Je m’échappe de la surveillance de mon père. Je file dans les couloirs de la maison. Je rase les murs. Et enfin je la trouve Ginny. Elle n’est pas seule, mais j’ignore simplement Jill. Je n’ai pas la force de lui faire face aujourd’hui. Elle m’importe peu à cet instant. Tout ce qui compte, c’est Ginny.
« Un jour, je t’expliquerai pourquoi j’ai dit oui. »

Un jour tout fera sens je te le promets. Un jour tout ira mieux même s’il cela doit prendre dix ans. Elle est futile ma promesse. Elle ne rassure en rien. Je le vois dans ses yeux. Elle est paniquée Ginny. Elle pourrait s’effondrer à tout instant. Je voudrais m’excuser pendant des heures, mais Jill en décide autrement. « Ça porte malheur de voir la mariée avant le mariage ton papa t'as pas appris ça ? » Ne commence pas… Je me retiens de me tourner vers elle. Je me concentre sur celle qui va devenir ma femme. Je voudrais pouvoir lui expliquer, mais elle insiste Jill. Elle devient dure. « Dégage Jill. » que je murmure alors que soudainement Ginny change. Elle relève la tête, elle souffle, elle s’impose. Je ne l’avais jamais vu comme cela. J’ai appris à ne pas m’interposer entre les sœurs. Je la laisse faire ce qu’elle pense être le mieux. Jill prendra pour les autres. C’est comme ça. On a trop mal pour agir plus intelligemment. On s’en voudra plus tard. Bien trop tard…

***

On m’a posé devant l’autel tel un pantin. A partir de cet instant précis, je ne contrôle plus rien. Le show commence.

Je devrais avoir des larmes de joie de la voir arriver dans sa belle robe blanche. Les larmes sont belles et bien là. La joie, non. Tout va trop vite et je m’enfonce. Je suffoque alors qu’elle n’est même pas encore arrivée à moi. Ma cravate me serre trop. Je commence à voir flou. Elle est là la crise d’angoisse, elle guette, elle attend le moment opportun. La langue de mon père qui claque dans l’assemblée. Tiens toi droit Bailey. Je me redresse. Souris comme un taré quand le père McGrath me tend la main de sa fille. Et nos regards se croisent. Je suis tellement désolé…

Ma main ne quitte pas la sienne alors que mon esprit s’enferme petit à petit. Je coupe tout. J’ignore les ricanements de Jill et Matt. Le regard assassin de mon frère. Les menaces ambiantes de mon père. Je coupe petit à petit. Je ressens tout trop fort, mais j’ignore. J’essaie tout du moins. J’en briserai sa main pour ne rien ressentir. Elle semble morte face à moi. Je devrais dire non. Mais ce sera pire pour elle. Je devrais la sauver, mais je n’en ai pas le courage. Je ne suis qu’un lâche.

Et vient le moment où le prêtre nous demande d’échanger nos vœux. Je le connais par cœur le discours écrit par mon père. Je lui ai récité ce matin même tel le bon écolier que l’on me demande d’être. Je l’avais appris par cœur. La citation de la bible, les mots jetés à la va-vite pour faire croire à une relation. Le je t’aime final. C’est ce que je dois dire. Et pourtant… S’il me reste une seule liberté c’est celle de m’exprimer. Je ne suis pas assez courageux pour dire non. Je le suis peut-être encore assez pour m’adresser à elle franchement.

« Ginny. » Pardonne-moi.

« Je promets de te respecter, de t’admirer et de t’apprécier pour la personne que tu es, celle que tu souhaites devenir. » Pardonne-moi, je t'en supplie.

« Je promets de soutenir et de protéger ta liberté, car bien que nos vies soient intimement liées, tes choix te restent propre. » Et j’entends mon père qui grince des dents. Et j’entends l’ironie de cette improvisation. Je t’offre la chance de dire non. Je n’en ai pas le courage, mais tu en as tous les droits. Un jour tu comprendras.

« Je promets de toujours m’efforcer de répondre à tes besoins, non par obligation, mais parce que cela me fait plaisir de te voir heureuse. » Je promets que tout ce dont tu as besoin passera avant moi. A mon détriment même s’il le faut. Je prendrais le blâme et tu vivras.

« Je promets d’être là pour toi lorsque tu auras besoin de moi. » Entends là bien cette promesse Ginny. Elle est la plus vraie qui soit.

« Je promets de nourrir tes objectifs et tes ambitions, pour te soutenir dans le malheur et pour célébrer nos triomphes. » Avec moi tu n'abandonneras pas la peinture. Tu ne le sais pas encore, mais un atelier l'attend déjà dans notre futur appartement. Tu continueras à créer, à t’évader.

« Je promets de persévérer lorsque les temps deviennent difficiles, sachant que tous les défis auxquels nous pourrons faire face, nous les vaincrons ensemble, car nous sommes une équipe, maintenant et pour toujours. » On devient une équipe. Et tu verras, au fil du temps, des années, que personne ne pourra nous atteindre lorsque l’on est deux. Cette promesse, elle tiendra. Même après. J’en suis certain. Maintenant, et pour toujours.

« Je promets de te montrer, chaque jour, la chance que j’ai de t’avoir dans ma vie. » Parce que dans mon malheur, tu es probablement la meilleure chose qui ne me soit jamais arriver.
« Je t’aime. » Pardonne-moi. Je suis si lâche.

Et elle est belle Ginny. Elle est belle et sa robe est parfaite, et son visage est de marbre. Elle est belle lorsqu’elle inspire, lorsqu’elle sent la chair de poule lacérer sa peau sous la dentelle, sous les tissus tous plus doux les uns que les autres. Elle est belle lorsqu’elle passe son bras sous celui d’Isaïah, quand elle suit chacun des pas qu’il initie, quand elle verrouille ses yeux brillants à ceux de Bailey, déjà posté à l’autel. Son sourire est impeccable et sa silhouette est droite, elle ne chancèle pas, jamais, lorsqu’elle se pose devant lui, lorsque ses mains trouvent les siennes et qu’elle tente de lui transmettre toute la force qu’elle a sans jamais sourciller. Elle sera forte pour eux deux aujourd’hui. Elle ne le sera plus jamais ensuite, elle le sait fatalement, mais aujourd’hui elle ne le lâchera pas d’une seule seconde quitte à se sacrifier elle-même. Elle est déjà maudite, de toute façon.

Les paroles de l’homme face à elle ne sonnent absolument pas comme lui. Ce n’est pas Bailey qui lui parle, ce n’est pas Bailey qui lui récite des vœux déjà écrits, ce n’est pas Bailey qui lui promet monts et merveilles quand elle sent ses doigts se resserrer d'angoisse sur les siens. Ce n’est pas lui et ce n’est pas elle non plus, quand elle se hisse sur la pointe des pieds pour embrasser son front, pour chasser toute sa peine et tout son mal de la plus délicate des façons. Elle lui offre le plus beau et le plus grand sourire qu’elle a en banque, elle lui donne tout cet amour qu’elle n’avait gardé que pour un seul homme, elle le regarde comme elle en regarderait avidement un autre. Elle vit en parallèle et en paradoxe ce moment qu’elle a tant espéré partager avec celui qui jadis était l’homme se vie. Il ne l’a pas arrêtée, il ne l’a pas retenue, il l’a laissée partir, il l’a oubliée. Aujourd’hui, elle se promet qu’elle l’oubliera elle aussi.

« L'amour prend patience, l'amour rend service. » elle sera patiente, elle le sera pour eux parce qu’elle a tout brusqué, parce qu’elle a tout gâché. Elle ne brusquera rien, elle lui offrira une bulle dans laquelle il pourra être lui, après n’avoir été que faux pour le reste du monde.

« L'amour ne jalouse pas, il ne se vante pas, ne se gonfle pas d'orgueil. » elle ne se mettra jamais le nez dans ses affaires, elle ne dira jamais qu’il la quitte, le soir venu, pour être avec sa sœur. Elle se laissera passer deuxième à tous les moments de sa vie, lui qui l’a passée première aujourd’hui et aujourd’hui seulement.

« Il ne fait rien de malhonnête, il ne cherche pas son intérêt, il ne s'emporte pas, il n'entretient pas de rancune. » elle ne lui en veut pas, elle ne lui en voudra jamais, et elle priera tous les saints qu’elle pourra trouver pour qu’il sache seulement considérer la pardonner un jour.

« Il ne se réjouit pas de ce qui est mal mais il trouve la joie dans ce qui est vrai. » elle mentira à tout le monde, elle leur ment tous en ce moment, et elle continuera de le faire parce que c’est tout ce qu’il lui reste. Mais à lui, pour lui, elle sera toujours honnête. Elle se l’est promis.

« Il supporte tout, il fait confiance en tout, il espère tout, il endure tout. » et elle supportera. Elle supportera le poids du monde, elle supportera ses démons sans jamais les lui imposer, elle supportera l’univers en entier en espérant que sa vie en soit simplifiée. Un peu, à peine, elle en brûle de le réaliser.

« L'amour ne passera jamais. » mais elle l’aimera. Elle l’aimera et elle fera tout en son pouvoir pour qu’on la croit.

Le silence revient, elle ne bouge toujours pas, ses espadrilles ancrées dans le sol et son cœur en miettes. Mais elle est belle Ginny, elle l’est toujours quand elle n’est pas elle, elle est parfaite quand elle se meurt de l’intérieur. Elle implose, quand elle n’explose pas.

« Si quelqu'un s'oppose à cette union qu'il parle maintenant ou se taise à jamais. »

Elle, elle s’oppose.
Mais elle, elle ne dit rien non plus.
Elle est belle Ginny, quand elle implose.

Elle a fini par dégager, elle a fini par suivre le mouvement jusqu'à l'Eglise en partageant une bouteille d'alcool avec son frère. Il faut que ça s'arrête, il faut que tout le monde se taise ou cette cérémonie sera bien trop dure à supporter. Elle est assise à l'avant, pour faire bien. Juste derrière les parents McGrath, juste à côté de Matt. Elle se demande où peut bien être Noah. Mais elle ne serait même pas capable de le garder sur ses genoux, pas dans cet état là. Pas alors qu'elle voit presque tout en double et qu'elle rit juste en voyant que sa sœur a mis des espadrilles. Il n'y a rien de drôle, absolument rien. Mais elle va se taire, elle va sortir son plus beau sourire et elle va les regarder craquer tous les deux sur leur autel. Elle tient la main de Matt. Elle ne pensait pas ressentir ça, elle ne pensait pas que des mots pourraient la briser autant. Ils récitent leurs vœux, pourtant ils sont convaincants. Et si c'était vrai ? Et si ils pensaient vraiment tout ça tous les deux ? Il l'aime, et peut-être qu'ils vont réellement trouver le moyen de s'aimer toute leur vie même si c'était par leur choix. Ils sont beaux, et Ginny a l'air heureuse. En tout cas, Jill ne voit que ça, elle n'entend que leurs mots, et tout va trop vite. Il faut que ça s'arrête, ils ne peuvent pas vraiment faire ça, ils peuvent pas dire oui, Bailey ne peut pas dire oui à sa sœur.

Elle ne respire plus vraiment, elle regarde le vide devant elle, elle ne pourra plus jamais les regarder sans entendre tous ces mots dans un coin de sa tête, sans revoir ce baiser sur le front de Bailey, sans revoir leurs mains enlacées, sans revoir le sourire béat sur le visage de Ginny. Ça fait mal, bien plus mal que ce qu'elle s'imaginait, bien plus mal qu'elle ne l'avouera jamais. Elle croise le regard de Matt, qui a l'air de se briser en mille morceaux lui aussi sur le bord du banc. Ils ramasseront les morceaux un jour, mais pour le moment, ils se perdent, ils se perdent absolument tous.

« Si jamais quelqu'un s'oppose à cette union qu'il parle maintenant ou se taise à jamais. » Est ce que c'est le moment ? Est ce qu'elle pourrait vraiment faire quelque chose pour arrêter tout ça ? Elle regarde Matt, elle ne cherche pas son approbation, elle s'excuse seulement d'avoir eu cette idée, d'être prête à se lever pour faire ce que tout le monde attend d'elle, tout gâcher. Elle allait se lever, elle allait vraiment hurler, elle allait regarder sa sœur avec toute la haine qu'elle pouvait ressentir ce jour-là, elle allait partir après avoir essayer de les sauver d'un destin qui n'était pas le leur. « Oh non Jill. » Isahïah, la ferme Isahïah. « Penses à Noah » Non pas Noah, ne joues pas avec la carte de Noah, t'as pas le droit de faire ça. « Tu crois que Sebastian s'occuperait mieux de Noah que Bailey. » Sebastian, Jill tourne ses yeux vers lui en soupirant bien trop fort. Elle n'a plus de force en pensant au petit garçon, la seule chose qui les maintient tous en vie dans cette ville. Une larme sur sa joue, de tristesse, de rage, de désespoir, tout est concentré dans une seule et unique larme qu'elle essuie d'un revers de main. « Je veux pas rester là. » Elle se lève Jill, elle regarde une dernière fois les futur mariés, parce que, même si elle se lève au bon moment, même si tout le monde croit qu'elle va parler, elle se tait. Un silence lourd de sens et elle sort de l'Eglise pour essayer de respirer un peu mieux. Ne hurle pas Jill, si tu hurles ils auront tout gagné. Et elle s'assoit dans un coin, elle attend, elle ne sait pas ce qu'elle attend, mais elle restera là tant que personne ne viendra la chercher.

Tout n’est que mensonge et apparat.

On est beau là. Elle dans sa robe blanche, moi dans mon costume hors de prix. On est tiré à quatre épingles. La couverture d’un magazine parfait.

Mensonge, mensonge, mensonge.

Pourtant, dans chacune de mes paroles, je tente de lui transmettre une part de vérité. Ce n'est pas que des promesses que l’on m’a obligé à prononcer. Je ferais tout ce qui est en mon pouvoir pour la protéger, pour tenter de la rendre heureuse, pour l’aider à s’épanouir. Un jour, tu comprendras Ginny. Je lui promets tout et rien à la fois. Et quand ses lèvres viennent se poser délicatement sur mon front, je comprends. Aucun d’entre nous ne va trouver la forcer de dire non. Elle est terrorisée. Je suis lâche. Alors, on tentera de s’aimer comme on peut, on tentera de vivre. Je crois.

Ce n’est pas elle qui me parle d’amour et pourtant elle le fait si bien. Et sa main dans la mienne permet de cacher mes tremblements. Et son regard dans le mien, m’aide à respirer un peu mieux alors que la tempête des émotions prend le dessus. Ma vision devient floue, l’air se bloque dans mes poumons. Et pourtant… Rien ne transparaître. Je garde mon sourire, je reste droit. Et il va être fier mon père quand le photographe aura réussi à capter les larmes dans mes yeux. Ils pourront dire que le marié n’avait pas pu retenir son émotion face aux vœux de sa femme. C’est de la bonne télévision, de l’émotion à l’état pur. Alors qu’en réalité, je me noie sans jamais retrouver la surface.

« Si quelqu'un s'oppose à cette union qu'il parle maintenant ou se taise à jamais. »

Moi, je m’y oppose, mais je ne dis rien.
Elle aussi, elle s’y oppose, mais elle ne dit rien non plus.
On est beau quand on se noie.

Et je vois Jill qui se lève. Du coin de l’œil, je la vois. Je voudrais lui dire que ça ira. Je voudrais la rejoindre. Je voudrais trouver la force de dire non. Je voudrais tout un tas de choses et pourtant… Jill s’en va. Et la cérémonie continue. On répète ces mots tant redouté. On échange les I do. Et viens le clou du spectacle. Pardonne-moi Ginny. Je l’embrasse sans le vouloir. Je l’embrasse réellement pour la première fois. Quelques secondes pour sceller le deal, pour leur prouver que nous sommes parfaits. Et le masque s’effrite.

Tout s’enchaîne sans que je ne réalise. En quelques minutes, on se retrouve sur le parvis de l’église. Mon regard ne cesse de la rechercher, elle. Et j’oublie de respirer lorsque mes pupilles croisent ses yeux rougis. J’oublie juste de respirer.

L'alliance brûle sa peau, elle la brûle si fort et si mal qu'elle doit se raccrocher aux doigts de son désormais mari pour arriver à rester droite, stoïque. Elle perd le masque une seconde et une seule Ginny, elle s'en voudra toute sa vie, mais on attribuera la larme qui coule sur ses joues à l'émotion de ce jour béni pour certains, maudit pour d'autres. Et ses lèvres trouvent les siennes, et ses paumes se lovent autour de sa nuque avec tout l'amour qu'elle dédiait il y a une poignée de minutes à peine à un autre. Elle s'ancre à lui comme il suffoque contre elle, elle en fait sa bouée de sauvetage alors qu'égoïstement elle prolonge leur baiser à la recherche d'une chaleur qu'elle n'aura plus jamais, elle condamnée à être désormais éternellement gelée.

Leurs doigts ne se lâchent plus, bien évidemment. Les photographes les suivent, les pétales de fleurs aux mille couleurs dressent leur sillage, ils sont parfaits, le couple d'élus. Ils sont parfaits et ils s'aiment, c'est ce qu'ils ont promis devant une assistance pâmée sur les mariés, pâmée sur le plus gros mensonge qu'une poignée à peine d'initiés voit clairement aller. Ils sont parfaits et ils s'aiment alors que les portes de l'église s'ouvrent sur eux, mais qu'ils ne voient qu'elle. Jill qui est brisée, Jill qui est cassée, Jill qui est démolie et Ginny elle, qui n'hésite pas une seule seconde. Lorsque ses mots soufflent ce qu'elle attribuera à la première des centaines de bénédictions qu'elle leur donnera, au cours d'une vie à tenter de survivre, à tenter de sortir la tête de l'eau, eux d'un côté, elle de l'autre. « Pars avec elle. » elle chuchote, elle y ajoute un baiser sur sa nuque pour camoufler la supercherie, elle provoque des soupirs admiratifs d'une part des invités, des regards envieux des autres. « Tout ira bien. » elle le rassure en ne l'étant absolument pas elle-même, maintenant que tous se dispersent vers la salle de réception. Elle calcule qu'ils n'ont encore qu'une heure à jouer aux parfaits époux avant qu'il puisse s'enfuir avec Jillian le temps qu'il leur faudra, qu'elle tente de retrouver courage et force comme elle seule devrait arriver à le faire.

***

La musique joue derrière elle, quand ils ont fini de partager le gâteau, quand les danses se sont succédées, quand les discours se sont envolés. Elle a bien compté et l'heure est presque écoulée, la dernière fois où ses prunelles se sont accrochées à celles de Bailey, et qu'elle l'a vu errer du côté de sa soeur sans détourner le regard d'eux deux une seule fois. Pars avec elle, qu'elle lui a dit. Tout ira bien, qu'elle a promis.

Elle a volé le téléphone de Matt, elle s'est enfuie sur la terrasse, elle est cachée par les rosiers et par la pénombre, elle est seule et elle tremble. Et c'est son numéro qu'elle compose. Il est à l'autre bout du monde et il ne lui répondra jamais. Elle espère être assez stupide Ginny, assez naïve, assez idiote pour arriver à croire une seule seconde qu'il ne l'ait pas oubliée. Mais il ne répond pas Auden, malgré la tonalité qu'elle étire, malgré le souffle dans sa gorge qui se serre, malgré toutes les prières qu'elle aligne sans jamais y trouver la moindre réponse. Lui non plus, ne l'a pas, la réponse. Elle ne lui aurait même rien demandé, elle ne lui aurait même pas fait l'affront de dire quoi que ce soit, alors qu'elle aurait simplement espérer entendre sa voix. Pars avec elle, parce que moi je ne pourrai jamais partir avec lui.