Jill a reçu un message de Matt, il voulait la voir de toute urgence au DBD, et elle n’a pas réfléchi. Elle a pris sa voiture et elle est allée jusqu’au bar de son frère pour l’aider. Ca c’est arrangé un peu entre les deux depuis leur dernière discussion, même si tout n’est pas encore aux beaux fixes. Son frère est le dernier de ses soucis. Là, elle a juste besoin d’oublier, ça fait des semaines qu’elle a vu Ginny pour la dernière fois. L’image du visage de sa soeur quand elle est sortie de son atelier, ce visage triste et fatigué. Elle ne peut pas l’oublier, parce que c’est tout ce qu’elle a vu pendant de longues minutes. Parce que c’est ce qui l’a fait vriller. Parce qu’elle sait que seul Auden est capable de la mettre dans un état pareil. 


Elle avait promis de la protéger, de faire attention à elle pour que personne ne lui fasse du mal. Et c’est ce qu’elle a voulu faire quand elle a hurler sur Auden. Elle a voulu protéger Lola qui était sortie de l’atelier en pleurant, protéger Ginny qui semblait être au bord de l’implosion, au bord du malaise. Comme si elle avait besoin de craquer. Mais elle s’est trompée apparemment, comme elle se trompe toujours quand il s’agit de sa soeur à en croire ses dires. Elle aura essayé pe. Mais elle n'a plus la force de toujours tout faire pour Ginny ou pour Matt. Elle a voulu changer, elle a voulu faire un pas vers sa sœur mais Ginny l'a violemment repoussé, comme si tout ce qu'elles avaient reconstruit à deux ne comptait pour rien quand on rajoutait Auden à l'équation. Elle le choisirait toujours lui, alors que Jill a fait passer sa sœur au premier plan pendant des semaines, des mois. C'était certainement son erreur, elle n'aurait pas dû s'habituer à cette relation, c'était de la poudre aux yeux, on ne peut pas réparer tant d'années à se détruire en seulement quelques mois. Et surtout pas quand l'homme qui partage la vie de Ginny est un homme qui préférerait vivre dans un monde sans Jill. Il avait ce qu'il voulait. Jill n'avait pas recontacté Ginny, elle n'avait pas échangé un seul mot ou un seul texto. Elle avait vu Noah seulement quand Bailey avait géré la situation. Et les McGrath se déchiraient. Elle avait promis, elle tiendrait sa promesse. Elle ne ferait plus de mal à Ginny, et Ginny ne ferait plus de mal à Jill. C'était trop, ça avait été la fois de trop. 


Elle arrive au DBD, mais personne n'est à l'intérieur alors que la porte est ouverte. "Matt ?" Elle le cherche partout, mais pas de trace de l'aîné. Elle s'apprêtait à essayer de monter dans son appartement quand la porte claque. "Tu me demandes de venir et t'es même pas…." Oh non. Pas ça. Pas elle. Elle n'aurait pas dû dire à Matt qu'elle ne pouvait plus voir sa sœur, elle aurait dû faire comme si de rien était. "Je m'en vais." Matt est devant la porte d'entrée et il ferme à clé. Adam et Matt les ont enfermé dans le bar. Elle va les tuer, c'est obligé. "Non non non je resterai pas là" ça fait trop mal au cœur de la voir, de réentendre ses mots, de revoir son visage. 

C'est pas drôle. C'est pas drôle et c'est risqué, tellement risqué. Parce que Matt sait qu'il joue quitte ou double là. Il sait que c'est soit fichu, soit qu'il réussira à recoller si quelques morceaux que ce soit le veulent, de l'être. Recollés.

J'aurais jamais pensé qu'on en arriverait là. J'aurais jamais pensé que d'un sens ou de l'autre ma relation avec Jill changerait. Je sais qu'on a eu de très hauts hauts, de très bas bas. Je sais qu'on a navigué en eaux troubles pendant toutes nos vies communes, je sais aussi qu'à mes yeux, c'était ça, avant, notre équilibre. De jamais arriver à savoir sur quel pied danser, de toujours tanguer, voguer à contre-courant. On s'est aimées, fort, vraiment fort à un moment. Au point où j'étais prête à tout oublier, à tout pardonner, à tout accepter simplement pour garder ce lien-là aussi beau, aussi doux que maintenant. Et on s'est détestées, vraiment, terriblement. Elle m'a brisé le coeur et j'ai brisé le sien, au point où j'ai complètement nié, annihilé tous souvenirs de la dernière fois où on s'est vues, parlées.

Et pourtant elle est là, devant moi. Et pourtant c'est comme si on était revenues en arrière, aller simple, vitesse express. "Je m'en vais." le verrou que Matt tire sur la porte en extérieur résonne, oh l'ironie. "Non non non je resterai pas là" je vois la silhouette de mon frère suivie de celle d'Adam. Ils passent devant la vitrine, ils quittent vers le parc, la plage sûrement.

« Il a préparé du thé. » la seule chose, le seul élément qui à mes yeux trahit nos vraies racines, quand chacun d'entre nous est depuis longtemps bien plus australiens qu'anglais. Ma silhouette se lève du tabouret au bar où j'étais installée, passe sous le comptoir pour attraper deux tasses, celle de Jill que je laisse de côté, remplissant la mienne en premier. Elle a dit qu'elle voulait partir, elle le peut si vraiment elle le veut. Y'aura toujours une fenêtre à éclater, toujours une serrure à crocheter. Mon silence le lui confirme, quand ma main ne lâche pas la théière, celle en suspens, véritable épée de Damocles, prête à la servir ou à assumer son désir de partir.

Pourquoi elle est venue ? Elle aurait dû se douter de quelque chose. Il sait toujours quand elles sont en froid Matt, et ça a toujours été son but de garder la fratrie soudée. Coûte que coûte. Et elle se retrouve à essayer d'ouvrir la porte alors qu'elle maudit intérieurement les deux hommes qui sont en train de s'éloigner du café. Elles en ont pour des heures à rester enfermées ici. Elle pourrait partir Jill, en détruisant la moitié du bar juste pour faire rager son frère. Elle regarde à l'extérieur. Elle ne sait pas comment va Ginny, et ça la ramène trop longtemps en arrière. Elles avaient tant avancé pourtant, elles étaient sur une bonne lancée avant de tout détruire devant cet atelier. Elle secoue la tête avant de poser son dos sur la porte et regarder sa sœur qui est encore dos à elle. 


Qu'est-ce qu'elle fait ? Parce qu'elle a plusieurs options. Elle peut rester en silence pendant le temps qu'il faudra, elle peut crocheter la serrure et s'enfuir loin, ou elle peut faire face à sa sœur et demander des explications, ou juste rompre le silence pesant dans le café. Et c'est Ginny qui parle la première. "Je rêve de café." mais elle n'a pas le droit d'en boire et Matt et Bailey la surveillent de près pour qu'elle ne déroge pas à la règle. Elle peut se passer de tout, mais le café, ça fait partie de son ADN. "J'espère au moins qu'il a des chips dans la réserve." oh il va regretter d'avoir laissé Jill seule avec la réserve de nourriture pendant des heures. "Il t'a dit quoi pour que tu viennes ?" et ça c'est un effort considérable, parce qu'elle a choisi la dernière option, parce qu'elle n'a pas décidé de s'enfermer dans la réserve pour tout manger seule. Parce qu'elle se rapproche de la tasse vide que Ginny a sorti pour la servir elle aussi. 

Je le vois son regard, qui dérive vers la porte. Je ne dis rien, absolument rien. Elle a le droit de partir, elle devrait partir, sûrement. Ainsi au moins on serait assurées que rien ne pourrait être détruit plus fort et encore plus mal entre nous. Ainsi on se préserverait surtout.

"Je rêve de café." qu'elle souffle.
Moi aussi, tellement, le plus fort possible. que j'aurais renchéri, sur une note soulagée, si j'avais pu. Un maigre sourire se dessine sur mes lèvres, le secret qui doit encore être gardé pour un long mois, la tasse que je lui verse dans un silence qui est un peu, un tout petit peu plus rassurant que nos silences habituellement.

On prend ce qu'on peut, elle et moi, au mieux. "J'espère au moins qu'il a des chips dans la réserve." ma silhouette se décale, ma camomille entre mes paumes après avoir doucement glissé la sienne, servie sous ses yeux. Elle verra que j'engage un mouvement vers la dite réserve et lorsque j'actionne l'interrupteur et ouvre la lumière de l'annexe, c'est autant pour elle que pour moi que je cherche un (ou cent) paquet de chips sur les différentes étagères. "Il t'a dit quoi pour que tu viennes ?" « Il a utilisé la carte Adam. » que je pouffe, distraite, mes mots volant vers elle mais mes prunelles qui finissent par repérer la tablette où toutes les recharges de snacks et énièmes collations se trouvent. Croustilles, noix, craquelins, c'est le paradis du salé et c'est parfait.

« Apparemment il avait besoin que je regarde son dernier film pour lui dire quels cadrages pouvaient être cool à transformer en photographies. Les fourbes, ils se débrouilleront seuls la prochaine fois. » mes épaules que je hausse, faussement désabusée. Jill sait aussi bien que moi qu'à la seconde où Adam me redemande de lui-même j'accepterai sans la moindre rancune. Pourquoi c'est pas facile comme ça, avec elle, aussi? « Toi? »

La tasse pleine de tisane glisse devant Jill. Parce que oui elle va rester, elles auraient tellement de choses à se dire si elles n'étaient pas autant en froid. C'était déjà arrivé qu'elles se détestent aussi longtemps, mais maintenant, c'est plus pareil. Elles avaient avancé, mais elles ont fait 10 pas en arrière pour 1 en-avant. Jill ne sait pas vraiment de quoi elle est censée parler, est ce qu'elles vont devoir reparler de l'autre fois. Jill a tout fait pour oublier ce moment, elle l'a laissé au fond de sa mémoire à partir du moment où elle a dit qu'elle ne voulait plus de tout ça. Alors elle cherche d'abord de quoi manger, il y a toujours une réserve pour tenir des mois en cas de siège dans cette réserve. Alors elle suit sa sœur. Elles le connaissent bien ce chemin. 


La carte Adam, ça ne l'étonne pas. Ils se sont rapprochés à une vitesse fulgurante les deux hommes. Et Adam fait partie intégrante des pièces rapportées de la famille McGrath désormais. Elle sourit légèrement Jill. Elle sait que Ginny finira toujours par vouloir aider Adam, même si il se met à l'appeler au beau milieu de la nuit. Mais elle ne fait pas de commentaire, elles n'en sont pas là encore. Il y a du chemin à faire avant que la conversation soit fluide. "Matt m'a dit qu'il y avait une urgence pour ce soir, donc je suis venue." sans poser de questions, comme toujours. L'ambiance est pesante, le silence est trop long. Elle soupire Jill, elle regarde sa sœur fouiller dans les placards comme si de rien n'était. Mais elle ne peut pas faire semblant, elle ne peut pas passer des heures à faire comme si Ginny ne l'avait pas brisé devant l'atelier. Les souvenirs reviennent et c'est de plus en plus dur à supporter. "J'ai pas compris ce qu'il s'est passé." elle parle doucement, elle ne sait même pas si c'est audible. Elle n'est pas du genre à vouloir régler les problèmes, mais là c'est différent. Elle évite le regard de Ginny mais attrape un paquet de chips et essaie à plusieurs reprises de s'asseoir sur une table. Ce ventre aura sa peau. Mais elle arrive à se caler sur cette table et relever un peu les yeux vers Ginny. 

"Matt m'a dit qu'il y avait une urgence pour ce soir, donc je suis venue." il n'a même pas fait d'effort Matt, au final. Il n'a pas fait d'effort parce que probablement qu'il savait qu'autant Jill que moi on finirait par céder. Sans rien dire, sans rien assumer, mais qu'on savait, qu'on espérait qu'il ferait encore et toujours ce qu'il sait faire de mieux. Certains diraient qu'il se mêle (encore) de ce qui ne le regarde pas, d'autres diraient qu'il était éternellement occupé à tenter de recoller les morceaux de sa famille brisée.

L'important, c'est que ça a fonctionné. Jill n'est pas partie, je ne me suis pas braquée. Elle parle et moi aussi, on prend le temps de boire une lampée et une autre d'un thé qu'on déteste en commun sans se trouver d'autres points à partager pour l'instant. Ça viendra, j'imagine. "J'ai pas compris ce qu'il s'est passé."

Le paquet de croustilles craque sous ses doigts. Elle a parlé tout bas, mais j'ai tout entendu, évidemment. « Il s'est passé beaucoup de choses, trop. » ma main se faufile par mille miracles dans le sachet qu'elle tient comme le Graal, attrape une poignée de chips avant que je ne multiplie les quelques pas qui me séparaient d'un des rebords de comptoir sur lequel je grimpe la seconde d'après. Mes jambes se ramènent en tailleur, j'inspire doucement, aussi doucement qu'elle s'est adressée à moi. « Et on en a dit beaucoup, aussi. » trop. Beaucoup de choses, beaucoup de mauvais, beaucoup de colère, beaucoup de peine aussi.

« J'aurais aimé que tu me demandes à moi. Pas que tu l'accuses, lui. » j'ai pris le temps de bien mâcher mes mots, à défaut de manger les chips qui restent sagement blotties au creux de ma paume. Mes prunelles elles, ont finalement retrouvé celles de ma soeur. J'évite soigneusement de laisser mon coup d'oeil descendre de son visage à son ventre, les trop nombreuses semaines qui sont passées rendant sa grossesse encore plus réelle - et toute la distance mise entre nous depuis.

Matt et Adam ont bien fait leur compte. C’est terrifiant de voir à quel point ils les connaisse bien. Même Adam qui ne les connait pas depuis si longtemps que ça est dans le coup. Et Jill aura l’occasion de rager contre son frère à l’instant même où il viendra de nouveau ouvrir la porte du café. Et, contre toute attente, elles se parlent. Des sujets sans conséquences, des questions inutiles, mais elles arrivent à aligner quelques mots sans avoir envie de se sauter dessus ou se lancer des horreurs à la figure. Jill respire, elle essaie d’éviter les yeux de sa soeur. La dernière fois qu’elle les a croisé, elles choisissaient de sortir de la vie de l’une et de l’autre. Et c’est ce qu’elles ont fait pendant plus d’un mois. C’est ce qu’elles auraient continué de faire si Matt ne les forçait pas à communiquer.

Et c’est peut-être Jill la plus perdue dans cette histoire. Celle qui n’a vraiment rien compris, qui a tout entendu et qui n’a pourtant pas été capable d’être à la hauteur de quoi que ce soit alors qu’elle ne voulait que le bien de tout le monde cette fois. Alors elle dit qu’elle n’a pas compris, et qu’elle a eu beau tout retourner dans sa tête elle n’arrive pas à voir à quel moment elles ont merdé à ce point là. Ca devait être une belle journée, ça devait être la rencontre de Grace et l’annonce des jumeaux pour Lola, et à la place ça a été l’apocalypse pour absolument tout le monde.

Les mots lui brisent le coeur. Elles en ont trop dit, elles ont été bien trop violente et au moins elles sont d’accord sur ce point. Elle parle encore Ginny et Jill capte son regard. Elles vont devoir discuter, et c’est maintenant ou jamais. Soit ça passe, soit tout se casse définitivement. Et Jill n’a pas vraiment envie que tout se brise comme ça l’était déjà pendant des années. “ça devait pas se passer comme ça.” Jill fronce les sourcils quand elle évoque des souvenirs encore bien trop douloureux. Elle n’oubliera pas, ni le visage de Ginny quand elle est sortie de son atelier, les larmes de Lola quand ils s’engueulaient comme deux adolescents, et cette après-midi qu’elle avait passé à sourire face à Lola pour lui offrir le moment qu’elle voulait. “T’as pas vu ton visage Ginny. T’avais l’air au bout du rouleau, vraiment au bout de tout c’était effrayant.” Elle secoue la tête, mais elle s’en fiche Ginny de tout ça, elle l’a bien montré ce jour là, quand elle non plus elle n’a pas cherché à comprendre pourquoi Jill a réagit de la sorte. “Et Lola était en pleur” Elle soupire, c’était trop ce jour là, tout était trop. “Personne a cherché à comprendre personne.” Ni Jill, ni Ginny, ni Auden, ni personne. Tous bien trop égoïste. “Il y a que lui qui peut te mettre dans un tel état Ginny, j’ai juste voulu… être là mais c’est jamais bon.” Elle ne fait jamais bien, et ça, Ginny et Bailey lui ont fait comprendre ce jour-là.

La voix de ma soeur qui est douce, presque calme. Elle est loin la Jill de la dernière fois, celle qui sautait aux conclusions, celle qui me reléguait comme le pire des boulets à un Auden à qui jamais je n'aurais imposé telle sentence. “ça devait pas se passer comme ça.” je sais, je sais Jill.

Je sais tout ça et elle aussi, et c'est bien ça le drame. Jamais je n'aurais pu penser qu'on en reviendrait si vite à nos mauvais plis, que la confiance s'envolerait aussi rapidement entre elle et moi. “T’as pas vu ton visage Ginny. T’avais l’air au bout du rouleau, vraiment au bout de tout c’était effrayant.” il est triste le sourire qui frôle mes lèvres, triste et fatigué surtout. « Je le montre jamais, d'habitude. C'est pour ça, que ça semblait aussi pire que ça. » tout le monde me donne le rôle de la fragile, tout le monde oublie que j'ai passé une vie à fabriquer des masques pour camoufler les fracas au mieux. J'étais ainsi parce que je faisais confiance Jill, j'étais ainsi parce que je n'en voulais plus des masques. J'aurais dû les garder.

“Et Lola était en pleur” mon coeur se serre, mon appétit de salé s'est envolé. “Personne a cherché à comprendre personne.” la poignée de chips que je pose à mes côtés comme énième drapeau blanc ridicule, mes paumes que j'essuie sur mon jeans la seconde d'après, pensive.

« Tu peux comprendre si tu veux. » c'était ce qui avait bloqué ce jour-là. C'est ce que je lui reproche et ce qu'elle me reproche elle aussi. Si elle veut parler, si elle a envie de parler, on parlera. Cette fois-là par contre, à la seconde où je sens qu'elle va trop loin, je me retirerai bien avant qu'elle. C'est moi, qui filerai par la fenêtre. « Tu peux me demander. Aujourd'hui. » pourtant je n'y pense pas, à une potentielle fuite, je n'en veux pas de l'esquive. J'attends plutôt, regard braqué dans le sien. Pas le moidnre masque en place, non plus.

L'ambiance est étrange, mais Jill n'a pas encore hurlé ou essayé de fuir. Et ça, ça peut être compté comme un effort de sa part. Parce qu'elle en sait des choses sur sa sœur aujourd'hui, des choses que Ginny lui a volontairement cachées et elle ne sait pas quoi en penser. Mais elle ne dit rien, c'est trop tôt, elles ont tout juste réussi à aligner deux phrases cohérentes qui montrent qu'elles ont décidé de se tolérer le temps qu'il faudra. Et elle pique la phrase de Ginny, elle fait mal parce qu'elle est terriblement vraie, parce qu'ils sont tous pareil dans cette foutue famille et qu'ils en ont à la pelle des masques à porter pour chaque occasion. "Je voulais juste…" elle soupire Jill, elle joue avec son paquet de chips sans en manger une seule. "je sais pas. Te protéger certainement."  elle aurait pu se taire Jill, elle l'aurait fait il y a quelques mois encore. Elle aurait sourit et aurait fait comme si de rien était. Comme si elle n'en avait rien à faire de tous ces problèmes. Mais là, elle parle, elles sont coincées ensemble de toute manière, donc autant que ça serve à quelque chose. 


Elle peut comprendre, elle peut demander. Quand l'une fait un effort l'autre la suit et c'est bien pour les deux. Peut-être que ça peut s'arranger, qu'elles peuvent apprendre à ne plus se faire aussi mal. 


Elle peut comprendre, elle peut demander. Est ce qu'elle doit lui poser toutes les questions qu'elle se pose. "On ment plus, on a dit qu'on arrêtait les bons dit quand on s'est tous vu la dernière fois."   elle prend des gants Jill pour tout ce qui va suivre. Elle respire et elle regarde sa sœur, la lueur dans ses yeux a changé depuis la dernière fois. Est ce qu'elle veut lui dire la vérité ? Est ce qu'elle compte le cacher pendant longtemps ? "Qu'est-ce que t'avais ?" elle le fixe, elle ne veut pas de mensonge. "Ne cherche pas une demi explication pour cacher la vérité." elle va le voir dans ses yeux Ginny, elle va le voir que Jill est au courant depuis quelques semaines déjà. Et les yeux de Jill se posent sur le ventre de sa sœur qui ne forme encore aucun arrondi. Mais elle les devance les questions de Ginny, pourquoi et comment elle a bien pu savoir. "Sebastian me l'a dit." Jill baisse de nouveau la tête sur son paquet de chips à peine entamé. "Et non il a pas fait exprès."


        

"Je voulais juste… je sais pas. Te protéger certainement."
« Lui aussi. » ma voix est douce, elle l'est beaucoup plus que toutes les autres fois où j'ai tenté de faire comprendre à ma soeur que les mauvaises intentions qu'elle donnait à Auden étaient erronées. Elle a toujours cru qu'il ne voulait que me faire du mal, que c'est ce qu'il réussirait à faire avec brio au fil des mois, des années. Elle n'a appris que tout récemment qu'à ce rayon, autant lui que moi avons fini par blesser l'autre ; quand jamais, jamais, jamais ça n'avait été notre volonté.

Elle est calme Jill. Seul le bruit des croustilles craque au fil des silences qui s'installent, ceux qui ne pèsent évidemment pas autant que lorsqu'on y ajoute nos célèbres joutes de regards, prunelles braquées les unes sur les autres sans jamais vouloir détourner les yeux. Aujourd'hui, nos yeux, ils se regardent avec toute la douceur dont on est étrangement capables. "On ment plus, on a dit qu'on arrêtait les bons dit quand on s'est tous vu la dernière fois." j'hoche docilement de la tête, l'entente qui comme avec mes frères continuera de s'ancrer avec ma soeur. Après avoir passé nos vies à agir d'un sens, ce serait mentir de dire que je ne suis pas soulagée de finalement laisser les habitudes derrière pour en construire d'autres. "Qu'est-ce que t'avais ? Ne cherche pas une demi explication pour cacher la vérité."

« Jill, c'était parce que je suis- » "Sebastian me l'a dit."

On parle en même temps, on tente d'être honnêtes, en même temps. Mes sourcils se froncent, elle le voit de suite Jill, précise à demi-mot. "Et non il a pas fait exprès." « Je voudrais vraiment te croire. » et je la croirai, je me le promets. Aucun reproche dans ma voix, quand toutes les fibres de mon corps me disent d'y penser à deux fois. Diviser pour mieux régner me semblerait être une si bonne tactique de la part du Fitzgerald envoyé pour nous surveiller, pour nous casser, pour me remarier à Bailey.

Pourtant, ce n'était qu'une question de temps avant que la personne qui sait tout sur tout l'échappe, volontairement ou non. Les questions remontent, si Bailey sait, pourquoi elle a parlé à Sebastian. Pourquoi elle semble si confiante qu'il n'a pas fait exprès, pourquoi elle ne m'attaque pas avec l'information plutôt que de la laisser glisser, comme raison. Elles restent en suspens les interrogations, mes jambes se déliant du comptoir pour battre une mesure irrégulière en apesanteur.

« On voulait attendre trois mois, à cause de - tu sais. » à cause de la fausse couche Ginny, un jour, t'arrivera à le dire. « Et j'ai pas le droit au sucre, en plus du café. J'ai presque le droit à rien Jill, sauf au salé. C'est l'horreur. » ma moue ne sert à rien, elle justifie en moins notre comportement, de ce jour-là. Et pourtant. « Je pense qu'on a juste peur que ça aille mal, comme tout a toujours mal été, avant. » je souffle, franche, le plus dont je suis capable. Sans filtre, sans masque, sans faire bonne figure. « C'est pour ça que je ne te l'ai pas dit, que je ne l'ai pas dit à personne. On veut que tout se passe bien, que tout se passe comme ça devait se passer. » il y a des années de ça, et aujourd'hui encore plus.

”Je crois qu’on arrivera jamais à se comprendre avec lui.” Elle a fait l’effort avec Ginny, et ça a fonctionné. Mais le passif Jill Auden est bien trop compliqué pour que ça puisse fonctionner un jour. Et c’est aussi triste que inévitable. Ils veulent la même chose pourtant, ils veulent la protéger, mais n’arrivent pas à s’apprécier. Et ça sera certainement toujours le cas. Leurs voix sont douces, bien loin de ce qu’elles pouvaient faire avant. Elles grandissent les soeurs, et c’est plutôt beau à voir. Jill apprend à compter sur les gens qu’elle aime, et Ginny fait partie de ce cercle restreint. Mais c’est encore tôt, il s’est passé tellement de choses, elles ont dit tellement de choses pendant cette après-midi à la galerie. Et elle sourit en pensant à Matt qui les a laissé là, ce n’était peut-être pas une si mauvaise idée finalement.

Elles parlent en même temps, et elle le sent que Ginny allait lui dire la vérité. Elle le sent qu’elle allait le dire le je suis enceinte. Et elle pince les lèvres, elle aurait dû attendre avant de parler de Sébastian. Elle sait que ses relations avec sa soeur sont compliquées. Mais elle croise le regard de Ginny, elle ne croit pas que Sebastian n’ait pas fait exprés de lâcher cette bombe. Mais elle ne sait pas qu’il a promis à Jill de ne pas être affreux avec elle, et elle le croit. “Tu peux me croire Ginny. C’était pas voulu, il cherchait juste à savoir pourquoi on s’était engueulée, c’est plus de ma faute que la sienne.” Si elle n’avait pas été aussi longue à parler il n’aurait pas eu besoin de trahir le secret.

Et elle écoute les explications Jill, des explications plus que compréhensible. Elles ont tellement peur chacune de leur côté “C’est pas l’horreur le salé” Jill hausse un sourcil, elle pourrait tuer toute sa famille pour un paquet de chips. A part la glace, elle ne mange presque rien de sucré. “Y’a pas de raison que ça aille mal. T’es à combien de mois ?” Et c’est un peu comme si au fil des minutes elles retrouvaient petit à petit ce qu’elles avaient perdu. “J’ai pas compris sur le moment. Je me suis dit que t’avais vraiment fait une croix sur tout alors que pour moi t’étais la première au courant…” Elle se justifie aussi Jill, elle essaie de parler de tout ce qu’elle a pu ressentir. “Mais t’avais tes raisons.” Et elle ne lui en voudra pas pour ça, pas maintenant qu’elle sait ce qui l’inquiétait.

Je tente de toutes mes forces de garder un regard impassible lorsqu'elle aborde la façon dont elle l'a appris - et de qui. “Tu peux me croire Ginny. C’était pas voulu, il cherchait juste à savoir pourquoi on s’était engueulée, c’est plus de ma faute que la sienne.” « Il s'inquiétait pour nous deux? » elle l'entendra dans ma voix Jill, la pointe bien plus curieuse que perplexe. Il ne s'inquiète pas Sebastian, il ne ressent pas l'inquiétude lui qui contrôle toujours tout d'une main de maître, à plusieurs pas d'avance. Ils s'en sont parlés, ils se sont parlés? J'ignore jusqu'où je peux la questionner avant qu'elle ne se braque, jamais je n'oserai aller trop loin, pas aujourd'hui du moins.

“C’est pas l’horreur le salé” Jill dédramatise, je m'entends rire à sa suite. « Faudra que tu m'y introduises. Le sucre c'est ma vie. » et l'espace d'un instant, c'est doux, c'est simple, c'est vrai. L'espace d'un instant je retrouve la Jill avec qui je suis allée me perdre au fin fond de la forêt, celle qui était là pour m'écouter quand même moi j'arrivais pas à parler. “Y’a pas de raison que ça aille mal. T’es à combien de mois ?” y'avaient des milliers de raisons pour que ça aille mal, ça a déjà tellement été ainsi que j'ai arrêté de compter. « Bientôt deux. »

Dans mon dos l'une de mes mains laisse mes doigts se triturer ensemble, camouflant les quelques bribes de stress qui remontent. “J’ai pas compris sur le moment. Je me suis dit que t’avais vraiment fait une croix sur tout alors que pour moi t’étais la première au courant…” le troisième mois devrait sonner comme la confirmation que tout va, la ligne d'arrivée ; pourtant, il reste encore tellement de scénarios que je ne m'autoriserai jamais à réellement célébrer. Je ravale, à la place. “Mais t’avais tes raisons.”

À une nouvelle inspiration s'additionne une nouvelle confession. « T'étais là quand c'est arrivé Jill... » quand j'ai perdu le bébé. Elle était là et elle était déjà enceinte et elle a tout vu, elle n'aurait jamais dû voir. Le traumatisme que j'ai encore occasionné, que je me déteste d'avoir été. « T'étais là et je vais toujours m'en vouloir que tu aies vu ça. » mes prunelles trouvent les siennes, autant de je suis désolée qui viennent s'y ancrer.

« Les premiers examens se sont bien passés, je suis ultra suivie et Auden est incroyable. Parfois on dirait qu'il est enceinte lui aussi tellement il suit mieux les indications que moi. » je ricane, une seconde plus tard, me redressant doucement sur le comptoir pour ramener une jambe vers moi autour de laquelle s'enlace mes deux bras. L'un de mes pieds s'ancre sur le bois vernis, mon menton se pose sur mon genou. « Comment ça se passe, pour toi? » et pour Bailey, si elle a envie d'en parler aussi, bien sûr.  « T'arrives à voir tes orteils, encore? » un fin sourire vient se nicher sur mes lèvres, son ventre de plus en plus rebondi qui doit lui jouer des tours plus souvent qu'autrement au moment d'attacher ses chaussures.

Elle ne sait pas vraiment pourquoi elle a parlé de Sébastian. Mais elle l’a fait, elle ne veut pas que Ginny lui en veuille pour cette annonce. Elle n’aurait pas dû le dire, elle aurait dû le garder pour elle. Mais maintenant sa petite soeur sait, et elle les sent les questions qui arrivent. Elles ont dit plus de mensonges, ni de tabou. Alors elle respire calmement avant de planter de nouveau ses yeux dans les siens. Il ne s’inquiétait pas pour Ginny, on ne peut pas dire qu’il s’inquiétait en réalité si ? “Il s’inquiétait pas pour toi, ni pour moi d’ailleurs.” Jill fronce les sourcils. “Enfin je crois pas.” Elle ne sait pas vraiment en fait, il est difficile à cerner. “Il me demandait pourquoi on avait décidé de se réconcilier, et j’ai dit qu’on était plus vraiment réconcilié et il cherchait la raison. Il s’est dit que c’était peut-être parce que t’étais enceinte, il a réfléchi à voix haute.” Elle lui cherche des tonnes d’excuses, comme si ça allait arranger quoi que ce soit.

“T’auras de nouveau le droit après le grossesse ?” Elle fronce les sourcils, pourquoi Ginny n’aurait pas le droit au sucre, c’est étrange non ? Et elle est à deux mois de grossesse. Et elle s’inquiète Jill, bien sûr qu’elle s’inquiète. Elle se souvient de tout. De cette soirée pendant laquelle elles avaient pleuré dans les bras l’une de l’autre quand il se passait déjà pleins de choses dans leurs vies. “Tu sais que je suis là, même après tout ça.” Parce qu’elle a dit des choses qu’elle ne pensait peut-être pas complètement, et qu’elle sera toujours là pour cette famille.

Jill capte le regard de Ginny, elle lui dit qu’elle était là quand c’est arrivé, quand elle a perdu le bébé. “J’étais là ?” Elle réfléchit, pourquoi elle ne savait pas ça ? Pourquoi elle n’est pas au courant ? Et tout s’éclaircit. “Le malaise à l’atelier ?” Le malaise qu’elle avait géré avec Auden. Ce qui n’était qu’une simple baisse de tension dans la tête de Jill depuis que c’était arrivé. “Pourquoi tu me l’as pas dit ?” Et elle le sait Jill. Parce qu’elle était enceinte et paniquée déjà à ce moment là. Elle ne sait pas si c’est le moment d’aller la prendre dans ses bras ou non. “Bailey est exactement pareil.” Et elle pouffe de rire Jill. “Il oblige même le docteur à me dire que je dois me reposer.” Elle hoche la tête en faisant référence au dernier rendez-vous. Comment la grossesse se passe pour Jill… C’est une question qu’elle se pose encore elle aussi. “Bailey est tellement heureux.” Et elle sourit un peu Jill en évitant le regard de sa soeur. “Moi je sais pas, c’est encore compliqué.” Pas de mensonge. “J’arrive presque plus à mettre mes chaussures, et j’ai dû refaire toute ma garde robe parce que même les jogging de Bailey me vont plus.” Et elle soupire Jill. Ca fait du bien, tellement de bien de pouvoir parler à coeur ouvert d’absolument tout. Peut-être qu’elles ne se sont pas perdues finalement.

“Il s’inquiétait pas pour toi, ni pour moi d’ailleurs. Enfin je crois pas.” elle précipite les mots Jill, elle s'assure de les mettre les uns après les autres le plus vite possible pour être certaine de sortir tous ses arguments et que je ne reste qu'avec les conclusions qu'elle-même en a tirées. “Il me demandait pourquoi on avait décidé de se réconcilier, et j’ai dit qu’on était plus vraiment réconcilié et il cherchait la raison. Il s’est dit que c’était peut-être parce que t’étais enceinte, il a réfléchi à voix haute.” je connais le comportement par coeur, je connais les mécanismes, je connais la tactiques, j'y suis familière depuis presque 15 ans maintenant. « Pourquoi est-ce que tu prends sa défense? » aucune touche de reproche dans ma voix ; j'essaie juste de comprendre ce qu'elle voit. Elle me fait penser à moi, avec elle, quand je donnais tout ce que j'avais en quelques secondes au compteur pour prendre la défense d'Auden.

Auden qui d'ailleurs est entièrement dédouané de la dernière fois, apparemment. “T’auras de nouveau le droit après le grossesse ?” « Si mon karma est bon. » je souffle, lorgne sur les chips, en mange une et une autre par dépit. “Tu sais que je suis là, même après tout ça.” le sac n'a plus aucune sorte d'importance quand mes prunelles sont scotchées aux siennes. « Je sais. Moi aussi. » malgré tout ce qu'on a pu se dire, malgré tout ce qu'on a pu se faire. On pardonne, même si on n'oublie pas.

Et l'ambiance était légère, puis doucement, elle l'est bien moins. “J’étais là ?” oui Jill, t'étais aux premières loges. “Le malaise à l’atelier ?” exactement ça. Mes lèvres se serrent, mon regard se voile, mes jambes remontent pour se coller un peu plus contre mon torse quand mes bras les enserrent.  “Pourquoi tu me l’as pas dit ?” mes yeux eux, ils dérivent vers son ventre. Elle venait à peine d'apprendre qu'elle était enceinte, elle était terrifiée. Jamais je le lui aurais dit de mon plein gré. “Bailey est exactement pareil. Il oblige même le docteur à me dire que je dois me reposer.” elle pouffe, j'éclate de rire à mon tour. « Ils veulent bien faire. » ni les gars ni les médecins ne sont méchants en soit. Chacun gère la situation comme il le peut au mieux. “Bailey est tellement heureux.” ça m'étonne pas. “Moi je sais pas, c’est encore compliqué.” et ça non plus.

“J’arrive presque plus à mettre mes chaussures, et j’ai dû refaire toute ma garde robe parce que même les jogging de Bailey me vont plus.”
« C'est ça, le vrai drame, de plus pouvoir porter ses jogging. »

Elle tente encore d'alléger l'air Jill, elle réussit presque. Je l'aide.

« Tu sais, c'est pas parce qu'il est heureux que tu dois absolument l'être. » je tente aussi, à mon tour, le plus doucement possible. « T'as le droit de trouver ça difficile ; ça l'est. » j'essaie de calmer le stress, j'essaie de calmer la pression qu'elle doit se mettre aussi, de ne pas être au même rythme de Bailey sans que personne ne le lui ait jamais reproché. C'est naturel de ressentir, elle a toutes les raisons de se l'autoriser. « C'est rien d'insurmontable et certainement pas pour toi, mais je peux pas te dire que c'est simple, ni facile. » on a dit qu'on ne se mentirait plus ; j'applique les règles à la lettre.

Elle avait besoin de l’entendre de la bouche de sa soeur qu’elle était enceinte. Elle savait que c’était vrai, Sebastian ne lui aurait pas menti, il ne ment jamais. Mais elle voulait être sûre, vraiment sûre. Et elle ne peut s’empêcher de défendre Sébastian, de dire à Ginny qu’il n’a pas lâché l’information pour lui nuire. Elle aurait pu se taire, elle sait que Ginny ne l’aime pas, mais elle n’a pas pu s’en empêcher. “Je prends pas sa défense…” Elle prend totalement sa défense mais elle-même ne sait pas vraiment pourquoi. “Je sais pas… Je veux pas que tu lui en veuilles alors que c’est pas de sa faute.” Elle évite de croiser le regard de sa soeur et préfère observer le paquet de chips avec lequel elle joue. “Il s’en voulait vraiment d’avoir dit ça, il veut pas me blesser.” Il lui a dit, et elle parle trop Jill, mais c’est Ginny, elle sait qu’elle peut lui faire confiance.

“On pourra faire le tour de toutes les pâtisseries de Brisbane quand t’auras accouché” Jill sourit un peu en relevant les yeux vers sa soeur. “J’aurais tellement mangé de salé pendant 9 mois que je pense que je vais être en manque de sucre.” A part la crème glacée, elle ne se nourrit que de salé, elle se fait même des petits-déjeuner à l’anglaise depuis des mois déjà. “Pourquoi faut toujours que le chaos revienne ?” Elle soupire, tout allait si bien, et elles avaient brisé tout ça en moins de 5 minutes. Ginny n’a pas compris Jill et l’inverse était tout aussi vrai. Elle en avait vraiment souffert Jill, peut-être que Ginny aussi. Ce n’était pas la première fois qu’elles ne s’adressaient pas la parole pendant tout un mois, ça avait déjà duré bien plus longtemps d’ailleurs, mais c’était la première fois qu’elles s'engueulaient pendant la reconstruction. “De vrais futurs papa poule” Jill hoche la tête en souriant, elle savait déjà que ce serait le cas pour Bailey, il aime ses bébés plus que sa propre vie avant même qu’ils soient nés. “Quand je pense que j’en ai encore pour 4 mois je pense que je vais exploser.” Et elle ne pourra même pas mettre les jogging de son mari.

Et elle connait Jill Ginny. Elle pose la bonne question, celle que Jill se pose depuis des semaines déjà. Elle est terrifiée à l’idée d’être incapable de savoir si elle aime ses propres enfants ou non. Bailey n’hésite pas lui. “Je sais juste pas ce que je ressens pour eux.” Elle espère que tout s’éclaircira bientôt, qu’elle aura le fameux déclic dont toutes les femmes parlent quand leur bébé est posé sur le torse, elle l’espère de tout son coeur. Elle essaie de la calmer Ginny, et ça marche un peu. Elle aime savoir qu’elle peut parler sans se soucier de tout ce que peut penser sa soeur. “Toi aussi.” Et c’est possible que ce soit encore plus dur pour Ginny, elle doit être terrifiée. “Je pensais pas que ce serait si difficile, j’ai l’impression d’avoir un problème. Quelle mère n’est même pas sûre de pouvoir aimer ses enfants ?” C’est un peu violent, mais c’est ce qu’elle ressent.

“Tu vas être parfaite Ginny, tout va bien se passer j’en suis certaine.” Elle doit la rassurer aussi, c’est le vrai rôle d’une grande soeur, celui qu’elle aurait dû avoir depuis toujours. Mieux vaut tard que jamais. “Tu sais que c’est un garçon et une fille ?” Jill ne lui a pas dit, peut-être que Bailey l’a fait. Et c’est le moment là non ? C’est lui prouver qu’elle pardonne, qu’elle a envie de passer à autre chose, de passer au-dessus de tout ça pour qu’elles soient présente le reste de ces deux grossesses. “Tu veux être la marraine du garçon ?” Et elle plante son regard dans celui de Ginny, ça pourrait presque sonner comme une supplication, mais elle sourit Jill. Elle serait parfaite, mais elle a toujours le choix de dire non.