I walk the world by myself, I got this soul that I can’t sell.
Tu l'écoutes s'inquiéter de l'avenir de ton embarcation esseulée et docile, tu t'orientes vers cette dernière en vue de lui prodiguer un maître. Sa réplique t'arrête dans ton élan néanmoins, évoquant cohabitation et rapides. Ton esprit critique s'interroge sur la probabilité que ton bateau se fasse dérober par de forts courants dans ces mers, mais celui-ci se voit bien vite étouffé par l'éventualité que la Parker t'offrirait un logement si jamais le tien se voyait démoli. Tu notais, avant de commenter, provocateur : « T'aimerais ça. » Tu n'oubliais certainement pas que c'était contre ton corps qu'elle se réfugiait la nuit tombée, emportant avec elle de nombreux degrés, les skinny jeans de Kane ayant peu de réconfort à apporter. Tu n'omettais pas non plus ces délits ou agissements douteux que tu avais commis en sa compagnie, pour des raisons qui vous semblaient toujours nobles ou qui ne méritaient pour justification que le besoin ou désir de l'autre part du duo que vous formiez. Devais-tu également ressasser vos nombreuses conversations à la volée, bien plus profondes que vous n'oseriez un jour avouer ? Le jeu et l'insolence surplombaient toutefois les souvenirs et les réalités.
Devant l'échelle menant à ton domicile, la parisienne de naissance s'interroge sur un îlot situé à quelques kilomètres de distance. Instantanément, tu lui donnes la qualité d'emplacement nudiste, tout en invitant la rousse à s'y rendre. Après tout, tu étais déjà en situation adéquate pour un tel lieu et chaque jour conviait de nouvelles découvertes. « T’aimerais trop ça. » qu'elle te rétorque avant d'enchaîner sur votre expérience commune en termes de vieux pervers. Un sourire en coin naît sur tes lippes, promptement happé par la surprise d'entendre la mélodie du téléphone portable d'Ariane. Un regard, une explication, tu te précipites sur le pont pour jouer au secrétaire du doctor love alors qu'elle hurle ton prénom en pure désapprobation. Puis, une fois l’appel achevé, tu manies malhabilement l'engin dans l'optique de prendre des clichés à destination de ton meilleur ami. Ses ongles t'arraches quelques nuances de ton épiderme lorsqu'elle récupère son bien tout en affichant les couleurs de toutes affaires que tu pourrais débuter via son téléphone portable. « T'es un vrai requin. Heureusement, j'ai d'autres moyens de faire du fric. » Tu hausses les sourcils, énigmatique et tournes les talons alors qu'elle t'interroge sur la conversation que tu viens d'avoir avec son éditrice. La malice s'accentue contre tes traits tandis que tu tangues entre lui livrer un bobard ou la laisser dans l'ignorance, l'invitant dans les deux cas à retourner son appel si repoussé de sa part.
Du moins, pendant quelques minutes. « Oh, non, j’ai mieux. » Déçu, n'ayant pas eu le temps de déterminer à quelle sauce tu voulais cuisiner Ariane, voilà qu'elle rejette d'un revers de la main ses responsabilités d'auteure. « Un vêtement part pour chaque fois où j’ai été meilleure que toi. » Tes yeux analysent la jeune femme sans cérémonie ni scrupule, du roux de ses cheveux au rouge de ses pieds transis par le sel et la fraîcheur de la mer. Pas de rictus, toutefois, seule une pointe d’incrédulité. « Ma confiance en moi a été heurtée avec tout ce que tu dis depuis tout à l'heure. J’ai besoin d’entendre la longue liste de mes qualités. » Tu ne prives pas un rire de filer entre tes lèvres. Comme si tu jouissais du pouvoir d'ébranler la Parker. « Puis tu voudrais pas qu’on arrive là pas vêtus pour l’occasion. Rude. » Tu croises les bras contre ton torse et réduis la distance entre vos deux entités, feignant de t'orienter vers ta cabine. Fishing for compliments, much? « J'vais aller chercher ma canne à pêche à compliments, ce sera plus rapide. » Mais à quelques centimètres derrière Ariane, tu te retournes discrètement pour l'enlacer par derrière. « Me tape pas, » tu sollicites sur ce ton posé et sérieux qui t'es très rare. Tu laisses l'anguille sous ton emprise se détendre et enchaînes : « Tu es forte, loyale, généreuse et intelligente. » Tu te détaches, effectues les quelques mètres te permettant de faire face à la chroniqueuse et enfonces ton doigt contre son épaule comme l'on attise un ours. « Tu es une bien meilleure amie que moi, et tu le seras toujours. » Tu plonges ton regard dans celui de la jeune femme, catégorique. « Et ça, tu le sais. » T'as juste envie ou besoin de l'entendre, tu retiens, comme le fait que Kane a bien de la chance d'avoir Ariane en alliée dans la traversée de son existence, lorsque tu ne composes qu'une bouée apparaissant ici et là, à l'improviste. Quelques secondes de silence s'imposent entre vous et tu te laisses tomber sur la chaise longue précédemment occupée par la crevette, annonçant par ce geste que tes compliments sont gratuits. Parce que gager enlever ses habits à chaque fois où elle se montre meilleure que toi rime avec vivre nue à perpétuité à ton sens. « C'est quoi ton problème, avec ton bouquin ? » Tu lances après de nouvelles secondes amorphes, taisant gracieusement la moquerie et l'arrogance qui font d'ordinaire vibrer ta voix.
À bout de souffle, à bout de nerfs, je lui pique le téléphone des mains en grognant, un éclat de rire qui n’attend pas le prochain. Et quand j’anticipe qu’il était à même de se faire de la thune en prenant des selfies POV de son zizi avec vue de soleil couchant en périphérie, voilà que Levi se défend en parlant de ses mystérieuses et oh combien variées sources de revenu. Je pige pas, honnêtement, comment il fait pour survivre s’il n’ajoute pas une touche d’illégal à tout ça - mais au final je sais bien, qu’il a besoin de peu pour vivre. Ça me fait juste particulièrement plaisir de l’imaginer avec un dark passenger, être le genre à tout cacher dans un sous-sol infusé aux mauvaises décisions et aux deals louches, les cadavres qu’il balance par-dessus bord enroulés de plastique et brûlés à l’acide, et ses chansons d’amour qui veulent en fait partager son modus operandi quand on les écoute à l’envers. L’anglais était un puits de mystères et ça m’allait - si je savais tout sur son cas, ça me blaserait que je pense, légitimement. « Alors, tu l’entres par où la drogue pour la passer au pays? » profitant du fait qu’il est complètement à poil et offert, je laisse mon regard fouiller chaque recoin, tentant de le visualiser passeur d’héroïne à la douane, de voir là où il aurait le plus de marge de manoeuvre pour enfouir quelques sacs de plastique illicites. Et non, je suis pas en train de sérieusement penser à lui piquer ses astuces s’il en a vraiment, s’il me prend à mon propre jeu et se la joue Piper Chapman qui réussi à s’en sortir. « Asking for a friend. » Vitto derrière la cravate pour venir plaider devant juge que j’ai agi sous l’influence de mes traumatismes d’enfance inventés et autres daddy issues, je me dis qu’il y a peut-être là moyen de payer toutes mes dettes et de m’en sortir avec un nouveau Thermomix dernier cri. Mon éditrice attendra, quand mon portable retrouve sa place au fond de mon sac, tout sauf prête à l’affronter à nouveau, à m’inventer un bobard et un autre pour me donner l’impression de ne pas être aussi nulle que je ne le suis réellement.
J’ai l’envie joueuse, j’ai l’énumération envieuse, lorsque je propose le jeu des qualités, celui-là même qui nous amusait sur de trop longues distances en van, dès lors qu’on se tournait les pouces et que le dernier CD gravé cumulait les rainures l’empêchant de jouer correctement. Levi qui se rapproche, qui pique, un roulement d’yeux en bonne et dûe forme et le soupir qui l’accompagne, déjà à même de vanter mes propres mérites toute seule comme une grande parce qu’en vrai, j’avais pas besoin de lui malgré ce que la légende avançait. Ce n’est que lorsque je vois le brun s’élancer dans ma direction, ses bras qui m'enserrent et ses supplications à mon oreille que je tourne la tête, crache un « Déjà, ça, ça m’en donne direct envie. » d’alarme, d’alerte, une nouvelle occasion de pallier sur sa masculinité à découvert le temps de lui arracher un morceau ou deux de son service trois pièces s’il prend trop ses aises contre mon dos, mes hanches, ma nuque, frisson qui attise le reste. Mais il roucoule Levi, ses murmures qui chatouillent l’arche de ma mâchoire avant que je papillonne des paupières, dodeline de la tête, me complaise dans ses compliments comme s’ils m’étaient dûs - à qui je mens, ils me le sont. « Très certainement. » et j’appuie, la question rhétorique à savoir qui de nous deux étaient la meilleure plus value dans la vie de Kane. « C’est juste mieux quand c’est toi qui le dit. » y’a tout un discours qui remonte le long de ma gorge, les accusations que j’aurais envie de pointer dans sa direction, l’enfant préféré qui étouffe tout le mérite de ceux qui bossent fort, pour vrai, mais je n’ai pas le temps de compléter. Parce que ce feu-là, il l’éteint en allumant la prochaine dose d’explosifs, le prochain bâton de dynamite que mon regard lui envoie à la seconde où mes iris se posent sur sa silhouette allongée, pacha de pacotille.
« Oh mais bébé, c’est ça mon problème. De me faire demander c’est quoi, justement. » et au fil de mes mots, c’est mon t-shirt qui part d’abord, mon short ensuite. Je tords mes mèches en une masse de boucles glacées dégoulinantes d’océan à mes pieds, fais passer la dentelle le long de mon bassin jusqu’à mes orteils, retire le haut assorti qui finit au sol, part rejoindre ses potes détrempés. « Je bloque. J’écris pas autant que je veux, je me fais chier à me rendre moi-même des comptes. Je prends pas le temps, je tourne en rond, je sais pas par où commencer. » la liste est blasée, longue, dépourvue de sens et de conviction, et à celle-ci j’ajoute d’un long soupir las et son chapeau qui finit la chorégraphie en s’élançant de ma tête à la sienne d’un mouvement de poignet agile. « Choisis ta justification bidon préférée, ça suffira pour aujourd’hui. » je m’emmerde moi-même, bien plus que Levi pourrait le faire de son plein gré. Toutes mes réponses se valent, toutes mes excuses m’énervent. Parce que c’était mon rêve, parce que c’était le genre de truc auquel j’aspirais à même pas 5 ans, à suivre maman à la trace à tous les salons du livre où elle passait, où on l’installait entre tables de dédicaces et stands de lecture devant public. C’est l’aspiration d’une vie que j’étouffe à chaque syndrome de la page blanche, c’est l’objectif ultime qui se dissout parmi les messages que Sage me laisse sur ma boîte vocale constamment pleine, y faire le ménage me filant des crises d’angoisse aussi stupides que nombreuses. Et quand je juge que le sujet est clos, ou du moins, que je me suis assez démoralisée moi-même pour laisser à Levi l’occasion de rebondir sur mon malheur d’une vanne supplémentaire, je retourne au programme principal, la voix aussi rauque qu’intéressée. « Toujours okay pour partager la vue ou tu veux qu’on reste à deux ici? » ma silhouette dénudée s’accorde au grand sourire provocateur qui la complète avant qu’un éclat de rire ne lui laisse pas le choix, maintenant que je file vers la barre, aligne du mieux que je peux ou du moins de ce que je me souvienne, le bateau vers l’île au loin.
I walk the world by myself, I got this soul that I can’t sell.
Elle est tenace, l'Ariane sauvage, et ce trait constitue sans nul doute le premier que tu lui as approprié en la découvrant. En effet, des années plus tard, tu ignores si on peut apprivoiser ce roux spécimen, si un de ses pairs en est même capable. Alors, bien qu'attrayantes, tu commentes ses remarques dignes d'une businesswoman aguerrie vouée à exploiter chaque profit de la moindre activité, certifiant sans gêne que tu regorges de ressources. « Alors, tu l’entres par où la drogue pour la passer au pays? » Ton sourire en coin s'accentue, creuse ta joue. Ton regard pétille et tu t'évertues à quelques poses sensuelles tandis qu'elle te reluque, à la recherche de la cachette la plus avantageuse. « Asking for a friend. » « Le même que tu qualifiais de chaire fraîche tantôt ? » Tu remémores malicieusement, avant de relater : « Un vrai magicien ne révèle jamais ses secrets. » Tu offres un clin d’œil à ton interlocutrice avant que le ton de la conversation n'attire les violons. Perçois-tu un manque d'assurance ? Une frustration ponctuelle ? Une carence en affection ? T'essaies valeureusement de pallier à tous ces conditionnels, ton corps se collant au sien pour susurrer les qualités que tu lui prodigues sans effort. Kane entre forcément dans la recette du bonheur et il n'en faut pas plus pour qu'Ariane et toi soient sur la même longueur d'ondes. « C’est juste mieux quand c’est toi qui le dit. » « Tout est mieux quand c'est moi qui le dit. C'est pour ça que les gens écoutent et lisent autant ce que j'ai à dire. » Tu enchères, cupide et puéril, avant de te laisser tomber sur une des chaises longues situées sur le pont de ton bateau.
D'ailleurs, parlant d'écrire, tu lui balances sans scrupule son stand-by d'auteure en devenir. Tu ne retiens pas le premier reproche, soupires à ses justifications, observes les vêtements tomber un à un. Un silence qui invite à tes remarques, l'impatience de la chroniqueuse qui l'incite à orienter ton navire vers l'îlot enchanté. « Bloody Arihell, tu te prends tellement la tête tu t'asphyxies. » Tu repositionnes ton chapeau précédemment réceptionné sur ta tête et remets les pendules à l'heure : « Écris ce que t'as envie d'écrire, couche sur le papier ce à quoi tu penses et ce que tu veux partager, ce que t'as sur le cœur, en tête, ce qui te grignote la cervelle. Tu t'en fous si ça sort mal, si ça rend pas justice à l'image que tu t'es - à tort - érigée de ton oeuvre avant même de la débuter. Crache ton talent sur le papier parce que t'en as et t'as même une éditrice qui te suce l'âme pour te le prouver. T'aurais même pas besoin d'elle, d'ailleurs, pour toute information. Si t'es là, c'est que tu le mérites et que tu en es capable. Alors remues ta frousse et mets toi à l'ouvrage. Prends un joint les premiers chapitres s'il le faut. » Tes doigts agiles qui fouillaient la sacoche d'Ariane dans son dos pendant ton monologue ont déjà pernicieusement extirpé son téléphone portable et s'efforcent d'effacer tous les messages assaisonnés aux livres, comptes à rendre et éditrice. Finalement, tu te rapproches de la jeune femme, son bourreau électronique dans les mains. « J'ai fait un clean up dans ton engin et je le balance à l'eau si tu n'as pas écrit avant qu'on retrouve la civilisation. Tu me remercieras plus tard. » Ton regard n'invite pas au défi, la moindre tentative de la part de la rouquine, l'iPhone fera des bulles.
« Bloody Arihell, tu te prends tellement la tête tu t'asphyxies. » mon soupir n’a d’égal que le roulement d’yeux que je lui offre, éternellement blasée par sa capacité à prendre le monde entier de haut, à s’y croire fort et fier parce que lui il a compris la machine, parce que lui il sait exactement ce dont il parle, il a vu, il a vécu. Et surtout dans un domaine que j’aurais tant espéré, tant voulu dominer à sa place, avant lui. Mais ça je me l’avoue pas, plutôt crever, préférant rager, bouillir, et cracher un « Tu le dis dès que tu veux partager le manque d’air. J’ai deux mains à disposition. » additionné de mes deux paumes que je fais danser à distance, rêvant de ses vertèbres à disloquer, de son cou à faire craquer. Y’avait ce petit, ce grand, plaisir que d’imaginer Levi se la boucler sous mon courroux, y’avait ce petit quelque chose d’aussi alléchant que malsain de l’imaginer cloué au sol incapable de faire quoi que ce soit d'autre que de manquer d’air, et inévitablement, manquer de munition à me balancer à la figure, lui qui ne manquait jamais la moindre occasion de piquer, lui qui touchait une corde sensible every single effing time. « Depuis quand tu joues à l’autoritaire zéro crédible? » je le dévisage le temps qu’il se recoiffe de son chapeau qui pue encore même à distance, rattrape mes fringues au sol pour les faire sécher contre la rambarde sans même lui accorder la moindre bribe d’intérêt. Ça va, vas-y Levi, apprends-moi la vie, dis-moi à quel point tu as la vérité infuse, tu sais exactement quoi dire pour me motiver, pour me faire croire en moi à nouveau, qu’écrire soit facile, pour que mes doigts trouvent le chemin de mon clavier et non de ta nuque que j'arracherais volontiers.
Et pourtant. À chaque mot qu’il me chante, à chaque vanne qu’il encense, y’a cet élan qui bouille, qui gronde à l’intérieur. Y’a cette petite voix qui me souffle à l’oreille à quel point je devrais lui prouver qu’il a tort, comment il bavasse et gobe de l’oxygène, gaspille de l’air pendant que l’inspiration se déclenche, que les idées dansent, et que mine de rien, il arrive à tordre un nerf assez fort pour que j’ai une phrase là, une seule, qui scintille dans ma tête, un début de chapitre, de quoi lancer la machine, rien de bien glorieux, mais quelque chose tout de même. Lentement, sans même daigner le regarder maintenant qu’il prend ses aises avec mon portable et se la joue “je suis nul avec l’informatique mais regarde j’ai trouvé le bouton delete hyper vite” j’entame la marche vers la cabine, même pas un coup d'oeil, même pas un sourire vers le brun. Il a atteint mon seuil de tolérance, comme à peu près à chaque heure passée en sa compagnie, et j’userai de cet argument lorsqu'on me demandera si ce qu’il a bien pu dire ou faire a suffit à me motiver à écrire. Non, c’était soit je me posais pour gribouiller sur une feuille, soit j’étais en état d’arrestation pour assassinat long, douloureux, violent, prémédité depuis minimum 15 ans. « Si tu me déranges, t’es mort. » comme ça Levi pourra pas dire qu’il n’est pas averti. Et, avant de m’isoler à l’intérieur, je précise, le doigt en l’air, toujours dos à lui. « Oh, et je remplacerai pas les cahiers que je t’aurai piqués. Buy your own sh*t. » la dernière chose qu’il verra, c’est la porte, close, claquée, pour le bonheur de ma tranquillité, et de mon bouquin que je finirai par avancer, trop pour le lui mentionner, trop pour lui donner le moindre crédit.