“Les prétextes n'ont jamais besoin d'être vraisemblables ; autrement, ils seraient des raisons, non des prétextes.” △
J'avais tellement de chose en tête ces derniers temps qu'il m'était compliqué de mettre un chemin sur ce qui était le plus important. Edge était entré à l'hôpital et par logique, je rentrais dans une maison vide. Je n'aimais pas les endroits vides de vie. Parce que ça m'obligeait à réfléchir et ce n'est pas forcément ce que j'avais envie de faire. Le week end dernier, j'avais pu avoir mes enfants et ils ont suffit à me rendre déjà bien plus heureux que n'importe qui.
Il y a une petite semaine, j'avais pu faire la rencontre d'Archibald aussi. Un jeune homme plutôt mignon qui a une fâcheuse tendance à s'attirer facilement les ennuies. Et la soirée avait été plutôt marrante. Entre éviter les conneries, boire et parler de tout et de rien. Je m'étais amusé. Et j'avais dans l'idée de recommencer. D'autant plus que celui-ci à garder ma veste. Donc, je n'avais pas d'autre choix que d'aller le voir. D'autant plus que ça risque d'être marrant de voir l'expression sur son visage quand je me pointerais chez lui. Moi aussi, j'avais quelques amis dans la police alors obtenir son adresse a été plutôt simple. Bien qu'un peu creepy étant donné notre différence d'âge.
Je n'y avais pas pensé comme ça jusque là. Parce que je n'ai pas de mauvaises intentions envers lui. Je crois que je n'aurai jamais de mauvaises intentions envers qui que ce soit. Il l'avait dit, lui-même, j'étais bien trop gentil. A voir par la suite si c'est vraiment négatif ou non. Oh, je n'aime pas la rétrospective que je fais sur moi-même...
Je ne travaillais pas cet après-midi. De ce fait, la fatigue que je devrais ressentir passer 17h n'était pas présente. Et je ne pouvais pas débarquer chez Archibald a n'importe quelle heure. Déjà, parce qu'il avait un métier. Un métier un peu plus compliqué que le mien. Alors débarquer au moment où il n'est pas là était plus que probable. J'attrapais mes clés de voiture ainsi que ma veste. Heureusement que j'avais plusieurs vestes parce que je passerais plus de temps à me cailler qu'autre chose. C'est que c'était la plus chaude qu'il avait en plus. Sans compter qu'il y avait tout mes papiers. J'aurai peut-être du les récupérer avant. Of, ce n'était pas perdu.
Je sortais de la maison et grimpais dans la voiture. Redcliff n'était pas trop loin de Toowoong. Le pire restait le trafic puisque tout le monde rentrait plus ou moins chez eux. La sortie du travail ne pardonnait pas. Il me fallu quelques minutes pour atteindre Victoria Avenue. C'était un quartier assez fréquenté et j'ai du tourner un peu avant de pouvoir me garer plus haut. Les transports en commun aurait pu être bien plus rapide mais je ne pense pas qu'il y aurait encore des transports si je m'éternise un peu chez Archibald. Une fois hors de ma voiture, je ferme à clé et grimpe au numéro 30 avant de frapper à la porte. Je glisse les mains dans les poches de ma veste et me débarrasse de mon bonnet. La température extérieure n'était pas la plus haute alors autant dire que je préférais parer tout rhume éventuel. Je patientais devant la porte, attendant simplement qu'il n'ouvre. Et quand ce fut fait, je penche la tête avec douceur.
- Salut ! Je te dérange pas ?
Parce que bon, si c'est le cas. Autant que je ne reste pas là. Loin de moi l'envie de faire chier les gens. Je souris avec gentillesse.
« Les prétextes n'ont jamais besoin d'être vraisemblables ; autrement, ils seraient des raisons, non des prétextes. »
C’est la première fois que je passe trois jours sans un rebondissement, trois jours sans une seule galère. C’est calme, beaucoup trop calme et je me méfie. Les journées sont aussi longues que mes cernes, j’ai l’impression que plus rien n’avance. L’hiver ne m’a jamais réussi, jamais, le mois de décembre est un mois maudit pour moi. Je n’ai jamais fêté Noël en famille, cela devait sans doute être pour ça, je n’en sais rien. J’essaye de me trouver des excuses parce qu’en réalité, je n’en ai aucune idée et je n’aime pas être dans le flou. Je crois que c’est la pire des sensations, le flou, l’incompréhension et pourtant je m’y retrouve souvent confronté dans mon métier, tous les jours que Dieu fait.
Sur le chemin du retour, je fais la rétrospective de ces derniers mois ; je me suis battu, j’ai retrouvé des anciens amis, j’ai aidé Oakley, j’ai rencontré des gens, j’ai commencé à haïr mon boss et j’ai failli me retrouver à l’hôpital. Bon, ça peut aller. J’ai connu pire. Ma rencontre la plus récente, c’est Paul. Je n’ai jamais rencontré quelqu’un de si gentil et d’attentionné. J’étais même étonné, je trouvais ça suspect. On n’est jamais trop sûr, après tout, il aurait très bien pu vouloir me découper en morceau. Mais non, il est réellement gentil. C’est probablement la raison pour laquelle j’ai pris en otage sa veste en cuir.
Bon, d’accord, disons qu’elle me plaisait pas mal et que l’idée de revoir ce type aussi poissard que moi n’était pas non plus désagréable. Je n’avais même pas osé lui demander son numéro. Je m’étais dit que s’il ne me le demandait pas, c’est qu’il ne le voulait pas. Je suis peut-être un peu idiot, par moment. C’est pour ça que j’ai gardé sa veste, je n’ai aucun moyen de lui rendre. Enfin, j’essaye de m’en persuader, parce qu’avec mon boulot, ce n’est pas très compliqué de retrouver quelqu’un. En somme, je voulais sa veste et je voulais le revoir, dilemme cornélien car je ne pouvais pas avoir le beurre, l’argent du beurre et la crémière. La vie, c’est nul.
Je viens de rentrer chez moi, je porte encore mon éternel costume noir ainsi que ma petite plaque toute neuf sur le torse, accroché au niveau du coeur. Néanmoins, je me suis mis à l’aise et j’ai laissé mes souliers vernis à l’entrée. Avant toute chose, je me repasse les moments importants en tête, j’essaye de voir si je peux aller plus loin dans ma réflexion pour l’affaire sur laquelle je bosse. Pas moyen de me concentrer, mon esprit parvient à divaguer, comme si je n’en étais plus maître ; ma concentration s’est fait la malle. Je mérite un peu de repos ces temps-ci, alors je décide de prendre un bon bouquin de Joël Dicker, me jette sur le canapé et commence ma lecture. J’ai soudain l’impression de prendre 20 ans d’un coup et ce n’est pas vraiment agréable.
Mon oreille est titillé par un bruit sourd. Quelqu’un toque à la porte ? Je fais la moue et je fronce les sourcils, c’est peut-être Oakley, sans doute même. C’est la seule qui débarque chez moi à l’improviste. Je décide de ne pas faire le mort et me lève afin d’ouvrir la porte.
Je l'ouvre. Stupeur.
Ce n’est pas Oak.
Pris de court, je referme instinctivement la porte dès lors que mon regard sur Paul Price.
Mais qu’est-ce qu’il fait là ? Pourquoi je réagis ainsi ? Je secoue mes mains dans le vide, la bouche pincée, je me retiens de me traiter d’idiot, d’imbécile, de con. Je reprends mon calme, prends une grande inspiration et j’ouvre de nouveau la porte. Je suis désolé mais je n'ose pas le dire, ce serait rappeler que je viens de lui fermer la porte au visage et ce n'est pas bon. Je ne souris toujours pas, je ne sais pas vraiment sourire mais j’espère que mes yeux parlent pour moi.
Je suis content de te voir. Non, cette phrase est nulle.
Je bégaye quelques mots, avant de dire tout simplement « non, du tout, tu ne me dérange pas. » et je ris à sa blague. « C’était moins une, j’ai failli me faire écraser au moins trois fois. Ce n’était pas une mince affaire. » Non, je n’ai pas pris le taxi comme tu me l’as conseillé et non, je ne parlerais pas de ta veste le premier.
Je m’écarte afin de le laisser passer, « entre je t’en prie ». J’essaye de ne pas en faire trop, ça marche, je n’en fais jamais trop sauf quand ma maladresse parle pour moi. Ici, j'ai peur que ce soit le cas même si j'ose espérer que je me trompe. La réalité me rattrape soudainement pour me frapper en plein visage. Je souffle doucement avant de fermer la porte derrière lui. « Avant toute chose, comment t’as eu mon adresse ? » dis-je avant de me diriger vers la cuisine pour qu’il me suive. Il peut découvrir mon appartement et ses briques rouges, décoré avec soin et goût. Je trouve que de pénétrer dans le domicile de quelqu’un, c’est quelque chose de très personnel, on en apprend encore plus sur la personne. Il faut faire attention aux détails, questionner, du moins, c’est ce que je fais. Je m’intéresse aux gens, parfois. « Tu veux boire quelque chose ? » je reste suspicieux tant qu’il ne m’a pas dit comment il a eu mon adresse. Encore une fois, comme à notre rencontre, je suis étonné, je trouve ça suspect. Et cette pensée, à l'intérieure, elle me fait drôlement sourire.
“Les prétextes n'ont jamais besoin d'être vraisemblables ; autrement, ils seraient des raisons, non des prétextes.” △
La porte s'ouvre et se referme quasiment aussitôt. J'ai eu le temps de reculer d'un pas pour éviter la porte dans le nez. Eh bah. Quel accueil. Je lui répète la même phrase, savoir si je ne le dérange pas, en fait. Je le vois bégayer un peu et je souris, amusé par la situation. Il réponds à ma blague et je penche la tête avec douceur. S'il a faillit se faire renverser plus d'une fois, c'est qu'il n'a pas pris mon conseil au sérieux.
- En même temps, je te dis de prendre un taxi, tu rentres à pied. C'est pas bien malin.
Je le remercie quand il me fait entrée. Je retire finalement mes chaussures ainsi que ma veste. Inutile de les garder ici. Même si je ne pense pas que ce soit bien de rester trop longtemps chez lui. Autant ne pas m'imposer non plus. Je ne suis pas surpris quand il me demande comment j'ai eu son adresse. J'aurai même pensé qu'il m'aurait posé la question bien plus tôt. Je viens sourire un peu plus, presque fier. Je rigole doucement.
- J'ai pas que toi en connaissance dans la police. J'ai juste eu à donner ton nom et ton prénom. Et je n'ai pas la tête du psychopathe, donc elle me l'a donné.
Je hausse les épaules, sourire toujours encré sur mon visage. Après tout, je dois être le gars qui ait le moins l'air d'un fou furieux. Si j'étais vraiment mal intentionné, ça aurait été un jeu d'enfant.. Mais pourquoi je pense à un truc pareil ? Quel con. Je le suis dans la cuisine. l'appartement est bien décoré.
- Tu as de bons goûts en décoration. Moi qui suit pas capable de choisir la couleur d'un tapis..
Enfin, je sais décorer de façon sobre. Mais de là à ce qu'il n'y ait aucun mauvais goût. Ca reste à prouvé. C'était mon ex femme qui faisait la décoration. Quand à Edge, c'est sa maison. Alors, de mon côté, je n'ai jamais eu à vraiment m'intéresser à la décoration. Je glisse les mains dans mes poches de jean et hoche alors la tête.
- Je veux bien de l'eau, si possible ?
Je ne veux pas le déranger plus que ça. Je reste debout dans la pièce, mes yeux se baladant toujours sur ce qui fait la décoration de chez lui. On en apprend beaucoup sur les gens avec leurs décorations. Ceux qui ne décore pas ou peu sont souvent des personnes qui ne restent pas bien longtemps à un endroit ou encore qui se lasse rapidement d'un appartement. Plus jeune, c'était mon cas. Je ne voyais pas l'intérêt de passer du temps à décorer si c'était pour rester un an ou deux.
- Je venais, à l'origine, pour récupérer mon porte-feuille et ma veste. Et pour voir comment tu allais aussi.
En soit, ma veste. Ce n'était pas le plus compliqué. Je voulais surtout mes papiers. Parce que je conduis sans avoir mon permis sur moi ni même mes papiers d'identités. Ça peut-être assez problématique si je me fais arrêter.. Je repose les yeux sur son visage et sourit.
- Je voulais t'appeler mais comme j'ai pas ton numéro. Je me suis dit que c'est déjà un peu creepy de trouver ton adresse alors évitons de piquer en plus le numéro de téléphone.
Je suis plus vieux que lui, quoi. Autant dire que je ne veux pas paraître encore plus suspect que je ne peux l'être d'un oeil extérieur.
« Les prétextes n'ont jamais besoin d'être vraisemblables ; autrement, ils seraient des raisons, non des prétextes. »
Je décide de reprendre mon naturel, de tenter de retrouver mon petit sourire moqueur et mon attitude nonchalante. En quelques secondes, ça va mieux, il fallait simplement que la surprise de recevoir une telle visite redescende. Je prends deux grandes respirations, repasse à l’aide de mes deux mains la chemise de mon costume et retourne au milieu de l’appartement en écoutant ce qu’il a à me dire, il me fait la morale pour le taxi : il va devoir s’y faire, je n’écoute jamais les ordres ou les conseils. Je suis comme ça, un peu trop têtu je crois… « Quand tu dis noir, je dis blanc, quand tu dis bonjour, je dis au revoir. C’est ma façon d’être, la prochaine fois, tu me diras de ne pas prendre de taxi et peut-être que j’en prendrais un. » La prochaine fois… Oui, je prévois de le revoir, quoi de plus normal ? Cet homme m’a sauvé la vie. J’exagère peut-être un peu mais je me plais à le dire, ça fait dramatique.
Les explications sont claires, concises, je les reçois donc cinq sur cinq et ma légère suspicion s’envole aussi vite qu’elle est apparue. Je pose soudainement mes yeux sur lui et je vois son sourire qui transpire la gentillesse mais je n’arrive toujours pas à croire qu’un homme puisse sembler et être aussi bon. Je n’arrive pas à y croire parce que je n’ai jamais connu quelqu’un d’aussi bien, pure, sans mauvaise intention et tous les autres adjectifs du monde. Ça doit être ça…
Paul complimente l’état des lieux, j’hoche la tête toujours de la plus nonchalante des manières avant de glisser la pulpe de mes doigts contre le mur en brique. « Si tu veux je peux t’aider à décorer, c’est vrai que je me débrouille pas mal… » et modeste en plus de ça. « Suffira juste que tu me donnes ton adresse, pour ne pas que j’ai à la trouver grâce à un collègue. Ou sinon on pourrait aller dans une de ces grandes enseignes de déco… Genre, Ikea, je crois ? » et je lui lance un clin d’œil avant de me tourner vers le frigo afin d’y sortir une carafe d’eau. Hop, je sors deux verres et je les remplis avant de lui en tendre un. « Et voilà pour monsieur le prof. » On change de l'éternel 'papy', j'aime trouver une multitudes de surnoms.
Ça fait du bien de recevoir quelqu’un, ça enlève la solitude, ça enlève un poids. Intérieurement j’ai un grand sourire que je ne parviens pas à extérioriser correctement. Ça ressemble plutôt à un sourire en coin, pourtant, c’est bien plus que ça même si ça ne ressort pas. Tant pis, ça fait mystérieux. Soudainement, je retrouve le sens des priorités lorsqu’il me parle de sa veste. « Ah ! Oui, excuse-moi. » je souffle avant de m'engouffrer dans ma chambre pour ensuite revenir avec le graal, la veste en cuir, intact. « Vraiment, désolé, ça m’était totalement sorti de la tête. Faut dire qu’elle est hyper confortable. J’espère que ça n’a pas été dérangeant… » et je pose la veste sur le plan de travail en marbre, juste en face de lui. « On va changer ça. » dis-je à propos du numéro de téléphone.
Traîner avec des gens plus vieux ne m’a jamais dérangé, j’ai toujours fait ça et je le ferais toujours. Les histoires, la culture, la vie, tout est différent et j'apprécie cette compagnie là. J'ai toujours été un peu décalé, un peu trop mature, sûrement. Désormais, je pense que je suis perdu entre les deux. Je suis un vieux à l’âme d’enfant mais également un jeune adulte avec une âme de vieux. Un petit paradoxe, j’en ai conscience. J’attrape soudainement le premier stylo qui me passe sous la main avant de m’approcher de Paul, je ne lui demande pas son avis mais je ne pense pas qu’il soit contre. Ainsi, lorsque j'arrive à la bonne hauteur, assez près, j’attrape sa main entre mes fins doigts avant de le regarder avec le plus de bienveillance possible pour le rassurer. Ensuite, je décide de prendre sur moi et et lui adresse mon plus beau sourire. Avec l'aide de ma main gauche je dépose l'encre noire sur sa peau légèrement hâlée afin qu'elle forme mon numéro de téléphone contre sa paume. « Et voilà, comme ça le problème est réglé. » Là, sans vraiment m’en rendre compte parce que tout sonnait d'une manière si naturelle, je venais d’avoir énormément de cran.
“Les prétextes n'ont jamais besoin d'être vraisemblables ; autrement, ils seraient des raisons, non des prétextes.” △
Il ne m'a pas écouté et, bizarrement, ça ne m'étonne même pas. Simplement parce qu'il n'a pas l'air d'être le genre à écouter les conseils des autres. En même temps, après la soirée que l'on a passé à tenter d'éviter la mort à l'autre, ça ne pouvait qu'aller dans ce sens. Il m'avoue faire tout le contraire de ce que je lui dirais. Je penche la tête et plisse les yeux, un sourire amusé sur le visage.
- Eh bah, qu'est ce que c'est quand tu couches. On te dit continue et tu t'arrêtes ? La frustration.
Je viens ricaner comme un gosse, bien fier de ma connerie en plus. Il m'a dit de ne pas prendre de filtre quand je lui parle. Alors, je compte bien raconter autant de connerie, salace et autre que je le fais avec ceux qui me connaissent très bien. Je glisse les mains dans les poches de mon jean. Il est modeste avec ça. Il m'arrache un rire et je viens déjà ajouter.
- Il faudrait que je me trouve un appartement avant de songer à la décoration, pour être honnête.
Comme j'habite encore chez Edge. Je sais qu'il faudra bien que je me prenne un appartement. Mais je n'aime pas la solitude.. Et retrouver un appartement vide à chaque fois que je rentrerais du boulot.. Quand j'y pense, je dois faire pitié à habiter chez mon cousin comme un gars incapable de se payer un endroit. L'argent n'est même pas le problème. Le problème, c'est qu'Edge m'a beaucoup aidé à remonter la pente, à me sentir bien. Je pince mes pulpes et fini par cligner des yeux quand il me tend le verre d'eau. J'ai du perdre un peu ma bonne humeur d'un coup. Je souris avec douceur.
- Merci, Agent Ford.
J'avale une gorgée et lui donne la raison de mon arrivée ici. Même si clairement, ma veste n'était pas un gros problème. En soit, c'était surtout mes papiers d'identités. Il s'excuse et j'agite la tête de droite à gauche. Je rigole un peu plus.
- Ne t'en fais pas. C'est surtout parce qu'il y a mon porte-feuille. J'ai conduis sans permis pendant une semaine, pas vraiment super.
Je ricane. Après, j'aurai fini au poste sinon. Pas de quoi fouetter un chat. Je me suis déjà retrouver au poste plus jeune. Même si j'ai l'air plus gentil maintenant, les cap ou pas cap que je faisais plus jeune avec des amis ont fait pas mal de grabuge. C'était plutôt marrant. Pas sûr que je sois capable de refaire la même chose maintenant. Il parle de changer ça par rapport à son numéro. Et je m'attendais à ce qu'il ne me le donne à haute voix et que je puisse finalement le rentrer dans mon portable. Mais il attrape ma main et la retour, paume vers le haut. A la vue du stylo, je comprends rapidement qu'il va le noter sur ma main. Je le laisse faire, regardant ma main et son visage de temps à autre. Sans l'alcool dans le sang, je remarque un peu plus les quelques traits sur son visage. Il est cerné, à bien plusieurs centimètres de plus que moi. Faut dire que je ne suis pas un homme très grand. Je ne me rend d'ailleurs pas compte tout de suite que je le dévisage depuis quelques secondes. C'est qu'il est mignon, en plus de ça. Je cligne des yeux avec lenteur et baisse ceux-ci vers le numéro formé sur ma main quand il vient me parler à nouveau.
- Bien, je vais pouvoir te faire des canulars téléphoniques ou t'envoyer des nudes. Merci !
Je rigole d'avantage. Comme si j'étais le genre de personne à faire ça. Ni canulars, ni nudes d'ailleurs. Ah non. C'est bizarre de faire ça. Enfin, est-ce que c'est vraiment bizarre compte tenu que mon ex le faisait volontiers. Ah, ne pas y penser. C'est inutile. Je me rassois simplement et ajoute alors.
- Plus sérieusement, comment tu vas ? Pas de risque de mort imminente depuis la dernière fois ?
Je repose les yeux sur son visage. Bon, à part se prendre une droite et manquer de finir sous les roues d'une voiture, je dois avouer que ça n'avait pas été tant mouvementé que ça comme soirée. Mais je voulais jouer surtout sur l'ironie de la chose. Je récupère mon portable pour pouvoir entrer le numéro de téléphone qu'il m'a donné.
- Tu habites seul? Ce n'est pas trop calme, par moment ?
« Les prétextes n'ont jamais besoin d'être vraisemblables ; autrement, ils seraient des raisons, non des prétextes. »
À la remarque assez borderline de Paul, un grand sourire apparait sur mon visage qui est pourtant fermé à l’accoutumé. Je me retiens de rire, je n’ai pas envie de lui donner ce privilège et… merde. Je pouffe, je ne peux pas m’en empêcher parce que ça m’est arrivé. Oui, ça m’est déjà arrivé de faire ça. « Figure-toi que, blague à part, j’ai déjà fait ça… » je parle avec les mains, je secoue mon indexe comme un vieux sage à cet instant, « Et effet garantie, quand on ne se donne pas ça fait monter l’envie chez l’autre. C’est élémentaire, l’humain est compliqué. » Je hausse finalement mes épaules avant de continuer à écouter ce qu’il a à me dire, pas d’appartement, un grand gaillard comme lui ?
« Ce n’est pas pour jouer au détective mais pourquoi t’as pas encore d’appartement ? » Je n’ai pas envie de le mettre mal à l’aise en lui posant cette question, j’ai simplement envie d’en savoir un peu plus sur lui. Je m’intéresse, en somme et c’est rare. C’est rare quand je m’intéresse et non pas seulement pour livrer une analyse en fin de compte.
« Si t’as besoin, tu peux venir ici de temps à autre, je sais qu’on ne se connait pas encore plus que ça mais t’es le premier qui m’a tendu la main dans cette ville. » et je pose ma main sur son épaule, parce que dans tous les sens du terme c’est ce qu’il s’est passé. Alors je compte bien lui retourner la pareille… Mais le surnom me fait tiquer, agent Ford, j’humecte mes lèvres et lui répond seulement par un sourire en coin. Paul veut jouer ? On va jouer. Je hoche la tête afin de lui dire ‘de rien’
Une fois mon numéro sur sa peau, je décide de me redresser pour reculer légèrement tout en reposant le stylo sur le comptoir. Je n’arrive toujours pas à croire que je viens de faire ça, ce n’est rien mais je n’en sais rien. J’aurai très bien pu écrire mon numéro sur une feuille ou même lui dicter pourtant j’ai agi d’une manière assez impulsive et si on me connait bien on peut reconnaitre que cela ne me ressemble pas. Je réfléchis toujours, je suis criminologue après tout, je fais attention à tout… sauf ici, sauf maintenant où je laisse tomber quelques barrières. Pas toutes mais déjà quelques-unes et c’est déjà énorme.
Mais lorsqu’il prononce cette phrase sur les canulars et les nudes je perds mon sérieux et secoue la tête tout en riant. Quel idiot, ce type. « Essaye un peu pour voir, monsieur le prof. Ça peut te coûter cher. » je surenchéris avant de croiser les bras sur mon propre torse, tout en restant à ces côtés. Je n’ai pas la tête à passer derrière le comptoir, je suis bien là où je suis.
« Je vais plutôt bien, ça fait un moment qu’on ne m’a pas menacé ou cassé la gueule alors ça va. Je n’ai plus aucune égratignure. » dis-je en désignant la commissure de mes lèvres ou encore mon œil qui était encore enflé il y a quelques jours. « Et toi, alors, ça va, t’es pas allé secourir quelqu’un d’autre ? » non pas que ça ne m’embêterait, du tout mais... peut-être un peu.
« De toute façon, je suis sûr que si on passe de nouveau une soirée à deux, on se retrouvera encore dans des mauvaises situations. La prochaine fois j’te parie qu’on sera au milieu d’un braquage. » c’est vrai, après tout, même si la soirée n’avait pas été si mouvementée ça ne me serait jamais véritablement arrivé en temps normal. Je pense qu’à deux on a juste encore plus la poisse, alors j’en rigole.
« Un peu trop calme, même. J’ai bien ma tortue mais elle n’est pas hyper bavarde… » je pince mes lèvres et gonfle silencieusement mes joues avant de reprendre, « C’est pour ça, vraiment, n’hésite pas à venir, c’est toujours bon à prendre un peu de compagnie. Ma nature solitaire atteint parfois ses limites. » Et ça c’est bien vrai, j’ai toujours aimé le calme, être seul mais par moment c’est pesant et j’ai juste envie d’hurler.
“Les prétextes n'ont jamais besoin d'être vraisemblables ; autrement, ils seraient des raisons, non des prétextes.” △
Il se met à rire et je suis plutôt surpris de l'entendre me dire qu'il a déjà fait ce coup là. Simplement parce qu'il a l'air bien innocent malgré son caractère et son répondant. Je ne peux pas dire le contraire, j'ai déjà fais pareil. Plus d'une fois.
- Je suis d'accord. Mais le mieux, entre guillemet, c'est de t'arrêter juste avant les quelques secondes qui te font basculer. Au delà de la frustration, c'est le pied. Je ne dirais pas que l'humain est compliqué mais plutôt... paradoxal..
Pourquoi j'en viens à parler de cul, moi? C'est quand même assez drôle comme situation. On se connait très peu. Et voilà que je lui donne des conseils en matière de sexe. Enfin, pas des conseils, juste des façons de faire. Je repose les yeux sur son visage quand il me demande pourquoi je n'ai pas d'appartement. Comment dire ?
- Quand je suis revenu à Brisbane, je suis allé chez mon cousin. A l'origine, c'était le temps de trouver un logement. Mais.. je retarde un peu l'échéance. En fait, depuis mon divorce, je ne me sens pas de rentrer chez moi dans un appartement complètement vide de vie..
J'aimerai lui expliquer clairement. Mais je ne sais déjà même pas ce qui cloche chez moi. Je viens avaler une gorgée de mon verre d'eau et ajoute alors. Pour lui donner plus de détail, en fait.
- La solitude m'oblige à penser. Et penser me fait me remettre en question quand je ne suis pas le fautif dans l'histoire. C'est assez compliqué..
Je ne veux pas l'embêter non plus avec mes problèmes. Je hoche la tête avec douceur quand il me dit que je peux venir ici de temps à autre. Je regarde sa main sur mon épaule et lui souris avec gentillesse. Simplement pour lui dire merci. Je ne pense pas que je vais m'incruster chez lui, tout le temps. Mais je retiens quand même l'information. Je ne veux pas être un fardeau pour lui, comme pour Edge. Ou qui que ce soit. Je repars sur un ton plus léger. Pas question que je lui envoi des nudes. Encore moins des canulars téléphonique. Je risquerais pas mal avec tout ça. Pas sûr que les parents d'élèves seraient heureux de savoir que le prof de leurs enfants envoient des nudes à un homme plus jeune que lui. Bien plus jeune que lui, pour le coup.
- J'ose espérer que ça n'arrive pas tout les jours de te faire casser la gueule, non ?
Bon, après. Je pense que son métier peut attirer quelques ennemies. Je pense. Mais je me met un peu à rire quand il me demande si je n'ai pas joué les sauveurs avec quelqu'un d'autres. C'est assez rare que ça soit le cas, pour moi.
- Crois le ou non, c'est rare que je dois sauver les miches de quelqu'un. Alors, non. Je n'ai sauvé personne entre temps.
Mais je pense qu'il n'a pas tord. A deux, les ennuies arrivent bien plus facilement que n'importe quoi. On dirait qu'on porte malheur, en fait. Alors que je ne pense pas que l'on soit vraiment poisseux chacun de notre côté. Mais je me met à rire quand il me dit que l'on pourrait finir dans un braquage. J'ose espérer que non.
- Si on finit dans un braquage, j'ose espérer que tu prendras le relais ! Je veux pas mourir, encore moi.
Je dis ça sur le ton de la rigolade. Mais je ne pense pas que ça soit bien marrant, non plus. Il me parle de sa tortue et je souris avec douceur. C'est mignon, une tortue, je trouve. Pas bien bavard, par contre. En effet.
- Je pense que j'aurai plus de conversation que ta tortue, en effet. Mais, je ne veux pas déranger, non plus.
Enfin, je pense qu'il le sait, ça. Après tout, personne ne veut jamais déranger les gens. Enfin, sauf les plus cons d'entre nous. Et ils sont bien plus nombreux qu'on ne le pense vraiment. Je repose les yeux sur son visage et ajoute alors.
- Tu m'as l'air plutôt ouvert pour quelqu'un de solitaire. Mais.. il y a quelques choses chez toi qui te sépare un peu des autres, j'ai l'impression.
« Les prétextes n'ont jamais besoin d'être vraisemblables ; autrement, ils seraient des raisons, non des prétextes. »
Je pince mes lèvres pour retenir mon rire tout en arquant mon sourcil alors que je le regarde m’expliquer « le mieux » en matière de frustration. J’opine du chef pour marquer mon approbation même si j’ai du mal à imaginer Paul dans une telle situation. Peut-être parce que je le pensais vieux jeu, dans un sens. J’hésite à couper court à cette discussion mais le fait qu’elle soit si cocasse me donne envie de continuer. Ce n'est pas tous les jours et c'est amusant, débridé. Je n'en ai pas l'habitude. En fait, je n'ai presque aucune habitude aux côtés de Price.
« La frustration c’est la pire et la plus charnelle des sensations. Un peu trop paradoxal si tu veux mon avis mais c’est ça qui est bien, au fond. Ou peut-être que je suis un peu trop joueur par moment. »
Quand il me parle des soucis d’appartement, je comprends. Retrouver la solitude n’est véritablement pas agréable surtout après des années de vie de commune avec le parfait schéma : une femme, des enfants… Je ne sais pas s’il avait un chien mais s’il s’agissait de moi je rajouterai ce détail au tableau. Parce que j’aime bien les clichés de temps en temps, parce que ça fait rêver malgré le fait que je puisse parfois être trop terre à terre.
« Je comprends, la solitude c’est compliqué. Le plus compliqué c’est d’apprendre à se supporter, à rester avec soi-même. Et je pense que tout ça.. ça n’arrange pas les choses. » Je décide de faire quelque chose de plus risquer mais beaucoup plus amical et agréable en posant ma main sur la sienne, caressant doucement le haut de celle-ci à l’aide mon pouce. Quelque chose de pas trop malvenu et de réconfortant.
« On se connait très peu mais t’as pas à te remettre en question. Vraiment pas. » j’essaye d’être rassurant mais je n’ai jamais été très doué pour ça. En général, je suis aussi froid qu’une porte de prison et impartial. Pas là, pas maintenant. Ça reviendra, c’est sûr mais j’en profite le temps de quelques instants. On m’a toujours dit que j’étais beaucoup trop mature pour mon âge malgré mes traits encore jeune et mon caractère parfois déroutant. Sûrement parce que mes paroles et mes conseilles valent de l’or, aujourd’hui.
Je ris légèrement avant de souffler, « presque tous les jours pour être honnête. Enfin, les menaces. Quand je me fais vraiment casser la gueule c’est que je me suis amusé à pousser le bouchon un peu trop loin. »
Lorsqu’il annonce qu’il n’a sauvé personne d’autre je souris sincèrement avant d’attraper mon verre pour boire de l’eau tout en me redressant. Je veux reprendre mon sérieux. « Cool. J’ai mon garde du corps attitré dans ce cas. Mais je suis gentil et je t’accord que dans un braquage je gère la situation. »
J’incline légèrement la tête lorsqu’il annonce qu’il ne veut pas déranger. Je pense qu’il en faut beaucoup pour déranger un gars comme moi. Enfin, si, les voisins quand ils font trop de bruit. Ce genre de truc ça peut me faire entrer dans une colère noire et c’est dans ces moments là que je me rends compte que je suis vieux avant l’âge ce qui est assez déroutant.
« Tu ne me dérangeras absolument pas. Après c’est toi qui vois, je n’ai pas non plus envie de te forcer la main. » et avec mon regard rempli de bienveillance je détaille son visage. Je ne l’ai jamais véritablement regardé avant, sa barbe, son nez, ses yeux. C’est un portrait que j’imprime donc car déjà que je ne suis pas physionomiste alors si je ne porte pas d’attention à son visage… « Eh mais t’es roux, prof’. » je sors ça sans réfléchir, avec toute l’impolitesse du monde. Ça ne me ressemble pas. C’est ça, mon côté paradoxal. Immédiatement je porte ma main à ma bouche dans un automatisme avant de siffler : « désolé. »
Enfin, je décide de me concentrer de nouveau sur ses mots. Je fronce les sourcils en essayant de décortiquer sa phrase. Quelque chose chez moi me sépare des autres ? Ça veut dire quoi, que je suis différent, unique, spécial, fou ? Ça peut vouloir dire des milliers de choses et je m’y connais. Je le sais, je suis un peu psy, au fond. Mais je n’aime pas ce terme.
« Et.. je peux savoir ce qu’est cette chose, Paul ? »
“Les prétextes n'ont jamais besoin d'être vraisemblables ; autrement, ils seraient des raisons, non des prétextes.” △
Je me rends compte que l'on parle de tout et de rien. Pour le cou, la frustration sexuelle n'est pas un sujet que j'aborde avec quelqu'un. Qu'il soit plus jeune que moi ou non. Mais, ça ne me surprend pas quand il dit qu'il est peut-être un peu trop joueur. On l'ai tous à un moment. On change de sujet pour revenir sur moi-même. Il semble comprendre mon point de vue parce qu'il me confirme ce que je dis. Je n'ai pas tant de problème que ça. Et contrairement à d'autres, ma vie va plutôt bien. J'ai un travail, une famille bien qu'elle soit un peu décomposé. Je suppose que je ne dois pas me plaindre. Mais on a tous des choses à gérer.
- Il y a pire que moi, je suppose. Des gens ont subit plus.
Je regarde sa main durant quelques secondes et il me redit la même chose qu'Edge. De ne pas me remettre en question. En soit, je ne suis même pas le fautif. Mais tout de même. Elle ne se remet pas en question donc je dois sûrement le faire moi. Il semble plutôt content de voir que je n'ai pas sauver d'autres personnes entre temps. Je ne pense pas que j'aurai le courage d'être un garde du corps. Simplement parce qu'il faut avoir les yeux partout et surtout s'avoir se défendre un peu plus. Moi, à part me battre comme la plupart des gens, je ne suis pas champion de karaté ou tout autre sport de combat.
- Tu me vois en garde du corps moi ? Je me casserais des trucs en tentant de te protéger.
Je me met déjà à éclater de rire. La dernière fois que l'on s'est vu, j'ai faillis me casser le coccys, lui finir sous une voiture. Enfin, on a passé plus de temps à se sauver l'un et l'autre qu'autre chose. Mais si je ne dérangeais pas, je comptais bien revenir le voir de temps à autre. C'est quelqu'un de bien. Je ne réponds pas et il me sort la phrase la plus hors propos que j'ai entendu depuis mon arrivée ici. Je viens éclater de rire et agite la tête de droite à gauche.
- La barbe, oui. Uniquement. Je suis brun sinon.
Je continue de rire comme un con. Je dois dire que je ne m'attendais pas à ce qu'il me sorte la couleur de ma barbe. Aussi bizarre que ça puisse paraître, on m'a déjà demandé pourquoi mes cheveux étaient bruns et que ma barbe est rousse. Je suppose que c'est juste de la génétique ? Aucune idée. Je ne me suis jamais concentré dessus.
- Mais ravi que tu t'en sois rendu compte.
Et c'est à moi de lui dire qu'il a quelques chose de différents des autres. Mais je serais probablement incapable de lui dire quoi à dire vrai. Il me pose la question et je penche la tête avec douceur.
- Je n'ai, malheureusement, pas encore découvert ce qui te différenciait. Mais c'est du bon côté du terme, ne te prend pas la tête.
Je vois bien que c'est quelqu'un qui réfléchi beaucoup. Et je ne peux pas lui en vouloir parce que je fais la même chose. Je glisse la main sur ma cuisse et ajoute déjà.
- J'ai l'impression que tu te situes un peu.. entre les deux. Entre l'adolescent et l'adulte.. Que tu es fort mature. Je pense que tu réfléchies constamment pour te remettre en question. Tu donnes de bon conseil mais est-ce que tu les appliques pour toi ? Tu es quelqu'un de bien et j'avoue que ton sarcasme me fait éclater de rire.
Je viens pouffer de rire avec lenteur. Pour la dernière partie, j'entends. Je ne sais pas si j'ai réellement mis le doigt sur sa personnalité. On ne se connait pas encore suffisamment. Je souris finalement avec douceur et ajoute alors.
- Mais on ne se connait pas depuis longtemps, je ne peux pas te cerner. Même si je pense que tu dois avoir une certaine facilité à me cerner moi.
:copyright:️BESIDETHECROCODILE
Spoiler:
Ca, c'est juste pour la remarque du "t'es roux prof" MDR
« Les prétextes n'ont jamais besoin d'être vraisemblables ; autrement, ils seraient des raisons, non des prétextes. »
Je me sens presque à l’aise, étrangement. C’est rare, moi qui ne me sens pas souvent à ma place je me découvre ; à sourire, répondre aux blagues et même à faire la conversation. Ça fait vraiment du bien, de ne pas se sentir seul dans une si grande ville qu’est Brisbane. Ça fait vraiment du bien de pouvoir être soi-même. En somme, je suis vraiment heureux d'être parti de mon petit havre de paix, loin de ma famille, de mes anciens amis, 'amours' - si l'on peut qualifier ça comme ça, je n'y crois pas -.
« Il y a toujours pire, Paul. », c’est vrai, il a cette façon de voir les choses du bon côté contrairement à moi. C’est agréable d’avoir quelqu’un de positif dans sa vie, ça permet de prendre du recul, de remettre les choses en place. Lui, il est comme ça. Finalement il annonce qu’il se casserait des trucs en tentant de me protéger ce qui me fais rire, il n’a pas tort et n'a pas l'air très adroit. Alors, je ris avec lui avant de souffler :
« Bon, ok, garde du corps c’est peut-être un peu gros. C’est vrai que t’es tout petit, donc pas très imposant. Et ce sourire, là… » avec ma main grande ouverte, paume à quelques centimètres de son visage, je désigne ce dernier, « … ça te donne vraiment un côté bisounours. Non, pas possible, t’as raison. Sauveteur à mi-temps, à la limite… » Je pense que le taquiner va devenir mon nouvel hobby, c’est presque trop facile mais ça me plait bien.
Seulement la barbe ? Ça me paraît tout de même étrange, j’opine du chef tandis que j’humecte mes lèvres avant de mordre l’intérieure de ma joue, mauvais tique que j’ai acquis avec les années. Mes yeux détaillent désormais ses cheveux, ils sont bien bruns à la racine. « Je n’ai jamais rien vu d’aussi bizarre, tu défies les lois de la physique avec tes poils. »
Et sans réfléchir, je glisse ma main à l’intérieure de ses cheveux comme pour vérifier s’il s’agit bien des siens. « Ça t’évite alors la grande panoplie de blague sur les roux, au moins. » Effectivement, ils n’appartiennent pas au boulanger du coin. Je me demande comment sont les cheveux de ses enfants mais je n’ose pas lui demander, ce sujet semble être un sujet sensible. Paul m’en parlera quand il se sentira vraiment en confiance avec moi, on ne se connait que depuis peu et je n’aimerais pas être intrusif ou tout gâcher. D’habitude je m’en fiche, je me délecte bien de la solitude mais pas ici, pas maintenant, pas aujourd’hui ni demain.
Je me différencie. On ne m’a jamais dit ça du bon côté du terme, du moins, pas dans mes souvenirs ou peut-être des rencontres sans véritable lendemain. Alors je souris tout en fixant mon verre, je n’arrive pas à le regarder. Je ne peux pas visualiser les gens lorsqu’ils me font des compliments, je ne me sens jamais légitime. Une sorte de syndrome de l’imposteur que je gère plutôt bien. Je me contente d’hocher la tête, de sourire, sans jamais insister.
Mes yeux pétillants revinrent trouver l’homme qui me fait face. Je détaille ainsi son être tout entier, des pieds à la tête. Petit mais trapu, il ferait un bon sauveteur, oui. « Très bien monsieur le criminologue. » je souffle alors qu’il est en train de me décrire, il a cerné quelques points de ma personnalité ce qui signifie qu’il s’est intéressé à qui je suis. Je ne peux que bien le prendre.
« Je n’applique jamais mes conseils, ma vie est un espèce de désordre ordonné. Un beau paradoxe que je n’arrive pas à… comprendre. Je ne sais pas si c’est entre l’adolescence et l’adulte parce que.. je me sens prêt pour plein de choses, je pense mais c’est vrai. Je cherche encore ma place, je crois. » je souris d’une manière assez morose, une sorte de demi sourire qui veut dire ‘c’est comme ça, un jour, par chance, ça changera’. C’est assez triste, je n’aime pas ça, je n’aime pas me confier sur ce genre de sujet mais je le fais sans réfléchir. Je plonge dans la piscine, je me lance, je me dévoile un peu. C’est qu’il est sacrément doué, Paul Price n’est pas un professeur pour rien : il est humain et intelligent.
Néanmoins je souris lorsqu’il annonce que mon sarcasme le fait rire, mon torse se gonfle et mon air hautain reprend le dessus. Sur mon visage, naît un sourire en coin et ma voix, princière, s’élance dans la pièce : « Je suis un homme d’exception, drôle et charmant. Que demande le peuple ?»
Il manque des pièces au puzzle, en effet, mais personne n’a jamais réussi à aller aussi loin. Merci, Price.
« Pas si facile que ça, à vrai dire. Je sais plein de petites choses, c’est mon boulot, c’est sûr. Mais avec toi il y a un truc qui bloque et je ne sais pas vraiment d’où ça vient. » je pose la pulpe de mon index contre son front, « ou t’es peut-être trop bien pour ce monde et ça me frustre car j’ai toujours l’habitude de trouver du noir où il y a du blanc. »
Mais pas cette fois, mais pas avec toi.
<3:
ça fait un moment que j'ai pas rp donc j'espère que ma réponse est bien ET CE GIF PTDRRRRRR je vois tellement Paul sortir ça en plus ce débile
“Les prétextes n'ont jamais besoin d'être vraisemblables ; autrement, ils seraient des raisons, non des prétextes.” △
Il vient de me traiter de petit celui-là ? J'arque un sourcil. Pas très imposant. Mais... Je viens sourire en coin et viens finalement éclater de rire. Mais quel petit con. Un bisounours. Je souris d'avantage amusé.
- Je ne peux pas dire le contraire, je suis petit mais ça ne veut rien dire. Tu es grand et fin, toi. Et pourtant, je t'ai sauvé le p'tit cul, Agent Ford.
Mais le côté bisounours. Ca ne me surprend pas. Combien de fois ais-je entendu ça ? Et pourtant, on me verrait en colère qu'on ne comprendrait pas comment je fais pour être aussi bisounours en temps normal... J'avoue que je vois quelques problèmes de colère de temps à autre. Il penche la tête sur le côté quand je lui dis que je suis brun à l'origine. Et ça, ça à l'air quand même de le surprendre pas mal. Je ne peux m'empêcher de rire comme un gamin quand il vérifie ma tignasse. Je ne suis pas du genre à me teindre la tignasse alors il peut vérifier. Je soulève la manche de mon pull et lui montre mon avant bras.
- Tu vois, brun. Bon, je suis bientôt poivre et sel mais tu m'as compris. Oui, ça évite les blagues sur les roux mais ça renforce les blagues normales. Et mes enfants sont tous bruns sauf Denis qui est blond. Mais il a été adopté donc pas de ma faute pour les cheveux.
Je souris avec douceur et fini par prendre mon porte-feuille. Je viens prendre une photo et lui tend alors. On y voit les trois. Marc est un peu plus grand que sa jumelle. Aussi brun qu'elle et les traits du visage assez similaires à celle-ci et à moi. Denis est bien plus petit, blond aux yeux marrons et les bras en l'air avec une grosse peluche qui pendouille.
- La photo est un peu vieille mais ça te donne une idée de leurs visages.
Il n'y a ni moi ni mon ex femme sur cette photo. Et c'est une de mes préférés. Je repose mon porte-feuille sur le comptoir et avale une gorgée d'eau. Il ne me regarde pas quand je tente de lui dire ce que je vois chez lui. Je rigole quand il me compare à son métier. Oh non. Je n'arrive pas à cerner les gens correctement. Sauf lorsque j'ai un certain intérêt envers eux. Il me réponds et je ne suis pas surpris de l'entendre parler des conseils qu'il n'applique jamais. Il parle mais j'ai l'impression que ça lui fait un peu de peine. Un sourire compatissant se dessine sur mon visage et je glisse la main sur son bras pour le frotter avec douceur.
- J'ai encore du mal à trouver ma place et pourtant, j'ai quarante ans. Je pensais l'avoir trouvé.. Et finalement.. Ce n'était pas le cas. Mais j'ai l'impression que les gens un peu avancé ou intelligent... ont du mal à trouver leurs places. Quand j'étais plus jeune, j'avais du mal à me faire des amis parce que j'étais toujours plus mature... J'avais l'impression de régresser un peu.
Je rigole quand il bombe le torse. Qu'il est con. Je souris et fait une légère révérence de la main avant de rajouter.
- Que demande le peuple.
Mais je ne suis pas criminologue. Et je ne crois même pas que j'aurai jamais sa capacité à étudier les gens. Non. J'aurai peur de dire une connerie qui détruirait l'estime de quelqu'un. Je le regarde parler de moi. Il dit que quelque chose cloche et je ne suis pas sûr de savoir si c'est une bonne chose ou pas. Je souris avec douceur.
- Il y a toujours du noir où il y a du blanc. Et peut-être que je suis noir qui cherche désespéramment le blanc ? Je ne suis pas compliqué à cerner. Mais je pense que je fais preuve de trop de gentillesse et d'indulgence envers les autres et que j'ai trop d'exigence envers moi. Parce que tu auras beau me faire du mal, je me dirais que c'était peut-être nécessaire ou justifier. Alors que non. Et ça.. même après quarante ans sur Terre, je n'ai jamais réussi à modifier ce trait de caractère. A l'opposé, une fois à bout, je ne serais plus là pour te trouver d'excuse. C'est incompréhensible.
Je viens même à soupirer avec lenteur à mon petit monologue. Je ne sais pas trop où je me situe. Ni même si je suis quelqu'un de vraiment bien ou pas. Je viens glisser les mains dans les poches de ma veste et ajoute alors.
- Mais même avec tout ça, il faut avance. Je ne me sentirais pas mieux à rester sur place. C'est comme tout.
« Les prétextes n'ont jamais besoin d'être vraisemblables ; autrement, ils seraient des raisons, non des prétextes. »
Agent Ford, encore. Ça suffit pour que je lâche mon plus beau sourire en coin. C’est idiot mais c’est vrai que ça fait son petit effet, en tout cas, j’aime bien. Mes joues se teintes de rouge, je le sens et je ne comprends pas cette réaction épidermique. Pour cela, je balaye cette idée de mon esprit. Grand et fin… je baisse la tête et caresse des yeux mon propre corps. Il n’a pas tort mais je me suis récemment mis au sport alors bientôt ses paroles ne seront que mensonges. À moi les abdos en béton.
Ma recherche est vaine, non, ses cheveux sont effectivement bruns et une mèche grisonnante retiens mon attention. « Okay, oui, mais t’as une mèche grise. Un peu comme les méchants dans les films. » et j’enlève à contre cœur ma main de sa tignasse.
J’écoute attentivement lorsqu’il me parle de ses enfants. D’un côté, j’ai du mal à l’imaginer père de famille et je n’arrive pas à comprendre pourquoi mon subconscient me fait ça. D’un autre, je le vois parfaitement dans ce rôle. Il a tout du bon papa poule. Lorsqu’il m’annonce qu’un des trois est adopté je hausse un sourcil, étonné. Tiens.
Néanmoins je ne fais aucune remarque et me contente de contempler la photo de famille qu’il présente sous mes yeux. Trois beaux enfants, je souris attendri. D’habitude, les gosses, ça me laisse indifférent mais ceux-là sont si mignons que je ne peux m’en empêcher. « Ils sont vraiment adorables tous les trois. »
Je crois que je viens de réaliser que Paul n’est pas si jeune que ça.
Jusqu’à ce qu’il passe sa main sur mon bras d’une manière compatissante. C’est vrai que je ne suis pas tactile hormis avec Oakley, pourtant, je ne me défais pas. J’ai peut-être un léger mouvement de recul mais je me rattrape rapidement. Finalement, je commence à penser que je ne suis pas si sauvage que ça.
« C’est marrant parce que.. c’est exactement ce que je me dis. Alors, toi et moi, on se ressemble peut-être un peu. » c’est bien de se sentir un peu moins seul dans ce monde beaucoup trop grand. C’est bien de ne pas se sentir si différent. Je secoue néanmoins rapidement la tête parce que j’ai l’impression d’avoir soudainement les pensées d’une gamine de quinze ans. Je préfère mon côté sarcastique et joueur, celui que je montre à tout le monde.
Les gens m’énervent, ils sont inintéressants et je m’efforce à les écouter en permanence. Là, mes oreilles sont absorbées par ce qu’il dit. Je mets ça sur le compte de son métier, un prof, c’est fait pour intéresser un petit public non ? Même un professeur d’école primaire…
À l’entente de ses paroles mes sourcils se froncent dans un automatisme presque insultant. Cet homme est vraiment beaucoup trop gentil pour ce monde, même moi qui suis un modèle de vertu je ne suis pas si… bon. Sans réfléchir et sans poser de mots sur ce que je pense, je décide de le prendre dans mes bras. J’entoure sa carrure, silencieux, sans jamais changer d’expression. Je suis crispé, ça ne me ressemble absolument pas mais je ne pouvais pas m’en empêcher. « T’es tout gris, surtout. » soufflais-je sans bouger. Cette étreinte, c’est plus fort que moi et je ne le regrette pas.
“Les prétextes n'ont jamais besoin d'être vraisemblables ; autrement, ils seraient des raisons, non des prétextes.” △
Il tripote ma tignasse et me sort même le fait que j'ai une mèche grise. Eh oui, je vieillis quoi. Mais je m'en fiche un peu. Je trouve que ça me va bien. Après, j'emmerde le monde moi et mes cheveux gris. De temps à autre, je change et remet la couleur brune habituelle mais ça reste assez rare. Il me compare aux méchants dans les films et je rigole avec douceur. Oui sauf que je ne suis absolument pas méchant.
- Sauf que je suis plutôt le bisounours, moi d'après ce que j'ai compris.
Le gars foncièrement gentil, c'est moi. On bascule sur mes enfants et je lui montre donc une photo des trois. Je ne sais pas pourquoi j'ai précisé qu'il était adopté. En réalité, ça ne m'importe pas. Il reste mon fils. Et même si Denis est encore un peu jeune pour comprendre le sens, on lui avait déjà expliqué qu'il n'était pas biologiquement le nôtre. Mais je m'en fiche de ça.
- Merci. Ce sont des petits fous. Mais ce sont mes petits fous alors, ça va.
Je rigole avec douceur avant de me concentrer sur lui lorsque je joue les criminologues. J'essaye de me montrer rassurant. Lui parler de ma propre expérience de la vie, en fait. Je l'écoute me répondre que l'on se ressemble peut-être un peu. Oui, je pense. Même s'il me semble un peu plus renfermé que je ne peux l'être. Enfin, je suis renfermé mais c'est un peu plus camouflé par une sympathie trop présente.
Je lui dévoile pas mal de chose. Je ne sais pas vraiment pourquoi mais je me dis qu'il est peut-être plus à même de comprendre. Enfin, je n'ai pas à me plaindre. Edge me comprend et m'aide beaucoup. Mais ce n'est pas pareil, la famille. J'ai toujours peur de les décevoir. Mais je suis un peu surpris qu'il ne vienne m'enlacer. Après un peu d'hésitation, je glisse un bras autour de lui et frotte un peu son dos. Je ne sais pas si j'ai besoin de cette étreinte oui lui-même. Alors.. je préfère parier sur nous deux. Je rigole légèrement, comme pour reprendre un peu la face sur mes émotions.
- Est-ce que ça veut dire gris ? Si ce n'est l'âge et ma tignasse.
Après quelques secondes de plus, je fini par le lâcher pour le laisser se redresser. Je ne voulais pas non plus le gêner. J'ai bien vu que tout ce qui est côté tactile n'est pas vraiment quelques choses qu'il apprécie. D'ailleurs, j'ignore même comment on est arrivé sur un sujet aussi délicats de nos personnes respectives.
- Tout ça pour te dire qu'on s'en fout d'être différents. Qu'il faut avancer dans tout les cas. Changeons de sujet avant de finir par vouloir sauter de ta fenêtre.
Dis-je simplement en ricanant. C'était une tentative stupide pour pouvoir aller sur des sujets plus léger. Bien sûr, je ne serais jamais au point de me jeter par la fenêtre. J'ai mes enfants derrière et c'est suffisant à aider à me lever le matin.
« Les prétextes n'ont jamais besoin d'être vraisemblables ; autrement, ils seraient des raisons, non des prétextes. »
J’ai pris quelqu’un dans mes bras de mon plein gré et j’en reste coi. Ce n’est pas véritablement choquant et ce n’est pas un effort surdimensionné mais ça m’en demande beaucoup, surtout lorsque je ne connais pas la personne depuis des années. Mais j’en sais rien, c’était plus fort que moi et je n’avais pas envie de regretter ? Un geste surtout très spontané, je n’ai pas réfléchi, c’était comme ça. C’est d’ailleurs stupide comme explication ‘c’est comme ça, c’est comme ça’. Ça n’a aucun sens, je déteste lorsque les choses n’ont pas d’explications et là, en l’occurrence, je crois que je n’ai pas véritablement d’explications. J’ai simplement laissé parler ce que j’avais à l’intérieur de moi. En somme, j’ai extériorisé sans tenter de mettre de mots rationnels. Ça fait du bien.
Je me recule finalement, me redressant totalement. Je sens que mes joues ne sont plus de leur teinte habituelle. Silencieusement, je détourne mon regard vers le plan de travail. Tiens ! Qu’est-ce qu’il est beau ce plan de travail… Évidemment, je ne trompe personne, pas même moi. Je suis un peu gêné, peut-être parce que j’ai apprécié l’étreindre ?
« Je suis d’accord avec toi, on est peut-être parti trop loin dans le délire… » je caresse lentement ma peau fraîchement rasée de ce matin avant de me glisser derrière le comptoir. Je pose mes deux mains contre le marbre avant de sourire.
« T’as tes enfants à dîner ce soir ? Je te proposerais bien de rester, si l’envie te prends. Ou juste rester boire un verre. » Ce n’est pas vraiment le genre de proposition que je fais d’habitude mais là, j’en ai sincèrement envie. Il n’est pas obligé d’accepter, de toute manière je sais que l’on se reverra. Du moins, je le sens et j’ai le flair. Je me trompe seulement très rarement.
“Les prétextes n'ont jamais besoin d'être vraisemblables ; autrement, ils seraient des raisons, non des prétextes.” △
Il ne me réponds pas quand à ma question. Je ne sais pas ce que ça signifie d'être tout gris. Est-ce que c'est être perpétuellement entre le positif et le négatif ? Ou est-ce que c'est être tout blanc entaché par le noir qui a fini par simplement prendre une certaine place et altérer finalement la couleur initiale ? Je le laisse se redresser en donnant une phrase assez bateau sur le fait d'être différent. De toute façon, on ne peut rien y faire. Si on est différent, autant tenter de vivre au mieux.
Archi semble d'accord avec moi. Nous sommes parti sur un sujet de conversation qui peut être bien plus destructeur que la montagne de sujet que l'on avait à disposition. Et dieu sait qu'il y en a des centaines de milliers disponibles. Je le vois se diriger derrière le comptoir et il me parle de mes enfants. Non, de toute manière, je ne pourrais pas les avoir juste à manger. Même si je voulais. Il y avait une bonne heure de route avant même de pouvoir franchir les portes de Brisbane. Et en général, c'est moi qui vais les chercher.
- En général, je ne les ai qu'un week end par mois, ou deux week end dépendant du bon vouloir de leur mère. Donc, je suis tout seul ce soir.
Enfin, tout seul. Il y a Edge. Mais je sais que la solitude lui fait du bien de temps à autre. Il faut dire que j'empiète pas mal sur son espace vitale. Alors quand je peux ne pas rentrer immédiatement, je le fait. Pour lui laisser suffisamment d'air, tout simplement.
- Donc, je veux bien. Avec plaisir. Est-ce que je peux t'aider à faire quelques choses ?
Je ne voulais pas non plus rester assis sur mon tabouret à le regarder faire à manger. Quoi que.. Jusqu'à présent, le regarder n'était pas la chose la plus gênante. Et quand j'y pense, ça me fait bizarre. Il est bien plus jeune que moi. Non pas que l'âge me dérange réellement... mais d'un oeil extérieur. Pourquoi je pense à ce genre de chose maintenant ? Je glisse mon coude sur le comptoir et reposait mon menton sur ma main.
- Tu travailles demain ? Que je ne reste pas plus longtemps qu'il ne faut. Ce serait bête que tu sois un zombie demain matin.
Je sais que moi, je pouvais dormir plus tard. Ce n'était pas le problème. Parce que même si mes journées n'étaient pas de tout repos, psychologiquement elles étaient bien moins éprouvantes que les siennes. Du moins, c'est ce que je pense. Et puis, il semblait déjà se plaindre un peu de ses cernes alors si je les agrandissait.
- Pour information, je suis allergique au chocolat et aux fruits de mer. Non pas que ça soit le menu de ce soir mais je pense que c'est toujours bon de le savoir.
Je me met à rire. Disons que je voulais au moins l'avertir de ce type d'allergie. Mais si on finissait par se voir régulièrement, autant qu'il le sache. Qu'il ne se demande pas pourquoi je gonfle comme un ballon si je mange malencontreusement un truc qui peut me tuer. Mes yeux se baladent sur son visage et sa carrure durant quelques minutes. Je le trouve vraiment beau. Et il n'a même pas l'air de se rendre compte de l'attraction qu'il peut dégager.
- Comme ça, si je gonfle comme un ballon, tu sauras qu'il faut appeler le samu.