| Chloé & Amos #1 ► KARMA POLICE |
| | (#)Lun 1 Juin 2020 - 13:48 | |
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KARMA POLICE
Sans l’intervention d’Olivia, j’aurais probablement fini en prison. La justice australienne est particulièrement stricte en ce qui concerne l’alcool au volant et, quoique je ne me suis pas rendu responsable de l’accident qui m’a privé de toute ma mobilité, j’ai écopé de travaux d’intérêt général malgré mon état physique lamentable. Je ne suis pas remis de cette colision. J’ai toujours le bras dans le plâtre et il faudra des semaines avant que ma côte ne soi totalement rétablie. Et, pourtant, l’assistance sociale que j’ai rencontrée, celle chargée de s’assurer de ma bonne volonté et d’évaluer mes chances de récidive – elles sont énormes – n’a pas souhaité attendre avant de me coller au boulot. Brisbane s’active pour la planète en cette période de l’année. La plage artificielle a besoin d’être nettoyée et elle a estimé que je mes deux mains ne me seraient pas utiles pour appuyer sur une pince à déchets et transférer ces derniers dans une poubelle. La peau de vache. Je l’ai détestée aussi sec, mais quel argument aurais-je pu avancer pour ma défense ? Je sais mon problème d’action et je mesure pleinement ma chance d’avoir des relations. Aussi, me suis-je fait violence pour m’armer de toute ma bonne composition pour me transformer en éboueur et rejoindre le lieu du rendez-vous. Je ne suis pas pressé de la revoir, cette jeune femme d’apparence douce qui m’a semblé manquer cruellement d’indulgence. Pour être honnête, il ne me tarde pas non plus de côtoyer ceux qui, comme moi, vivent l’expérience comme une punition – ç’en est une – et ceux trop enjoués qui s’affairent à la tâche en riant, en se jetant des blagues au visage et en espérant que j’y participe. Tout ce monde me tend et active la mécanique du jugement. Je me sens à des kilomètres de leur combat puisque le mien est égoïste et j’ai honte également. J’ai honte de n’avoir aucune intention d’arrêter définitivement de faire passer ma peine à l’aide d’un verre ou l’autre et, dans les pires moments, une bouteille. Rien de ce qui se joue sur cette plage ne me servira de leçon et pourtant, je lui mentirai à la petite brune qui s’avance et qui me hèle. Je ne suis pas le seul à être ici contre mon gré. Pourquoi commence-t-elle par moi ? M’aurait-elle dans le collimateur ? Est-ce lié à une mauvaise expérience ? A-t-elle perdu quelqu’un dans des circonstances identiques, une personne qui n’aurait pas eu autant de chance que moi ? À moins qu’elle ne prenne son boulot un rien trop à cœur à mon goût bien que ça soit honorable. « Que puis-je faire pour vous ? » lui ai-je lancé après l’avoir rejoint sur son coin de sable. « Vous avez décidé d’être clémente et de m’accorder une pause ? »
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| | | | (#)Lun 1 Juin 2020 - 15:36 | |
| Loin d'elle l'idée de jouer la figure d'autorité. Elle sait bien, qu'avec le gobelet de café qu'elle lui apporte et le sourire mutin qu'elle y ajoute, qu'il a tout pour l'avoir mauvaise. Mais ça ne serait pas elle de ne pas essayer tout de même. Et elle sillonne la plage, et elle en salue un, sourit à un autre. Elle est venue pour Amos aujourd'hui, mais elle ne presse rien, bien plus professionnelle que les fossettes creusant ses joues pourraient le sous-entendre. Ses prunelles l'ont repéré à la seconde où elle est arrivée à quelques mètres de lui, sa silhouette qu'il traîne d'un côté à l'autre et ses grognements qu'elle entendrait presque si elle s'en donnait la peine.
Elle est arrêtée dans son élan Cohen, quand il redresse les yeux vers elle, qu'il demande à prime abord ses motifs, ses justifications à elle. « Que puis-je faire pour vous ? » ce serait mentir de dire qu'elle ne dénote pas l'agacement dans la voix de Taylor, ce serait mentir également de dire que ça lui fait ni chaud ni froid. Elle a appris à agir comme si elle portait le plus étanche des masques Chloe, elle ne montre absolument rien de ce qui se trame en elle à qui que ce soit et encore moins aux gens avec qui elle travaille. Pourtant, la moindre teinte d'agressivité même la plus minime l'agresse foncièrement. Elle ravale plutôt, redresse les épaules, tient son regard pendant un long moment. « Vous avez décidé d’être clémente et de m’accorder une pause ? »
« Déjà, tu peux me tutoyer. » qu'elle commence, laissant un sourire en coin tantôt imperceptible tantôt tout de même facile à remarquer se dessiner sur ses lèvres. De sa main droite, elle lui tend le gobelet de café noir qu'elle a pris pour lui au kiosque à proximité, sa main gauche couvant son latté à elle qui vient finir sa course contre ses lèvres. Une gorgée et une autre, elle y va même d'une touche plus personnelle. Il connaît son nom de famille et peut-être même qu'il l'a oublié, elle pallie à la distance d'un « Chloe. » se voulant calme, posé, inclusif aussi. Elle n'est pas là pour le gronder, elle est simplement venue pour s'assurer que tout allait. Que les quelques détails qu'elle a gardés en tête à son sujet n'étaient que des inquiétudes liées à son état la dernière fois où ils ont bien pu parler. Que ce n'était pas du domaine de l'habituel.
Son ton mutin glisse vers une touche bien plus espiègle, quand elle partage un coup d'oeil de plus avec Amos. Elle file la seconde d'après attraper l'un des immenses sacs fournis pour aider au travail. Le lui tenant en gage d'offrir un peu d'aide, elle justifie finalement sa présence d'un innocent « Je passais juste dans le coin. » qu'il pourra ridiculiser autant qu'il le veut. Tout ce qu'elle, elle veut, c'est qu'il souffle un peu.
@Amos Taylor |
| | | | (#)Lun 1 Juin 2020 - 16:08 | |
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KARMA POLICE
Quelque chose ne colle pas dans l’attitude de cette assistante sociale. Lors de notre entretien, elle m’a donné l’impression qu’elle était prête à venger toutes les victimes d’accident de la route lié à un quelconque état d’ivresse – je ne lui aurais pas volontiers rappelé que je n’avais rien provoqué d’ailleurs – et, aujourd’hui, alors qu’elle s’approche avec ses airs de ne pas y toucher, deux cafés à la main et un sourire innocent au coin des lèvres, j’ai l’impression qu’elle nourrit moins d’animosité à mon égard qu’il y a paraît. Suis-je dès lors perdu ? Clairement. Je ne suis pas le dernier des lunatiques – mes souvenirs rythment mes humeurs – mais je suis trop authentique pour comprendre ce genre de paradoxe du comportement. Je suis incapable de décider sur quel pied il convient d’entamer la valse de cette conversation et je me méfie. Je me méfie de son invitation à la tutoyer et à l’appeler par son prénom. Je me méfie de sa délicatesse au point d’hésiter à récupérer d’entre ses doigts le gobelet de café qu’elle me tend et je me méfie de ce que rapportent ces pupilles braquées dans les miennes. Je suis incapable d’y déchiffrer l’ombre d’une explication et, dans ces cas-là, je ne me plie qu’à un seul réflexe : je m’écroue à ce silence entrecoupé par ce que la politesse exige. « Merci. Pour le café. » ai-je donc déclaré alors que la question qui me brûle les lèvres est tout bonnement : pour quoi faire ? Je ne suis pas la seule âme qu’elle a envoyée dans ce bagne et, jusqu’à preuve du contraire, elle n’est pas arrivée chargée d’une cargaison de gobelet. Quant à son excuse, je n’y crois pas et je renoue avec ma verve. « Donc, Madame Chloe Cohen s’ennuie au point d’avoir envie de tuer son temps à ramasser les déchets sur une plage. » me suis-je enquis l’air sceptique et le sourcil soulevé. Mon ton transpire l’ironie, plus encore lorsqu’elle me propose de me saisir du sac poubelle. Est-ce une boutade ? Une façon de me rappeler ce pour quoi je suis là ? Il n’y a pas de sot métier, mais nul ne rêve de faire une carrière dans le domaine des immondices. Pas même moi qui, avant la mort de ma fille, n’avait rien d’un ambitieux. « Et ça va être compliqué pour moi. » Je lui désigne mon plâtre d’un geste du menton et secoue l’autre main occupée par le café gracieusement offert. « Si vous voulez vous montrer sympathique auprès de ceux que vous envoyez ici, il va falloir vous débrouiller toute seule pour porter ça ou attendre que j’aie fini mon café. » Et nul doute que je prendrai tout mon temps pour le savourer si cette pause improvisée n’est pas décomptée de ma peine : j’y touche pour la première fois d’ailleurs. « Et si vous répondiez à ma question ? Ça fait partie de votre job d’envoyer des éclopés. » Je déteste l’appellation. Quiconque s’y serait risqué aurait goûté à ma colère. Sur l’heure, ça m’arrange d’en user si elle peut culpabiliser un peu. « Faire un job aussi difficile.» Il fait chaud et mon plâtre m’incommode. « Et de venir les narguer sur le terrain ? Vous allez ramasser quoi ? Trois papiers de bonbons et puis vous éclipsez ? » Dieu ce qu’elle est belle la citoyenneté, ai-je pensé un rien trop fort : le mépris a tiré mes traits. |
| | | | (#)Lun 1 Juin 2020 - 20:08 | |
| « Merci. Pour le café. » « Y'a pas de quoi. »
Il est bref, elle l'est elle aussi. Ce n'est pas le premier qui arbore ce genre de rictus d'agacement à la présence de la brune, elle ne lui en tiendra jamais rigueur. Parce qu'elle sait bien à quoi on l'associe, qu'elle sait bien que chaque fois qu'on l'implique on l'imagine être la figure d'autorité qui gronde, celle qui pointe les erreurs, qui les met de l'avant, qui les use envers et contre tout. Pourtant, il n'y a pas plus douce qu'elle ; simplement, elle a appris à la dure que plus on lâche du leste, moins on inspire les gens à évoluer. L'un ne va pas sans l'autre selon elle, de toute façon. « Donc, Madame Chloe Cohen s’ennuie au point d’avoir envie de tuer son temps à ramasser les déchets sur une plage. » Amos qui erre et dévie, elle tient son regard sans broncher l'australienne. « J'ai jamais dit que je m'ennuyais. » s'il refuse qu'elle lui prête de mauvaises intentions, il serait tout autant gagnant de faire de même avec elle.
La seconde d'après, la joute reprend, non sans qu'ils se soient chacun octroyé une gorgée de café de plus, un coup d'oeil s'y additionnant d'office. « Si vous voulez vous montrer sympathique auprès de ceux que vous envoyez ici, il va falloir vous débrouiller toute seule pour porter ça ou attendre que j’aie fini mon café. » « Tu. » elle corrige, le sourire aux lèvres, ses fossettes bien ancrées sur ses joues de porcelaine. « Et j'ai tout mon temps. » sa voix est douce, mais n'en reste qu'elle est irrévocable Chloe. Elle ne bougera pas d'ici tant qu'elle aura décidé de rester.
« Et si vous répondiez à ma question ? Ça fait partie de votre job d’envoyer des éclopés. » Amos poursuit, elle arque la nuque au fur et à mesure de ses paroles. « Faire un job aussi difficile. » et il énumère et il grogne, elle, elle reste impassible. « Et de venir les narguer sur le terrain ? Vous allez ramasser quoi ? Trois papiers de bonbons et puis vous éclipsez ? » son plâtre qu'il agite sous ses yeux, elle l'a vu et sait très bien qu'il n'agit qu'à titre de piqure de rappel pour que le Taylor se souvienne de ses gestes aussi longtemps que sa patience ragera d'y être ramenée. « Donne-moi le sac. » alors qu'elle abrège ses souffrances Cohen, qu'elle aide un peu. Son bras se tend, elle attrape le dit sac problématique pour le lui tenir docilement.
« Mon job, c'est de m'assurer que tout aille bien, pour l'après. » qu'elle finit par annoncer, répondant à sa question, précisant sa réponse pour toutes les autres qu'il doit vouloir lui renvoyer à la tête. « L'avant t'appartient, le pendant aussi. » et elle ne juge pas. Elle constate, elle a bien vu son trouble et sa colère, elle connait son boulot par coeur et elle le fait bien, la brune. « C'est juste la suite qui m'importe. » pourtant, elle n'est pas là pour lui mettre ses fautes en travers de la gorge. Il les connait déjà et doit vivre quotidiennement avec. Elle est simplement là pour voir comment il avance maintenant qu'elles l'ont guidées vers un mur qu'il n'a pas pu éviter. « Comment tu vas? » la question qui pique, la quesiton qui grince, c'est à elle de la poser. Ses iris s'accrochent à ceux bleutés d'Amos. « Dis-moi la vérité. Sinon, là c'est vrai que je vais m'ennuyer. » sa voix est douce, mais n'en reste qu'elle est irrévocable Chloe ; elle ne bougera pas d'ici tant qu'elle aura décidé de rester.
@amos taylor |
| | | | (#)Lun 1 Juin 2020 - 21:03 | |
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KARMA POLICE
Elle n’a pas dit qu’elle était venue jusqu’ici pour tuer le temps, pour massacrer l’ennui en s’amusant du sort des autres. Sauf que je suis têtu et que j’ai du mal à lui prêter d’autres intentions. Bien sûr, elle ne m’a pas entièrement antipathique. Tout du moins ne l’est pas autant que j’essaie de le lui faire croire. Chloé Cohen semble être de ses femmes que la fierté a élevées. Mes couteaux tirés avec discourtoisie ? Elle les ignore quand elle ne les attrape pas d’une main pour me les renvoyer en feignant l’innocence. Elle a le minois pour le faire, la jeune femme. Son teint laiteux lui donne l’air d’une poupée de porcelaine et si elle n’appartient pas au genre de femme taillée pour me plaire, je lui reconnais ses talents de théâtreuse et du tempérament. J’en aurais presque soupiré de dépit, lasse de me battre puisque ces derniers temps, j’ai l’impression que mon quotidien est jalonné de défi du genre et je n’ai plus vraiment la force. Sauf que je ne supporte pas sa familiarité. Je ne supporte par qu’elle m’impose de la tutoyer quand je n’en ai pas du tout envie et je ne me gène pas pour l’exprimer. « Vous ! » ai-je donc rétorqué sur le même ton. Ma volonté m’appartient et tout agréable fut l’attention – le café n’est pas obligatoire, il ne doit pas faire partie du contrat – je ne céderai pas. Je m’obstinerai jusqu’à ce qu’elle lâche prise, qu’importe le pronom qu’elle choisira. « Et, je suis curieux de savoir combien de temps vous allez sacrifier votre temps ici. » Je serai d’autant moins enthousiasmé si elle est aussi déterminée qu’elle n’y paraît. Au moins ai-je obtenu réponse à ma question, ai-je songé alors qu’elle récupère le sac poubelle, qu’elle ouvre la marche sur la plage, et qu’elle entreprend de fournir de véritables explications. « Je ne comprends pas pourquoi mon cas vous intéresse tant ? J’ai fait une connerie. J’ai pris le volant que j’étais ivre, mais j’ai expliqué cent fois que c’était une erreur grossière qui ne se reproduira plus. » Fadaise claironnée haut et fort avec aplomb. « Je suis un grand garçon, vous savez. Je sais ce qui est bon pour moi ou non. » Et, soudain, il me pousse une évidence à l’esprit, la graine du doute s’enracine et je m’arrête tout net. « Vous avez reçu mon dossier, c’est ça ? Le dossier des flics… Vous savez que j’ai été militaire. » Et arrêté des suites d’un accident désastreux qui a coûté la vie de mes paires et un gros morceau de ma santé mentale. Des années durant, dormir profondément m’a été interdit. La mort de ma fille n’a fait que réveiller le trouble, mais ces faits-là, elles l’ignorent sans doute. « Je vais bien ! Je n’ai juste pas envie d’être là, c’est tout. » J’ai reporté mon attention vers elle et son regard m’a glacé les sangs. N’y croirait-elle pas une seule seconde que je n’en serais pas surpris. Quelque chose me dit que ce n’est pas de suite que je serai débarrassée d’elle. |
| | | | (#)Mar 2 Juin 2020 - 5:50 | |
| « Et, je suis curieux de savoir combien de temps vous allez sacrifier votre temps ici. » « Le temps qu'il faudra. » « Je ne comprends pas pourquoi mon cas vous intéresse tant ? » « Tous mes cas m'intéressent. » « J’ai fait une connerie. J’ai pris le volant que j’étais ivre, mais j’ai expliqué cent fois que c’était une erreur grossière qui ne se reproduira plus. Je suis un grand garçon, vous savez. Je sais ce qui est bon pour moi ou non. » « La notion de "bon" est relative à chacun. »
Ils se renvoient la balle, ils se renvoient les attaques verbales, ils se renvoient les mots les uns les autres sans jamais ni l'un ni l'autre baisser la garde. Et ça l'énerve ça aussi Chloe, ça l'énerve profondément même si elle est passée maître de ses émotions, qu'elle ne le montrerait pas même sous la torture. Amos n'a pas plus envie qu'elle soit là qu'elle a elle-même envie de se coltiner ses remontrances. Pourtant ses pieds s'ancrent dans le sable et elle tient avec fermeté le sac de ses deux mains, son gobelet trônant sagement au sol en attendant que lui-même la renvoie si vraiment c'est ce qu'il désire.
« Vous avez reçu mon dossier, c’est ça ? Le dossier des flics… Vous savez que j’ai été militaire. » qu'il finit par ajouter, entre un soupir et un râle de plus. « Oui, je sais. » elle n'avait jamais prévu lui mentir, comme elle n'avait jamais prévu lui mettre ce genre d'informations personnelles sous le nez en plein lieu public non plus. « Je vais bien ! Je n’ai juste pas envie d’être là, c’est tout. » pourtant il agit comme si elle était en faute, comme si c'était elle et elle seule qui lui avait brandit son passé comme tant d'autres leviers. « On va s'assurer que les travaux se fassent plus vite, alors. » ses tentatives de la chasser s'additionnent à ses remarques aussi fausses que pressantes. Elle ne fait qu'aider en ramassant maintenant elle-même ses propres déchets pour accélérer le processus.
« Je ne suis pas là pour t'attaquer, Amos. T'as même pas besoin de parler si t'en as pas envie. » qu'elle finira par souffler, quand son silence à lui finit par rendre le sien à elle aussi inconfortable que cruel. |
| | | | (#)Mar 2 Juin 2020 - 11:50 | |
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KARMA POLICE
Le temps qu’il faudra ! Très bien, mais pour obtenir quoi ? Des aveux sur mon état d’esprit ? Des promesses pour l’avenir ? Elle peut s’accrocher au tram, je n’ai pas l’âme d’un menteur. Bien sûr, je pourrais prétendre que je me sens en pleine forme sans honte, c’est une fadaise commune que celle-là. Qui n’a jamais claironné haut et fort qu’il allait parfaitement par politesse ? En revanche, je n’arrêterai pas de boire. J’en suis incapable. Je déteste les conséquences de l’abstinence. Je m’en sens diminué et, quoique heurté par l’accident, j’ai diminué ma consommation de whisky, je ne divorcerai pas de Johnie Walker dans les jours à venir. Elle peut se lancer dans toutes les joutes verbales qu’elle le souhaite, Chloé, je ne céderai pas du terrain. J’y mets un terme en buvant une gorgée de café et, si je la suis alors qu’elle a récupéré les sacs d’entre mes doigts, c’est le fruit de la politesse et de ce que je suis convaincu de ne pas avoir le choix. Elle rédigera sans doute un rapport après cette entrevue faussement improvisée, un qui complétera les informations concernant l’armée, celle qu’elle a consulté au préalable. Elle confirme d’ailleurs et le doute se transforme en certitude. C’est dérangeant qu’elle en sache autant sur moi. Je ne l’ai pas autorisée à pénétrer l’intimité de mes souvenirs et ça m’agace. Ça m’agace autant que j’ai envie d’être de bonne composition afin qu’elle n’alourdisse pas l’ardoise de mon cas. Alors, je puise dans son autorisation de quoi renouer avec mes réflexes : je me tais. Je bois mon café, je le jette à la poubelle, je récupère la pince, je lui abandonne le sac poubelle et je nettoie en silence la place. Dans ma tête, mille questions se bousculent : que sait-elle ? Que contient-il ce feuillet ? Parle-t-il de la mort de Sofia ? Quand je n’y tiens plus, c’est moi qui romps avec mon mutisme. « Il dit quoi, ce dossier ? Vous savez quoi exactement ? » Que je suis victime d’un syndrome post-traumatique, que j’ai vu un psychologue durant un temps, celui désigné par l’armée ? Je doute qu’elle ait pu consulter ces documents-là, mais il n’est pas exclu que la curiosité l’ait menée jusqu’à moi. Ne dit-on pas que les assistants sociaux sont des bonnes âmes ? Qu’elles ont choisi leur métier dans l’espoir de sauver la terre entière ? Me voit-elle comme un quidam auquel il faut tendre la main avant qu’il ne se noie ? « C’est à cause de ça que vous êtes là ? Parce que, jusque là, je ne suis pas convaincu par vos arguments. Parce que ce n'est pas à cause de cet accident que j'ai commencé à boire de temps en temps.» Je plaide le modérément, mais je n'y crois plus moi-même depuis une éternité.
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| | | | (#)Mer 3 Juin 2020 - 15:52 | |
| « Il dit quoi, ce dossier ? Vous savez quoi exactement ? » de son silence, il se braque, il ne sait faire que ça finalement. Chloe en a vu des comme lui, des dizaines de centaines de cas aux mêmes comportements, aux mêmes démons, aux mêmes cassures. Et pourtant à ses yeux, ils sont tous uniques, différents. Ils n'ont pas la même histoire, ils n'ont pas les mêmes brisures, ils n'ont rien en commun même si tout ce qu'elle a bien pu lire sur son dossier, le fameux dossier qu'il ne cesse de ramener, va du pareil au même. « Je ne discute pas de ce genre d'informations en public. » sa vie privée, sa vie personnelle, sa vie à lui, elle le rend évident, logique. Elle en discutera en long et en large avec lui et à son bureau, si c'est vraiment ce qu'il veut savoir. D'office, elle n'insulte pas le Taylor non plus bien entendu ; il sait, qu'elle sait. Elle ne nie pas d'ailleurs, et ça, ça vaut pour toutes les confirmations dont il semble avoir tant besoin.
Elle fait sa besogne Cohen, elle prend part au mouvement d'une conserve et d'une canette à ramasser de plus. Elle s'applique, quitte à passer le reste de sa présence ici à ne faire que ça ; soit. Elle aura été utile à la ville et à la planète, et c'est tout ce qui compte pour elle de toute façon. « C’est à cause de ça que vous êtes là ? Parce que, jusque là, je ne suis pas convaincu par vos arguments. Parce que ce n'est pas à cause de cet accident que j'ai commencé à boire de temps en temps. » lentement, docilement, elle redresse la tête. Ses mèches brunes l'énervent, elles bloquent une partie de son regard, regard qu'elle veut aussi dénué de quelconque émotion négative que possible. Elle n'est certainement pas là pour le prendre avec des pincettes qu'on soit clairs. Elle ne lui en ferait jamais l'affront.
« Je suis là parce que je veux voir le vrai Amos, pas celui dont on parle dans le dossier. » simple, précis. Elle a à coeur de traiter les gens comme des gens, non comme des données, non comme des papiers. Elle veut voir comment il se comporte en société, elle veut voir comment il agit seul et avec les autres. Elle veut voir, tout simplement. « Je suis là pour les bonnes raisons. » est-ce si difficile à comprendre? Oui, bien sûr que ça l'est, pour quelqu'un qui semble vouloir se battre contre le monde entier, quand finalement il est son seul et unique adversaire. « Et parce que j'ai envie de l'être. » contrairement à lui, évidemment. |
| | | | (#)Mer 3 Juin 2020 - 21:21 | |
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J’étais chien méchant quand s’est pointée l’assistante sociale. Et, maintenant, parce que je la sais détentrice de mes secrets honteux, je me radoucis. Je lui mangerais presque dans la main de Chloe si je n’étais pas si fier. Mon orgueil me préserve de grostesque face à cette jeune femme sur laquelle je peine à statuer. Est-elle avec ou contre moi ? Est-elle réellement venue gaspiller son temps par inquiétude à mon égard ou cherche-t-elle à me piéger ? À vérifier que je fais ma besogne, sans geindre, mais avec la tête d’un type condamné au bagne ? J’ai besoin de savoir ce qu’elle a déniché et ça aide à montrer patte blanche. Je lui tends un drapeau dont elle se saisit non pas à l’aide de détail, mais avec correction. “Pas en public“ ai-je répété pour moi-même en ramassant de ma pince un nouveau détritus, un de plus. « Je vois. J'ai compris. Et merci. » Elle sait tout et je lui suis désormais reconnaissant de ne pas en faire l’étalage, ici même, alors que je suis en mauvaise posture, que je n’ai pas envie d’être là, que je suis un supplicié de la justice. Je l’ai cherché bien sûr. Je connais les lois de mon pays. Je sais les risques de prendre le volant en étant ivre. J’ai songé, comme tous les imbéciles, que ça n’arrivait qu’aux autres et voilà où j’en suis. Je suis vidé, perclus par la peine, assommé par mes erreurs, accablé par la douleur physique. J’ai l’impression d’avoir cent ans d’âge et je n’ai plus la force de lutter. Elle veut le vrai Amos ? Très bien. Elle le rencontrera, mais elle ne l’aimera. Il la touchera sans doute. Il lui fera de la peine certainement. Elle nourrira à son égard de la pitié et, en conséquence, il la détestera à son tour. « Je ne sais même pas qui il est. » Il s’est perdu entre le deuil et la culpabilité. Il reparaît en présence de Raelyn. Sans elle, il oscille entre la morosité et le désagréable. « Mais je ne suis pas malheureux pour autant. » J’allais mieux avant que ma vie ne dégringole jusqu’au fond du ravin. « Et j’ai l’impression que c’est l’image que je renvoie parce que pour le moment, tout le monde semble vouloir m’aider. Comme si j’étais un cas désespéré. » Mes lèvres se sont étirées dans un sourire un rien plus large, le premier. J’ai jeté mon gobelet vide dans mon grand sac poubelle tenu par Chloe et j’ai adressé un signe au coordinateur de ce monde affairé à la tâche. « Très bien, Chloe. Je t’écoute. Que veux-tu savoir exactement ? » Si j’ai conscience d’être un alcoolique ? Assurément. Est-ce avouable cependant ? Je n’en crois rien. C’est une professionnelle, pas ma meilleure copine.
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| | | | (#)Ven 5 Juin 2020 - 1:13 | |
| Le gronder ne sert à rien, faire l'étalage de ses erreurs ne rendra la scène que plus horrible encore. Elle ne torture pas Chloe, elle ne se réjouit pas du malheur d'autrui et plus encore, elle est incapable de concevoir qu'on puisse penser qu'elle fait son travail pour juger quiconque se retrouve face à elle. Son écoute reste la seule valeur sur laquelle elle mise toujours, il finira simplement par le découvrir au fur et à mesure de la conversation qui se met doucement en place entre eux deux.
« Je ne sais même pas qui il est. » il ne le remarquera pas, il ne le verra pas non plus, elle cache tout et ravale autant, mais son coeur se brise de l'entendre dire une telle chose. Oh, qu'elle comprend, la brune. Elle qui croyait toute sa vie aspirer à quelque chose, à une famille, à un mariage, à une totalité de diktats qu'on lui avait endoctrinés si profondément que rien d'autre ne faisait suffisamment de sens pour qu'elle se sente interpellée. Puis, elle a tout cassé, puis elle s'est perdue. À peine aujourd'hui elle se retrouve. « Mais je ne suis pas malheureux pour autant. » elle aimerait le croire. Elle aimerait faire fi des démons qui percent son regard bleuté, ses prunelles d'océan qui restent éternellement voilées. « Et j’ai l’impression que c’est l’image que je renvoie parce que pour le moment, tout le monde semble vouloir m’aider. Comme si j’étais un cas désespéré. » le ressenti qu'il a en travers de la gorge la pique Chloe, l'agresse. Elle n'a jamais voulu qu'il se sente ainsi avec elle, se jure silencieusement de faire tout pour que l'impression qu'elle lui donne et que le monde entier relie avec elle s'envole aussi vite. « Très bien, Chloe. Je t’écoute. Que veux-tu savoir exactement ? »
« Qu'est-ce qu'il aimait? » elle commence fort, elle le sait l'australienne. La question est ouverte pourtant, il peut parler d'un détail qu'il appréciait autant que d'un concept que lui seul captait. Chaque réponse est bonne à prendre, tant qu'il en amène une. « Nomme-moi une de ses qualités. » plus facile encore. « Et un de ses défauts. » au véritable Amos. À celui dont il se rappelle tout du moins, à celui qui se brouille dans ses souvenirs d'avant qui semblent être tous aussi brouillés autant soient-ils.
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| | | | (#)Ven 5 Juin 2020 - 20:20 | |
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KARMA POLICE
La question est rude. Beaucoup trop pour moi. La seule réponse qui me viendrait d’instinct serait le prénom de ma fille. Alors, je me tais. Je refuse de parler d’elle. Pas tant qu’elle soit un sujet tabou – elle l’est – mais parce que ma vie semble partir à vau-l’eau, que ma barque chavire et que j’ai l’impression d’être impuissant à retenir la poisse. Elle est tombée amoureuse de moi, la complice du destin. J’ai le sentiment d’accumuler les gouailles et je ne saurai pas me détacher comme j’ai si bien appris à le faire. Alors, je ne pipe mot. Je fixe le sable, ramasse les déchets parsemés autour de moi – je n’aurais jamais cru qu’il y en aurait autant – et je réfléchis. Je regrette de l’avoir invité à gratter le vernis qui protège ma personnalité. Je ne suis pas taillé pour ce genre de conversation. Je n’ai pas envie de la mener avec une presque-inconnue non plus. Je ne sais même pas si j’aurais la force de m’entretenir de ces détails avec Raelyn. Moins encore avec elle en réalité. J’ai confiance en elle, mais j’aurais peur de la perdre. J’aurais peur qu’elle me juge pleutre, poltron, trop cassé. Je redouterais qu’elle me regarde avec des yeux différents quoiqu’elle ait déjà prétendu le contraire à maintes reprises. Je la crois dur comme fer. Je la sais stable. Je manque de confiance en moi. Sarah l’a piétiné, mon amour-propre. Elle a recommencé et je ne sais plus quoi dire. « Je ne sais plus. » ai-je fini à voix basse. Elle est blanche d’émotion, neutre, mais l’assertion n’en est que plus tranchante. « Et ça n’a plus grande importance. » Le destin malsain ne me rendra pas ce qu’il m’a volé, tragiquement arraché. Ce que j’aimais ne compte plus. Seul ce qui m’importe aujourd’hui a de l’intérêt. La question suivante est plus facile et, cette fois, j’ai relevé la tête vers Chloe l’audacieuse, Chloe qui paraît déterminée à me pousser dans mes retranchements. Pourquoi ? Pour son dossier ? Pour me rendre mon permis de conduire au terme de cette sentence ? « Je suis franc. » Je lui ai souri avec amertume, car c’est vrai en général. Ma franchise est un trait de ma personnalité. Je ne faillis jamais à part cette malheureuse fois à propos de Sarah. « Et je suis franc. C’est tout autant un défaut. » Serais-je en train d’échanger avec une amie que je lui aurais retourné la question. Au lieu de ça, j’ajoute : « La pizza. Il adorait la pizza. Et ça n’a pas beaucoup changé. » Je lui ai souri. La grimace est moins vide. C’est une semi-plaisanterie. Je crois que j’ai besoin que la conversation reprenne un tour plus léger. « Et plonger. » Et, je ne l’ai plus jamais fait. J’y songé. J’ai essayé. Mais, je n’ai pas osé. « Vous avez déjà plongé ? » Une minute de battement s'impose. « La sensation est incroyable.» Elle est proche de ce que pourrait être la liberté, la vraie.
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| | | | (#)Ven 5 Juin 2020 - 21:33 | |
| « Je ne sais plus. » la réponse ne l'étonne pas, quoi qu'elle la blesse. Elle prend les choses personnelles Chloe, bien plus qu'elle ne le montre. Elle ressent beaucoup et fort, emphatique qui le masque parfaitement pour elle-même, un peu moins pour les autres. « Et ça n’a plus grande importance. » « Ça en a pour moi. » avoir le dernier mot ne sert à rien, c'est probablement pour cela que sa voix est inaudible, qu'il aura tous les honneurs s'il entend quoi que ce soit.
Il pourrait nier. Il pourrait lui tourner le dos, il pourrait partir de son côté et la laisser ramasser du sien. La chorégraphie a été vue et revue, faite et refaite. « Je suis franc. » mais il parle Amos, il ajoute même un sourire au tableau, et même si le dit sourire semble lui coûter un trait de plus, n'en reste que oui, il a parlé. Et que c'est tout ce qu'elle désirait. « Et je suis franc. C’est tout autant un défaut. » oh, le débat qu'il lance sans même s'en rendre compte. La franchise qu'elle a en travers de la gorge la gamine, la fourbe, celle qui est si honnête et si authentique avec les autres et avec le monde en entier - mais qui s'est si longtemps menti à elle-même. « Ça l'est aux yeux de ceux qui n'ont pas fait la paix avec la vérité. » elle hausse de l'épaule, attrape un déchet et un autre, relativise comme elle désensibilise.
L'ambiance est douce désormais, elle sent le changement monter sans même l'avoir demandé. « La pizza. Il adorait la pizza. Et ça n’a pas beaucoup changé. » « Il avait bon goût, alors. » il parle au passé, il parle au présent, il navigue entre les deux et elle le suit tout autant. « Et le café? Il aimait le café? » elle prend une chance aussi Chloe. Le gobelet qu'il a déjà fini depuis belle lurette, amende honorable qu'elle a pointé au tout début quand déjà il se braquait. Pourtant, là, il ne se braque plus. Elle reviendra peut-être une prochaine fois, lui tenir compagnie sur cette plage, lui parler ou pas. Le silence fait du bien parfois.
« Et plonger. » son sourcil se hausse, à l'australienne. Elle la voit la passion dans son regard, s'y raccroche de toutes ses forces tant elle lui semble enfouie. « Vous avez déjà plongé ? La sensation est incroyable. » sa tête hoche de la négative, ses mots précisent. « Pas encore. » elle n'y voit pas d'invitation subtile ni de demande camouflée, lui laisse toute la distance dont il a sans doute besoin. « J'ai fait un peu de snorkeling par contre. » rien de bien phénoménal ni de comparable, mais elle tâte doucement.
« Ça remonte à quand, la dernière fois? » La dernière fois, que tu as plongé? La dernière fois, que tu t'es senti comme ça? |
| | | | (#)Sam 6 Juin 2020 - 14:09 | |
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KARMA POLICE
Elle chuchote… les mots ne parviennent pas à mes oreilles et ça m’intrigue ? Que dit-elle ? Que pense-t-elle ? Que je sus pathétique ? Que c’est dommage d’en être arrivé là ? Que je suis faible d’avoir abandonné, un jour, la voie de la raison ou de la prudence ? Et que cherche-t-elle ? M’aider ? Me soutenir ? Me sauver de moi-même ? Et si ma vie me convenait en l’état ? Y songe-t-elle ? Ne sait-elle donc pas qu’on ne peut secourir que celui qui souhaite s’en sortir ? Je ne sais pas ce que je veux ! En bavassant avec elle, en portant haut l’étendard de la paix afin qu’elle ne me prive pas de mon permis trop longtemps, je lui fais perdre son temps, à Chloe. Mais, ai-je d’autres choix que celui de l’abnégation ? Je n’ai pas envie qu’elle ajoute à son rapport que c’est terminé, que je suis une cause perdue désormais. C’est faux ! Raelyn m’a démontré qu’il y avait encore du bon en moi. Elle m’a prouvé qu’au-delà de ma caverne se tenait un monde tel une pomme qui n’attend qu’à être croqué. Le processus est simplement lent parce qu’il dépend de ma vengeance, celle que je n’ai pas le droit d’évoquer sous peine d’être qualifié de fou. Je tais donc ma rancœur contre la Terre entière – en particulier Strange néanmoins – et je babille pizza et café. « Ouais. Il aime ça aussi. C’est vrai. » Et le sien est tombé à pic : j’avais besoin d’un coup de bol. « Chloe a eu de l’instinct, donc. » ai-je plaisanté à la troisième personne. Ça me permet de me détacher de l’objet de cet entretien : moi ! Je me désolidarise de mes propres émotions. Je n’aime pas déduire de son assertion que si je me mens si souvent à moi-même, c’est de vivre encore dans le déni de la vérité. Alors, je la balaie et reviens à la simplicité : ce qui m’a animé durant des années. « C’est sympa. Le snorkelling. Ça permet déjà de s’en mettre plein les yeux, mais ce n’est pas pour ça qu’il aimait plonger. » Mais parce que le néant semble engloutir tout ce qui chagrine ou qui fait peur au fond de l’océan. Il noie l’entièreté de nos problèmes. « Longtemps. Il a essayé il n’y a pas longtemps, mais… il n’a pas pu. » J’ai regardé le matos tout neuf. Je me suis préparé, mais je suis resté sur place. « Pourtant, il aimerait bien. Il y a quelqu’un, en particulier, à qui j’aimerais bien montrer tout ça. » Quelqu’un que j’aurais envie d’immerger dans le monde qui fut le mien. « Peut-être. Un jour. Si ça s’arrange entre elle et moi. » ai-je admis sans trop comprendre ce qui a motivé l’allusion. Le manque sans doute. Le manque et l’absence. L’absence et la peur de la perdre.
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| | | | (#)Sam 13 Juin 2020 - 19:46 | |
| « Chloe a eu de l’instinct, donc. » Chloe n'a que ça, de l'instinct.
Elle fonctionne aux impressions et aux pressentis, elle se laisse guider par les impulsions qui suivent, mais jamais ne se ressemblent. Ça, et le fait qu'elle l'a remarqué le café qu'il a pris la dernière fois où ils se sont vus. Celui qu'il portait à ses lèvres chaque fois où elle lui posait une question, se grattant quelques secondes supplémentaires de rébellion avant de lui répondre. Elle s'en rappelle de ça, elle se rappelle de tous les détails. Elle se rappelle de tout.
S'il s'ouvre, elle s'ouvre elle aussi. Elle est avare de détails et de vie personnelle Cohen, rien ne s'échappe de ses lèvres sans qu'elle ne le calcule. Encore plus avec lui. « C’est sympa. Le snorkelling. Ça permet déjà de s’en mettre plein les yeux, mais ce n’est pas pour ça qu’il aimait plonger. » et il tient bon, avec sa troisième personne. Laisser le moindrement de distance entre eux deux et entre l'ancien Amos lui va à la brune. Il ne lui a jamais adressé autant de mots que maintenant et ce serait mentir de dire qu'elle ne s'en réjouit pas bien au contraire. Elle jubile dans ses silences. « Longtemps. Il a essayé il n’y a pas longtemps, mais… il n’a pas pu. » elle n'hoche pas de la tête, elle écoute pourtant. Ses yeux d'océan n'ont pas quitté leurs homologues, elle s'amuse sans laisser la moindre faille se dessiner sur son portrait de porcelaine à l'imaginer, avant. Avant qu'il ne s'autorise plus aucun après. « Pourtant, il aimerait bien. Il y a quelqu’un, en particulier, à qui j’aimerais bien montrer tout ça. » la pointe de curiosité qu'il divulgue, le plus finement dont il le peut. « Peut-être. Un jour. Si ça s’arrange entre elle et moi. »
Et ça l'agace, ça. Le froncement, indicible, entre les sourcils du Taylor. Celui qu'elle associe à la fameuse elle. Un point négatif et un point qui coince, un point qui ajoute du sombre à un tableau déjà en teintes trop ombrées au goût de l'australienne. Il ne l'a jamais mentionnée, elle, et voilà que Chloe s'en voudrait presque d'avoir manqué à la tâche d'en savoir plus sur celle qui semblerait brouiller autant les cartes que le regard d'Amos. À quel point est-elle en cause, dans toute son histoire à lui? « Pourquoi est-ce qu'il aimait plonger? » qu'elle finira par demander, doucement, à tâtons, la seconde d'après. « Tu ne l'as pas précisé. » non, parce qu'il était trop occupé à avoir son coeur brisé. Par la nouvelle variable que Chloe a parfaitement enregistré, sans en dévoiler le moindre indice. |
| | | | (#)Dim 14 Juin 2020 - 2:10 | |
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KARMA POLICE
Ce n’est pas preuve de prétention si j’utilise la troisième personne du singulier pour parler de moi. Je ne le suis pas. J’ai cessé de m’aimer le jour où Sofia est décédée faute à la culpabilité entérinée, plus tard, par Sofia. J’ai cessé d’apprécier l’homme que j’ai été de m’être senti englouti par le vide à mes pieds. J’ai chuté, lourdement, et celui que je suis aujourd’hui, je l’appréhende encore. Je l’apprivoise au jour le jour. Alors, ce choix de mettre dans la distance entre mon passé est mon présent n’induit que le détachement et ça me va. Ça me convient parce qu’elle veut savoir, l’assistante sociale, et que je sais que si je ne saupoudre pas ma morosité de bonne volonté, elle creusera encore et toujours. Elle ne lâchera jamais prise. Je peux le déchiffrer dans son regard planté dans le mien. Il transpire la détermination et somme toute un brin de curiosité aussi. Est-elle malsaine ? J’en doute ! Je la repère d’instinct, celle-là, et je ne lis ni pitié ni jubilation dans l’attitude de Cohen. Alors, je parle. Je me confie sur mes passions d’hier et j’évoque mes amours d’aujourd’hui. Cette allusion, je l’ai regrettée. Je n’ai pas envie de rendre compte à une étrangère ô combien j’ai été con de cacher à Raelyn que je n’étais pas divorcé. J’ai honte de ma lâcheté également et je pousse dès lors un soupir discret de soulagement qu’elle ne relève pas… ou pas encore. « Pourquoi ? » ai-je répété en ramassant un déchet traînant à mes pieds. La réponse est si vaste que j’en hausse les épaules. Par où commencer ? Comment expliquer aux néophytes ce qu’on ressent lorsqu’on se coupe du monde d’en haut pour se mêler à celui d’en bas, celui que dissimule les océans, celui que l’homme n’a pas fini d’explorer ? D’autant qu’il fait froid sous l’eau et c’est noir aussi. N’est-ce pas la couleur du désespoir ? C’est ce que la légende raconte, mais c’est à cause de ce dernier que je n’ai plus jamais plongé. Le désespoir d’avoir failli à ma tâche envers mes frères d’armes, d’avoir survécu quand tant d’autres sont morts. « Est-ce que tu as déjà eu l’impression que certains endroit te débarrassaient de tous tes soucis du quotidien ? Que là-bas, plus rien ne t’atteint ? Que les responsabilités sont loin ? » me suis-je enquis conscient que je ne suis pas doué pour les métaphores. Mais, comparer est le seul moyen d’éclaircir ce qui me manque tant dans la plongée et ce qui me plaisait tant dans l’acte en lui-même. « L’eau a cet effet sur moi. Le sel sur ma bouche. » Je n’ai jamais crains de boire la tasse. « Et, quand tu vas voir ce qui se passe là-dessous, tu as l’impression d’avoir trouvé un secret que la majorité du monde ignore et tout s’efface, parce que c’est plus grand que tout le reste, parce que tu es tellement petit quand tu plonges, parce que tes emmerdes sont moins lourdes à porter. » Tu ne sais pas si tu reviendras d’ailleurs. Tu doutes même d’avoir envie de remonter. « Et des emmerdes, on en a tous. » Et, quelles sont les tiennes, Chloé ? Qu’est-ce qui t’a poussé sur cette voie de travailleuse social ? Quel événement t’aura abîmé pour que tu aies besoins d’aider ton prochain, même celui qui refusera ton soutien ? « On en a tous. » ai-je réitéré mes yeux bleus cadenassés aux siens comme une invitation à rendre cet échange plus équitable.
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| | | | | | | | Chloé & Amos #1 ► KARMA POLICE |
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