Peut-être que je ne devrais pas avoir annoncer aux pompiers qu’Adèle a un cancer, peut être que ce n’est pas mon choix de le dire ou non, mais je suis bien trop inquiet pour penser à quoi que ce soit d’autre que la santé de mon amie. Elle sera peut-être en colère contre moi, peut être qu’elle m’en voudra de leur avoir dit, mais à ce moment précis, cela m’importe peu, tout ce que je veux c’est qu’elle aille bien, que l’on s’occupe d’elle correctement, et si il faut que l’on rentre en conflit pour cela alors je le ferais quand même. Je vois bien qu’Adèle relève le regard vers moi et elle tente d’ailleurs encore une fois de s’en échapper, sans avoir à passer par la case hôpital. « Je vais bien, je vais rentrer chez moi. Mes colocs m’attendent… » Je secoue la tête, mais heureusement pour moi, les pompiers ne semblent pas non plus décidé à laissé repartir comme cela. Elle essaye de trouver des excuses pour ne pas avoir à y aller, je le vois bien mais je ne la laisserais pas faire.
Je finis alors par me relever à mon tour et commencer à suivre les pompiers qui embarque la brunette. Je ne compte pas l’abandonner. « t’as qu’à y aller à ma place. » « Crois moi que si je pouvais être malade à ta place, je le prendrais sans soucis. » Adèle ne mérite pas ce cancer, elle qui est si innocente, si pleine de vie. Alors si j’avais pu échanger ma vie alors la sienne, je l’aurais fait sans même y penser deux fois. « T’aurais pu rien dire… ils vont encore me trouver autre chose… » Je m’installe à côté d’elle dans l’ambulance et vient doucement prendre sa main dans la mienne. « Tu peux m’en vouloir, mais ils fallaient qu’ils sachent pour s’occuper correctement de toi. » Je lui adresse un sourire et le camion démarre doucement. « Mais je te laisse pas okay ? Ca va aller je te promet. Je comprends bien que tu ne dois pas être fan des hôpitaux, mais au moins tu n’y seras pas seule. » Je suis le premier à courir à l’opposé des hopitaux et je me doute bien qu’Adèle doit pas mal en voir les murs ces derniers temps. Alors au moins cette fois ci elle ne sera pas seule.
L’hôpital l’effraie plus que de raison. Que l’on puisse lui déceler bien d’autre chose, que sa maladie se propage davantage dans son corps, tout ça, Adèle cherche à le fuir. Parce qu’elle en est effrayée, elle a peur, elle ne souhaite pas comprendre cette vérité. Et quand bien même Matthias est son ami et qu’il ne lui veut que du bien, elle n’a pas appris à taire ses besoins, ses envies. Pas appris à ne pas dire ce qu’elle pense. Mais les pompiers ne l’écoutent guère, et si elle obtempère plus par principe d’une lassitude installée désormais, il n’en reste pas moins qu’elle n’est pas véritablement une envie soudaine de coopérer auprès d’eux. « Crois moi que si je pouvais être malade à ta place, je le prendrais sans soucis. » Elle n’y était pas allé de main morte, et sans doute que ses mots ont dépassés ses pensées. Parce qu’elle n’a rien de méchant Adèle, elle n’en veut pas spécialement à la terre entière, elle a juste peur mais dire à son ami qu’il ferait mieux de prendre sa place, n’était pas si anodin que ça, et elle n’en réalise que face à sa réponse, qui la heurte de bien des façons, alors qu’elle baisse la tête, fronçant les sourcils. Jouant avec ses mains. Avait-elle le droit de lui parler comme ça, alors qu’il ne cherche à faire que son bien ? « Tu sais pas ce que tu dis… » Qu’elle avoue, avec un peu moins de mordant que précédemment, alors que les pompiers se sont un peu éloignés, il ne sait pas Matthias ce que c’est de vivre avec cette épée de Damoclès sur la tête. De ne pas savoir si dans une semaine, trois mois, ou un an elle sera encore là. Il ignore cette souffrance interne. Quoi qu’il en soit, les pompiers reviennent vers eux et la jeune femme n’a guère le choix que de monter à l’arrière du véhicule. « Tu peux m’en vouloir, mais ils fallaient qu’ils sachent pour s’occuper correctement de toi. » Qu’il avoue, avec un sourire aux lèvres alors qu’elle hausse les épaules, si il savait par quoi elle est passe jusque-là, lui aussi ne serait plus sûr de rien… « Personne ne peut rien pour moi Matthias. » Pas qu’elle soit défaitiste ou autre chose, mais fallait bien qu’elle voit les choses en face, « Mais je te laisse pas okay ? Ca va aller je te promet. Je comprends bien que tu ne dois pas être fan des hôpitaux, mais au moins tu n’y seras pas seule. » Elle ose tourner la tête sur le côté, pour le regarder, « Tu m’laisseras pas hein ? » Et elle resserre sa main autour de celle du brun, pensive, le cœur battant, en direction de l’hôpital..
« Tu sais pas ce que tu dis… » me dit Adèle lorsque je lui dis que si je le pouvais j’échangerai nos places sans même y penser à deux fois. Et pourtant, je sais parfaitement ce que je dis. Adèle est jeune, pleine de talent et si je pouvais être sûr de lui sauver la vie en prenant sa place dans la maladie alors je le ferais, sans hésiter, sans même cligner des yeux. Il y a certaines personnes dans ma vie pour lesquelles je ferais énormément, et Adèle en fait partie. Ne voulant cependant pas me disputer avec elle alors qu’elle n’est pas en forme, je choisis de ne pas répondre, de ne pas la contredire. « Personne ne peut rien pour moi Matthias. » Et mon cœur se serre à l’entendre dire cela. Comment peut-elle avoir si peu d’espoir, est ce que le médecin lui a dit quelque chose, est ce qu’il lui a dit qu’elle était condamnée ? « Faut pas que tu perdre espoir Addie. » Je lui adresse un doux sourire et monte dans le camion de l’ambulance avec elle. Je ne vais pas la laisser. « Tu m’laisseras pas hein ? » Je secoue la tête et viens embrasser son front. « Jamais. » Parce que je serais là pour tous les examens médicaux, tous les traitements si elle a besoin que je sois à ses côtés. Parce que je ne compte pas la laisser seule face à cette épreuve que la vie a mit en travers de son chemin. Pourquoi elle d’ailleurs ? Pourquoi une petite jeune de vingt quatre ans qui a encore la vie devant elle. Ce n’est pas juste. « Ca va aller… » que je lui dis alors que l’ambulance se gare sur le parking de l’hôpital. Et comme promis, je reste avec elle, durant les examens, durant les prises de sang, je ne la laisse pas. Jusqu’à ce que je puisse la ramener chez elle, et que je lui fasse même à manger. Elle finit par s’endormir et je lui laisse un petit mot sur sa table basse pour lui dire de m’appeler si elle a besoin.