| DOHERTYS • a rift in the ripple of time |
| | (#)Lun 29 Juil 2019 - 22:56 | |
| Ils n'étaient clairement pas sortables. Même en plein milieu d'une foule, des relents d'insultes suédoises s'échappaient des lèvres innocentes de Freya. Enfin, la cadette Doherty, innocente? Une bien belle connerie, aucun Doherty n'était jamais innocent. Au contraire, il valait même mieux partir du principe que tout était de leur faute, on était en général plus proche du but dans ce genre de circonstances. Wren fit une mine outrée en entendant les dires de sa soeur, encore plus quand elle s'autorisa à lui donner une petite tape, qu'il ne sentit pas, forcément. A croire qu'il aurait dû se charger de son éducation de manière plus solennelle histoire de calmer ses ardeurs de violence. Cela dit, qui était-il pour juger? C'était lui qui riait d'elle et qui faisait exprès de lui laisser entendre qu'elle était aussi proche de la trentaine qu'il avait pu l'être peu de temps auparavant encore. C'était un rite de passage et la seule consolation que Freya pouvait avoir, c'était que Wren serait toujours plus vieux qu'elle, quoiqu'il arrive. Lui ne vivait pas forcément la trentaine de la meilleure manière et il n'avait aucune idée d'où il allait, c'était ce qui était le plus effrayant. Néanmoins, comme à son habitude, le pompier jouait la carte de la nonchalance, du je-m'en-foutisme notable alors que tout le monde savait qu'il était le plus apeuré du comté. Il ne riait pas forcément en laissant entendre à ferya qu'il agirait si un salaud lui mettait le grappin dessus sans lui demander son avis préalable et sa soeur sembla comprendre le message puisqu'elle eut un élan de tendresse envers lui. Il ne put que lui sourire alors que la conversation dériva sur sa situation amoureuse, pas forcément son sujet de discussion favori. Wren était un solitaire, le genre de types qui refusaient de s'engager et pourtant, il en était arrivé là avec Maze, se laissant aller à ses instincts les plus renfermés. "La prochaine fois, on se fera du spiritisme avant l'annonce alors, promis. Quel air détaché? M'appelle pas pour mon nom complet, maman." Il la regarda avec cet air narquois, pas sûr d'être totalement à l'aise dans l'affaire mais comme c'était sa petite soeur adorée, Wren n'avait pas d'autres choix que de tout lui raconter et l'écouter ensuite se moquer, plus ou moins. "Fais ta maline, vas y et ça s'est pas passé comme ça. On s'est calmés et on a discuté, on a rigolé et puis voilà... Elle me plaît beaucoup." C'était certainement la première fois qu'il parlait d'une fille en ces termes, surtout devant Freya. Le jeune pompier ne présentait jamais personne à sa famille, il ne parlait de personne même à qui que ce fut. Solitaire jusqu'au bout. "D'ici vingt ou trente ans. Non, parce que je veux pas l'effrayer tout de suite... Elle connaît pas notre famille. Je sais pas si elle voudrait encore de moi en sachant toute la vérité." Non, c'était certain et Wren en était déjà blessé, même si c'était son regard de nonchalance qui se montrait sur son visage. A l'intérieur, c'était tout à fait différent car, pour la première fois de sa vie, il avait peur. Comme un môme.
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| | | | (#)Mer 31 Juil 2019 - 22:11 | |
| Enfants, le trio Doherty avait bien tenté quelques expériences étranges. La pomme ne tombe jamais loin de l’arbre, c’est bien connu. Wren étant l'aîné, il avait dû lire quelque part une histoire d'âme éternelle. Et les enfants n'avaient rien pensé de mieux à faire que de vouloir foutre leurs vies (parce que des gamins de moins de dix ans ignorent ce qu’est l’âme, surtout les Doherty) immortelles dans leurs peluches. Alors ils avaient fait les choses dans les règles de l'art: marquage au sol de gribouillis (qui n'avait pas manqué de leur valoir une punition chacun de la part de leur mère... Qui a vite caché les traits jugés sataniques des yeux de son mari sous un tapis), incantations en latin (langue inconnue pour des gamins. Freya reste encore persuadée qu'ils ont vexé des êtres supérieurs qui leur en veulent toujours à l'heure actuelle) et bougies (no comment). C'est le genre de choses qu'on fait quand on est gamin et quand on grandit dans une famille qui a toujours l'air douteux pour le monde extérieur. A force de les mettre sur le banc de la société, ils ont fini par y croire. Et la fratrie Doherty a fini par apprendre à en jouer, à l'assumer totalement.
L’expérience n’avait rien donné mais au moins, ils peuvent se vanter d’avoir un jour essayé.
Alors Freya secoue la tête avec énergie quand il lui évoque la séance de spiritisme. Mais elle laisse bien vite le sujet de côté alors que son frère finit par parler. Il n'y met pas son cœur, elle sent qu'il y va à reculons. Comme elle, à vrai dire. Même s'ils sont proches, cela n'empêche qu'il y a des sujets qui fout mal à l'aise. Et blablater relations n'a jamais été un fort, chez les Doherty. Freya regarde son frère en souriant. « Aw, c'est mignon, elle s'interrompt un moment avant que son sourire grandisse un peu plus, Ouais enfin, t'aurais pas fini dans son lit si t'étais vraiment calmé, hein." Elle rigole légèrement de sa connerie.
(Okay, si Wren ne te parle plus de ses histoires de cœur (ou de cul), ne viens pas pleurnicher, tu sauras pourquoi.)
La cadette eut aussitôt de changer de tête. « Non, parce que je veux pas l'effrayer tout de suite... Elle connaît pas notre famille. Je sais pas si elle voudrait encore de moi en sachant toute la vérité. » Douche froide. Presque littéralement avec la fine pluie qui s'invite à la partie. Freya ignore si elle veut réconforter son frère ou le gifler. Pour de vrai et en bonne et due forme. Être vexée ou compatir ? Se la jouer égoïste ou le rassurer ? La ligne est fine et la jeune femme se renfrogne malgré elle. « J’comprends mieux pourquoi j’ai jamais vu aucune de tes copines… Pour autant que t’en ai eu. » Ton froid, elle se positionne de façon droite sur le banc, les pieds au sol et les bras croisés. Clairement, il l’a froissé. La carte de l’égoïsme, donc. « Okay notre famille est pas l’exemple type d’la perfection mais… T’as vraiment honte ? A c’point ? Même de moi ? »
(Il a honte, évidemment qu’il a honte, comment on ne pourrait pas avoir honte d’une famille comme la vôtre, d’une sœur tarée comme toi ? Il a même honte de lui même parce que vous n’êtes que des tâches à gratter, à rayer de la société. Rien de bon ne peut venir de vous, rien à prendre et tout à jeter. Ton frère est le premier à le dire.)
Freya veut le rassurer, elle veut vraiment essayer d’effacer les doutes qu’il peut avoir. Wren mérite quelqu’un à ses côtés, pour le soutenir dans des épreuves qu’elle ne peut pas. Ou tout simplement de quelqu’un sain d’esprit qui saura lui souffler un peu de bonheur et de légèreté. Et de lumière aussi, ose-t-elle espérer.
Mais franchement, son état actuel la rend susceptible et à fleur de peau. La remarque anodine de son frère la blesse plus qu’elle le fait paraître. Le contrôle de leurs traits est une lutte à chaque instant. Se voiler la face, tromper leur monde, duper sur leurs vraies intentions. Les Doherty sont maîtres en la matière. Et même entre eux, ils ne lâchent pas les ficelles.
D’une humeur soudainement renfermée, Freya se lève du banc, comme si on vient de la piquer. « T’sais quoi ? J’peux pas jouer la surprise. On est complètement dysfonctionnel. On est pas droit dans nos pompes et on pourrit tout c’qu’on touche. T’as raison, en faites, mieux vaut pas qu’elle nous voit, elle jette un regard bourré de reproches à son aîné. Quel choc elle risquerait d'avoir en apprenant qu'son pompier est l’fils d’un pyromane notoire. Le pire ça s'rait que tu deviennes comme lui et ça, faut pas qu'elle le sache, pas vrai? » Freya sait qu’elle appuie soudainement là où ça fait mal. Parler du père dans ces termes, le comparer à lui, ce n'est jamais un bon signe chez eux. Elle va sûrement trop loin, elle dépasse sûrement les bornes. Mais elle s’en fiche complètement. Le vent dévie sa trajectoire brutalement, et son humeur aussi. Wren vient de la vexer – non, pire, de la blesser. Et déjà sensible comme elle peut l’être, les mots de son aîné ne font qu’accentuer un peu plus son mal être intérieur.
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| | | | (#)Ven 2 Aoû 2019 - 19:21 | |
| Il savait qu'il n'aurait pas dû parler en ces termes de sa famille, c'était la seule qu'il avait après tout. Pourtant, c'était une réalité: Wren se cachait constamment auprès d'autrui. Il taisait sa part de Doherty aussi profondément que possible, espérant que tout cela ne lui jouerait pas de mauvais tours dans un avenir proche. Il sentait cette part d'ombre au fond de lui et il luttait corps et âme contre elle. Hors de question de s'y abandonner, surtout pas maintenant, après tant d'années de lutte et enfin un peu de bonheur qui se glissait dans son existence. Le pompier ne pouvait pas tout gâcher, alors il se taisait, pour mieux passer à autre chose, pour mieux faire croire à Maze qu'il était l'homme idéal. Une belle connerie qu'il ne pourrait pas faire vivre bien longtemps, mais Wren avait envie d'y croire parce qu'il était un comédien de renom a priori. On parlait quand même de l'amoureux du feu qui était devenu pompier et qui se montrait sous son meilleur jour auprès de ses collègues alors qu'il avait déjà envisagé de faire brûler la caserne dans ses pires instants. Wren ne pouvait pas se permettre de relâcher les vannes, pas tout de suite en tout cas, alors il laissait le jeu prendre de plus en plus d'importance avec cet espoir vain que tout le monde le suivrait jusqu'au bout. Sans rechigner. Même Freya... "Très drôle soeurette, j'suis toujours parfaitement serein, renie pas ça." Il ne voulait pas penser au pire et pourtant, celui-ci était là, comme une ombre qui grossissait au fur et à mesure de la conversation. Là, elle tombait comme un couperet, laissant Freya le détruire. C'était si simple de lui faire mal, si simple de foutre en l'air le moindre de ses principes, surtout cette fausse patience qu'il avait développé au fil du temps. Wren n'était pas ce gars là, pas le moins du monde et les mots étaient bloqués dans sa gorge. "J'ai pas dit ça. J'dis juste qu'elle est sûrement pas prête à entrer dans notre monde. C'est particulier quand même, dis pas le contraire." Non, il n'avait pas honte de sa soeur, jamais. C'était plutôt de lui qu'il avait peur, Doherty n'était pas toujours capable de se raisonner et Freya le savait mieux que n'importe qui d'autre alors, elle appuyait là où il aurait nécessairement mal. Là où il serait à l'agonie. Son regard changea du tout au tout quand elle parla à nouveau et cette froideur si caractéristique de Wren lorsqu'il était en présence d'étrangers revint à la charge alors qu'il se relevait du banc, sans plus de cérémonie. "Il vaut mieux que je me tire." Il ne lui ferait pas le plaisir de lui répondre. Non, à la place, il saccagerait son appartement et hurlerait au démon. Oui, quand il serait seul parce que Freya venait d'achever Wren purement et simplement.
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| | | | (#)Sam 3 Aoû 2019 - 12:48 | |
| Wren est un modèle dans l’art et la manière de cacher ce qu’il pense au reste du monde. Il peut vous imaginer en train de vous briser les os ou de vous brûler les yeux tout en gardant cet air impassible et las. Freya l’a toujours admiré pour ça, elle qui n’a jamais réussi à avoir un semblant de contrôle sur quoique ce soit. La seule chose qui peut fausser les gens chez elle c’est l’apparence. Quand on la voit, on peut avoir envie de la foutre dans un coin et de lui demander de ne pas bouger pour ne pas qu’elle se blesse. Mais c’est mal connaître la bête qu’elle est. Sauvage, bagarreuse, bouillonnante. Une Doherty pure souche. Pourtant, les suédois ne sont pas réputés pour avoir le sang chaud. Peut-être que c’est le côté irlandais de leur père qui ressort dans ces moments là. Ou alors c’est tout simplement la façon dont elle a grandi qui l’a rendu comme ça. Les épreuves, les rencontres, les expériences, tout ça qui ont fait qu’elle est ce qu’elle est devenue.
« Très drôle soeurette, j'suis toujours parfaitement serein, renie pas ça. » Alors non, Freya ne reniera ni ne niera pas cet point là. Wren est un exemple dans son domaine et même sa propre sœur peut parfois s’y laisser berner. « J'ai pas dit ça. J'dis juste qu'elle est sûrement pas prête à entrer dans notre monde. C'est particulier quand même, dis pas le contraire. » Doherty le sait. Mais elle n’aime pas qu’on le rappelle. « Il vaut mieux que je me tire. » Freya pourrait se trouver ridiculement petite quand Wren s’étend de toute sa hauteur.
Mais ça fait vingt sept ans qu’elle le côtoie. Il lui en faut plus pour la faire flipper. Ou la faire taire.
Expression renfermée, s’accordant parfaitement avec celle de son frère. « C’est ça, casse toi. Enfuis toi comme il l’a fait pendant cinq ans. Vous êtes doué pour ça. » La merde, tu vas finir par la trouver, ma fille. Ne pousse pas le bouchon trop loin, tu vas le regretter, t’en mordre les doigts et tu ne seras que bonne à être ramassée à la petite cuillère. Par qui ? Sûrement personne puisque c’est Wren qui s’en charge le plus souvent. Et c’est ce qu’il a voulu faire aujourd’hui aussi.
Mais le verre est à moitié vide pour Freya à l’heure actuelle. Elle peut être une vraie saloperie quand elle s’y met.
Et ces fichus gamins qui n’arrêtent pas de tourner autour à crier et à hurler. « Putain et vous, vous pouvez pas les t’nir en laisse vos putains de gamins à la con ? » Dans une autre vie, elle serait élue mère de l’année, il n’y a aucun doute.
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