J’ai fini ma garde. C’est vendredi soir. Je suis d’humeur à rentrer à pied chez moi. Envie de prendre le temps. Envie de me perdre dans mes pensées. Envie d’être seul encore un peu plus longtemps. Charlie est chez moi aux dernières nouvelles, je crois. J’avoue j’ai pas trop regardé. J’ai la tête ailleurs. Levi vient de faire sa première chimio. J’ai passé un moment avec lui. Pas tout le temps que je voulais mais une grande partie déjà parce que c’était au milieu de ma garde. Le capitaine a bien compris la situation et m’a laissé partir plusieurs heures. C’est pour ça que je sors que maintenant du boulot. J’avais pas besoin de rattraper mais j’ai voulu le faire quand même. Pas tout, mais un peu. J’avais des trucs à faire, j’ai pas fait ça juste pour faire bonne figure. Et je sais pas pourquoi ce soir je traîne la patte à rentrer chez moi. Je comprends pas tout dans ma tête mais je vais où le vent me mène. C’est super animé dans les rues. On est vendredi, il est bientôt minuit. Tout le monde est dehors, tout le monde s’amuse, boit, mange. Et moi je suis là. Un hoodie Unite sur le dos, un short même s’il fait plus chaud maintenant qu’il n’y a plus de soleil. Je suis pas frileux et on est super bien loti à Brisbane. Je passe devant un petit shop qui fait des hot dogs et j’en commande un végétarien. J’essaie de manger le moins de viande possible mais parfois je laisse s’échapper un cheeseburger. Je sors mon téléphone pour faire passer le temps mais je me rends compte que je regarde même pas l’écran. Je suis perdu dans mes pensées. Et je relève la tête d’un coup vers la femme derrière le comptoir, ne sachant plus si j’ai commandé ou pas. Mais elle a l’air occupé et y’a que moi ? Mais non. Y’a aussi une fille là.

« Did you order ? »

Et puis tu poses une question très con.

« Did I order ? »

Comment elle pourrait savoir ? Maybe she was there all along. Oui, j’ai tellement la tête ailleurs que tout est possible à ce niveau là. Mon téléphone dans ma main toujours, en position comme si vraiment j’étais en train de le regarder alors que pas du tout. Il est juste là comme ça dans ma main, comme exposé. Je suis une vraie blague là. Je suis à l’ouest.

Freya a mal partout. Ses muscles sont endoloris parce qu’il a fallu qu’elle creuse un peu plus un trou pas assez profond. Moment gênant dans l’assemblée funéraire. Ce n’était pas de sa faute. Les gars qui étaient déjà passés, qui doivent avoir plus d’expérience qu’elle, ils doivent pouvoir le savoir, ce genre de conneries. On ne la fait pas, ce genre de conneries. Ça passe mal et – sans surprise, c’est mal passé. Elle s’est retrouvée à devoir gratter et piocher le plus rapidement possible mais elle n’est qu’humaine et sans attrait sportif particulier. C’est principalement dans ces situations là qu’elle maudit Tim de lui avoir donné son bébé – qui devient un véritable cauchemar quand il s’y met. Alors Freya s’est octroyée un passage dans un rayon alcool pour s’offrir une bouteille de vin sur le trajet du retour à chez elle. Elle pourrait éventuellement aller crécher chez Tim mais c’est tellement nouveau tout ça qu’elle préfère ne pas faire son pot de colle tout de suite. Et puis, Freya ne songe qu’à son lit qui l’attend et elle s’en contrefout s’il est trop tôt pour dormir, surtout un vendredi soir. Elle a mal, elle commence à avoir le moral dans les chaussettes, le bourdon qui lui monte au cerveau et… Elle le sait quand ça arrive, de toute façon. Elle devrait être heureuse, elle devrait sourire au monde entier mais non. Freya déballe la bouteille de son sachet marron et ne perd pas une minute pour s’en abreuver. Elle veut oublier que sa tête commence à lui tourner court à son bonheur, à sa nouvelle relation avec un type formidable. Mais il faut toujours que la réalité la rattrape, de toute façon. Alors quand elle se fait bousculer une cinquième fois parce qu’il y a un monde impressionnant dans la rue, Freya finit par gueuler. On la regarde, on voit la bouteille, on fait des suppositions et on passe sa route. Bordel, quoi, parce qu’elle boit, elle ne mérite pas le respect, celui de ne pas se faire marcher sur les pieds ? Alors Doherty bougonne comme elle sait si bien le faire et décide à la dernière minute d’aller se poser sur la place centrale de la rue piétonne pour profiter dans son coin de son vin. Un vin de basse catégorie, de la piquette parce qu’il n’a rien à voir avec le vin qu’elle a goûté il y a quelques mois avec Finnley – pour le peu qu’elle se rappelle de la finité de cette journée.

« Did you order ? » Doherty lève la tête, complètement dépassée, ailleurs, hagard. Elle est où, là ? « Did I order ? » Qu’est-ce que… Freya veut poser sa main sur son front mais le bras qu’elle amène à son visage, c’est celui avec la bouteille de vin. Vide. Oh right. Cela doit expliquer les oreilles qui bourdonnent légèrement, la vision un peu troublée et surtout, la tête, enflée à vingt degrés supérieurs de la moyenne. La jeune femme jette alors la bouteille par terre – parce qu’elle n’en a rien à foutre – avant de regarder l’inconnu qui semble lui parler, ou se parler à soi-même ? « I don’t know, man, just… Fuck, I’m the one who’s drunk and ya’re the one not remembering. That’s lame. » Freya a sûrement dû décréter que de se prendre quelque chose à manger est la meilleure chose à faire dans son état. Pour une fois qu’elle est raisonnable. « Can ya just hurry the fuck up so I can order and go home ? I had a fucking long day. » La patience n’a jamais été dans ses gènes. Et encore moins quand elle est comme ça.

La meuf à côté de moi a l’air bien alcoolisé. Je la regarde et vu son comportement je m’attends à tout. « I don’t know man, just… Fuck, I’m the one who’s drunk and ya’re the one not remembering. That’s lame. » Truth hurts. Elle vient de me mettre une claque sans se rendre compte. Je sais que je suis perturbé ce soir. Ca fait même plusieurs soirs. Beaucoup de nouvelles sont tombés ces derniers temps. Pas des trucs cool… Ca me fatigue grave. Je pensais pas que ça se verrait d’un coup d’oeil venant d’une inconnue qui en plus est saoule. That shit hurts. Je crois que je devrais aller faire un stage chez mes parents. Ca fait un moment que je les ai pas vu. Un bon plat de lasagne, des bisous de ma mère et l’écoute de quelques CDs avec mon père, ça sonne comme la paix sur Terre à ce moment là. La paix de mon esprit. « Can ya just hurry the fuck up so I can order and go home ? I had a fucking long day. »

« You and me both. »

J’ai l’impression qu’on est sur la même longueur d’ondes elle et moi. Qu’on se comprend sans même savoir ce qu’il se passe. It’s just a coincidence. Y’a pas de coincidences. Je m’approche du comptoir et je commande mon hot dog végé que je n’avais pas commandé en fin de compte. Je paie et je me tourne un peu vers la meuf ivre à côté.

« I should probably get drunk too. »

Ca sonne comme le bon mauvais plan de la soirée. J’ai juste besoin d’arrêter de penser. De me libérer l’esprit. De lâcher prise. Mais je sais aussi que quand je me mets ivre alors que je suis préoccupé, ça fini généralement pas bien du tout. Les bad trip c’est franchement pas fun.

« It’s the worst idea so I will do it. »

J’ai envie de dire fuck à tout et tout le monde là. J’ai besoin de redevenir le gars qui malgré ses 30 ans est encore loin d’être un adulte. Je veux pas de responsabilité. Je veux pas de gosse. Je veux pas perdre mon ami. Je veux pas avoir à me forcer dans la vie de Ariane. Je veux rien de tout ça. Je veux juste vivre et arrêter de réfléchir. Faut que je pense à moi en premier et se mettre la mine semble la chose la plus parfaite là maintenant tout de suite. Y’a des bars partout dans cette rue piétonne. Je suis en train de jeter un oeil à mon prochain move. Bar ou épicerie ? J’ai pas envie de me ruiner non plus. Mais j’ai nulle part où aller pour boire. Charlie est chez moi. Charlie. Si je rentre bourré ça risque d’être problématique. Really i don’t give a single fuck about that right now. Je suis encore libre de faire ce que je veux. Me first. Fuck yes.

« You and me both. » Freya arque un sourcil. Elle essaie de percuter. Ce qui est compliqué dans son état. Les lumières de sa tête commencent à vaciller mais ses jambes la tiennent encore debout. Donc c'est une victoire en soi. Elle n'est pas encore perdue. A part qu'elle ne comprend toujours pas pourquoi le gars avec une crinière blonde lui parle encore. « I should probably get drunk too. » Est ce qu'elle a l'air de vouloir écouter ? Freya cligne des yeux. Elle ignore encore s'il s'adresse vraiment à elle ou s'il marmonner pour lui même. Sérieusement, il y a vraiment des gens incompréhensibles dans ce monde. « It’s the worst idea so I will do it. » Freya roule des yeux tout en passant la main sur son visage. Okay, take a breath, girl. Non, le monde ne tangue pas, c'est juste ton imagination.

« Oh god, I can feel the pity party comin’. Are ya gonna do the pity party on me? Ain’t time for that shit right now. » C'est faux, putain, elle n'a rien de mieux à faire. Si, elle beg to differ. Il y a là bas un gamin qui braille qu’elle pourrait aller emmerder. Ou alors un couple qui s’enlace et franchement, ça la rend tellement triste de pas avoir Tim avec elle à ce moment là que son esprit lui dit que ça serait drôle de leur lancer des cacahuètes à la figure. Tiens, ça lui rappelle qu’elle a faim. Peut-être que ça peut tasser le liquide qui noie son estomac et ses intestins. Ou alors ça provoquera la réaction inverse et on ne pourra que constater du gâchis alimentaire. Tant pis, Freya s’en fiche de ça aussi. Elle se commande un hot dog “with tone of ketchup pls” parce que le ketchup, c’est l’essence même de son existence.
Puis la suédoise se rappelle qu’il y a toujours le type à la crinière blonde qui la regarde. Freya capte (enfin) qu’il veut s’en boire une aussi. Une bouteille ou un coup. Oh. Son cerveau fait fonctionner un plus un dans une équation impeccable. Pour une fois, elle qui n'a jamais été douée en maths. Ni en aucun d'autre matière d'ailleurs. Mais quand ses intérêts peuvent entrer en jeu, pourquoi se priver ? Ils peuvent faire d'une pierre deux coups. « If ya buy me something to drink, I try to keep my ears for ya to complain for at least ten minutes, deal? » Et plus encore mais ça, c’est à négocier. If he wants to get wasted, who's she to say no ? En plus, elle est pas obligée d’écouter. L’entendre lui donnera à lui satisfaction d’être écouté somewhat et elle, elle pourra savourer une nouvelle liqueur en faisant sa bonne action de la journée. Voilà, Freya semble ravie de son compromis.
Elle prend son futur repas - mission : le garder dans son estomac - en passant devant lui. Et maintenant qu’elle le voit d’un peu plus près ; « You look like a lion with that hair » qu’elle lui balance comme ça, parce que c’est la première chose qui lui passe à l’esprit et qu’elle est généreuse comme ça. Et c’est probablement la chose la plus sympa qu’elle a pu dire jusqu’à maintenant.

« Oh god, I can feel the pity party comin’. Are ya gonna do the pity party on me ? Ain’t time for that shit right now. » Elle est drôle. Je me fais déjà pitié tout seul comme un grand. Je me fais pitié de croire que je pense à moi d’abord et pas à Charlie qui va peut être faire une remarque de me voir rentrer ivre. She won’t say anything apart’ from ‘i hate you I wanna get drunk too.’ Et cette pensée me fait du bien. Je l’idéalise peut être trop. Mais j’ai envie de croire que je commence à bien la connaître et il vaudrait mieux vu dans le chemin qu’on est en train d’emprunter elle et moi. A fucking kid. Vaut mieux pas que j’y pense. De toute façon on sera plus ensemble d’ici la naissance. Je suis le pire de me dire ça à chaque fois mais on verra bien comment les choses vont évoluer. Me conditionner de cette façon là peut être bénéfique pour un brisage de coeur un peu moins violent. Or so I wish. Mais je réponds pas à la meuf ivre parce qu’elle est en train de commander sa bouffe et je suis pas sûr qu’elle parlait réellement de moi ou à moi. Elle est ivre. Elle devait se parler toute seule. Je vais partir là dessus parce que je sais pas quoi lui répondre. Je remets le nez dans mon téléphone parce que y’a toujours un truc à voir par là bas. A rafraichir. A poster. A liker. « If ya buy me something to drink, I try to keep my ears for ya to complain for at least ten minutes, deal ? » Elle me fait réellement sourire. Elle est drôle. Et le pire c’est que j’apprécie réellement son geste. I am too desperate. Mais c’est vrai que j’ai parlé à personne de tous mes soucis. Parce que mes amis en ont trop sur leur plat pour rajouter ça. Mais non. Je ne compte pas me confier à une meuf bourrer. Ca va servir à rien. « You look like a lion with that hair. » Qu’est ce que je disais. La conversation mènera à rien du tout.

« Usually I’m being told I look aggressively Australian. »

Et c’est pas faux. Ma bouffe est prête, je la prends et je regarde la fille. Je suis un peu dans mes pensées, j’ai esquivé ses propositions gentiment.

« Should we go do some shots next door ? »

Y’a un bar. Y’en a pas qu’un en vrai. Y’en a partout dans cette rue mais celui d’à côté c’est le moins cher. Je m’y connais en bars à Fortitude Valley. Ca fait presque 10 ans j’habite dans le coin. Et j’ai squatté les lieux toute ma vie parce que c’est là qu’il y a la plupart des salles de concerts que j’ai fréquenté en grandissant. Still going there. Ouais ouais. Et je mords dans mon hot dog pour commencer parce que j’ai vraiment faim, c’était pas de la comédie. Je lâche un léger gémissement d’ailleurs parce que ça fait vraiment du bien de manger.

« Usually I’m being told I look aggressively Australian. » Freya eut un hoquet de rire. « Well ya look lik’a lion aggressively Australian then. » C’est vrai que le blond a les cheveux typiques qu’on attend de voir sur la tête des Australiens sur leur planche de surf. Il a l’air bien foutu, en plus – pas que c’est un détail qui a de l’importance mais pas étonnant que le pays des kangourous a une réputation d’avoir de beaux spécimens sur ses plages. « You surf ? ‘Cose if ya surf, you’re definit’ly the Australian cliché. » Elle est presque sans filtre quand elle est comme ça. La race suédoise qu’elle est doit être sûrement plus habituée à tenir sa liqueur mais elle fait exception à la règle. Une bouteille, de n’importe quoi, et c’est fini. C’est pitoyable. Mais bon, le type n’a pas l’air de trop mal s’en accommoder. Au contraire même, il prend son hot dog et se tourne vers elle. Pour lui répondre ? Mieux. « Should we go do some shots next door ? » Freya le regarde comme s’il est la huitième merveille du monde. « Y’know how to speak to a girl. » Elle arrache un morceau de son hot dog dont l’odeur lui donne vraiment très envie – c’est une victoire en soit. Elle pourrait avoir envie de le jeter pour la simple raison qu’il lui donne la nausée mais non.

Et elle veut se remplir l’estomac avant d’ingurgiter plus de liqueur. Freya en profite tant qu’elle a de l’appétit à revendre car elle n’ignore pas que ça ne va pas durer. Ils ont l’air peut-être cons à rester planter devant le shop à manger leurs hot-dogs mais tant pis. La suédoise finit par désigner du menton un bar complètement ouvert de l’extérieur. Il y a du monde, trop à son goût mais hey, c’est elle qui a décidé de passer par là un vendredi soir. C’est une ville animée, Brisbane, et son quartier n’est pas en reste. Et puis, franchement, c’est le bar que son œil guère aguerri désigne comme le plus près. Peut-être qu’un autre est encore plus proche mais il faudrait que la brune se retourne et ça, ce n’est pas envisageable. « This one looks nice. » Freya ne lui demande pas vraiment son avis, à vrai dire, puisqu’elle se dirige vers ledit bar. « Y’know, I’ve seen enough shrinks in my life to know it can be good to talk to strangers. » C’est pour ça qu’elle ne l’a jamais fait, d’ailleurs. Mais ça, il n’est pas censé le savoir. Ça lui ferait perdre toute crédibilité. Elle n’a pas besoin de regarder derrière elle ; elle sent qu’il la suit. Comme un sixième sens qu’on développe parce qu’elle sait que c’est lui qui va payer de toute façon. Et ça non plus, elle ne va pas lui demander son avis. Un deal est un deal. Et promis, elle ne coûtera pas cher. Après avoir joué des coudes, Freya finit par poser son cul sur une chaise de la première table disponible qu’elle croise. « Shoots first. That’s the best way to open my psychological side. » Elle sourit tout en prenant une nouvelle bouchée de son hot-dog – pas dégueulasse, bonne trouvaille, en espérant qu’elle s’en rappelle demain.

« Well ya look lik’a lion aggressively Australian then. » Elle me fait encore rire. « You surf ? ‘Cose if ya surf, you’re definit’ly the Australian cliché. » Elle a raison c’est ça le pire.

« I don’t. I tried. I never took the time to get better at it. »

Pourquoi je me justifie autant ? Je sais pas. Mais c’est trop tard. Je suis un cliché ambulant de toute façon. Pas le cliché de l’Australien apparemment, mais le cliché de l’emo boy pour sûr. J’ai pas vraiment honte. C’est qui je suis. Qui j’étais. Qui je serai toujours. Le gars qui pleure tout le temps. « Y’know how to speak to a girl. » A drunk girl for sure. Parce que sinon, non. Je sais pas parler aux filles. Toujours été un manche pour ça. Je le serai toujours aussi. Si on avait pas autant d’amour commun pour Trophy Eyes et Deaf Havana Charlie et moi je crois qu’on serait pas ensemble. La musique nous a réuni. Elle est tombée sous mon charme. J’ai rien eu à faire. Juste à être moi même. Which is the best. Yeah. I love her. Je continue de manger, la fille ivre en fait de même avant qu’on commence à se diriger vers le bar. « This one looks nice. » This one is cheaper also. Alors j’approuve. « Y’know, I’ve seen enough shrinks in my life to know it can be good to talk to strangers. » Elle parle de moi encore là ? Elle veut vraiment que je lui raconte ma vie ? « Shoots first. That’s the best way to open my psychological side. » Oui. Apparemment c’est bien de moi qu’elle parle. Elle me fait sourire. Je la prends pas du tout au sérieux.

« You’re too drunk to help me in any way. »

Je prends une bouchée de mon hot dog aussi de la voir faire. Je l’ai presque fini. Il était pas si gros. Mais je vais me remplir d’alcool alors tout va bien. Je ne vais pas mourir.

« You. Tell me what is going on. You need to be quick. »

Parce que je vais boire aussi et la rattraper sous peu.

« I’ve seen a few shrinks also. You can count on me. »

Je me trigger du Trophy Eyes tout seul.

« Kidding, don’t take any of my advice. »

Et maintenant The 1975. Je peux tellement parler qu’en paroles de chanson si je veux. Mais je crois qu’on chercherait à m’abattre rapidement comme étant le gars le plus relou de la planète. Charlie would not kill me.

« I don’t. I tried. I never took the time to get better at it. » Pretty fair. Il n'est pas le cliché typique australien alors. Tant pis. Elle s’en remettra. A coups de hot dog dans la bouche. Et de la promesse de verre sous son pif. C’est bien, ça. C’est réconfortant comme pensée - est-ce que c’est pitoyable? Peut-être. Même Freya a l’habitude. C’est son quotidien, rien de nouveau sous le soleil en continu de Brisbane. D’ailleurs, c’est quoi l’arnaque de l’hiver bien trop doux qui finit par s’arrêter pour des jours encore plus beaux, plus chauds? Elle pense que ça fait longtemps qu’elle n’est pas allée en Suède, tiens. Très longtemps. Là bas, l’hiver ne rigole pas. Bordel, si elle avait les moyens financiers, elle pourrait se prendre un billet. Et pour Tim, aussi, s’il le veut bien - il le voudra sûrement. Il lui dira certainement qu’il sera prêt à aller au bout du monde avec elle et elle finira encore sur les rotules parce que ce n’est pas permis d’être aussi cute dans ce monde de brute. Ouais, ça semble être un bon plan mais Doherty n’est pas assez saoul pour ignorer les problèmes financiers qui leur pendent au nez. Alors pour l’instant, ça restera sagement dans sa cabosse submergée d’alcool et voilà.

« You’re too drunk to help me in any way. » Freya tape une main sur la table. « Never said I was here to help. Said here to hear, dieu que c’est compliqué à parler quand on a la bouche pâteuse, Difference. » Parce que les psys, ça écoute plus que ça aide. Et parfois ça fait du bien. Quand y croit et qu'on met de la bonne volonté. Mais Freya n'y a jamais mis de la bonne volonté. La seule chose positive qui est ressortie de ses nombreuses séances, c'est le dessin. La seule façon qu'avait eu l'équipe médicale pour évaluer son psychique après l'incendie de leur appartement. Par leur propre père. Traumatisant as fuck. « And trust me, I can be way more helpful drunk than sober. »

« You. Tell me what is going on. You need to be quick. » « You need to be quick. You’re the late one, buddy. » Oh. Il est en train de retourner le jeu contre elle ou elle rêve ? « I’ve seen a few shrinks also. You can count on me. » Ils sont sur une timezone différente, là. La communication est un peu brouillée. Mais ça va le faire. « Kidding, don’t take any of my advice. » La suédoise finit par sourire. « I ain’t the talking kind of person. I don’t do pity parties. But I'm sure ya can be wise if ya want to. » Elle lève son hot dog qu’elle finit en deux bouchées tout en levant sa main libre pour qu’ils puissent enfin les avoir, ces shoots. « But who thought working in a fuckin’ graveyard would be that fuckin’ exhausting, hum? » Freya parle quand même parce que le stranger lui a quand même dit de lui dire ce qui n’allait pas. My fucking mind. Always causing trouble. It’s exhausting. Mais ça, même bourrée, la suédoise ne le dira pas. C’est à elle de faire avec, un point c’est tout. Mais franchement, taffer dans un cimetière, avec des morts, ça devrait être plus reposant que ça. Hors ça ne l’est pas. Du tout.
Freya tape dans ses mains avec un petit cri de joie quand les verres arrivent devant eux. Une vraie gamine. Du vrai alcool. De quoi oublier encore plus. C’est cool. « Join me in the dark side of the worst ideas. » Un doigt approche un verre du stranger blond. Elle se sentira moins seule comme ça. Limite ça lui donne bonne conscience.

« Never said I was here to help. Said here to hear, Difference.  » C’est bien vrai ça. Elle joue sur les mots et en temps normal ça m’aurait agacé mais pas là. Elle est ivre. Elle n’est pas du tout à prendre au premier degré. Elle a grave de la répartie. Elle est super drôle. Je me demande si elle est pareille sobre. « And trust me, I can be way more helpful drunk than sober. » Ca c’est aussi très vrai pour certaines personnes. Elle est super perspicace et ça me plaît beaucoup chez quelqu’un. « You need to be quick. You’re the late one, buddy. »  She takes no shit et elle me fait toujours autant sourire. Je sens que je peux passer une soirée à me changer les idées à outrance avec elle. Ca marched déjà maintenant alors qu’on parle de nos problèmes malgré tout. We don’t really. No we don’t. « I ain’t the talking kind of person. I don’t do pity parties. But I'm sure ya can be wise if ya want to. » Elle est super attaché à ce terme ‘Pity party’. Elle se répète. Je dois vraiment faire pitier.  Elle engloutit son hot dog et j’applaudis intérieurement sa capacité buccale. « But who thought working in a fuckin’ graveyard would be that fuckin’ exhausting, hum? » In a graveyard?  « Join me in the dark side of the worst ideas. »  Nouveau sourire sur mes lèvres alors que le précédant venait à peine de s’estomper.

« You work in a graveyard? Sounds cool. And believe me I know my share of ‘it’s the worst idea, let’s do it.’ »

J’hoche la tête en même temps, je mords dans mon hot dog et je reprends la parole la bouche pleine. Rien à foutre.

« You know that saying ‘Two wrongs make a good time’ ? »

She probably doesn’t.

« The great James Veck-Gilodi said that. Love that quote. It’s so true. »

J’avale ma bouchée et j’essuie mes doigts sur mon jeans because I can.

« Well maybe not true but I want to believe it is. »

« You work in a graveyard? Sounds cool. » Ouais, Freya aussi trouvait que c’était cool comme idée quand elle a parlé à Tim la première fois. Le silence, le calme, des habitants qui ne vous dérangent pas. Aux premiers abords, ça semble être une super bonne idée. Et d’ailleurs, c’est pour ça que Tim l’a prise sous son aile. Parce qu’elle a montré de l’intérêt et que, par une heureuse coïncidence, il avait besoin de quelqu’un pour le remplacer quelques semaines après. Autant dire que le timing avait été parfait. Mais maintenant, ce soir en tout cas, en sentant ses bras endoloris, Freya maudit Tim. Elle aurait dû l’appeler, tiens. Que ce qu’il a gagné en muscle au camp d’entrainement sert à autre chose que de faire une série de pompes. Quelle conne de ne pas y avoir pensé. « And believe me I know my share of ‘it’s the worst idea, let’s do it.’ » Freya eut un sourire amusé à ça tout en claquant des doigts. Elle va retenir ça. Elle va s’en rappeler et elle va lui balancer quand il le faudra. C’est bizarre comme situation. Elle ne le connait ni d’Adam, ni d’Eve (ni de n’importe où d’ailleurs) et pourtant, il se laisse embringuer pour une série de mini verres. Et en plus il paie. Purée, devrait en avoir plus, des types comme lui. « You know that saying ‘Two wrongs make a good time’ ? » Freya fronce le nez tout en penchant la tête. « The great James Veck-Gilodi said that. Love that quote. It’s so true. »
‘Two wrongs make a good time’. C’est ce qu’il a dit dans sa bouche engloutie de bouffe, n’est-ce pas ? Elle a le nez en l’air, visiblement essayant de connecter ses neurones pour peut être émettre un avis qu’on ne lui a pas demandé. Dans l’état qu’elle est, elle le donnera quand même sûrement. Because she’s generous as fuck. « Well maybe not true but I want to believe it is. »

« Well is Christmas true ? Na but we still want to believe in it. The happy spirit and all that cheesy fuck. So I see nothing wrong to believe in something even if it’s not true. » Freya hausse les épaules. « And it does make sense. We can make it real. Like a point to prove kinda real. » S’il veut s’enivrer, il n’aurait pas pu trouver meilleur partenaire. « I knoooow it sounds cool. I was same. But now, it doesn’t sound that cool. My body doesn’t find it cool at all. Not used to physical stuff. » Au pire, ça lui donnera une bonne raison de demander à Tim de la masser. « So what can trouble a lion aggressively Australian ? Work, love, family, friends ? Not being able to surf? » La suédoise sourit sans retenue avant d’avaler cul sec son premier verre. Y a pas à dire, ça fait du bien quand c’est frais.

« Well is Christmas true ? Na but we still want to believe in it. The happy spirit and all that cheesy fuck. So I see nothing wrong to believe in something even if it’s not true. »

« THAT IS SO TRUE ! »

Genre ce qu’elle vient de dire là ça me fait comme une révélation. J’avais jamais vu ça comme ça et ses mots sont les plus vrais que j’ai jamais entendu holy shit. C’est le premier jour du reste de ma vie. Je suis mindfucked. « And it does make sense. We can make it real. Like a point to prove kinda real. » Ouais parce que j’ai toujours que des bons souvenirs avec ces pires idées. Presque toujours. « I knoooow it sounds cool. I was same. But now, it doesn’t sound that cool. My body doesn’t find it cool at all. Not used to physical stuff. » Ah ouais j’avoue qu’en fait elle doit juste creuser des trous toute la journée c’est ça ? J’en sais rien et je sais pas si je vais oser poser la question. Ca doit être ça. Je me souviens dans le film Garden State y’a aussi un gars qui bosse dans un cimetière et c’est ce qu’il faisait. Il creusait. Mais visiblement elle est pas assez fatigué pour rentrer chez elle au lieu de sortir et boire à outrance. Maybe she didn’t work today. Ouais j’en sais rien en fait. « So what can trouble a lion aggressively Australian ? Work, love, family, friends ? Not being able to surf? » Nouveau sourire sur mes lèvres. A lion aggressively Australian. C’est hot nan ? J’en oublie presque sa question parce que la vérité c’est que j’ai pas envie d’y répondre.

« Not going there. I don’t want to talk about my problems more than we already did. I’m trying to forget tonight. »

C’est triste mais c’est vrai. Je veux oublier que Charlie est enceinte et pas de moi. Je veux oublier que Levi a un cancer et pas moi. Je veux oublier que Ariane a le bras cassé et pas moi. Je veux oublier tout ça.

« Four Jager bombs please ! »

Le barman qui a fait contact visuel avec moi et j’ai pas perdu l’occasion. On a pas fini nos verres mais on va y aller jusque là. Pas envie de me limiter financièrement. Mon père a débloqué mes fonds. J’en ai parlé à personne. J’ai l’impression personne n’a le temps pour entendre plus de trucs que ce qu’il se passe en ce moment déjà. Personne = Levi et Ariane. Ils sont tout mon monde.

« THAT IS SO TRUE ! » Freya pourrait presque être flattée devant l’éclat du lion australien – ça claque quand même un peu comme surnom – si elle ne savait pas déjà qu’elle a raison. Sa parole est indéniable, vous n’avez plus qu’à vous incliner. Oui, en plus d’être wonder woman, Freya est clairement la reine de son monde dans ces moments-là. Si elle ne se flatte un peu, qui le fera de toute façon ? Il parait qu’on n’est jamais mieux servi que par soi-même. Même si c’est faux. Parce qu’elle a actuellement quelqu’un et ce quelqu’un ne manque jamais une occasion de lui rappeler tout le vocabulaire tendre et adorable qu’elle doit l’inspirer. Même si franchement, Doherty n’est pas à associer avec ces mots. Tendre et adorable. Parce qu’elle ne l’est pas. Mais comme Tim est ce qu’il est, elle n’est qu’une petite guimauve who’s trying to put her shit together to be worthy of him. Et ce n’est franchement pas facile tous les jours. Parce qu’il est solaire, parce qu’il est chou, parce qu’il est prévenant et surtout parce qu’il est d’une bienveillance sans faille. Yep, she’s probably going to fall for him if it’s not already happening. Du coup, la hauteur de l’échelle entre eux n’est pas pareille, celle de Freya étant carrément à la ramasse. Faut dire qu’elle n’est pas un cadeau. Et même si elle a le visage typique de la femme poupée (terme qui vous emmènera aux urgences soyez-en sûr) son regard est bien trop dur et trop voilé pour être jugé sympathique. Ce même regard qui flâne sur l’inconnu aux cheveux blonds – c’est dommage qu’elle n’a ni papier ni crayon, ça aurait été drôle d’essayer de le dessiner. Même si ses doigts sont bien trop fébriles là pour tenir quoique ce soit d’autre qu’un verre. Ou deux. En même temps, ouais, elle peut le faire, c’est un talent qu’elle cultive.

« Not going there. I don’t want to talk about my problems more than we already did. I’m trying to forget tonight. » Freya fronce le nez avant de secouer les épaules. « Umph. Fine. I didn’t know not being able to surf is that damaging. Well I guess for an Australian, it’s kinda a shame. Mmh, I’m talking like I don’t belong here but I definitely do… I guess? » Okay, she’s talking no sense now. Pourquoi elle se met à blablater ? Oh, parce qu’elle a déjà la gorge qui picote et que son estomac lui confirme que ce n’est pas le cola qui fait ça. Et puis, s’il ne veut pas parler, il faut bien quelqu’un pour faire la conversation, nan ? « Do we belong 'ere ? » Ouais, vivement que l’inconnu la rejoigne sur le même état spirituel pour que sa connerie n’apparaisse pas telle quelle mais comme une philosophie et une façon de refaire le monde. Le troisième œil est pleinement ouvert – deux bouches se créent alors en conséquence ? C’est possible, tout est possible. Les quatre verres arrivent sous leurs pifs, se cumulant déjà aux plus petits sur la table. « Do y'feel like ya belong 'ere, stranger ? Doing all of these, sa main désigne la globalité des verres, is what y'do ? »
Parce que chez Freya, c’est clairement une spécialité.

Elle aime pas la réponse que je lui donne. Elle a l’air d’avoir envie qu’on lui raconte des histoires. Elle doit vouloir m’écouter pour oublier les siennes d’histoires. Ses problèmes. Non non non, définitivement not going there. « Umph. Fine. I didn’t know not being able to surf is that damaging. Well I guess for an Australian, it’s kinda a shame. Mmh, I’m talking like I don’t belong here but I definitely do… I guess? » Wow this escalated quickly. « Do we belong 'ere ? » Très bonne question et je me déteste de considérer véritablement lui répondre. Y’a 1000 chance qu’elle soit juste en train de se foutre de ma gueule mais j’y fonce tête baissée. Je bois une jager bomb alors que je suis toujours en train de considérer sa question. Je ne crois pas avoir le mal du pays. Je ne crois pas me sentir mal dans cette ville. « Do y'feel like ya belong 'ere, stranger ? Doing all of these is what y'do ? »

« All of these ? »

Je comprends pas du tout à quoi elle fait référence mais je m’attarde pas trop. J’ai faillit oublier qu’elle était ivre. Pas moi. Pas encore.

« I think I feel like I belong here. »

Et voilà. Je rentre dans son jeu. Dans sa réflexion qu’elle m’a fait avec un air beaucoup trop sérieux pour qu’elle se foute de moi.

« But depends where exactly. There are places I love more than others. But that’s just like… Normal stuff. No ? »

Je finis avec une interrogation mais j’attends pas de réponse. Alors je continue assez rapidement.

« I really love this city. I’ve been living here ever since was born. I’ve seen places. Can’t tell I’m happier over there but… »

Moue pensive.

« … It is true that I loved the UK. I could live there if the weather wasn’t so cold. »

Je suis une frileuse bitch en plus d’une sensitive one. J’ai juste pas l’habitude qu’il fasse froid.

« Do you think you belong here ? I can’t reply for you, I barely know you but… »

Parce que j’ai une idée qui me vient.

« Tell me your favourites bands, or favorites albums and I’ll know you better. »

Je promets pas de donner une réponse still. Trop de pression. Trop de merde que je pourrais sortir et ruiner toute ma réputation. Since when do I care ? Yeah, i really don’t. Et la 2e Jager qui y passe. D’un trait. That one belonged in my belle for sure.

« I think I feel like I belong here. » Il a de la chance. Freya n’en sait jamais vraiment rien. Parfois elle est la pure gamine du coin, qui connait chaque rue, chaque sentier, chaque faux grain de sable de la plage artificielle. Elle sait où aller pour profiter du meilleur coucher de soleil et ceux pour être au calme. Elle connait les adresses à éviter parce que trop de monde, mais aussi ceux qui offrent une série de bars tout aussi savoureux les uns que les autres. Mais parfois, elle est une véritable étrangère. Plusieurs dans sa tête, on la regarde bizarrement, elle change trois fois de destination, elle doute, elle ne sait pas où elle va. Elle veut rentrer chez elle mais elle ne peut pas et elle a le temps de faire trois tours sur elle-même avant de capter que non, elle n’a pas bougé, toujours le même paysage, mêmes buildings, même pays. « But depends where exactly. There are places I love more than others. But that’s just like… Normal stuff. No ? » Sounds fair. En même temps, c’est vrai que ça a du sens. Parce qu’on peut se sentir chez soi dans un endroit et ne plus l’être trois pas plus loin. Parce que ce n’est pas le même lieu, c’est différent. Freya boit un verre cul sec, ne prenant pas en compte en premier lieu lequel c’est. « I really love this city. I’ve been living here ever since was born. I’ve seen places. Can’t tell I’m happier over there but… It is true that I loved the UK. I could live there if the weather wasn’t so cold. » Freya eut un léger rire tout en souriant et reposant son verre sur la table. « Oh yeah, feel that. » Mais pas vraiment avec l’Angleterre, encore plus au nord. « Do you think you belong here ? I can’t reply for you, I barely know you but… »

« Sometimes I do. Sometimes I don’t. My family isn’t typical, I’m used being the paria y’know? Like I belong here but I’m not accepted. Because I’m… » Freya fronce le nez, se grate l’oreille, plisse les yeux tout en faisant un signe vague de la main. Dis le, for godsake. « Weird. Yeah, must be that. » Les Doherty ne sont jamais entrés dans les cases de la société. « Now, we should belong here. My bro is a fireman and I’m a gravedigger. But nope, still something to put us apart. » Elle soupire face à cette fatalité. Mais dans le fond, est-ce qu’elle ne cultive pas cette différence ? Peut-être bien mais ça, le stranger est pas supposé le savoir. « I never went to the UK. Never went anywhere outside of Brisbane except Sweden, a looooooong time ago. » Et elle sourit légèrement. « So cold and ice as frozen hell, I can tell ya. » Ce n’est pas pour rien que la jeune femme n’aime pas forcément le temps australien. Même si elle n’a été que quelques fois en Suède, il y a trèèèèèès longtemps, il n’empêche que ses pores ne sont pas faits pour respirer autant de chaleur. Même au bout de vingt sept ans.

« Tell me your favourites bands, or favorites albums and I’ll know you better. » Freya se mord la lèvre. « Oh god. I’m not… I don’t listen bands or albums, but songs. I like remix. I like rhythm. I’m… » Elle prend un shot comme si elle a besoin de courage. Pourtant ce n’est pas la mort qu’il lui demande. Mais c’est tout comme. Ses goûts musicaux peuvent être bizarre. Alors elle s’en tient aux bandes traditionnelles. « Let’s say… The typical one ? Imagine Dragons, Within Temptation, … Krewella? » Parce que tu penses qu’il va savoir à ta place, darling ? « How it can make you know better ? Why would you want that ? »

« Oh yeah, feel that. » Je l’ai vu descendre son verre juste avant de dire ça; Je sens que je vais devoir payer une nouvelle tournée rapidement vu comme elle boit vite. Et du coup comme un con j’essaie de suivre son rythme. Mais j’ai pas besoin de beaucoup d’excuses non plus. C’était aussi mon plan d’action pour ce soir. Boire. Oublier. Essayer de pas pleurer.  « Sometimes I do. Sometimes I don’t. My family isn’t typical, I’m used being the paria y’know? Like I belong here but I’m not accepted. Because I’m… » Je lève un sourcil en l’entendant. Je comprends pas tout ce qu’elle veut dire par là.   « Weird. Yeah, must be that. » Oh. Ca je comprends. I’m weird too. Ca me trigger une chanson d’ailleurs. Je vais pas commencer à lui balancer des lyrics dès que je suis trigger ou elle va me chasser en moins de deux.  « Now, we should belong here. My bro is a fireman and I’m a gravedigger. But nope, still something to put us apart. » Là mon visage s'éclaire d’un coup. Your brother?  « I never went to the UK. Never went anywhere outside of Brisbane except Sweden, a looooooong time ago. » Sweden?  « So cold and ice as frozen hell, I can tell ya. » Frozen hell. J’aime bien ces deux mots ensemble. « Oh god. I’m not… I don’t listen bands or albums, but songs. I like remix. I like rhythm. I’m… » Oh. Dommage. Je connais pas trop ça.  « Let’s say… The typical one ? Imagine Dragons, Within Temptation, … Krewella? » J’hoche la tête. Des noms que je connais là.  « How it can make you know better ? Why would you want that ? »

« How can it make me know you better ? Are you kidding ? It says so much. You listened to Within Tempation so you had an emo phase. I am feeling that. Even tho I never dyed my air black. I was all emo on the inside. Still am to be honest. »

The truth.

« You said you have a brother firefighter. Is he in Brisbane too? Cos there’s one Swedish guy at my fire house and… »

Je penche un peu la tête en la regardant.

« I think you kinda look alike… »

Ou peut être que j’ai déjà trop bu et mon cerveau n’en fait qu’à sa tête.