Duncan était rentré d’Afrique depuis seulement deux jours. La première journée, il l’avait passé avec sa mère, la seule personne qui lui restait dans sa famille. Ensuite, elle lui avait la surprise de lui avoir trouvé une maison à louer dans Logan city. Cette maison était parfaite, pas trop grande mais confortable pour une personne seule. Pour ce qui était de ses affaires, elle y avait stocké tout ce que lui-même avait stocké dans son garage avant de partir pour sa mission humanitaire. Le hic ? C’est que tout cela remonter à l’époque de son internat et il se retrouvait donc avec des affaires d’appartement comme un clic-clac qui n’avait plus rien à faire dans un grand salon. Du coup, le jeune homme c’était accordé cette deuxième journée pour faire le tri dans ses affaires. Il avait loué un camion de déménageur et faisait des allers retours pour échanger les nouveaux meubles avec les anciens.
La journée était plutôt chaude et il s’était donc habillé simplement pour ne pas avoir trop chaud, un simple jean et un débardeur blanc, une chemise par-dessus et le tour était jouer. De toute façon, il n’attendait personne. Il avait un millier de choses en tête et ne faisait pas vraiment attention à son environnement, plusieurs personnes étaient sortis de chez elles pour voir qui était le « nouveau » dans la rue. Il y avait beaucoup de couple marié ou avec des enfants et cela devait surement paraitre étrange qu’un célibataire s’installe ici. Mais Duncan avait passé un certain cap de sa vie, la trentaine et il n’était plus question pour lui de vivre dans un appartement dans un centre ville bondée vingt-quatre heures sur vingt-quatre.
C’était le milieu de l’après-midi quand Duncan s’autorisa une pause. Il rentra à l’intérieur de chez lui constatant l’effort qu’il avait du faire pour rentrer le nouveau canapé, vu qu’il était juste posé en pleins milieu de la pièce. Il soupira légèrement le poussant contre le mur et se rendit jusque dans sa cuisine qui était ouverte au salon, on appelait cela parfois le style « américain ». Il sortit une bière bien fraiche de son frigidaire, la décapsulant pour en avaler une longue gorgée. Il entendit ensuite frapper à la porte et se mit à penser qu’il fallait qu’il installe une sonnette. Il voulait crier un « entré ! », pour éviter de bouger d’où il était. Mais c’était peu probable que se soit quelqu’un qu’il connaisse, sa mère aurait appelé avant de venir. Il se rendit alors jusqu’à la porte d’entrée posant sa bière sur le comptoir de la cuisine pour ouvrir.
Quand il ouvrit la porte, il découvrit alors une jeune femme qu’il ne connaissait pas. Elle était plutôt très jolie et il ne pu s’empêcher de sourire quand ses yeux croisèrent son regard. Il espérait ne pas avoir fait trop de bruit en bougeant tout son bazar dans cette rue qui avait l’air très calme. Il pencha légèrement la tête sur le coté puis se mit à parler.
-Bonjour…
Il n'ajouta rien d'autre sur le moment, bien trop impatient de savoir à qui il avait l'honneur de pouvoir parler. Après tout, c'était peut-être une voisine et valait mieux tisser de bon lien avec que d'être la personne qu'on évite dans le quartier.
« (…) Et puis sinon, t'as pas entendu la nouvelle? » Je me déplaçais dans mon salon, le téléphone fixe vissé à l'oreille. « Non, dis-moi! » Il était neuf heures et demie du soir, j'étais en train de m'apprêter à aller promener notre chien quand Alex vint m'apporter le téléphone. Au bout du fil n'était nulle autre que ma voisine, Kate. Cela faisait à présent une heure que nous conversions, j'avais fini par abandonner l'idée d'aller promener Diana. Alex s'était ensuite proposé de s'en charger, voyant que je n'allais pas décamper. Je lui fis un signe de la main à travers la fenêtre. La nuit était tombée à Brisbane et le quartier semblait calme. J'entrepris ensuite de m'asseoir dans l'un des sofas de notre énorme salon. J'étais tranquille, je pouvais parler de tout ce dont je voulais, sans qu'Alex ne vienne m'espionner. Non que l'on ait des problèmes de confiance dans notre couple, au contraire, mais parfois je tenais à avoir mon jardin secret. « Y a un petit nouveau dans le quartier. Un médecin apparemment… » Kate semblait vague, à vrai dire je doutais qu'elle n'en ait quelque chose à faire, elle qui avait tant de problèmes. Néanmoins, il était dans notre coutume de se raconter les potins du coin, les cancans du voisinage et ma chère voisine ne faillait pas à la règle. « Mais encore? Il est beau? » Kate rît après ma question. « J'en sais rien, va voir par toi même! Je bosse tard demain donc va jeter un coup d'œil. Tu m'en diras des nouvelles! » Son ton semblait amusé. Je décidai de suivre son conseil et d'aller investiguer sur notre nouvel habitant le lendemain. Cela tombait également très bien, puisque je n'avais rien de prévu. Nous avions convenu de ne travailler exceptionnellement que le matin avec l'équipe, car nous avions veillé tard durant toute la semaine afin de préparer la prochaine édition du magazine. Je terminai ma conversation avec Kate avant de raccrocher quelques minutes plus tard. Alex n'était toujours pas rentré. Pas grave. Je me décidai à aller au lit.
Ma courte journée de travail fût épuisante. À vrai dire, nous n'aurions pas du raccourcir la journée, car cela revenait à travailler double la matinée. Voilà une leçon que je devais retenir pour l'avenir. Je me dépêchai de rentrer à la maison. Alex n'était pas là, il avait quelques visites à faire dans l'un des quartiers de la ville. J'étais encore une fois tranquille. J'entrepris de cuisiner quelques petits cookies à offrir à mon nouveau voisin. J'avais aperçu un camion de déménageurs en rentrant à la maison, ce qui me confirma que l'intéressé était bien chez lui. Je pris mon temps pour bien doser les ingrédients, je coupai moi même le chocolat en pépites et enfournai le tout. Je décidai ensuite d'aller me changer, après tout, la première impression était toujours la plus importante. Il faisait plutôt chaud pour une journée d'automne, j'optai donc pour un jean simple mais sophistiqué, une blouse de couleur corail et un gilet assorti. J'enfilai des baskets confortables, j'avais le look escompté: simple mais chic. Satisfaite, je descendis les longues marches qui menaient du premier étage à la cuisine. Les cookies était prêts. Je les sortis précautionneusement du four et les mis dans un panier vintage que j'avais chiné quelques temps auparavant. Je déposai quelques croquettes destinées à mon chien et sortis de ma vaste demeure. Je marchai quelques mètres d'un pas décidé, mon petit panier en main. Arrivée devant la maison de mon nouveau voisin, je remarquai qu'il n'y avait pas encore de sonnette. J'haussai un sourcil et tapa contre la porte, en espérant ne pas déranger le principal intéressé. Ce dernier m'ouvrît la porte et me sourît aussitôt. « Bonjour… » Je restai bouche bée. Qu'est-ce qu'il était beau, bon sang! « Bonjour. Je m'appelle Chloë Fox-Constantine, je suis votre nouvelle voisine! Je vous ai apporté des petites douceurs en guise de bienvenue » Je lui tendis mon panier, les cookies étaient encore chauds et dégageaient une odeur exquise. Il avait l'air ravi, moi de même. J'attendis qu'il m'invite à entrer. J'étais curieuse d'en savoir plus sur lui et surtout de voir dans quel environnement il vivait, comment était sa maison, pour quel style de décoration avait-il opté, bref, une vraie curieuse.
Quand la jeune femme se présenta à lui, alors il pinça légèrement sa lèvre inférieure entre ses dents avant de finir par sourire une nouvelle fois. Il ne se doutait pas un instant qu’en s’installant dans un quartier comme celui-ci, les voisins, encore mieux les voisines, viendraient lui souhaiter la bienvenue. De mieux en mieux, elle lui tendit un panier dont l’odeur vint immédiatement lui chatouiller le nez. Il adorait tout ce qui était à base de chocolat, c’était un vrai problème qu’il essayait de régler en s’accordant une matinée voir deux en cas de gros écart, de course à pieds. Mais du chocolat, il n’avait pas eu vraiment l’occasion d’en manger en Afrique, mais à l’aéroport il n’avait pas résisté à ces gros bloques de Tobleronne qui étaient vendu avant l’embarquement. Son regard se reposa donc sur Chloë, sa charmante et nouvelle voisine.
-Enchantée, je m’appelle Duncan Wilde et je suis donc, votre nouveau voisin.
Il s’écarta de la porte, pour libérer l’entrée de sa maison, ça aurait été mal poli de sa part, de lui dire de partir en prenant tout de même les cookies. De plus, il venait juste de s’accorder une pause et avoir de la compagnie n’était pas de refus. Pour ce qui était de la décoration de sa maison, c’était très simple. Il louait pour le moment ce domaine et son propriétaire avait été très stricte sur le fait qu’il ne devait en aucun touché à la peinture des murs ou du carrelage au sol. La seconde option qui s’était proposé à Duncan était d’y accrocher tout un tas de photos qu’il avait prit depuis environ… Toujours. Pour le reste, on remarquait tout de suite que c’était un lieu où seul un homme vivait, pas de fleurs, ni de bougies.
-Merci pour les cookies, vous tombez pile au bon moment, j’étais entrains de prendre une pause, ranger ce n’est pas ce que je préfère. Si vous voulez entrer un moment, se serait un plaisir pour moi de vous accueillir chez moi.
Duncan pensait bien qu’elle serait curieuse de voir l’intérieur de sa maison, alors il laissa la porte grande ouverte se dirigeant vers la cuisine qui était donc ouverte au salon. Il sortit une assiette du placard pour pouvoir y mettre les cookies et lui rendre directement son panier même s’il espérait secrètement peut-être la revoir dans le coin. Quand elle s’approcha du comptoir il se remit à parler.
-Et sinon, vous habitez dans ce quartier depuis longtemps ? Je suis de Brisbane mais j’habitais dans le centre-ville, depuis mon retour, bien des choses ont changés… Oh, je ne vous ai même pas demandé si vous vouliez quelque chose à boire ? Je dois avoir quelque chose comme… De la limonade ?
Il ne pu s’empêcher de faire une légère grimace essayant de deviner ce que pouvait bien boire les gens d’ici, ce n’était pas si simple que cela de s’intégrer dans ce genre de quartier. Il prit alors un cookie encore tiède entre ses doigts, ne résistant pas plus longtemps à croquer dedans. Il échappa surement un léger petit bruit incontrôlé au contact du chocolat sur ses papilles gustatives, il n’y avait pas à dire, elle était douée pour faire les cookies.
Le jeune homme mordit ses lèvres et mon cœur ne fit qu'un bond. Pourquoi réagissais-je de la sorte? Quel était mon problème? Je ne connais ce jeune home ni d'Eve ni d'Adam et pourtant, il exerçait déjà un effet sur ma personne, quelque chose d'envoûtant, de magnétique même. C'était peut-être sa barbe de trois jours, son côté négligé, cette petite odeur de bière, cette masculinité en somme, sa virilité qui m'attiraient. Non que mon homme ne fût pas viril, loin de là, mais dans un autre style. Alex avait été élevé dans le luxe. Il était un homme sûr de lui et qui aimait prendre soin de sa personne. Quelqu'un de propre, de net, de régulier. Même s'il lui arrivait souvent de faire la fête et de finir complètement débraillé, il n'en perdait jamais son élégance, sa touche de bourgeois Australien qui m'avait fait craqué il y a déjà quelques années. « Enchanté, je m’appelle Duncan Wilde et je suis donc, votre nouveau voisin » Un échange formel et pourtant, quelque chose m'excitait dans ce que venait de dire le jeune homme. Il était mon nouveau voisin, il n'habitait qu'à quelques mètres de ma vaste villa, il n'était qu'à quelques pas de venir boire un café à l'occasion, d'assister à l'un des nombreux barbecues qu'il me plaisait d'organiser, bref, de me tenir compagnie. La perspective de passer devant chez lui de temps à autre, de lui faire un rapide coucou, de le croiser ça et là quand j'allais promener Diana me réjouissait. C'était inné, une intuition, j'avais un bon sentiment concernant ce nouveau voisin. « Merci pour les cookies, vous tombez pile au bon moment, j’étais en train de prendre une pause, ranger ce n’est pas ce que je préfère. Si vous voulez entrer un moment, se serait un plaisir pour moi de vous accueillir chez moi » Ce dernier s'écarta de la grande porte en PVC et me laissa entrer dans son humble demeure. Je lui fis un grand sourire orné de dents blanches et pénétrai dans l'entrée. Sa petite maisonnette était de loin beaucoup plus petite que mon immense domicile mais je ne lui en tenais pas rigueur, apparemment il était célibataire, du moins je ne voyais rien de très féminin dans l'entrée. J'étais très perspicace quand il s'agissait de cela. J'avais également remarqué qu'il ne portait pas d'alliance, signe qu'il n'avait personne, du moins officiellement, dans sa vie. Des photos ornaient les murs de son entrée, je jetai un rapide coup d'œil dans leur direction. Des photos normales en somme, prises un peu partout à en juger les différents monuments présents. Duncan était donc un homme qui aimait voyager, qui aimait vagabonder même et qui n'avait pas l'air d'avoir d'attache. Il n'y avait pas de fleurs, pas de bougies, l'endroit était très sobre et la décoration pas vraiment recherchée. Je le suivis vers la cuisine en observant tous les détails me menant à la pièce. Arrivée à sa hauteur, au niveau du comptoir en marbre de la cuisine, j'attrapai le panier qu'il me tendit. « Et sinon, vous habitez dans ce quartier depuis longtemps ? Je suis de Brisbane mais j’habitais dans le centre-ville, depuis mon retour, bien des choses ont changés… Oh, je ne vous ai même pas demandé si vous vouliez quelque chose à boire ? Je dois avoir quelque chose comme… De la limonade ? » Je ris en entendant sa proposition. De la limonade, moi? Il ne savait pas à qui il s'adressait. Je n'allais quand même pas commencer à lui exposer mes goûts de luxe de vraie Australienne embourgeoisée et décidai d'opiner à sa proposition. « De la limonade, très bien! » J'y mis d'ailleurs un peu trop d'enthousiasme, ce qui eût don de faire sourire le jeune homme. Je décidai ensuite de répondre à sa première interrogation. « J'habite à Brisbane et ici à Logan City depuis le collège… Mes parents n'habitent pas très loin, à quelques rues d'ici…» Je ne savais pas pourquoi mais lui parler d'Alex n'était pas une priorité pour moi. Je décidai d'ignorer le sujet jusqu'au moment où il allait me le demander. « On peut se tutoyer? » Je n'aimais pas toutes ces formes de politesse, que je trouvais bien trop pompeuses. Le jeune homme accepta et j'entrepris de lui poser plus de questions. « Ton retour? D'où? Que fais-tu dans la vie? » J'appuyai ma tête contre mon bras et l'observait avec insistance lorsqu'il attrapa l'un de mes cookies et le dégusta avec délectation. Un sentiment de jouissance prit possession de mon corps en le voyant littéralement adorer mes petits présents. Je lui fis mon plus beau sourire. « Ravie que mes cookies te plaisent… J'en déposerai dans ta boîte aux lettres de temps en temps » Je lui fis un clin d'œil. Je n'irai bien évidemment pas en déposer dans sa boîte, je me ferais un plaisir de lui rendre visite, plutôt.
Au rire de sa jolie voisine, Duncan comprit qu’elle ne buvait surement pas de la limonade en temps normal mais il avait vraiment aucune idée de ce que l’ont pouvait boire ici. Alors il sortit un verre, versant le liquide à l’intérieur. Un sourire se dessina au coin de sa bouche quand une idée lui vint en tête. Il chercha dans un tiroir tout juste rempli, une paille et une sorte de petite décoration que l’on met dans les verres durant les fêtes ou peut-être même durant les barbecues d’après-midi. Il se tourna ensuite vers elle, qui était de l’autre coté du comptoir, posant le verre face à elle. Quand elle lui demanda s’il pouvait se tutoyer, il hocha simplement la tête pour dire qu’il était d’accord et prit la parole à son tour.
-Je vois, tu es plutôt habitué à ce quartier, tu vas pouvoir m’apprendre, tout ce qu’il y a à connaitre. J’habitais dans le centre-ville avant, rien à voir avec ici, mais c’est plutôt sympa.
Il bu une gorgée de sa bière et ne pu s’empêcher de remarquer l’alliance, à l’annulaire de sa voisine quand elle attrapa son verre. Pour une raison qu’il ne serait expliqué, cela lui provoqua un petit pincement au ventre. Pourtant, il ne la connaissait pas, du moins pas pour le moment et quand elle avait franchi sa porte, il ne s’était rien imaginer. Il montra alors son alliance du bout de son goulot de bouteille.
-Cela fait longtemps que tu es marié ?
Il s’installa sur l’un des tabourets et l’invita à faire de même. Il la regarda dans les yeux quand elle posa à son tour, des questions sur lui et son passé. Beaucoup de personnes ayant son statut de chirurgien en aurait profité pour prendre un air supérieur voir pompeux pour juste se montrer et affirmer qu’ils étaient supérieurs et au dessus des autres mais Duncan n’était pas ainsi alors il répondit de manière simple comme si elle lui demandé quelle était sa couleur préférée.
-J’étais en Afrique, après mon internat pour devenir chirurgien, je me suis spécialisé en cardiologie et je suis parti faire de l’humanitaire. Maintenant, je suis de retour pour essayer de faire accepter certaines choses à l’hôpital, comme ouvrir un budget pour faire venir un bon nombre d’enfants que je n’ai pas pu opérer là-bas par exemple… Beau projet n’est ce pas ?
Duncan inclina sa tête un peu sur le coté, regardant toujours Chloë. En fait, il scrutait la moindre de ses réactions. Un sourire presque angélique se dessina sur sa bouche alors que le cookie qu’il avait attrapé venait à la rencontre de ses lèvres. Il aurait bien dévoré toute l’assiette mais ça n’aurait vraiment pas été poli et ça même en plein centre-ville. Quand elle parla de mettre d’autres cookies dans sa boite aux lettres, il ne pu s’empêcher de rire tout en lui répondant.
-Je crois que se sera un peu à l’étroit pour des gâteaux de se retrouver dans une boite aux lettres, le mieux encore serait que tu viennes sonner à ma porte,dit-il en lui renvoyant son clin d’œil. Enfin quand j’aurais installé la sonnette bien sur !
A première vue, les deux jeunes gens étaient très différents l’un de l’autre. Le genre de personnes qui n’étaient pas du tout destiné à se rencontrer. Mais le destin était parfois étrange, il en décidait autrement même si cela pouvait provoquer de gros bouleversement dans leur vie. Mais n’étais-ce pas ça en réalité vivre ? Prendre des décisions, des chemins et faire des rencontres qui n’auraient pas du avoir lieux ? La vie était parfois étrange mais quand elle nous obligeait à sortir de notre train-train quotidien, malgré les choix qui en découlaient, on ne pouvait que lui dire « merci ».
Lorsque le jeune homme s'éclipsa quelques secondes dans l'un des tiroirs de sa cuisine pour en sortir des pailles et des sortes de mini-parasols pour cocktail, je ne pus m'empêcher d'émettre un rire. Il m'amusait. C'était bien la première fois qu'un homme m'amusait autant en ne faisant rien d'extraordinaire. Je ne savais pas pourquoi je réagissais de la sorte, je n'avais pourtant rien mis de suspect dans mes cookies, pas de vapeurs bizarres, pas de poudre magique… « Je vois, tu es plutôt habituée à ce quartier, tu vas pouvoir m’apprendre, tout ce qu’il y a à connaitre. J’habitais dans le centre-ville avant, rien à voir avec ici, mais c’est plutôt sympa » J'hochai la tête. Il y avait plein de jolies choses à voir par ici, bien que je ne m'en souvenais plus si bien. À vrai dire, je passais beaucoup plus de temps dans le centre-ville que chez moi, moi qui travaillais à longueur de temps. « Il y a de chouettes trucs à faire, je te montrerai. Si mon emploi du temps me le permet… » Un petit silence s'installa et je poursuivis. « Je vais souvent promener mon chien dans le parc au bout de la rue. Sinon, les autres voisins sont cool aussi, pas autant que moi mais bon…» Je lui fis un clin d'œil et remarquai son sourire en coin qui me faisait étrangement pas mal craquer. Je le vis ensuite poser les yeux sur mon alliance. Aïe. « Cela fait longtemps que tu es mariée ? » Je baissai les yeux et répondis d'une manière évasive, presque expéditive. « Oui, ça fait six ans que nous sommes ensemble. On s'est marié il y a à peu près un mois… » Je m'installai ensuite sur l'un des tabourets après l'invitation du jeune homme. « J’étais en Afrique, après mon internat pour devenir chirurgien, je me suis spécialisé en cardiologie et je suis parti faire de l’humanitaire. Maintenant, je suis de retour pour essayer de faire accepter certaines choses à l’hôpital, comme ouvrir un budget pour faire venir un bon nombre d’enfants que je n’ai pas pu opérer là-bas par exemple… Beau projet n’est ce pas ? » Oh mon dieu, épouse-moi. Mon corps ne répondait plus de moi, mon cerveau était en train d'imaginer ce véritable philanthrope, es mains sûres d'elles qui s'occupaient de cœurs malades… Je finirai presque par avoir envie qu'il chipote au mien, tiens. Et pas qu'au cœur. Bref, je me perdais. J'hochai la tête avec admiration. Autre chose que mon agent immobilier de mari. « Impressionnant. C'est beau oui… J'espère que ça aboutira à quelque chose… » L'image d'un sauveur me vint à l'esprit. Mais qui diable a pu bien mettre un tel personnage sur mon chemin? Mon corps défaillait déjà. « Je crois que se sera un peu à l’étroit pour des gâteaux de se retrouver dans une boite aux lettres, le mieux encore serait que tu viennes sonner à ma porte » Son clin d'œil me fit fondre un peu plus. La réponse était celle que j'attendais. Je ne pus m'empêcher d'avoir un sourire satisfait. « Enfin quand j’aurais installé la sonnette bien sur » Je le regardai boire sa bière avec envie. Envie d'être à la place de la bouteille, bien évidemment… Je me délectai de chacun de ses gestes. "Bouh, stop, Chloë. Qu'est-ce qui te prend?!" Je me ressaisis et me tint droite sur le tabouret. Je pris ensuite un air plus sérieux. « Je peux demander à mon mari de te donner un coup de main pour le déménagement, si tu veux » Je priai intérieurement pour qu'il refuse la proposition. D'une part parce qu'Alex était incapable d'un tel service et d'autre part parce qu'une petite voix dans ma tête me disait de ne jamais réunir les deux hommes dans la même pièce.
Le jeune homme eut un léger sourire presque pas visible quand il l’entendit rire. Il adorait le son que procurait son rire et il la regarda dans les yeux un instant avant de boire une seconde gorgée de sa bière. C’était plutôt un bon point s’il la faisait rire, non ? Même si c’était en faisant le pitre devant elle. Il écouta attentivement ce que lui disait Chloë sur le quartier, c’était assez important qu’il puisse trouver sa place parmi ces gens. Il hocha doucement la tête en riant à son tour quand elle parla des autres habitants du quartier ou qu’elle lui montrerait les lieux seulement si elle avait le temps. Il espérait vraiment qu’elle puisse en trouver le temps.
-Je vois… Si tu es la plus cool du quartier, alors j’espère vraiment que tu trouveras une place dans ton agenda très serré pour revenir me voir, sinon je vais drôlement m’ennuyer ici.
Il ne pu s’empêcher de prendre un petit visage triste en la regardant faisant une petite moue. Cela ne dura pas longtemps car il ne résista pas à son envie de sourire. Il reprit ensuite son sérieux puisque le sujet abordé n’était surement pas celui dont il avait envie d’entendre parler mais il fallait mieux qu’il soit fixé sur sa relation amoureuse et se fut presque un coup de masse. Six ans et maintenant marié. C’était énorme pour lui qu’une relation puisse durée six ans. Déjà une année, c’était extrêmement long à moins de rencontrer son âme sœur mais il ne vivait pas dans un conte de fée. Il prit alors un sourire sincère mais surement un peu déçu également.
-Félicitations, je crois que je n’ai jamais connu quelqu’un qui soit resté aussi longtemps avec une autre personne alors tu as tout mon respect.
Duncan préféra ensuite changer un peu de sujet pour en revenir à ses années en Afrique. C’était un sujet plutôt banal pour lui qui lui faisait oublier que sa sublime voisine était mariée. Elle avait l’air de porter intérêt à ce qu’il faisait et cela lui faisait plaisir. Certaines personnes montraient un désintérêt complet pour sa mission en Afrique ne comprenant pas comment un homme pouvait abandonner son pays et son métier pour aller s’expatrier dans un pays comme l’Afrique pour gagner une misère puisque c’était en partie du bénévolat. Duncan avait toujours envie de répondre à ces gens là qu’il fallait avoir un cœur et que c’était sa spécialité à lui. La plus part du temps, il ne répondait pas ou hochait simplement la tête. Inutile de donner intérêt à ce que pouvait dire ces gens là, avocat ou bien même banquier.
-Merci c’est gentil. J’espère aussi, bon il va me falloir un certain avant d’y arriver certainement mais je ne lâcherai pas, après tout il faut voir au-delà de l’Australie.
Chloë renchérie sur une réplique parlant de son mari et Duncan ne voulait surtout pas paraitre malpoli en lui disant qu’il n’avait aucunement envie de voir le petit chanceux qui avait la chance de rentrer chez lui pour voir sa femme, surement qu’elle lui préparait autre chose que des cookies. Un frisson le parcouru et il se ressaisit assez vite.
-Je ne voudrais pas imposer à ton mari de m’aider à déménager mais s’il veut boire une bière devant un match ou autre, tu peux alors lui dire qu’il y a un nouveau voisin dans le quartier !
Le temps était passé malgré tout et même s'il ne voulait pas voir sa voisine quittait sa maison, s'était presque inévitable. C'était une rencontre qu'il n'oublierait pas et il ferait même peut-être tout pour la revoir. Il fallait qu'il trouve encore une raison valable mais il fallait aussi qu'il se calme car la demoiselle qui n'en était plus une était mariée.
À vrai dire, je ne connaissais pas énormément de monde dans le coin. J'y habitais depuis mes seize ans, certes, mais beaucoup de va-et-vient furent effectués. Il y avait mes voisins directs du temps où je vivais encore chez mes parents qui avaient déménagé pour Canberra il y a peu. Il y avait également ma voisine directe, Kate, qui venait boire un verre de temps en temps à la maison. Très rarement, d'ailleurs, puisque je n'étais quasiment jamais chez moi. Il y avait Soren, un habitant de la rue qui promenait son jeune chien tous les soirs, en même temps que moi. Nous nous retrouvions souvent au parc afin de discuter de tout et de rien. Il était rare que j'aille rendre visite à un nouvel habitant. Duncan devait d'ailleurs être l'un des premiers. Je devrais peut-être remercier Kate de m'en avoir parlé au téléphone l'autre jour. Ou plutôt la maudire car le jeune homme exerçait sur moi un magnétisme indescriptible, quelque chose de risqué, voire même dangereux. « Je vois… Si tu es la plus cool du quartier, alors j’espère vraiment que tu trouveras une place dans ton agenda très serré pour revenir me voir, sinon je vais drôlement m’ennuyer ici » Sa petite attention à mon égard me toucha au plus profond. Il voulait donc me revoir… Je souris et me surpris en train d'imaginer quelle pourrait être mon excuse afin de lui rendre une seconde visite. Il faudrait peut-être que je me trouve un autre délicieux dessert à cuisiner, je ne vais surement pas revenir avec des cookies. Nous discutâmes ensuite pendant quelques minutes de mon boulot. Il avoua me porter un grand respect ainsi qu'une admiration quant au poste que j'occupais, même si au fond il n'avait aucune idée de ce que pouvait être la mode. Ce n'était clairement pas son truc. Il reprit ensuite son sérieux lorsque nous arrivions à parler de ma situation conjugale. Je remarquai son air pincé, comme s'il était dérangé que j'aie quelqu'un dans ma vie. Pour tout dire, je me sentais également coupable d'avoir quelqu'un, c'était bien la première fois que cela m'arrivait. Quel sentiment bizarre, je me sentais honteuse tout à coup. « Félicitations, je crois que je n’ai jamais connu quelqu’un qui soit resté aussi longtemps avec une autre personne alors tu as tout mon respect » J'avais donc affaire à un désillusionné, quelqu'un qui avait surement connu une mauvaise expérience, ou bien quelqu'un qui n'avait tout simplement pas encore rencontré la bonne personne. Je me gardais de lui faire une réflexion, ne vouant remuer aucun couteau dans aucune plaie. Il changea rapidement de sujet pour me parler de son projet humanitaire. Je l'écoutai avec admiration et le regardai presque avec amour, tant son humanité me touchait. Il ne m'était pas rare d'organiser des actions caritatives, mais cela semblait tellement ringard et désuet à côté de ce qu'avait fait le jeune homme. Après quelques minutes, je me ressaisis et lui proposa la pseudo-aide de mon mari. Il la refusa poliment, ce qui me soulagea au plus haut point. J'imaginai ensuite Alex venir boire une bière en regardant un match avec Duncan et des frissons me parcoururent aussitôt. Non, je ne sentais vraiment pas une cohabitation possible entre ces deux hommes si différents. Je lui répondis que je transmettrai son invitation à Alex, par politesse. Ce que je ne ferais sans doute jamais. Nous discutâmes encore pendant une bonne demi-heure de tout et de rien, faisant connaissance en croquant ça et là dans les cookies que j'avais préparé avec amour. Un coup de fil d'Alex nous interrompît et je dus malheureusement prendre congé de mon cher voisin. « Désolée Duncan, mais je dois y aller, obligation conjugale... Merci pour cette après-midi… » Je lui fis un sourire timide puis descendit du haut tabouret de sa cuisine. Il haussa les épaules, l'air dépité puis me raccompagna à la porte. Je repris mon panier et arrivés devant le seuil, je lui fis une bise qui me procura une sensation bizarre, presque gênante. « À bientôt Duncan… Et bienvenue chez nous! Si tu as un souci, sonne au 220! » Je m'éloignai de sa modeste maison d'un pas léger. Ce fût sans nul doute la rencontre la plus bizarre qu'il m'ait été donné de faire…
Plusieurs jours étaient passé depuis sa rencontre avec Chloë, il avait reprit sa nouvelle vie à Brisbane là où elle avait tout juste commencé sauf que ses pensés étaient toutes occupés la plus part du temps quand il était chez lui par la jeune femme. Il ne cessait de repenser à leur rencontre à ces quelques mots qu’il s’était tous les deux échangé, au fait qu’elle était marié… Il soupira se disant que c’était peine perdu d’espérer la revoir car elle devait avoir bien mieux à faire. Duncan commença à essayer de se vider l’esprit en vidant un carton de babioles qu’il n’avait pas encore défait plus par flemmardise qu’autre chose. Dedans, il y avait son diplôme de titularisation, il se rappelait au détail près, le jour où il avait juré sur l’honneur, la veille de son premier jour d’internat. Il sortit également de son carton une petite coupe qu’il avait gagné lors d’une soirée bien arrosé où il avait réussit à descendre le plus de shoot possible. Il reposa tout dans le carton se redressant, «Mais qu’est ce que je fais ? ».
Duncan secoua la tête et se dirigea rapidement vers sa porte d’entrée. Il jeta un coup d’œil au miroir pour voir son allure générale comme si ça avait eu de l’importance, mais peut-être que cela en avait aujourd’hui. Il glissa son téléphone dans sa poche et sortit dehors. Il n’avait rien à faire dehors à part passé devant le 220 pour voir si elle était là, où bien peut-être dans le parc, elle avait dit qu’elle y promenait souvent son chien. Il trouverait surement une idée, quelque chose qui l’avait amené à se balader dans les rues. Il marchait d’un pas plutôt lent, « Du repérage ? Non, Duncan ça fait un poil voyeur cette réflexion. », il fit alors une légère grimace regardant les numéros aux entrées des maisons.
Il arriva près du numéro 220. Cette maison était vraiment très grande. Ils devaient surement tous les deux êtres très bien placés pour avoir autant d’argent, leur maison faisait au moins le double de la sienne. D’un pas lent, il s’avança devant la maison pour y apercevoir Chloë assise dehors à profiter du soleil. Son cœur loupa un battement, elle était encore plus jolie que la semaine dernière. Un doux sourire se dessina sur la bouche de Duncan qui commençait à s’avancé pour aller à sa rencontre mais il en avait presque oublié qu’elle ne vivait pas seul. Son mari arriva pour la rejoindre et lui fit demi-tour, son sourire s’effaçant de son visage. Il était impossible de dire pour lui si elle l’avait vu ou non, mais il y avait de grande chance que oui.
Comme il n’avait rien d’autre à faire pour aujourd’hui, il regagna sa maison assez rapidement. Une fois chez lui, il prit la direction de la salle de bain pour y prendre une longue douche. Une fois sous l’eau, il ferma les yeux penchant sa tête en arrière, l’eau coulant sur lui, lui faisait beaucoup de bien comme si tout le reste autours de lui disparaissait et puis c’était surtout un luxe qu’il n’avait pas eu en Afrique, là-bas il ne pleut presque jamais et c’est encore moins possible de pouvoir rester sous une douche. Il revint rapidement à la réalité quand son biper se mit à sonner, on l’attendait à l’hôpital pour une opération en urgence, au moins cela lui changerait les idées. Il se dépêcha de s’habiller pour se rendre à l’hôpital.
Sachant qu’il allait passer devant la maison de Chloë et vu qu’il n’avait pas son numéro de portable, il marqua juste sur une demi-feuille blanche un message qu’il espérait que son mari ne trouve pas avant elle, mais il y avait peu de chance que celui-ci prenne le temps d’aller chercher le courrier. Il marqua juste ces quelques mots, « Je suis passé, mais ce n’était pas le bon timing. -D. », avant de déposer le papier dans sa boite aux lettres, cette fois, il partit ensuite au travail.
Brisbane venait sans nul doute de connaître l'une des plus chaudes semaines de l'automne. Même si le climat était d'habitude assez chaud et ce, peu importe la période de l'année, les températures de la semaine écoulée étaient on ne peut plus alarmantes. Il me plaisait d'associer cette brutale montée de chaleur suite à la rencontre que j'avais effectuée il y a quelques temps. En effet, le nouvel habitant du quartier, un dénommé Duncan, avait attiré mon attention…et à vrai dire, pas que mon attention. Il m'arrivait de penser à lui, régulièrement et surtout lorsqu'Alex m'énervait. J'avais eu énormément de boulot cette semaine, ce qui ne m'avait pas souvent permise d'aller promener notre chienne Diana. Alex s'en était chargé, étant soudainement devenu plus présent, plus aimant et surtout plus actif sexuellement. Sa libido était remontée en flèche, lui qui d'habitude passait volontiers ce devoir conjugal afin de jouer à sa PlayStation ou passer des coups de fil à ses nombreux amis. Je venais de passer la semaine la plus chaude de ma vie, aussi bien au sens propre qu'au figuré. Cependant, il m'était arrivé quelque chose d'assez bizarre, voire de dérangeant même. Lors de l'une de nos galipettes nocturnes en milieu de semaine, je m'étais surprise à penser à lui. Pas à Alex, pas à mon mari avec qui j'avais convolé en justes noces il y a de cela un petit moi. Non. À lui. À Duncan. L'acte s'était terminé sans un mot, sans un regard. Je m'étais retournée après avoir souhaité une bonne nuit à mon cher mari. Et j'avais commencé à pleurer, à chaudes larmes. Pendant une heure environ. Je m'étais réveillée le lendemain avec l'estomac dans les talons. J'avais erré toute la journée au bureau en ne pensant qu'à une seule chose: cet infâme et malsain fantasme qui avait pris possession de toute ma tête, de toute mon âme et qui s'était officiellement matérialisé la nuit précédente. Et puis ce fantasme était passé aussi vite qu'il était arrivé. Je n'avais plus revu Duncan depuis notre première rencontre, mais il m'arrivait bien trop souvent de ralentir devant chez lui lorsque je passais dans la rue en voiture. Je me plaisais à essayer de regarder ce qu'il faisait. Il avait l'air d'être, d'après mes dernières observations, bien installé chez lui. Je ne voyais pas souvent sa voiture devant la petite maisonnée, je supposais dès lors qu'il était de garde à l'hôpital. Nous étions vendredi et le soleil était au beau fixe. J'avais fini journée plus tôt et m'étais décidée à rentrer directement à la maison. Je passai bien évidemment devant mon cher voisin, remarquai que sa voiture était là, ce qui me procura une sensation bizarre dans le bas du ventre. Je rentrai chez moi et y trouvai Alex, avachi sur le canapé, en train de regarder un match de rugby. Je lui fis un rapide bisou avant d'aller me coucher sur un transat dans le jardin. Diana était en train de s'amuser dans les buissons environnants. J'étais simplement vêtue d'un minishort en jean et d'un débardeur en voile rose. J'avais besoin de me reposer, de me recentrer et d'essayer de chasser ses pensées parasites de ma tête. Je savais qu'il était là, pas loin. J'avais envie de courir jusqu'au numéro quarante-quatre, de frapper tambour battant contre la porte et de rentrer en trombe chez lui. De discuter des heures durant, de boire une bonne bouteille de vin, de me sentir autre, en compagnie de quelqu'un d'autre… Je remarquai une ombre s'approcher au loin dans la rue dont je pouvais avoir vue de mon jardin. Cette ombre se précisait de plus en plus. "Non, c'est pas vrai?!" Je n'eus même pas le temps de terminer le fil de ma pensée qu'Alex vint m'interrompre afin de m'amener un cocktail, préparé par ses soins à mon attention. Je lui fis mon plus grand sourire et le remercia. Il vint ensuite s'asseoir à mes côtés et l'ombre que j'avais distinguée s'était évaporée. J'étais quasiment sûre que c'était lui. Il m'observait. Il me hantait. Je bus une grande gorgée de mon cocktail fort alcoolisé afin d'essayer d'oublier, encore une fois. Toujours. Mais rien n'y faisait. C'était inévitable, c'était comme des vagues: incessant. Ma tête commença à tourner après quelques heures passées à cuver avec mon mari. Il décida de nous commander des pizzas et de louer un film romantique en ligne. La nuit commençait tout doucement à tomber sur Brisbane. J'aurais été capable d'aller dormir dans la seconde, étant complètement à la masse à cause de la lubie d'Alex de vouloir toujours sur-doser tous les verres qu'il préparait. Ce dernier me prévint que les pizzas allaient arriver dans une trentaine de minutes. Je décidai alors d'aller promener Diana en vitesse dans la rue, afin qu'elle se dégourdisse les pattes. En revenant, je m'arrêtai à hauteur de ma boîte aux lettres et y relevai le courrier. J'y découvris une feuille blanche avec une écriture assez brouillon, digne d'un médecin. "Je suis passé, mais ce n’était pas le bon timing. –D" Mon cœur ne fit qu'un bond. Je dessaoulai sec. Y avait pas plus efficace contre une trop grande dose d'alcool. Je rangeai le papier en vitesse dans la poche arrière de mon minishort, ramenai Diana dans le jardin et rejoignis mon mari. Nous mangeâmes notre pizza devant le classique Coup de Foudre à Notting Hill. Alex s'endormit en moins de vingt minutes. J'étais captivée par le film. C'était donc ça. Un coup de foudre. J'avais eu un coup de foudre pour Duncan. Je décidai d'aller dormir après la fin du film. Demain était un autre jour. Je me réveillai vers sept heures et me préparai d'une manière nonchalante. Nous étions samedi et je ne devais travailler que jusque seize heures, le samedi étant un jour assez relax dans le milieu de la mode. J'avais prévu d'aller boire un verre avec une amie après le boulot, ce que je fis. Alex m'avait envoyé un message pour me prévenir qu'il sortirait avec quelques collègues de travail ce soir. J'avais donc mon samedi soir de libre. En rentrant, vers vingt heures, je pris soin de regarder si Duncan était chez lui. Bingo, sa voiture était garée devant l'entrée. Je décidai de lui rendre une visite impromptue. Après tout, il était le dernier à m'avoir laissé une preuve d'attention. À mon tour. Je décidai de sortir le grand jeu, afin de lui en mettre plein la vue et qu'il flatte un peu mon égo. Je pris une douche rapide et enfila une robe on ne peut plus moulante de couleur rouge. Cette dernière me dotait d'un décolleté assez prononcé, ce qui me gêna au début. Je m'habituai au reflet dans le miroir lorsque je me maquillai. J'optai pour un maquillage léger, accentué au niveau des yeux. Je séchai mes cheveux et mis un parfum floral. Il ne fallait pas que j'en dégage de trop. Il ne fallait pas qu'il remarque que je m'étais faite belle pour lui. Il fallait que ça paraisse naturel. J'enfilai une paire de sandales compensées, pris mon téléphone et me dirigeai vers le numéro quarante-quatre. Je remarquai à mon plus grand plaisir que la sonnette était installée. Enfin. Je sonnai donc et attendis quelques instants. J'entendis des bruits de pas se rapprocher. La porte s'ouvrit. Le visage du beau jeune homme m'éclaira de toute sa splendeur et son sourire ne tarda pas à m'aveugler. « Salut Duncan, j'ai bien reçu ton invitation » Je lui montrai le bout de papier blanc tout froissé que j'avais pris soin d'emmener avec moi. Je regardai ensuite par-dessus son épaule et lui fis une petite moue timide. « J'espère que je ne te dérange pas... »
Samedi vers treize heures. « On appelle le docteur Wilde aux urgences.» , voilà ce qu’avait entendu Duncan toute la nuit de vendredi et encore ce matin. A croire que les gens de cette ville s’étaient donné rendez-vous pour arriver aux urgences tous en même temps. Il ne pouvait pas se plaindre car les autres soignants et lui-même n’avaient perdu qu’une patiente ce soir. Une femme de peut-être vingt-cinq ans, arrivés ici à cause d’un chauffard qui lui était rentré dedans alors qu’elle était arrêté à un stop. Bien sur, l’autre personne n’avait eu presque rien, une jambe cassé, mais Duncan s’en voulait presque de penser qu’au fond de lui-même, que c’était presque injuste. Mais des injustices dans ce genre là, il y en avait tous les jours. Cette nuit avait été épuisante mais après ça, c’était presque impossible que le chef le convoque la semaine suivante pour lui dire qu’il ne le prendrait pas. Rejoignant son vestiaire après avoir signé plusieurs documents aux urgences il croisa un collègue commençant tout juste son tour de garde. Il regarda le visage fatigué de Duncan en riant pour lui donner une accolade en passant, « Et bien alors Wilde ? On faisait sa première grosse nuit ! Ca ne rigole pas ici ! Fini les vacances en Afrique ! ». Qu’est ce qu’il pouvait bien savoir de ce pays cet abruti qui n’avait surement pas l’expérience que pouvait avoir Duncan ? Il serra les dents mais ne répondit que par un large sourire forcé, presque moqueur tout en battant des cils. C’était sa spécialité et puis le silence était le meilleur des mépris selon lui. Il rangea sa blouse blanche puis récupéra son sac pour enfin sortir du bâtiment. Il ne pu s’empêcher de soupirer, il regrettait d’un coup son petit appartement au bout de la rue, et oui vouloir vivre dans une maison imposait certains sacrifices.
En arrivant chez lui, il ouvrit la porte d’entrée, quitta ses chaussures en continuant de marcher jusqu’à sa chambre, son sac tomba au milieu du couloir et il lança son pull et son tee-shirt juste devant la salle de bain un peu plus loin. Entrant ensuite dans sa chambre, il se laissa tomber à plat ventre sur le lit, un large sourire sur les lèvres en bénissant le célibat. Son ventre le réveilla aux alentours de dix neuf heures et se rendant dans la cuisine les yeux à demi ouverts, il mit un plat préparé dans son microonde pour l’engloutir cinq minutes plus tard. Après être bien réveillé, il se leva ramassé ce qu’il avait laissé sur son chemin pour ranger un minimum. Allant mettre ses vêtements dans la panière à linges, il en profita pour se brosser les dents tout en fredonnant une chanson. C’était magique dès qu’il passait la frontière de la salle de bain, il devenait chanteur, bon pour ce qui était de chanter juste, c’était autre chose. Quand Duncan était de garde la nuit, il était ensuite complètement décalé et pouvait vivre à l’envers des autres durant la journée suivante. Il attrapa donc un tee-shirt programmant une douche aux alentours de minuit ou une heure du matin pourquoi pas. Il s’apprêtait à l’enfiler quand le bruit de la sonnette raisonna dans toute la maison, elle fonctionnait. Duncan se dépêcha de sortir de la salle de bain pour aller ouvrir, oubliant qu’il était encore torse nu. Quand la porte s’ouvrit, alors un large sourire prit place sur ses lèvres, il se retrouvait sans voix devant la beauté de voisine qu’il n’avait plus revue depuis un certain temps. Son cœur à lui aussi loupa un bon et se sentit vite prit au dépourvu, après tout, il n’avait rien d’aussi classe à coté d’elle. Il ouvrit un peu plus la porte se cachant derrière un fragment de secondes pour enfiler son tee-shirt. Il se mit à parler gardant son sourire sur sa bouche.
-Hey Chloë, je suis content de te voir, il marqua une pause avant de reprendre. Oh tu veux dire ma super invitation déposait sur une demi-feuille ?
Ce mot en y pensant, rappeler ceux que les adolescents pouvaient s’envoyer en classe. Généralement ces mots étaient écrits sur un bout de papier déchiré d'un cahier pour rejoindre la trousse du destinataire en toute discrétion. Peut-être que cela deviendrait une habitude de Duncan de laisser des mots dans celle de Chloë, comme un adolescent qui découvrait ce qu’était un coup de cœur pour une autre personne.
-Non tu ne me déranges, je suis rentré en début d’après-midi d’une garde, je n’ai donc rien prévu pour ce soir. Tu peux entrer si tu veux. Au fait, tu as inauguré la sonnette !
Il se mit à sourire en coin en la regardant une nouvelle fois. C’était un crétin en jean, tee-shirt alors qu’elle était sublime, vraiment belle ou bien encore magnifique. Oui tous ces synonymes passèrent dans l’esprit de Duncan alors qu’elle entrait chez lui, il referma la porte derrière elle, bien trop content de pouvoir passé une soirée à apprendre à la connaitre. Il prit une profonde respiration en passant légèrement sa lèvre inférieure dans sa bouche.
-Maintenant qu’on se voit pour la deuxième fois, je peux surement me permettre de te dire que tu es vraiment belle dans cette robe… Mais ne fait aucun commentaire sur ce que je porte, je crois que ce n’est pas nécessaire, finit-il par dire en riant.
Je regrettai aussitôt mon geste quand la porte s'ouvrît devant moi. Quelle idiote. Et quelle impulsive. Pourquoi fallait-il toujours que je n'en fasse qu'à ma tête quand il s'agissait des garçons? Pourquoi ne pouvais-je pas être toute aussi réfléchie et raisonnable que dans mon boulot? Pourquoi fallait-il que j'aie un point faible? Les liaisons dangereuses, c'est quelque chose dont j'étais familière. Pas avec Alex, non, grand Dieu merci. J'avais été une petite-amie exemplaire, une fiancée attentionnée…et à présent une femme en proie au doute. Pourquoi diable le destin eût-il mis Duncan sur mon chemin, dans ma rue plus précisément? Dieu seul le savait. Je n'étais qu'un pion, avec tous ses défauts et ses impulsions, prête à passer du temps avec quelqu'un d'autre que mon mari, avec quelqu'un que je trouvais attirant. Une situation délicate, voire dangereuse. Et je m'y jetais à corps perdu. Comme si j'avais besoin d'une échappatoire. Ma vie avec Alex n'était-elle pas parfaite? C'était ce que je pensais. Tout ce que j'avais bâti pendant près de neuf ans de ma vie s'écroulait petit à petit comme un château de cartes. Sous mes yeux impuissants, mon corps ne se mouvant désormais que selon ses propres lois. Mais quelles lois? La loi de la gravité? La loi de l'attraction? Tout ce qui pourrait m'attirer des ennuis en somme. Oui, je regrettai à présent d'avoir fait ce malheureux pas vers le jeune homme. Il n'était pas trop tard pour faire marche arrière, j'y pensai juste avant d'appuyer sur la sonnette. Mais lorsque la porte s'ouvrît et que je découvris mon voisin, son visage illuminé, son sourire angélique, tout s'effaça. Tout ce qui aurait pu me permettre de revenir à la raison. Quand la porte s'ouvrît, le début de la fin commença. C'était sans dire que le jeune homme avait oublié d'enfiler son tee-shirt, ce qui me laissa l'occasion d'apercevoir son torse viril. Une sensation de chaleur vint me chatouiller le ventre et je ris en le voyant se cacher derrière la porte afin de se vêtir. Quel clown. « Hey Chloë, je suis content de te voir » Ça tombait bien, moi aussi. Et de voir que c'était réciproque me procurait un sentiment de joie extrême, qui relevait presque de l'euphorie. « Oh tu veux dire ma super invitation déposée sur une demi-feuille ? » Je levai les yeux en ciel puis lui souris. Il était vrai que ce n'était pas une invitation à proprement parler, mais plutôt un gribouillage, quelque chose semblable à une trace, à un pas dans ma direction, à un échange secret et excitant. Il aurait peut-être fallu que je lui donne mon numéro de téléphone, histoire d'éviter un futur quiproquo avec Alex. J'envisageai même d'enregistrer son numéro sous un autre nom, sait-on jamais quel genre de messages pourrait atterrir dans ma boîte. « Non tu ne me déranges, je suis rentré en début d’après-midi d’une garde, je n’ai donc rien prévu pour ce soir. Tu peux entrer si tu veux. Au fait, tu as inauguré la sonnette ! » Je posai mes yeux sur l'espèce de petit engin à côté de la porte et lui fis un sourire. « Ravie d'être la première » Je passai ensuite le seuil de sa porte pour le suivre dans la petite maison. Il s'arrêta un instant dans le hall pour me complimenter. Je le remerciai puis ris en regardant son accoutrement. « T'en fais pas, je me suis habitée au fait que tout le monde ne travaille pas dans la mode… » Je lui fis un clin d'œil et le suivis ensuite jusqu'au même endroit où nous nous étions installé lors de ma première visite. Il m'invita à m'installer sur l'un des tabourets. Il se dirigea ensuite vers le frigo et en sortit une bouteille de vin. Je haussai les sourcils, visiblement surprise d'une telle attention. Même si au fond c'était ce que je désirais, je n'en perdis pas mes bonnes manières. « Oh, ne te sens pas obligé… Tu reviens d'une garde, je n'ai vraiment pas envie de te prendre du temps. Tu devrais te reposer… » Je pinçai les lèvres, généralement signe que quelque chose me contrariait. Je n'aimais pas m'imposer, même si ma compagnie était visiblement désirée...
Quand elle le suivit dans sa modeste maison, il se dirigea alors vers le frigidaire pour en sortir une bouteille de vin. Elle prit place sur le tabouret face à lui. Le comptoir les séparer et ce n’était peut-être pas plus mal. Duncan s’efforcer de penser que Chloë était mariée et qu’il la connaissait depuis environ, deux fois. Ils ne s’étaient pas vu plus et il ne savait pas grand-chose d’elle, à part qu’elle travaillait dans la mode et vivait dans une villa de rêve. Le jeune homme sortit du placard deux verres à pied en riant doucement suite à ce qu’elle venait de dire.
-Je vais te raconter quelque chose sur mes gardes et moi.
Il s’installa sur le tabouret remplissant les deux verres de moitié en faisant glisser un verre elle. Sa main effleura la sienne et c’est comme s’il reçu une décharge électrique bien sur ce n’était rien de ça, juste une étrange sensation qui prouvait l’attraction qu’elle avait sur lui. S’il avait écouté cette pulsion qui lui parcourait à ce moment même l’échine, les verres auraient fini par terre et il aurait bondit sur le comptoir pour venir l’embrasser, juste gouté ses lèvres au moins une fois. Il cligna des yeux plusieurs fois se rendant compte qu’il était tout bonnement entrains de rêver en reprenant le fil de la conversation où il l’avait laissé et surtout en espérant qu’elle n’est rien remarquée.
-Quand je suis de garde la nuit, je suis ensuite complètement décaler les vingt quatre heures qui suivent. J’ai donc fini ma garde à treize heures, je suis rentré et j’ai été directement dormir jusqu’à dix neuf heures. Tu vois, je viens juste de me réveiller en fin de compte. J’ai toute la nuit devant moi… Tu ne me prends aucun de mon temps.
Duncan attrapa son verre pour le lever jusqu’au sien et claquer doucement les deux ensemble avant d’en boire une gorgée. Il avait tout d’un coup envie de savoir tout d’elle. Où elle avait grandit, comment s’appeler son chien, ce qu’elle aimait regarder à la télé, ce qu’elle aimait manger… Il sortit une barquette de framboises du frigidaire la déposant à coté d’eux avant de venir en mettre une dans sa bouche. Et s’il était son genre d’homme… Mais ça c’était peu probable vu l’aperçu qu’il avait eu de son mari l’autre jour qui était son opposé sous toutes ses formes.
-Et si tu me racontais ta journée ? Ce que tu as fait ? Ce qu’on fait en général dans la mode. Tu pourrais même me relooker un jour… Je suis sur que tu as eu un peu peur en me voyant à la porte tout à l’heure.
Tout le passionné, tout ce qui sortait de la bouche de Chloë. Il ne décrocha pas son attention une seule seconde même quand elle parlait de mode alors qu’on pouvait clairement voir que ce n’était pas demain qu’il ferait la couverture de grands magasines. La soirée passait doucement pour les deux voisins tout en sirotant leurs verres de vin. La nuit était maintenant tombée et Duncan eut une idée pour changer de la rencontre derrière le comptoir de la cuisine. Il se releva prenant son verre en se mordillant la lèvre inférieure.
-Suis-moi et prend ton verre, je vais te montrer quelque chose, je suppose que tu as le même genre de vue dans ta rue, mais ce n’est pas grave, cela nous changera des tabourets de la cuisine.
Il lui lança un clin d’œil passant de l’autre coté du salon pour y ouvrir une grande baie vitrée. Derrière celle-ci se trouvait une terrasse en proportion avec la maison, qui donnait sur la plage de Brisbane. Il adorait l’immensité de l’océan et ce qu’il avait voulu retrouvé en revenant ici. Les lieux étaient éclairés par quelques lampions, il bu une autre gorgée de son verre se tournant vers Chloë pour voir sa réaction sur son visage et essayer d’en décrypté les moindres détails. Il était fort à ce jeu là mais une chose était sur, il était incapable de savoir comment aller se terminer cette soirée. S’il oserait ou non se rapprochait d’elle au risque de se prendre un refus plus que normal et de perdre pour toujours se semblant de lien qui commençait à naitre entre eux.
« Je vais te raconter quelque chose sur mes gardes et moi » Je me redressai sur le tabouret, prête à écouter la petite histoire du jeune homme. Il n'avait pas l'air contrarié par ma présence, il balaya ma phrase d'un revers de la main à vrai dire. Il glissa ensuite un verre à vin en ma direction, me frôlant le dos de la main droite. Je reçus comme une décharge, quelque chose d'inhabituel, de nouveau pour moi. Je n'avais jamais eu de coup de foudre de la sorte, aucune attirance semblable. J'avais mis beaucoup de temps à tomber amoureuse d'Alex, moi qui sortais d'une relation assez mouvementée à l'époque. Je ne m'étais accroché à mon mari qu'après quelques mois, voire presque une année passée à ses côtés. Son côté vantard et fêtard, c'était très peu pour moi à l'époque. Il avait fallu que la pilule passe. Et puis il avait fait quelques efforts, quelques preuves d'amour irréfutable qui me firent tomber dans ses bras un peu plus chaque jour. Jusque l'apothéose. Notre mariage. Brisbane s'en souvenait encore. À vrai dire, il n'avait eut lieu qu'un mois auparavant. Les souvenirs de ce jour parfait ainsi que notre lune de miel aux Maldives étaient encore fraichement ancrés dans ma mémoire. Cependant, mon cerveau semblait défaillir quand il se retrouvait en compagnie de mon nouveau voisin. « Quand je suis de garde la nuit, je suis ensuite complètement décalé les vingt quatre heures qui suivent. J’ai donc fini ma garde à treize heures, je suis rentré et j’ai été directement dormir jusqu’à dix neuf heures. Tu vois, je viens juste de me réveiller en fin de compte. J’ai toute la nuit devant moi… Tu ne me prends aucun de mon temps » C'était donc ça. Je tressaillis lorsqu'il m'annonça qu'il avait toute la nuit devant lui. La perspective d'une nuit complète à papoter avec lui devenait de plus en plus probable. Quant à Alex, il était de sortie et ne serait probablement pas de retour avant le petit matin. J'avais, en théorie, également toute la nuit devant moi. Je réfléchis quelques secondes et me lançai, après tout, autant jouer avec le feu jusqu'au bout. « Ça tombe bien, Alex est sorti avec des amis… » J'attrapai mon verre et le cognai contre celui du beau jeune homme. Cet échange de sous-entendus commençait à devenir pesant. Tout comme la tension ambiante. Il sortit ensuite une barquette de framboises. Miam. Mon fruit préféré. C'était comme s'il me connaissait déjà par cœur. Je le regardai prendre délicatement l'un des fruits et le porter à sa bouche. Il possédait une délicatesse indescriptible dans ses mouvements, quelque chose de magnétique. Je restai scotchée. J'aurais pu baver sur place si je n'avais pas une partie de mon cerveau qui m'obligeait à agir d'une manière rationnelle. Je n'étais plus une gamine après tout. Même si il me faisait ressentir comme telle. Comme si j'étais fan de lui. J'attrapai à mon tour un des petits fruits et le portai à ma bouche tout en regardant avec insistance le jeune homme parler. Je remarquai que sa phrase s'accélérait quand le fruit atteignit ma bouche, ce qui eut le don de me faire sourire. « Et si tu me racontais ta journée ? Ce que tu as fait ? Ce qu’on fait en général dans la mode. Tu pourrais même me relooker un jour… Je suis sur que tu as eu un peu peur en me voyant à la porte tout à l’heure » Il respira un grand coup et bût une gorgée de vin. Je réfléchis un instant sur la manière dont j'allais lui expliquer mon boulot. « C'est très répétitif, tu sais. Je dois passer des coups de fils, lire mes emails, gérer une équipe. Donner des directives. Et surtout donner mon avis, sur absolument tout… » Je réalisai alors que j'étais vraiment payée à rien faire. Surtout comparé au boulot de Duncan. Ma mère était pédiatre, cela me sauvait un peu. J'avais quand même un pied dans le médical, dans l'aide à autrui. De très loin cependant. Même si en soi, la mode pouvait être considérée comme une aide à autrui. L'attitude, l'élégance, l'apparence, c'est ce qui aidait de nombreuses personnes à obtenir un boulot, à se faire respecter. Il ne fallait jamais sous-estimer l'effet de la mode et du style dans la société actuelle. Je décidai de ne pas mentionner ce détail à Duncan, qui m'aurait surement regardée avec un drôle d'air, tellement cela n'avait rien de comparable au fait de sauver des vies. J'avalai à mon tour une grande gorgée de vin. « Pour le relooking, tu pourras passer au bureau si tu veux, je m'occuperai de toi avec plaisir... » Je marquai une pause, un silence presque gênant s'installa entre nous après ce sous-entendu gros comme une montagne. Merde Clo, faudrait peut-être penser à ne pas aller trop loin, non? « Et si t'es gentil, tu pourras même avoir quelques pièces de collection » Je lui fis un sourire timide, j'essayais tant bien que mal de rattraper ma petite bavure. Le jeune homme se leva ensuite et prit son verre. Je ne pus m'empêcher de le voir se mordre la lèvre, ce qui encore une fois me provoqua une réaction bizarre dans le bas du ventre. « Suis-moi et prend ton verre, je vais te montrer quelque chose, je suppose que tu as le même genre de vue dans ta rue, mais ce n’est pas grave, cela nous changera des tabourets de la cuisine » Je me levai du tabouret et remarquai que ma robe était remontée un peu trop haut, laissant apercevoir le haut de mes cuisses. Je priai intérieurement pour que le jeune homme ne le remarquât pas et entrepris d'abaisser aussitôt cette satané robe moulante. Le rouge me monta aux joues. Je suivis Duncan derrière une vaste baie vitrée. Je posai mes pieds sur la terrasse bien aménagée du jeune homme, avec des petits lampions décorant le sol de l'extérieur. Mes yeux s'illuminèrent et un grand sourire se dessina sur mon visage. La vue était magnifique, je pouvais distinguer l'océan au loin. Je pouvais également entendre le bruit des vagues à distance, le constant flot des vagues se jetant sur la plage. J'avais le souffle coupé. Je ne croyais pas avoir une vue aussi magnifique de mon jardin, du moins je n'en profitai pas souvent. Cette vue prenait également une toute autre ampleur, une toute autre beauté en compagnie du jeune homme. « C'est magnifique… » Je regardai le jeune homme et pour une fois je ne sus soutenir le regard qu'il me lança en retour. Je me cachai dès lors dans mon verre, appréciant une gorgée de ce bon vin.
Leur discussion sans le vouloir et pourtant, était pleine de double sens. Enfin c’est ce qu’il croyait ou voulait penser quand il entendait Chloë lui répondre. Quand elle mentionna que son mari n’était pas là ce soir, son cœur s’emballa un peu en se disant que c’était tant mieux et qu’elle n’aurait pas à rentrer tout de suite. Il se demandait par contre jusqu’à combien de pulsions il allait pouvoir résister en sa présence. Quand elle n’était pas là, il pensait à elle bien que c’était stupide puisqu’il ne la connaissait pas vraiment mais c’était difficile pour lui de s’expliquer à lui-même ce qu’il avait ressentit en la rencontrant la première fois. C’était une sorte de « whao », un émerveillement, bref le genre de sentiment qui aller lui retourner la tête et surement lui causer de gros problème. Il fut ravi de constater qu’elle aimait également les framboises. Il pouvait faire un nombre de kilomètre inimaginable pour en trouver. Il concentra son attention sur ce qu’elle lui disait, parlant de son travail.
-Je vois, tu as l’air d’être quelqu’un d’important dans ce que tu fais et si cela te plais alors c’est génial.
Un léger sourire avait prit place sur sa bouche quand elle mentionna l’envie de s’occuper de lui à son bureau. Il se demandait bien si elle avait un genre de cabine où ses clients pouvaient se changer et où il aurait pu l’entrainer avec lui, juste pour être sur que ces vêtements lui aller bien. Les pensés qui lui traversaient l’esprit n’était pas toute jolies, jolies et après avoir laissé ce petit silence passait il reprit.
-Compte sur moi alors. Oh je serais ravi de voir ce qu’est une pièce de collection.
Sa petite bavure, ne le dérangeait pas bien au contraire. En se levant, il remarqua brièvement sa gêne mais ne le fit pas remarquer par politesse. En plus de cela, cette robe lui allait divinement bien, il aurait été dommage de faire une réflexion juste pour rendre ses joues un peu plus rouge. Il l’entraina alors avec lui dehors sur sa terrasse contemplant la vue un instant, une main dans sa poche il bu la dernière gorgée de son verre de vin. Quand elle se mit à parler il tourna son visage vers elle, la regardant boire son verre.
-Tu n’as pas cette vue là chez toi ?...
Il remarqua que son verre à elle était presque vide, alors il se tourna complètement, vu qu’elle était un peu en retrait derrière lui s’approchant d’elle, pour récupérer son verre et le remplir de nouveau. Duncan tendit doucement sa main vers la sienne pour attraper son verre mais un nouvel éclair parcouru son corps tout entier ce qui lui fit lâcher le verre et comme elle ne le tenait plus, celui-ci s’écrasa au sol. Pendant une demi-seconde, il baissa la tête regardant les morceaux de verres puis son cœur battant la chamade, surement par la surprise d’entendre le verre se brisait par terre mais aussi par cet instant où il se retrouvait aussi proche de Chloë. Il remonta son regard à ses yeux noisette. Elle ne pouvait plus se cachait derrière son verre désormais et lui, il ne pouvait plus résister une seconde de plus à ses pulsions qui le dévoraient de l’intérieur.
Le jeune homme posa alors sa main froide sur la joue brulante de Chloë et passant brièvement sa langue sur ses lèvres, il céda enfin à cette envie dévorante de l’embrasser en venant déposer sa bouche contre la sienne fermant les yeux. Impossible pour lui de décrire exactement la sensation qu’il pouvait ressentir à cet instant mais son ventre le chatouillait comme jamais. Il ne pensait pas aux conséquences à la réaction de la jeune femme. C’était mieux que l’alcool, mieux que la drogue, mieux que tout ce qui avait pu le faire planer un jour. Il rapprocha son corps du sien faisant un petit pas vers elle mais assez pour qu’ils s’effleurent, son autre bras passant autours de sa taille, il laissa l’instant filé l’espace d’un instant.