Et il n'avait rien à faire là Jack, absolument rien du tout.
Il n'avait pas d'argent, les poches vides en permanence d'un fric qui lui brûlait les doigts à chaque moment où il le touchait.
Il n'avait pas affaire à être installé à une table aussi populaire, aussi populeuse, la partie de poker qui se trame sous ses yeux lui fait autant peur qu'elle le fascine.
Il devrait pas être là, il a suivi ses gars, des musiciens encore et toujours eux, un groupe qu'il a signé y'a des mois de ça, un groupe qui apparemment a pas qu'une apparence de mauvais garçons, un groupe qui traîne dangereusement dans l'un des endroits les plus dangereux de la ville.

Il devrait pas être là et il le sait, quand sa main se braque sur son porte-feuille, qu'il s'apprête à miser à nouveau. Il a suivi, il a mangé, il a bu. Il les a écouté parler musique, il a renchérit dès qu'il a pu. Et il allait partir. Il allait rentrer à la maison, retrouver une demeure complètement vide d'une Ellie encore une fois partie découvrir le monde de ses yeux quand ceux de son père la lassaient parfois, souvent. Il n'avait pas prévu rester, et encore moins les suivre à l'arrière du restaurant, assez qu'il n'a même pas retenu le mot de passe pour passer les gardes, qu'il est conscient de ne pas avoir sa place ici.

Mais il brûle Jack, il brûle et il le nie depuis si longtemps. Il brûle de ses mauvais plis, il brûle comme le whisky qui s'en prend à sa langue à chaque nouvelle lampée, il brûle comme la clope qu'il a aux lèvres, qu'il renouvelle chaque fois qu'on lui prend ses jetons, chaque fois qu'il perd grassement sans le voir comme un signal d'alarme, d'arrêt.

Et il continue de jouer, il perd, les musiciens autour de lui gagnent, et les autres gars qu'il ne connaît pas d'ici ni d'ailleurs. Les autres joueurs qu'il n'a jamais vus de sa vie et qui l'ignorent sauvagement verront bientôt qu'il n'a pas misé sur une si pire main depuis le début de la partie, qu'il est foutu, littéralement foutu.

« Un dernier tour et on part? » que Clyde lui souffle à l'oreille, probablement sournois, assurément rusé, pour jeter un coup d'oeil aux cartes qu'Epstein a encore entre ses paumes fatiguées, le regard qu'il renvoie à son ami l'est tout autant. « J'ai fini, j'vous attends dehors. » et il fait mine de se relever Jack, il est prêt à prendre pour une fois dans sa vie une bonne décision, la seule qui lui semble logique sur l'instant. Sa veste de cuir qu'il passe sur ses épaules, et son regard qui croise celui d'une petite blonde qui entre au même moment. Ses iris qui se greffent aux siens, la drôle d'impression qui l'immobilise sur place. Il allait partir, il se l'était juré. Et pourtant il se rassoie, et pourtant, il ne la lâche pas des yeux.

Sa silhouette précède tout, il l'écoute attentivement quand elle s'arque, quand elle jauge les gens présents, qu'il ne voit qu'elle. « Mais qui voilà, bonsoir Clyde. » « Ça fait longtemps » leur passif intéresse pas Epstein, il connaît son pote, il le sait capable de s'entourer des meilleures âmes comme de celles desquelles se méfier ; il l'a vu au fond du baril comme à poser chaque geste dans l'espoir vil de dominer son monde. Il le connaît par coeur pour avoir grandit avec lui, pour avoir été à ses côtés dans les pires comme les meilleurs moments, l'inverse étant toute aussi vraie. Mais ce soir, ce n'est pas la nostalgie de leur amitié qui voile son regard à Jack, ni même l'éphémère du contrat récemment signé, mais bien l'intérêt envers celle qui semble toujours à un geste de s'échapper, à un mot de s'envoler.

« Je crois pas qu’on ait été présentés. Vous ramenez des amis maintenant les garçons ? » ses lèvres s'adressent aux autres, ses yeux ne regardent que lui et il se replace dans son siège le musicien, il se demande ce qu'ils ont à dire à son sujet, ce que Clyde a à dire. Mais il laisse pas le temps à personne d'articuler quoi que ce soit quand il se présente lui-même, quand il cède au silence pesant de sa voix rauque, qu'on aurait presque pu qualifier de cassée. « Jack. » il a une vie derrière lui, il a un monde qu'il cache dans son mutisme, dans sa réserve, il baigne dans le mystère Jack et il ne le réalise même pas. « Raelyn. La maison t’a offert à boire pour ta première visite ? » et elle se présente et elle s'appuie sur une chaise et elle a l'air d'avoir l'endroit au complet au bout d'une ficelle imaginaire et il ne remarque rien d'autre, n'enregistre rien d'autre que son prénom. « Pas à ce que je sache. » il laisse un fin, un espiègle sourire en coin orner ses lèvres, ses iris qui dérivent vers le verre qu'elle tient, l'alcool ambré qu'il reconnaît par la robe, qu'il tente de deviner par le parfum. « Il partait de toute façon. » Clyde s'amuse, Clyde pique et Jack lui, il est ailleurs.

« Vous devriez essayer le Gibson's, 18 ans d'âge. » il est canadien, on le comprend de suite, lui et son whisky, lui et ses barils d'érable, lui et ses contrées lointaines, lui et son hiver qui n'en finit pas. « Enfin, si vous avez envie d'autre chose que du scotch. » pourtant ici, maintenant, c'est pas du froid dont il est question.

Il est fatigué, il devrait rentrer. L'heure tourne, Ellie erre il sait pas où, il a fait son temps ici, il voulait même pas traîner auparavant. Et pourtant ses yeux sont scotchés sur elle, tant même qu'il ne s'en cache pas. Jack qui n'a clairement plus l'âge ni l'envie de camoufler quoi que ce soit, trop transparent, trop honnête de toute façon. Il carburer à l'authenticité, il est de ceux qui n'en ont rien à faire de mettre ses travers de l'avant, d'afficher quoi que ce soit. Les masques ne lui font pas, ils sont trop moulés à d'autres, il les refuse du revers de la main pour afficher ses vraies couleurs, toujours.

« Un canadien donc je suppose ? » en plein dans le mile. Epstein qui acquiesce d'un signe de tête en la voyant se dégager un instant. Les autres autour de la table ont initié une nouvelle manche, le musicien lui, il ne les écoute pas, ne les écoute plus. Il cherche ce qu'elle a de différent, il cherche d'où s'attache ce qu'elle dégage, il cherche trop et il trouve, elle aussi, quand d'un geste aussi naturel que calculé elle attrape la bouteille qui lui fait de l'oeil, la lui dédie pour un verre, pour une nuit. « J’espère que pour commencer ça te conviendra, c’est tout ce que je peux faire dans l’immédiat. » « J'en attendais pas autant. » qu'il lâche, joueur, il s'y plaît. Et elle s'installe là, juste là. Il sent son parfum remonter à ses sens, il sent sa silhouette à une distance beaucoup trop loin de lui, charmé qu'il est, électrifié qu'il cède. « Comme ça t’allais t’en aller ? » oh, qu'elle joue elle aussi. « Faut pas que mon arrivée perturbe tes plans. »

« J'ai jamais vraiment tenu mes plans. » il a jamais voulu, faut-il préciser. Il a jamais été organisé, toujours diffus, toujours désorganisé. « Et c'est bien mieux maintenant que j'ai quelqu'un pour m'expliquer les règles. » qu'il ridiculise, il diminue le fait qu'il a largement perdu. Il en tient pas rigueur de ses dettes, il ne fait qu'en ajouter de nouvelles au lot, il s'en étonne presque plus. Quand son verre finit enfin par monter à ses lèvres, que les gars leur font signe que s'ils veulent entrer dans la partie, une place est libre. Jack qui refuse de nouveau, mais que pour lui. Il ignore si elle, elle osera.

Elle reste, il reste, elle est intéressante la suite des choses. Parce que Jack a soudainement totalement oublié ce qu'il avait à faire, il en est à ne même plus y penser s'il était franc, s'il se l'avouait à lui-même plutôt que d'aborder les fameux plans. « Pourquoi t’en fais alors ? » ceux qu'elle ridiculise avec le sourire aux lèvres, ce sourire qu'il n'arriverait jamais à décrypter même s'il couvait son visage d'une multitude de coups d'oeil des plus curieux aux plus intrusifs. Elle est belle Raelyn, elle a un charisme qui le cloue sur place et une voix qui enchanterait n'importe quel abruti prêt à tout faire pour qu'elle lui adresse la parole. « Me dis pas que t’es le genre à penser que ça t’évitera de faire des conneries. » n'importe quel abruti comme lui, en somme. « Au contraire. Ça les encourage. » il en remet Jack, parce qu'il le sait de quel bois il est fait. Il le sait que malgré les années et les histoires, que malgré la drogue qu'il a retirée au mieux de ses pensées et les mauvais plans qu'elle amenait, il ne restait qu'une âme bohème, un homme incapable de se poser où que ce soit, pour quoi que ce soit. Qui se rebellerait dès qu'on lui mettra de l'autorité sous n'importe quelle forme entre les pattes. Il le faisait, pour Ellie. Il le faisait enfin et il était plus que temps. Elle était bien la seule et unique raison, au final, pour qu'il les tienne, ses maigres plans.

« Moi je vais jouer. » son sourcil se hausse, il n'en est pas du tout décontenancé Jack. Le whisky à ses lèvres goûte le miel, goûte la fumée, il siffle à l'avalée, il savoure. Et le jeu qu'elle met en place, et l'alcool qui brûle sa langue, réveille ses sens. Il est tenté de fermer ses yeux Epstein, que chaque goutte ait son moment de gloire, mais ça serait sacrifier les coups d'oeil entendus, le charme totalement assumé à la dévolue de Raelyn. « Eh vous deux, pas de triche. » on grogne, il renchérit. « Je sais pas jouer. » expression maligne aux lèvres, c'est vrai qu'il sait pas jouer, qu'il n'est qu'une suite de ratés que sa feuille au compteur des dettes le souligne si bien. Mais pour l'heure, il sait reconnaître une bonne main, il sait qu'elle en a une, et il se cale dans son siège pas le moins du monde stressé, pressé. « Ouais, ouais. » ça râle de voir le sourire en coin qui ne quitte pas les lèvres de Jack, ça râle qu'il sache quelque chose qu'ils ne savent pas. Et égoïstement, il raffole de ne le partager qu'avec elle.  

Il se lève, à un moment. Pour se dégourdir les jambes, pour lui servir un verre aussi, elle est à sec. Naïfs autres joueurs qui le laissent faire, qui sont trop occupés dans une partie qui s'échelonne maintenant depuis de longues minutes d'intense jeu pour remarquer à quel point il lorgne Jack, comment il triche. « Lui, à gauche. Fais-le augmenter sa mise. » qu'il chuchote à l'oreille de la blonde, complice. C'est parce qu'il l'aide à assurer la victoire, faut dire.

« Je te préviens, si tu me fais perdre mon argent je t’en voudrais beaucoup. » son sourcil qu'il hausse Jack, il joue, bien sûr qu'il joue. « Ce sont des menaces? » parce qu'elle aurait toutes les raisons du monde de lui faire peur, parce que l'argent lui brûle les doigts et que ses dettes s'accumulent à Epstein. Parce que la façon dont on la regarde lui suggère qu'elle est importante ici, trop pour qu'il foute le bordel, trop pour qu'il s'y risque aussi. « Je croyais que tu ne savais pas jouer. » il hausse innocemment l'épaule, se régale d'une nouvelle lampée d'alcool, laisse un air mutin couronner son visage non sans répliquer sur le même ton moqueur, murmuré qu'elle. « J'ai deux yeux et ils savent voir, par contre. »

La partie qu'ils semblent ignorer parfois, trop pour ne pas être suspects. Elle s'y plaît, au jeu des murmures, il s'y plaît, au jeu des confidences. Et ils oublient les autres, un temps, « Me fais pas croire que t’utilises pas l’excuse de la partie de carte pour venir te glisser plus près de moi. » un fin sourire qui n'a pas fini de lâcher ses lèvres à Jack, il fait rouler entre ses paumes son verre, celui qu'elle lui a d'abord amené avant qu'il ne le remplisse, celui qu'elle a utilsé comme offrande, comme alibi de proximité. « Chacun ses astuces. » et il le souligne le musicien, il s'en amuse, il s'en régale bien évidemment, et pas que du whisky on s'entend.

« Si je gagne, qu’est-ce que je gagne ? » bien sûr. Bien sûr qu'il écoute, qu'il n'entend qu'elle, ne voit qu'elle. Il replonge Jack, il y va tâtons mais il recommence à flirter avec ses manies d'avant. Celles qui ont ruiné autant sa vie qu'on adoucit ses nuits. Il a un scénario tout tracé en tête parce que c'est toujours comme cela que ça se termine. Et pourtant il recommence, il connaît le début, il connait la fin, il en ignore l'entre-deux et c'est bien ça, ce qui rend le tout grisant. « Je sais pas jouer, mais je pense que tout ça, ça s'ra à toi. » oh le fourbe, oh le vil, oh Jack. Il désigne la table entre deux doubles-sens. Et il sourit, et il lui encourage un sourire à elle aussi.

« Blackwell, ton tour. » leur proximité énerve, leurs chuchotements sont remarqués, il n'en a rien à faire Jack. Quand il dégaine sa clope et son briquet, quand il fait craquer la flamme, qu'il inspire profondément. « Pour la chance. » la cigarette qu'il lui tend aussi, si poli.

« C’est pas une réponse ça. » il est dilué le canadien, il est prudent, il place ses pions alors qu'elle agite ses cartes.

Il a appris à fonctionner comme ça, à mettre le temps qu'il faut, les mots qu'il faut, il ne presse rien et on le lui a reproché des dizaines de fois. Mais il préfère apprécier le moment, il préfère laisser le temps au temps. Et si elle fronce du nez, et si elle pique, il ne s'en amuse qu'un peu plus. « Les autres ont misé de l’argent, moi aussi. Toi, tu mises quoi ? » elle presse Raelyn, elle presse et il se cale sur son siège, l'homme qui n'a rien, le type qui a un jour tout perdu, le gars qui roule sa bosse sans demander d'aide à personne, celui qui n'a jamais été matérialiste du plus loin qu'il se souvienne. « Qu'est-ce que j'ai qui t'intéresse? » il a sa musique, il a ses mots, il a ses histoires, il a ses mains, ses baisers.

Il a son regard aussi, embrumé, même regard qui repère une silhouette qui erre un peu plus proche d'eux depuis quelques minutes. Ils partagent un coup d'oeil elle et lui, il le note, la clope au bec. « Je suis, et je relance. » elle accepte la cigarette qu'il lui tend, Epstein qui dégaine son briquet sans lâcher le profil de la blonde, sans arrêter de le détailler, il mémorise les traits, il profite de leur intimité exacerbée.

La pierre craque, il se penche et allume sa cigarette à elle, quelques millimètres qui les séparent à peine mais il ne s'en barde pas, son sourire en coin restant inévitablement scotché sur ses lèvres. « Il te regarde. » Jack qui est persuadé qu'elle sait de qui il parle, elle l'a remarqué, comment ne pouvait-il pas en être autrement. Mais il n'est pas jaloux l'Epstein, il constate seulement, tirant sur sa clope avant de se décaler, de casser leur proximité pour la retrouver à la seconde où il murmure à nouveau son oreille. « Tu y vas all in, ou tu bluffes? » il demande pour le jeu, il demande pour leur spectateur, il demande pour lui, il demande pour tout.

« Qu'est-ce que j'ai qui t'intéresse? »
« Toi. »

Elle a le mérite d'être franche, elle a le mérite de lui plaire. Il n'est pas fan des mots et s'en régale Epstein, parce qu'elle gère ce volet quand ses silences à lui guident le reste. Lui, il observe. Il observe le jeu, il l'observe elle, et il le voit, l'autre, qui les observe eux deux. « Je sais. » et apparemment il n'est pas plus alerte que qui que ce soit quand elle ne s'en étonne pas, qu'il tire sur sa clope sans lui demander plus d'explications sur une situation qui ne l'intéresse pas, qui ne le regarde pas non plus. « Il fait ça souvent. » à peine il hoche de la tête, simplement dans l'optique qu'elle voit qu'il a entendu. « La compétition te fait peur ? » un fin sourire vient se nicher sur ses lèvres au canadien. S'il n'aime pas la compétition, il n'en laisse point rien paraître. Plutôt, il statue avec amusement l'évidence. « C'est lui qui est là-bas, c'est moi qui est ici. » la fumée qu'il souffle loin d'elle, la silhouette de l'autre homme qu'ainsi il masque une seconde de plus au compteur ; le leur.

« Je sais pas faire les choses à moitié. Je vais toujours jusqu’au bout des choses. » il ne s'en étonne pas de ça. Il ne s'en étonne pas non plus qu'elle dirige le jeu, que les autres se couchent au fur et à mesure, qu'elle garde la main et la mine, et qu'il y assiste dans la plus confortable des contemplations. « Et toi ? » on le qualifie de lâche mais jamais de peureux. On le qualifie de calme mais jamais de dissipé. On le qualifie d'âme bohème, mais jamais ça ne lui a nuit. « J'aime pas dire non. » son sourire ne fait que grandir, la lueur au creux de ses prunelles résonnant au creux des siennes à elle. All in donc.

« On part? » les cartes sont jetées, elle en sort victorieuse, il n'a pas suivi le reste de la partie mais il veut la suivre elle. « T'as gagné, apparemment. » qu'il pouffe, sa clope qu'il éteint du bout des doigts, jetant le mégot dans le cendrier devant eux. Fin, oh qu'il est fin stratège Jack, quand il finit par se pencher vers elle, niche sa main près de sa nuque, sans même toucher à une parcelle de son épiderme. Ses mots remontent à son oreille à nouveau, elle l'entendra dans sa voix, son sourire. « Rassure-moi, il suivra pas? J'aime pas partager. »

« Je gagne toujours. » « Vaut mieux t'avoir dans son équipe, alors. » et pour un perdant comme lui, ça pince. Mais il sourit Jack, il a son whisky d'un côté, il a les yeux pétillants de l'éternelle gagnante de l'autre. Parce qu'au final, si la partie l'ennuie, elle beaucoup moins. Il n'a pas besoin de voir leur étalage de richesses à tous, il a encore moins besoin de réaliser à quel point ils réussissent en puissance quand lui, il a à peine de quoi payer son loyer d'aussi longtemps qu'il se souvienne. La clope éteinte qu'il cède fait place à une nouvelle qu'il glisse entre ses lèvres sans l'allumer, s'occupant comme il peut sans jamais lâcher les prunelles de sa prunelle d'une soirée.

Ils ont un spectateur, il lui accorderait probablement de l'importance si elle n'était pas aussi blasée à son sujet. « Je te rassure, j’aime pas partager non plus. » il n'est pas de ceux qui posent des questions de toute façon Jack. Il déteste bien trop souvent les réponses qu'on lui donne, entre les mensonges et les faux-semblants il lui en faut peu pour décrocher et passer au suivant. « Heureux de voir qu'on en est venus à une entente. » la vérité reste qu'il a passé sa vie à partager Jack. Qu'il a partagé des nuits entières ailleurs, avec d'autres, et qu'il s'y complaît en éternelle âme dissipée, hypothétique volage qu'il est.

« Il suivra pas. C’est pas faute d’avoir déjà essayé, mais faut croire qu’il est pas intéressé. » il aurait presque envie de lui prouver le contraire, Epstein. Il aurait presque envie de prendre la défense de l'inconnu s'il ne voyait pas en lui sa propre lâcheté. Lui dire à elle que c'est probablement la preuve qu'il s'y intéresse justement, qu'il s'y intéresse tellement trop qu'il s'auto-sabote lui dans l'espoir de ne pas l'auto-saboter elle. « Et toi tu suivras ? » mais déjà il oublie, à nouveau. Sa silhouette se lève à sa suite, son bras passe autour des épaules de la blonde et ses lèvres qui se nichent à la hauteur de sa nuque pour y murmurer sans le moindre contact, un temps. « Ça casse la magie, de demander. » l'instant d'après il effleure sa peau de la sienne, ses pas s'adaptant aux siens.