Make sure she is okay

→ Le temps semble s’être arrêté pour quelques heures. Douce lévitation. Nos corps s’accrochent et se lient dans cet espace hors du temps. Temporalité abstraite. Le réveil sera brutal, nous le savons tous les deux mais cela ne nous empêche pas de sombrer avec envie, dans le gouffre de plaisir qui s’étend à nos pieds. Je plonge, prêt à me noyer, prêt à mourir d’asphyxie. Sans parachute, sans sécurité, je m’élance dans le vide avec la ferme intention de profiter de la moindre parcelle de plaisir qui me sera donné. Qu’elle va me donner. Mon cœur d’égoïste brisé cicatrise faiblement à ses côtés, suffisamment pour exploser à nouveau. Fais-le battre, fais-le battre jusqu’à ce qu’il explose, jusqu’à ce qu’il n’en reste plus rien. Tendre supplication. Torture désirable. Je m’engouffre avec délice dans les affres de cet exquis supplice que nous nous infligeons mutuellement. Oh Jess, nous regretterons tellement ce moment. Profitons-en tant qu’on le peut encore.

- Ils sont magnifiques. Mais fais attention, tu vas finir par ne plus avoir de place. Un sourire furtif prend place sur mes lèvres. Elle a toujours aimé les tatouages, l’encre gravée pour toujours sur une peau douce qui raconte une histoire. Les interprétations peuvent être multiples, chaque personne peut y voir une signification différente selon ses origines, son mode de vie, ses connaissances. Je suis étonné de découvrir une fleur sur sa peau, que je connais vierge et je n’hésite pas à lui en demander la signification. – Le coquelicot, rouge comme la passion, aussi magnifique que le fruit de notre mariage raté mais remplie de poison quand on la cueille. Cette fleur c’est nous, inscrite sur ma peau là où ta main s’est posée la première fois. Mariage raté. Rempli de poison. C’est nous. Ces mots me frappent avec une brutalité redoutable et m’offrent un aperçu de ce qu’a pu ressentir Jess à notre divorce. Je n’ai jamais considéré notre mariage comme raté pour ma part, c’est au contraire une expérience que je chéris. Je suis cependant en grande partie responsable de son échec – même si je déteste ce mot, je le trouve vraiment trop dur. L’amour n’échoue pas selon moi, il répond simplement à sa propre loi et nous laisse souvent sur le côté, plein d’incompréhensions. Quant au poison… Il court sûrement encore dans mes veines, et ce sera le cas jusqu’à la fin de ma vie. Si je suis un poison, elle a eu raison de me fuir. Je ne réponds rien, me contente de cacher mon visage dans sa chevelure pour retenir les larmes qui menacent de sortir. – Je ne peux pas rester dormir, notre petit ange doit adorer te réveiller en se glissant dans ton lit et je… C’est mieux qu’elle ne sache pas que je suis venue. J’inspire profondément son odeur, alors que mon cœur se serre dans ma poitrine. J’étouffe, ça y est. La réalité reprend le dessus et s’apprête à s’abattre violemment sur nous. Jess accroche mon regard – S’il te plaît, fais-moi vivre encore une fois. Je ne peux pas résister… Même avec toute la volonté du monde, je suis prêt à déchirer mon âme pour ces quelques instants de pur bonheur et d’extase. Pauvre petit cœur brisé qui ne s’en remettra jamais. Et je fonds, je m’enlise et je cède. Mes mains encadrent son doux visage, mes lèvres se posent sur les siennes. Mon corps vient épouser ses formes divines, que je connais par cœur, imprimé dans ma tête, sauvegardé dans ma mémoire infaillible. Je m'allonge sur elle, hume son parfum qui s'accroche à ma peau et pénètre dans ma chair. Mes lèvres brûlent, mon corps est tremblant et je ferme les yeux de peur que ne s’échappent des larmes de douleur. Violente extase qui déchire par sa puissance exceptionnelle.

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Vêtu d’un simple jogging enfilé rapidement, j’observe Jessian rassembler ses affaires, un pincement au cœur. Ses cheveux sont encore en bataille, elle a l’air tout autant éparpillée en dehors qu’à l’intérieur. Les bras croisés, adossé contre le mur prêt de la porte d’entrée, je la fixe sans ciller. C’est tellement douloureux, ça fait un mal de chien et pourtant je m’efforce de tout voir, tout observer. Elle, ses boucles qui virevoltent autour de son visage parfait, sa petite robe trop sexy qui met en valeur ses courbes féminines parfaites, ses talons qui claquent sur le sol. Je veux la voir dans sa globalité, graver chaque souvenir précieusement, égoïstement, tout garder en moi pour alimenter le volcan rugissant et débordant de sentiments qui m’habite. Nos regards s’accrochent, elle s’apprête à partir. Ma gorge se noue, je tiens bon malgré tout et demande d’une voix incertaine, troublée – Je te la ramène demain soir, chez tes parents ? Comme tous les dimanches, j’affronte la belle-famille la tête haute en ayant conscience de leur mépris à mon égard. Je baisse automatiquement le regard, je ne veux pas qu’elle y voit la souffrance qui me serre le cœur. Fuis, fuis le poison qui coule dans mes veines. Et ne te retourne pas, car tu vaux mieux que ça. Mieux que moi. J’ouvre le paquet de cigarettes pour en extirper une, avant de le replacer dans ma poche. Je relève le visage vers Jess, la clope calée entre mes lèvres, les yeux légèrement humides. Je suis en colère à présent, en colère contre moi. J’ai trop mal au cœur pour contenir ma douleur à te voir partir. Alors, vite, met fin à mon supplice. Achève-moi et claque cette porte devant mon visage. Achève-moi vite, s’il te plait.

black pumpkin & whitefalls