La tranquillité. C'est ce que tu étais venu chercher ici. Arrêter de faire semblant pour quelques minutes. Juste quelques minutes. De toute façon le pire de la soirée était à venir. Ce Jet terminera ses chansons et les hommes d'affaires parleront contrat et argent pendant des heures. Ils feront tous semblant de pas être d'accord, mais honnêtement, tout le monde sait que la décision était déjà prise avant que la soirée ne commence. Alors, oui, c'était le parfait moment pour s’éclipser. Mais non, tu n'es pas resté seule bien longtemps. À peine quelques minutes après ton arrivée, tu attends la porte s'ouvrir à nouveau. Tu te retournes et tu tombes nez à nez avec elle. Cette fille de tout à l'heure. Celle que tu ne remarque pas encore assez. Celle qui passe sous ton radar. Pour l'instant. C'est mieux elle que n'importe qui d'autre. C'est ce que tu penses. Si seulement tu savais... « Vous fumez? » « Non. » Elle tenait probablement l'excuse parfaite pour se sauver sans que ça ait l'air de ce que c'était vraiment. C'est probablement la seule raison qui pousse les autres à sortir sur la terrasse. Ça et la chaleur suffoquante causé par le nombre élevé de personne dans la salle. L'air ici est frais et la vue est pas trop mal. « Vous fumez ou vous vous sauver de cette soirée ? » que tu lui demande sans vraiment savoir pourquoi ça t'intéressait, ou si ça t'intéresserais. Ça se voyait qu'elle ne faisait pas partie de ce monde bourgeois. Ça devait l'emmerder. Tu en fais partie et ça t'emmerde. T'es là parce qu'il le faut. Pas parce que tu le veux. « Ariane, c'est ça ? » Tu n'oublie jamais un nom. Même si tu penses que le sien, tu vas finir par l'oublier. Parce qu'il avait se forte chances que vous ne vous recroisiez jamais. « D'où est-ce que vous connaissez Sebastian ? » Par son invité, tu supposes, mais t'en sais rien au fond. Tu sais rien d'elle. Peut-être que tu juges trop vite. Comme toujours. Tu portes ta flûte à tes lèvres, alors que la dernière gorgée coule contre tes lèvres.

« Non. » moi non plus. L'instant d'après, je laisse le briquet tomber par-delà la rambarde. Son echo s'échoue dans la ruelle, tout en bas. Il ne sert à rien maintenant de toute façon l'alibi. Il était stupide ; l'espoir bancal.

Ma silhouette fait volteface, mes prunelles détaillent son profil quand elle semble inspirer réellement pour l'une des premières fois de la soirée. Je sais, je fais pareil. L'air frais fait des miracles, dirons-nous. « Vous fumez ou vous vous sauver de cette soirée ? » « Un peu des deux. » et si mes mots sonnent comme un surtout la deuxième option, c'est que c'en est un. J'ai même pas la moindre clope dans mon sac, le seul joint qu'on a embarqué pour faire bonne figure est terminé depuis longtemps, il colle encore aux lèvres de Jet, aux miennes. Mais non, je ne fume pas. J'attends juste.

« Ariane, c'est ça ? » j'opine du chef, mon nom qui coule bien trop facilement sur sa langue pour que je me complaise à croire que ça en sera toujours ainsi. « Et vous êtes Elise. » bien sûr qu'elle est Elise. Elle est Elise dans toute sa posture et son air aussi fermé que pragmatique. Véritable Joconde qui se laisse noyer dans l'assemblée sans dire le moindre mot, quand pourtant ses airs de porcelaine n'ont absolument rien pour me berner. Elle est tellement plus forte qu'ils peuvent tous croire, les autres à l'intérieur. Ç'aurait été plus facile de la détester. « D'où est-ce que vous connaissez Sebastian ? » « Je pense pas qu'on puisse dire que je le connais vraiment. » parlant de détester quelque chose, elle est là, l'impression de ne jamais vraiment arriver à mettre le doigt sur Sebastian. D'haïr les zones grises à travers lesquelles il slalome avec beaucoup trop de facilité. « On fréquente les mêmes personnes. » que je finis par statuer, détestant laisser les réponses aussi vagues que les questions. Jet, Bailey, Saül ; ils se mélangent tous un temps au fil de mes mots. Vaut mieux.

Sa coupe est vide, mon verre est désespérément resté à l'intérieur. « Le champagne m'ennuie. » la seconde d'après, je tourne le visage, le détourne d'elle simplement pour ancrer mes prunelles à celles du serveur en charge de gérer les commandes sur la terrasse. « Quelque chose de plus fort? » elle n'aura pas le temps de répondre Elise, quand je juge qu'un silence ou un non passe aussi bien qu'un oui. Scotch, toujours, sans glace, double. Il ne manquerait plus que les cigares, si on fumait, et le cliché n'en serait que plus parfait.

Ce n'est que lorsqu'elle est servie et moi aussi que j'égare mon attention par-delà la baie vitrée à repérer encore à l'intérieur les mêmes personnes que l'on fréquente, toutes attroupées les unes autres des autres. « Je me demande lequel trahira lequel en premier. » oh, si seulement les paris étaient possibles.

C’est le bordel dans ma tête. Vraiment le bordel. Donc mes yeux restent fixés sur ma guitare ou dans les yeux d’inconnues qui bavent déjà après seulement 3 accords joués. C’est trop facile avec ce genre de filles. Et je joue du côté mauvais garçon, le côté du gars qui n’a pas sa place dans ce genre d’endroit. Parce que c’est vrai au fond. Je n’ai rien à faire ici, si je n’avais pas la musique, je ne suis pas sûr que je prendrais du plaisir à rester pour m’enfiler un nombre incalculable de verres. J’évite Ariane depuis que je l’ai vu minauder devant le type que je suis impressionné. Il a l’air con, vraiment con. Et mon avis est objectif bien sûr. Bref, je chante mes chansons, mes compositions. Je donne tout ce que j’ai en essayant de contrôler ma colère, et je n’y arrive pas tout le long. Mais ça va bien avec mes chansons, donc je ne m’inquiète pas. Au bruit des applaudissements je sais que j’ai fait bonne impression.

Le seul avis qui m’intéresse pour l’instant c’est celui de Sébastian. En temps normal, je serais allé cherché Ariane en première pour qu’elle me dise à quel point j’ai foiré, même si ce soir, j’étais parfait. Mais là je vais voir Sébastian, j’ai pas vraiment envie de la croiser. Il vaut mieux que je respire et que je me calme un peu avant de poser de nouveau mes yeux dans ceux de la rousse. Mais c’est le deuxième Fitzgerald qui me rejoint en premier. Est ce qu’il est vraiment important ? Est ce que ça vaut vraiment le coup que je perde du temps pour lui dire que oui j’écris mes chansons ? Je perds ce temps-là quand même. “Oui” Peut-être que lui s’y connait un peu plus que le reste de l’assemblée en musique. “Tu es quoi dans l’entreprise toi ?”

On discute quelques minutes et je rejoins Sébastian sans me préoccuper de l’autre. C’est plus fort que moi, mais si je le regarde un peu trop longtemps mon poing risque d’être attiré comme un aimant par son nez. J’ai pas de verre alors mes mains glissent dans mes poches. “Satisfait ?” Parce que je l’ai dit, c’est son avis que je vais chercher en premier. Et je la vois la rousse sur la terrasse, et mes yeux plongent dans les siens même si je suis presque sûr que ce n’est pas moi qu’elle regarde, qu’elle prête son attention à un autre. Et étonnement, même si je bous, je ne fais rien, qu’est ce que je pourrais faire de toute manière ? Je l’ai dit, je ne briserai ma carrière pour rien au monde, rien ni personne. Surtout quand la seule personne qui pourrait me faire douter de cette promesse n’a même pas été vraiment là quand je lui ai demandé.

Les minutes passent et je ne suis même pas la conversation. Alors je m'excuse et décide de sortir sur la terrasse. Elle est accompagnée mais j'en ai rien à foutre. "Alors c'était quoi ta partie préférée ? Le champagne ou la montre ?" oh oui je t'ai vu Ari, et bien sûr que tu sais que je rage là. Je rage vraiment. "T'as tellement envie que je perce dans la musique que t'as décidé de draguer tous les vieux que je dois impressionner ?" ma langue pique, mon regard aussi. Yeux qui la fixent elle et qui ignorent complètement la présence de l'autre femme. Je ne sais même pas qui c'est, mais elle n'a qu'à partir si le spectacle ne lui plaît pas.

C'était juste une question de temps avant qu'il n'arrive Jet, avant qu'il ne quitte les autres, pour venir ici.

Ses yeux lâchent pas les miens, il est calme Etish, il est bien trop calme et bien sûr qu'il rage. Au moins il fait pas le con à l'intérieur, et même si c'est le pire endroit possible pour exploser, encore heureux que ça soit pas devant un des deux Fitzgerald. Son contrat, blablabla.

"Alors c'était quoi ta partie préférée ? Le champagne ou la montre ?"
« Ta gueule. »

Ça sort vite, simplement, la menace qui n'en est pas vraiment une parce que de le lui dire c'est assuré qu'il va renchérir. Il comprend rien et il pose pas les bonnes questions, c'est qu'un con sérieux et il fait exprès, il fait tellement exprès. On parle pas de ces choses-là comme on ne met pas d'étiquettes comme on oublie, là, apparemment, qu'on est devant public. Il a cette capacité-là Jet, de tout brûler sur son passage. Il est bien trop doué à dire exactement ce qu'il faut pas et à faire aussi mal avec ses poings qu'avec ses mots - avec le temps, je l'ai bel et bien appris.

"T'as tellement envie que je perce dans la musique que t'as décidé de draguer tous les vieux que je dois impressionner ?"
« Me fais pas pleurer, même toi tu voulais pas être là ce soir. »

Je souffle, le scotch entre mes mains que je bois d'un trait d'un seul. Les quelques verres ingérés ce soir font à peine d'effet et c'est là où j'en rêve, d'une potentielle ligne de coke de merde que je déteste de vouloir autant. À la place, je reste immobile, appuyée sur la rambarde. Dos à la ville parce que de toute façon, faudrait pas que je quitte les prunelles de Jet une seule fois. Il oublierait pourquoi il est là, il oublierait aussi que c'est juste une soirée de plus, qu'il en a pas besoin au sens où il peut très bien faire tout ce qu'il veut avec sa guitare et son stupide talent s'il arrête de jouer au bâtard qui a envie de gueuler sur tout ce qu'il peut. « Ma partie préférée c'est quand tu m'as dit que t'allais pas faire de scène aujourd'hui parce que tu y tiens à ton contrat. »

« Rythme, paroles, drogues, c'est noté. » Je marque un temps d’arrêt alors que mon frère semble vouloir entendre ce que j’ai à dire, pour une fois. On se retrouve l’un en face de l’autre, nos verres à la main, comme deux idiots qui ne savent même plus communiquer ensemble. On pourrait en parler pourtant de ce fameux Jet. Il y a des choses à dire, une trajectoire à prendre et quelques séances de travail à programmer, mais il a du potentiel. Je me trompe rarement pour ce genre de choses, qu’importe ce qu’en pense Sebastian. « Je compte passer le voir pendant la tournée, est-ce que tu voudras venir un soir ou deux ? Lui donner des conseils sur sa musique, sur sa façon d'être sur scène ? » Un instant, je regarde le fond de mon verre. Il a distribué de la drogue ce soir ? Il ne me parle jamais aussi calmement Sebastian. Jamais il ne m’a proposé de collaborer sur quoique ce soit depuis son arrivée à Brisbane. Je voudrais en rire, mais je reste là et je le prends au sérieux. « Cela dépend quand sera la tournée. » Parce que je ne partirai pas si Jill est trop proche de la date de son terme. Il est au courant mon frère, il saura très bien de quoi je parle. « On pourrait commencer par une séance au studio, non ? » Ce serait bien. « Ensemble. » que j’ajoute au cas où le doute planerait un peu trop.

Mais déjà, il s’éloigne pour rejoindre Saül. Au loin, je vois Ariane et Elise. Un soupir m’échappe. Il va falloir que tu gères les choses un peu mieux Saül.

J’intercepte le chanteur alors qu’il se fraye un chemin hors de la scène. Je veux parler avec lui avant de m’enfuir de cette soirée. « Oui » Pas très loquace le gamin. « Tu es quoi dans l’entreprise toi ? » Il se méfie, je comprends pourquoi il s’entend bien avec Sebastian. « Le producteur et directeur artistique. » Autant dire, qu’il ferait bien de me faire confiance et surtout de me parler un peu plus. « J’aimerais te voir au studio une fois. »

Je me retrouve seul au milieu des requins et la fuite semble être encore la meilleure des options. Pourtant, je me fais happer par des lointaines connaissances qui veulent prétendre qu’ils savent parler de musique. Je joue le jeu. Dix puis vingt minutes. Je soupire et m’excuse. C’est trop pour moi, mais j’ai une dernière chose à faire. Je me dirige vers la terrasse, interromps probablement la conversation, je m’en fous. Mon regard se plante dans celui d’Ariane. « Tu devrais passer à la maison un soir. Ça ferait plaisir à Jill. » Et si t'a juste besoin de t'échapper un peu.

« Ce soir. »

C'est de la triche, voilà ce qu'il en pense. Surtout parce qu'il ne peut pas répliquer, à cause de Elise qui choisit ce moment là pour s'imposer. « Qu'est-ce que t'attends ? » « Rien. » Tout. « Merci » Saül ne relève même pas, pas plus que quand son épouse file vers d'autres horizons. Lui pose sa coupe sur une table à sa gauche. Son prétexte s'est envolé sans qu'il n'ait besoin d'en user. Ariane a filé, de toute façon, un briquet dans la main. C'est qu'il voudrait la suivre elle, quand Fitzgerald premier du nom trouve de quoi lui faire la conversation. Le regard de l'italien passe de la terrasse à l'anglais. « Alors ? » Alors il n'en pense rien du tout. C'est juste de la musique, ça ne lui dit rien, pas plus que la peinture ne lui parle, ou que le dessin ne le fait vibrer. Tout ça a toujours eu quelque chose de creux, à ses oreilles. Rien de très tangible. « Alors je le veux pour notre arrangement commun, au prix que tu pourras en tirer. » Prometteur, le type, sans doute, si Sebastian le lui présente. Pour ça, Saül fait confiance au quarantenaire. « Je le trouve un peu impétueux, mais je te laisse le loisir de calmer ses ardeurs. Qu'il apparaisse un peu plus... présentable. » Et c'est un ami de Ariane, non ? Après tout, elle devrait être honorée de sa présence sur scène - c'est lui qui le dit.

L'artiste en question qui file, à son tour, vers la terrasse. Il n'en faut pas plus à Saül pour s'inquiéter, soudain, s'inquiéter de la présence d'Elise là-bas. Et puis, le Fitzgerald junior se rajoute à l'équation. « Je crois qu'il est temps pour nous de rentrer. C'est toujours un plaisir, Sebastian. » Lorsque Saül lui a envoyé un dernier sourire, il s'éloigne l'air de rien vers l'endroit où se réunissent visiblement les foules. Dehors, l'air est électrique.

« ...de draguer tous les vieux que je dois impressionner ? »
« Me fais pas pleurer, même toi tu voulais pas être là ce soir. » Ce n'était probablement le cas de personne. Comme si de rien n'était, Saül vient s'arrêter aux côtés de Elise. Son regard bleu vrille un instant les épaules de l'artiste. « Ma partie préférée c'est quand tu m'as dit que t'allais pas faire de scène aujourd'hui parce que tu y tiens à ton contrat. » « Tout va bien, par ici ? » On dirait presque qu'il s'inquiète, dans son ton, quand il repose les yeux sur Elise, quand ses prunelles ont envie d'être autre part. Saül n'entend pas ce que Bailey a à dire. Ça ne s'adresse pas à lui, de toute façon. « Tu devrais renter. J'ai encore quelques mains à serrer, et puis je te rejoindrai. » Le dernier mot n'est pas pour elle. « Je vais te faire appeler un taxi. » Qu'elle soit loin, avant l'explosion.

« Le champagne m'ennuie. Quelque chose de plus fort? » « Je crois pas que... » Mais elle est déjà partie Ariane. Elle se rue déjà sur le serveur et elle en revient aussitôt avec deux verres. L'un d'entre eux finit dans ta main. Tu baisses le regard quelques secondes, te disant que ce verre collerait bien mieux entre les mains de ton mari que les tiennes. L'odeur suffit à te lever le coeur. Pourtant, l'orgueil suffit à le porter une première fois à tes lèvres. Infecte. Elle ne s'en rendra pas compte si tu ne fais que le siroter toute le reste de la soirée, si ? Parce que c'est pas une bonne idée. Tu supportes très mal l'alcool. Tu as l'habitude de ne boire que très peu. Tu as déjà bu tes deux traditionnelles coupe de champagne. Après, c'est tout. Tu es toujours en train de coller aux basques de Saül à lui dire qu'il a assez bu. Ce serait illogique que tu ne sois pas raisonnable. Vraiment illogique. « Je me demande lequel trahira lequel en premier. » Tu te retournes à ton tour, suivant le regard d'Ariane vers la baie vitrée, posant ton regard sur eux. « Bailey » que tu réponds juste parce que tu ne l'aimes pas. Au fond, c'était ce musicien qui avait l'air le moins fiable des quatres, mais tu gardes ce commentaire pour toi. Bailey, c'est mieux. « Ou Sebastian. » Parce qu'il est bizarre. Et puis, en femme modèle que tu es, tu ne dirais jamais Saül. « Vous dites lequel des deux ? » que tu demandes en tournant de nouveau la tête vers Ariane. Tu ne sauras jamais la réponse puisque vous vous retrouvez interrompu par ce musicien. « Alors c'était quoi ta partie préférée ? Le champagne ou la montre ? T'as tellement envie que je perce dans la musique que t'as décidé de draguer tous les vieux que je dois impressionner ? » Quel vieux ? Sebastian ? Tu as envie de rire. Saül il a une belle montre lui. « Me fais pas pleurer, même toi tu voulais pas être là ce soir. Ma partie préférée c'est quand tu m'as dit que t'allais pas faire de scène aujourd'hui parce que tu y tiens à ton contrat » Malaise. Qu'est-ce que tu fais encore là ? Tu veux pas être mêler à ça. C'est probablement le moment idéal pour partir. Il est rendu où Saül ? Tu retournes tes yeux vers la baie vitrée et c'est plutôt Bailey que tu aperçois faire son entrée. Pas lui. Tu devrais passer à la maison un soir. Ça ferait plaisir à Jill. » Ton regard passe de lui à eux. À cette dispute qu'il venait de mettre en suspend, ou pas. Ta présence ne semblait pas déranger ce Jet, il y a de bonnes chances que la présence de Bailey non plus. Enfin, sauf s'il tenait vraiment à ce contrat. Ah ! Le voilà ce très cher mari qui vient se poser à tes côtés. « Tout va bien, par ici ? » Tu lui fais signe que oui de la tête. Tu as surtout ce regard qui lui dit de pas s'en mêler, qui veut lui dire que c'est le temps de partir. Il a comprit, à moitié.. « Tu devrais renter. J'ai encore quelques mains à serrer, et puis je te rejoindrai. Je vais te faire appeler un taxi. » « Je peux t'attendre.. » Pourquoi rentrer séparément ? Tu pouvais attendre quelques mains à serrer avant de partir.

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Le fameux Bailey est en fait le producteur directeur artistique. Ca sonne important ça, il peut sûrement être utile à mon ascension. Alors je me détends un peu, mais je ne parle pas beaucoup plus. “Oui bien sûr.” Et je lui donne mon numéro. Sébastian l’a déjà mais l’ambiance entre les deux n’a pas l’air aux beaux fixes. Je m’en fiche de leurs histoires de famille, je veux juste évoluer. Et les deux peuvent sûrement m’y aider.

Bien sûr que je l'ai rejoint sur la terrasse parce que je suis pas à ma place dans cette foutue salle, comme elle elle n'est pas à la sienne. J'ai envie de partir, et à la base je voulais qu'on parte ensemble d'ici. Et là je pourrais me mettre à douter. Mais j'ai capté son regard, et je ne suis pas près de le lâcher, il peut y avoir n'importe qui, on a des choses à régler. J'ai des choses à lui dire. Genre pourquoi elle drague un type devant moi alors qu'elle me connait et elle sait comment je réagis. Ok j'ai couché avec d'autres filles qu'elle, mais c'est pas une raison pour qu'elle fasse la même chose. Blablabla je suis pas jaloux.

Le ta gueule si rapide et si prévisible qui me fait même pas sourire parce qu'elle me donne raison la conne. Parce qu'elle a bien fait plus attention à la montre qu'à autre chose et je rage toujours un peu plus si c'est possible. "Vas te faire foutre" j'ai toujours pas haussé la voix mais mes sourcils se sont froncés. Et mes yeux sont toujours dans les seins alors que mes pas se rapprochent dangereusement d'elle. "t'étais pas obligé de venir si ça te faisait tant chier que ça." mais elle serait venue dans tous les cas donc pourquoi on a cette discussion ? "T'avais pas l'air de te plaindre au buffet." là mon ton est plus froid, je ne crie pas, mais c'est encore pire. Et qu’est ce qu’il fout là le vieux en question ? Il peut pas aller se mêler de ses montre et de ses verres de champagne. C’est quoi cette terrasse ? Un rassemblement ? Le seul moment où je me tourne c’est pour lancer le regard le plus noir que j’ai en banque au mec qui se mêle de ce qui ne le regarde pas. Il devrait aller serrer les mains du monde entier avec sa femme et arrêter de me faire chier.

Je suis proche, trop proche de la rousse et elle m'énerve à un point inimaginable. Et j’ignore tout le monde, même Bailey qui prononce le nom de Jill, et ce nom m’aurait rappelé un souvenir pas très agréable. Mes dents se serrent parce qu'elle ne s'arrête pas de parler alors que moi je fais pas de connerie dans l'histoire. "Je fais pas de scène." je suis complètement en train de faire une scène et je la sens elle aussi qui pique, qui rage juste devant moi. Aucun des deux ne crie et je trouve que c'est un exploit. "Si tu faisais pas de la merde j'aurais pas réagis comme ça, alors fais pas comme si c'était de ma faute." je sais pas si quelqu'un d'autre qu'elle m'entend tellement je suis proche et tellement je parle doucement. Et elle parle trop, et elle va encore trop parler si je la fais pas taire et elle m'énerve encore et encore mais mes yeux la lâchent pas. Et encore plus quand je pose mes lèvres sur les siennes parce que j'en ai absolument rien à foutre de ce qui se passe autour. Ouais voilà, là au moins elle se tait. “On se tire ?” D’ici, de la ville, on se barre loin, très loin. Pendant longtemps, oui je lui propose de partir en tournée pendant tout un mois.

"Alors je le veux pour notre arrangement commun, au prix que tu pourras en tirer." Parfait. Je lève mon verre à cette nouvelle, avec un sourire, et je bois une longue gorgée de gin. L'objectif de la soirée est accompli, ce qui veut dire pour moi que c'était un succès. C'est plus simple de vivre dans ma tête que dans la vôtre, vous ne trouvez pas ? "Je le trouve un peu impétueux, mais je te laisse le loisir de calmer ses ardeurs. Qu'il apparaisse un peu plus... présentable." J'acquiesce. C'est bien le grand défaut de notre Jet national ; il avait un sang-chaud et l'air de venir d'une banlieue défavorisée. Ca allait avec son image rock'n'roll qui faisait succomber les femmes et mettait en transe les hippies, mais on allait avoir besoin d'une allure plus raffinée pour notre clientèle. "On va s'en occuper avec Bailey", j'assure, et réaffirme ainsi que, malgré l'inimitié entre mon frère et moi, lorsqu'il s'agit de travail, nous faisons ce que nous avons à faire.

Jet s'avance vers moi, encore ému par son set. Il ignore Saül d'une façon qui me donne envie de lever les yeux au ciel, mais pas tout de suite, je lui apprendrai plus tard. Il a tout à apprendre. "Satisfait ?" Je hoche de la tête. On reviendra sur les détails plus tard. "Entièrement. Tu peux aller profiter de ta soirée." Et je souris tandis qu'il file vers la terrasse. Ah, la jeunesse. Mais le regard de Saül aussi s'aventure dehors, et ce qu'il y voit semble l'inquiéter. "Je crois qu'il est temps pour nous de rentrer. C'est toujours un plaisir, Sebastian." "Idem." Et je le laisse partir, mais suis du regard les silhouettes dehors qui s'agitent. Je repère assez vite la confrontation entre Jet et Ariane, soupire, et penche la tête sur le côté. Bon. Ca fait partie de mon métier, malheureusement.

"Si tu faisais pas de la merde j'aurais pas réagis comme ça, alors fais pas comme si c'était de ma faute", j'entends, et ils s'embrassent, et je trouve le tout d'une vulgarité... Je jette un oeil à Saül et Elise, et hausse les épaules comme pour vous dire : pardonnez-les, ils ne se contrôlent pas. "On se tire ?" Je souris en m'avançant légèrement. "C'est vrai qu'il se fait tard", et mon regard se pose sur chacun d'entre eux, pour leur intimer avec toute la douceur et la fermeté du monde d'aller finir leur conversation et leurs ébats ailleurs. "Je peux vous appeler un taxi, si vous le souhaitez", j'ajoute, grand seigneur. Je me tourne vers Bailey. "Je ne vais pas tarder, je te dépose ?" On a la suite à prévoir, avec mon frère. L'album, la tournée, et l'approbation de Jet par Saül. J'espère juste que Jet acceptera de partir aussi, car sinon, je crains bien que sans Fitzgerald, la terrasse prendra feu ce soir.

« Tu devrais passer à la maison un soir. Ça ferait plaisir à Jill. » je devrais aussi me tirer d'ici ouais. Y'a un balcon, il donne sur l'autre terrasse d'à-côté, si j'étais une connerie de Spiderman je pourrais facilement m'y jeter sans avoir peur pour mon cou. Anyways, c'est pas mon cou à moi que je veux casser, c'est celui de Jet là.

"Vas te faire foutre"
« Toi de même. »
"t'étais pas obligé de venir si ça te faisait tant chier que ça."
« Si tu réagis comme ça et que je suis venue, j'imagine pas si j'avais pas été là. »
"T'avais pas l'air de te plaindre au buffet."
« Y'avait des frai-. »

« Tout va bien, par ici ? » ah, ahah, ahahah. Nope. T'as pas vu, quand j'ai lancé le briquet d'en-bas de l'immeuble qui n'a rien de celui d'en face? C'est pas mal que lui qui va bien, là, si tu me demandes, Saül. « Tu devrais renter. J'ai encore quelques mains à serrer, et puis je te rejoindrai. » et pendant une seconde, une fraction de chiante de seconde, j'espère que c'est à moi, qu'il l'enlève, le dernier mot. « Je vais te faire appeler un taxi. » « Je peux t'attendre.. » oh, l'ironie qui frappe encore.

Second (millième) round.
"Je fais pas de scène."
« À peine. »

"Si tu faisais pas de la merde j'aurais pas réagis comme ça, alors fais pas comme si c'était de ma faute." je faisais pas de merde, je buvais tranquillement un verre de scotch sur la terrasse avec elle. Verre de scotch qui est dangereusement vide, verre de scotch que je lui tirerais à la gueule à Jet, Jet qui est proche, Jet qui est bien trop proche. “On se tire ?” qu'elles perdent sur mes lèvres, les siennes. « Ouais. » je savais qu'il la poserait, la question. Pour ici, mais pour la tournée surtout.

On se tire? Faudrait.
Et je savais aussi que mon regard dériverait.
Bleu contre bleu.

Sebastian est arrivé je sais même pas d'où ni de comment, ça en devient lassant. "C'est vrai qu'il se fait tard." et dans la catégorie de l'ajout à la conversation absolument inutile qui fait que confirmer qu'on veut juste tous se barrer, il y va fort, Seb. "Je peux vous appeler un taxi, si vous le souhaitez" c'est que le ratio de taxis de Brisbane ce soir va faire le double de son salaire à nous entendre, tous si responsables, enfumés et embrasés, les lèvres encore collées de l'alcool ingéré. Mes lèvres à moi goûtent encore Jet.

Les frères se gèrent, je me gère avec. « Pas besoin de taxi pour moi, je vais marcher. » faut que ça ait du bon, de monopoliser le canapé de Charlie depuis une semaine. Ça implique que j'ai besoin d'air, ça implique que l'un doit impressionner l'autre. Et ça implique que c'est assez pour moi, j'crois.