| WAYNE & AMOS ► THANK YOU CONSEQUENCE |
| | (#)Mer 3 Juin 2020 - 16:38 | |
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Thank you consequence
Wayne Petterson @" Wayne Petterson"
J’aimerais prétendre que je n’y pense jamais, à cet accident. Je souhaiterais également pouvoir avancer que je ne passe pas des soirées entières à lutter contre l’appel de la boisson et à reconstituer ce que je me souviens des faits. Malheureusement, je me mentirais à moi-même et je suis fatigué de m’endormir pour persister à ne pas assumer mon addiction. Elle est là, bien réelle. L’alcool est le serpent qui nargue Eve au pied de l’arbre du savoir et moi, je suis l’idiot qui croque dans la pomme interdite. Je lève le coude depuis si longtemps que j’ai perdu le compte des années et, le plus triste, c’est que je ne suis pas certain de trouver la force d’arrêter. Je suis entouré, pourtant. J’ai même autour de moi quelques étrangers prêts à se dévouer à ma cause, prêts à me soutenir tout au long du chemin tortueux de la rédemption. Mais, moi, le suis-je vraiment ? Je fais des efforts évidemment. Je digère mal d’avoir été absent depuis le lieu de la collision jusqu’à l’hôpital. Cette espèce de black-out m’oppresse parce qu’il fait écho à mes nuits d’ivresse, celle où je bois pour oublier que j’ai perdu ma fille, que ma vie a volé en éclats et que je n’ai pas réussi à préserver ce qu’il me restait de beau, ce que j’ai construit de grand, récemment, avec Raelyn. Je me déteste d’être un homme de plus en plus faible et à tout niveau. Mais, j’ai l’impression que mon propre destin m’échappe, plus encore dès lors que quelqu’un de bienveillant ait disposé de moi sans moi. Qui m’a sorti de la bagnole ? Qui a appelé les secours ? D’où venait-elle cette voix qui m’intimait de ne rien lâcher, que ça n’avait pas l’air si grave ? Au vu de ce qu’il reste des vêtements portés le soir de l’événement, je m’imagine aisément couvert de sang. Et pourtant, l’altruiste ne s’est pas démonté. Il a tenu bon et, quelquefois, avant de m’endormir – quand j’y arrive – alors qu’à défaut d’être pleinement heureux sans elle, je célèbre la joie d’être en vie et la chance qui m’est offerte de réparer mes fautes, je me dis qu’il serait bon de la remercier cette belle âme. Certes, elle a versé un témoignage au dossier, mais je n’y ai pas accès. Mon taux de whisky dans le sang m’a mis dans la position du coupable idéal. Je suis jugé par l’assureur au téléphone et je n’ose imaginer par quel mépris je serais accueilli si je me pointais au commissariat. Alors, je chasse ces idées saugrenues de mon esprit malade et reconnaissant. Je les range dans la case du fait de l’ennui puisque sans lui, je songerais moins souvent à cette catastrophe sur mon quotidien.
L’horloge digitale de mon four affiche en rouge 14h00 et je n’ai rien avalé de liquide ou de solide. Si j’en suis fier ? Pas tout à fait ! Je suis debout depuis une demi-heure que j’ai utilisée pour me laver, m’habiller et consulter chaque minute passant l’écran de mon téléphone. Rien ! Pas un message. Une journée de plus sans elle et, je sais que je vais lâcher prise tôt ou tard. Je sais que ces dernières vingt-quatre d’abstinent sont le fruit de ma discussion avec Greg, mais que ça ne durera pas, pas si je ne peux pas la voir et lui parler. Ma tête prise dans ma seule main valide, j’arrive à peine à me convaincre de ne pas la brusquer et, tandis que je renonce à ma volonté, que je me lève pour ramasser mon paquet de cigarettes, mon briquet quand mes gestes sont interrompus d’un bref coup contre ma porte. Qui est-ce ? Sarah ? Impossible. C’est bien trop timide, ça ne colle pas à sa rage. Alors qui ? Curieux, j’ai redéposé mes effets sur la table et j’ai ouvert sur un jeune homme qui m’est totalement étranger et qui aurait pu être mon fils tant il a l'air d'un oisillon sorti de son oeuf. « Je suis désolé, mais vous devez faire erreur. Je ne loue pas mon bateau et je n’ai pas de liquide sur moi. » ai-je avancé dans l’unique but de désamorcer son démarchage économique. Pour quelles autres raisons seraient-ils là ?
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| | | | (#)Mer 3 Juin 2020 - 22:02 | |
| L'accident -un autre, pas le sien- l'avait pris par surprise. Et depuis il n'arrêtait pas d'y penser. C'était le crissement de pneus qui l'avait fait se retourner. Un bruit qu'il pensait bizarrement ne plus jamais avoir à entendre à nouveau, et qui depuis ne quittait pas ses oreilles. Peut-être parce qu'il ne savait pas ce qu'il était advenu de l'homme sorti de la carcasse de ce qui avait été une voiture ? Il avait bien sûr cherché à se renseigner à l'hôpital mais il s'était trouvé face au secret médical, et c'était tout juste si on lui avait dit que l'homme était ressorti de l'établissement sur ses deux jambes. Et que parce qu'il avait fait valoir son propre accident et les séquelles bien visibles qui en avait découlées. Au moins, cet homme qu'il avait à toutes fins cherché à rassurer alors qu'il appelait les secours, était vivant et apparemment en bonne santé. Il s'en était donc contenté, pour quelques jours, avant que d'autres questions ne viennent faire écho à son propre vécu. Il avait donc cherché à retrouver sa trace et avait en toute logique été voir la police où il avait eu la chance de retomber sur l'agent ayant géré l'accident. Celui-ci le reconnaissant aussitôt, il obtint facilement le nom et l'adresse d'Amos Taylor au milieu des remerciements pour s'être montré un citoyen modèle, pour avoir porté secours à autrui et des tas d'autres choses dont il ne pensait pas mériter un instant. Mais visiblement Steve O'Donnell avait des problèmes avec son fils qui avait à peu près son âge et qui était "bon à rien si ce n'est fumer et picoler..." Compatir à son sort lui apporta une autre flopée de louanges guère plus méritées que les autres, et il s'enfuit du poste de police avant de voir une statue élevée à son nom !
Donc Amos Taylor au 613 maine road... Il y était et il se demandait bien comment il allait se présenter et surtout expliquer sa présence ici. Parce dire à un total inconnu Je voulais vous voir pour que les crissements de pneus que j'ai dans la tête et dans les oreilles s'arrêtent... Ça faisait tout de même un peu échappé de l'asile ! Il n'aurait plus manqué que celui-ci apprenne qu'il ait réellement été interné pendant pas loin d'un an pour voir Steve O'Donnell s'amener mais cette fois-ci, sans louanges et avec des menottes... Il n'avait donc strictement aucune idée de comment il allait amener les choses mais il se retrouva à frapper timidement à la porte parce qu'un couple passait par le couloir. Et que ça faisait définitivement bizarre de rester planté devant une porte fermée. Il ne s'était pas attendu à ce que ce soit la porte d'à côté qui s'ouvre sur une voisine qui le renvoya vers un bateau puisqu'il s'agissait ici d'une adresse postale. Un peu perdu, il suivit les directives données pour se retrouver bel et bien sur un bateau à frapper tout aussi timidement sur la porte menant à la cabine de celui-ci.
Et là, il le reconnu immédiatement. C'était bien cet homme et qui était bien aussi, sur ses deux jambes. Alors il ne le connaissait certes pas mais un poids de dix mille tonnes lui fut enlevé de ses épaules alors qu'il n'écoutait que d'une oreille distraite ce qu'il lui racontait. Il lui fallut donc quelques secondes pour réaliser qu'Amos attendait une réaction quelconque alors qu'il était toujours à le fixer, un soulagement sans nom inscrit sur ses traits. "Ah ! Euh... Non, c'est pas ça, je... Je suis content de voir que vous allez bien finalement ! A l'hôpital, ils ont rien voulu me dire à part que vous étiez sorti sur vos deux jambes. Et juste parce qu'ils ont vu mes béquilles et que j'ai parlé de mon propre accident. Je suis désolé de vous avoir dérangé pour ça, je sais bien que c'était idiot mais... J'avais besoin de savoir." Il s'entendait babiller et c'était juste l'horreur ! Il se tut aussi soudainement qu'il s'était mis à parler et tenta un sourire qui ressemblait bien plus à une grimace qu'à autre chose. "Euh... Je vous souhaite de passer une bonne journée Monsieur Taylor..." Voilà, un au revoir et il allait reprendre la direction du quai, c'était le mieux. Il avait vu maintenant et avec un peu de chance, il n'entendrait plus les crissements de pneus... |
| | | | (#)Jeu 4 Juin 2020 - 18:49 | |
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Wayne Petterson @" Wayne Petterson"
En ouvrant la porte, je n’ai pas distingué que le jeune garçon au visage de poupon tenait fermement des béquilles entre ses mains. Je n’ai pas non plus compris son silence dès lors que j’ai rencardé en veillant ne pas me montrer trop désagréable. Et, ce qui m’étonna sans doute le plus, c’est que je n’ai pas, aussitôt parlé, refermé le rempart de bois entre ma main droite. J’ai attendu, comme un con. Quoi ? Je ne sais pas. Pourquoi ? Je ne me l’explique pas non plus. Mais, le résultat n’y change pas grand-chose. J’étais tout disposé à l’écouter lorsqu’elle ouvert la bouche. J’étais prêt à entendre qu’il était content de me voir en vie et heureux de recevoir de mes nouvelles. A ce stade, deux options se sont imposées à moi. La première : il est à l’origine de l’accident qui m’a valu ce plâtre, de la douleur, une presque-rupture, la visite de ma femme, la dispute avec cette dernière, des heures de travaux d’intérêt général et quelques conversations dont je me serais volontiers passé. (autrement dit, vaut mieux qu’il s’en aille). La seconde : il est celui qui s’est arrêté sur l’accident, qui a pris son téléphone et qui appelé les urgences, celui qui, dans l’éventualité où l’accident aurait été plus grave, m’aurait littéralement sauvé la vie. Nous n’en sommes pas là, mais nul ne décède des conséquences de fracture. Dès lors, s’il répond à la deuxième hypothèse, ne mériterait-il pas ma gratitude ? Et, dans l’absolu, n’est-il pas bon que je lui témoigne le bénéfice du doute au lieu de considérer que ses trépieds le classe directement dans la première catégorie. Néanmoins méfiant, je l’observe. Je cherche dans son discours de quoi appuyer l’une ou l’autre de mes théories. Il est allé à l’hôpital, a demandé des renseignements. Mais, pourquoi ? A cause de sa conscience ? Parce qu’il nourrit des remords ? Les infirmières ont été attendries par ses bâtons d’assistance. Très bien, mais sont-elles la conséquence de sa propre distraction ? Quel âge a-t-il ? Conduit-il ? A-t-il seulement le permis de conduire ? Il m’intrigue, ce gosse. Je n’arrive pas à saisir ses motivations à revenir pour repartir aussitôt. Dès lors, après avoir hoché de la tête lorsqu’il signifia prendre congé, c’est moi qui l’ai hélé. « Hey, petit, ton accident, c’est le même que le mien ou c’est un autre ? » Je lance la balle à la volée et je suis persuadé qu’il l’attrapera sans qu’elle ne fasse un rebond. « Tu devrais rentrer. Boire un café. Ou autre chose. Qui que tu sois. » Dans un cas comme dans l’autre, nous aurons des choses à nous dire. Des remerciements ou des brimades. Des explications ou des excuses. A voir et je suis curieux. Je l’ai toujours été et force est d’admettre que Raelyn me sort peu à peu de ma caverne.
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| | | | (#)Ven 5 Juin 2020 - 7:03 | |
| Ça avait été un petit peu la chasse au trésor pour parvenir jusqu'ici. Un sacré périple même allant de l'hôpital, au poste de police, jusqu'à un appartement vide où la voisine lui avait indiqué ce bateau. C'est que pour un peu, il se serait presque attendu à devoir aller encore ailleurs ! Ce Amos Taylor était donc du genre difficile à dénicher, mais il y était finalement parvenu. Comme quoi avec un peu de persévérance, on arrivait à tout. Même à se trouver assez bête à babiller des choses sans queue, ni tête, pour tenter d'expliquer la présence d'un total inconnu venu frapper à votre porte de bateau pour prendre de vos nouvelles... Il y avait de quoi en effet être regardé de cette façon-là. Il fit donc la seule chose qui lui passa à l'esprit à cet instant-là, il prit congé pour s'éloigner très vite d'ici. Après tout, Amos se trouvait effectivement sur ses deux jambes et allait visiblement bien. Ou pas trop mal physiquement parlant. Après pour le mental, il n'en savait trop rien mais il supposait qu'on avait dû lui donner à lui aussi ce qu'il fallait pour éviter -dans la mesure du possible, nul n'étant tenu aux miracles- les cauchemars.
Il allait donc s'éloigner en regrettant de ne pas pouvoir gambader comme un lapin, ne serait-ce que pour monter et descendre de ce bateau -on avait déjà vu plus pratique, surtout avec des béquilles !- lorsqu'il fut arrêté net par une drôle de question. Quel accident ? Si c'était le sien ou un autre ? Il devait vraiment répondre à ça ?! Apparemment, oui. "Lorsqu'on sait que j'ai eu trois opérations avec attente de consolidation de l'os avant une rééducation de plus d'un an à chaque fois, sans compter les semaines en coma artificiel dont j'ai perdu le compte forcément, un internement de presque un an et les séjours d'éducation thérapeutique au diabète, je vois pas trop comment ça pourrait être votre accident..." Parce qu'il aurait manqué quelques années dans le compte ! Il rajouta d'ailleurs comme on féliciterait quelqu'un d'un exploit quelconque. "Mais c'est bien que vous n'ayez pas à passer par tout ça ! Vous ne sembliez pas trop blessé dans la voiture mais il y avait quand même du sang..." Ce qui n'avait pas été sans lui rappeler celui de son père tombant goutte-à-goutte sur lui. Et qui s'écoulait à nouveau sur lui dans son sommeil, nuit après nuit dès que les somnifères perdaient en efficacité.
Se trouvant invité, il accepta alors qu'il déclinait son identité parce qu'effectivement dans tout son discours, il n'avait pas trouvé le moyen de se présenter ! "Je veux bien un café, merci. Sans sucre." Et s'il précisa, c'était juste pour la petite touche d'humour puisqu'il venait tout juste de révéler qu'il était diabétique. "Et je suis Wayne Petterson." Pour le suivre ensuite dans la cabine du bateau alors qu'il demandait. "Vous pensiez que c'était moi qui vous avait embouti ?... Je vous assure que je ne me drogue pas. Et avec mon traitement, je n'ai pas le droit à l'alcool, il n'y a donc aucun risque de ce côté-là." En vérité, les anti-dépresseurs n'étaient pas non plus conseillés pour la conduite mais cela il préféra ne pas le préciser. |
| | | | (#)Sam 6 Juin 2020 - 0:06 | |
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Thank you consequence
Wayne Petterson @" Wayne Petterson"
L’a-t-il trouvée incongrue, ma question ? Est-ce pour cette raison que ce gamin a dénombré les péripéties qui lui valurent ses deux béquilles ? Je ne sais pas quoi en penser. Je ne sais pas si je dois avoir de la peine pour lui, m’estimer heureux de mes propres blessures qui n’ont rien de grave, lui dire que je suis désolée ou en conclure que je pourrai me contenter de quelques remerciements sur le pas de ma porte avant de les laisser partir finalement. Et, je cligne des yeux, à plusieurs reprises, l’air perplexe. « Je t’en demandais pas tant, petit. » Je ne veux pas être désagréable : je refuse d’entamer une conversation dans laquelle nous finirions par comparer nos malheurs. Je ne suis pas un gosse. Je me fous de savoir lequel crachera le plus loin et je n’ai pas assez d’empathie que pour une verser une larme pour un inconnu. Je n’en fais preuve que si je suis touché, si je finis par apprécier et j’entends lui donner sa chance à cet inconnu. Je la lui offre de bonne grâce parce qu’il l’a fait pour moi. Il s’est arrêté quand d’autres auraient simplement fui. « Et c’est plus que bien ! » J’ai eu mon lot de drame, de peine et de tristesse. Je n’ose imaginer ce qu’il serait advenu de moi si le sort, malsain, m’avait privé de tant de mobilité. « J’ai déjà du mal à vivre avec un plâtre. » Mon sourire traduit mon admiration pour son courage puisque d’après moi, il en faut. Dans les vagues souvenirs qu’il me reste, je crois me rappeler qu’il a tenté de me garder conscient jusqu’à ce que les secours arrivent. Ses traits sont flous dans ma mémoire et sa voix, un lointain écho. Je ne la reconnais pas, mais il y avait quelqu’un et puisqu’il affirme ne pas être responsable de la globalité de mes malheurs actuels, j’en conviens de lui offrir de mon temps, de ma gratitude et une place dans mon fauteuil : je l’ai invité à entrer. Je lui ai proposé à boire, amène et, comme il choisit un café, j’en fis couler deux, l’un après l’autre, de ma seule main valide. « Enchanté, Wayne. Et, oui, je me suis posé la question oui. A cause de… » J’ai désigné ses meilleurs copines, ses bâtons de fer qu’il avoir apprivoisé. Ils sont comme un prolongement de sa personne et, néanmoins, je n’arrive pas à imaginer qu’il ait réellement pris son parti de cette situation que je lui souhaite provisoire. « Parfois, les gens font des choses dingues quand ils sont rattrapés par le conscience. » J’ai haussé les épaules et je l’ai rejoint sur le sofa. « Tu fais ce que tu veux, gamin. Tu bois, tu fumes, tu te drogues… c’est la même chose pour moi. Je me demande juste pourquoi… toi… » Alors que sur un paddock de courses, il ne serait pas le premier cheval sur lequel on parierait. « Tu t’es arrêté pour… enfin, tu sais. » Me sauver la mise. « Et pourquoi ça te tenait tant à cœur de constater de tes yeux que j’allais bien. » N’aurait-il pas pu se fier aux aveux des infirmières ? « Quoiqu’il en soit, je te remercie de l’avoir fait. » Et je me souviens m’être fait la réflexion, en buvant une gorgée de mon café chaud, si son altruisme n’était pas lié à sa propre histoire.
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| | | | (#)Sam 6 Juin 2020 - 6:42 | |
| Ce fut avec un haussement d'épaules indifférent qu'il accueillit la remarque d'Amos. Il n'avait pas qu'à poser des questions idiotes s'il voulait obtenir des réponses intelligentes... Il n'en restait pas moins qu'il était sincèrement content pour lui. Un plâtre, c'était rien et il allait pouvoir retrouver sa vie. Et ça, ça n'avait pas de prix. Et il savait de quoi il parlait... Là, ce n'était sans doute que l'histoire de quelques semaines, de mois tout au plus. Et apparemment, Amos semblait d'accord avec lui, ce qui était plutôt rassurant.. Mais ils étaient cependant en désaccord sur une chose. Il ne méritait pas un tel regard pour la simple et bonne raison qu'il n'y avait rien à admirer là-dedans. Il en secoua donc la tête alors qu'il modérait le "problème" de ses béquilles. "Pour les béquilles, faut pas vous en faire c'est comme le plâtre, c'est rien. Et on m'aurait coupé la jambe que ça aurait été pareil, pas grand chose de plus. C'est le reste... Tout le reste, qui est dur." Parce que les béquilles, c'était comme la canne blanche pour les personnes non voyantes ou le fauteuil roulant pour les paraplégiques, une aide essentielle sans laquelle il ne pourrait pas se déplacer.
Par la suite, il aurait presque pu en sourire mais ce fut surtout une grimace qui joua sur ses lèvres. Parce que sa vie s'était stoppée net à 15 ans alors qu'il n'était encore qu'un enfant sage et obéissant pour ne la reprendre que maintenant, sans avoir rien eu dans sa vie qui lui aurait permis d'avoir l'occasion de regretter des choses. "Pour ça, encore faudrait-il avoir eu le temps d'avoir des choses à se reprocher..." Et peut-être qu'à choisir, il aurait préféré faire avec sa conscience. Ça semblait toujours plus "réparable" que sa situation actuelle... Par contre, il ne pouvait que réagir face aux propos tenus par Amos. Et même plutôt violemment tant il n'était pas d'accord. "Non, on peut pas faire ce qu'on veut, pas au volant d'une voiture ! C'est comme une arme, ça tue ! C'est avec de telles idées qu'il y a des gens qui se croient tout permis en mettant ça sur le dos d'un accident. Mais ça s'appelle un meurtre !" Et plus encore lorsque celui qui tenait le volant avait pour patronyme le nom d'une arme... Ça faisait 8 ans, avec un nombre incroyable d'heures de psychothérapie, et il en était toujours là. A réagir de façon épidermique dès que le sujet se trouvait abordé. C'en était désolant, et il était le premier à s'en rendre compte. "Je suis désolé, c'est... Toujours aussi compliqué. Je crois que c'est plus pour moi que pour vous que je suis ici. Je voulais m'assurer que vous alliez bien, en être vraiment sûr, le voir par moi-même..." Il serrait avec force sa tasse de café alors que sa voix s'amenuisait à mesure qu'il parlait. C'était définitivement compliqué.
Et pourtant, il fallait bien qu'il explique. "Mon père... a été projeté sur moi. J'étais assis à l'arrière. Il était mort. Mais ma mère, je l'ai pas vue. Elle a été éjectée et... On m'a dit qu'elle était morte à ma sortie de coma artificiel mais je l'ai pas vue. Alors... J'avais besoin de voir par moi-même ce qu'il en était pour vous, je crois." Pour lui permettre de mieux dormir ? Enfin, mieux... C'était une façon de parler. Mais au moins maintenant, il savait. "Et puis j'allais pas vous laisser comme ça, je sais ce que c'est que d'attendre du secours lorsqu'on est coincé tout seul, avec..." Son père mort se vidant de son sang au-dessus de lui ? "Personne qui vous répond." Après tout, pour lui aussi quelqu'un avait appelé les secours. Sauf qu'il n'avait jamais su qui. |
| | | | (#)Sam 6 Juin 2020 - 22:09 | |
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Thank you consequence
Wayne Petterson @" Wayne Petterson"
C’est quoi, le reste ? Que peut bien dissimuler cette allusion à la gravité ? Considérant que cela ne me regardait pas, je me suis contenté de l’inviter à entrer, de lui proposer à boire et de lui servir un café. J’ai respecté ses recommandations. Je m’en suis fait couler pour moi. « Je ne m’en fais pas. Tu as l’air de gérer. » Je considère simplement qu’à son âge, à moins qu’elle ne soit définitive, il aurait mérité que le destin se penche sur son berceau. C’est un putain d’ingrat que le sort néanmoins. Il ne fait aucun cadeau et il ne connaît pas le privilège de l’âge visiblement. « J’ai cru comprendre qu’un accident n’arrive jamais seul en effet. » Je l’ai saisi il y a bien longtemps d’ailleurs, mais je ne m’épanche pas. J’essaie d’être neutre et, surtout, d’être le plus agréable possible quand je ne suis pas réputé pour ma sympathie. Est-ce pour cette raison qu’il est sur la défensive ? Serait-ce le fruit seul de mon imagination ? J’ai l’impression qu’il s’est quelque peu vexé de ce qu’il aurait pris pour de la méfiance (par rapport à son rôle) ou de la pitié ( par rapport à ses trépieds.) En réalité, ce n’était ni l’un ni l’autre. Je ne sers pas à autrui un repas que je ne mangerais pas moi-même. Je suis trop intègre pour ça. Et, qui plus est, bien trop soucieux de la liberté de chacun pour juger qui que ce soit, plus encore toute personne qui prendra la route dans un état second. Je l’ai fait. Ce n’est pas la cause de l’accident, mais j’aurais pu en provoquer moi-même. Alors, j’entends. J’entends le raisonnement de ce gamin et j’aurais sans doute tenu le même discours à son âge. Sauf que je ne l’ai plus, que j’ai sacrifié ma vie à l’armée et qu’elle n’a plus voulu de moi après m’avoir abîmé, détruit, cassé, faisant semblant de me réparer, mais abandonnant à la première difficulté émotionnelle. Bande de lâches. « Peut-être, oui. » ai-je cependant avancé, sans rien renchérir. L’hôpital ne se moquera pas de la charité cet après-midi. Je n’endosserais aucun des deux rôles et je n’ai pas envie d’entrer dans une conversation philosophique sans fin pour définir l’éthique et la morale. « Et, t’inquiète. C’est pas grave. On a tous des sujets qui nous fâchent. » Je tente un sourire rassurant et bois une gorgée de mon café. Essayez d’aborder Sofia et je me ferme comme huître. Lui, est davantage à fleur de peau et je comprends rapidement pourquoi. Je saisis pourquoi il est là, ce qu’il est venu chercher auprès de moi : sa rédemption. Sera-t-elle suffisante malgré tout ? Et moi ? Que dois-je répondre face à ce récit tragique ? J’ai froncé les sourcils, soucieux et j’ai choisi l’honnêteté. « Je ne sais pas quoi te dire, petit. Je ne sais jamais quoi dire face à ce genre d’histoire. Je n’ai pas su quoi dire à ma femme non plus. » Et, cette dernière remarque, je ne sais pas d’où elle m’est venue. C’est comme si elle s’était échappée de ma tête après que j’en aie perdu le contrôle. « Et, tu as fait quoi du coup ? » Autant ne pas laisser de zones d’ombre dans cette histoire.
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| | | | (#)Lun 8 Juin 2020 - 8:02 | |
| Ce n'était pas du tout ce qu'il avait prévu au départ. Il devait juste s'assurer qu'Amos Taylor allait bien et repartir comme il était venu. Au lieu de cela, il se trouvait dans son bateau, assis sur son sofa avec une tasse de café à la main, à raconter ses malheurs... C'est que pour un peu, il se serait presque cru face à un quelconque thérapeute lui demandant comment il allait. Bien que non, aucun thérapeute -et Dieu sait s'il en avait vu au cours de ces dernières années !- ne l'avait jamais appelé "petit". Il aurait pu -et aurait même dû ?- s'en offenser vu son âge... Mais il n'y parvenait juste pas. Pas alors que le goût d'une madeleine de Proust se rappelait à lui, lorsque ses parents étaient encore là avec lui. Pas à l'appeler "petit" non plus mais il y avait définitivement quelque chose de ce goût-là, en effet. Et il aimait cela bien plus qu'il ne voulait se l'avouer. Ça datait de si vieux ! Et surtout, ça lui avait été arraché bien trop tôt parce que même si à 15 ans on jouait déjà aux grands, les câlins de sa mère le soir tant décriés mais en secret si attendus, et surtout le regard approbateur que pouvait parfois poser son père sur lui, étaient comme l'air qu'il respirait. Absolument nécessaire pour vivre. Et il aurait voulu pouvoir retrouver ça. Rien qu'une fois. Juste une fois...
Ce "petit" donc s'avérait être comme aimant, et s'il aurait pu trouver n'importe quelle excuse pour décoller ses fesses de ce canapé, il restait là. Et il parlait. Et sans aucun doute plus facilement qu'il ne l'avait jamais fait avec n'importe quel thérapeute. C'en était déroutant, d'autant qu'Amos parlait peu lui. Même s'il finit par laisser échapper un avis qui aurait dû le satisfaire d'avoir enfin obtenu quelque chose de personnel de lui, mais qui le fit aussitôt réagir avec virulence. Et ce ne fut pas la suite qui le calma ! "Peut-être ?! Non, il n'y a pas de peut-être qui tienne ! Mes parents en sont morts... Tout ce qui faisait ma vie a été anéanti. Ma famille, la vie que j'avais, mes rêves et mon avenir. Ce type aurait pris un flingue pour nous abattre un à un que ça aurait été la même chose. C'est un meurtrier. Il n'y a pas d'autres mots pour appeler ça." Et qu'on ne vienne pas lui dire que c'était la volonté de Dieu et qu'il fallait l'accepter ! Rejeter la religion et toute l'éducation qu'on lui avait donnée avait été la première chose qu'il avait faite une fois passé le choc qui avait suivi sa sortie du coma. Et il en avait fait de même avec tous les amis de ses parents venus lui prêcher la bonne parole avec des directives à suivre sur ce qu'il devait penser ou la meilleure façon d'envisager les choses... Il n'avait fallu que quelques visites pleines de cris et de tensions pour que celles-ci s'espacent jusqu'à se retrouver très vite, tout seul. Ou avec des soignants cherchant à entrer dans sa tête pour déterminer son niveau de santé mentale.
"Alors ne dites rien. Vous n'êtes pas obligé de dire quelque chose de toute façon, ce n'est pas de votre faute... Parfois juste être là, ça aide." La dernière phrase avait surtout été dite pour sa femme alors qu'il avait levé un regard intéressé sur lui. Ce n'était certes pas correct de poser la question mais il était intrigué. "...Votre femme ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ?" La question était suffisamment ouverte pour qu'Amos puisse biaiser s'il n'avait pas envie d'y répondre, mais il était clair qu'il attendait une réponse à minima alors qu'il sirotait son café à petites gorgées.
Pour se voir finalement lui aussi questionné à son tour. Et pas avec la question la plus facile qui soit. "J'ai... appelé, hurlé en fait... quand j'ai vu la tête de mon père au-dessus de la mienne qui... Enfin, le sang me tombait dessus. Les films d'horreur n'étaient pas le genre admis à la maison mais là, ça aurait pu être ça. J'ai paniqué mais j'étais coincé, je ne pouvais pas bouger. Quand votre accident est arrivé, c'est à ça que j'ai pensé, qu'il y avait quelqu'un de coincé comme je l'avais été..." Il serrait sa tasse nerveusement alors qu'il se remémorait une énième fois les événements. Il ne se rappelait plus combien de fois il avait déjà dû raconter cette scène, assez en tout cas pour pouvoir maintenant en parler mais ça ne rendait pas les choses plus faciles pour autant. "J'en fais encore des cauchemars. En fait, j'ai pleuré et j'ai appelé ma mère. Je voulais juste qu'on me sorte de là... Mais mon fémur était brisé en de multiples endroits et... sortait de ma jambe, et j'étais de toute façon empalé sur une tige en métal. On aurait pu en faire une scène de film d'horreur, vraiment. Et ça m'a valu de longues années de thérapie. Ils tenaient à ce que je parvienne à entrer dans une voiture à nouveau et que j'apprenne à conduire. Je ne suis pas trop à l'aise quand je suis à l'arrière mais sinon, ça va." Il parvint même à en sourire alors que le coeur n'y était pourtant pas. |
| | | | (#)Lun 8 Juin 2020 - 17:14 | |
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Thank you consequence
Wayne Petterson @" Wayne Petterson"
Ok ! Le sujet est somme toute sensible. La preuve étant, il s’insurge et s’adresse à moi avec humeur. Il va jusqu’à se permettre de hausser le ton pour m’imposer son opinion et, de suite, c’est moi cette dernière qui m’intéresse qu’un retour fissa au calme et à la politesse. Aurait-il oublié qu’il est sur mon bateau ? Que je suis chez moi ? Que je dis ce qui me chante ? Et que j’ai accessoirement passé l’âge d’être rappelé à l’ordre par un poussin à peine sorti de son œuf ? J’ai passé quarante ans. J’ai eu mon lot d’emmerdes moi aussi, de celles qui ne se voient pas mais dont les séquelles, invisibles, n’en restent pas moins douloureux. « Hey, petit, j’entends ce que tu dis. Mais, tu es chez moi. Il va falloir que tu baisses d’un ton. » La dernière phrase n’est qu’un chuchotement. Je ne veux pas le braquer, juste le ramener vers le bon sens et, pour m’assurer qu’il n’actionnera pas le mécanisme de sa vexation, je le gratifie d’un sourire. Je vais jusqu’à plonger tout entier dans sa malheureuse histoire. Il a l’air innocent, lui, contrairement à moi. Le destin n’a-t-il donc aucun critère quand il s’agit de blesser ? De décimer une famille ? Il n’a donc jamais aucun scrupule à essaimer perte et fracas autour de lui ? Perplexe, je me perds quelque peu dans mes pensées non sans avoir oublié mon impuissance et mon désoeuvrement. Son récit est de ceux qui ne réclame pas de mots, de ceux qui mette mal à l’aise également. Je ne le suis pas vraiment ou pas tout à fait. Je suis tout à ma propre douleur, car un enfant est un parent, et que seul les rôles divergent. Ainsi me suis-je surpris à laisser échapper une information. Elle n’engage à rien. Elle est même plus proche de l’allusion, mais elle traite de Sarah qui est, sur l’heure, la personne à laquelle j’en veux le plus au monde. C’est réciproque, je le sais. Elle prétend m’aimer encore, mais elle n’est plus qu’un mélange de frustration, une masse de caprice et, arguant d’en avoir trop dit, je fais la part belle à ma discrétion. « Au départ ? Elle n’a pas digéré la mort de notre fille. Elle a décidé que je serais le coupable idéal et elle m’a dégagé. Trois ans plus tard, elle se dit que j’en valais la peine et elle s’acharne à dégager quelqu’un qui compte pour moi pour retrouver une place qui n’est plus la sienne. » Elle ne lui sera plus jamais dévolue et j’aspire à ce qu’elle le comprenne rapidement, avant que nous ne nous lancions dans une bataille juridique sans précédent. « Tu vois, rien de grave en soi. Qu’un truc banal pour le reste du monde, mais moi, ça me crispe. » ai-je avoué en guise d’excuse pour mes silences, mes airs bourrus et mon accueil en demi-teinte. Après tout, sa démarché était plutôt bienveillante. Aurais-je dû sortir les biscuits pour l’occasion ? Je n’en sais rien et ça ne me tracasse pas outre mesure. Je suis tout concentré sur son discours et, toujours à court de mots, j’ai hoché simplement de la tête. Ainsi, tout s’éclaire. C’est lui, en effet, qu’il a tenté de sauver le soir de mon accident. « Et, ça t’a fait du bien ? De venir en aide à quelqu’un coincé, comme tu l’as aidé ? » Quoique j’étais seul et non pas le témoin de la mort de mon père. « Parce que, tu as l’air d’avancer puisque tu parviens à monter dans une voiture. C’est déjà pas mal. Il n’y a pas que des fous du volant sur la route, tu sais. »
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| | | | (#)Mer 10 Juin 2020 - 7:24 | |
| Bon, c'était ce qui s'appelait se faire taper sur les doigts. Gentiment, mais tout de même, les choses étaient dites. Et... Il comprenait. Jamais son père n'aurait accepté qu'il lui parle ainsi. Mais c'était une autre époque et il avait depuis, plus souvent qu'à son tour, piqué de belles crises où la colère se battait avec l'injustice, sans plus personne pour le contenir. Alors il eut de quoi être surpris, et se sentir honteux, lorsqu'il s'excusa. "Je suis désolé..." Et il raconta. Pourquoi il racontait autant à ce type qui n'avait même pas demandé sa visite, il n'en savait rien. Il supposait juste qu'il en avait besoin, comme une façon de se raccrocher à sa propre histoire alors qu'il se trouvait confronté à quelque chose qu'il n'aurait jamais envisagé, même dans ses pires cauchemars. Et pourtant, il avait bel et bien retrouvé la famille de celui qui avait tué ses parents et l'avait laissé dans cet état. Combien y avait-il de chances pour que cela arrive ? Certainement quelque chose avec un nombre incroyable de zéro devant le un.
Ce n'était pas qu'il n'avait pas l'habitude de raconter, parce que jusqu'à peu il le faisait tout le temps et à un nombre incroyable de personnes. Il avait certainement vu plus de psy que n'importe qui d'autre en ce monde. Mais cette fois-ci, ce n'était pas un psy et le changement était lui aussi radical. S'il y eut réponse, ce ne fut pas sur sa propre histoire mais sur la sienne. Pas si détaillée, et à peine abordée en fait, mais il n'était plus seul à se livrer comme un animal qu'on aurait disséqué. C'était nouveau et... appréciable. Même si après avoir écouté religieusement, il devait bien avouer ne pas savoir quoi en dire. Il avait bien conscience de ne pas avoir vécu grand-chose hormis son parcours médical, en plus de n'être qu'un gamin aux yeux de cet homme. mais il y avait cependant une chose qui avait retenu son attention. "Perdre un enfant n'est pas un truc banal. C'est la plus terrible chose qui soit pour des parents." Il n'avait jamais douté de l'amour de ses parents malgré leurs règles très strictes régentant sa vie, et il savait qu'ils auraient accepté de mourir le sourire aux lèvres pour lui laisser à lui une chance de vivre. Et il imaginait sans mal qu'il devait en être de même pour tous les parents. "Peut-être qu'elle cherche juste un ersatz de la vie que vous partagiez pour se donner l'illusion de retrouver le souvenir de votre fille..." Il l'avait dit à mi-voix plus pour lui-même que pour Amos, avant qu'il ne relève le regard vers lui et qu'il précise très vite. "Enfin, je dis ça mais j'en sais rien. C'est juste tous les psy que j'ai vu qui ont fini par déteindre sur moi." Une excuse qui sonnait sans doute de façon un peu bancale mais qui n'en restait pas moins vraie. C'est qu'il avait appris avec le temps à deviner ce qu'ils attendaient de lui ou les différents types de réactions que ses propos pouvaient engendrer... Il n'osa pas en tout cas, poser davantage de questions sachant avec une conscience aiguë à quel point le sujet pouvait être douloureux.
D'ailleurs, il remit bien vite le sujet des psy sur le tapis puisque c'était eux qui détenaient le "savoir" sur son bien-être et surtout les "laissez-passer" que cela entraînait ou pas. "Ça, c'est à mon psy qu'il faudrait le demander. Il parait que c'est lui le plus apte à juger de mon état mental. Et quels qu'ils soient, ils sont tous persuadés qu'ils savent mieux que moi-même..." S'il voulu en sourire, c'est surtout une grimace qui joua sur ses lèvres. Il avait juste appris à faire avec, depuis le temps. "En fait, ça faisait partie des items à valider pour ma réinsertion. Avoir le permis, être inscrit dans une formation professionnelle, poursuivre un suivi régulier médical et psychologique, accepter de m'éloigner de mon lieu de vie de mon enfance et même de changer de pays, et encore quelques autres comme ça. J'ai pas trop eu le choix, refuser m'aurait encore valu quelques années en centre..." Et ça, il avait assez donné. Alors il s'était plié et avait serré les dents pour en arriver là, à ça. "Mais ces abrutis, ils... ont rien trouvé de mieux à faire que de m'envoyer dans la ville où se trouve la famille du meurtrier de mes parents... Il y avait un magazine qui traînait avec le nom de son frère lorsque j'ai été finaliser mon inscription à la fac. J'ai carrément halluciné. Mais j'ai depuis vérifié, et c'est bien eux." Haussant les épaules dans un geste d'indifférence qu'il était très loin de ressentir, il précisa même si ça semblait évident. "Mais bon ça, je vais éviter de le dire à mon psy." Il ne manquerait plus qu'ils le fassent à nouveau déménager il ne savait où. Une fois était bien suffisant. Et puis... maintenant que le destin s'était chargé de le mettre face aux Winchester, il ne comptait pas partir d'ici comme ça. |
| | | | (#)Jeu 11 Juin 2020 - 1:30 | |
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@" Wayne Petterson"
Il peut l’être, désolé. La politesse n’a jamais tué personne. Ceci étant, je ne l’ai pas recadré pour qu’il me présente des excuses. Dans les faits, je comprends son amertume. Je saisis également qu’il s’emporte aisément face à ce sujet sensible. C’est lié à son histoire et à son passé. A son âge – car le temps avançant nous apprend à mieux gérer nos émotions – bien d’autres auraient réagi avec humeur. Dès lors, je ne lui en tiens pas réellement rigueur et je le rassure d’un sourire. Il ne sonne pas faux. Il manque simplement de lumière parce que j’en ai peu en moi. Elle ne brillera pas tant que Raelyn se bornera à me garder loin d’elle. En attendant, je prends mon mal en patience et j’avance, un pied devant l’autre. J’avance et je me penche sur le sort de ce gosse parce qu’il m’est venu en aide et parce que son histoire, quoique différent, fait douloureusement écho à la mienne. Il connait le deuil, lui aussi. Il apprend à vivre avec l’absence et le manque des siens et, je crois que comme moi, il sait que cette leçon est vaine, qu’on n’en tirera rien, qu’on ne ressortira pas plus fort des drames qui ont frappé nos vies. Qu’on s’est relevé, certes, mais qu’il nous reste des bleus au cœur, des plaies toujours béantes que nul ne saura jamais recoudre. « Et, ça l’est. Ce qui est banal, c’est pas la mort de ma fille. » Surtout que les circonstances de son décès relèvent de zones d’ombre que je ne suis pas parvenu à éclaircir. J’y travaille. C’est en cours d’évolution et, dans les faits, ça avance plutôt bien, mais elles n’en restent pas moins glauques. « Ce qui l’est, c’est que mon couple ait volé en éclats et, que dans les faits, il m’a fallu trop longtemps pour réaliser que, de toute façon, je n’aurais pas pu le sauver. » Je suis long à la détente parfois, mais je reviens rarement en arrière. « Cet ersatz, comme tu dis, c’est moi qui m’y suis accroché pendant longtemps pour ne rien te cacher. » Et, je répète, c’est étonnant. En général, je ne rapporte rien de mon histoire. Je ne rends aucun compte. Je la garde jalousement pour moi. « Elle, ce qu’elle fait c’est… chercher à me punir, comme si j’étais responsable. » Et, je ne le suis pas. Le seul reproche formulable, c’est mon penchant pour la boisson et, sans surprise, je rêve d’un verre actuellement, mais je réprime le besoin. Je tente de le garder sous contrôle, pas tant à cause de Wayne, mais parce que je me suis promis de ralentir, promis que mourir dans la maladie promise par les médecins n’est pas une option viable et valable pour l’instant. « Ouais ! Je ne suis pas étonné. Tu verras que même à quarante piges » Et un peu plus. « Il y aura toujours quelqu’un qui sera persuadé qu’il est plus à même de choisir pour toi ce que tu dois dire, faire, porter, penser. » J’en comptais tant des croquants bien pensants qui, pourtant, effleurent à peine les émotions crispantes qui me tord souvent l’estomac. « Alors, oui… évite de prévenir ton psy qu’il s’est planté en t’envoyant ici. C’est qui ce mec ? Tu l’as rencontré ? Il a cherché à te contacter ? » Au minimum pour présenter des excuses, quoique je doute que ça puisse suffire. « ça t’est déjà arrivé d’avoir envie de te venger, petit ? » Ou suis-je le seul fou à nourrir de la rancœur en mon sein ?
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| | | | (#)Ven 12 Juin 2020 - 4:24 | |
| Ce ne fut pas le rappel à l'ordre qui calma ses flambées de colère. Et encore moins ses excuses qui, même si elles étaient sincères, n'étaient que la chose correcte à faire dans une telle situation. Un geste social de bonne volonté, rien de plus. Non, ce qui l'apaisa comme un baume appliqué sur une plaie à vif, fut l'histoire à peine dévoilée d'Amos. Il n'avait aucune idée de quel âge avait sa fille à son décès, ni même de quoi elle était morte. Et c'était de toute façon des questions qu'il ne poserait pas parce qu'il y avait des choses qui d'elles-mêmes imposaient le respect. Et la souffrance d'Amos était de celles-ci. Alors certes, il parlait de l'échec de son couple mais en filigrane, ce n'était que cela, la perte de leur fille. Et surtout cet océan de souffrances sans fin constitué de jours enchaînés à d'autres jours sans horizon, ni but, ni avenir. Et il découvrait que dans cet océan, il n'y était plus seul à se débattre pour tenter de rester à la surface et ne pas se laisser entraîner par le fond. Et ça changeait tout. Alors bien sûr, il n'aurait pas voulu que quelqu'un souffre comme lui souffrait, ce n'était à souhaiter à personne. Quoique, si c'était les Winchester... Mais c'était un autre problème. Parce que Amos n'avait rien à voir avec sa propre histoire et aucun parent ne devrait avoir à vivre cela, comme aucun enfant d'ailleurs. "On est pareil..." C'était sorti dans un souffle, alors qu'il modérait aussitôt. "Un peu." Parce que lui n'avait aucun souci de couple vu que... Il n'y avait pas de couple du tout. Pas qu'on avait pas tenté de le coller à chaque fête de Noël -Dieu, pendant Noël en plus, la fête familiale et religieuse par excellence !- dans les bras des filles les plus potables du service mais... Il valait mieux en rire qu'en pleurer, n'est-ce pas ?
Il ne pouvait en tout cas pas en dire grand-chose si ce n'est qu'Amos n'avait sans doute pas tort. Chercher un responsable était le premier réflexe, et il en savait quelque chose ! "On en est tous là, à chercher un responsable, un coupable idéal..." Et quand il n'était plus là, c'était comme s'il vous avait volé ça aussi. Cette dernière chose qu'il restait aux victimes. Le droit de demander des explications. "Mais moi, j'aurai bien aimé ne pas avoir à vivre ça seul. C'est dommage qu'elle s'en soit pris à vous comme ça..." Il imaginait sans mal l'enfer que ça avait dû être parce que c'était comme appuyer sur la tête de quelqu'un qui se noyait. Et il ne doutait pas un instant qu'Amos ne soit en rien responsable, juste parce qu'il ne serait sans doute pas ici à parler avec lui si ça n'avait pas été le cas. "Les trajets en voiture se faisaient toujours sans distraction mais si j'avais fait quelque chose qui aurait pu dévier l'attention de mon père, je crois que... Je m'en serais pas remis." Définitivement pas. Hôpital psychiatrique ou pas. Psy ou pas. "Si déjà je pouvais me débarrasser des psy, ça m'arrangerait bien..." Mais ça, ce n'était pas demain la veille. Il allait devoir montrer patte blanche avant et prouver que tout allait bien pour lui.
Il n'allait donc certainement pas se vanter d'avoir retrouvé les Winchester. D'autant que cette famille pour une raison qu'il ne parvenait pas vraiment à définir l'intriguait pas mal. "Il est mort lui aussi lors de l'accident. Bien pratique pour lui, on n'a pas à lui demander de rendre des comptes comme ça... Mais pendant tout ce temps, je n'ai jamais pensé qu'il ait pu avoir une famille, un père et un frère... Et je crois que quelque part... Ça m'a choqué que eux puissent avoir encore une famille." Alors que l'un d'eux avait tué la sienne. Il n'aurait su dire si c'était de l'injustice, de la jalousie, de la rancœur ou il ne savait quoi d'autre encore, mais il avait du mal avec cette idée même s'il les savait innocents. Parce qu'après tout, lui aussi l'avait été -et l'était d'ailleurs toujours- innocent ! La réponse à sa dernière question était donc si évidente qu'elle donnait l'impression de sortir du coeur. "Oh que oui ! J'aurai tellement voulu lui faire payer tout ça, mes parents, ma vie bousillée, tout... Mais comment on fait payer un mort ? On ne peut pas. Dieu, que je le hais ! " Et encore, le mot n'était pas assez fort pour tout ce qu'il ressentait. Mais le meurtrier était mort, fin de l'histoire. Sauf que lui restait bien vivant devant les vestiges de sa vie qu'il ne retrouverait plus jamais. |
| | | | (#)Dim 14 Juin 2020 - 14:02 | |
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@" Wayne Petterson"
Pareil ? À quel niveau ? La remarque, spontanée, soufflée par le gosse, n’a pas été mûrie. Il n’a pas comparé non plus sur base de critère objectif. Non. Il constate, simplement, que face à la souffrance l’Homme se plie à un réflexe en partie universel – ne tombons pas dans la généralité - : se trouver un coupable, un différent de soi-même. Est-ce que cela fait de nous deux âmes reliées par un quelconque point commun ? J’hésite. Il est vrai que je me suis trouvé quelqu’un à blâmer et à juste titre. Mais j’ai commis ma part d’erreur dans l’éducation de ma gamine ou dans ma manière de l’aimer. Que pourrait-il se reprocher, Wayne ? Il n’était qu’un gosse lorsque ses parents lui ont été arrachés. Autant dire que, si le deuil nous est commun, du reste, je doute qu’il ait rencontré le besoin de vivre avec le remord lié à l’imperfection. Ceci étant, je ne dis rien. Je l’observe en buvant une gorgée de mon café qui tend à refroidir dans ma tasse et je songe : un tout petit peu, un rien qui pourtant me permet de m’ouvrir quelque peu sur ma propre histoire, un rien qui ne supplante pas cette réflexion : il y a encore de la candeur derrière la rage qui peint les traits de ce gosse lorsqu’il évoque le drame de son existence. Il a su conserver une part d’innocence dont il n’a même pas conscience, car on est jamais assez bien accompagnés face à l’adversité. « On est toujours tout seul. Mariés. Frères. Sœurs. Quand on a mal, c’est là. » J’ai désigné le point du cœur de l’index et j’ai renchéri : « C’est invisible pour les autres. Et ce que les autres ne voient pas n’existe pas ou pas longtemps. » Sans compter l’égoïsme de l’humain qui considère sa seule misère comme importante et digne d’obtenir du soutien. C’est l’amère réalité qui découle de la débâcle de mon couple. Et la vérité prévaut sur les hypothèses. « Mais, tu ne l’as pas distrait et c’est très bien comme ça. C’est bien assez compliqué pour que tu rajoutes des si à cette histoire. » lui ai-je conseillé, le tout ponctué d’un clin d’œil. J’aimerais, moi aussi, me fustiger uniquement à l’aide de suppositions. J’aurais aimé : je ne serais peut-être pas devenu cet alcoolique fini. « Eux ? Qui eux ? » ai-je aussitôt demandé alors que je peine à comprendre son raisonnement. A priori, si l’intervenant dans le sinistre qui a tué ses parents est décédé pendant les faits, il semblerait qu’il ait retrouvé la famille de ce dernier. Se pourrait-il qu’il leur en veuille d’avoir surmonté la mort de leur proche en cocon clos ? Je m’interroge. Je me demande si l’amertume du gosse lui fait oublier toute forme d’empathique, s’il est simplement égocentrique ou s’il est uniquement trop jeune pour évaluer tous les paramètres. Je le détaille donc, intrigué, ma tasse de café en suspension entre la table basse et ma bouche. « Est-ce que ça t'est déjà arrivé de te dire que justice avait été rendue finalement ? » Puisqu’il est mort, lui aussi. « Je ne te suis pas, petit. J’ai l’impression que… » Qu’il aimerait faire payer à la famille survivante l’erreur d’un seul et je ne sais qu’en penser. Est-ce comparable avec ma situation ?
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| | | | (#)Mer 17 Juin 2020 - 4:14 | |
| Même s'il aurait été bien incapable de l'expliquer, il écoutait Amos d'une façon qu'il n'avait jamais fait avec aucun de ses thérapeutes. Sans doute parce que celui-ci savait de quoi il parlait. Et parce qu'il n'était pas là pour l'aider à "aller mieux" en lui projetant seulement un savoir médical. Ils partageaient une expérience commune dans une discussion autour d'un café -le sien pour une fois à peine bu, mais il avait bien mieux à se préoccuper- et non au travers d'un bureau et face à quelqu'un qui savait déjà tout mieux que lui. Tout ceci avait en tout cas un côté apaisant qui lui permettait de poser des mots sur des idées généralement à peine abordées. Et sur des ressentis qui parvenaient enfin à s'extérioriser. "Non, j'aurai préféré être coupable de quelque chose, de pouvoir me dire que c'était en partie de ma faute, que si j'avais fait autrement j'aurai pu changer les choses. Je m'en serais voulu à mort..." Et ce n'était pas que des simples mots lancés dans le vide. "Mais au moins j'aurais su pourquoi. Là, je ne suis que victime de quelque chose dont je n'ai eu aucune maîtrise, en quoi que ce soit. L'impuissance à l'état brut. Comme si nous avions été face à un Dieu qui aurait soudainement jeté son dévolu sur nous et aurait décidé de notre sort, pour aucune autre raison que d'avoir été là..." Sauf qu'ils ne s'étaient pas trouvés face à un dieu quelconque mais à un simple homme qui s'était permis de jouer avec leur vie. Et leur mort. Il aurait d'ailleurs préféré être coupable et vivre avec les remords et la culpabilité plutôt que ce sentiment d'insignifiance de sa propre existence, juste bon à être écrasé n'importe quand et par n'importe qui. Sans qu'il ne puisse rien y faire...
Mais s'il parlait -beaucoup !- face à Amos, il y avait des choses pour lesquelles il n'était pas prêt à partager. Il haussa les épaules à sa question mais garda un silence prudent sur le "eux" qu'il n'avait pas envie de dévoiler. Il ne savait ni où il allait comme ça, ni même ce qu'il cherchait, mais c'était entre les Winchester et lui. Il plongea donc son nez dans sa tasse de café devenu tiédasse avant de poursuivre ses explications comme si Amos n'avait pas posé de question. Du moins jusqu'à la prochaine question qui lui fit hausser un sourcil bien haut tant il la trouvait... inappropriée ? "Où est la justice là-dedans ? Il est mort ! Comment il va réparer ce qu'il a fait ? Ou même seulement prendre conscience du mal qu'il a fait..." C'est bien simple, il ne pourra pas. Il n'y aura aucune réparation de quelque ordre que ce soit. Et il ne pensait pas à l'argent ou quelque peine de prison ou d'intérêt général dont il se fichait éperdument. Mais juste... des excuses ? Pour avoir tué ses parents et accessoirement bousillé sa vie ? Alors que sa famille à lui était toujours intacte ?
"Ce n'est pas un accident, quoi que tout le monde peut en dire." Et il y avait une certitude implacable dans son ton. C'est qu'il avait eu huit ans pour y réfléchir. "Un accident, c'est quelque chose qu'on ne peut éviter. C'est la définition du mot et c'est écrit dans tous les dictionnaires. J'ai vérifié. Des freins qui lâchent sont un accident. Des blocs de pierre se détachant d'une falaise sont un accident. Là, il a prit sa dose de drogue et il a prit le volant. Alors on peut me parler d'inconscience, de folie induite par la drogue, de bêtise due à la jeunesse, mais pas d'accident. C'est un meurtre non prémédité, mais un meurtre tout de même. Parce que là, c'est comme s'il avait pris une arme et nous avait tiré un à un à bout portant. Comme quoi il y des gens qui portent bien leur nom." Et s'il regarda Amos, ce n'était pas pour avoir son verdict ou ce qu'il pensait de tout cela. Parce que lui avait déjà forgé son opinion depuis longtemps. |
| | | | (#)Jeu 18 Juin 2020 - 22:51 | |
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@" Wayne Petterson"
Je l’entends son raisonnement et les divergences dans notre histoire commencent ici. Je ne veux pas le juger. Il est libre de penser et, de mon point de vue, de se tromper. La culpabilité est un poison indolent qui s’infiltre dans nos veines et qui se répand dans nos organes. Elle pourrit tout sur son passage et biaise jusqu’à la moindre émotion. On n’ose plus rire ni même pleurer. On ne s’autorise plus à chanter ou à danser. On se fustige et se blâme quand l’on croise son reflet dans un miroir au point de l’éviter. On ferme les yeux devant les vitrines. On fuit du regard les flaques d’eau croupies de peur de ce qu’elle nous renverra comme on image. On meurt jour après jour. On succombe à la douleur, aux remords et aux regrets. Elle nourrit notre colère contre les autres et contre nous-mêmes. Elle emplit notre tête d’idées noires, de pensées suicidaires. On se sent comme l’intrus dans sa propre vie et, vivre, d’ailleurs, n’est plus un cadeau, mais une malédiction. On pense : pourquoi ne pas m’avoir pris moi et on cherche des raisons de se battre qui fondent comme neige au soleil. Avec le temps, quand on s’est accroché, on apprend à composer avec sa perfidie. On en fait une amie, un moteur, mais il est malsain. Sous son impulsion découle l’idée d’une vengeance mais contre qui ? Chercher un coupable est un geste désespéré et je suis heureux, pour lui, contrairement à ce qu’il prétend, qu’il n’ait pas eu à côtoyer ce sentiment. « Personne n’a jamais pu maîtriser la mort, petit. Que tu sois responsable ou non ne pourra rien y changer. C’est comme ça ! C’est à nous à essayer de vivre avec ce que les autres appellent la fatalité.» ai-je lancé conscient que je vais l’agacer. Il n’aime pas cette idée. Il la réfute depuis son arrivée. Mais, je ne lui demande pas d’être d’accord. Juste d’entendre. Un jour peut-être, mes paroles, loin d’être sages, feront écho en lui et il abordera son existence et le drame de cette dernière différemment. C’est tout le mal que je le souhaite d’ailleurs. Il se torture à espérer que les torts qui lui auront été causé lui seront dédommagé. Outre la mort du véritable responsable de la mort de ses parents, rien n’y personne ne pourra réparé son coeur d’enfant vraisemblablement blessé. On ne lui rendra pas les sourire de sa mère. Elle ne s’embrassera plus sur le front avant de s’endormir. Les exemples sont pléthore. Pour lui et pour moi. « Et qu’est-ce que tu crois qu’il aurait pu faire s’il avait été vivant ? Il t’aurait demandé pardon que ça n’aurait rien changé à ta douleur. il y a rien qui peut remplacer un être cher qui nous aura été enlevé brusquement. La vengeance aide. Ou en tout cas, l’envie d’en avoir une. Mais… je ne sais pas si c’est la panacée. » C’est tout l’enjeu de mes récentes remises en question : si Raelyn se montrait clémente à l’égard de mes mensonges, aurais-je encore la force de mener à bien mes projets de destruction ? En valent-ils la peine quand je tiens à mon couple ? « Je n’ai pas souvenir d’avoir dit que c’était un accident ! Je n’ai pas souvenir non plus d’avoir minimisé ce qui t’était arrivé. » lui ai-je rétorqué tandis qu’il s’énerve à nouveau. « Tu les as rencontrés, ces gens ? Peut-être que…. que ça te ferait du bien. » De lire la culpabilité de l’autre dans leurs yeux. J’ai du mal à considérer que face à ce genre de faits, ceux qui restent ne se surprennent pas à maudire la drogue et les habitudes de l’être disparu par sa faute et qui aura en l’occurrence, détruit une famille.
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| | | | | | | | WAYNE & AMOS ► THANK YOU CONSEQUENCE |
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