Parler de Matt est toujours pour eux la parfait excuse pour continuer à discuter sans tomber dans des sujets trop sérieux. Il leur permet d’évoquer leurs souvenirs en commun et d’enfin donner les bonnes explications à ces sourires qui n’en finissaient pas et ces regards qui suivant sans doute un peu trop la silhouette de l’autre lorsqu’il passait dans les parages. « Hannah veut juste me protéger parce que j’ai un léger historique de choix plutôt hasardeux. » Il croirait entendre sa propre justification pour les faits et gestes d’Ariane ; la seule différence étant que ce n’est pas lui qui faisait des choix hasardeux mais bien lui qui était ce choix plus que mauvais. Il n’a jamais été le petit ami exemplaire en trente années de vie mais avec Lucia il compte bien changer toutes ses mauvaises habitudes et se montrer aussi parfait que possible. Il n’a même pas besoin de se forcer pour ça puisqu’au fond c’est réellement tout ce qu’il désire : une relation aussi stable que saine et passionnée. « Elle a juste besoin d’être rassurée. Je pense que ça aiderait qu’elle apprenne à te connaître. » Silencieusement, le blond hoche de la positive alors que sa joue reste encore collée contre le crâne de Lucia. Autant dire qu’il n’est pas prêt de bouger avant un moment, parce qu’aussi inconfortable le siège puisse-t-il être, ils sont biens, là. « Allez, arrache le pansement d’un coup. S’une une échelle de un à dix, à quel point Ariane me déteste ? » Sûrement au niveau onze voire douze, même si en connaissant Ariane elle se serait contentée de frapper l’échelle jusqu’à faire tomber peu importe quelle personne se trouvait dessus. Disons qu’elle n’arrive que très peu à rentrer dans le moule de la société, surtout quand ce n’est pas ce qu’elle désire. “Au point où j’en ai rien à faire de ce qu’elle peut penser elle ou qui que ce soit d’autre.” C’est un fait qu’il n’invente pas et si la famille a bien sûr une place importante dans sa vie, n’en reste pas moins qu’il ne tourne pas qu’autour de cette dernière et est capable de prendre ses propres décisions. Généralement mauvaises, certes, mais après tout cela ne regarde que lui. Pour ajouter des gestes à ses paroles, l’anglais l’embrasse de nouveau sur la tempe dans une tentative maladroite pour le rassurer. “Tes cheveux sont électrostatiques, ça fait encore plus 80’s.” Tentative encore plus maladroite de changer de sujet, il sourit pourtant en observant les quelques mèches de la brune voler librement dans les airs.

Après un pas puis un autre en dehors de la nacelle, c’est avec tout le naturel du monde que les doigts de Swann se sont retrouvés entremêlés de ceux de Lucia. La peluche presque aussi grande qu’elle le fait sourire, il s’amuse comme un enfant des cheveux de la brune qui se collent au pelage de Swann Junior. Il se moque encore plus du stupide nom de cette peluche, lequel il est certain ne changera finalement jamais parce jamais il ne voudra changer quoi que ce soit à cette soirée. « Dis, Swann ? » Perdu dans ses pensées, il reprend aussitôt ses esprits. Ce serait mentir que de dire que son coeur ne s’est pas accéléré et qu’il ne s’est pas mentalement fait la liste de toutes les bêtises qu’il aurait pu faire ces deux dernière minutes. Il lui a écrasé le pied ? Il lui a tiré les cheveux ? Il a un truc entre les dents ? « Toi tu préfère être heureux séparément ou ensemble ? » Finalement, il hésite entre un ah[i] et un [i]oh.

L’anglais s’arrête le premier et laisse la jeune femme faire quelques pas de plus avant de la retenir du bout des doigts. Au milieu de la foule et des stands par dizaine, le programme de tout ce qu’ils doivent encore manger lui semble fort peu intéressant soudainement. Pour assurer ses paroles et ses gestes réalisés sur la grand roue, c’est avec un mince sourire énamouré au bout des lèvres qu’il vient justement gommer la distance entre eux pour l’embrasser. Qu’ils soient seuls à quelques mètres au dessus du sol ou justement les pieds sur Terre au milieu d’une foule d’inconnus ne change absolument rien à ce qu’il désire tendrement : “Ensemble.” Promis, il ne commencera pas à parler projets tout de suite. Pas cette fois. Il se le dit et il se le répète : avec Lucia, il fera les choses bien et il franchira les étapes les unes à la suite des autres sans jamais n’avoir peur. De toute façon, il ne serait pas réellement heureux séparément, cela ne rimerait plus à rien maintenant qu’il vient de toucher du bout des doigts la possibilité de former une seule et unique entité en compagnie de la jolie jeune femme. “Qu’est ce que tu en penses ?” Si la réponse semble être logique pour les deux partis, il veut pourtant s’en assurer une dernière fois avant de se lancer corps et âme dans cette relation, peu importe à quel point il pourrait clamer y aller doucement et s’attacher progressivement. Ce ne serait finalement que pures mensonges de sa part et ses proches le savent bien mieux que lui. “Lucia … Juste … Quelle que soit ta réponse, je veux qu’on fasse les choses bien. Je veux pas …” t’abandonner. te faire souffrir. te laisser seule. t’oublier. répéter les mêmes erreurs. “Laisse tomber, c’est stupide et je te mets la pression pour rien. On a des peluches à gagner.” Ce sera une discussion pour plus tard. Attrapant de nouveau la jeune femme dans sa main, il trace le chemin inverse jusqu’au stand de peluche et à son tour tente d’attraper la plus belle (moins laide ?) peluche qui soit pour la nommer Lucia Junior.

fail : Il attrape cette CHOSE.
mitigé : Il attrape une peluche de kangourou mais elle tombe au dernier moment, il retente sa chance.
réussi : Il a attrapé la peluche de kangourou.

Il la préférait avec les cheveux courts, longs, ou sans aucun. Il aimerait sa coupe même si elle se décidait à les porter arc-en-ciel, quand, finalement, cela ne lui importe absolument pas et il se contente de le lui faire comprendre en lui affirmant qu’elle sera toujours belle peu importe ce qu’elle choisit de faire. Bien au delà de dire ça pour lui faire plaisir et la rassurer, il le pense sincèrement et parle avec des étoiles dans les yeux comme le ferait un adolescent.

Swann a cependant beaucoup moins d’étoiles dans les yeux lorsqu’il arrive enfin à attraper une peluche, laquelle semble bien loin des standards de beauté dont il a l’habitude. A vrai dire c’est simple : elle ne correspond à aucun standard de beauté tout court et pour être franc, il la trouve loin d’être belle. Pourtant il ne saurait le dire face à une Lucia qui lui donne déjà un prénom et qui, entre deux moqueries, la lui tend amoureusement.  « Finalement, j’aime bien Swann Junior, je retire tout ce que j’ai dit à son sujet, il est canon à côté de Lucia Junior. » La vision de Lucia prenant soin de l’émeu laisse un sourire conquis sur le visage du blond et il juge que la journée touchant peu à peu à sa fin se conclut au moins sur une bonne note. Parce qu’elle s’est déroulée sur une bonne note aussi, il faut le dire. Jamais il n’aura été aussi heureux de se rendre dans un parc d’attraction pour manger des barbes à papa. « Je te vois. Je sais que t’es jaloux maintenant, mais tu m’auras pas, c’est moi qui garde Swann Junior. » Il tire la langue comme l’aurait fait un enfant puisque c’est finalement ce qu’ils sont redevenus, insouciants l’espace de quelques heures. Vivre en tant qu’enfant est plaisant dès lors qu’il s’agit d’un temps donné. N’avoir à se soucier de rien si ce n’est le prochain repas qu’on s’apprête à engouffrer, c’est un rythme de vie qui plairait totalement à Swann sans que cela n’étonne personne. “T’es sûre qu’on peut pas faire une semaine sur deux ? Une garde alternée ? Si tu refuses j’ai des moyens de pression, fais attention !” Sa pseudo menace se perd dans un rire alors qu’il n’a rien de crédible et que, justement, il ne cherche aucunement à l’être. Si moyen de pression il devait y avoir alors ce serait sans aucun doute lié à la nourriture sans que cela n’étonne personne.

En parallèle, Lucia devient la super-maman de l’opération et tente de trouver mille solutions pour que sa peluche ait l’air un peu moins … morte écrasée par les roues d’un 4X4 ? Autant dire que ce n’est pas une mince affaire vu l’air du chien, le blond s’étonnant presque qu’ils ne lui aient pas créé une langue qui pend d’un côté de la bouche. « Peut-être que si on lui met des élastiques et des barrettes de couleur dans les cheveux Lucia Junior sera moins moche ? Peut-être un collier fluo autour du cou ? » Mentant quelque peu et enrobant ses fausses paroles d’un sourire chaleureux, le McGrath se permet de répondre du tac au tac. “Elle est très belle comme elle est, Lucia Junior, ne change rien.” Disons qu’elle est belle à sa façon et tout le monde sera content de la tournure de la phrase. Ajoutons le fait qu’elle ne sera de toute façon jamais plus belle que Lucia, pas aux yeux du blond, et voilà un mensonge qui devient une vérité générale immuable.

Alors qu’il était bien trop occupé à se moquer de la peluche et à lui inventer des coupes improbables faites avec des bracelets fluorescent, la jeune femme reprend presque aussitôt sa voix sérieuse et lui de se calmer dans la foulée. « Oui. Ensemble c’est bien. Ensemble ça me va, je suis d’accord. » Ses yeux marrons se retrouvent sur le visage de porcelaine de la jeune Whitemore et il ne peut qu’ajouter un sourire chaleureux et, justement, heureux. Elle prend des couleurs pourpre qu’il lui excuse et balaie du revers de la main ; cette même main qui justement se retrouve accrochée à la sienne sans qu’il n’ait le temps d’y réfléchir. Heureusement qu’elle ose parfois faire certaines choses puisque lui pourrait devenir une statue de cire et la regarder toute la journée sans que ça ne soit en rien dérangeant. « Je veux faire les choses bien aussi. » “Alors on est deux.” Un baiser se perd sur sa tempe, lui qui vient sceller les dernières déclarations du jeune couple qui ose peu à peu de nouvelles choses.

Parfois, cependant, Swann est bien heureux de ne pas avoir à se renouveler d’une quelconque manière que ce soit et lorsque Lucia évoque la suite des événements, il ne peut qu’être heureux. Encore un peu plus. « Faire les choses bien ça veut dire fêter ça avec un milkshake et trinquer avec churros non ? » La beauté ou non de Lucia Junior devenant désormais le cadet de ses soucis, il profite d’avoir la main de la jeune femme dans la sienne pour la tirer doucement à travers la foule et s’y frayer un chemin non sans mal. Faut dire qu’ils prennent de la place avec leurs peluches atypiques. “On peut faire les choses bien sans milkshake ni churros ? Impossible.” Les gens qui font ça n’ont en tout cas rien d’amusant au goût de Swann et il laisse Lucia commander la première, supposant qu’elle va se débrouiller pour prendre la boisson la plus sucrée qui soit, pendant qu’il réfléchit à sa propre boisson et y ajoute des churros, comme prévus. Ensuite, ils se posent sur les marches à l’arrière d’une des caravanes de la fête, les doigts déjà pleins de sucre et de gras, les lèvres autour des pailles immenses et fraîches. “Je peux te ramener chez toi après, si tu veux éviter de prendre les transports.” Et là où beaucoup y auraient vu des allusions, Swann, lui, ne voit que la possibilité pour la jeune femme de ne pas s’encombrer. “Et demain je finis un peu plus tôt alors je passerai au DBD. Et après demain c’est toujours ok pour venir courir ? Et le jour d’après on pourrait aller sur la plage si tu veux et - …” Et il a soif, là, parce qu’il parle trop et qu’il enchaîne et que, trop heureux, il en oublie même de respirer parfois. “On est pas obligés de se voir tous les jours, en fait. C’est comme tu veux. C’est pas parce que t’es ma petite amie que ça devrait changer quoi que ce soit.” La suite est venue toute seule sans qu’il n’y pense un seul instant et il est justement là, le problème de Swann qui agit souvent avant de réfléchir. Il se contente de noyer le poisson en prenant une nouvelle gorgée de milkshake, ses yeux ronds tournés vers Lucia pour anticiper la moindre de ses réactions. “Je voudrais que tu sois ma petite amie. C’est ça que je voulais dire. Et t’es pas obligée non plus.” Nouvelle gorgée et une autre ensuite. Décidément, il a bien soif ce soir.

La conversation autour de l’animal de compagnie à adopter prend finalement le pas sur tout le reste et Swann est bien heureux de pouvoir changer de sujet de discussion, tant pour ne pas se moquer éternellement des joues rouges de Lucia lorsqu’elle court ou de la couleur de ces dernières lorsqu’il a maladroitement évoqué l’idée qu’elle entre dans son appartement. Loin de lui toutes les mauvaises idées du monde, il ne sait tout simplement pas comment bien s’y prendre puisque jusque là il s’est toujours évertué à mal passer chacune des étapes de relation de couple, si on peut même parler de couple. Tous ceux qu’il a connu le détestent aujourd’hui si ce n’est l’inverse, la seule exception à tout ceci étant Noa. Tout ce qu’il espère, c’est arriver à faire les choses assez différemment pour que cela n’arrive jamais avec Lucia, si jamais ils en viennent un jour à ne plus être des petits amis. Ce n’est bien sûr pas ce qu’il souhaite mais aujourd’hui le blond préfère anticiper le pire pour mieux s’y préparer puisque dans sa vie, ce n’est que ce qui ne cesse d’arriver encore et toujours. « Non c’est vrai ? On doit prendre un chien, c’est o-bli-ga-toire. » Espérant secrètement que ce soit la réponse qu’elle lui apporte, il ne peut que lui offrir un sourire plus large encore alors qu’ils commencent à revenir vers la voiture. Entre eux et les peluches, ils prennent toute la place au milieu de la foule mais autant dire que c’est la première fois depuis longtemps que Swann se moque de savoir s’il peut bien déranger des inconnus. Tant que tout va bien avec Lucia et qu’ils sont heureux tous les deux, c’est tout ce qui importe. « Tu dois prendre un chien. » Assuré, il reprend quelques secondes après, à sa suite. “Alors c’est décidé, je prendrai un chien.” La tête tournée vers l’horizon, il ne doute pas du bien fondé de ce choix et se prépare déjà mentalement à accueillir un animal à quatre pattes dans son appartement. Lorsque ce sera le cas, il n’aura réellement plus aucune excuse pour ne plus passer l’aspirateur et accueillir Lucia dès qu’elle souhaite traverser les quelques pâtés de maison qui les séparent. “Je pourrai peut être l’appeller Rex II, comme ça on le confondra pas avec le chien du voisin.” Loin d’avoir une âme d’artiste ni même une imagination débordante, autant dire qu’en effet … Il n’a pas pensé à appeler le chien autrement que Rex, ce qui semble être le nom générique pour tous les canidés du monde à ses yeux. C’est bien comme nom, quand même. Simple, pratique, efficace, les deux chiens pourront même se reconnaître si jamais un jour il les sort ensemble - parce que oui, bien loin d’être une blague, il va réellement faire ce qu’il vient de dire.

Les portières de la voiture claquent alors qu’ils rentrent dans l’habitacle mais la jeune femme semble avoir gardé des étoiles plein les yeux, ce qui ne dérange pas Swann le moins du monde - et bien au contraire. « Tu crois qu’on pourrait aller le chercher ensemble ? J’ai une amie qui travaille dans un refuge, elle m’a dit de la contacter si je pensais à adopter un animal mais je crois pas que Leah soit ouverte à l’idée. Je t’y emmène, si tu veux. » Étonné de savoir que tout semble s'emboîter aussi bien et aussi facilement, il ne peut retenir un haussement de sourcil étonné alors qu’il tourne la tête en sa direction avant de démarrer ? “Sérieusement ? T’as encore beaucoup de secrets comme ça ? Parce que moi, je les aime vraiment beaucoup en tout cas.” Il tente de se rattraper sur la dernière phrase, ne voulant pas laisser sous entendre qu’elle lui cache quoi que ce soit - et de toute façon, si jamais tel était le cas, elle aurait sûrement ses raisons. “Je veux bien. Pour ton amie, et pour qu’on aille le chercher ensemble. Ça serait vraiment bien.” Avec elle à ses côtés, il sait au moins qu’il ne prendra pas de mauvaise décision et que l’animal les aura adopté tous les deux. Il n’y a en réalité que des avantages à sa venue, le premier de tous étant qu’il souhaite passer autant de temps que possible en sa compagnie. Loin d’être un solitaire, il est quelque peu déçue de devoir lui dire au revoir alors qu’il est garé devant la porte de son immeuble mais finalement ce n’est que partie remise : il la retrouvera le lendemain et tous les jours qui suivent encore. La promesse prend la forme d’un dernier baiser sur ses lèvres et d’un sourire trop heureux qui ne se décide plus à quitter son visage.