”J’ai rien pour toi … Mais je me dis que ça manque de blanc, ta tenue.” « Aouch, ça chatouille, tu fais exprès, t'es cruelle ça pique là, et j'ai des allergies. » oh que je les utilise toutes les excuses nulles pour râler, pour la faire rire aussi. Je gigote, je rends rien facile, je le vois le regard du conducteur qui roule à s'en fouler le nerf optique. Mais Lily s'amuse à attraper le tissu et il y a rien de plus beau que son sourire qui n'en finit plus de grandir au point où elle risque d'avoir mal aux joues encore demain.

Sa main est dans la mienne, je sens ses alliances contre mes doigts, j'ai fait gaffe de pas lui donner l'historique complet de la bague, le truc idiot que j'avais acheté un peu après l'avoir revue à Noël au café. C'était pas censé être donné comme ça, c'était surtout pas censé être donné aujourd'hui et avoir cette signification-là, mais c'était pour elle que je l'avais prise. Dans une machine crade aux arcades, je sais pas pourquoi, j'avais pensé à elle, j'avais pensé que ça lui plairait, j'avais pas pensé plus loin et maintenant, de l'avoir gardée comme un idiot dans ma poche en me disant que si un jour elle réapparaissait on pourrait se moquer du pourcentage élevé de fois où la perle virerait au noir, ça fait sens. Y'a pas grand chose qui fait sens ces temps-ci pour être honnête, alors quand ça arrive, je resserre ma main contre la sienne, je resserre le contact que je suis pas près de lâcher, et j'inspire aussi. Un peu mieux.

Mes yeux sont vrillés à la salle maintenant, on a des priorités de bouffe à valider. ”Je savais que j’aurais dû dire que je préférais les poneys aux glaces.” ou les chats avec une oreille plus petite que l'autre. Ou les dinosaures mais juste ceux avec un long cou et qui mangent des plantes. J'ai noté ses animaux préférés dans un coin de ma tête pour pouvoir m'en moquer le jour venu, mais le jour d'aujourd'hui, il est pas dédié à rire d'elle, il l'est à rire de nous. « Vois le bon côté des choses, j'aurais sûrement fait un fou de moi en tentant de monter sur le poney pour me la jouer prince charmant et t'aurais facepalm jusqu'à ce que ta paume fusionne avec ton front. » alors j'hausse de l'épaule, réagis même pas quand y'a une caméra qui passe devant nous pour filmer mon sourire à deux balles et le sien que j'occasionne, fier comme à chaque fois où une de mes conneries la fait rire. « 1-0 pour toi, tu gagnes meilleure femme et je perds meilleur mari, déjà. » ça tient, c'est fun. La compilation que je lance, parce que je sais que côté compétitif, elle est aussi pire/meilleure que moi.

La musique se lance, Pete va faire l'idiot sur la piste de danse, je prends sur moi pour pas aller mettre une distance de 140 kilomètres de sécurité entre Jill et lui. Au moins Ginny est pas là pour que j'ai deux soeurs à surveiller plutôt qu'une. D'ailleurs, elle est où la benjamine? ”Tu crois que je dois leur rendre, la robe ? Ils se doutent pas que je vais la tacher dès qu’ils auront sorti les gâteaux fourrés à mille saveurs, là.” ma main se pose chastement sur sa taille, la sienne sur mon épaule. J'ai pas donné le véto sur la musique alors dès qu'il y a autre chose que les BSB qui joue, je risque d'être lourd à grogner - mais ça va, Lily s'occupe de la partie distractions à merveille. Si elle se tache, ça sera probablement parce que comme un con j'aurai tenté de voler sa dernière bouchée de gâteau et qu'elle se sera rebellée à me la refuser. Des gamins. ”Je promets que si tu marches sur ma robe, la bague deviendra pas noire tout de suite.” et là, elle est naturelle l'impulsion, elle est instinctive, la mention. « T'es belle, dans ta robe. » qu'elle la garde ou pas, qu'elle la tache ou non, que je pile dessus ou pas.

”C’est quoi tes autres prénoms ? Le maire a pas parlé de ça alors que c’était la meilleure partie, il est même pas drôle.” oula. « J'aime mieux quand c'est toi qui me rebaptise, pas lui. » ça, je sais qu'elle va s'en servir contre moi. Je sais pas quand et je sais encore moins comment, mais c'est acté, c'est écrit dans le ciel qu'à la seconde où je lui fais confiance elle va prendre une note mentale et y revenir dès que l'occasion se présentera ; ou pas du tout. Le truc, c'est que je lui fais déjà confiance, et donc d'office, j'ai même pas une seconde de jeu avant de flancher comme un naïf, comme un enfant. Ma main se dégage de sa taille pour prendre la sienne à nouveau, initie le mouvement, la fait tourner sur elle-même avant de glisser à son oreille, le secret de polichinelle numéro un. « Adam. » et elle repart Lily, on perd la proximité parce que je laisse ma paume se poster entre ses omoplates, dramatique le gars, maintenant que je penche sa silhouette, qu'on a presque l'air d'avoir pratiqué un semblant de chorégraphie sur du 5 Seconds of summer de merde que j'ignore pourquoi ils ont mis sur le DJ set et ok, le refrain est bon, il est entraînant, je vais l'avoir dans la tête un moment. « Alexander. » à son oreille quand elle remonte, y'a le prénom numéro 2 qui part, rien d'une confidence et encore plus ridicule quand notre danse va pas du tout avec le rythme. Mais bon, à d'autres. « Les tiens, c'est quoi? » elle a ses armes, me faut les miennes.

C'était cool, c'était simple, c'était nous, un temps. Puis y'a Ariane et Jill que je vois du coin de l'oeil, Swann qui se tire d'un sens et elles qui le pourchassent direct. Je retiens un soupir parce qu'à la dernière seconde je réalise qu'il risque de se casser sur la nuque de Lily et la chatouiller la pauvre, elle a pas demandé ça. Mais faut lui faire le portrait de la suite, autrement la surprise va faire mal je le sens déjà. « Okay, petit cours rapide sur ma famille : on abuse, on s'incruste, on fait du drame pour tout et surtout pour rien et elles, elles vont probablement te passer un interrogatoire aussi serré que celui qu'elles passent au rencard de Swann là. Lucia?! » tout déboule, les mots et les mises en garde et les excuses, et mes sourcils se froncent quand je vois mon frère qui danse avec la nouvelle du DBD. Hum, what's going on there?

Ok, de retour au programme principal, et mes yeux se vrillent dans ceux de la brune, ils sont toujours aussi bleus et toujours aussi beaux, c'est aussi déstabilisant que fascinant. « Si je vais au bar chercher de quoi remplir leurs verres pour qu'ils chillent autant que nous, ta bague, elle devient quelle couleur tu penses? » alors je tâte le terrain. J'ai pas envie de drame ce soir, j'ai envie de doux. J'ai pas envie qu'elle soit propulsée dans le pire déjà, on a encore le temps avant qu'elle capte dans quel foutoir McGrathien elle a doucement plongé le premier petit orteil. « Promis quand je reviens, ce sera avec un verre spécial Lily deux L trois O, j'vais voler des passiflores dans les centres de table rien que pour toi. » pour faire amende honorable, ma main quitte à contre-coeur sa hanche pour se lever à la hauteur de ses yeux, la promesse à sceller.

« T'es belle, dans ta robe. » Elle ne demandait pas à ce qu’il lui dise ce genre de chose mais la brune ne peut s’empêcher de sourire de manière enfantine, cachant sa gêne alors qu’elle abandonne ses yeux un instant pour poser les siens sur les chaussures de Matt. Elle n’est plus habituée à ce genre de compliments et à vrai dire elle ne l’a jamais été, son ex petit-ami ayant toujours été avare de ces choses là. ”T’es beau. Mais t’as pas intérêt à prendre la grosse tête, sinon je te le répéterai pas.” Matt, pourtant, enchaîne les compliments avec aisance et une part d’elle affectionne bien trop ce genre d’attentions pour qu’elle pense un simple instant à se méfier ou, tout simplement, ne pas retomber trop vite dans les bras de qui que ce soit. « J'aime mieux quand c'est toi qui me rebaptise, pas lui. » Ca aussi, il pourrait le dire à n’importe qui, il pourrait amadouer n’importe quelle femme juste en souriant comme il le fait là juste là et Lily ne fait pas exception cette fois-ci. Elle est taquine, pourtant, quand l’information est enregistrée dans partie de son cerveau qui est réservée à Matt depuis quelques heures déjà si ce ne sont des mois. Elle lui trouvera le pire nom pour le rebaptiser un jour, quand il s’y attendra le moins, c’est promis. Ce sera son cadeau de mariage, le second.

Elle laisse leur main se coller autant de fois qu’elle le peut pourtant un simple nouveau contact suffit à la faire sourire comme s’il était le premier. Ses yeux bleus retrouvent le noisette des siens, elle tournoie sur elle même avec aisance et en riant sans que la scène n’ait rien de drôle. Ce soir, Lily est heureuse et rien ne semble pouvoir se mettre en travers de cette joie retrouvée et inespérée. « Adam. » Leur premier secret, avec son mari Matthew Adam. La brun n’a le temps de faire aucun commentaire qu’elle se retrouve en arrière, Matt par dessus son buste sans qu’elle ne se sente à aucun moment oppressée. Leur danse est presque gracieuse, c’est vrai, mais elle n’a rien à voir avec la musique qu’ils sont en train de passer et s’ils ne sont pas entrés en collision avec aucun des convives c’est seulement parce que ces derniers ont délimité un périmètre de sécurité autour d’eux. Ils savent, tous, à quel point ils ne font pas attention à personne d’autre en ce moment même. Lily et Matthew Adam « Alexander. », la boucle est bouclée et la main de la jeune femme ne se replace pas sur son épaule mais plutôt sur sa nuque, là où elle fait l’effort de n’y planter aucun ongle et de ne pas lui faire mal non plus. ”Tes parents se sont même pas vengés sur tes autres prénoms, petit veinard.” Un sourire amusé s’inscrit sur son visage alors qu’elle relève les yeux à sa hauteur.

« Les tiens, c'est quoi? » Contact visuel qu’elle rompt bien rapidement alors que sa tête vient se poser au dessus de son coeur, qu’elle jurerait pouvoir en entendre les battements avec son oreille collée sur son torse. ”Astrée, Eve.” La douce ironie qu’elle ne comprend que maintenant et qui lui crée un nouveau rire qui doit sûrement faire un horrible “cvugyhij” dans le micro qu’il a collé entre ses clavicules. ”Nos parents sont peut être voyants finalement.” Elle avait promis de se protéger, de rester éloignée, de rester placide, de ne rien montrer de la véritable Lily. Elle s’était promis bien des choses mais la défaite n’en est que davantage cuisante : elle rêve déjà d’un plus tard alors que la journée n’est même pas terminée.

« Okay, petit cours rapide sur ma famille : on abuse, on s'incruste, on fait du drame pour tout et surtout pour rien et elles, elles vont probablement te passer un interrogatoire aussi serré que celui qu'elles passent au rencard de Swann là. Lucia?! » Le regard de Lily se perd là où est posé celui de Matt, elle associe des noms à des visages, reconnaît Lucia (sa Lucia) alors qu’elle ne la savait même pas présente à la cérémonie. ”Lucia !?” Ils n’arrêtent pas de parler (oh, l’équipe technique va les détester) mais sa voix est enrouée alors qu’elle chuchote en même temps qu’elle hurle, qu’elle est surprise en même temps qu’émue, qu’elle a mille émotions différentes au fond d’elle et qu’elle n’arrive pas à en gérer une seule. ”Tu choisis pas ta famille, et je suis une pro aux interrogatoires. C’est pour ça que t’as perdu au Devine Tête.” Elle ne devrait pas en parler, de leur rencontre passée, de leur lien qui remonte bien avant leur mariage même s’il est complexe et entrecoupé de mois entiers de silence et de plus de rancoeur que de toute autre chose. Elle préfère parler du Devine Tête que lui faire le topo sur sa propre famille à son tour, laquelle sera bien moins oppressante que la sienne pour la simple et bonne raison qu’elle est inexistante.

Elle en oublie bien rapidement Lucia et son rencard en même temps qu’elle repousse à plus tard la famille compliquée de Matt. Elle sait ce que c’est, elle peut gérer, il n’y a rien de nouveau là dedans. « Si je vais au bar chercher de quoi remplir leurs verres pour qu'ils chillent autant que nous, ta bague, elle devient quelle couleur tu penses? » Cette fameuse bague qu’elle ne retirera jamais et ça c’est un fait, autant parce que ça pourrait l’aider lui à savoir quand est ce qu’il doit vraiment se la fermer que ça pourrait l’aider elle à se souvenir qu’à un moment au moins elle a été mariée et heureuse. Peu importe combien de temps ça dure, peu importe combien de temps elle peut continuer à faire tourner son alliance autour de son annulaire et faire de même avec celle de Matt lorsque leurs mains sont liées. Elle ne s’y fera jamais, ne s’en lassera jamais non plus. Elle pose ses yeux derrière Matt, sur sa main qui fait désormais le tour de son cou, sur sa bague qui luit des mille teintes de roses et violets. ”Y’aura peut être un peu plus de paillettes même ? Je sais pas, elle est jolie comme ça. Elle changera pas.” Pas pour ce soir, pas si le pire qu’il puisse faire soit d’aller chercher à boire à son propre mariage. Au contraire. « Promis quand je reviens, ce sera avec un verre spécial Lily deux L trois O, j'vais voler des passiflores dans les centres de table rien que pour toi. » Elle rigole une énième fois devant toute la théâtralisation de la scène et sa main levée dans les airs, ne la laisse pas bien longtemps dans cet état alors qu’elle la reprend entre ses deux mains, chacune portant une bague différent qui les relient. ”Sois pas bête.” Doux euphémisme quand il est question de Matt. ”Vole pas les fleurs de notre propre mariage, je viens avec toi.” Même des passiflores, même les passiflores qu’il cite parce qu’il se souvient et qu’il se soucie et que ça vient s’ajouter à la liste déjà bien trop longues de toutes les qualités qu’elle peut bien lui trouver.

Leurs pas les conduisent vers la table hors caméra dédiée aux boissons diverses et variées, les yeux de la jeune femme se posent sur les bouteilles de vin que personne n’a encore osé entamé. Trop tard pour eux, maintenant que Lily est là elle va seulement les voler et les garder pour elle. Il n’a rien dit à propos des tâches sur sa robe alors ça veut sûrement dire qu’elle a carte blanche. C’est son mariage, après tout, elle peut faire ce qu’elle veut. Une bouteille dans chaque main, elle sourit tendrement à Matt pour la millième fois de la soirée déjà. ”Une pour toi une pour moi. Deal ? Si on est alcoolisés ils vont même plus vouloir nous filmer, on sera libres.” Il y a parfois du bon à vivre dans un état si conservateur. ”Et y’a une balancelle là bas, elle a l’air d’avoir des coussins qui ont l’air supeeeer moelleux.” Un peu de temps pour respirer, pour eux, c’est ce qu’elle demande.

A peine a-t-il posé sa main dans celle de Lucia que les interrogations de cette dernière fusent. Il fait de son mieux pour garder son calme, jonglant avec le feu d’Ariane et la tempête qu’est Jillian face à la douceur de Lucia. Elle n’a pas eu le droit au disclaimer sur la famille McGrath mais il semble qu’elle en a aujourd’hui droit à un condensé rien que pour elle, ce que le kinésithérapeute aurait largement préféré éviter. ”C’est la marraine de Gabriel et elle prend son rôle vraiment à coeur. Ce n’est pas contre toi, ne t’en fais pas, ne t’excuse de rien.” Difficile d’expliquer dans ces conditions là qu’elle est l’archétype par excellence de la maman ours, elle semble bien trop occupée à faire de la vie de Lucia un enfer pour s’occuper de qui que ce soit d’autre. Swann sait, pourtant, que c’est sa manière à elle de s’occuper de tout le monde et de veiller sur chacun, il le sait et il l’accepte parce que ça fait partie d’elle. Il accepte beaucoup moins que le tout ait des conséquences sur la pauvre Lucia n’ayant rien demandé, elle dont il est certain de sentir la main trembler dans la sienne sans qu’on puisse laisser reposer la faute sur le froid.

Il espère avant autant de naïveté que de sincérité que les deux femmes McGrath se trouveront une nouvelle proie alors qu’il pose sa main légèrement plus haut que la hanche de Lucia. Ce n’est définitivement pas en dansant qu’il apprendra à draguer, ayant bien trop de respect pour elle pour oser poser sa main plus bas, se sentant obligé de s’excuser pour les frasques de sa famille en parallèle. ”Ce sont mes soeurs, oui.” Il ne s’attarde pas sur les détails de liens de parenté ou ceux par alliance, la conclusion à retenir est que tant Jillian qu’Ariane sont ses soeurs et jamais il ne reviendra là dessus, même si elles les font lever les yeux au ciel plus que de raison. Il rigole doucement quand elle les qualifie de ‘sympa’, adjectif qui ne lui serait pas venu à l’esprit en premier lieu. Elles sont plutôt … protectrices. Pourtant il n’a pas le temps de placer quelques mots qu’elle est déjà repartie dans un monologue ne faisant de sens que pour elle et les personnes stressées en général. Il déteste la voir ainsi et aimerait réellement pouvoir arranger le tout d’un coup de baguette magique, raison pour laquelle il s’arrête de danser alors qu’ils sont au milieu de la piste. ”Respire, tout va bien. Tu veux qu’on s’éloigne ? J’ai entendu de l’eau, il doit y avoir un bassin ou une fontaine pas loin si tu veux, loin des caméras.” L’avantage de ce mariage c’est que l’un comme l’autre ne sont pas la cible favorite des caméras et qu’ils peuvent aisément se substituer à la scène.

Ils auraient pu, en tout cas, s’ils n’étaient pas épiés par deux harpies qu’il aime bien trop pour réellement critiquer. La chevelure d’Ariane tranche dans la foule, le sourire carnassier de Jillian à sa suite. Les mots, ensuite, ceux qui sont lancés avec toute la bonne volonté du monde mais qui sont loin d’avoir l’effet escompté pour Swann. Il serait prêt à leur excuser tout et n’importe quoi, il irait enterrer des corps dans le désert pour elles, il passerait sous silence n’importe quoi … tant que cela ne concerne que lui et personne d’autre. « Alors comment ça se passe votre date? Tu lui as parlé de tes exs déjà, de ce que tu cherches chez l'être aimé? De où tu te vois dans 5 ans? » Il comprend enfin que le problème n’est pas Lucia mais le lien qui le lie à la brune, lien qu’il n’aurait jamais qualifié comme le fait Ariane parce que c’est sûr et certain qu’elle en fait trop, c’est sûr qu’elle voit trop loin, c’est sûr qu’elle imagine mille scénarios alors qu’ils sont juste amis et qu’il l’aime bien. Elle invente des scénarios improbables, elle a toujours eu trop d’imagination, voilà ce qu’il retient. « Parce que j'te dis de suite, dans cette famille on sait tout sur tout. Alors autant nous dire tout ça à nous aussi, ça va accélérer les prochaines étapes. » Oh, Ariane. Son regard accusateur est seulement tourné vers la jeune femme et rien de ce que peut tenter Swann pour forcer Lucia à se concentrer sur lui à nouveau ne semble suffire.

Il se sent respirer à nouveau dès lors qu’elle dévie son regard de celui d’Ariane, préférant au dernier moment celui du benjamin McGrath. Sa main passe de sa hanche à son dos, il joue de son pouce pour essayer de la rassurer sans que cela n’ajoute de l’huile sur le feu dans la confrontation avec les deux autres femmes. Il fait de son mieux pour que tout le monde s’entende mais cela semble peine perdue aujourd’hui alors qu’il arrive lui même à bout de patience, peu conciliant quand il s’agit de s’en prendre directement à Lucia sans qu’elle n’ait rien demandé. Ariane fait de toute façon fausse piste à déjà les croire sur le point de s’embrasser ou n’importe quelle autre sottise du genre. Ils ne sont qu’amis, ils ne font que danser ensemble. Tout aurait pu se passer aussi simplement que cela. « J’ai pas compris, tu veux savoir quoi ? » Oh Lucia, la douce Lucia, un agneau parmi les loups. Il délie ses doigts de leurs mains liées alors qu’il fait remonter sa main dans le dos de la jeune femme pour lui prouver qu’il reste présent pour elle. ”Ariane c’est bon. Ca suffit pour ce soir.” Son regard est froid alors que ce n’est pas dans ses habitudes, il soutient le regard de la rousse sans sourciller, tiraillé entre les deux camps qu’il souhaiterait voir alliés. ”Vraiment.” Il sait que ses mots ne sont pas les bons, pourtant. Il sait qu’elle rejettera la faute sur un brainwashing de Lucia. Ce n’est pas sa soirée, pourtant, il n’est pas le centre de l’attention et Lucia ne devrait pas l’être non plus. "On en reparlera plus tard." Ce ne sont pas eux qui se marient.

A peine arrivée proche de Swann, Jill entend vaguement une phrase d'Ariane. Et elle se pose la même question, pourquoi Swann a ramené une fille dans un truc de famille sans prévenir qui que ce soit ? Et Ariane, elle, elle peut la poser la question, parce qu'elle a toute sa place chez les McGrath depuis qu'elle a commencé à faire le bonheur de Levi. Elle, elle mérite sa place dans ce mariage. Mais elle, elle est inconnue, et bien trop proche du dernier de la fratrie pour que ce soit anodin. Elle a l'air trop gentille, trop fragile pour cette famille. Et Swann n'a pas besoin d'autres filles dans sa vie, il a déjà bien assez de sœurs à gérer. Jill ne le connaissait pas depuis toujours, mais elle l'avait intégré à la famille dès qu'elle avait appris son existence. Il a été abandonné par leur ordure de père et franchement, qui ça étonne ? Elle a voulu tout faire pour qu'il aille bien, pour qu'il ne soit pas aussi brisé que le reste de la fratrie. Et c'est ce qu'elle faisait encore pendant cette réception. Elle voulait savoir qui était cette fille, pourquoi elle l'approchait, pourquoi elle respirait un peu trop près de lui. Cette Lucia aurait pu trouver un autre mec, il aurait mieux valu pour elle qu'elle ne craque pas pour Swann McGrath.

Jill aime qu'Ariane et elle pensent exactement la même chose. « On est d'accord. » Personne ne méritait Swann, il était bien trop parfait. Elle jette un coup d’œil au bébé avant de se concentrer sur autre chose de bien plus intéressant, comme le sac de la fameuse fille qui était entre les bras de Swann au milieu de la piste de danse. Ariane rajoute des trucs dans le sac et Jill ne fait même pas attention, elle est bien trop intéressée par les cachets qu'Ariane vient de trouver. « Des anxiolytiques ! Ça se revend ça ! » Jill hoche la tête, c'était une affirmation, elle avait déjà vu ce genre de pilules. « Pourquoi elle prend des cachets à ton avis ? » Pourquoi une fille qui a l'air aussi calme et sans histoire aurait besoin de prendre des cachets ? Oui elle essayait de trouver tout et n'importe quoi pour discréditer madame parfaite. Jill grogne en levant les yeux au ciel en entendant la description d'Ariane. « Oh non pitié pas ce genre de trucs dans la famille, on va déjà devoir en gérer une avec l'autre là-bas, pas deux. »

Elles vont danser parce qu'Ariane ne laisse pas vraiment le choix à Jill dans tous les cas. Et elle se retrouve à côté de Swann, Jill le fixe une minute, il a l'air inquiet, et elle, elle a l'air de fondre comme la neige au soleil. Aucun caractère, aucune contenance, même pas drôle à torturer et à interroger. Jill sourit en écoutant Ariane, elle ne rajoute rien parce qu'elle a raison, autant qu'elle soit au courant de comment fonctionne la famille non ? Et elle demande ce qu'Ariane veut savoir, et là c'est Jill qui prend le relais une seconde parce que elle aussi elle veut savoir. « on veut savoir tout ce dont on a besoin de savoir pour juger si t'as le droit de le regarder avec ces yeux là » Elles veulent tout savoir, absolument tout. Mais Swann parle avant Lucia, encore. Jill fronce les sourcils en croisant son regard. « Arrêtes de dramatiser Swann on fait que discuter avec ta nouvelle amie, tu veux pas qu'elle apprenne à nous connaître ? » Elle a pas vraiment le choix à vrai dire, les deux filles c'étaient imposées à sa soirée. « Pourquoi plus tard ? Pourquoi pas là alors qu'on est tous réuni sur la piste de danse ? Qu'est ce que t'en penses toi ? » Elle tourne la tête vers la brune qui a l'air terrifiée. « Et parles pas à sa place Swann. »

C'est fun, vraiment, d'avoir maintenant un marqueur pour jauger en temps réel ma connerie. Je peux pas le nier et elle non plus : je risque de passer une grosse partie de mon temps à lorgner sur sa bague rien que pour savoir à quel niveau je l'énerve - ou ne l'énerve pas. Du génie. ”Y’aura peut être un peu plus de paillettes même ? Je sais pas, elle est jolie comme ça. Elle changera pas.” « Quand t'auras faim, c'est quelle couleur tu penses? Couleur gâteau vanille de Madagascar ou glace caramel fleur de sel? Smoothie fraise rhubarbe ou sorbet citron poivre? » et non Matt, c'est pas en fixant l'alliance et en fronçant des yeux autant que des sourcils que ça va changer sur commande, quoi que ce soit.

”Sois pas bête.” pourquoi, déjà? ”Vole pas les fleurs de notre propre mariage, je viens avec toi.”  oh, pour ça. « Mais j'voulais me sentir comme un hors-la-loi, c'pas drôle là. » elle fait presque pitié, la mine que j'arbore, et la réplique presque larmoyante que j'exagère, avant de pouffer de rire, mais de l'entraîner avec moi dans le méfait. Bonnie and Clyde des temps modernes quand mon bras s'allonge, l'effronté, pour que ma main libre attrape quand même une fleur désormais volée, la glisse dans ses cheveux en plus de la couronne de pétales qu'elle y a déjà. C'est comme le retour de l'ascenseur façon fleuriste/cambrioleur vu celle qu'elle a mise à ma chemise y'a une journée et une balade en voiture plus tôt. Elle pourra râler comme elle veut mais j'ai pris la plus jolie des passiflores et ça j'en suis persuadé. Je l'ai vraiment choisie après avoir fait des tas de détours entre les tables et les convives, détours qui m'ont aussi permis de relativement être rassuré en entendant de loin les voix de Jill et d'Ariane qui sont presque pas aussi effrayantes qu'habituellement, c'est pour dire.

Lily dérive à la table où y'a l'alcool, j'attrape pendant ce temps un serveur rien que pour lui donner du pourboire le sourire aux lèvres, le nom des McGrath que je lui susurre à l'oreille en les pointant les uns après les autres, m'assurer que si c'est pas moi qui remplit leurs verres, ça sera lui. ”Une pour toi une pour moi. Deal ? Si on est alcoolisés ils vont même plus vouloir nous filmer, on sera libres.” elle est brillante, ma femme. « Deal. Et une pour la production, comme ça on leur achète notre liberté tant qu'on a pas assez bu pour être off-cam. » mes sourcils dansent, j'attrape du champagne pour le caméraman qui est tellement proche de nous que je lui ai pilé sur les pieds au moins 4 fois depuis le début de ma manoeuvre. ”Et y’a une balancelle là bas, elle a l’air d’avoir des coussins qui ont l’air supeeeer moelleux.” en vrai, je demande que ça.

Je sais pas si ce sont les nerfs qui lâchent après la journée, ou la cuite d'hier qui continue encore de faire des siennes. Je sais pas si c'est une accumulation de tout ou un immense besoin de rien, mais quand je passe mon bras autour de ses épaules et que je m'affaire à ouvrir sa bouteille de rouge en tirant le bouchon avec mes dents, je jure que je suis plus calme, plus zen aussi. « T'as dit moelleux, right? Tu penses qu'on peut voir les étoiles de la balancelle ou on est encore trop proches de la ville du coup on va mariner dans le brouillard pollué? » et la seconde d'après on s'esquive, on fuit comme des lâches heureux, le vin dédié à chacun dans nos mains et le hamac qu'on s'approprie parce qu'elle avait raison, y'en a des tas de coussins et ça, en vrai, c'est la vie.

« Quand t'auras faim, c'est quelle couleur tu penses? Couleur gâteau vanille de Madagascar ou glace caramel fleur de sel? Smoothie fraise rhubarbe ou sorbet citron poivre? » ”Arrête c’est pas drôle maintenant j’ai vraiment faim de gâteau vanille de Madagascar avec glace caramel fleur de sel, sorbet citron et un smoothie fraise rhubarbe. Tout en même temps ça ferait vraiment pas beau sur la bague mais peut être que ça serait bon.” Ce n’est peut être pas drôle mais elle est la première à en rire, désormais désireuse de tout tester avec lui ; et ça commence par les associations culinaires douteuses. ”Je noterai toutes les teintes qu’elle aura selon mon humeur sur un google docs et je te l’enverrai tous les deux jours pour un update.” L’organisation il n’y a que ça de vrai, même si elle notera les couleurs tels que “violet joli” “violet moins joli” “violet comme la confiture de mûre” et qu’il y a fort à parier qu’elle s’emmêlera autant les pinceaux que Matt n’y comprendra rien.

Pendant une seconde, Lily a réellement pitié de lui quand à « Mais j'voulais me sentir comme un hors-la-loi, c'pas drôle là. » il ajoute des petits yeux de chiens battus et sa lèvre inférieure qui se retrousse. Mille scénarios se bousculent dans son esprit pour en trouver au moins un dans lequel elle trouve quelque chose à lui dire pour se rattraper parce qu’elle ne veut pas déjà divorcer et qu’elle est désolée et qu’elle ne pensait pas à mal et qu’elle le prendrait presque dans ses bras là, juste là, et … - oh, elle est vraiment belle la fleur qu’il choisit. C’est sûr qu’elle s’accorde même parfaitement avec la couronne de fleurs qu’elle a saoulé l’équipe technique pour avoir. Ses yeux suivent le trajet de la fleur, se plantent en haut quand l’objet sort de son champ de vision et que Matt arrive à la déposer dans ses cheveux sans même lui arracher la moitié de son cuir chevelu. ”On aura qu’à dire que tu l’as empruntée.” Ce sera son élément emprunté, un des quatre essentiels du mariage. Elle pourrait dire que Matt est déjà bien plus présent que n’importe qui dans sa vie alors qu’elle ne l’a côtoyé que par périodes de quelques heures jusqu’à maintenant. Elle pourrait dire ça, et ne se serait pas un mensonge, ses joues rosées et ses pommettes relevées le prouvent.

Aux deux bouteilles de vin, Matt juge bon d’y ajouter une de champagne et la brune accepte cet ajout avec un sourire aux lèvres. Il accepte de s’enfuir de son propre mariage et c’est pour ça qu’elle sait qu’il est le bon, quand le seul argument qu’elle a à avancer c’est une balancelle et que lui se dit seulement qu’une balancelle, c’est cool. Pour le moment un rien suffit à les rendre heureux et c’est tout ce qui importe, tout semble si simple ce soir.

La respiration de la jeune femme ne se coupe pas quand il passe un bras autour de ses épaules et au contraire même, elle s’étonne à prendre une grande inspiration et à laisser sa tête se reposer un instant sur son épaule. Une seconde, seulement, puisque déjà Matt tente de retirer le bouchon des bouteilles à l’aide de ses dents et sous le regard effaré de Lily qui place aussitôt sa main autour du goulot pour l’en empêcher. ”Mais Matt tu vas te faire mal, arrête, Mattttt, Mattt lâche cette bouteille !” La voix pseudo-outrée qui l’est tout aussi faussement que l’air qu’elle affiche sur le visage, sourcils froncés, un simple instant avant qu’elle ait un instinct de recul naturel lorsque le bouchon saute et explose. ”Un jour tu vas te faire mal.” Là elle boude pour de vrai, et ça va au moins durer deux secondes. « T'as dit moelleux, right? Tu penses qu'on peut voir les étoiles de la balancelle ou on est encore trop proches de la ville du coup on va mariner dans le brouillard pollué? » Pourtant elle abandonne toute envie de faire la tête au moment où il parle de leur refuge improvisé et un sourire nouveau naît sur son visage dès lors qu’il énonce la possibilité de voir les étoiles. ”Je veux voir les étoiles.” Caprice d’enfant jeté à la volée, voix rêveuse, yeux tournés vers la nuit étoilée, une main accrochée à celle de Matt refusant ainsi qu’il laisse retomber le protecteur bras autour de ses épaules.

Les pieds rabattus sous ses cuisses, sa bouteille dans une main, la main de Matt dans l’autre, elle se permet enfin de souffler maintenant qu’ils se sont éloignés de toute l’agitation de la fête pour un temps au moins. Elle était heureuse de s’amuser et de danser à côté de personnes qu’elle aime mais elle l’est tout autant de simplement s’éloigner de tout pour un temps au moins, seulement avec Matt. ”Tu connais les constellations ?” Et sans attendre de réponse elle laisse la bouteille reposer entre ses cuisses dans un équilibre des plus instables pour pointer les étoiles de son index, suivant une forme de serpentin. ”Celles qui forment une sorte de Z qu’aurait tracé Zorro sous alcool, c’est la constellation du Dragon.” Qui eût cru que les séjours de scouts lui serviraient un jour au moment de son mariage. ”Et après je saurais pas te dire parce que j’écoutais pas quand on nous les a montrées, désolée.” Pourtant elle a rarement été aussi heureuse d’être assez éloignée de la ville pour échapper au nuage de pollution et pour pouvoir se faire mal au cou autant qu’elle le souhaite, simplement à regarder les étoiles et attendre. Elle en profite pour prendre une gorgée dans sa bouteille, une seconde après l’avoir faite teinter contre celle de son mari. Une seconde avant de quasiment tout recracher à l’intérieur, aussi. ”Oh une étoile filante, Matt Matt Mattttt fais un voeu !!” Sa main se presse doucement autour de son avant bras, comme s’il avait réellement pu ne pas la voir, ignorer les paroles de Lily et ne pas la sentir devenir une sorte de pile électrique à la seconde où un éclair blanc a fendu le ciel.

La bouteille me donne du fil à retordre et c'est probablement dû au fait que c'est fucking pas brillant de tenter de l'ouvrir avec mes dents quand on y pense. La mauvaise idée du jour à laquelle Lily s'oppose férocement en gesticulant et en s'écriant à travers. ”Mais Matt tu vas te faire mal, arrête, Mattttt, Mattt lâche cette bouteille !” mon index se dégage de la bouteille que je tiens toujours de ma main libre pour se poster sur ses lèvres, même si c'est à mes yeux le meilleur moyen pour qu'elle fasse encore plus de bruit en protestation à mon ouvre-bouteille approximatif et à mon hygiène qui est pas top ; on note que je me suis pas lavé les mains depuis qu'on a signé les papiers qui allaient avec le I do. « Chuuuut tu vas nous faire repérer. » ”Un jour tu vas te faire mal.” et elle renchérit, même si j'ai réussi. « Et tu pourras te vanter que tu me l'avais dit. » et là juste là. Je pense que c'est le plus grand sourire de con/vainqueur que je peux lui servir et je le tiens si longtemps que c'est assuré que les caméras l'ont capté, avant que la porte de la salle ne se referme derrière nous et qu'on ait enfin la paix, la plus simple et tranquille de paix possible.

Ouais, mais on est encore quand même proches de la ville et on risque de pas tant les voir que ça les étoiles et ça risque d'être décevant et on pourrait peut-être juste boire notre vin relax dehors et souffler un peu.
”Je veux voir les étoiles.”
« On va voir les étoiles. » ça sonne peut-être définitif, ça sonne peut-être même dramatique, mais c'est la (ma) priorité pour les prochaines minutes et ça, c'est acté.

La balancelle se secoue de tous les sens, elle fait des craquements qui augurent rien de bon et Lily a confisqué tous les coussins pour elle et le seul qu'il me reste il sent l'humidité et un peu le vin parce que pendant qu'elle gesticulait avant d'avoir la bonne posture j'en ai renversé une gorgée - okay deux. Trois max. ”Tu connais les constellations ?” j'inspire, la bonne - terriblement nulle -  réponse est celle que Pete et moi on a pratiquée des tas de fois à tenter de pas pouffer de rire comme des cons direct après : "Ouais, genre la constellation qui brille dans tes yeux.". Mais je sais pas, même si je l'ai dit 40 fois et 40 autres, à Lily, j'ai pas du tout envie de le dire, encore  plus que j'y pense tout simplement pas. « Ça va avec l'horoscope, non? » mon bras retourne se lover autour de ses épaules après avoir tenté de lui enlever sa bouteille pour pas qu'elle salisse plus sa robe qu'elle l'est déjà, mais son grognement de Gremlin après minuit m'a ravisé.

”Celles qui forment une sorte de Z qu’aurait tracé Zorro sous alcool, c’est la constellation du Dragon.” je suis les indications plisse des yeux, plisse du nez, plisse des sourcils et la repère même si « Y'a pas d'horoscope pour le Dragon. Ni pour Zorro. » oh Matt. La nuit était belle pourtant. Y'avait des cigales qui chantaient en trame de fond, ça sentait bon les fleurs pas volées pas empruntées qui colorent le jardin en bordure. La musique à l'intérieur a l'air bonne, les gens rient aussi, j'entends pas de cris de meurtre ni de vrombissement de tronçonneuse du coup Jill et Ari doivent s'être calmées. ”Et après je saurais pas te dire parce que j’écoutais pas quand on nous les a montrées, désolée.” et ça c'est du Lily tout craché. Ça fait bizarre de me dire ça parce qu'en soit je la connais pas tant mais si j'avais eu à l'imaginer au moment où elle a appris les constellations, c'est exactement comme ça que je l'aurais calquée. « Okay du coup si on nous pose la question un jour on parlera pendant des heures de la constellation de Zorro-Dragon comme ça personne va nous questionner sur le reste. » ma joue se pose sur sa tête et sa couronne de fleurs me pique au point où je me dis que je dois être allergique à une des plantes dedans. Ou juste qu'elle y a foutu des aiguilles de partout pour garder les gros lourds de trop se blottir contre elle et ça me rassure un temps. Jusqu'à ce que je réalise que le gros lourd qui lui a mis la bague au doigt ce soir, c'est moi. Matt, behave.

”Oh une étoile filante, Matt Matt Mattttt fais un voeu !!” au moins elle s'est pas étouffée avec la gorgée recrachée et pour ça chapeau sérieusement, j'espère qu'elle va l'apprendre ce tour de magie-là à Ginny. « J'ai pas vu, j'ai pas vuuuu, j'ai rien vu! » que je troll, comme un idiot, quand elle a tout pointé et que le ciel s'est illuminé si fort que même les aveugles auraient vu. « Ton vin est meilleur que le mien. » je confisque, maintenant qu'elle reprend sa place et que j'ai pu lui tirer la langue parce que j'ai officiellement 4 ans et parce que c'est ce qui me semble la bonne façon de faire pour l'embêter un peu plus maintenant. « Me dis pas ton voeu, je veux qu'il se réalise. » sa bouteille revient sur ses cuisses, celle qui est à moi repasse sur les miennes. Je pallie, j'anticipe le fait qu'elle adore presque plus parler que moi et qu'à deux, on doit être le cauchemar de la régie au point où ça les dérange pas de nous avoir laissé filer un temps, ça leur donne un break au montage. Et pourtant quand j'y pense « Mais si vraiment tu y tiens et que tu brûles la promesse et que tu finis par le dire, j'vais tout faire pour qu'il se réalise anyways. »

Ca devient donc la constellation du Zorro-Dragon horoscopien si ça lui fait plaisir, parce que si c’est aussi la seule concession qu’il lui demande alors elle la lui donne sans aucun problème parce que c’est mignon comme nom. Dès que ça comprend un nom mignon elle serait prête à tout, surtout si ça fait que Matt se rapproche encore un peu plus d’elle alors qu’il fait semblant de continuer à chercher une étoile filante dans le ciel. « J'ai pas vu, j'ai pas vuuuu, j'ai rien vu! » Le second degré qu’elle ne maîtrise parfois pas alors que sa main continue de montrer la trajectoire parcourue par l’étoile morte dans le ciel et que pendant un instant elle relâche la surveillance autour de sa bouteille et - oh le fourbe. Il la lui vole et la bouche de la jeune femme forme désormais un “O” aussi outré que faussement vexé qu’il s’amuse déjà à lui voler toutes ses affaires. « Ton vin est meilleur que le mien. » C’est sûr que le sien est meilleur que celui de Matt parce que la bouteille était plus décorée, donc ça veut forcément dire que le vin à l’intérieur est meilleur et vous pourrez dire ce que vous voulez que l’avis de Lily ne changera jamais à ce propos. Si c’est beau c’est bon.

« Me dis pas ton voeu, je veux qu'il se réalise. » ”Okay.”

Elle glisse un peu plus sur les coussins, relâche la pression, dépose sa tête sur l’épaule de Matt. Le même Matt qui est devenu son mari, idée à laquelle elle va avoir besoin de beaucoup de temps encore pour s’y faire tellement ça paraît surréaliste. Ses mains glissent entre sa robe et sa peau pour enlever le micro et son boîtier, laquelle elle finit par jeter doucement à quelques mètres devant eux. Ce qui vient remplacer toute son attention entre ses mains, ce sont les doigts de Matt qu’elle vient prendre, ceux de sa main gauche, celui en particulier où elle lui a glissé une bague il y a quelques heures à peine de cela. Elle s'amuse à faire tourner l’anneau autour de sa chaire, le chatouille sans même le vouloir, sourit pour elle même.

« Mais si vraiment tu y tiens et que tu brûles la promesse et que tu finis par le dire, j'vais tout faire pour qu'il se réalise anyways. » ”Okay.”

Ca ne l’empêche pas de continuer à jouer avec sa bague, de coller sa main à la sienne pour voir combien de phalanges de plus qu’elle on peut compter, de faire tout et n’importe quoi avec ses mains parce qu’elle veut le garder près d’elle et au calme autant de temps que possible. C’est leur mariage, après tout, ils devraient pouvoir faire tout ce qu’ils veulent. ”J’ai demandé à ce que le jour où je t’embrasse tu sois toujours là le lendemain.” C’est aussi pour ça qu’elle refusait de porter le micro, tant parce que l’équipe technique ne doit être mise au courant de rien que parce que ça lui fait montrer ses failles et ses doutes et c’est quelque chose qui n’arrive jamais. En temps normal. Tout comme elle n’embrasse jamais le premier soir, tout comme elle ne se marie pas dans un jeu télévisé. Ce sont des choses qui n’arrivent jamais mais lui il chamboule et pour ça elle l’aime autant qu’elle le déteste. ”Ca aussi tu vas tout faire pour que ça se réalise ?” Elle est presque suppliante, sa triste voix d’enfant, alors qu’une seconde plus tôt elle souriait et rigolait pour un rien. Ca pourra être à nouveau le cas dans une seconde de plus selon ce qu’il lui répond.

”J’ai demandé à ce que le jour où je t’embrasse tu sois toujours là le lendemain.” j'inspire et elle sent la vanille.

Elle sent les fleurs, elle sent le shampooing mais le bon, celui qui est le plus cher, celui que t'achètes directement dans les salons de coiffure avec de la protéine de soie dedans, la totale. J'inspire parce que 2018 est loin et parce que 2018 est chiant, et parce que 2018 a un goût d'inachevé et parce que parlant de goût, celui de ses lèvres, il reste même après tout ce temps. ”Ca aussi tu vas tout faire pour que ça se réalise ?” j'aime pas sa voix parce qu'elle en doute et c'est ma faute. J'aime pas le savon qui m'a fait effacer le dernier chiffre de son numéro sur ma paume. J'aime pas mon égo de merde qui croyait qu'elle s'en foutait au matin, et j'aime pas Deklan qui contrecarrait mes tentatives de textos en se donnant le droit de jouer juge. « Okay mais attends, y'a plusieurs variables à préciser avant que je réponde. » alors je la rapproche de moi en pressant ma paume sur son épaule, me replace sur sa tête, m'arrache une partie de la joue avec sa couronne de fleurs et je laisse ses mèches chatouiller mon sourire. On est bien là.

Et évidemment, quand je suis bien, je parle, je jacasse, je sais faire que ça. « Quand tu dis "le jour où tu m'embrasses" ça veut dire que ça sera pas la nuit? Pas le soir? » elle le verra pas, mon air forcé et outré, elle va juste l'entendre à ma voix sûrement, à laquelle j'ajoute un hummmm prolongé, exagéré. « Et le "embrasses" c'est où exactement que ça compte? La joue? Le front? Le biceps - avoue, le biceps c'est cool. » mon index poke sa joue, son front. Je fais gaffe à ses yeux parce que même si une Lily pirate ça serait forcément adorable j'imagine que c'est pas son plan de vie de devenir borgne. Mon biceps lui, je la laisse l'imaginer, pouffant de rire mais surtout de surplus confiance en carton. « Faut clarifier aussi quel genre de baiser, parce que ça peut être juste toi qui titube et tombe sur moi les lèvres closes et là je saurai pas si tu m'as embrassé ou si tu t'es fait mal. »

Et quand je l'ai entendu rire, ou du moins, quand j'ai espéré assez fort pour que j'y crois qu'elle a pouffé, j'inspire à nouveau. Zorro-Dragon qui est facile à repérer maintenant parce que c'est la seule constellation qui compte pour moi désormais. « Anyways je peux pas partir j'ai une défaite à Cluedo à reprendre, et un honneur à tenir. » ouais, ouais, Matt, des excuses, fais pas genre.

À son oreille, par contre, je chuchote, j'oublie le micro cravate parce que j'oublie tout ce soir, j'oublie tout sauf ça. « Le code de sécurité au DBD c'est 688-1010. Tu pourras entrer n'importe quand pour me gifler si je mets trop de temps à revenir le lendemain matin parce que je traîne à aller chercher des croissants et des pâtisseries à la boulangerie en face. »

L’insécurité est caractéristique de Lily, tout comme le besoin d’être entourée par les meilleurs ou par personne, quitte à sans doute trop restreindre son cercle de connaissances par peur d’avoir à souffrir de nouveau et de ne pas être capable de se relever une fois de plus. Elle est aussi exigeante avec elle même qu’elle peut l’être avec le monde entier, à toujours demander aux autres d’être parfaits sans être capables d’accepter leurs défauts qui font pourtant d’eux des êtres humains. Pourtant avec Matt elle essaye de faire au mieux, vraiment, elle prend les devants pour lui montrer à quel point elle a besoin d’être rassurée en permanence tout comme elle prend les devants pour lui prouver que tout ça n’est pas un jeu pour elle. Elle a déjà bien trop perdu en acceptant de participer à cette émission pour que tout continue ainsi. Elle croit en eux, la brune, elle y croit véritablement et elle fera tout pour qu’ils soient heureux, pour qu’ils soient ensemble, pour que tout le monde oublie bien rapidement qu’ils se sont mariés avant de réellement s’aimer. C’est décousu mais ça leur ressemble, au fond, de commencer quelque chose et le mettre en pause, d’aller loin avant d’apprendre à davantage se connaître. Si c’est avec lui alors elle saura s’y faire et s’y adapter, même si cela va contre tous les principes qu’on a pu un jour lui inculquer dans sa vie. Si c’est avec lui alors elle lui fait confiance parce qu’elle sait qu’il saura toujours trouver les mots pour la rassurer, même au milieu de ses blagues.

La nouvelle mariée rigole doucement quand il pose mille questions et demande des précisions qui ne font aucun sens, quand sa joue se pose contre sa couronne et qu’elle lui rentre tant dans le crâne que lui dans sa chair sans qu’elle ne cherche pourtant à aucun moment à se replacer parce qu’ils sont juste bien, là, comme ça. Sa voix attristée et inquiète ne semble qu’un mauvais souvenir quand son rire se fait plus franc, plus enfantin aussi à chaque fois que son index vient lui chatouiller la joue puis le front. ”Ca arrive que dans les films ça, de tituber et de tomber pile sur les lèvres de celui qu’on a vu une fois dans notre vie à Noël et embrassé sous le gui et les flocons qui venaient à peine de commencer à tomber.” Qu’elle se moque en riant de nouveau, la terre à terre qui rêve encore et toujours avoir tort, pour une fois. Noël, gui et flocons de neige ont été troqués contre Passiflore, tinder et Cluedo et à ses yeux ça vaut tous les flocons du monde - même si l’idée d’embrasser Matt à un tel moment ne la dérangerait absolument pas non plus.

« Anyways je peux pas partir j'ai une défaite à Cluedo à reprendre, et un honneur à tenir. » Il le dit et elle se surprend à respirer avec bien plus de facilité désormais, quand ses paroles qui ne font de sens que pour elle semblent sceller leur union bien plus que ne l’aurait fait n’importe quel “oui, je le veux”. Si elle continue de tricher à toutes les parties de Cluedo qu’ils pourront faire alors il aura toujours des défaites à reprendre et il restera toujours aussi, ce qui est une éventualité qu’elle envisage sérieusement dans un coin de son esprit. Un jour elle pourra l’embrasser et le lendemain il sera toujours là. Ce n’est pas un rêve, c’est la réalité. Il l’a dit et elle le croit, elle le croit vraiment, autant que ses doigts s’emmêlent aux siens et refusent désormais de les lâcher.

La tête du brun vrille dans son cou, elle sent son souffle de nouveau et il ne sent ni le vin ni le fromage ni même quoique ce soit d’autre pour une fois. Seulement lui. « Le code de sécurité au DBD c'est 688-1010. Tu pourras entrer n'importe quand pour me gifler si je mets trop de temps à revenir le lendemain matin parce que je traîne à aller chercher des croissants et des pâtisseries à la boulangerie en face. » Il est con et c'est pour ça qu'elle l'aimait bien au début. C'est encore pour ça qu'elle aime un peu plus aujourd'hui. Il n'a absolument pas changé et ça a quelque chose de rassurant pour elle, presque autant que le fait que la paume de sa mai. Ne relâche pas son épaule. ”Si tu ramènes ton poids en tartes au citron tu seras excusé. Pendant ce temps là j’irai faire mon shopping dans la réserve de vin du DBD. On sera quittes.” Le code est ancré, tatoué dans son esprit, sa promesse de ne plus la laisser partir avec. Elle s’autorise de nouveau à croire en lui, à laisser quelques uns de ses milliers d’espoirs en tout genre reposer sur sa personne.

Comme preuve qu’elle fait des efforts elle aussi, qu’elle fera de son mieux pour être la meilleure femme qui soit et pas seulement un boulet accroché à sa cheville, elle lui fait de nouveau tourner la tête pour déposer un baiser empli de sens sur sa joue. Un autre suit plus haut sur son front, toujours aussi significatif, toujours aussi passionné alors qu’elle garde son sourire caractéristique. Lily finit par poser ses yeux bleus dans le noisette des siens une ultime fois, plus proche et plus confiante que jamais alors que ses doigts repassent sur les traces de la couronne de fleurs qu’il garde dans la chair de sa joue et glissent doucement dans son cou jusqu’à s’y immobiliser. ”On peut rester ici ? Juste cinq minutes. C’est pas parce que c’est notre mariage qu’ils ont vraiment besoin de nous, hein ?” Juste cinq minutes. Parce qu’ils sont bien, là.

Elle a le code, mais elle aura pas besoin de l'utiliser parce que je prévois pas partir. Je prévois pas me tirer le matin d'après ni le soir même ni jamais, je prévois pas partir de cette balancelle à dire vrai, et c'est probablement idiot de dire qu'on pourrait y être bien pour très, très longtemps, reste qu'on y est bien, et que je voudrais y rester pour très, très longtemps. ”Si tu ramènes ton poids en tartes au citron tu seras excusé. Pendant ce temps là j’irai faire mon shopping dans la réserve de vin du DBD. On sera quittes.” y'a des tas de raisons qui font qu'elle est parfaite. Y'a des tas de raisons qui font qu'elle est trop cool et qu'elle est awesome et que j'arrête pas de sourire comme un gamin à Noël de voir mon alliance qui s'agence à la sienne. Mais ça, ce qu'elle dit là, c'est en top de liste. « Ouais faudra d'ailleurs que tu m'aides j'ai pas ton palais je choisis aux étiquettes, du coup prochain tasting t'es la première en ligne de dégustation. » mon bras se presse contre sa nuque, mes doigts jouent au tic tac toe sur les quelques parcelles d'épaule dénudée à travers la dentelle de sa robe. La bouteille de vin contre ses cuisses et celle contre les miennes rendent nos futurs élans de faux sommeliers chiants bien dérisoires, mais demandez-nous si on en a quoi que ce soit à faire.

Ses lèvres sont humides et froides d'alcool, elles s'égarent sur ma joue et sur mon front, j'ai l'air d'un idiot à contracter le biceps la moue presque déçue comme si elle allait finir l'équation quand c'est juste une connerie de plus que j'ai sortie sur une longue liste. Le simple fait qu'elle ait supporté toutes les stupidités qui sortent de ma bouche à la minute durant une soirée entière lui donne tous les droits d'être honorée et respectée pour le reste de son existence à passer à m'endurer à ses côtés. Trois soirées.  

”On peut rester ici ? Juste cinq minutes. C’est pas parce que c’est notre mariage qu’ils ont vraiment besoin de nous, hein ?” « Juste 5 minutes. » si j'ai l'air de la gronder, si j'ai l'air de faire la moindre tentative de discipline avec ma voix grave et mes sourcils froncés de façon autoritaire, tout s'annule de lui-même quand je me dégage comme un sans coeur le plus rapidement possible le temps de retirer mon veston pour le lui mettre sur les genoux. Je dis rapidement, parce qu'en vrai, deux secondes top chrono après, je reprends ma place joue contre crâne, bras contre nuque.

« Et 5 autres. » j'ouvre l'oeil pour valider sur ma montre on en est où, dans les temps. Quand on somnole depuis bien plus que les 5 minutes de base, et que je suggère qu'on réitère l'expérience.

« Okay 5 de plus. » là, c'est peine perdue, quand mes paupières battent sur elles-mêmes, collées. Ma montre affiche une nouvelle heure, le ciel est un peu plus noir, Zorro-Dragon est un peu plus clair et Lily dans mes bras, elle est toujours aussi belle.

J'inspire profondément cet air sophistiqué, ce mélange de parfums de personnes qui élaborent et agrémentent un large faisceau représentant mon intolérance de l'humanité. Mes bras se croisent contre ma poitrine, estomac noué, visage imperturbablement fermé tandis que mon cœur bat la chamade contre une cage thoracique violentée. Bien sûr que Michael avait raison : je ne devrais pas être ici. Mais lui comme moi savions pertinemment que pour que je parvienne à faire une croix sur quelqu'un ou quelque chose, il m'est nécessaire de me faire extrêmement mal. De me briser jusqu'à la moelle afin de me redéfinir, un reboot total, violent mais efficace. C'était la seule solution, mes manières d'être ancrées telles des vermines en moi.

Sauf que Matt compose mon seul et unique bug. Il s'est incrusté en moi et je n'ai déniché aucun antivirus pour l'éradiquer totalement de mon futur. J'ai beau cherché, j'ai beau me brûler, il a répandu son huile sur toute la mécanique de mon cœur.

J'ai envie d'arracher les yeux de tous ceux qui admirent son épouse, j'ai envie de tordre la langue de celle qui clame que leurs bébés seront trop beaux. J'ai envie de leur souhaiter tout le mal du monde, question de m'assurer une place en enfer. J'ai envie de tout ruiner, enfant gâtée, gamine têtue, trop romantique, trop amoureuse.
Mais j'en suis incapable, parce que malgré tout, je m'entête à l'aimer et n'ambitionner que son bonheur, même si la recette de celui-ci ne m'inclut pas.

« Vous pouvez signer ma pancarte ? C'est pour Matt. Vous dessinez pas de dessins obscènes dessus, je veux qu'elle reste... belle. » Mon regard passe de la dite pancarte à Jillian. Mon poing se serre, l'envie irrémédiable de cogner faisant tressaillir mes muscles. Nouvelle inspiration. « Je voudrais qu'il se noie dans sa bière. » Voilà qu'on a au moins un point en commun, devinant que ces foudres sont dirigées vers Peter. « P-pas vraiment, bien sûr. Mais je sais faire les gestes de premiers secours, si jamais ça devait arriver. » L'indécise, je lève les yeux au Ciel. Qu'il meure dans son vomi créé par son addiction à l'alcool, ça n'en sera que logique et bien cherché.

Jillian et Ariane s'enquièrent sur la petite amie de Swann. Levi rôde autour du bar. Je décide de m'éloigner, quitte à percuter de plein front le Mulligan. « Tu sous-entendais quoi quand t’as dit que je devais être heureux pour Molly? » Il décapsule sa bière, la lève à l'attention de Matt qui lui répond de la même manière. Je fronce les sourcils. « Ton jeu a bien mollit, à être à la bière, » je commente, provocatrice, bousculant la bouteille d'un geste de la main, l'alcool fort étant de rigueur si je me mets à boire ici. « Et ça te permet même pas d'avoir un bon esprit de déduction, » je constate, amère. « Mais c'est qu'il est pas passé à autre chose ! » enchérit Jillian, Pete manifestement autant accroché à Molly que je le suis à Matt. Sombrement, je réalise qu'on a un nouveau point commun, Pete et moi. « Je sous-entends que Matt est pas le seul à s'être marié cette année. » Donc qu'il laisse ma cadette tranquille, le Mulligan. Il lui a assez pourri la vie comme ça.  

La répartie de Jillian me fait sourire. Je sais que je peux compter sur elle, qu'on a la même vision des choses, qu'on est sur la même longueur d'ondes niveau justice et équité. Elle provoque Murphy avant de la défendre des griffes acérées de Peter, puis succombe à l'invitation d'une danse sous le rythme des Maroon 5. La rouquine s'oriente vers le bar, je balaie la réception du regard. Bientôt, une investigation sera menée sans vergogne sur l'identité de la compagne de Swann et sourire en coin, je songe à l'une de mes dernières soirées avec Jill où nous avions dérobé le porte-feuille d'un mec du club. J'ai envie de faire des folies, ce soir. J'en ai besoin.

Nouvelle analyse de la salle. J'hésite, soupire, Matt a disparu de la circulation tout comme Lily. Finalement, le mieux est sans doute que je m'en aille. J'en ai assez vu et l'ignorance n'est-il pas le meilleur des mépris ? Ma volonté de me mettre mentalement et moralement à terre est-telle possible ou/et judicieuse ? « J'pense que j'vais y aller. » J'annonce à Jillian, reconnaissante de toute son amitié et de son soutien. « J'vais me chercher de quoi de plus fort. » J'explique, lui démontrant mon téléphone question de lui assurer que j'étais toujours disponible pour quoi que ce soit. Je prends la McGrath dans mes bras avant de lui glisser à l'oreille, franche. « Merci pour tout. T'es la meilleure. »

« Des anxiolytiques ! Ça se revend ça ! » et je pouffe de rire, Jill est parfaite à penser à faire du fric sur le dos de la poupée de porcelaine accrochée à Swann comme si sa vie en dépendant. Si au moins elle nous est utile la greluche, ça sera pas de refus. « Pourquoi elle prend des cachets à ton avis ? » « Elle prend pas de cachets elle les trimballe juste pour se sentir vivante. » si elle décèle dans mon ton à quel point je suis lasse, c'est pas parce qu'elle s'est forcée à le faire. Je suis si peu emballée du choix de rencard de Swann que j'en viens même à lui inventer une autre vie et des aspirations à être cool même si elle en a pas l'air, c'est pour dire. En soi, elle aurait pu se trimballer 40 kilos de cocaïne que j'aurais pas cru une seule seconde qu'elle soit autre chose qu'un ramassis de peau diaphane et de rubans à paillettes faux et archi forcé et c'est bien ça le drame. « Oh non pitié pas ce genre de trucs dans la famille, on va déjà devoir en gérer une avec l'autre là-bas, pas deux. » c'est le drame, parce que maintenant on en a deux comme ça dans la famille. Elles survivront pas à l'année.

On dérive vers la piste de danse, ils nous voient venir à 100 à l'heure pourtant Swann la garde proche et la laisse jacasser. Il est maso le gars, je l'ai toujours su. « on veut savoir tout ce dont on a besoin de savoir pour juger si t'as le droit de le regarder avec ces yeux là » Jill mord et Jill me rend fière, elle prend le relai quand ma langue a arrêté de claquer sur mon palais et que mes yeux ont depuis longtemps arrêter de scruter Lucia pour se verrouiller à ceux du blond qui s'amuse clairement pas autant que nous. Boohoo. ”Ariane c’est bon. Ca suffit pour ce soir.” mon sourcil se hausse, ma nuque s'arque. ”Vraiment.” mon sourire lui, il ne fait que grandir, quand il pense avoir toutes les cartes en main, quand il ne vient que d'attiser le jeu un peu mieux. "On en reparlera plus tard." oh honey t'inquiètes, c'est au planning.

« Arrêtes de dramatiser Swann on fait que discuter avec ta nouvelle amie, tu veux pas qu'elle apprenne à nous connaître ? » mais elle a du nerf sa soeur et elle me fait presque autant rêver que le plateau à service qui passe à hauteur des yeux et duquel je choppe deux coupes de champagne, les deux pour moi et aucune pour elle. Mais ça aide de l'avoir dans les parages, la Jill en sevrage quand j'ai soif. « Et parles pas à sa place Swann. »

« C'est bon, elle m'ennuie. » que je statue comme l'évidence. Et elle m'ennuie tellement que tout ce temps je l'ai même pas regardée une seule autre fois, bien trop occupée à ce que Swann voit exactement ce qui se trame dans mon coup d'oeil et spoiler alert : ça sera très fun pour moi et Jill, et très chiant pour lui et sa Barbie. « On en reparlera plus tard. » ses mots que je reprends, le ton avec. « Vraiment. » oh honey t'inquiètes, c'est au planning.

La seconde d'après, on les lâche. Parce qu'on a un plan à mettre en place, Jill et moi. Les cachets tintent dans mon sac, mon sourire a pas du tout quitté mes lèvres. Et c'est mauvais signe pour eux, pas pour nous.

Ariane en rajoute une couche, Jillian une autre, et Swann a beau être un parfait tampon entre tout le monde cette fois-ci ce n’est plus suffisant. Elles ont chacune des milliers de couteau en main et continuent de transpercer encore et encore Lucia au milieu du carnage, celle qui n’a rien demandé. Il essaye de se raccrocher à l’idée qu’elles tentent toutes les deux de bien faire et qu’au fond tout part d’une bonne intention même si ce n’en a désormais plus du tout l’air. Il se raccroche à ses convictions et à tout l’espoir qu’il a déposé sur leurs épaules il y a une vie de ça mais en parallèle vit Lucia qui elle ne sait rien de leur passé ou de leurs intentions et qui doit pourtant subsister au milieu du chaos. Elles sont deux, elle est seule, l’ordre de priorité est alors tout trouvé.

Il voudrait leur répondre bien des choses mais il se retient, les mots restant bloqués dans sa gorge puisqu’il lutte pour les y garder. Il le fait pour Lucia, parce qu’à aucun moment il n’avait été question de ce genre de scène alors qu’elle pensait simplement assister à un mariage et passer une bonne journée. Son corps parle pourtant à sa place, sa mâchoire se serre et les os de son visage se contractent sans que cela ne puisse paraître inaperçu, tout comme son poing dans le dos de Lucia. Il ne frappera pas, il n’est pas du genre à agir avant de réfléchir (encore moins de frapper qui que ce soit, à vrai dire) mais il bouille de l’intérieur à l’idée de devoir rester silencieux. Seul son regard assassin défit celui de la rousse alors qu’à aucun moment il ne se dérobe, surtout pas quand elle conclut la discussion d’elle même pour aller voguer ailleurs.


Le blond s’autorise à respirer de nouveau alors qu’elle est à quelques pas d’eux, Jillian derrière lui. Il ferme les paupières un temps, expire profondément avant de focaliser de nouveau son attention sur la jeune femme à ses côtés. « Je… Je suis désolée, vraiment, je voulais pas te créer d’ennuis… C’est le mariage de votre frère à tous les trois, vous devriez pas être en train de vous disputer, je vais rentrer chez moi, c’est pas grave. » Il se retourne vers elle et les traits de son visage changent automatiquement, désormais bien plus détendus alors qu’il tente de faire au mieux pour la rassurer. L’entreprise semble ô combien difficile alors qu’elle n’a pas eu le droit au disclaimer sur la famille McGrath&co mais qui lui aurait infiniment utile là, juste là. « Ce n’est pas de ta faute. Si tu veux rentrer je peux te ramener. » Sa main se déloge de son dos, il la veut libre de chacun de ses mouvements et de ses choix. Il était loin d’être la présence la plus rassurante qui soit alors il comprendrait parfaitement qu’elle décide de rentrer par ses propres moyens. Quoi qu’elle décide il ne lui en voudra absolument pas et ce sera en tout cas bien moindre que tous les reproches qu’il a accumulé en un temps record contre le duo de harpies aux cheveux longs.

Elle a l’air perdue et désorientée et c’est apparemment l’effet que l’on ressent après avoir fait connaissance de manière express avec une partie de la famille McGrath. Autant dire qu’elle risque désormais de prendre toutes les précautions du monde avant de rencontrer qui que ce soit associé de près ou de loin au blond et il ne le comprendrait que trop bien. Et puis, pourquoi est ce qu’elle devrait nécessairement rencontrer davantage de personnes dans son entourage, hein ? « Où j’ai laissé mon sac déjà ? » Swann balaye l’assemblée du regard et les tables avec pour trouver le sac de la jeune femme, lequel il n’a eu aucun effort à faire pour en retenir la forme ou la couleur puisque cela lui paraissait évident. Il allait parfaitement sa robe et ses yeux, c’est tout. « Là bas. » Il pointe du doigt, l’insolent, avant de se faire petit au milieu de la piste de danse pour passer entre les amis et autres connaissances des mariés. Même s’il connaît Ariane et Jillian par coeur, il est encore loin de se douter qu’elles étaient allées jusqu’à fouiller à l’intérieur pour en découvrir un précieux Graal. « Elles n’avaient pas à te parler comme ça. Je suis désolé, elles pensent bien faire … à leur manière. » Il leur en veut profondément mais il est incapable de ne pas leur trouver des circonstances atténuantes, toujours égal à lui même. « Tu vas bien, toi ? » C’est tout ce qui importe.