| ZEKE&BIRDIE • you will continue to bleed |
| | (#)Mar 24 Mar 2020 - 17:20 | |
| “you can accept or reject the way you are treated by other people, but until you heal the wounds of your past, you will continue to bleed.” feat @ezechiel blythe & birdie cadburry Elle l’a revu. Purée de speed-dating, pourquoi elle y est allée déjà ? Birdie n’en sait rien et ce n’est pas ce qu’elle aura bu au bar juste après qui va l’aider à y voir plus clair. Ou alors, si. Elle se met à blablater si fort et si bien que c’est le barman lui-même qui finit par la foutre dehors. Parce qu’elle est soûlante, qu’elle a assez bu, qu’il est temps de rentrer chez elle. De toute façon, il fut clair dès le début que ce n’allait pas être lors de ces foutus speed-datings qu’elle aurait rencontré quelqu’un. Pas qu’elle se soit inscrite pour cela, d’ailleurs. Non, ce n’était qu’un prétexte pour trifouiller un peu plus l’espèce humaine et voir à quel point sa vision des choses n’est pas si loin de la réalité.
Cependant, Birdie n’aurait pas pensé tomber sur lui. Ce lui dont elle persiste à vouloir laisser flou dans sa tête parce que c’est ce qu’elle a fait de mieux cette dernière décennie. Lui qui a toujours ce putain de regard bleuté, perçant et saillant et qui a réussi à la rendre muette le temps d’une bonne seconde. C’est long, une seconde. C’est le temps qu’il faut pour que des années de travail sur soi remontent à la surface, que les tremblements réapparaissent, que les angoisses reprennent forme. Pourtant, ce n’est pas lui qui est le coupable. Pas réellement. Birdie devrait apprendre à pardonner, Birdie devrait apprendre à tourner la page. Elle ne devrait pas rejeter la faute sur lui.
Mais à ce moment-là, c’est lui qu’elle maudit alors que Cadburry traine, elle marche, elle trébuche sur le bord de la route. Une âme en peine ? Pas vraiment. Son van, elle l’a oublié. Il doit être sur le parking du restaurant où s’est déroulé l’évènement, stupides rendez-vous, stupide st Valentin, stupide lui. Elle utilise ses pieds dénudés de chaussures, certainement oubliés aussi quelque part, pour se diriger là où elle sait qu’elle sera tranquille. Ou alors qu’elle ira briser la tranquillité. Même alcoolisée, même peu vaillante sur ses jambes, Birdie n’a pas perdu le sens des repères. Elle a peut-être laissé sa dignité au fond d’un verre (ou quinze) ce soir mais elle la trouve, la cabane. Elle la trouve et elle pousse un cri de victoire.
Birdie s’y affale, elle prend plus de place qu’avant et les coussins ont perdus encore plus de superbe - déjà qu’à la base, ils n’étaient pas très vaillants. Elle reste un moment en étoile de mer, les yeux portés sur le ciel par l’ouverture faite de son créateur - d’ailleurs, ça fait penser. « Zezeeeeeee, je t’ai vuuuuuu, t’as fait speed dating, toi ? » Sa voix à travers le combiné se veut enjouée, brisant le calme et le silence de la forêt et ses habitants. « J’y étais aussi et pi après, j’ai suivi une trace fluorescente au sol et t’sais quoi ? J’ai atterri dans la cabane ! C’est fou, nan ? Zeze ? »
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| | | | (#)Jeu 26 Mar 2020 - 23:08 | |
| Il n'avait pas passé une excellente soirée mais Zeke avait tout de même essayé, au moins pour faire plaisir à son petit frère qui se plaignait constamment qu'il ne sortait jamais. On voyait le résultat quand il s'y osait puisque Blythe était tout de suite rangé dans la catégorie des hommes bizarres, juste parce qu'il parlait peu, qu'il n'était pas très doué pour relancer des conversations et puis, il le savait, il n'avait pas forcément le physique le plus avenant non plus. Dans le fond, les gens étaient tous trop superficiels et il avait appris à faire avec, ne pas se conformer à leurs préjugés pour s'éviter d'en souffrir. Zeke vivait seul, sûrement trop à bien des égards mais en évitant le contact de proximité avec les autres, il s'empêchait aussi toutes les douleurs qui en résultaient. Il considérait qu'il n'avait pas besoin de cela, encore moins ces derniers temps avec la nouvelle de son père qui avait du mal à gérer la ferme sans assumer complètement sa maladie. Dire que Ezechiel cachait ce fait à son petit frère, lui qui n'avait pas l'habitude de dissimuler quoique ce fut à Yele, il avait vraiment très peur que cette situation ne dégénère à un moment ou un autre. En tout cas, une fois le speed dating terminé, Zeke n'avait pas traîné au bar comme d'autres autour de lui. A la place, il avait pris la tangente, s'éclipsant vers son pick-up pour rentrer bien vite à la ferme. Il fallait dire qu'il devait se levait tôt le lendemain matin pour gérer les animaux à la place de son père souffrant et il n'avait pas envie de perdre encore deux heures à essayer de suivre des conversations qu'il ne pouvait pas comprendre. Presque une heure plus tard, il atterrissait dans son salon, s'asseyant au fond de son divan pour respirer une minute. Ce n'était pas de trop en vue de tout le lien social qu'il avait eu à supporter, un record pour lui, sûrement qu'il avait discuté autant que ce qu'il avait pu faire en plus d'un an... La fatigue, voilà ce qui taraudait le grand brun mais le combiné de la maison Blythe sonna à ce moment là et il n'eut pas d'autre choix que d'accourir pour faire arrêter ce tintamarre puisque ses parents dormaient depuis de longues heures déjà. Il lui fallu une bonne minute pour reconnaître la voix au bout du fil, sûrement parce qu'il ne l'avait pas vu depuis très longtemps et elle n'avait pas l'air tout à fait sobre par dessus le marché. "Birdie?" Evidemment que c'était elle et en plus, elle savait ce qu'il avait fait de sa soirée, étrange qu'il ne l'ait pas remarquée. "La cabane? A cette heure?" Pas la peine de tergiverser, il grogna dans sa barbe, remit son blouson et se dirigea à la hâte vers ladite cabane de fortune, perdue au milieu de la forêt autour du domaine des Blythe. "Tu dors?" Il chuchota ces mots en grimpant en haut, se demandant bien ce qui avait pu amener Birdie ici, dans un refuge, après tout ce temps. Sûrement quelque chose de grave, Zeke avait cet instinct là. |
| | | | (#)Dim 29 Mar 2020 - 13:41 | |
| Il a l’air de s’interroger, Zeze. Il a l’air de se demander, et il a l’air surpris qu’elle soit dans la cabane. « A cette heure, oui, m’sieur ! ‘Quoi, y a des heures de visites ? » La cabane, elle est mignonne, elle est ouverte, elle est accueillante. Birdie ne voit pas ce que ça change qu’elle y soit maintenant, à cette heure-ci, dans la nuit noire, en rêvassant qu’un papillon de nuit bleu viendra peut-être se poser sur son nez et la bénir. Parce qu’elle n’a que ça, Birdie. Que ça à laquelle se rattacher pour ne pas sombrer totalement. Pas plus qu’elle ne l’est déjà.
« Zeze ? » Elle répète, sans cesse, alors qu’il n’y que le silence qui lui répond. Peut-être qu’il lui est arrivé un truc, aussi, à Zeze. Peut-être qu’il a clamsé directement ou qu’il a fini en une flaque d’eau géante - parce que c’est un géant, Zeze, alors il y aurait forcément une inondation s’il devient de l’eau. Mais pourquoi il deviendrait de l’eau, surtout qu’il n’aime pas ça, l’eau, Zeze ? C’est ridicule. Mais Birdie répète encore son prénom, ce doux surnom affectif qu’une gamine qui n’arrivait pas à prononcer toutes les lettres avait lancé un jour. Elle finit par soupirer, relâchant son téléphone qui devient bien trop lourd - d’inutilité surtout. « Même toi, tu m’lâches. »
Mais en faites, non. « Tu dors? » « Si c’est l’cas, alors t’es le meilleur spot pub du monde. » Elle rigole nerveusement, Birdie, ne bougeant pas de sa place, la voix calfeutrée de son ami contrastant avec celle perçante qu’elle a. « J’aurai préféré dormir pour toujours, Zeze. C’est possible, ça, nan ? J’aurai juste à prendre petits cachets et pouf !, c’est fini, plus rien à voir, rideaux baissés ! » Un discours sombre mais dit avec une légèreté perturbante. Birdie a mal et Birdie n’est jamais très certaine comment réagir à des flux d’émotions.
Et là, la solution qui a l’air d’être la plus raisonnable pour tout faire taire, c’est le sommeil éternel.Telle la princesse dans sa tour. Mais sans prince charmant. Puisque ce dernier s’est révélé être aussi le dragon malfaisant. La vie est vraiment mal foutue.
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| | | | (#)Dim 29 Mar 2020 - 14:22 | |
| Il lui avait plus ou moins raccroché au nez mais c'était bien connu que Zeke ne supportait pas le téléphone. De base, être en face de quelqu'un ne l'aidait pas franchement à entamer une discussion alors au bout d'un fil et d'un combiné, c'était la mort assurée aux yeux du brun. Cela dit, il était suffisamment suicidaire pour tenter de rejoindre une Birdie apparemment dans un état ivre avancé. A croire qu'il aimait se faire subir des instants gênants car lui n'avait jamais été saoul de sa vie et en vue de sa constitution, on avait tous les droits de douter que ce genre d'événements lui arriveraient un jour. Ezechiel rejoignit bien vite les quelques mètres qu'il avait à faire entre la maison et la cabane dans la petite forêt attenante, ne s'étonnant qu'à peine d'entendre la voix stridente de Birdie pour l'accueillir. Il entra dans la petite bâtisse qui avait tenu malgré les épreuves du temps, comme quoi il construisait toujours du solide, pour finalement s'asseoir juste à côté d'elle, ne commentant pas le surnom stupide qu'elle utilisait à nouveau. A croire que cela non plus, ce n'était pas parti avec l'épreuve du temps. Il tâcha de rester clair, de ne pas s'énerver tout de suite mais il avait un frisson qui lui parcourait l'échine, le Blythe, parce qu'il n'aimait pas du tout ce qu'il venait d'entendre. Mourir, vraiment? "Qu'est-ce que tu racontes? C'est pas toi de dire ça." Elle était censée être tout le temps joyeuse, la petite Cadburry, on parlait tout de même de sa voisine qui ne reculait devant rien, aucune bêtise, aucun mot fort. Et là, voilà qu'elle geignait sans qu'il ne comprenne vraiment pourquoi, c'était inquiétant aux yeux de Zeke. "Tu m'expliques?" Oui, parce que écouter, il savait faire, le grand brun, c'était même la compétence sociale qu'il avait développé au fil du temps, autant que ça serve maintenant. |
| | | | (#)Dim 29 Mar 2020 - 14:43 | |
| Birdie détache son regard du plafond nocturne pour le poser sur Zeke qui est venu s’asseoir de sa grande carrure si imposante à côté. Elle aurait la vision plus claire, elle pourrait noter qu’il n’aime toujours pas ce surnom. Qu’il est contrarié qu’elle l’ait perturbé à cette heure-ci. Qu’il n’est à l’aise sûrement dans ce genre de situation. Mais elle ne voit pas clair, Birdie, alors elle ne voit rien, elle entend juste.
Ses oreilles percutent la surprise d’Ezechiel face à ses mots et un rire vient de nouveau la prendre. Il n’a pas l’air de comprendre, ou alors il ne veut pas comprendre. Elle ne lui en veut pas, Birdie, parce qu’elle n’a jamais rien dit. Elle a toujours camouflé, elle a toujours voulu paraitre plus folle qu’elle ne l’est - non, ça, c’est impossible, elle l’est, naturellement, évidemment qu’elle l’est. Elle lève sa main pour compter ses doigts et, merde, « J’crois que j’ai un pouce siamois, Zeze. » Distraite alors que le grand brun attend une explication, une réponse, une raison sur sa présence ici. Ou peut-être sur son regard vitreux. Et son haleine alcoolisée. Et ses paroles incohérentes.
Mais Cadburry prend son courage sur deux bras pour redresser son buste. Elle fait face du mieux qu’elle peut à Ezechiel, le regardant une demi-seconde avant d’enfoncer son doigt dans son torse. « J’y suis allée voir le monde. J’y suis allée et le monde a pas été gentil. Alors j’ai pas pu être gentille non plus. » Birdie redresse ses pupilles bleutées sur le visage du jeune homme, embuées et fragiles. « J’aurai pas dû y aller. J’aurai dû rester ici. J’aurai pas dû t’écouter. Le monde est dégueulasse. Il pourrit, il tue, il blesse. Alors si, c’est moi qui dis ça parce que c’est comme ça qu’on m’a rendu. » Elle lève les bras, tragédienne dans l’âme et dans les gestes. « J’aurai préféré mourir ce jour-là. Plutôt que- » Mais elle a une expression de dégoût qui vient sur son visage, Birdie tremble, elle serre les poings et elle se renferme sur elle-même. « C’est trop dur de vivre parfois. »
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| | | | (#)Dim 29 Mar 2020 - 14:53 | |
| Il n'allait pas comprendre, évidemment que non, puisque Zeke n'avait pas bougé de sa ferme, qu'il n'avait rien accompli de plus en près de vingt ans, si ce n'était réussir à obtenir le mépris de son petit frère. On l'avait prévenu pourtant qu'il n'arriverait pas toujours à gérer son monde, même s'il était minuscule, qu'il essayait de le rendre toujours plus petit pour s'éviter des mauvaises surprises. Il n'était qu'humain, c'était là le fond du problème, là où le bât blessait à coup sûr parce qu'il ressentait tout autant qu les autres, si ce n'était plus encore. Ezechiel n'avait rien pu empêcher, pas ce qu'il avait tenté d'absoudre, pas ce qu'il avait terré vis à vis de Chloe, de sa famille, de Yele et maintenant, il était plus seul que jamais à rebâtir tant bien que mal quelque chose qui s'était brisé au fond de lui... Son coeur. Il n'était pas seul apparemment puisque Birdie ne faisait pas taire le moins du monde la détresse qui la tenaillait, même si elle s'était relevé avec difficulté, même si elle avait commenté son nombre de doigts parce qu'elle n'avait pas les idées claires, Blythe savait que le mal était bien plus profond que cela. Elle lui en voulait, il le sentit dans le doigt accusateur qu'elle enfonça dans son torse parce que c'était lui qui l'avait invitée à saisir sa chance dans l'univers. Seulement lui, et elle en avait souffert. Il ne savait pas quoi dire, pas comment le comprendre non plus alors il ne dit rien, captant qu'elle allait pleurer d'une minute à l'autre et qu'il ne savait pas nécessairement gérer le désespoir d'autrui non plus. Zeke ne savait rien faire, c'était là le plus dur à assumer, il n'était qu'un bon à rien qui savait seulement parler aux arbres, pas une compétence exceptionnelle à l'hure actuelle. Cela dit, il posa sa main délicatement autour du poignet de Cadburry pour l'apaiser, espérer l'atteindre autrement que par les mots parce qu'il était nul à ce petit jeu. "Qu'est-ce qu'il s'est passé, Bird'?" Ne jamais tourner autour du pot, la regarder droit dans les yeux et oublier les remontrances ainsi que les futilités qu'elle pouvait balancer pour noyer le poisson. Avec Zeke, c'était direct, toujours. |
| | | | (#)Dim 29 Mar 2020 - 15:34 | |
| Elle se sent nulle, Birdie. Elle se sent pitoyable à réagir comme ça. Elle devrait être plus forte. Elle est censée être plus forte. Elle a réussi à vivre avec pendant des années. Elle pensait avoir fait son deuil. Deuil de quoi, exactement ? Son innocence, sûrement. Elle est plus forte, oui, c’est ça. Mais là, elle est juste pitoyable. Birdie n’aime pas quand elle est comme ça. Elle a l’impression d’être une gamine. On lui a souvent dit, qu’elle en est encore une. Et pourtant, tout ça, personne ne voit à travers. C’est son talent à elle. Cadburry distrait toujours ailleurs, elle repousse sans qu’on le remarque dès qu’on s’approche un peu trop près de son territoire privé. Mais ça, c’est un secret qui pèse lourd. Il pèse tous les maux du monde depuis qu’elle a revu le regard bleuté de Joseph. Réaction violente d’un passé, d’un fantôme qu’elle pensait enterrée.
La cadette Cadburry s’est sûrement vouvoyée elle-même. A force de cacher et de laisser dans un coin, Birdie a fini par y croire. Que ce ne fut qu’une histoire passagère, qu’elle s’en remettra, qu’elle n’a pas besoin d’en parler. Toutes ses blessures les plus profondes, Birdie les garde au fond d’elle-même en pensant qu’ils finiront par disparaitre. Mais force de constater que ce n’est pas le cas. Elle voit toujours Olivia et maintenant, elle a revu Joseph. L’univers est certainement en train de lui faire un joli doigt d’honneur.
Birdie revient à la réalité quand Zeke attrape son poignet. Elle regarde ses doigts enroulés autour de sa peau et elle a presque le vertige. Ce n’est pas lui, c’est Zeze, respire.
« Qu'est-ce qu'il s'est passé, Bird'? » Cette dernière baisse les yeux tout en ôtant son poignet de son emprise. Trop de mauvais souvenirs, des marques qu’il ne peut pas voir mais qu’elle, elle sait. C’est encore là, incrustées sous sa peau. Mais la voix de Zeke est douce alors Birdie a honte. « J’aurai pas dû suivre Jo. Tu sais, je l’aimais bien, Jo. Il était gentil. J’avais toujours l’droit à des bons produits. » Elle se mord la joue intérieure alors que de l’eau a l’air de commencer à sortir de ses yeux. « Je pensais aller à une bonne soirée, tu vois. Je croyais que j’allais m’amuser. Mais je… La seule fille au milieu d’une bande de camés, à quoi j’pensais, sérieusement ? » Son cœur palpite, sa tension nerveuse s’emballe et la main qu’elle passe sur son visage est glacée, contrastant avec sa peau en feu de l’éthanol ingurgité. « J’pensais aussi que je m’en étais remise, que j’avais réussi à passer outre toute seule. » Birdie passe ses doigts sur ses yeux avant de les poser sur Zeke. « Mais je suis pas forte, Zeze. J’suis lâche, j’ai rien dit, à personne, jamais. »
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| | | | (#)Dim 29 Mar 2020 - 15:46 | |
| Elle lui faisait de la peine, forcément, parce que Birdie n'était pas le genre de filles à pleurer. Bien au contraire, elle utilisait l'humour et cette touche de folie pour faire passer son malheur, mais jamais elle ne s'extériorisait de la sorte. De la même manière, jamais elle ne l'avait repoussé, Zeke, sûrement parce qu'il n'essayait jamais vraiment de toucher les autres. Cette fois, il avait voulu faire un effort, lui faire penser qu'il état apte à consoler n'importe qui avec sa grande stature et ses manières d'ermite mais il échouait. Ce n'était pas une nouveauté pour sûr, il avait toujours été mauvais avec autrui mais là, c'était quelque chose qui le blessait bien plus que tout ce qu'il aurait pu imaginer. On avait fait du mal à Birdie, du moins ce Jo dont elle parlait lui avait fait du mal, même s'il ne savait pas comment, encore moins pourquoi. L'histoire était sidérante et Ezechiel tâchait de remettre dans l'ordre les mots qu'exposait Birdie mais rien ne semblait faire sens pour lui parce qu'il était encore bien trop innocent pour imaginer la petite Cadburry au milieu d'une soirée avec des junkies qui avaient envie de s'amuser. Est-ce que c'était bien ce à quoi il pensait? Blythe tenta de déglutir mais l'image était d'une violence extrême et lui était beaucoup trop gentil pour envisager ce genre de choses. Vraiment. Il la regarda pleurer, l'air abasourdi, ne sachant ni quoi faire ni quoi dire parce qu'il n'avait pas fait un master en psychologie, il ne savait qu'à peine lire... Pourquoi se fier à lui, vraiment? Birdie avait sûrement des dizaines de personnes dans son entourage qui auraient pu l'aider plus aisément que lui mais elle avait bu alors, la logique devait être différente. "Ils t'ont... Violée?" Rien que dire le mot le faisait frissonner, voire lui donnait la nausée et Zeke tenta de garder son regard vers Birdie mais il avait mal au coeur, très fortement. "C'était quand?" Il ne savait même pas depuis quand il ne l'avait pas vue, Birdie, et cela aurait pu être la veille qu'il se sentirait comme le pire voisin de la planète, malgré les années qui les avaient séparés. "Qu'est ce que je peux faire?" Il demandait parce qu'il n'était pas du genre à aller tuer des junkies, ni à se battre tout court. Pas très doué pour les câlins et les discours non plus, à quoi pouvait-il bien servir au final? |
| | | | (#)Mar 31 Mar 2020 - 0:32 | |
| Birdie ne veut pas le repousser, Zeke. Parce qu’il est gentil, il veut essayer de faire les choses bien, il n’est pas brutal. Il ne veut qu’aider les animaux, rester avec les animaux, prendre soin des animaux. Il est honorable, il sait où est sa place, il a réussi à donner une sorte de sens à sa vie malgré tout. Il a choisi son trajet et il y est resté, solide comme un chêne sur toutes ses grosses racines vigoureuses. Alors que Birdie, Birdie, elle, a fait tous les mauvais choix. Elle a voulu explorer, finalement, elle a voulu apprendre à voler et ce fut amusant et distrayant au début. Puis on lui a coupé les ailes. Non, on les lui a arrachées.
Brutalement, sans aucune cérémonie. Cadburry a été dépouillée de ce qui lui restait d’innocence, l’épreuve la rendant plus crue, plus dure, plus réaliste sur le monde qui les entoure. Elle a enterré tout tellement fort et tellement bien que maintenant que ça revient, c’est une explosion qui lui déforme le visage. Un visage si joyeux d’habitude, ou hautain ou encore amusé mais là, il est détruit par les larmes, par la hantise. L’alcool n’arrange rien, la tête tangue et elle est maintenant persuadée qu’il y a deux et demi d’Ezechiel de présent. Autant d’Ezechiel tant qu’il n’y a plus de Jo. Plus de Jo, pas maintenant.
« Ils t'ont... Violée? » Violée ? Elle redresse le torse, le regard fixe devant elle. Violée. Puis son regard se pose sur Zeke. « Il m’a violé. »
Le mot est violent. Mais presque libérateur. Elle l’affirme, elle le confirme. « Non non non, pas ils. Juste un. » Mais un, c’est déjà un de trop. Un, c’est beaucoup, Birdie, mais est-ce qu’elle devrait être soulagée que ce ne fut pas des ‘‘ils’’ du coup ? Peut-être qu’elle devrait être redevable. La blonde sent quand même la pression sur sa poitrine qui s’accentue alors que Blythe lui demande quand et ce qu’il peut faire.
« Trop longtemps, Zeze, trop longtemps. C’est presqu’y a une éternité. Du genre très loin. Tellement loin que ça doit plus vraiment exister en faites, si ? » Si elle ne s’en rappelle presque plus, c’est que ça a été effacé, peut-être. Mais à qui elle ment, évidemment qu’elle s’en rappelle. Elle n’a pas été assez stone pour oublier ce moment-là.
Birdie s’approche de Zeke et se met en face de lui sur ses genoux. Ses mains se portent sur son visage, ses doigts dans ses cheveux et le regardant dans les yeux du mieux qu’elle peut s’en s’écrouler. « Ce que tu peux faire, c’est continuer à être gentil, Zeze. Continuer à croire que les gens sont bons. Mais moi, je sais qu’ils le sont pas. Je suis pas une bonne personne non plus, tu sais. Mais toi, toi t’es ignorant et c’est bien. Faut pas que tu changes, Zeze. Faut pas que tu fasses comme moi. Tu peux rester avec tes animaux, le monde en vaut pas la peine. » Son discours n’est pas cohérent et elle le finit sa tête sur son épaule, comme épuisée, alors que les tremblements de ses larmes reprennent de plus belle. « Veux juste dormir et jamais revenir. » L’unique solution face à la douleur, certainement. La seule issue possible pour une personne comme Birdie qui n’affronte pas les problèmes.
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| | | | (#)Mar 31 Mar 2020 - 1:20 | |
| Est-ce que c'était censé le rassurer qu'elle lui assure qu'il n'y avait eu qu'un type? Pour Zeke, c'était déjà un de trop et il n'arrivait pas à comprendre. Comment quelque chose d'aussi tragique lui était arrivé, au petit oiseau? Elle n'avait jamais mérité de se faire autant maltraiter, elle qui était tout le temps si joyeuse et qui prenait le temps de faire la conversation à n'importe qui, la première personne qui croisait. C'était peut être ce qui l'avait entraînée dans autant de souffrances justement, qu'elle n'ait pas pu se défendre parce qu'elle était trop avenante avec les autres. Au final, c'était Blythe qui restait là sans bouger, à s'en vouloir pour une conversation qui avait eu lieu il y avait au moins cent ans, en années Zeke comme il appelait cela. Le temps défilait différemment avec lui mais il s'en rappelait très bien néanmoins, de l'avoir forcée à sortir de sa coquille, d'aller voir si l'herbe était plus verte ailleurs, si elle pouvait trouver sa place dans le monde plutôt que dans le coin d'une ferme qui n'avait que des animaux et des souvenirs d'enfance. Au fond, qu'est-ce qu'il en savait, Ezechiel? Rien, absolument rien et il l'avait envoyée dans la gueule du loup. Il en avait mal au coeur. Il ne savait même plus quoi dire, encore moins comment réagir. On l'avait violée. Un homme. C'aurait pu en être plus, évidemment, mais le problème, c'était que cette société laissait faire. Que des gens puissent s'autoriser être suffisamment puissants pour prendre ce qu'il désirait malgré la désapprobation de la personne et face et ça le dégoûtait, le fermier, il n'allait pas en dormir de la nuit. Encore plus que d'habitude, ce qui n'était déjà pas fameux en temps normal. Il allait être malheureux durant des jours d'avoir appris la nouvelle, si c'était aussi possible de l'être plus encore après sa dispute avec Yele et Chloe. "Mais ça existera toujours." Peu importe le temps qui passait depuis l'événement, même si Birdie essayait de minimiser l'importance de ce qui lui était arrivé. Zeke ne pouvait pas le faire, pas quand il la voyait s'approcher de lui, sentir ses mains sur sa joue et dans ses cheveux, le moulin à paroles étant de retour. Elle avait mal, elle pleurait et elle s'effondrait contre son épaule, les bras maladroits d'un homme qui ne savaient pas maîtriser l'art de la communication l'entourant délicatement. Si elle voulait pleurer, cela au moins, il pouvait le recevoir, à défaut de pouvoir la sauver d'autre chose. "Chut, dis pas ça. C'est faux." Il n'aimait pas cela, vraiment pas. "Être gentil, c'est pas mieux non plus." Clairement pas vu la souffrance qu'un tel trait de caractère engendrait. "Et ça va pas t'aider là par dessus le marché." Il ne pourrait pas détruire la personne qui avait osé la blesser et même pour cela, Zeke s'en voudrait, autant que pour tout le reste, son incapacité à être l'homme de la situation. |
| | | | (#)Mar 31 Mar 2020 - 3:10 | |
| « Mais ça existera toujours. » Même si elle ferme les yeux ? Même si elle croise une étoile filante ? Même si elle jette une pièce dans une fontaine en priant très fort ? Il est sûr et certain, Zeke, qu’on ne peut pas la faire faire partir ? Cette parenthèse aussi brutale que brûlante que destructrice ? A trop vouloir garder tout pour soi, voilà le résultat. Une gamine complètement perdue, paumée dans une cabane qui n’a pas grandi alors qu’elle, elle a totalement changé. Birdie est comme les coussins et les voiles qu’elle a mis avec soin il y des dizaines d’années ; plus fanée, moins colorée, plus détruite par le monde et ses aléas. Il y a une poésie terriblement mélancolique, un sonnet absolument morbide mais pourtant, c’est d’une beauté flagrante et douloureuse. Birdie qui ne se laisse jamais aller comme ça. Elle qui ne montre jamais vraiment ses failles, qui se cache derrière ses excès en tout genre, ses folies, ses vêtements retapés avec amour, ses fantaisies. Elle a une multitude de choses avec lesquelles elle peut se camoufler, se protéger, disparaitre derrière.
Mais ce soir, la peine est trop lourde pour ses frêles épaules. Les apparences ne suffisent pas, et son dos est courbé, sûrement prêt à recevoir la sentence. Pourtant, elle l’a déjà eu. Dans ses entrailles d’abord puis dans sa confiance. En elle-même mais surtout envers l’humain. Birdie a ouvert des yeux tout pétillants, tout majestueux sur le monde et on lui a tout pris. En dix minutes. Exactement le même temps qu’elle a pris avant de s’effondrer sur Ezechiel, le solide, le roc.
Elle qui ne montre jamais ses failles, la voilà complètement à la merci du grand brun. Aux emprises de ses propres émotions, d’un flux constant dans ses poumons, dans son cerveau, dans ses veines, et elle ne gère pas ce genre de choses, normalement. Birdie reste les bras balans, le visage enfoncé dans l’épaule de Blythe alors que ce dernier lui répond doucement. Elle renifle, elle tremble, elle se déteste. « J’ai été trop gentille, on a abusé d’ma confiance. Je sais que ça aide pas. Mais j’suis pourrie de l’intérieur, maintenant. J’ai toujours trop gêné, t’façon. Et j’ai toujours voulu apprendre à voler. Y a plus rien à en tirer. » Cadburry finit par passer un bras autour de lui pour avoir un appui alors qu’elle relève la tête vers la sienne. « P’t’être que je l’avais cherché aussi. P’t’être que j’ai vraiment l’air d’une salope. » Trop court, trop attirant, trop tape à l’œil. Et une fille dans un gang de mecs, sérieusement. Il ne fallait pas avoir fait des études pour savoir comment ça se finirait.
Croire en l’humanité est un bien beau gâchis.
« T’es le seul à savoir. Tu garderas le secret, Zeze, hein, pas vrai ? » Elle parle à voix basse, proche de ce qu’elle pense être sa mâchoire. « Ça sera entre nous, pour toujours. » Parce que Birdie a réussi à maintenir le secret pendant des dizaines d’années, il ne s’agit là que d’un moment d’égarement. Ou de sa dernière confession avant le signal final. A ce stade, la jolie blonde n’est plus très sûre de rien.
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| | | | (#)Mar 31 Mar 2020 - 14:54 | |
| Il ne se sentait pas du tout à la hauteur d'une telle révélation, Zeke aurait probablement dû lire un opus de la psychologie pour les nuls, histoire de savoir quoi dire à une personne qui vous annonçait de but en blanc qu'elle avait été violée. C'était si dur à entendre, si dur à gérer, lui qui vivait dans un monde de bisounours avec des centaines d'animaux autour de lui et par dessus le marché, Blythe n'avait pas de soeur alors il avait du mal à s'imaginer que ce monde pouvait être un prédateur pour une personne comme Birdie. Il l'avait poussée à voler de ses propres ailes justement, faire ses choix et ne pas regretter ses échecs mais il ne s'était pas figuré que l'atterrissage pouvait être aussi violent pour leur innocence, à tous les deux. Zeke tentait de remettre ses idées en place, de faire en sorte que son cerveau fonctionne de nouveau dans le bon sens, facile à dire mais beaucoup moins à faire parce qu'il avait du mal à réaliser. Il la tenait simplement entre ses bras, essayant d'enregistrer son discours mais les mots paraissaient si peu importants à ce moment là. Voilà pourquoi il n'avait jamais aimé parler en réalité: aucun mot n'était à la hauteur d'une pensée ou d'un voeu profond et peu importe ce qui était dit, il y avait nécessairement une déception à l'arrivée. Il n'aimait rien de tout cela, le grand brun, pas ce qu'il entendait, pas ce qu'il n'arrivait pas à communiquer parce qu'au fond, il ne comprenait pas vraiment pourquoi elle se confiait à lui... L'homme le moins apte à gérer le poids d'un tel fardeau sur ses épaules qui paraissaient si fortes en apparence mais il n'avait pas assez vécu, Zeke, pas assez vu. "C'est pas ta faute. C'est lui le coupable. T'as rien fait de mal." Non, elle avait juste voulu vivre et on l'avait coupée en plein milieu de cet envol qui paraissait majestueux vu de l'extérieur. Dans tous les cas, Ezechiel avait mal au coeur, non, il en avait même la nausée en hochant simplement la tête. "J'aurais pu le dire qu'aux oiseaux, t'façon." Et tout cela, les oiseaux ne s'y intéressaient pas. "Faut que tu t'reposes. Je reste là, si tu veux." A ne pas dormir, juste à penser, à attendre aussi que le ciel lui tombe sur la tête alors que Zeke se détachait d'elle pour essuyer quelques larmes qui coulaient encore le long de ses joues. Même sourire lui devenait trop difficile dans de telles circonstances. |
| | | | (#)Mar 31 Mar 2020 - 23:29 | |
| C'est pas ta faute. C'est lui le coupable. T'as rien fait de mal.
Elle essaie de se les incruster, ces paroles. Il faudrait qu’elle songe à les écrire, comme un mantra, sur sa peau, dans ses veines, sur les parois de son crâne en feu, de son esprit bousillé. Elle peut aussi les marquer les murs, sur les meubles, dans la cabane, sur les arbres, sur le bitume. Peut-être qu’à force, elle pourrait y croire, Birdie, qu’elle n’est pas la coupable mais la victime. Elle le sait déjà, juridiquement, logiquement, ça a du sens. Mais son intérieur lui dit l’inverse et son intérieur lui répète à quel point elle se déteste. Parce que son intérieur n’a jamais fait son deuil, il n’a pas réussi à guérir sainement, non. Il s’est foutu en l’air, il a vrillé parce qu’elle a fait des mauvais choix, accumuler les mauvaises actions et elle a laissé l’obscurité envahir son âme. Maintenant, il n’y a qu’une odeur pourrie de lsd dans son cerveau certainement, des mondes imaginaires qu’elle s’invente pour oublier celui dans lequel elle grandit. Un monde qu’elle frôle de ses pieds nus, que sa voûte plantaire a marqué de sa trace et que pourtant, elle ne retrouve nulle part, jamais. Birdie doit sûrement tourner en rond, à force, elle doit certainement se perdre même si sa direction est quelque part toujours là. Tout est effacé, rien ne reste, rien ne perdure.
Alors pourquoi elle a toujours mal ? Pourquoi ça, ça ne s’efface pas ?
La blonde secoue la tête, perdue dans les bras du grand brun, complètement dépassée pour voir à quel point ce n’est pas anodin ce qu’elle vient de dire. Qu’Ezechiel n’est sûrement pas armé pour ce genre de révélation - que personne ne l’est vraiment. Mais penser à le dire à sa famille, ça la fait se recroqueviller plus, ses larmes ne s’arrêtant jamais et, ça la frustre, énormément, cruellement. « Les oiseaux, ils auraient pu en faire une chanson, p’t’être. » Birdie n’a pas réfléchi, elle n’avait pas pensé où elle atterrirait. Elle est juste là et Zeke, le pauvre Zeke qui n’a rien demandé à personne, c’est lui qui récupère l’objet cassé et brisé qu’elle est actuellement. Décidément, la cruauté de ce monde est sans limite. Cadburry renifle une nouvelle fois alors qu’il se détache d’elle et s’entache à lui ôter les cadavres des anciennes larmes sur les joues - mais les nouvelles suivent malgré elle. Elle secoue la tête avec empressement, ses doigts se crispant autour de son bras. « Veux pas qu’tu partes. » Birdie lève ses yeux vers Ezechiel, la lèvre tremblotante et le regard suppliant. « Dormir me fait peur. C’était y a longtemps. Je pensais que j’avais surmonté ça. J’avais plus de cauchemars. Mais ça va revenir, Zeze, tout va revenir, ça va me hanter, tout le temps, comme un prédateur tapis dans l’ombre qui attend de sauter dessus. Je sais pas comment faire et je… Désolée, Zeke, désolée, t’as pas à subir ça, personne ne devrait subir ça, j’aurai dû faire comme la première fois, apprendre à gérer toute seule mais j’y arrive pas, j’y arrive plus. » Elle n’a jamais rien géré de sa vie. Elle est juste bonne à se balancer au gré du vent et se laisser porter en espérant le meilleur mais récoltant souvent le pire. La pire histoire que le monde puisse porter.
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| | | | (#)Mer 1 Avr 2020 - 1:04 | |
| Il allait falloir qu'il retrouve le luxe de respirer parce qu'il n'était pas vraiment à l'aise à l'heure actuelle, Zeke, même s'il faisait au mieux pour paraître l'être parfaitement. En réalité, le fermier n'avait jamais connu une telle situation, certainement parce qu'il n'était pas du genre à avoir mille amis qui vivaient des aventures incroyables et dangereuses à la fois. Lui, il n'avait que ses moutons et ses oiseaux, ce qui limitait légèrement le spectroscope des possibilités de voir quelque chose d'aussi terrible arriver. Il n'allait pas abandonner Birdie dans cet état: connaissant Zeke, il n'aurait même pas pu abandonner le pire enfoiré de cette planète dans cet état mais il manquait cruellement de ressources pour la sauver d'elle-même. Il devait bien y avoir un manuel quelque part mais Blythe se rappelait tout de suite qu'il ne savait même pas déchiffrer deux syllabes d'affilée, la honte assurée. Le pauvre avait beau se triturer la cervelle de toutes les manières possibles, à part sécher les larmes de la blonde au fur et à mesure qu'elles roulaient sur ses joues, il n'avait pas grande solution. Rien qui pourrait lui apporter la paix intérieure, en tout cas. Les mots de Cadburry lui déchiraient le coeur toujours un peu plus: comment avait-elle pu sombrer à ce point? Et surtout, comment personne n'avait rien vu? Pour Zeke, c'était simple, il ne l'avait pas vue depuis un bail mais sa famille? Ses amis? Mille questions se posaient à l'intérieur de sa boîte crânienne et le grand brun n'était pas à même de toutes les poser, encore moins en même temps. Il n'était doué pour rien de ce genre, juste pour rire en voyant des pâquerettes pousser et pleurer en les voyant faner, le reste sortait de sa zone de compétences. Vraiment. "Là, Bird', tu parles beaucoup trop. Laisse toi vivre. Ferme tes neurones." Il posa sa main délicatement sur sa bouche pour qu'elle arrête d'osciller entre mille excuses et mille idées de suicide. A la place, il l'invita à s'allonger au sol, lui en faisant de même en se tournant vers elle totalement. Au moins il avait des techniques d'insomniaque à lui proposer, comme quoi il n'était pas totalement un fardeau pour cette société. "Imagine que t'es un oiseau. Tu voles dans le ciel. Tu sens le vent. T'entends tes congénères qui chantent. Ferme les yeux et laisse toi aller à monter tout en haut de la montagne que tu vois au loin là. T'as pas le droit de rouvrir les yeux avant d'être arrivée." Première fois de sa vie qu'il enchaînait autant de mots et Zeke avait la gorge sèche en la regardant, espérant que l'idée fonctionnerait un minimum pour apaiser sa peine immense. |
| | | | (#)Mer 1 Avr 2020 - 17:59 | |
| Zeke y met du sien alors que Birdie est une épave. Il a l’air de vouloir trouver les mots justes pour qu’elle se calme, ou au moins qu’elle arrête de délirer de la sorte. Il faut dire qu’elle parle trop, encore plus si cela est possible, elle pourrait même se taper la tête contre le bois si elle en avait la force pour s’arrêter. De parler, de réfléchir, de s’exprimer, de plomber le calme. Elle perturbe Ezechiel dans son quotidien, elle vient lui ruiner sa soirée alors qu’il n’a rien demandé à personne et, comment ça se fait que ça tombe sur lui ? Elle n’en sait rien, Cadburry, c’est sûrement la gamine en elle qui a juste voulu retrouver les pas de son quartier d’enfance, là où elle se sent bien, en sécurité, comme elle l’a toujours dit. On n’a jamais voulu la croire, peut-être que même elle avait fini par se dire qu’elle trouvera mieux ailleurs. Mais non, elle réalise qu’ailleurs n’est pas mieux, c’est toujours pire. Et quand on croit que ça ne l’est pas, ça le sera forcément encore plus la fois d’après. C’est injuste mais c’est comme ça que le monde fonctionne. Le grand brun lui parle de fermer ses neurones, « je sais pas faire ». Qu’elle parle beaucoup, « j’parle pour deux ». Qu’elle doit se laisse vivre, « c’est c’que j’fais déjà » et on voit le résultat.
Il l’interrompe, il veut vraiment bloquer sa voix parce qu’il met sa main sur sa bouche et Birdie sent que c’est important. Presque religieux. Cela n’enlèvera pas les pensées de sa tête mais ça peut les soustraire pour un moment. Il s’allonge et il l’invite à faire la même. Elle fait la moue parce qu’elle ne veut pas être forcée à dormir. Mais Cadburry se soumet quand même parce qu’elle est faible, elle est alcoolisée, le cœur qui tangue, la tête aussi et que de toute façon, elle n’a rien d’autres à faire pour l’instant. Elle a demandé à Ezechiel de rester alors elle restera là où il sera, cela a du sens. « L’histoire de l’ois- » Elle s’interrompt parce qu’il parle, tout d’un coup. Il parle, il enchaine plein de mots d’affilés et rien que pour ça, ça mérite qu’elle se taise. Pour une fois, les rôles s’inversent et ses grands yeux bleus restent bloqué sur l’apparence du jeune homme, en même temps que sur ses mots. Ils en avaient parlé. Qu’elle aurait aimé savoir voler.
Birdie cherche sa main qu’elle serre entre ses doigts avant de fermer docilement les yeux. Les paupières frémissent en même temps que ses phalanges se crispent autour de la main de Zeke mais elle tente d’imaginer malgré son esprit en vrac et son estomac noué. « Et s’il fait trop froid, en haut d’la montagne ? Et si un prédateur arrive et il me mange, je fais quoi ? » Elle n’ouvre pas les yeux parce qu’elle n’est pas arrivée. Ses larmes se sont apaisées mais il y en a toujours qui coulent, qui roulent sur les côtés parce qu’elle a peur, peur de se faire avaler, peur de ne pas voir le danger, peur de mourir sans être prête. « C’est souvent quand ça parait beau que c’est le plus moche. » Birdie déglutit mais elle essaie quand même en reprenant sa respiration. Essayer, au moins pour ce soir, au moins pour maintenant, à se sentir mieux.
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| | | | | | | | ZEKE&BIRDIE • you will continue to bleed |
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