Ça faisait à peu près une heure qu'Alexander admirait la façade du Northlight Theater Company depuis un banc situé sur la rue d'en face. Smartphone dans les mains, il avait entamé une partie d'un jeu au hasard dans sa liste d'application et n'avait pas avancé des masses depuis qu'il était arrivé là. Il se donner de la contenance sinon il attirerait l'attention à épier la porte. Il avait fait la même chose hier. Ainsi qu'avant hier. Plusieurs fois. Voilà déjà trois jours qu'il venait passer une heure sur ce banc. Plusieurs fois. D'abord tôt le matin, ensuite à la pause déjeuner et ainsi qu'en fin de soirée. Il n'avait pas vraiment un faciès inquiétant bien qu'il redoutait de se faire repérer tel un rôdeur qui préparait un mauvais coup alors il s'occupait toujours à moitié. Il n'avait qu'une hâte, apercevoir Clément, son demi-frère. Alexander craignait ce moment autant qu'il s'en languissait. Vingt-trois ans, c'est assez long à rattraper et, bien qu'il ait fait appelle à un détective privé pour en savoir le plus possible sur celui qui considérait déjà comme son petit frère, il ne savait pas vraiment ce que lui savait à ce sujet. Peut-être avait-il passé toute sa vie à maudire sa famille biologique de l'avoir abandonné? Après tout, lui avait bien réussi à retrouver sa trace en à peu près un an alors pourquoi pas lui en vingt-trois longues années? Bon, réalisme appliqué, en déduisant les années d'enfances et d'adolescence, il avait disposé d'au moins quatre ou cinq ans pour mettre en place des recherches. Alexander se disait que Clément les avait peut-être faites mais avait décidé d'en rester là parce que lui et ses parents ne lui convenaient pas? Qu'ils n'étaient absolument pas ce qu'il avait imaginé, lui faisait abandonner l'envie de les connaître. L'hypothèse que Clément ignore tout des King étaient aussi possible, après tout certains adoptés ne connaissait pas la vérité quant à leur origine. Dans ce cas-là, c'était le destin qui l'avait subtilement guidé à Brisbane, près des siens parce que c'était écrit? Alexander avait ce petit côté naïvement sentimental malgré ses vingt-huit ans, ce qui le poussait à attendre que Clément arrive ou sorte du théâtre afin qu'ils puissent se croiser, peut-être même se voir ou mieux se reconnaître. Dans un des nombreux scénarii que l'aîné avait imaginé, une alchimie les connectés immédiatement et leur faisaient instantanément comprendre leur lien fraternel avant qu'ils ne tombent dans les bras pendant une longue étreinte. Visiblement, ce n'était toujours pas pour aujourd'hui. Il se releva en soupirant douloureusement, bravant une énième déception. Même si feindre une rencontre spontanée n'était pas la manière qu'il aurait souhaitée, il ne se voyait pas non plus le prendre de front en scandant je suis ton frère car s'il le faisait, il se sentirait obligé d'imiter la voie de Darth Vader, tu parles d'une première impression. Et là, alors qu'il ne s'y attendait plus il le vu enfin. Bouche bée et le cœur fébrile, il ne put retenir un immense sourire. C'était la première fois qu'il le voyait en chaire et en os après s'être contenté de photos pendant des mois, remerciant l'existence des réseaux sociaux tout public pour l'occasion, ce qui lui permit de plus ou moins reconnaître celle qui devait être sa meilleure Carol. Il se sentait pousser des ailes et décida de traverser les quelques mètres qui le séparaient de son petit frère, n'ayant que l'obstacle de la circulation à braver. Un œil sur les voitures, l'autre sur Clément, Alexander avait l'impression que c'était le moment pour lui d'entrer en scène, la coïncidence faisait que lui et Carol se disaient au revoir, parfaite fenêtre pour lui par laquelle il comptait bien s’immiscer. Il n'était plus qu'à quelques mètres quand il se mit à trembler. Qu'est-ce qu'il allait bien pouvoir lui dire? Il avait passé en revue des centaines de façon de l'aborder néanmoins plus aucune ne semblait adéquate le faisant ralentir tandis que Clément amorçait son départ. Le voir de dos s'éloigner de lui le frappa droit au cœur tant c'était l'histoire qui se répétait. Pas cette fois. Alexander accéléra le pas pour rattraper Clément pour finalement poser sa main sur son épaule. "Hey Clément!" Ça lui été venu spontanément, comme ça, d'un air enjoué avant de se souvenir qu'il n'était que deux inconnus finalement. Il se racla la gorge devant le regard médusé du jeune homme. "Clément Winchester, je présume?" Sa voix s'était faite plus rauque, plus sérieuse, peut-être pas plus rassurante pour son interlocuteur. "Je m'appelle Alex..." A ce moment-là, il aurait voulu tout lui raconter, mais mort de trouille à l'idée que celui-ci le rejette, il se raviva. "... Xander. Je travaille pour GM Holden Limited company, le constructeur automobile." Techniquement, il n'y travaillait plus mais ça lui était venu comme un automatisme. Sa longue pause pendant sa présentation pouvait laisser à penser qu'il s’appelait Alex Xander, quelque part, il espérait que Clément fasse la méprise. Il n'avait pas l'air de connaître son visage, mais peut-être connaissait-il le nom des King? Trop de questions, pas assez de temps, une migraine qui s'installait déjà mais qui ne gâcherait pas ce qui était l'un des moments les plus importants de la vie d'Alexander.
Cette longue discussion avec Andreï il y a une semaine, avait porté ses fruits. Le soir même de la représentation, Clément se sentait bien plus à l'aise qu'il ne l'était pendant les répétitions. Il avait d'ailleurs eu un sms de Mary King, lui disant qu'elle avait adoré la pièce mais qu'elle n'avait pas pu rester plus longtemps. Une histoire de mari et de fils qui l'attendaient à la maison, ou quelque chose dans ce genre. Dans tous les cas, c'est, le cœur et l'esprit plus léger, que Clément semble appréhender son quotidien depuis trois jours. Bien plus concentré en cours, très attentif pendant les répétitions, assidue pendant la danse, il a l'impression d'enfin trouver un bon équilibre entre ses passions, le but de sa vie et les cours.
Aujourd'hui n'est pas coutume, il est au théâtre. Et quel n'est pas sa surprise lorsqu'il voit Carol arrivé au plein milieu de la répétition. Tout d'abord mal à l'aise, la plupart des comédiens n'acceptant pas le public avant la représentation, Charles a fini par accepter qu'elle reste dans la salle tant qu'elle soit silencieuse et n'interrompt pas inutilement le cours. Et au final, elle a participé activement, un regard extérieur étant bénéfique à tout le monde. Elle a profité pour se foutre un peu de la gueule de Clément qui a prit le tout à la légère, rigolant même, preuve irréfutable qu'il est bien plus détendu que la semaine passée. Et comme il ne sait pas comment ce sentiment va évoluer, s'il va rester longtemps aussi heureux ou si c'est le répit avant une longue descente aux enfers, Clément préfères en profiter.
Il est 19h lorsqu'il sort du théâtre, rigolant de bon cœur avec Carol, essayant de la convaincre de rester un peu avec lui pour boire un coup. Elle ne veut pas, elle doit s'occuper de son frère qu'elle lui dit. Un peu déçu il lui dit au revoir en bonne et due forme puis sort son portable et commence à pianoter sur le clavier, bien décidé de demander à Ambroise de le rejoindre au Mctavish. Mais, alors qu'il ralentissait un peu le pas tout en écrivant, une voix s'élève derrière lui, l'interpellant bien clairement. Levant la tête de son portable, Clément lance un coup d’œil en arrière puis s'immobilise lorsque son regard se pose sur un parfait inconnu. Qui, pourtant semble bien le connaître. Ou du moins connaît-il son prénom et son nom de famille ce qui est déjà beaucoup. Avec, toutefois, un charmant sourire, il se présente comme étant un certain Alex Xander, travaillant pour GM holden Limited company, un truc de voiture.
«Je ...ouais ? » réagit enfin Clément après plusieurs secondes de silence «Et ...en quoi je suis concerné, moi ? » l'interroge-t-il, inclinant la tête sur le côté « Vous devez faire erreur, je crois » reprend-t-il en abaissant son portable «Je veux dire ...je n'ai pas de voiture, je suis même très loin d'avoir mon permis donc ...qu'est-ce que vous voulez, en vrai ? » le ton de Clément n'est aucunement agressif. Il est juste fortement intrigué, se demandant sincèrement ce que cet inconnu peut bien lui vouloir.
C'était incroyable pour Alexander d'être enfin face à Clément, lui avait attendu cet instant impatiemment dès qu'il avait appris son existence. C'était un peu un rêve d'enfant qui se réalisait tant il aurait voulu avoir un petit frère pendant son enfance. Même s'il était adulte aujourd'hui, c'est un souhait qui lui tenait toujours à cœur. Bien qu'il aurait préféré quelque chose de plus officiel et beaucoup plus emprunt de tendresse pour leur rencontre, il était quand même heureux de le rencontrer enfin. Il avait ce sourire poli qu'il ne cherchait même pas à dissimuler, contrairement à ses réelles intentions ainsi qu'à son identité et ça, ça lui brisait le cœur. Il ne pouvait décemment pas lui parler de tout ça en pleine rue mais il fallait bien qu'il parle. Il n'était qu'un étranger pour Clément, qui ne comprenait pas ce qu'il lui voulait, si le lien avec son travail. Réfléchissant à toute vitesse, il l'idée lui vient d'essayer de lui vendre une voiture, avant de réaliser que ça n'expliquerait pas le fait qu'il connaisse son identité. Bien que les démarcheurs avaient les dents longues et ne reculaient devant rien, de là à se renseigner à ce point sur un potentiel client c'était quand même plutôt étrange. "Je... J'ai entendu dire que vous aviez été sensationnel sur scène." Ça lui faisait tout drôle de le vouvoyer mais étant donné que Clément avait commencé de la même façon, autant se calquer dessus. Il n'avait pas assisté à la représentation, à son grand regret. Il avait longtemps hésité pourtant, toutefois il ne s'en était pas senti la force, l'idée de le voir pour de vrai pour la toute première fois se devait être accompagné d'une véritable rencontre à ses yeux. De toute façon, il pourrait toujours se rattraper par la suite. Il avait hâte de pouvoir l'applaudir et l'acclamer à la fin d'une représentation, déjà convaincue que ce serait un triomphe. Maintenant qu'ils étaient face à face, il ne savait cependant pas trop quoi faire ni quoi dire. Alors il improvisait. "On est à la recherche d'un nouveau visage pour notre prochaine campagne de publicité..." Il repensait à son ancienne boite et c'était ce qui lui était revenu en tête en cherchant comment associer tout ça à Clément. Il avait aussi besoin d'un prétexte pour discuter avec lui, il aurait du mal à se faire passer pour un fan sans même l'avoir vu jouer, il se serait trahi rapidement tant il aurait été incapable de parler de la pièce ou du jeu de Clément sur les planches... Quoi qu'au final, il s'engouffrait aussi dans de sales draps à commencer à raconter n'importe quoi au jeune homme. "La compagnie de Théâtre de Brisbane semblait être un bon endroit où chercher." Alexander ne savait pas vraiment comment ce genre de chose marchait, si on proposait ce genre de boulot comme ça à quelqu'un ni même quel poste il fallait occuper pour gérer ce genre de négociation ou d'affaires. Alors il restait quand même un peu vague dans ses propos, histoire de ne pas trop avoir l'impression de mentir.
Cet Alex travail pour une boîte qui recherche une nouvelle tête pour leur nouvelle campagne de publicité. C'est … intriguant. A vrai dire dans un premier temps, le visage de Clément s'illumine, d'avantage encore lorsque cet homme lui annonce qu'il a entendu qu'il est « sensationnel sur scène » -ça booste son égo, qu'on soit d'accord. Faire une campagne de pub peut être pas mal pour lui, pour se faire connaître un peu au grand publique. Et même si ce n'est pas le genre de Clément, que tourner devant une caméra ne l'intéresse pas des masse, ça ne peut qu'être une expérience enrichissante, cela va de soit. Toutefois, il est là le problème : il n'a jamais eu pour vocation d'être acteur. Lui, tout ce qu'il veut, c'est être comédien de théâtre et comédie musicale. Et il y a une très grosse différence entre le cinéma, les pubs et le théâtre. Aussi, il trouve ça bizarre que ce soit Alex qui vienne le voir. Il dit qu'il travail pour cette compagnie et non qu'il était régisseur ou s'occupait du casting.
Le sourire de Clément se fige graduellement alors qu'il incline la tête sur le côté «Je vois ... » dit-il en se redressant un peu, épaulant son sac à dos «Je ...hum ...je dois vous avouer que je suis bien plus intéressé par le théâtre. En fait, passé devant la caméra et être filmer ne m'intéresse pas des masses » avoue-t-il en haussant les épaules « Je veux dire, ça peut être une bonne expérience, je n'en doute pas, mais ...non je ne me vois pas faire ça. Du moins pas dans l'immédiat en faite» il s'approche d'Alex, réaffichant son sourire «Par contre si vous avez une carte de visite ou je ne sais quoi, je peux donner vos coordonnés à Charles Anderson, notre metteur en scène ? » il hausse les épaules « il est du milieu théâtre comme cinéma et a sans doute pas mal de contacts qui pourraient être intéressé par votre campagne» ça peut valoir le coup d'essayer, non ?
En voyant le sourire de Clément, il avait reconnu la fossette de sa mère. Enfin, de leur mère. Alexander décortiquait le visage de son frère, comme s'il s'efforçait à en apprendre chaque millimètre le plus vite possible, des fois que ce soit la dernière fois qu'ils se voyaient. Lui avait les yeux noisette à l'inverse de ses yeux si clairs mais ils avaient la même proéminence de l'arcade sourcilière qui leur arrivaient juste au-dessus de la paupière en la cachant un peu. Alexander ne savait pas si l'air de ressemblance était réel ou s'il espérait tellement en voir un qu'il l'imaginait très fort comme pour leur menton hexagonal qui semblait similaire. En tout cas, dès que le sourire de Clément s'effaça, celui d'Alexander manqua de faire de même, mais en apprenant à découvrir son frère, un demi-sourire résistait sur ses lèvres. Ainsi, il faisait du théâtre par passion et non dans la seule hypothèse de gloire et célébrité. De plus, il y avait une certaine maturité dans ses propos qui l'impressionnait en se rappelant que Clément n'avait que vingt-trois ans. "Ah je ne vous laisserais pas dire non avant d'avoir tout fait pour vous convaincre." Son sourire redevenu intégral sans être trop expressif non plus ou sans lui donnait l'air idiot, du moins il l'espérait. Hors de question d'en rester là aussi vite, il fallait bien qu'il le retienne un peu plus. Il lui fallait réfléchir vite, surtout quand ce dernier lui demanda sa carte de visite. Même s'il en avait encore estampillé de l'entreprise Holden, il aurait du mal à rayer son nom complet discrètement. Réflexe de malaise, il passa sa main dans ses cheveux depuis le sommet de son crâne jusqu'à sa nuque avant de positionner son autre main sur sa hanche. Sa nervosité était freinée par l'admiration qu'il développait pour Clément, en plein démonstration d'altruisme prêt à faire profiter de l'opportunité à d'autres. "Vous êtes vraiment très sympathique. Pensez aux autres plutôt qu'à soit c'est tout bonnement stupéfiant!" Alexander était ravi de voir qu'il était en face d'un si gentil garçon, lui qui avait quelque peu appréhender qu'il soit tout l'inverse. C'est qu'il n'avait envisagé pas de scénarii. Sauf ceux où il mentait et devait se sortir de là. "Vous avez exactement le profil de ce qu'on cherche à véhiculer. Je ne doute pas que vos collègues soient doués et très gentils, mais mon instinct me dit que c'est vous que je cherche." A la fin de sa phrase, envahi par l'émotion, il manqua de s'étrangler en ayant du mal à déglutir et masqua tout ça en toussant en ramenant son poing devant sa bouche. Une fois tout revenu à la normale, il hocha la tête avant de croiser ses bras devant sa poitrine, histoire de contenir ses mains qui s'étaient mis à trembler quelques secondes plutôt, quand il dit que c'était lui qu'il cherchait... C'était tellement ça.
Une tête de mule. Voilà comment Clément qualifie rapidement cet Alex. Un vrai commercial qui ne lâche pas l'affaire et qui trouvera toujours des arguments pour nous baratiner. Ça commence par quelques compliments, puis des offres qui semblent alléchantes dans un premier temps et on fini par vendre son âme au diable parce qu'on a n'a pas lu les conditions écrites en petits.. Le jeune comédien a bien conscience que pour progresser il faut prendre des risques, mais il n'a pas envie de risquer sa carrière -qui n'a pas encore commencée- avec un petit faux pas. S'il accepte cette offre et qu'il signe un contrat, Clément s'engage dans un chemin qui peut être aussi dangereux que bénéfique.
Franchement, plus Alex parle et plus Clément est tenté d'accepter. Mais il fait taire cette voix qui lui hurle de prendre des risques, car il a bien plus à perdre qu'à réellement gagner. Il ne doit absolument pas sauter à pied joint dans cette offre. Sa décision doit être mûrement réfléchie. Alex le recouvre encore une fois de compliments qui sonnent de plus en plus faux aux oreilles de Clément. Il ne sait plus vraiment où se mettre à vrai dire. Le regard fuyant, il se passe une main dans les cheveux puis sur la nuque, hésite puis soupire doucement
«Ecoutez, je ... » il se tait lorsque son regard sur pose sur la terrasse d'un café. Avec un léger sourire, le jeune homme se tourne vers Alex et désigne ledit café du pouce « Je propose qu'on se pose là et qu'on en parle un peu plus en détail ? Parce que là, concrètement, je ne peux vraiment pas vous donner de réponse comme ça, à pied levé ...» avoue-t-il.
Alex ne met pas très longtemps avant d'accepter sa proposition et, ensemble, ils se dirigent vers la terrasse. Clément pose son sac à côté de lui et s'installe sur la chaise. Il commande une bière à la serveuse puis check rapidement son portable, se rendant compte que le message qu'il comptait envoyer à Ambroise ne s'est envoyé qu'à moitié engendrant quelques questionnement de la part de son meilleur ami. Mais c'est surtout en lisant le deuxième message que son cœur rate un battement. Un message de Mary, qui souhaite savoir si elle peut l'appeler aujourd'hui. Déglutissant légèrement, il verrouille son portable, se promettant de lui répondre plus tard, puis relève son regard sur Alex en laissant glisser le téléphone dans sa poche. «Désolé, ma mère » dit-il en roulant légèrement les yeux, sur un ton las, comme si elle avait l'habitude de l'emmerder, réussissant parfaitement à cacher son malaise grâce à ses talents de comédiens. «Efin bref» il se redresse et gratifie la serveuse d'un sourire lorsqu'elle revient avec leur commandes puis repose son attention sur le jeune homme « Je peux voir votre carte professionnelle ?» demande-t-il en se penchant légèrement vers l'avant « Histoire d'être sûr que je ne suis pas entrain de me faire embobiner quoi» reprend-t-il avec un léger rire.
Ça ne lui plaît pas forcément de jouer un rôle face à son petit frère et n'a qu'une hâte, qu'ils soient tous les deux suffisamment proches pour pouvoir rire de cette rencontre qu'Alex à provoqué, où il pourrait probablement amuser Clément encore plus en se charriant lui-même pour ce qu'il qualifierait d'improvisation théâtrale dans le futur. Tellement pressé et excité à l'idée de nouer des liens avec Clément qu'Alex n'y voit même pas le mal qu'il pourrait causer. Il n'a nullement l'impression de mentir alors que ça s'y apparente fortement. Ses intentions ne sont pas mauvaises, il ne se focalise que sur le potentiel résultat et sur le fait qu'il partage son premier moment avec celui qu'il attendait de rencontrer depuis des mois. Il n'en reste pas moins déçu face à la réticence de ce dernier, même s'il comprend bien sa réaction étant donné les circonstances qui le dépeigne comme un représentant qui ne voit en lui que l'image de sa marque. Alex, lui serait tombé dans le panneau extrêmement flatté et aurait probablement déjà signer, mais ça lui faisait plaisir de voir que son frère était plus réfléchit qu'il ne l'était. Beaucoup plus réfléchit puisqu'il voulait parler de tout ça plus en détails. Alex hoche la tête, mais intérieurement, il commençait un peu à paniquer, ne sachant absolument pas comment approfondir le sac de nœuds dans lequel il s'était lui-même empêtré. Il affiche cependant un authentique sourire à Clément en acceptant d'aller au café d'en face. Mais bien volontiers! Je suis encore plus performant avec une tasse de café ! Ils traversent la route et s'installent en terrasse. Alex, à fond dans son rôle commande un café long alors qu'il a horreur de ça, mais trouve que ça fait très adulte et très professionnel de boire du café donc il se donne à fond. Clément choisit une bière. Alex ferme les yeux une fraction de seconde et jure intérieurement en se disant qu'il aurait pu en prendre une lui aussi, déçu d'avoir annoncé son choix en premier. Restant optimiste, il se focalise en se disant que le côté décontracté de l'endroit leur permettrait d'être moins formel et peut-être même de sympathiser. Il se frotta les mains d'impatience et d'excitation, en disant que ça pouvait être interprété pour l'impatience de leurs boissons. Il avait envie de lui poser tout un tas de questions, sans savoir ce qu'il était en droit de poser étant donné sa qualité de... Il ne savait même pas trop quoi en fait, mais garder en tête qu'il bossait toujours pour Holden et recrutait un acteur pour une campagne de pub. Heureusement, le temps de sa réflexion était compensé par le fait que Clément soit focalisé sur son téléphone. Sa mère apparemment. Alex eu un petit sourire gêné, se redemandant s'il était au courant de son adoption. Elle doit être très fière de votre performance scénique et du succès de la pièce, j'imagine ? Ça lui faisait de la peine de savoir qu'une autre l'avait élevé même s'il espérait de tout cœur que sa mère adoptive soit quelqu'un de formidable qui se soit bien occupé de lui. Il avait également tout un tas de questions à son sujet, mais c'était tout aussi délicat à mettre sur le tapis sans être suspect... Tout aussi suspect qu'il ne saurait tardé à être quand Clément lui demanda sa carte de visite. Il se frotta les mains sur son jean en essayant de gagner du temps. Bien sûr, bien sûr. J'en fais toujours imprimer des tonnes, j'en donne tellement que j'en fais sans cesse réimprimer. Il avait été tenté de prétendre ne pas en avoir, mais changea d'avis quand Clément utilisa le mot embobiner. Alors qu'il réfléchissait à toute vitesse, il porta finalement sa tasse de café à sa bouche pour en avaler une gorgée avant de subitement la recracher sur le trottoir. Putain c'est chaud ! Et dégueulasse. Il détestait vraiment le café. Avec du lait ça pouvait passer. Les dérivés du café, ils les toléraient comme le cappuccino, mais rien à faire, le café le dégoûter. En un éclair, il se dit qu'au moins ça venait de lui faire gagner quelques instants. Pourtant, le regard de Clément le fit presque paniquer. Il était septique, peut-être qu'il avait mis sa réaction sur le compte de la panique ? Alex se devait donc de lui sortir une carte... Il se racla la gorge et fit mine de s’épousseter, jusqu'au moment fatidique où il passa la main dans la veste intérieure de sa veste avant de changer de côté, comme s'il ne se rappelait pas de quel côté il avait rangé son portefeuille. Il était persuadé d'avoir encore des cartes de visite du temps pas si lointain où il bossait chez Holden. Effectivement, il en sortit plusieurs modèles et les examina tour à tour. Toutes sans exceptions portées son nom. Logique en quelques sortes. Une lui donna une idée. "Et voilàààààà ma carte !" La typographie pouvait peut-être jouer en sa faveur. Son prénom, son nom et le nom de sa boite étaient surperposées, chaque mention sur une ligne séparé. La calligraphie était en majuscule et chaque lettre était espacée les unes des autres. "Alex Xander, le « King » de chez Holden. Parce que je suis vraiment le roi dans mon domaine." Se vanta Alex en se pointant lui-même des pouces, se donnant une consistance un peu narcissique qui pourrait coller à son histoire. "L'imprimeur à oublier un X, mais il faut y voir une métaphore, des comme moi il n'y a pas deux !" Il s'enfoncer de plus en plus, mais il tentait le tout pour le tout en priant le ciel que pour ça marche.
Jamais de la vie Clément n'aurait imaginer qu'un jour, à la sortie du théâtre, il serait possiblement interpellé par un responsable de castin, scénariste, réalisateur ou peu importe ce qu'il peut être. En fait, tout ça lui semble tellement irréaliste qu'il a vraiment du mal à croire cet Alex Xander, qui prétend être celui qu'il est. Mais, lui laissant le bénéfice du doute, il décide d'abord d'aller boire un coup avec lui histoire d'échanger un peu, dès fois qu'il serait quand même sincère. Ainsi donc, désigne une terrasse non loin du théâtre où ils s'installe. Tandis qu'Alex commande un café, Clément demande une bière et lance un coup d’œil à son portable. S'excusant de ces quelques secondes asociale, il prétend que c'est un message de sa mère, ce à quoi Alex répond qu'elle doit sans doute être très fière de ses performances de jeune comédien. «Comme tout ce qui touche son fils hein » dit-il avec un haussement d'épaule «Enfin, ça fait longtemps qu'elle n'est plus venue me voir. Elle est trop occupé avec son nouveau copain et ... » il se tait et secoue la tête «bref laisse tomber » dit-il en secouant la tête.
Il se redresse vivement et arque un sourcil lorsqu'Alex recrache la gorgé de son café sur le trottoir « WOAh ! Woah hey ça va ?» demande-t-il, plus sous la surprise qu'autre chose. Le jeune homme se plaint que le café est trop chaud ce qui étonne sincèrement Clément. Mais, à part un sourire amusé, presque moqueur, il hoche la tête et demande simplement s'il a une carte professionnelle. Et tout le cinéma qu'il fait, en cherchant la carte, ressemble tellement à un gain de temps. C'est trop obvious.
Et lorsqu'enfin il lui tend la carte, Clément ne sait pas trop quoi penser. Les explications d'Alex sont trop floues et il est un peu trop nerveux pour paraître sincère. D'autant que cette excuse du « l'imprimeur a oublié un X » ne lui semble vraiment pas crédible pour le coup. ¨Prenant la carte en main, Clément l'observe et hoche doucement la tête. «Je vois … vous devriez changer d'imprimeur » il incline la tête sur le côté « Et vous ...vous devriez mettre le King entre guillemet aussi. Enfin, c'est juste un petit conseil» dit-il en posant la carte à côté de lui.
Il prend une gorgé de sa bière, son regard ne pouvant quitter la carte. «tu sais ...plus je lis cette carte, plus j'ai l'impression que vous vous appelez en vrai Alexander King » Clément relève sa tête et interroge le jeune homme du regard «Vous … n'auriez pas de lien familiaux avec Mary et Charles King … ? » demande-t-il, doucement, un peu mal à l'aise. C'est la première fois qu'il parle de ses parents biologiques avec un total inconnu.
Rien ne se passait comme il l'avait prévu même si au final il n'avait rien organiser et avait foncé tête baissée. Tout ça le dépassait et la situation échappait peu à peu à tout contrôle. Il se retrouva d'autant plus mal à l'aise quand Clément évoqua sa mère et son nouveau petit ami. Alex imaginait mille et une chose dans sa tête en quelques secondes, est-ce que son père adoptif était mort? Ou peut-être avaient-ils divorcés? Dans tous les cas cela ne devait pas être facile pour son petit frère, il aurait tant aimé être là pour lui. Sans doute l'accumulation de toutes ses émotions qui provoquèrent la catastrophe avec le café qui manqua de le brûler puis la tentative désespérée de convaincre Clément de sa fausse identité avec une vieille carte de visite... Ça ne prend pas, il est loin d'être aussi naïf que lui, un point qu'ils n'ont pas en commun, une chance pour Clément, mais pas pour Alex. Son cœur cesse de battre quand Clément prononce le nom de ses parents, de leur mère qui plus est. Il sait forcément quelque chose, mais quoi? Alex regarde Clément avec appréhension ainsi qu'une pointe d'espoir avant de se lancer. "Je m'appelle effectivement Alexander King..." Soudainement plus léger, c'est comme s'il s'enlevait une épine de pied. Le mensonge ce n'est pas pour lui. "... Mary et Charles sont mes parents." Il ne peut s'empêcher de redouter la réaction de son frère qu'il ne quitte pas des yeux. Préférant vider son sac pendant qu'il en a l'occasion, il ne marque pas de pause et continue de parler. "Je suis désolé de ne pas l'avoir dit dès le départ mais j'ai paniqué... Je voulais tellement te rencontrer... Je ne savais pas comment m'y prendre." Sur le coup de l'émotion, il aurait presque envie de pleurer toutefois il se retient. Il est tétanisé, craignant de tout foutre en l'air, d'avoir déjà tout gâcher. Il ignore encore d'où il a entendu parlé de leur mère et n'ose pas se présenter comme son frère, à son plus grand regret. "Je... Je ne sais pas comment formuler tout ce que je voudrais te dire." Il luttait pour ne pas se jeter dans ses bras en lui disant qu'il était là maintenant. Il souhaitait également ne pas mettre la pagaille dans sa vie et regrettait presque de l'avoir abordé. "Désolé d'avoir mentit!" Impossible de faire marche arrière de toute façon et puis, quelque part il était quand même heureux d'être face à lui et de discuter bien que ce soit un beau fiasco.
Et là, tout s'éclaircit. D'un coup, tout le subterfuge de cet homme se fini et ne fait place qu'à la stupéfaction de Clément. Autour de lui, le monde semble s'être arrêté de tourner alors qu'il lui annonce que Mary et Charles King sont ses parents. Aussi. Ainsi, ce prétendu responsable de casting est son frère. Biologique. Celui qui partage le même sang que lui, avec qui il aurait pu grandir. Et en vrai, Alexander semble tout aussi mal à l'aise que Clément est surprit. En vrai, il n'a aucunement l'air d'être un homme a avoir confiance en lui et ...il ne sait pas où se mettre. Il a l'air perdu et absolument sincère quand il lui dit ne pas avoir su comment l'aborder autrement mais qu'il à vraiment envie de lui parler et apprendre à le connaître.
«Je ... » il ferme les yeux et se pince l'arrête du nez alors qu'Alexander ne cesse de s'excuser. «Ce ...c'est bon ! C'est bon stop » dit-il en levant une main pour faire taire Alexander. Rouvrant les yeux, c'est un sourire qui s'affiche sur son visage « Alex je ...» il pince les lèvres puis hausse les épaules «Tu peux pas t'imaginer à quel point j'avais envie de te voir. En vrai » murmure-t-il avant de toussotter «Je ... » il entoure à nouveau sa bière de ses mains, jouant avec la bouteille «Tu t'en doutes sans surement mais je n'ai eu la lettre de Mary, ta ...enfin, 'notre' mère plutôt qu'en Décembre dernier, le 25 pour être plus précis » il se passe une main sur le visage « J'ai mis pas mal de temps avant d'accepter. Je veux dire, ma mère...» il se tait un instant «adoptive » ajoute-t-il «ma mère adoptive, elle ne m'a rien dit. Pendant 23 ans j'ai cru que j'étais né à Auckland et qu'on a déménagé à Riwaka seulement pour s'approcher un peu plus de la nature et quitter la ville » il pince légèrement les lèvres « Apprendre donc que j'ai, en vrai, été adopté tu ...enfin tu t'en doutes que c'était un sacré choc» il se passe une sur la joue puis sur la nuque «J'ai déjà apprit à connaître ta mère. Mais seulement au téléphone, je ne l'ai jamais rencontré. Tu ... » il incline légèrement la tête vers l'avant «T'es le premier de ma famille biologique que je vois en vrai » reprend-t-il sur une voix bien moins assurée
« Désolé, j'ai encore un peu de mal à me dire que ...» il se tait et secoue la tête «J'ai tellement de question putain et je m'excuse à l'avance mais...pourquoi ? » demande-t-il finalement «Pourquoi est-ce qu'elle m'a abandonné ? » il pose son regard sur son frère et attend une réaction de sa part.
Soulagé d'avoir avoué sa véritable identité et ses réelles motivations, Alex se laisse envahir d'une intense allégresse en constatant que Clément est au courant de toute l'histoire, semble également désireux d'apprendre à le connaître et se lance dans un long monologue non sans lui faire penser à lui-même, quelque peu amusé par leur similitude étant lui-même un sacré moulin à paroles. "Je ne suis au courant que depuis quelques mois également, mais j'ai tout fais pour retrouver ta trace!" C'est avec une pointe d'émotion et une once de fierté qu'il lui fait cet aveu, si heureux qu'ils soient enfin réunis malgré l'adversité de la vie qui les avaient séparés. Il n'est pourtant pas surpris qu'il ait eu du mal à accepter tout ça, mais il n'en est pas moins soulagé qu'il sache déjà tout, si le choc est déjà passé ça leur fera une épreuve de moins à traverser. "Je te comprends, j'ai encore du mal à encaisser. Je veux dire qui peut être assez tordu pour droguer la femme de son propre frère pour abuser d'elle? Au moins, elle n'a pas vraiment de souvenir de l'agression, faut se consoler comme ça même si elle savait inconsciemment..." C'était bien la première fois que ces mots arrivaient arriver à passer la frontière entre son cerveau et sa bouche. Il n'avait pas réussi en à reparler avec sa mère après l'avoir appris. Il ne s'en était pas senti la force de lui infliger ça à nouveau pourtant, il avait besoin d'en parler lui aussi. Ça l'avait atteint en profondeur et l'avait rendu malade, même si c'était éprouvant de l'évoquer aujourd'hui une part de lui était soulagée. "Puis elle a fini par avoir la certitude qu'il l'avait... Enfin, qu'il s'était passé quelque chose de pas très catholique quand elle est arrivée à l’hôpital et qu'on lui a dit qu'elle allait accoucher. Vu que mon père utilisait des capotes, il n'y avait pas de doute." Il n'avait que cinq ans au moment des faits, il se souvenait vaguement du séjour de sa mère à l'hôpital ainsi que de sa grande déprime après ça, sans compter l'état émotionnel de son père qui était tout aussi bouleversé. "Il ne faut pas leur en vouloir... J'imagine que ça devait être trop dur de s'imaginer t'élever sachant qu'ils penseraient constamment à la manière sordide dont tu as été conçu." Il regretta assez vite sa phrase, peut-être un peu déplacé et mal formulé. Il ne voulait pas non plus causer encore plus de peine à Clément pourtant Alex aussi avait besoin de vider son sac. C'étaient beaucoup à encaisser, ça se voyait sur sa tête. "Je m'exprime maladroitement quand je suis stressé. Excuse-moi, je suis peut-être un peu trop brutal dans mes propos? Je vais trop loin?" Il avait eu depuis noël pour s'y faire, mais se fait-on jamais vraiment à une telle chose? Pourtant, il avait presque l'air de tout découvrir. Quoique... Alex blêmit, pris d'un horrible doute. "Quand tu parlais d'avoir du mal à accepter et de chocs, tu parlais bien de ça? ... Tu. Tu savais hein?" Sans doute, aurait-il fallu qu'il parle ouvertement de tout ça avec ses parents avant de foncer tête baissé voir Clément!
Un sourire presque attendrit prend place sur le visage de Clément lorsqu'il apprend qu'Alex a tout fait pour le retrouver. Ça fait vraiment plaisir quelque part qu'il ait tout mit en œuvre pour qu'ils puissent se connaître. Et en même temps le jeune comédien se sent un peu mal, étant donné qu'Alex a fait tout le boulot, bien qu'il n'y puisse rien lui-même. Il finit par lui demander des plus amples informations, avouant être un peu perdu. Mais il n'aurait pas dut. II aurait dut se taire et rester sur les informations de bases. Il n'aurait pas dut chercher à en savoir plus. Mais il est comme ça Clément, beaucoup trop curieux. Et voilà où ça le mène. Sa mère, Mary, a été drogué par son beau frère qui a ensuite abusé d'elle. Le seul souvenir qu'elle garde de son viol c'est ...lui. Clément. Qui est né neuf mois après l'agression alors que les king ne voulaient pas d'autres enfants. Alex, lui non plus ne sait pas se taire, continuant en disant qu'il se doute fortement qu'élever un enfant non désirer et conçu sous de telles conditions était juste inimaginable.
Écarquillant les yeux, il déglutit difficilement et pince les lèvres, avant de secouer doucement la tête. Se reculant, il se passe une main sur le visage puis tire un peu sur son t-shirt comme s'il avait besoin de ça pour respirer à nouveau correctement. Il fini par secouer la tête lorsqu'Alex lui demande s'il était au courant de tout ça, qu'il parlait du viol de sa mère quand il disait avoir du mal a accepter les chocs. «N...non... » souffle-t-il finalement « Non j'étais absolument pas au courant de … putain...» il se passe les deux mains sur le visage et souffle doucement pour essayer de contrôler sa respiration qui commence à s'accélérer assez rapidement « Tu ...tu veux dire que ...j'étais pas voulu, à la base... ?» il soupire, secoue la tête, le regard se faisant fuyant « Putain ...» il sert les poings en essayant de contrôler ses tremblements «merde... »
Il ne peut en dire d'avantage car, se levant brusquement, sa chaise tombant sur le sol, il attrape son sac, regarde autour de lui puis se détourne «Je ...désolé » souffle-t-il en se détournant. Il s'éloigne rapidement de la terrasse, tourne dans la rue adjacente et s'immobilise, la respiration courte et saccadée.
Avoir enfin un petit frère ne se passait pas exactement comme prévu. Alex étant convaincu qu'il saurait quoi faire, qu'il trouverait les mots justes et que Clément et lui commenceraient doucement à tisser des liens. En quelques sortes, les mots avaient coulé de source sans toutefois être les bons, sans même y mettre les formes. Il y avait-il réellement une manière douce d'annoncer ça de toute façon ? Le sparadrap avait été arraché d'un coup sec en tout cas. Ne restait plus qu'à Clément qu'à encaisser la nouvelle... Et quelle nouvelle ! Alex comprenait lentement mais trop tard, bien trop tard qu'il ne savait absolument rien au sujet de sa conception. Serrant ses lèvres après coup, le jeune homme fut saisi d'un mal de ventre terrible, celui qui accompagne les erreurs de jugement et les mauvaises décisions. La mine affligée et déconfit de Clément n'arrangeait en rien la culpabilité grandissante d'Alex qui restait muet, ne sachant plus quoi rajouter, qui n'osait plus vraiment parler après ça. Il se retrouva impuissant lorsqu'il vit son petit frère se lever brutalement avant de prendre ses jambes à son cou. « Et merde ! » Tapant du poing sur la table, la mine renfrognée, en colère contre lui-même, Alex se passa les mains sur le visage qu'il frotta énergétiquement avant de se lever à son tour, attraper un billet au fond de sa poche pour le jeter sur la table avant d'entamer de rattraper Clément... Si c'était encore possible. « Clément ? » Plus aucune trace. Il a tardé à réagir, quelques instants d’inattention ont suffi pour qu'il perde sa trace. Comme si l'histoire se répétait en quelque sorte. Alors il regarde autour de lui, affolé, désespérément à la recherche du jeune homme. Il ralentit l'allure, tournant frénétiquement la tête dans tous les sens. « Clément ? » Soit il est hors de porter et ne l'entend, soit il l'ignore. Les deux options l'attristent. Alex a tout raté, sans doute la pire catastrophe de sa vie, pourtant il se rappelle avoir rayé une voiture de collection d'une valeur de quelques milliers de dollars. Ça lui paraît dérisoire aujourd'hui. Dépité, en colère contre lui-même, il passe ses nerfs en donnant un coup de pied dans un container de poubelle en plastique. Il s'arrête, ressentant le besoin de se calmer. Il ferme les yeux et repasse ses mains sur son visage, les mains jointent autour de son nez, respirant profondément plusieurs fois. Il rouvre les yeux, prêt à rentrer chez lui. Le sort en a choisi autrement, Alex retombe par hasard sur Clément au coin d'une rue. Il a ce faux air d'un petit animal blessé qui se cache, crevant un peu plus le cœur meurtrit du responsable. « J'suis un grand maladroit... Mais j'suis pas méchant tu sais ? » Il n'ose pas vraiment s'approcher d'avantage, il est environ à deux mètres de distance. Est-ce qu'il doit lui laisser du temps ? Est-ce qu'il doit essayer de parler de tout ça ? Alex nage dans le brouillard, la situation lui a échappé depuis bien longtemps.
La fuite de Clément était inévitable. Il n'aurait tout simplement pas put faire face à Alexander suite à cet aveux des plus déboussolant. Il était heureux, jusque là, de rencontrer le fils de sa mère biologique, mais apprendre tout ça par la bouche de cet homme est autrement plus choquant. Le néo zélandais -ou plutôt australien, en vrai- n'était pas voulut, sa venue au monde non souhaité, sa conception horrible. Il n'y peut rien, il n'a demandé rien à personne. Alexander non plus, d'ailleurs. Il n'est en rien responsable, et pourtant Clément ne peut s'empêcher de lui en vouloir. De lui avoir dit la vérité ? Peut-être.
Arrivé au détour d'une ruelle, le dos appuyé contre le mur, le jeune comédien essaie de se calmer un peu. Il ne devrait pas réagir de cette manière. En tant normal, il aurait accuser le coup sans trop se poser de questions et sa réaction n'aurait sans doute pas été aussi excessive. Mais il faut dire qu'il est un peu à fleur de peau ces derniers temps. Sa sensibilité est doublée voire triplée et c'est ce qui lui confère ce genre de réaction. Les yeux fermés, penché en avant, les mains appuyées sur ses genoux, Clément reprend peu à peu le contrôle sur sa respiration …
… avant qu'elle ne se bloque dans sa gorge en entendant la voix d'Alexander. Il l'entend répéter son prénom à plusieurs reprise et hésite à lui répondre. Mais au final son regard croise celui de son frère et, se redressant, l'observe quelques instants. Le jeune homme fini par lui dire, sans pour autant oser s'approcher, qu'il n'est pas méchant, que très maladroit. Et malgré tout, malgré la douleur qu'il ressent en son fort intérieur, Clément ne peut s'empêcher de sourire doucement, amusé. Il déglutit, se passe une main sur le visage et dans les cheveux avant de se pousser du mur. «Je ...hum... » commence-t-il avant de toussoter légèrement « Dé...désolé. D'être parti aussi rapidement et ...ce n'est pas grave. Enfin je ...c'est pas ta faute. Ni la mienne. Ni celle de ...» il pince les lèvres «...de maman » souffle-t-il finalement d'une petite voix, presque inaudible.
S'humectant les lèvres, croisant les bras devant son torse, il s'avance doucement vers Alexander «Je … j'ai pas envie de savoir qui lui a fait ça, à Mary. Du ...du moins pas tout de suite » avoue-t-il. Il porte une main à sa bouche, pince les lèvres et dévie quelques instants le regard «Mais je … j'ai envie de passer du temps avec toi. Vraiment. » reprend-t-il en reportant son regard sur son frère «Ce que tu m'as appris là ne change rien au fait que tu … que t'es mon frère quoi » reprend-t-il avec un sourire « On … on a aussi 23 ans à rattraper » continue-t-il avec toute la sincérité du monde.
Il fallait désormais marcher sur des œufs, probablement que tourner sa langue sept fois dans sa bouche avant de parler ne serait pas de trop. Maintenant, il commençait à comprendre pourquoi leur mère avait tant tardé à reprendre contact à Clément. Devant l'adversité de l'histoire, il était laborieux d'affronter les retrouvailles sans qu'ils y laissent des plumes visiblement et c'était bien plus douloureux qu'Alex ne l'avait cru. Il réalisait qu'il aimait déjà sincèrement cet inconnu avec lequel il partageait la moitié de son code génétique. Il s'avance tout doucement au fur et à mesure que Clément reprend la parole, plus ou moins saccadé par la douleur d'une vérité qui dérange, qu'il lui aurait sûrement été préférable de continuer d'ignorer mais le mal était fait. S'il voulait l'éluder, Alex ferait tout son possible pour le lui faire oublier en le distrayant mais s'il voulait y revenir un jour ou l'autre, il l'accompagnerait sur cette route sinueuse et tranchante... Comme deux frères. Il ne pus retenir un sourire béa emplit de fierté quand Clément le qualifia de la sorte. C'était une chose d'assimiler qu'on en avait un, s'en était une autre de l'entendre. Pour la toute première fois. De sa bouche ou de n'importe qu'elle autre bouche d'ailleurs, sa mère n'ayant jamais réussi à le dire. « Vingt-trois ans... » C'était long, mais l'idée de rattraper tout ces années était si plaisante que la notion du temps en était quelque peu déformée. « Alors, t'es en quelques sortes plus vieux que moi! » Alex ricana doucement en continuant son discret rapprochement avant d'ajouter avec malice: « Officiellement j'en ai vingt-huit mais ça fait des années qu'on me dit que j'agis comme si j'en avais seize. » Il y a du vrai là-dedans. À cause de sa naïveté légendaire et sa mauvaise habitude de tomber dans tout les panneaux, c'était la bonne poire de service. Il avait tellement envie de croire que de bonnes choses pouvaient arriver qu'il avait tendance à tout idéaliser et sincèrement vouloir croire à ce que d'autres qualifieraient de contes de fées. Il se refusait de croire que les gens avaient de mauvaises intentions et se persuadaient systématiquement que tout le monde n'avait que de bonnes intentions... « Du coup, j'imagine que tu vas devoir m'apprendre à me comporter comme un adulte? » La plaisanterie a toujours été quelque chose qui lui venait spontanément, autant se servir de ça aujourd'hui pour essayer de redonner le sourire à Clément. Alex, à force de se rapprocher, est enfin aux côtés de son frère et s'assoit tout près de lui tout en lui tendant son bras gauche. « Tu vois la cicatrice en forme de losange? On m'a convaincu que la guimauve grillée ne pouvait pas brûler la peau! » Souvenir d'une soirée avec des potes aux coins d'un petit feu de camp, même pas arrosé d'alcool où sa naïveté avait montré un niveau exceptionnel. « Bah j'en ai fait l'expérience y a six mois environ... » Le bon côté des gens, c'est qu'il s'assumait totalement et là où d'autres pourraient avoir honte, lui avait plaisir à raconter ses bêtises pour amuser la galerie. Il espérait bien redonner le sourire à Clément avec cette anecdote. Au pire, il en avait tout un tas du même genre en stock.