je la raccompagne. Je ne m’en offusque pas.

Elle a le visage baissé et je n’aime pas la voir comme ça. Je m’arrête de marcher.

« Hey… »

Je lui relève le menton et je la serre un peu plus contre moi avant d’aller poser de nouveau mes lèvres sur les siennes. Doucement. Voilà comment j’imaginais notre baiser. Je suis content d’avoir eu cette fenêtre pour l’embrasser comme il se doit. Enfin, presque. Parce que je ne cherche pas à l’embêter avec ma langue non. Je reste sur un baiser chaste parce que je trouve que ça se prête à la situation. Je me détache et je la regarde.

« Fais pas la tête. »

J’entends siffler de manière approbatrice et je suis sûr qu’il s’agit d’un collègue qui m’a vu embrasser Nina. Je jette un rapide coup d’oeil et je vois effectivement un visage familier. Il me fait un thumbs up. Je souris de manière très amusé, fermant les yeux brièvement, pris en flag. Je vais en entendre parler de ça à notre prochaine garde. Je reporte mon attention sur Nina. Je cherche quoi dire pour la faire sourire, mais j’ai que des phrases de merde qui me viennent en tête. Je vais poser ma main sur sa joue et je la caresse de mon pouce. Je suis prêt à remettre ça et goûter à ses lèvres une fois de plus.

J’affiche une moue. Je ne suis que déception d’être forcée de me détacher de lui alors qu’il n’y a pas de sensation plus douce que d’être serrée contre son corps à ce moment. Je l’ai brusqué (oui ? non ? peut-être ?). Je m’empêche de trop réfléchir, ça me donne le vertige ce soir, d’essayer d’aligner deux pensées cohérentes. Une partie de mes doutes s’effacent, je m’apaise quand je sens de nouveau son bras autour de moi, je me sens presque moins coupable d’avoir commis une agression sexuelle, là. Ivre, elle se transforme en dangereuse prédatrice et embrasse tout ce qui bouge pourraient titrer les journaux, ils auront beau commenter, ils ne sauront jamais de quel mal je suis atteinte ; je souffre d’être seule. Je veux quelqu’un. Et ce soir, il y a Kane. Son parfum me fait tourner la tête, je m’enflamme à son contact et mon cerveau embrumé a fait tomber mes barrières. Sur nous planait aussi une certaine familiarité, on s’était déjà enlacés et embrassé, il y avait toujours le « et si ? » sur notre histoire. Si je n’avais pas été aussi jeune, qu’est-ce que ç’aurait donné, nous deux, quatre ans avant ? Ça m’aurait fait évoluer d’une façon bien différente, c’est certain. Je réfléchis, tête baissée, à tout ça. Je ne respecte même pas mes engagements parce que mon cerveau tourne à plein régime en ce moment-même, sans garantie d’efficacité. Je me stoppe en même temps que lui, il me rappelle à la réalité même si croiser ses yeux me tentent déjà à aller vers d’autres rêveries. Je ne me suis pas rendue compte que j’avais cessé de respirer. Mauvaise idée mais je ne savais pas qu’il viendrait à moi. Ses lèvres capturent les miennes et je ne contrôle plus rien, je gémis. L’alcool me rend vulnérable, je me sens toute fragile dans ses bras et s’il ne me tenait pas si fort, si près de lui, je suis certaine que je fondrais et que je coulerais par terre. Mes mains, glacées, sont attirées par la chaleur de son corps et se posent sur sa taille, je serre ma prise entre mes doigts. J’apprends à aimer sa douceur, timidement intense, c’est bon, ça me fait sourire de plaisir et même si je manque d’air, en aucun cas, je ne veux rompre ce contact et je le laisse se détacher. A nouveau, heureusement qu’il me tient, j’ai les jambes toutes tremblantes. Son injonction me fait sourire, encore plus quand il se fait surprendre par un collègue et qu’il a l’air adorablement gêné. « Tu as fait des progrès, Kane. » fis-je, en rigolant. Les paupières papillonnent, ma voix rauque veut le charmer. Nous ne jouons pas tout à fait au même jeu, je crois, vu son pouce qui effleure ma peau et ses yeux qui interrogent les miens. Mes bras passent autour de son cou, je tangue un peu. « Tu penseras à effacer les marques de rouge à lèvres que j’ai laissé sur toi quand tu retourneras auprès d’Angelina. » Mes yeux fixent sa bouche où j’ai laissé de jolies traces rosées, d’un air malicieux. « Mais on n’est pas obligés de le faire tout de suite si tu comptes encore m’embrasser. » Mes dents scintillent quand je souris et d’un air faussement innocent, je passe ma langue sur mes lèvres, sans le quitter des yeux.

J’ai fait des progrès ? En baiser ? En drague ? Je ne suis pas sûr de la suivre sur le coup mais je ne demande pas d’explications parce que je vais passer pour un con. Surtout qu’elle dit ça en se marrant, alors je la laisse rigoler, surtout qu’elle est bien plus jolie comme ça. Au moins ça aura eu le mérite de changer son humeur même si à mes dépends. Elle me fait sourire à battre des cils de la sorte. Elle est trop cette fille. Je crois que je ne suis pas au bout de mes surprises avec elle. Je resserre mon bras autour d’elle et je ne la quitte pas du regard. Mon autre main sur sa joue.

J’ouvre grand les yeux quand elle dit que j’ai du rouge à lèvre sur moi. What. Du coup je porte à ma bouche la main qui était sur sa joue. La phrase qu’elle ajoute fait revenir le sourire que j’avais sur le visage. Je ne tente plus de m’enlever le rouge des lèvres parce qu’effectivement j’ai bien envie de remettre ça. Surtout après avoir eu une confirmation de sa part qu’elle apprécie tout autant que moi ce genre de moments.

« Je vais attendre un petit peu alors ouais… »

Oui un petit peu parce qu’il faut pas que j’oublie de retourner voir Angelina à un moment. Je me conforte dans l’idée qu’elle n’est pas seule car elle parlait avec pas mal de collègues quand je l’ai quitté. Mes collègues ne la laisseront pas seule, ils sont pas comme ça. Pas comme moi. Mais j’ai une bonne excuse. J’embrasse Nina. Oui, je retourne poser mes lèvres sur les siennes et cette fois j’approfondis le baiser, glissant ma langue contre la sienne. Je reste doux, je prends le temps, rien ne presse. Je caresse tendrement sa joue de mon pouce en même temps, gardant bien mon autre bras autour de sa taille pour l’avoir au plus près de moi. J’entends la chanson qui passe pour les gens qui sont sur la piste de danse. On est loin mais comme c’est calme dans notre coin on reconnait bien. Il s’agit de « Let me love you » de Ne-Yo (clique). J’aime beaucoup cette chanson et je trouve que ça apporte quelque chose de plus au baiser qu’on est en train d’échanger. Je ne suis pas déjà chaud pour lui dire « let me love you » mais j’aime bien l’idée général. Je n’ai jamais vraiment écouté les paroles de cette chanson, je connais que le refrain, mais y’a un bon rythme et une jolie mélodie. Une chose est sûr je me souviendrais de cette chanson comme celle de notre premier baiser. Ok premier baiser de 2017. Après un long moment je me détache pour respirer et la regarder. Je reste tout proche, mon nez touchant le sien, je lui fais un sourire parce que je suis bien content de la tournure de la soirée.

« J’ai vraiment beaucoup de rouge à lèvre ? Comment ça se fait t’as un truc cheap c’est ça ? »

Parce que les rouges à lèvres que je vois dans les pubs sont tous super résistant et laissent pas de traces. Je ne sais pas si ça reflète la réalité parce que ça fait un bon moment que j’ai pas embrassé une fille avec du maquillage comme ça.

« Je devrais retourner voir Angelina mais j’ai pas envie… »

Je me mords la lèvre en la regardant. Je veux rester avec elle.

Pourquoi se torturer l’esprit alors que je suis parfaitement à ma place dans ses bras ? Toutes mes pensées se sont envolées dès qu’il s’est emparé de mes lèvres. Le reste importait peu à cet instant même. Je ne regrettai plus d’avoir initié la danse, même si j’aurai pu être moins brutale, il venait de me donner la plus délicieuse des corrections. J’ai beau avoir besoin de reprendre mon souffle, je ne manque pas une occasion de le taquiner. Je ne sais pas si c’est un réflexe ou si c’est parce qu’il est bien trop adorable mais ça reste mécanique, dès qu’il sourit, je fais de même presque dans le dixième de seconde qui suit. Oh, et oui, il est aussi marrant à regarder avec des traces de rouge à lèvres comme celles que je viens de laisser. Sa réaction me fait éclater de rire. Quatre ans plus tôt, je n’aurai pas osé ce genre de suggestion et j’aurai même rougi devant un Kane qui ne cachait pas ses intentions, j’avais gagné en assurance, expérience oblige, et j’avais des envies moins innocentes. Les paupières closes, je savoure encore une fois, de ne plus sentir que nos deux bouches et ses mains contre ma peau. Ses lèvres enflammées réagissaient avec l’alcool dans mes veines, mon désir pour lui et tout mon corps s’était transformé en un brasier. Un grand feu de joie dont les flammes dansaient au rythme des battements de mon cœur, eux-mêmes soumis aux lois de la musique qui parvient inconsciemment à mes oreilles. Je rends son baiser, nos langues se mêlent, passionnément coordonnées, je combats mon envie de prendre le dessus. Je respecte la douceur initiale qu’il a imposée mais c’est plus fort que moi, il faut que je m’exprime, je suis plus pressante, avide de son contact, insatiable dans mon envie de lui. Quand on se sépare, j’ouvre les yeux et mon regard pétille encore, espiègle, joyeux, plein de désir. Heureusement, il est si proche et il fait assez sombre pour qu’il ne prenne pas peur quand je le regarde comme si j’allais le dévorer sur place. Il a l’air vraiment embêté par ce transfert coloré et je souris, amusée de son malheur. « Qu’est-ce qu’il y a de mal à vouloir marquer son territoire ? » je souffle, entre nous, à voix basse, une moue enjôleuse. Je pouffe doucement mais il souligne évidemment un problème, c’était un rouge à lèvres nouvellement acquis et mon expérience de ce soir me montre qu’il n’est pas kiss-proof. Je penche la tête sur le côté, pour mieux observer son visage, pour voir l’ampleur du carnage et il profite de ce moment pour lâcher son aveu. « Awn… » répondis-je, d’un ton mielleux. « Tu es adorable. » Je passe affectueusement ma main dans ses cheveux, toute sourire. C’est bien trop vrai quand il se mord la lèvre de cette façon. « Qui t’as dit que j’allais te laisser partir, ce soir ? » l’interrogeai-je, de plus en plus joueuse. Mes yeux se détachent des siens glissent sur lui en même temps que mes mains cheminent de son cou jusqu’au milieu de son torse, à plat sur sa chemise, elles sentent le relief de sa musculature. Un sourire appréciateur s'imprime sur mon visage malgré moi, j’ai déjà commencé à imaginer d’autres choses. Je ne sais pas pourquoi, au même-moment le visage d’Angelina s’affiche dans ma tête et directement, j’ai poussé faiblement Kane en arrière pour augmenter la distance entre nous. Une autre phase de lucidité, je m’entends dire : « Tu devrais y aller, elle va s’inquiéter. »