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 Raisons & Sentiments, mais surtout sentiments

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Message(#)Raisons & Sentiments, mais surtout sentiments - Page 2 EmptyLun 26 Nov 2018 - 16:43

Leonardo ne pouvait s’empêcher d’être légèrement impressionné par la personne qu’était Adam, du moins d’un point de vue professionnel mais aussi sportif. S’il avait dû passer par le sport avant de devenir végétalien il en serait encore très loin, et il admirait la ténacité que le Suski avait visiblement eu en la matière, dont les effets étaient bien visibles. Il se contentait d’écouter ce qu’il disait, et de quelle manière il était passé des arts martiaux au chinois, ainsi que la façon dont l’écologie et la politique se rejoignaient dans son travail. Il ne put s’empêcher de rire doucement quand il évoqua ses différences avec son géniteur, tout simplement parce qu’il était dans le même cas. « Pour le coup, c’est pas mon père et moi qui illustrons la relation père-fils idéale. » Mais comme le disait Adam, parfois c’était juste ‘’comme ça’’. Il avait depuis très longtemps arrêté d’essayer de comprendre ce qui motivait son père, encore moins en matière d’éthique, et encore moins pourquoi ils étaient si différents l’un de l’autre. En revanche, sa dernière question l’étonna quelque peu, mais sa réaction ne se fit pas attendre. « Oh, oui. » Il ne put s’empêcher de rire doucement, tout simplement parce qu’il ne s’était jamais vraiment posé une telle question, à tel point que c’était presque drôle de l’entendre posée. Il prit un instant pour réfléchir, n’ayant pas vraiment envie d’utiliser les mauvais mots pour un sujet aussi important. « Disons que… j’ai connu beaucoup de monde qui s’obstine à rejeter toute appartenance à une quelconque communauté, mais j’ai rarement rencontré des bons arguments qui ne relèvent pas des mêmes clichés que répétait inlassablement mon père. » En effet, nombreux étaient les inconnus (souvent sur Grindr, s’il devait être honnête) qui l’avaient souvent fait tourner des yeux avec des explications très farfelues, qui avaient pour centre leur différence des ‘’autres gays’’, par exemple parce qu’ils n’aimaient pas Britney Spears, parce qu’ils ne portaient pas de rose, parce qu’ils ne parlaient pas constamment de leur sexualité… En règle général, il se contentait de rouler des yeux et les bloquer, tout simplement parce que c’était des gens qu’il ne connaissait ni d’Adam ni d’Eve, et qu’il avait mieux à faire que s’engueuler avec. « En soi, je comprends le fait qu’on veuille en être dissociés parce qu’on est plus que notre sexualité, et il y a bien plus en ma personne que le fait d’aimer les garçons. Et dans les faits, ayant des vécus différents on a tous des ressentis différents, et il n’y a pas un ‘’gay prototypique’’ qui représente ‘’la communauté’’, tout simplement parce que ça s’ajoute à tout le reste de notre personne, et des personnes de tout type sont concernés. » Il suffisait d’ouvrir un peu les yeux pour se rendre compte qu’il y avait tout un tas de profils différents qui convergeaient autour de la question, sans qu’il y en ait un plus important que l’autre. « Et en soi, je me sens pas tellement légitime de m’y engager et être un grand militant, mais c’est plus parce que j’ai eu énormément de chance par rapport à d’autres, et tout le monde ne peut pas partir à l’autre bout du monde pour fuir ses parents, t’sais. Et malgré tous les progrès qu’il reste encore à faire, l’Australie n’est pas le pire des pays en la matière. » Pour le coup, il ne pouvait pas vraiment prétendre le contraire – et ça n’aurait servi à rien de faire comme si ç’avait été le cas. « Mais c’est absolument pas parce que je pense qu’il n’y aurait pas d’intérêt, ou parce que je pense que je suis ‘’différent’’ des autres, ou… que sais-je. » Ses hésitations rejoignaient aussi celles qui lui empêchaient de s’engager pour l’environnement, mais c’était à ses yeux beaucoup moins important. « Comme pour beaucoup d’autres choses, je pense qu’on devrait juste laisser les gens vivre tant qu’on ne fait rien de mal. Que ce soit d’un côté ou de l’autre. Et pour le coup, on ne pourra jamais être égaux si on continue de se diviser de la sorte. » Si Leonardo savait que sa naïveté l’aurait un jour, il y avait bon nombre de sujets où on ne pourrait absolument pas lui faire changer d’avis – et ça, c’en était un très bon exemple.
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Message(#)Raisons & Sentiments, mais surtout sentiments - Page 2 EmptyLun 26 Nov 2018 - 19:38

— Hmm.

Calé contre le dossier de sa chaise, Adam s’était fait pensif.

— C’est pas vraiment de ça que je parlais, finit-il par répondre, d’un ton un peu incertain, enfin… je crois ?

Fatalement, ce n’était pas un sujet qu’il abordait souvent. Il ne s’en cachait pas exactement, au travail, mais, d’une part, son environnement professionnel était peu propice à l’étalage de la vie privée, et, d’autre part, il se voyait mal discuter de son homosexualité avec des agents qui correspondaient somme toute assez souvent au profil du militaire, éduqué peut-être, mais pas nécessairement toujours très ouvert d’esprit.

Alors il avait du mal à trouver les mots.

— Moi, je suis d’accord qu’on doit se battre pour beaucoup de choses. L’égalité des droits. Le mariage, l’héritage, la solidarité en matière de sécurité sociale, l’adoption. L’égalité dans l’éducation sexuelle à l’école. La protection contre les discriminations. La protection des séropositifs. Ce genre de choses. Le côté, tu sais, politique, je pense qu’on est quand même à peu près tous largement d’accord dessus, et qu’on se sent tous plus ou moins concernés. Si un jour je trouve vraiment le mec qu’il me faut, je veux pas qu’il se retrouve dépourvu à ma mort.

Il avait dit cela tout naturellement, comme si sa mort, sous-entendue précoce, était une réalité inévitable qui allait de soi. Et c’était en effet une question qui le travaillait. Il était lucide sur son travail et tous les dangers qu’il impliquait. Il y avait des agents pour se reconvertir dans le management et s’éloigner du terrain, mais nombreux étaient aussi ceux qui connaissaient une fin précoce. Et si ceux-là n’étaient pas mariés, il n’y avait personne pour toucher la pension de veuvage. Et puis Adam n’avait pas envie que ses décorations finissent sur les étagères de ses parents.

— Et je crois que pour faire valoir tous ces droits, les étiquettes, c’est quand même utile. J’sais que c’est la mode, aujourd’hui, de dire que la sexualité est complètement fluide, qu’on aime une personne avant d’aimer son physique, mais déjà, ça me paraît assez largement contre-factuel, et même un petit peu, comment dire ? snob, comme position. Pour ne pas dire dangereusement homophobe. Mais aussi, ça me paraît dangereux politiquement. Pour qu’un groupe puisse faire valoir ses droits, il faut d’abord qu’il se constitue comme groupe, et ça implique de se construire une identité. C’est vrai pour nous, et c’est vrai pour d’autres luttes.

Et c’était ironiquement un principe bien assimilé par les services de renseignement, quand il s’agissait de fomenter une guérilla. Les politiciens avaient beau condamner les politiques identitaires, les espions, eux, savaient que c’était un puissant levier d’action politique, y compris radicale.

— Mais… ‘Fin, en fait, c’est tout con, ce que je veux dire. Mais quand des fois je lis un magazine gay ou des sites, je me sens complètement… Exclu ? Y a rien de ce que s’y dit qui me parle, dans les sujets quotidiens je veux dire, y a rien qui correspond à mon mode de vie. Et quand je rencontre des amis de Ko… de mes copains, et qu’on discute, j’ai toujours l’impression que je suis pas assez gay pour eux.

Et il le serait encore s’ils savaient ce qu’il faisait réellement de sa vie.

— Du coup, je n’ai jamais trouvé la communauté très accueillante. Mais j’imagine que c’est un cercle vicieux : je tombe sur les mauvaises personnes, qui me reprochent de pas me conformer à des attitudes ou à des goûts, du coup, j’ai moins envie de découvrir, et ça m’empêche de voir la diversité. Et d’un autre côté, j’ai aucune envie de me retrouver dans un bar avec des potes hétéros pour parler de conquêtes féminines. Parce que je sais qu’eux et moi, on a quand même une expérience radicalement différente du monde.

Il y avait sans doute beaucoup de gens qui auraient tiré une sorte de fierté un peu superficielle de « faire hétéro » comme Adam et lui-même avait bien conscience que le côté pour ainsi dire inoffensif de son homosexualité quasi insoupçonnable lui avait beaucoup servi au cours de sa carrière, en empêchant les autres de se former des préjugés à son sujet, mais au bout du compte, il avait l’impression d’être coincé entre deux mondes et de n’avoir jamais personne à qui parler vraiment.

— J’sais pas. C’est juste toujours un peu compliqué, fatigant, tu sais, d’avoir l’impression de devoir prouver qu’on est ce qu’on dit être, à des gens dont on avait l’espoir qu’ils seraient juste tolérants, parce qu’ils partagent nos difficultés.
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Message(#)Raisons & Sentiments, mais surtout sentiments - Page 2 EmptyLun 3 Déc 2018 - 10:25

Leonardo écoutait patiemment l’Australien parler calmement, le visage posé dans l’une de ses mains pour être un peu plus comfotable. S’il ne pouvait peut-être pas comprendre exactement ce qu’il avait dû vivre avec sa famille ou les amis de son copain – même si ce dernier risquait de bientôt sortir de sa vie, au vu de la tournure qu’avaient pris les événements –  il s’imaginait que tout le monde avait plus ou moins ressenti ce genre de rejet, bien trop fort mais tout aussi subtil. Du moins, il avait retrouvé ce même genre de vécu tout autour de lui, ce qui pouvait aisément être imaginé comme une sorte d’universel, bien que ça puisse se décliner sous mille et une façons différentes. « Je crois que je vois plus ou moins ce que tu veux dire. Peut-être. » Il s’ajusta un peu plus dans sa chaise, le regardant en plissant légèrement des yeux, comme un puzzle à mettre ensemble. C’était un peu comme ça que ça se passait, en règle général – on recevait plein de pièces de l’autre, qu’on devait ensuite combiner pour espérer réussir à voir l’image générale. Mais tout comme les puzzles, les humains étaient loin d’être tous pareils, encore moins en matière d’identité et personnalité, ce qui compliquait quelque peu la chose. « En tout cas, je suis d’accord quant au fait que ça paraît dangereux d’effacer toute identité et étiquette pour atteindre une sexualité fluide qui serait universelle. Du moins, ça le serait pour l’instant et… j’sais pas. Y’a une certaine force dans le fait d’affirmer ça alors que personne partira jamais du principe que toute personne qu’il croise dans la rue est gay, quoi. » Si c’était des questions très profondes et intéressantes autour desquelles échanger, ça restait tout de même extrêmement abstrait et il n’y avait pas toujours de retombées dans leur vie de tous les jours, ce qui rendait cette même réflexion assez complexe à atteindre. « Quant au reste… c’est pas parce qu’on est censés être ouverts et tolérants qu’on l’est forcément, malheureusement. Ce qui est complètement contre-intuitif et idiot, mais bon. » Après tout, à quoi bon rejeter les autres et imposer une sorte de modèle à respecter – qu’au final personne ne représentait vraiment – alors que c’était bien ce contre quoi ils se battaient constamment ? Il n’y avait pas tellement de logique en la matière, mais le Grimes se doutait bien que la société ambiante n’y était pas pour rien. « Et en soi, à la fin de la journée… y’a personne d’autre que toi qui peut définir ton identité, et même la personne qui te connaît le plus n’aura aucun droit là-dessus. Mais effectivement, ce serait chouette que ce soit juste accepté tout le temps, au lieu d’être constamment remis en question. » Mais en règle générale, il ne traînait pas de masses si quelqu’un correspondait à ce genre de profil, tout simplement parce que le courant passait affreusement mal dans ces cas-là. « C’est pour ça que l’avis des autres ne peut compter que jusque-là. Et dans l’idéal on est censés être toujours dans l’écoute et le respect, mais… ça suppose qu’on soit nous-mêmes entendus et respectés, comme tout le monde devrait l’être. Et si dans les faits c’est beaucoup plus compliqué que ça… » Leonardo haussa les épaules, montrant qu’il n’avait pas de réponse finale à ce genre de questions, tout simplement parce qu’il n’avait pas de connaissance innée qui l’aurait aidé à comprendre tout cela. Tout comme le Suski, il essayait de trouver sa place en faisant sa vie, sans trop piétiner sur celle des autres. Une serveuse vint les interrompre, leur demandant s’ils avaient besoin de quelque chose d’autre pendant qu’elle débarrassait le tout – ce qui fit tourner Leonardo vers Adam. « À moi de t’offrir la boisson de ton choix, pour te remercier du pain au chocolat. Si t’as encore soif, bien sûr. » Après tout, à force de parler il était lui bien assoiffé.
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Message(#)Raisons & Sentiments, mais surtout sentiments - Page 2 EmptyLun 3 Déc 2018 - 15:57

— Hmm… ?

Adam leva les yeux vers la serveuse, qui fit l’effort de lui adresse un sourire patient, même si le café ne désemplissait pas et qu’il y avait sans doute fort à faire.

— Un thé, s’il vous plaît. Noir.

La commande passée, la demoiselle hocha la tête avant de disparaître. C’était bien la première fois qu’Adam passait autant de temps dans un café à discuter avec quelqu’un sans y être poussé par les nécessités de son travail. Mais la conversation avec Leonardo l’absorbait bien plus qu’il ne l’aurait cru de prime abord, et elle avait sauté librement, et naturellement, d’un sujet à l’autre, sans que l’Australien ne se soucie vraiment du temps qui passait.

À vrai dire, il avait même oublié ce qui l’avait poussé à l’origine à traquer le jeune homme. Dans quelques heures, sans aucun doute, la douleur d’avoir été définitivement trahi par Koji ferait retour, et il se poserait toutes sortes de questions sur les autres amants que son compagnon avait peut-être collectionnés, sur les mensonges, sur les faux-semblants, mais, pour l’heure, l’échange avec Leonardo s’était substitué à ses préoccupations.

— Merci pour le thé, lui dit-il, alors que, de l’autre côté des baies vitrées du café, le soir commençait à tomber sur Brisbane. Après, tu vois, je comprends que les gens soient pas toujours nécessairement dans, comment tu dis ? L’écoute et le respect. On voudrait tous être des saints, mais la vérité, c’est qu’il faut faire des efforts, et que parfois, on a juste envie d’être avec des gens comme nous, qui pensent comme nous, et tout ça. Et, en un sens, c’est bien naturel. On peut pas exiger constamment des gens qu’ils fassent des efforts émotionnels et cognitifs.

Adam ne s’était jamais senti très proche des révolutionnaires de l’immédiat, qui imaginaient qu’un changement radical de la société pouvait se produire sans attendre, sans aucune préparation et sans aucune transition. Pour lui, c’était à la fois manquer de pragmatisme et manquer d’humanité.

— Après, bon, faut que je fasse un aveu.

Il s’interrompit pour remercier la serveuse qui venait leur apporter leurs nouvelles consommations, avant de plonger à nouveau son regard dans celui de Leonardo.

— J’suis catholique. Pas étonnant, tu vas me dire, pour un Polonais. Mais je veux dire, je vais à la masse, je vais à la confession, tout ça. Du typique, quoi.

Un typique très atypique, si l’on considérait son orientation et sa véritable profession.

— Et c’est sûr que je préférerais que l’Église soit… Radicalement différente. C’est sûr que quand je lis ce que le pape raconte sur le clergé homosexuel, ça me désole, quand j’entends les évêques, ça me désole, quand je les vois s’opposer tous au mariage gay, ça me désole. C’est super difficile comme situation, être ce que je suis, ne pas en avoir honte, et en même temps être intégré à ma communauté religieuse. Et y a cent milles raisons de critiquer cette Eglise, et d’ailleurs la plupart des organisations religieuses dans le monde.

Et l’opposition à l’homosexualité n’était même pas la principale, aux yeux d’Adam. La pédophilie, les droits de la femme, le néo-colonialisme, l’anti-scientisme, il y avait tant d’attitudes problématiques, qui menaçaient chaque jour un peu plus sa foi et sa volonté de persévérer dans son culte.

— Mais quand je vois d’où partent certains de mes coreligionnaires. J’veux dire, quand je vois leur niveau de… D’obscurantisme, oui. Je me dis que c’est pas raisonnable d’exiger d’eux une ouverture d’esprit radicale du jour au lendemain. J’aimerais bien, mais c’est juste pas possible. Faut parfois se contenter d’un tout petit peu. Et continuer à pousser. C’est super frustrant, et un peu déprimant, c’est une solution de l’ordre du moins pire et pas du tout du meilleur, mais c’est la réalité avec laquelle on compose.

Il était évident à l’entendre parler que sa place au sein de l’Église catholique n’était pas celle d’un plein épanouissement. C’était la foi et la spiritualité, qui l’y maintenaient, beaucoup plus que la participation communautaire.

— Et je suppose que de la même façon, un mec comme moi, dans une soirée de drag queens, c’est… Comme un cheveu sur la soupe. Une sorte de vague menace. Je sais pas. Même si ça me frustre, je comprends que quand on porte pas dans son identité les principaux codes communautaires, on puisse avoir du mal à s’intégrer.

Adam esquissa un sourire d’excuses à l’intention de Leonardo.

— ‘Fin bon, désolé, tout ça, c’est bien philosophique. Je passe pas non plus mon temps à me débattre dans mes doutes existentiels, hein. Je voudrais pas passer pour un mec torturé ou quoi. Une petite crise de la trentaine, peut-être, à la rigueur. Tant que j’arrive à réfréner des pulsions comme m’acheter une grosse moto, adopter une coupe de cheveux bizarres ou mettre des jeans slims, je pense que je devrais arriver à m’en sortir.
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Message(#)Raisons & Sentiments, mais surtout sentiments - Page 2 EmptyLun 10 Déc 2018 - 10:07

Leonardo prit son nouveau thé, le portant rapidement à sa bouche pour le siroter pendant qu’Adam reprenait la parole. Une telle révélation n’était pas des plus choquantes – le cas de la Pologne semblait bien similaire de celui de l’Italie, et s’il n’y avait jamais habité ça ne lui empêchait pas d’avoir connu à de maintes reprises ce pays-là. Et si la religion était présente chez les Grimes, ça n’avait jamais été une question de foi pour leur père, qui ne croyait qu’au pouvoir de son argent. Quant à elle, leur mère avait essayé de les élever dans la même foi que la sienne, sans trop de succès – du moins dans le cas de Leonardo, qui s’était bien vite rendu compte qu’il n’avait pas envie de supporter tant de formalités pour sa famille. Ainsi, ces questions que le Suski s’était posé… le Grimes n’avait jamais ne serait-ce qu’eu le temps de les envisager. Son rapport à l’Église et au Pape étaient strictement extérieurs, ce qui faisait qu’ils n’étaient peut-être pas des plus tendres quand on y réfléchissait, mais ce n’était pas une question qui tombait sur le tapis très souvent. Presque jamais, à vrai dire – de tête, il ne connaissait pas grand-monde de croyant, encore moins de bien pratiquant. « Je peux comprendre dans une certaine manière. Pour te dire… ma grand-mère italienne, elle est choquée que je sois encore célibataire et sans femme ni enfants à bientôt trente ans. Donc voilà, c’est sûr qu’il lui faudra du temps quand je lui dirai pour se faire à la nouvelle, mais… » Il posa un instant sa tasse en carton sur la table, se rappelant de tout ce qu’on avait pu lui dire sans forcément savoir que ça lui était adressé, en fin des comptes. « Je la vois très mal en arriver au point où elle me dirait que je suis un suppôt du diable, ou que je suis un erreur de la nature, ou que Dieu n’a pas prévu ça pour moi… t’vois le petit scénario, quoi. » Adam en avait sûrement entendu tout autant, peut-être même plus – ce genre de commentaires ne lui était sûrement pas inconnu. « Après voilà. C’est sûr qu’on peut difficilement espérer que tout change du jour au jour. Mais je peux pas en vouloir aux gens d’être remontés en entendant ce genre de choses. » Pour l’énième fois depuis le début de leur discussion, Leonardo haussa des épaules. À la fin de la journée, ce genre de questions ne se posait que très théoriquement pour le Britannique, et ç’en était sûrement mieux de la sorte. « Et si ça peut te rassurer, je suis pareil que toi – muscles en moins, évidemment. » Et pas qu’un petit peu, ce qui rendait la comparaison quelque peu triste de son côté à lui. « Mais plus sérieusement… ça non plus, je peux pas trop le condamner au vu de tout ce qu’ils peuvent se prendre dans la gueule. Et c’est pas comme si moi ça m’empêchait de vivre, t’sais ? » Et comme il s’agissait de questions bien trop théoriques pour qu’il puisse en appliquer la réponse dans sa vie de tous les jours, il ne se le posait souvent pas. Il ne s’embêtait pas des masses avec ce qui n’était pas directement utile, tout simplement parce qu’il avait déjà beaucoup d’autres chattes à fouetter. « Et niveau crise de la trentaine qui approche, on est tous dans le même bateau, ça arrive à tout le monde. T’as bientôt trente piges, tout le monde ou presque se marie ou fiance ou a des gosses… et toi t’es là avec tes chats. ‘Fin. Ça c’est juste moi, mais quand-même. » On pouvait peut-être dire qu’il remplaçait son besoin de paternité et sa solitude avec le fait de s’occuper de petits félins, mais… ça ne faisait que rendre le constat encore plus triste. Du coup, il essayait de présenter les choses autrement, mais les gens n’étaient que très rarement dupes.


Dernière édition par Leonardo Grimes le Jeu 13 Déc 2018 - 15:14, édité 1 fois
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Message(#)Raisons & Sentiments, mais surtout sentiments - Page 2 EmptyJeu 13 Déc 2018 - 11:43

Un silence embarrassé suivit leur constatation commune qu’ils étaient à deux doigts de la retraite et du célibat perpétuel. Presque. Même s’ils avaient encore la plus grande partie de leur vie devant eux, les deux garçons faisaient leur bilan comme des vieillards.

Les yeux un instant perdus dans ses propres pensées, Adam finit par relever le regard vers Leonardo et, d’une voix un peu timide, risquer :

— Tu sais, moi, personnellement, je trouve que tu…

Mais il fut interrompu — et peut-être sauvé — par la sonnerie de son téléphone. Minimaliste. Discrète. Le jeune homme

— Désolé.

Le Polonais tira le téléphone de la poche de son blouson, jeta un coup d’oeil sur l’écran avant de répondre, en mandarin. Sa participation à la conversation fut une démonstration de laconisme, presque essentiellement constituée de quelques syllabes répétées de temps à autre, qui devaient probablement vouloir dire « oui » et « non ». Son visage avait pris un air bien sérieux, pour ainsi dire professionnel.

La discussion téléphonique dura moins d’une minute, avant qu’Adam ne raccroche.

— Va falloir que j’y aille.

Et précisément, qu’il prenne le premier avion disponible à la base militaire du coin, pour se parachuter au large de la côte coréenne et crapahuter dans la jungle dans la plus grande discrétion. Une semaine comme les autres.

À devoir partir d’un coup, comme ça, il se rendit compte qu’il avait conversé longuement avec Leonardo, et beaucoup plus facilement qu’il ne l’avait fait depuis des semaines, peut-être des mois, avec qui que ce soit. Quand il songeait aux raisons qui l’avaient poussé dans ce café au tout début, il avait l’impression que sa vie avait changé d’un coup, sans qu’il parvienne à trop comprendre pourquoi ni comment.

— Si jamais…

Adam pianota quelques secondes sur le bord de la table, du bout des doigts. Pour quelqu’un qui s’apprêtait à jouer les commandos dans l’un des pays les plus hostiles de la planète, il manquait soudainement de façon curieuse de confiance en soi.

— ‘Fin, tu sais, si jamais tu veux encore parler, ou, je sais pas… Visiter l’épicerie…

Visiter l’épicerie ?
Sérieusement ?

— Oui, en fin, je veux dire… Autre chose que l’épicerie. Bref…

Il ne restait qu’à espérer que l’espion était plus à l’aise quand il s’agissait de se fondre dans la foule des dîners diplomatiques des puissances étrangères.

— Tu vois. Quoi. Si jamais. Tu as ma carte.

Adam lui-même ne savait pas très bien ce qu’il était en train de proposer, ni même pourquoi. Une rencontre amicale ? Un groupe de soutien informel pour trentenaires à la dérive ? Quelque chose qui ressemble plus à un rendez-vous galant ? Peut-être qu’il était inutile de se poser la question. Qu’il suffisait de vouloir préserver et prolonger cette conversation comme il en avait eu si peu.

Le jeune homme se décida à se relever et à enfiler son blouson. Partir sans rien dire d’autre ? Glisser ce qu’il avait au fond de l’esprit ? Les mains sur le dossier du fauteuil, il se résolut à dire, du ton le plus dégagé possible :

— Et, hm, si je peux me permettre, mais j’dis ça, je dis rien, je pense pas que tu finisses tout seul avec tes chats. Les garçons comme toi, c’est pas destiné au célibat.

Leonardo était gentil, ouvert, facile à la conversation et plutôt mignon, et surtout, surtout, il n’avait pas l’air d’avoir une vie trop compliquée. N’était-ce pas une situation idéale ?

— Bref. Salut. Merci pour… Le soutien moral et tout ça.

Avec un sourire un peu incertain, Adam se décida enfin à tourner le dos et quitter le café à grands pas. Dans la rue, poussé par un esprit de résolution, il s’arrêta devant la vitrine du café pour dégainer son portable et composer un message à l’intention de Koji.

Citation :
Je serai en voyage d’affaires jusqu’à lundi, mais ce serait bien qu’on se voit le soir de mon retour pour discuter.

Et déjà, en appuyant sur « Envoyer », il se sentit un peu plus léger.
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Message(#)Raisons & Sentiments, mais surtout sentiments - Page 2 EmptySam 5 Jan 2019 - 19:35

Le silence embarrassé qui suivit le triste constat de leur solitude et de l’âge qui avançait doucement mais sûrement fut comblé tant bien que mal par Leonardo par quelques gorgées de thé, histoire de dire que s’il ne parlait pas, c’était juste parce que sa bouche était occupée. Et si Adam reprit la parole d’un air bien plus hésitant que celui que le Grimes avait connu jusque-là, il fut bien vite arrêté par la sonnerie de son téléphone. La conversation du Polonais ayant eu lieu en mandarin, il n’aurait de toute façon pas vraiment pu comprendre de quoi il avait pu parler, même avec tous les efforts du monde – et de toute façon, ce n’était absolument pas ses affaires en fin des comptes. Il continua donc de siroter bien silencieusement son thé, touchant malheureusement la fin de son cher gobelet. Bien heureusement, le Suski raccrocha à ce moment-là – expliquant assez brièvement qu’il devait y aller. La curiosité de Leonardo avait été piquée – pourquoi partir en toute vitesse ? Le travail ? Une urgence familiale ? Koji ? Et s’il avait bien envie de savoir ce qu’il pouvait bien se tramer, il se tut au sujet – après tout, ils venaient à peine de se rencontrer, et peut-être pas dans les meilleures conditions qui soient. « Pas de soucis, t’en fais pas pour ça. J’ai encore plein de boulot à faire de mon côté, de toute façon. » D’un haussement des sourcils, il pointa assez tristement à son ordinateur – s’il devait être honnête, il savait tout autant qu’Adam que sa productivité n’allait pas vraiment être au rendez-vous, malgré les obligations qui l’attendaient patiemment. Après tout, s’il avait vraiment été dans l’urgence, le Suski ne l’aurait pas pris en flagrant délit sur Facebook. Adam ramassa ses quelques affaires avant de se relever – mais il s’arrêta net dans son élan, attirant une nouvelle fois la curiosité de Leonardo, à qui il ne fallait peut-être pas grand-chose. Si le Grimes ne comprenait pas vraiment pourquoi le Suski mentionnait l’épicerie, il souriait doucement – histoire de le mettre à l’aise, et qu’il n’ait pas l’impression d’embêter le Britannique. Ce dernier savait ce que c’était de ne pas savoir où mener une conversation, et c’était très rare que quelqu’un soit encore plus empoté au sujet que lui. « Oui, pour le coup elle sera bien utile. Même si l’épicerie, ça doit pas être le coin le plus intéressant de Brisbane je crois. » Tout le monde aurait relevé des sous-entendus presque explicites dans la proposition d’Adam, mais pas Leonardo. Il avait un peu de mal avec les énoncés du genre, qui lui passaient très joyeusement sous le nez en toute circonstance. Et si la mention de l’épicerie était bien singulière, il ne se posait pas trop de questions au sujet. Ça arrivait à tout le monde de ne pas trop savoir quoi dire et sortir la première bêtise qui passait en tête, n’est-ce pas ? Le Grimes croyait que leur échange touchait à sa fin, mais visiblement ç’en était pas autant pour le Suski – mais celui-ci laissa le Britannique avec encore plus de questions qu’avec l’épicerie. Qu’est-ce que c’était, un garçon comme Leonardo ? Et pourquoi Adam pouvait bien lui dire ça ? Malheureusement, le départ en toute vitesse du Polonais ne lui laissait pas l’occasion de chercher des réponses à toutes ces questions, et il se contenta de le saluer d’un geste de la main, le sourire aux lèvres. « Pas de soucis, toujours là pour ça. Et… à la prochaine, du coup. » En voyant le Suski disparaître par la porte d’entrée du café, Leonardo ne pouvait s’empêcher de réfléchir quant à la singularité de leur rencontre – mais pour le coup, il préférait que les choses restent ainsi.
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