Don't let the stars get you down
Don't let the waves let you drown

Attentive au moindre de ses gestes, Charlie ne peut s’empêcher d’emmêler ses doigts à ceux de Tim alors que le taxi les emmène déjà en direction de la plage. Le trajet se fait sans un bruit, elle se garde bien de lui faire part de toutes ses craintes et appréhensions alors que la seule chose dont il a besoin c’est qu’elle soit enfin forte à son tour. Comme lui l’a déjà été un millier de fois. Le bout de ses doigts repasse délicatement sur ses phalanges et sur ses veines saillantes avant de finir par venir se loger dans la paume de sa main pour ensuite refuser de la laisser repartir.

Elle a donné pour indication de les emmener sur la dernière plage touristique de la ville avec pour seul but qu’ils puissent réellement prendre une glace pour ensuite s’éloigner de la foule. Elle sait que les promesses sont importantes pour lui, aussi infimes puissent-elles paraître, tout comme elle sait qu’il ne s’en portera que mieux s’ils arrivent à échapper à la masse. C’est en le connaissant aussi bien qu’elle arrive malheureusement à lui faire autant de mal et de toutes les raisons pour lesquelles elle pourrait se détester, celle-ci arrive en tête de liste. Jamais elle ne pourrait cesser de lui dire qu’elle est désolée pour tout ce qu’elle a pu lui faire vivre et tout ce qu’elle s’apprête à lui faire subir sans même le vouloir. Leur nature veut qu’ils s’attirent aussi violemment qu’ils se repoussent, c’est ce qui les caractérise.

Ils finissent par sortir et la blonde lâche sa main sans ne jamais oser la reprendre. Toujours quelques dizaines de centimètres derrière lui, elle ne relâche pas son attention pour autant. Il est la prunelle de ses yeux et tant que l’enfant est encore dans son ventre, il reste la personne qu’elle chérit le plus. Quoi qu’il en coûte et peu importe à quel point ça lui fait mal. ”Dans trois mois on pourra venir sur la plage tous les trois.” La vérité, c’est qu’elle évite les sujets dangereux mais le fait est qu’ils le sont tous devenus désormais ; elle se contente donc d’énoncer chacun de ses mots avec une grande attention et de peser chaque syllabe. La seule chose qu’elle se dit c’est qu’ils pourront toujours être liés par l’amour qu’ils portent à leur enfant à défaut de peut être ne pouvoir se raccrocher à quoi que ce soit.

Elle s’arrête devant le premier stand venu et leur commande une glace à chacun, vanille pour lui, pêche blanche pour elle. Les cornets à peine dans leur main qu’ils commencent déjà à fondre et elle se regarder la glace couler, pataude face à ce spectacle. Elle se contente de rigoler doucement sans réelle raison et tenter de rattraper le carnage. ”Ce n’était peut être pas une si bonne idée que ça, avec cette chaleur.” Les températures avoisinent les quarante degrés, il faut dire. Cian serait sans doute déjà mort de panique de la savoir dehors par une telle température sans au moins trois litres d’eau dans son sac. Pour elle, cependant, cela ne fait aucune sorte d’importance puisque des mots lui brûlent le bout des lèvres. ”Je suis désolée. Pour ce que je t’ai dit la dernière fois, et ce que j’ai dit à propos de Freya. Si tu lui fais confiance alors moi aussi. Je ne veux pas me battre avec personne.” Jamais elle n’a eu à autant ravaler sa fierté mais il faut croire que Tim lui ferait faire n’importe quoi.

Est-ce qu'il serait à la hauteur de la mission? Est-ce qu'il serait un bon père? Un bon soutien pour Charlie? Et dans le même temps, le petit ami idéal pour Freya? Un bon soldat? Un frère parfait en tous points, un meilleur ami suffisamment présent? Les attentes étaient constantes, partout autour de lui et la pression, invivable pour un garçon aussi tendre que Timothy. On ne l'avait pas préparé à autant de luttes à vivre en simultané: dans sa tête, il était encore le gardien de cimetière du quartier, celui qui était dans le décor mais qu'on oubliait bien vite après avoir demandé son chemin entre les allées et c'était une position qui convenait parfaitement à Decastel. Se faire le plus petit possible, qu'on ne le remarque pas, garder bien terrées ces petites appréhensions qui le rongeaient de l'intérieur, faire en sorte qu'il n'ait aucune sorte d'existence importante pour autrui, même pas pour lui même. Il avait presque réussi son challenge, durant plus de trente deux ans en tout cas, il avait fermement tenu le cap et personne n'avait réellement fait l'effort de retenir son prénom en faisant son petit bonhomme de chemin en direction de l'église. Et puis, il avait croisé la route de la chevelure flamboyante de Charlie et tout son univers avait été bousculé. Désormais, il ne pouvait plus se contenter d'être le larbin des pierres tombales avoisinantes, il n'en avait de toute façon plus le droit parce qu'il était devenu important. Essentiel même. Il avait peur pourtant, oui, peur de tant de choses, de l'avenir, de ce qui allait leur arriver d'ici quelques mois et Tim tremblait encore en sortant du véhicule, sentant la main pourtant rassurante de Charlie relâcher la sienne. Il n'osait pas lui dire qu'il voulait encore la sentir dans la sienne parce que c'était interdit, que les astres n'étaient pas alignés au dessus de leur tête respective alors Decastel ne dit rien. Il la suivit à travers le parcours tortueux des touristes qui ahanaient sous la chaleur étouffante de l'été australien. C'était ainsi que les événements devaient se dérouler en période hivernale pour les européens et Timothy ne se sentait spécialement à son aise entouré de tant de gens mais il tint la route parce que Villanelle était à quelques pas d'elle et qu'il devait être fort pour elle. Pour eux. "Tu crois que c'est possible la plage avec un bébé, une poussette et tout l'attirail?" Il n'avait lu aucun mode d'emploi, le brun, et il ne voulait pas se tromper en harnachant un enfant à son dos alors que celui-ci n'était pas prêt pour ce genre d'aventures. Respirer, Tim, accepter la glace à la vanille que la blonde lui tendait, déjà fondante en vue de la chaleur qui augmentait encore, inlassablement. Tim avait l'air de l'ignorer, souriant timidement à la remarque de sa sirène: lui aimait l'idée d'une glace, juste d'être à ses côtés sans qu'il n'y ait de drames et de larmes, pour une fois. Il avait juste besoin de respirer, même si c'était factice, le temps d'une heure ou eux, à essayer de retenir la glace collant à ses doigts très rapidement. Il garda son attention sur Charlie malgré tout, elle qui s'excusait et qui laissait Decastel bouche bée. Il n'avait pas l'habitude, il ne savait pas quoi dire, il avait le coeur qui battait à tout rompre et il devait calmer la tornade, encore et toujours. "Personne va se battre. On va faire ce qu'il faut... Et puis, j'ai pas été très gentil non plus. Je veux juste que ça se tasse tout ça, qu'on oublie, qu'on aille toucher l'eau. Tu veux?" Il lui proposait avec son petit sourire affectueux, reculant déjà vers la mer, espérant qu'elle apaiserait tous leurs maux et ferait d'eux des personnes nouvelles. Enfin ces êtres capables de s'aimer sans se déchirer.

Il lui avait manqué, lui et ses mille questions qui s’inquiètent déjà de ce qu’il pourrait advenir dans plusieurs mois. Ils n’ont même pas idée de ce qu’ils sont en train de faire en ce moment présent mais Tim s’enquiert déjà de voir toujours plus loin. C’est sa manière à lui d’exprimer son optimisme, sans doute, que de déjà penser qu’ils auront un futur, qu’ils iront sur la plage ensemble, que le bébé sera en bonne santé et qu’ils seront tous les trois heureux. Tout semble inné, normal ; mais pour eux c’est tout sauf inné ni même normal. Rien n’a jamais été normal, rien ne leur a jamais été donné. ”On verra bien. On aura une poussette spécial plage, quatre roues motrices, allégée au maximum ; tu vois le genre ? Ça doit être cool.” Elle en sait rien, Charlie. Elle invente, elle sourit, elle tente le tout pour le tout pour qu’il ne s’inquiète plus de rien maintenant.

Les excuses viennent naturellement en même temps que la glace goutte peu à peu en dehors du cornet, Charlie fuit son regard en s’attardant sur les grains de sable s’accrochant à ses chaussures. Sans aucune surprise, Tim ne lui tient rigueur de rien et demande seulement à ce qu’ils passent à autre chose. Elle déglutit lentement et hoche la tête avant d’enfin oser relever ses yeux vers lui. Il lui offre la mer et une porte de sortie ; elle accepte les deux. Cette conversation est une pente glissante et, la connaissant, elle n’aurait su rester neutre que quelques minutes avant de tomber une énième fois dans les extrêmes et lui faire du mal. ”Je veux.” Toucher l’eau pour en oublier les problèmes, c’est aussi utopiste que c’est une bonne idée. La blonde retire ses chaussures avant de se rapprocher au plus près des vagues, sa glace à moitié mangée et à moitié fondue toujours dans la main. Elle joue avec l’eau, tente de battre les vagues à leur propre jeu mais termine toujours happées par elles, quoi qu’il advienne. Alors que l’eau lui monte jusqu’aux chevilles, son bras vient s’enrouler autour de Tim pendant le trajet, sans qu’elle n’y pense réellement. Elle finit par lui faire goûter son parfum de glace et lui le sien et ça leur suffit. Ca leur suffit pour sourire bêtement, ça suffit à Charlie pour lui faire croire que le pire est désormais derrière eux et que maintenant plus rien de mal ne pourra leur arriver.

Fougueuse, joueuse, amoureuse, aussitôt sa glace terminée elle ne sait pas rester en place et la voilà déjà qui s’amuse à jeter de l’eau sur Tim en s’abaissant au moment où les vagues s’échouent sur la côte. Ses éclats de rire viennent ponctuer leur discussion et elle ne cesse de le taquiner avec les moyens mis à sa disposition. Tout ce dont il a besoin c’est de penser à autre chose et pour elle il est tout ce dont elle a besoin. Tout semble converger, pour une fois, et maintenant qu’ils sont assez éloignés et isolés sur la plage elle sait qu’il n’a plus à craindre la présence de personne d’autre. Il n’y a plus qu’eux deux, désormais. Elle a simplement envie de revenir dix ans en arrière, de jouer au chat et à la souris sur la plage, d’enfoncer un pied dans le sable pour mieux s’appuyer dessus et s’enfuir de l’autre côté. Elle veut s’entraîner pour ce jeu auquel elle jouera assurément avec son enfant, courant au ralenti pour lui laisser entrevoir un espoir de fugue. Ses deux mains en viennent à recueillir l’eau pour mieux la lui jeter à la figure et ses éclats de rire deviennent toujours plus sonores, toujours plus enfantins. ”T’es même pas capable de m’attraper je parie.” Et bien sûr que si, il pourrait, parce que des deux c’est elle l’escargot avec un ventre rond comme un ballon. Mais elle s’amuse de croire que non, comme un enfant s’amuserait de croire qu’il peut réellement courir plus vite que ses parents.

Se retrouver comme un enfant à nouveau, ou du moins, vivre comme tel pour la première fois de son existence, c'était quelque chose qui aurait pu faire pleurer Tim s'il n'avait pas déjà tari ses larmes dans le couloir de la psychologue. Il se sentait si faible depuis mais il pouvait compter sur le soutien sans faille de sa sirène pour le tenir à flot et il revivait, peu à peu, en avalant quelques gouttes liquides de sa glace, son regard se portant bien trop fréquemment sur Charlie parce qu'elle était là, qu'il était encore en vie et qu'il s'estimait chanceux de l'avoir dans sa vie. Il ne pouvait pas lui dire, pas en ce moment, pas avec tout ce qui se passait et qu'aucun d'eux ne contrôlait mais un jour, peut être, Decastel retrouverait ce droit vis-à-vis d'elle. En attendant, il était plutôt question d'oublier pour un temps ce qui les séparait, que ce fut Kane, Freya, ou la perspective d'être de mauvais parents. Effacer le tableau des plus noirs et attendre l'avenir sans paniquer. Tout irait bien s'ils se laissaient aller à se retrouver, sans qu'il n'y ait de douleurs au dessus de leur tête. Juste une heure ou deux, juste cela, Timothy ne demandait rien de plus, il n'était pas ivre de pouvoir de toute manière. "Si ça existe pas encore, on l'inventera... Pour notre bébé." Tim n'avait jamais été très plage pourtant, lui qui ne supportait pas la présence des gens, il se plaisait bien plus dans un cimetière, oui, cet endroit vide de civilisation mais depuis qu'il connaissait Charlie, cette tendance changeait peu à peu. Lorsqu'elle était là, il appréciait l'étendue de sable fin et chaud, le bruit des vagues résonnant à ses tympans et surtout, le rire de Villanelle qu'il entendit au moment où elle se fit agresser par une vague surprise. Tim laissa un sourire tendre naître sur son visage et il savait à cet instant précis que jamais elle ne serait remplacée dans son existence, quoiqu'il fasse. Il chassa cette pensée cela dit, observant Charlie s'amuser dans l'eau, son ventre arrondi faisant agrandir le sourire sur le visage du soldat parce que c'était leur enfant qui s'y cachait. Ils le rencontreraient bientôt et leur vie changerait, ils changeraient tous les deux de manière générale. Pour le moment, qu'ils aient cette chance d'être des enfants, Tim recevant les gouttes d'eau de la part de sa sirène en mimant un visage outré de son attitude. Il la laissa faire une fois ou deux supplémentaires avant de s'armer d'eau de mer lui aussi et lui rendre la pareille. "Tu paries quoi? Rêve pas trop, ma sirène, j'ai fait un entraînement intensif au camp, tu peux pas m'échapper..." Et effectivement, elle dût courir quelques mètres avant que les grandes jambes de Timothy ne la rattrapent, ses bras l'entourant avec délicatesse, alors qu'il s'autorisait pour la première fois depuis des mois à sentir son dos contre son buste, ses deux mains se posant sur son ventre arrondi, l'émotion de nouveau présente au fond de ses yeux bleutés. "C'est la meilleure chose qui nous arrivera jamais, tu crois pas?" En tout cas, lui était convaincu que devenir père serait le plus beau moment de son existence et qu'il était heureux de le vivre avec Charlie Villanelle.

Il joue bien le visage outré mais ça sera toujours son expression attendrie qu’elle préferera parmi toutes, celles qu’il n’a jamais eu besoin de mimer. Elle le remercie mille fois de se prendre au jeu, d’oublier ses problèmes pendant un temps au moins pour accepter de redevenir les adultes adultes totalement insouciants qu’ils étaient il y a seulement quelques mois encore. L’hiver dernier ils auraient pu jouer à ce même jeu sans jamais n’en voir la fin, sans jamais ne s’inquiéter de savoir si oui ou non elle peut laisser son ventre exposé au soleil sans protection, sans s’inquiéter de savoir quelle fichu goût de glace elle a le droit de manger ou non. Tout était plus simple il y a quelques mois mais tout est encore plus fort aujourd’hui pour le meilleur et pour le pire. A son tour elle s’offusque de l’eau qu’il lui renvoie au visage, sa bouche affichant un “o” outré. Il se moque d’elle, il la provoque et elle y répond aussitôt avec un sourire sur le bout des lèvres, déjà prête à décamper dans la seconde.

Le sable ne vole pas longtemps sous ses pieds avant qu’il ne la rattrape et qu’elle se retrouve à nouveau protégée par son étreinte l’espace d’une seconde. Il a ses mains sur son ventre, son visage dans son cou et Charlie ferme les yeux une simple seconde pour profiter de sa présence, de son souffle qu’elle sent se perdre dans sa nuque. Une seconde, une seule. Assez pour se souvenir de ce que ça fait, de l’avoir près d’elle sans qu’ils ne se fassent du mal, pas trop pour ne justement pas recommencer à flirter avec l’interdit. Ça ne leur fait plus de mal que de bien. Elle le sait, pour avoir déjà tenté l’expérience à trop de nombreuses. "C'est la meilleure chose qui nous arrivera jamais, tu crois pas?" La blonde ne gesticule plus, ses mains entourent les poignets de Tim et elle sourit à nouveau tendrement en entendant ses paroles. Sa tête se repose un instant en arrière, sur l’une de ses clavicules, avant qu’elle ne se résigne à se dégager de son étreinte. Il a toujours été celui qui était le plus sage des deux mais maintenant c’est à son tour aussi de l’être, d’arrêter de faire reposer tout le poids de leur duo sur ses seules épaules à lui. ”C’est la meilleure chose qui nous soit arrivée pour le moment, en tout cas.” Impossible de parier sur le futur, impossible de continuer à rêver de ce dernier ou de le croire inexistant. Il sera ce qu’il sera, ils en feront partie en temps et en heure, ensemble ou séparément. Quoi qu’il en soit, ils auront cet enfant entre eux. Parce qu’il est la meilleure chose qui leur soit arrivée.

Elle abandonne ses mains, elle abandonne son étreinte et sa présence pour se diriger à nouveau vers la plage déserte. Elle y dépose ses chaussures, elle enlève sa robe ample pour se retrouver en sous vêtements sans qu’il n’y ait aucun sous entendu avec Tim. Elle n’avait pas prévu de passer sa journée avec lui comme elle n’avait pas prévu qu’ils feraient un arrêt par la plage, qu’elle ne pourrait ensuite pas résister à l’envie de se baigner ; elle cette enfant de l’océan. ”Si on va à la plage sans se baigner, c’est comme si on n’était pas allé à la plage.” Elle assure, affirme, sourit de toutes ses dents pour lui faire croire qu’elle est réellement assurée de chacun de ses gestes en cet instant présent. C’est sûrement tout sauf le cas mais rien ne saurait entacher cette seconde partie de journée qu’elle souhaite totalement joyeuse.
Ses pas la conduisent à nouveau vers les vagues, lesquelles l’enveloppent totalement en quelques secondes à peine alors qu’elle leur fait dos, ses yeux seulement posés sur Timothy. Le contexte présent est incomparable à celui d’il y a une heure à peine et elle espère tant ne plus jamais à le voir ainsi, lui qui mérite tant d’être enfin heureux. La blonde rayonne, à présent, tant grâce à sa présence qu’au lieu désert dans lequel ils se retrouvent. "T'en fais pas, j'attendrai au moins cinq minutes avant d'essayer de te couler." L'ironie sa seule arme, l'ironie son seul moyen de lui montrer qu'elle a besoin de lui peu importe les mauvaises idées enfantines qui peuvent lui traverser l'esprit. "J'arrête de t'emmener dans mes plans débiles ensuite, c'est promis. Juste une dernière fois, viens." Après elle lâche l'affaire, après elle vit sa vie et cesse de rêver de lui chaque soir. C'est promis. Juste une dernière fois.

Rien n'était encore décidé pour leur futur et c'était un fait qui effrayait Tim plus qu'il ne pouvait l'avouer. Il avait toujours eu peur de tout, de l'abandon, des coups et des mots qu'on lui assénait, il n'avait jamais été fait pour ce surplus de violence. Malgré tout, il était encore vivant même s'il chancelait encore, plus souvent qu'il n'aurait dû certainement. Decastel aurait aimé être plus fort pour elle parce que Charlie n'aurait pas dû avoir à s'inquiéter pour lui. C'était elle qui avait tant de choses à gérer ces derniers temps, lui n'avait pas le droit de se confronter aussi durement à son angoisse et pourtant, il ne pouvait pas l'empêcher. Timothy n'était qu'humain et pire encore, il était bien plus vulnérable que la majorité d'entre eux, ce qui était une bonne chose pour certains, une horreur pour d'autres. Le brun ne savait pas réellement ce que la blonde en pensait, il n'avait jamais vraiment osé lui demander car il avait toujours eu peur de la réponse, comme il avait encore peur qu'elle le laisse en plan au beau milieu de la plage alors qu'il la serrait contre lui. Néanmoins, ce ne fut pas le cas, pas tout de suite puisqu'elle laissa choir sa tête contre son épaule et Tim sentit son coeur battre plus fort. Il l'empêchait du mieux qu'il pouvait, il essayait mais avec Charlie, rien n'était aussi simple ou même évident. Elle était entrée comme une furie dans sa misérable existence et depuis cet événement, elle fracassait toutes les défenses du jeune homme sur son passage. Tim ne pouvait pas agir contre une réalité aussi forte, la sentant se détacher finalement, non sans qu'il ne lui ait produit un sourire parce qu'elle avait laissé l'avenir en suspens. Ils ne savaient pas encore s'ils feraient mieux que cet enfant, Decastel tâchait de ne pas y penser. Il fallait s'ancrer dans le présent à tout prix, ce qu'il fit en suivant la jeune femme jusqu'à la plage, ses vêtements trempés. Il la regarda s'apprêter pour aller à l'eau, son petit sourire ne le quittant pas. Il savait qu'elle était venue jusque là pour cette raison, retrouver l'insouciance de deux gamins au fond de l'eau mais le soldat n'était jamais certain de prendre les bonnes décisions, plus récemment en tout cas. Il la regarda courir vers l'eau et s'y retrouver happée, sa respiration plus poussive à ce moment là. Pourvu que l'angoisse ne le guette pas de nouveau, Charlie méritait mieux que cette réaction après tous ses efforts pour le ramener à lui, et à elle par extension. "Me couler? T'oserais couler le père du bébé, toi?" Il lui fit un clin d'oeil, toujours sans bouger, puis il respira plus vigoureusement, se délestant d'une couche de vêtements à son tour, se dirigeant jusqu'à l'eau timidement. "Tu peux pas promettre ça, tu le sais bien... Parce que je t'y suivrais toujours en plus, ça nous manquerait sûrement." Il plongea dans l'eau, s'essuyant ensuite les yeux et les cheveux en retrouvant la surface, s'approchant de Charlie avec volonté. "Et qui apprendrait les plans foireux à notre enfant si t'arrêtes? J'suis pas capable, je suis juste celui qui lui apprendra à faire survivre des fleurs, tu le sais mieux que personne." Il était trop doux pour ce monde, se relevant sur ses jambes en toisant la jeune femme d'un sourire affectueux. "Merci d'être toujours là." Merci de m'aimer malgré tout, c'était ce qu'il voulait lui dire et lui rendre aussi, d'un simple sourire. "Et là, c'est le moment où t'essayes de me noyer, c'est ça?" Sous l'eau, il ne penserait plus à rien. Il disparaîtrait peut être, même si ce n'était que quelques secondes et une partie de lui en serait soulagé, c'était le plus dur à accepter. Charlie était là, cela dit dit, alors Tim remonterait à la surface. Pour elle et le bébé.

”On est tous les deux, il n’y a personne à mille millions de kilomètres à la rond, aucun témoin. C’est le parfait endroit pour commettre un crime, non ?” Qu’elle exagère, qu’elle ponctue par des gestes extravagants, qu’elle sourit. C’est le parfait endroit pour t’aimer. Ici personne ne les juge, ici personne ne fait de mal à Tim. Ils ne sont que tous les deux et parfois c’est tout ce dont ils ont besoin pour apprendre à se retrouver. Pour lui, elle oserait tout. C’est ce qu’il faut retenir de leur histoire. Elle oserait tout, du pire au meilleur, du légal au beaucoup moins. Il n’y a plus de limites quand il s’agit de lui.

Il la ramène à la réalité en lui rappelant que les plans débiles et elles ne font qu’un, qu’elle et lui ne font qu’un aussi. Ils sont un tout, à prend ou à laisser ; et cela fait bien longtemps qu’ils ont choisit de tout prendre. Et en plus, il la suivra toujours. Il l’a dit, ça résonne dans son esprit. Ces deux mots et leurs milliers de sous entendus et d’espoirs enfouis. ”T’as raison, ça nous manquerait trop.” La blonde qui souligne les mots qui font moins mal, ceux qui sont tout aussi véridiques. Ils sont habitués aux plans foireux, aux idées débiles qui tournent mal, à une séance de cinéma qui mène au début et à la fin de leur aventure. Ils partent d’un rien, ils en font tout. Et ils le détruisent trop vite, trop fort, sans avoir eu le temps d’en profiter. Alors pour le moment elle se contente de l’observer sans cesser de sourire, elle voit ses yeux bleus devenir encore plus beaux avec le reflet de l’eau et les jeux de rayons du soleil. Elle le voit devenir encore plus beau et encore plus inaccessible à chaque nouvelle brasse qui fait en sa direction, elle qui se contente de rester sur la pointe des pieds. ”Il aura plein d’amis pour lui apprendre les plans foireux mais un seul papa pour lui faire gagner le concours botanique de l’école.” Tim qui minimise toujours tout, Tim qui fait comme s’il n’était pas vital à Charlie et à leur enfant à naître. Et ça aussi, elle le sait mieux que personne, qu’il minimise un million de fois le rôle qu’il joue déjà dans sa vie.

"Merci d'être toujours là."

Ces mots là, cependant, elle ne les avait pas prédits. Elle n’aurait jamais cru qu’il irait à nouveau sur ce terrain, qu’il serait le premier à parler avec tant de franchise alors qu’elle ne cesse de se restreindre. Et elle ne lui en veut pas, bien sûr qu’elle ne lui en veut pas. Bien au contraire. Charlie fait de son mieux pour contenir son émotion, sans doute bien plus importante que ce qu’elle aurait cru. Il la surplombe toujours autant, même dans l’eau, mais elle tend quand même ses bras au maximum pour arriver à poser ses mains derrière sa nuque, laquelle elle caresse doucement de ses pouces. Ils sont proches par ce geste, éloignée par la distance qu’elle continue de garder entre eux. Le sourire de la jeune femme est faible mais plus existant que jamais. Alors, incapable de l’embrasser sur le front, elle ferme ses yeux bleus un instant pour déposer un baiser sur ses joues sans n’ajouter aucun mot. Ils savent déjà tous deux ce dont il en retourne, cela ne fait aucun doute.
Il change l’ambiance avec sa question à la seconde qui suit et le rire de Charlie ne se fait pas attendre en même temps qu’elle en profite pour détacher ses bras et lever les yeux au ciel avec exagération. ”Non, quelle idée ! Je patienterai pour le moment où tu t’y attendras le moins, sinon c’est pas drôle.” Faussement outrée, la blonde fait une nouvelle brasse pour reculer de quelques centimètres et positionner ses lèvres au niveau même de l’eau. Ses cheveux flottent derrière elle, sa main protège son ventre sans discontinuer et elle profite d’un instant de flottement pour remplir sa bouche d’eau et la jeter sur Tim ensuite, la seconde qui suit. Son sourire taquin s’agrandit encore un peu plus et elle recommence à rire sans que cela ne fasse réellement sens. ”Si quelqu’un apprend à faire ça à notre enfant, il est un homme mort.” Elle l’imagine déjà en train de vouloir prendre de l’eau dans sa bouche et tantôt s’étouffer tantôt en mettre partout dans la salle de bain. Aucun de ces scénarios n’est souhaitable. ”T’as des idées ? De prénom ?” Le changement de sujet est brutal mais soudainement elle ressent le besoin d’en parler, comme s’il pouvait arriver dans la seconde et avait besoin d’un patronyme.

Il lui faudrait encore un peu de temps pour tenir debout sans avoir quelques vertiges mais la condition physique de Tim finirait par s'améliorer, ce qui était plus compliqué à gérer, c'était surtout sa santé mentale. Depuis tout petit, il avait accumulé tant de malheurs, tant d'instants de doutes et de peurs que Decastel n'arrivait plus à maîtriser quoique ce fut. Il n'avait jamais été bien dans sa peau, se trouvant toujours trop ou pas assez, en tout cas, bien trop loin des standards de cette société et cela le tuait peu à peu. Au quotidien, il rencontrait des tonnes de personnes qui avaient l'air si assurées dans leurs faits et gestes quand lui s'embrouillait en excuses pour avoir osé commencer une conversation sans demander si son interlocuteur allait bien. Il se flagellait pour tout, constamment et se blâmait d'exister, tout cela parce que sa mère lui en avait toujours voulu d'être dans ses pattes quand elle aurait aimé obtenir un de ses rêves les plus profonds. Tim n'était qu'une source de déceptions et ce message s'était enregistré dans son cerveau de manière irrémédiable et encore aujourd'hui, il ressentait le poids du fardeau qu'il devait être sur les épaules de Charlie et il en avait mal au coeur. Elle méritait tellement mieux que ce qu'il lui offrait ces derniers mois, lui ce bourreau infâme, incapable de la regarder en face et d'arrêter de se mentir mais Timothy n'avait jamais rien appris qui pourrait lui être utile en termes de relations humaines, alors il faisait ce qu'il pouvait avec le peu d'armes qu'il avait en sa possession. "Et tu me laisserais disparaître dans l'océan?" On l'oublierait bien vite au milieu des poissons et Tim n'en serait pas troublé de vivre une telle fin, il considérait qu'il la méritait de toute façon. Il n'allait néanmoins pas le dire en face de Charlie, préférant lui sourire de tout son coeur et de toute son âme, parce que c'était la personne qu'il avait toujours été: le gamin rieur et serviable, toujours généreux et philanthrope, loin de s'intéresser à ses propres états d'âme. Celles-ci ne comptaient plus maintenant qu'il était au fond de l'océan en face de Charlie, elle qui avait l'air de retrouver son insouciance, beaucoup plus aisément que Decastel pour sûr. "Je sais pas si ça fait encore fureur les concours de botanique mais l'idée me plait, tu vois." Tim adorait les jardins et il était plus que paré à apprendre tout ce qu'il savait sur la question à son petit bout. En plus, il avait suffisamment de patience pour supporter les mille questions qui s'échapperaient de la bouche de l'enfant: le soldat ne se rendait pas compte mais il serait probablement un excellent père. Il n'était pas quelqu'un qu'il considérait d'excellent à l'heure actuelle mais il accueillit le doux baiser de Charlie sur sa joue en rougissant un peu. Par ce geste, il comprenait qu'il l'avait touchée sans forcément l'avoir voulu, juste parce qu'il était honnête et c'était un fait, Timothy avait besoin d'elle. Elle s'éloigna finalement et le jeune brun ne s'arrêta pas de lui sourire, même lorsqu'elle le menaça à nouveau avant de passer à l'acte, Tim hochant la tête en soufflant de son insolence mais il n'en était pas dérangé plus que cela. Le jeu lui allait, cela faisait du bien à son âme en peine alors, il espérait qu'elle allait continuer dans cette veine. "Et si c'est toi qui lui apprend, on fait quoi?" Il lui fit un clin d'oeil amusé, ils feraient sûrement des bêtises de ce genre tous les deux mais ils s'en sortiraient, ensemble. "J'y ai pas trop pensé jusque là... Je crois que j'avais peur de le faire, si jamais le bébé arrivait pas. T'en as, toi? Je suis pas difficile, du moment que ça te plaît, je serais content aussi." Tim et sa générosité sans faille, son cerveau s'actionnant pour trouver quelques idées. Il voulait juste que le bébé naisse et se porte bien, le reste n'était que subsidiaire. "Tu crois qu'il prendra quoi de nous?" Il se posait forcément la question, l'angoisse se lisant dans son regard si, justement, l'enfant prenait cette part de son père. Tim le refusait, il en aurait le coeur brisé.

"Je ne te laisserai disparaître nulle part." Mon amour. La réponse est franche, tranchée. Impossible de revenir sur ces mots ci, impossible que cela ne serait-ce lui traverse l’esprit. Il a ces mots qu'elle aurait pu avoir il y a de ça quelques mois encore et la blonde a une idée de tout ce qui peut malheureusement se passer dans son coeur. Encore une fois elle aimerait pouvoir faire plus, elle aimerait être tout simplement utile à son bon rétablissement mais si elle se rapproche trop de lui cela ne fera qu'empirer les choses. Le paradoxe est difficile à gérer, les espoirs égoïstes de la blonde reposent sur le fait que bientôt ils sauront trouver l’équilibre qu’ils n’ont jamais eu et enfin être ensemble.

La seule manière qu’elle trouve pour lui changer les idées est de retourner en enfance et c’est un jeu auquel elle se prête aisément, un sourire sur le coin des lèvres bien décidé à subsister quoi qu’il advienne. "Je lui apprendrai seulement le minimum vital pour faire rire ses amis à l'école. Le reste il l'appendra seul je pense." La blonde ne se fait aucune illusion là dessus, leur enfant apprendra bien assez tôt comment faire toutes les bêtises de l’univers et les rendre fou. Il dessinera sur les murs, jettera sa nourriture partout, se collera n’importe quoi dans les cheveux, annoncera qu’il a faim à n’importe quelle heure du jour et de la nuit. En bref, il sera un enfant normal. Il ne subira pas les erreurs de ses parents, c’est au moins une chose sur laquelle ils sont tous les deux d’accord. Le clin d’oeil de Tim la rassure même si son sourire est cachée dans l’eau translucide. Il se lit au moins dans ses yeux. "Tim ... Je sais que ça a été loin d'être facile et ... y'a eu des hauts et des bas. Mais maintenant tout va bien. C'est le troisième semestre, tu as entendu les médecins comme moi, ils sont confiants.” Ils sont confiant alors les futurs parents doivent l’être aussi, maintenant que plus aucun démon n’est encore dans sa tête. Elle a à coeur de le rassurer après avoir été la source de toutes ses inquiétudes, c’est un devoir qu’elle prend au sérieux. Son sourire disparaît pour qu’elle prenne une expression plus sérieuse, davantage sûre d’elle même. Charlie se relève et vient dérober la main de Tim pour la poser sur son ventre et ainsi lui assurer la bonne santé de leur enfant. "Cet enfant, c'est autant le tien que le mien. On trouvera un prénom tous les deux. On trouvera des parrains tous les deux ... sans le truc religieux tout autour, juste deux personnes à qui on pourrait confier notre vie et la sienne. Ouais, juste ça.” Le sourire revient en même temps que sa maladresse à choisir les mots adaptés à la situation. Les noms, elle les a déjà en tête, tant pour le prénom du bébé que celui des deux personnes sur qui elle pourrait compter quoi qu’il arrive. Ce n’est sûrement pas encore le moment d’en parler, ni même le lieu. Trop tôt. Ils ont encore trois mois avant qu’il ne pointe le bout de son nez et beaucoup de choses peuvent encore arriver.

La main libre de la monde joue à la surface de l’eau, crée de plus petites ondes là où l’océan conçoit d’immenses vagues. A chacun son échelle. "Il aura ta délicatesse. Il aura ta patience ... peut être pas les premières années, c'est vrai, mais il la gagnera bien assez vite. Il aura tes cheveux qui bouclent maintenant qu'ils sont mouillés, il aura cette semi fossette, là, dans le coin de ta joue." Le bout de son index s’y enfonce légèrement parce que même s’il ne sourit pas en cet instant elle se souvient de l’emplacement de cette marque sur son visage. Elle se souvient de chacune des marques caractéristiques de sa peau, de toutes celles qu’elle a pu voir, de toutes les autres qu’elle a pu effleurer du bout des doigts. Elle se souvient de tout et pour rien au monde elle ne voudrait oublier une seule des secondes passée à ses côtés. "Je lui donnerai un grain de folie, un seul. Ca sera bien suffisant."

Il avait besoin d'elle et elle de lui, c'était le contrat qu'ils avaient dû signer sans s'en rendre compte le jour de leur rencontre. A croire que leur destin était lié depuis le début, en tout cas, Tim avait du mal à en douter quand il lui offrait ce genre de sourire parce qu'elle lui assurait qu'elle ne le laisserait jamais disparaître. A la base, ce n'était qu'une plaisanterie sur une tentative de noyade mais au final, le message était bien plus profond que cela. Elle voulait sûrement dire qu'elle ne désirait pas qu'il quitte sa vie à un moment donné et la réciproque était vraie, même si rien n'était simple entre eux depuis les prémisses. Ils n'avaient fait que vivre le pire, entrecoupés de moments de joie intenses mais jamais ils n'avaient eu l'occasion de se perdre dans des instants d'une étonnante normalité. Après la crise que venait d'avoir Tim, on doutait que ce jour-là entrerait dans cette catégorie mais ces quelques minutes passées sur le plage se rapprochaient de ce qu'ils pouvaient espérer obtenir à un moment donné... Un semblant de normalité, une espèce de dynamique familiale, même si rien de tout cela n'avait l'air clair et définitif à l'heure actuelle. Decastel essayait de ne pas s'en inquiéter, écoutant simplement le discours de la jeune femme après un instant de proximité auquel ils durent couper court, sachant très bien que tout leur était interdit jusque là. "Tu lui apprendras le meilleur." Decastel ne doutait pas une seule seconde de la capacité de Villanelle à être une mère exemplaire, elle s'était si bien rattrapée depuis ses dérapages. Timothy avait eu si peur à ce moment-là, il avait vraiment cru que leur bébé était condamné mais il s'avérait qu'il était encore bien vivace à l'intérieur du ventre de la blonde, celle-ci venant porter sa main jusqu'à lui. Tim avait tant douté de ce qui se passerait, il n'avait même pas pris le temps de penser à la réalité des faits, à tout ce qu'ils allaient devoir prendre comme décision en commençant par le choix du prénom. "Je le suis aussi, maintenant. Et bien sûr que je veux qu'on trouve un prénom, des gens de confiance pour le bébé au cas où on disparaîtrait... Je suis prêt pour tout ça, je t'assure." Il ne l'avait jamais été autant, même s'il avait l'air si fébrile ces derniers temps. Le soldat avait besoin de devenir père, de se remettre sur le droit chemin et d'arrêter d'appréhender l'avenir. Celui-ci s'offrait à lui, il n'avait qu'à le saisir, sourire en avant en écoutant la remarque de sa sirène. Il rougit, forcément, sinon il n'aurait pas été Tim, avant d'attraper Charlie par la main et la ramener vers le rivage, les pieds encore dans l'eau. Il s'agenouilla devant elle et caressa son ventre, ses yeux bleutés portés là, s'osant pour la première fois à parler à l'être qui grandissait à l'intérieur. "Je suis désolé de t'avoir jamais parlé, mon bébé... Je vais me rattraper pour être le papa que tu mérites et j'espère que tu auras un deuxième grain de folie héritée de ta maman. Et puis, son rire aussi. Sa force. Après, je serai pas contre l'héritage de ma fossette ou mon amour des plantes mais l'important, c'est que tu existes. Que tu nous rejoignes bientôt parce qu'on est impatients, ta mère et moi." Et les yeux bleutés de Tim remontèrent vers ceux de Charlie, sa main caressant encore son ventre arrondi, l'émotion se lisant dans sa voix, l'écume caressant ses genoux sans qu'il n'en ait quelque chose à faire. Tim rêvait juste de cette famille qui se formerait bientôt, espérant être à la hauteur du petit être dans le ventre de sa mère, sinon Timothy n'y survivrait pas.

Elle assure que leur enfant saura prendre les plus belles parties de la personnalité de Tim et il en fait de même avec elle dans un effet miroir. Aucun n’accepte les compliments de l’autre mais tous deux savent qu’il est désormais bien inutile de nier, que l’autre saura défendre ses arguments coûte que coûte. Parce qu’au fond ils seront tous deux certains de ce qu’ils avancent. Plus sûr de lui qu’il ne l’a jamais été, le brun campe sur ses positions, s’affirme doucement mais sûrement à propos du choix du prénom et des parrains, laissant ainsi naître un sourire discret mais pourtant bien présent sur les lèvres de Charlie. Il a tant changé, depuis la première fois où elle l’a rencontré. Il n’est plus du tout le même, il a mûri, il s’est endurci. Sans doute que tout est allé trop vite, trop fort, qu’il a du se briser pour mieux se reconstruire ensuite … Mais maintenant ils y sont, maintenant chacun accepte les choix de l’autre et fait de son mieux pour l’aider à continuer à grandir. Ils joindront leurs forces pour s’occuper de leur enfant et ils le feront avec passion et ferveur, comme ils le font déjà l’un pour l’autre. ”Je sais que tu l’es.” Elle trouve à peine le temps de murmurer, yeux bleus dans yeux bleus, avant d’à nouveau se laisser guider sur le rivage.

La main du trentenaire entoure la sienne et ses doigts se mettent instinctivement à chercher les siens, n’importe quoi, même le pouce. Un simple ancrage sur lequel se reposer le temps du trajet, quelques secondes à peine, comme si l’importance était capitale. Pour elle, ça l’est. Lorsqu’elle finit par relâcher sa main, elle ne s’attendait pas à un spectacle de ce genre. Depuis longtemps elle n’avait pas eu à être aussi émotive et des larmes de joie n’ont pas coulé sur ses joues depuis sans doute bien trop de temps. Elle a un sourire ému, des larmes encore pour un instant retenues dans ses yeux. Sa main s’est reposée sur la nuque de Tim, elle joue doucement de ses cheveux mouillés alors qu’il parle à leur enfant avec encore plus de délicatesse que ce à quoi il l’avait habitué. Elle ne pensait pas la chose possible mais Tim continue de l’étonner de jouer en jour.

Ses lèvres pincées, elle se retient de ne pas se laisser déborder par ses émotions. A son tour, elle se met au niveau de Tim et laisse ses genoux se poser sur le sable, sous elle. Il peut continuer à lui parler de cette manière sans qu’il ne soit obligé de relever les yeux pour la voir elle. Ils sont mieux, là, chacun à hauteur de l’autre, leur futur enfant entre eux, l’émotion à son paroxysme. ”On n’a peut être pas toujours été parfaits mais maintenant il n’y a plus de raison pour qu’il y ait de problèmes. Dans trois mois on pourra lui parler et il n’aura pas encore la capacité de nous dire qu’il en a marre de nous. On a encore un peu de répit.” Elle prévoit déjà quand ils devront l’aider à apprendre à lire, elle prévoit la crise d’adolescence à venir, elle prévoit les négociations ardues pour dormir chez les amis en plein milieu semaine. Elle prévoit tout ça avec leur enfant, leur petit eux, un être humain qui aura la fossette de Tim et le rire de Charlie ; et ça ça lui convient parfaitement.

”Le médecin a donné le sexe du bébé lors de mon dernier rendez-vous, sans le faire exprès.” Elle avoue avec un sourire sur le bout des lèvres, plus amusée par la situation qu’autre chose. Ce n’était pas un secret d’Etat, elle n’en a jamais fait toute une histoire. ”Tu veux savoir ? Si non promis je garderai mieux le secret que le médecin et tu auras la surprise le jour J.” Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise réponse et elle cherche réellement à le rassurer à ce propos là, emprisonnant à nouveau ses mains dans les siennes sans jamais les retirer de son ventre. Quelques secondes de plus, quelques minutes. Le temps qu’il aille mieux, un temps pour qu’elle profite de sa présence pour se sentir bien.

Dès qu'il pensait à son futur rôle de père, Tim semblait retrouver pleine possession de ses moyens. C'était comme s'il oubliait le moindre de ses tracas, la manière dont sa cage thoracique comprimait ses poumons et ce, dès le réveil jusqu'au coucher. Plus rien d'autre ne comptait que ce petit être qui rejoindrait leur vie bientôt, Timothy n'attendait plus que cela. Enfin, le destin lui offrait un objectif clair de vie: s'occuper de quelqu'un d'autre que lui, tenter à tout prix d'offrir la stabilité qu'il n'avait jamais obtenu avec son propre enfant et il était autant impatient qu'effrayé. Heureusement, dans cette affaire, il n'était pas seul parce que Charlie restait fermement ancrée à ses côtés, à le rassurer sur ses capacités, répéter encore et toujours qu'il était prêt pour tout ce qui allait changer dans leur existence respective. Decastel le croyait sincèrement, même si rien ne serait simple vu les complications dues à leur situation mais ce n'était pas l'essentiel à ce moment-là, non, bien au contraire, Tim ne pensait qu'à l'avenir. Plus à ses crises, plus à ses petits malheurs et ses incertitudes persistantes, il ne voulait que partager un moment tendre avec son enfant... Pour la première fois en plusieurs mois. Le brun n'avait jamais osé, de peur qu'il ne disparaisse avant cette fameuse rencontre alors, entraîner Villanelle sur le rivage pour se poster à genoux devant elle, laisser sortir les mots qui lui brûlaient les lèvres depuis des semaines, c'était une aide précieuse pour que son coeur redémarre. Après une crise d'une telle intensité, le soldat ne s'en serait pas cru capable mais c'était à croire qu'il avait encore un bon lot de ressources insoupçonnées et la réaction de Charlie devait en être la preuve première. Elle était émue, il le sentait en posant ses mains sur le ventre arrondi, ses yeux finissant par se poser dans les siens, voyant des larmes briller au coeur de ses prunelles bleues et il la trouvait belle, peut être plus encore qu'auparavant et c'était clairement ce qui aurait dû le faire arrêter tout agissement. Non, il la regarda choir face à lui, leurs deux têtes se retrouvant au même niveau, Tim ne lâchant pas la pression douce sur son ventre, captant le regard de Charlie avec ce demi sourire qui le caractérisait si bien. "Même si on a pas une seconde de répit, je suis impatient." Il avait peur, bien sûr, mais il voulait rencontrer leur enfant. Il se sentait à la hauteur de la tâche, même s'il était nul en bricolage de berceaux, qu'il avait besoin de passer une heure ou deux dans un placard pour calmer la peur panique qui l'assaillait encore fréquemment. Tant que le bébé faisait son apparition dans leur vie, Tim se remettrait de tout. Il regardait d'ailleurs sa sirène avec cette lueur d'espoir au fond des yeux, sentant ceux-ci briller lorsque Charlie lui annonça qu'elle savait le sexe du bébé. Le coeur de Tim s'arrêta une bonne dizaine de secondes, comme tétanisé car tout se jouait maintenant, même si la blonde lui exposait qu'il n'était pas obligé de l'apprendre avant la naissance. "Je suis si triste de pas avoir été là... Faut que tu me racontes tout en détail, dis moi, je veux savoir. Même si j'aimerai notre bébé avec tout ce que je peux, qu'importe son sexe mais je pense que tu t'en doutes déjà." Effectivement, il caressait la peau du ventre de Charlie en espérant qu'il se manifeste, heureux de retrouver son père et Decastel attendait la réponse, de l'eau coulant sur ses joues et ses yeux bleus qui pétillaient d'une émotion nouvelle. Il allait être le plus heureux des hommes sous peu, ce qui dénotait clairement avec son état de l'heure précédente mais quand il était en si bons termes avec Charlie, on ne pouvait jamais s'en étonner. C'était sa sirène, c'était celle qui portait leur petit ange et c'était elle qui le berçait d'un espoir renouvelé. Leur famille, voilà ce que Timothy irait toujours chercher parce qu'il avait besoin d'elle, autant qu'il avait envie d'être à ses côtés, quitte à se brûler les ailes. Il acceptait l'inévitable, pour elle.

L’attention de Charlie se concentre uniquement sur Tim, maintenant plus que jamais. Elle se moque des vagues qui viennent leur titiller les genoux, elle se moque de la faible brise qui fait s’éveiller sur ses bras les premiers indices de chair de poule. La vérité c’est que le monde pourrait s’arrêter de tourner qu’elle n’en aurait rien à faire non plus, pas quand elle a l’occasion de voir les yeux bleus de Tim briller de manière aussi naturelle et délicate. Ce sont les yeux d’un futur père, et elle les aime beaucoup, ces yeux là. Elle les aime bien plus que de raison, elle voudrait ne jamais les voir partir, ne jamais les voir s’éteindre. Ce moment est un des rares de bonheur qu’elle peut lui offrir alors elle en profite. ”Je sais que t’aimeras cet enfant quoi qu’il arrive.” La blonde a encore beaucoup de doutes quant à son futur, quant à leur, quant à celui de l’enfant ; mais jamais elle n’oserait douter de la capacité de Tim à l’aimer et à être un bon père. Tout reste encore flou, rien ne peut être anticipé parce qu’ils ne savent même pas de quoi demain sera fait … mais ils y croient encore. La jeune mère se veut pourtant rassurante, ses mains caressant doucement celles de Tim, ses yeux toujours plonges dans les siens.

Elle ne fait pas durer le suspens, ne veut pas se jouer de Tim de cette manière ci - il a déjà assez vécu, déjà assez subit. Même si elle a une confiance aveugle en lui, elle n’est toujours pas maîtresse de ses émotions et son coeur s’accélère significativement en même temps que son visage commence à lui donner chaud. Pourtant elle fait de son mieux pour rester calme, pour profiter de ce moment comme un nouveau pas vers la vie de famille. Son visage finit par s’avancer vers le sien, son front se pose sur le sien, ses cheveux blonds et mouillés viennent caresser son visage. Elle finit par chuchoter, tel un secret que seuls eux deux devraient savoir. ”Un garçon. Ca sera … c’est un petit garçon. On va avoir un fils.”

Sans doute que le chuchotement était là pour cacher son émotion mais il faut bien avouer que c’est peine perdue, que sa voix se brise entre les phrases pourtant raccourcies au maximum. Personne ne lui a jamais appris à annoncer de telles choses, personne ne lui a jamais dit qu’en prononçant enfin ces mots à voix haute cela rendrait le tout encore plus réel que jamais. Cette fois ci les larmes coulent sur ses joues, se mêlent aux dernières gouttes de l’océan. ”C’est de la joie. Je te jure que c’est de la joie.” Elle a dévié du droit chemin tellement de fois qu’elle se sent désormais obligée de justifier la moindre de ses actions, la moindre de ses émotions. Elle ne veut plus risquer aucune mauvaise interprétation et désormais sa vie se résume seulement à être certaine que tout ira bien pour leur enfant. Leur fils. ”Ca sera un mini toi. Un mini jardinier en herbe.” Elle libère une main, caresse la joue de Tim, toujours trop émue de l’instant.

Tout devenait plus réel que jamais et Tim ne s'y était pas spécialement préparé. Il agissait avec naturel, sans se poser trop de questions sur ce qui se passerait lorsque le bébé arriverait dans le petit monde. Tout allait changer, fatalement, mais Decastel ne savait pas encore à quel point. A l'heure actuelle, ce n'était pas tellement ce qui comptait, mais plutôt le fait qu'il partage cette appréhension avec Charlie, celle qui avait déjà tout transformé dans sa petite existence morne. Sa Villanelle à genoux juste devant lui et qui le rassurait encore une fois sur son aptitude à gérer un petit être en dehors de lui. Le soldat n'avait jamais été très doué pour s'occuper de lui même mais son côté philanthrope le rendait plus qu'apte à gérer le bébé à naître. Il pensait d'ores et déjà à tout ce qu'il pourrait lui apprendre et tout ce qu'il pourrait lui dire une fois qu'il n'y aurait plus le ventre de Charlie pour les séparer. Pour le moment, il caressait cette paroi de peau avec énormément de tendresse parce que c'était le fruit de leur amour qui se trouvait juste derrière et Timothy ne pouvait pas réellement s'en détacher, pas plus qu'il ne pouvait relâcher le regard de sa belle sirène. Il lui souriait, sentant son coeur se mettre à battre plus vite en apprenant que la blonde était au courant du sexe du bébé depuis quelques temps. Il voulait savoir et lui demander était une source de stress immense, ce qui était idiot en soi puisqu'il allait aimer ce bébé quoiqu'il arrive, qu'il fut une fille ou un garçon. Il sentit le front de Charlie se poser contre le sien et Tim ferma les yeux, dans l'attente, l'émotion le submergeant déjà, avant qu'il ne sache de quoi il en retournait. Et puis, la consécration. Un garçon. Un si beau garçon qui serait un mélange d'eux deux. Tim se répandit en larmes en même temps qu'en sourires parce qu'il était si heureux, il ne contrôlait rien du tout. Absolument rien. Ses deux mains se posèrent sur les joues de Charlie qu'il caressa avec un bonheur non dissimulé, essayant quelques larmes qui y coulaient, juste quelques secondes avant qu'il ne les ramène contre son ventre pour accueillir ce futur garçon qu'il aimait déjà plus que tout au monde. "Un petit garçon, je suis tellement content, Charlie, c'est tellement beau ce qui nous arrive... Mais pleure plus, je vais pleurer encore plus si tu continues." Il eut un sourire amusé, si fier d'elle, si fier d'eux. Il ne pourrait jamais l'aimer plus que cela parce qu'elle lui apportait un de ses plus beaux rêves, même dans une situation des plus imparfaites. "J'espère qu'il aimera autant les M&M's que sa maman... Gabriel?" Cela lui était venu naturellement, sans qu'il ne contrôle quoique ce fut, son visage s'écartant de celui de Charlie pour que ses yeux puissent observer le ventre arrondi de la jolie blonde, ses mains encore à la surface, des larmes coulant encore alors qu'il essayait de contenir son rythme cardiaque et sa respiration. Peine perdue. Il était tellement heureux.

Sur leurs joues coulent encore plus de larmes qu’il n’y a d’eau dans l’Océan. Le bonheur se lit sur leur visage même si n’importe quelle personne non aguerrie pourrait croire qu’un des deux vient d’annoncer une terrible nouvelle à l’autre. Si seulement ils savaient. Si seulement ils savaient qu’aussi loin qu’elle s’en souvienne ils n’ont pas connu de moment aussi heureux que celui-ci, un moment dans lequel ils s’accordent tous les deux, un moment dans lequel ils ont le même avis sur ce qui compte le plus. Ils l’aimeront, cet enfant. Ils l’aimeront plus que tout, leur fils. Ils sera l’enfant roi par exemple, ça va s’en dire. Le premier né, sans doute le dernier aussi. Il sera la prunelle de leurs yeux, leur étoile dans la nuit. La plus belle, la plus immense, la plus brillante de toutes les étoiles qu’il puisse exister. A n’en pas douter.

Elle finit par trouver la force pour rigoler doucement. ”Dans la version officielle on va omettre qu’on pleure comme des gamins, d’accord ?” Cette histoire, ils l’auront conté mille fois à leur enfant, ce moment où ils ont appris qu’ils allaient élever un garçon et qu’étrangement cela ne changeait rien à leur plan. Ils ne vont rien peindre en bleu, ne pas se perdre dans le cliché des activités liées au football et aux jouets de bricolage. Ils feront mieux, pour lui, ils passeront outre tous ces clichés qu’ils ont comme seule envie de faire exploser. Elle le laisse sécher les larmes sur ses joues rosée et fait de même sur les siennes d’une manière assez pathétique. Ils ont beau ne pas arrêter de pleurer, leur sourire sont immenses, ineffaçables, inoubliables.

Un prénom s’échappe des lèvres de Tim et elle plante ses yeux dans les siens une seconde de plus, surprise. Gabriel. Gabriel. Ce sera Gabriel, alors. Elle qui était la première à lui rappeler que cet enfant est le leur à tous les deux et que chacune des décisions doit être prise avec l’accord de l’autre … cette fois-ci elle est plus que d’accord. Gabriel, leur ange. Ô que c’est cheesy, ô qu’elle se déteste déjà mais ô combien que ce prénom si simple lui procure tant d’émotions. En quelque secondes il vient de devenir celui de leur enfant. Leur fils qui s’appellera Gabriel, qui aura la fossette de son père, qui aura le rire de sa mère, qui aura les yeux encore plus bleus que le ciel et l’océan réunis. Leurs yeux à tous les deux, réunis dans un parfait mélange.

Elle se penche à son tour vers son ventre, parle à son enfant comme elle le fait si rarement. ”Gabriel … Si tu savais à quel point je t’aime déjà. Tu a déjà détrôné ton papa et tu n’es même pas encore né.” Et trois mois, ça semble être une éternité. Trois mois, c’est peut être la moitié de ce qu’elle vient déjà de vivre … mais ça reste une éternité à ses yeux. Elle voudrait pouvoir l’avoir dans ses bras à l’instant, elle voudrait pouvoir l’observer pendant des heures, elle voudrait s’inquiéter de la température de son biberon et la calibrer au degrés près. Avec lui, elle ne ratera rien. C’est promis. Pas de faux pas, pas d’écarts. Elle sera une mère exemplaire, elle sera tout ce qu’elle n’a pas su être jusque là.

Ses bras s’enroulent autour des épaules de Tim (une dernière fois, elle se le promet) et elle ferme les yeux quelques secondes de plus pour profiter de l’instant. ”Je t’aime tant, toi aussi. Je sais que faut pas, je sais … Je sais que c’est pas pareil de ton côté. Je sais. Réponds rien. Dis rien, s’il te plait.” Cette douloureuse évidence, elle ne la connaît que trop bien. Ce n’est pas pour autant qu’elle a gagné la capacité de garder ses émotions pour elle même, surtout pas quand il s’agit de Tim. Cela n’arrivera sûrement pas. ”Gabriel est un prénom magnifique.”