Tout avait bien débuté pour nous.

Même si la voiture de Samuel ressemblait à s'y méprendre à une épave, elle nous avait conduit jusqu'à Toowoomba, en un seul morceau. Nous avions pu passer la nuit et rallier rapidement un deuxième point, la ville de Miles, sans encombres et en prime avec une rencontre plutôt amusante.

Nous nous étions accordés sur le fait de reprendre nos chemins séparément à la sortie de Miles. Alors après un café gracieusement offert par David, nous nous étions remis en route. D'abord à quatre, puis après une dernière accolade avec Liam et Kane, nous étions de nouveau seul avec Kelly. L'objectif était de continuer à faire du stop le plus possible, mais Miles n'es pas une grande ville et ici les gens nous offre un autre regard lorsque l'on se trimballe avec un sac à dos et surtout deux caméraman aux trousses. Les mentalités sont différentes et faire du stop deviens compliqué, les gens se méfient et nos sourires ne peuvent pas acheter leur confiance. Alors on a commencé à marcher pour ne pas perdre de temps. Après plus d'une heure, un homme à accepter de nous prendre dans son véhicule, mais dès le départ, l'ambiance fut bien différente des précédentes.

Il a commencé par faire des blagues graveleuses, en ne faisant pas attention à la route et surtout il en beuglant que personne ne pourrait lui dicter le chemin. Kelly, un peu fatiguée, à commencer à somnoler à l'arrière et notre nouveau chauffeur, James, a pris cela comme une autorisation à faire des remarques de plus en plus perverse sur la jeune femme. « Tu vas te la faire ? » qu'il me demande pour la troisième fois. « Non. » Je commence à être mal à l'aise et je crois bien qu'il est en train de nous perdre ce con. On s'enfonce dans la campagne Australienne et l'autre abrutit enchaîne les remarques déplacer. « Je crois que vous pouvez nous déposer ici. » que je lui indique en conservant un ton poli. Je n'ai qu'une idée en tête sortir de cette voiture, et vite. « QUOI?! Oh tu veux pas partager ta copine, hein. » « Non ce n'est pas ça, mais on doit s'arrêter. » Et s'enchaîne une dizaine de minutes de négociation où James s'amuse à prendre différent tournant avant de nous abandonner au milieu de nul part excéder que je ne rentre pas dans son jeu macho et salace.

La voiture redémarre en trombe et nous voilà perdu au milieu de nul part. « Le dernier panneau que j'ai vu indiquait Glenmorgan » que j'indique à ma coéquipière un peu secouée. « Ça va ? Il était vraiment bizarre ce gars, il m’a fait flipper. »

@Kelly Ward @May Glitters

James, à première vue, n’avait pas l’air d’un mauvais bougre. Un brin bourru, et peu élégant, loin de l’image du gentleman. Elle était assez certaine que des miettes de son déjeuner de l’avant-veille se cachaient quelque part dans ce double menton dégoulinant. Mais malgré tout ce qui le rendait aussi repoussant et retournait l’estomac de Kelly, celle-ci n’avait eu d’autre choix que de monter à l’arrière de sa voiture, entre deux fûts de bière. Elle jetait un regard dépité à la caméra régulièrement, les lèvres pincées pour contenir la nausée que l’odeur de l’habitacle couplée à la conduite rustre du chauffeur lui faisait subir. Elle avait sûrement pâli de plusieurs tons de blancs. Et elle n’était même pas au bout de ses peines. Somnolente, elle feintait de dormir profondément et de ne pas entendre ce qui se disait à son sujet à l’avant de la voiture. James avait visiblement de la suite dans les idées. Ses insinuations graveleuses à peine voilées lui serraient les tripes. La sensation d’être la plus belle côtelette au rayon boucherie n’avait rien de flatteuse. Loan prenait le parti de la brune tant bien que mal, quitte à vexer James qui les conduisait gracieusement dans le désert. Mais entre le discours et l’itinéraire douteux, l’homme n’était qu’un caillou dans la chaussure du binôme. Au bout de quelques kilomètres, ils furent lâchés elle ne savait où. « Le dernier panneau que j'ai vu indiquait Glenmorgan » indiqua Loan qui avait eu la présence d’esprit de rester attentif à leur trajet malgré tout. Kelly sortit sa carte et sa boussole de son sac. « Ça va ? Il était vraiment bizarre ce gars, il m’a fait flipper. » L’australienne haussa vaguement les épaules. Ce n’était pas son genre de s’épancher sur ce genre d’incidents. Entre se faire comparer à une planche à pain frigide et être le sujet de plans salaces, les rustres n’avaient aucun juste milieu. Il n’y avait rien à en dire. L’important était qu’ils soient débarrassés de James. « Ça va. Merci de l’avoir forcé à nous déposer. Un peu plus et on finissait en viande hachée dans son coffre je crois. » Chacun dans trois sacs en toile de jute différents, puis enterrés dans le désert. La prod n’aurait pas apprécié les conséquences juridiques de cette tournure des événements.

« Bon, Glenmorgan… » souffla Kelly en scrutant la carte. Elle suivait du doigt l’A2 qu’ils étaient suivre tout droit jusqu’à Charleville –un jeu d’enfant à première vue, nage droit d'vant toi. Mais Glenmorgan n’était nulle part sur cet axe, pas même écrit en tout petit. Alors Lee se mit à fouiller autour de la voie rapide, forcée de faire sans le moindre repère visuel autour d’elle ; le paysage était plat, les arbres rares, et aucun lac aux environs. Là, enfin, elle mit le doigt dessus –littéralement. Glenmorgan. D’après l’échelle de la carte, le détour de James les avait éloignés d’une centaine de kilomètres de la route. « Oh non. Non, non, non. » murmurait-elle, petit à petit en proie à la panique. « Il nous a complètement éloignés de l’autoroute. » Ils devaient désormais rejoindre une ville nommée Surat pour espérer récupérer l’A2, à moins de couper par le désert et risquer de ne croiser strictement personne avant de nombreuses heures. « Nous sommes au milieu de nulle part. » Kelly ne connaissait rien de cette partie du Queensland. C’était dans de tels moments que l’aventure prenait tout son sens, et tout ce qu’elle constatait, c’était que ses mains devenaient totalement moites sur la carte. « Qu’est-ce que… Comment… » Son regard se leva vers Loan. Elle ne savait pas quoi faire, son esprit était focalisé sur l’idée qu’ils étaient perdus et un grain de sable dans les rouages de son cerveau l’empêchait de réfléchir correctement.

« Ça va. Merci de l’avoir forcé à nous déposer. Un peu plus et on finissait en viande hachée dans son coffre, je crois. » L’idée me fait frissonner de la tête aux pieds. Il était définitivement bizarre et je suis surpris de voir qu’aucun membre de la production n’a réellement réagi. Bon… Il faut croire que cela leur donne de bon rush pour leur première émission ou un truc comme ça. Je secoue la tête pour m’enlever l’image du pervers de la tête et commence à observer les alentours. Ou plutôt… Le manque de vie aux alentours. C’est bien trop calme.

Une nouvelle fois, je laisse Kelly gérer la carte, elle semble avoir un bon sens de l’orientation. Enfin… Elle en avait un bon lorsqu’elle savait où on allait et qu’elle connaissait la vie. Au milieu de ce désert, tout devient bien plus compliqué. « Oh non. Non, non, non. » Trop compliqué ? Je n’aime pas voir son visage changer de couleur soudainement. « Il nous a complètement éloignés de l’autoroute. Nous sommes au milieu de nulle part. » Le constat n’est pas compliqué à faire, mais le fait que la brunette panique, ne me rassure pas vraiment. On doit vraiment être au milieu de nulle part. Je me penche au-dessus de son épaule et remarque, après quelques secondes, le minuscule point qui représente la ville que l’on a traverser avant de se faire abandonner. « Merde. » On doit être à une bonne centaine de kilomètres de l’A2. Fait chier. Quel con ce James. « Qu’est-ce que… Comment… » Kelly commence à avoir du mal à s’exprimer et je viens me planter devant elle pour lui sourire de la manière la plus calme possible. « Eh… On va s’en sortir. » Ça ne pouvait pas être aussi simple tout le long après tout, non ? Il faut réagir intelligemment. « On va marcher déjà. » Et je l’en traîne dans mes pas, rester sur place ne nous aidera pas. On s’oriente avec la boussole et il nous suffit de rester sur le bord de la route. Non ? Je n’en sais rien. Je pourrais pas avoir un appel à un ami ? Que Martin me dise quoi faire. Je souffle un bon coup et tourne la tête vers ma coéquipière. « On va quand même tenter d’arrêter un camion ou un truc comme ça. » Il ne faut pas abandonner aussi facilement. « Vu l’heure, il va falloir camper, je pense. » Je ne sais pas vraiment, mais ça peut être fun après tout. Le seul souci… On n’a rien à manger… « Mais on va essayer de rejoindre une petite ville, non ? » Je crois que je tourne en rond dans ce que je raconte. « Oui on va faire ça! »

Ils étaient au milieu de nulle part. Ces mots résonnaient dans la tête de Kelly, encore et encore, jusqu’à lui faire perdre ses moyens. Et s’ils avaient faim ? S’ils avaient soif ? Si personne ne passait en véhicule ? Si les rares voitures qui passeraient par cette zone de l’Australie visiblement oubliée de Dieu refusaient de les conduire jusqu’à la prochaine ville ? « Eh… On va s’en sortir. On va marcher déjà. » lui disait Loan, se voulant rassurant. La sommelière hocha la tête doucement en prenant une grande inspiration. Ce n’était pas elle, celle qui perdait ses moyens, son sang froid. Ce n’était pas son genre. Elle devait retrouver son légendaire calme olympien, cette placidité qui lui donnait parfois l’air de survoler toutes les situations, tous les obstacles. Kelly trouvait toujours des solutions, et elle n’était pas du genre à abandonner. « On va quand même tenter d’arrêter un camion ou un truc comme ça. » Elle acquiesça, continuant à se reprendre, se recentrer, aidée par la marche qui remettait ses idées en place. « Vu l’heure, il va falloir camper, je pense. » Lee priait de tout son soûl pour que cela n’arrive pas. Elle n’avait jamais campé de sa vie, et elle n’avait pas envie de changer cela si tôt dans l’aventure. D’un part parce qu’elle le prendrait comme un échec personnel : dormir à la belle étoile dès le deuxième jour ne pouvait pas être de bonne augure pour la suite, à ses yeux. Et secondement, son dos délicat était à l’instar de la princesse au petit pois ; elle n’arriverait jamais à fermer l’oeil dans de telles conditions. Non, elle voulait un vrai toit, un vrai lit, et, si possible, une bonne moustiquaire. « Mais on va essayer de rejoindre une petite ville, non ? Oui on va faire ça! » Kelly reprit la carte. Cette zone était si vide de noms de villes ou de villages que celui lui donnait le tournis. Il n’y avait que du désert, de rares routes bétonnées. “La prochaine ville c’est Surat, c’est à…” Avec son pouce, elle prit la mesure de l’échelle de la carte, puis la reporta sur la route tracée entre les villes. “... probablement une cinquantaine de kilomètres.” souffla-t-elle, dépitée. “Ca va nous faire perdre toute une journée d’y aller à pied.” Lee avait beau être mauvaise en calcul mental, il ne fallait pas être astrophysicien pour en déduire cela : à 5km/h en marche, il leur faudrait plus de dix heures pour rejoindre la ville en question. La fin d’après-midi montrait le bout de son nez. Si personne ne les prenait en stop, ils pouvaient vaguement espérer arriver le lendemain soir. “Peut-être qu’on devrait faire demi-tour, peut-être que Glenmorgan est plus proche que Surat et avec un peu de chance on trouvera quelqu’un pour vous dépanner là-bas.” Mais Kelly ne pouvait en être sûre, seul Loan avait été assez attentif à la route pour estimer à quelle distance ils se trouvaient de l’autre ville et si cela valait le coup de tenter leur chance là-bas.

Clairement, ce détour n’était pas prévu au programme. On se pensait plutôt bien loti depuis le début. Je crois que l’on ce n’est pas assez méfier pour notre troisième stoppeur et voilà que nous sommes complètement perdus. Elle perd un peu ses moyens Kelly et je dois avouer que ça me fait mal au cœur. Je voudrais que tout se passe bien et non pas qu’elle subisse complètement les choses dès notre deuxième journée d’aventure. « Ça va le faire. » Je suis déterminé. Je ne veux pas que l’on baisse les bras à la première difficulté, on va trouver un moyen. La seule chose à ne pas faire, c’est rester sur place et se lamenter sur notre sort, cela nous ferait perdre bien trop de temps.

On marche une dizaine de minutes et je réalise que nous n’avons pas croisé une seule voiture depuis que James nous a largués ici. Ça ne présage rien de bon. « La prochaine ville c’est Surat, c’est à probablement une cinquantaine de kilomètres. » Elle est dépitée et je dois dire que je commence à l’être aussi. « Ça va nous faire perdre toute une journée d’y aller à pied. » Sur ce point, elle a complètement raison. « On a pas vraiment le choix… » Je grimace. Pour le moment, il nous reste nos pieds et rien de plus. Et je ne compte pas abandonner aussi facilement, même si on doit camper. « Peut-être qu’on devrait faire demi-tour, peut-être que Glenmorgan est plus proche que Surat et avec un peu de chance on trouvera quelqu’un pour nous dépanner là-bas. » « Hum… Je sais plus vraiment. » Je lui prends la carte des mains. Après tout, il nous a laissé peu de temps après la sortie de la ville et il ne roulait pas vite. « Si on fait demi-tour, on aura peut-être plus de chance de tomber sur une maison pour sûr. » Je n’aime pas prendre ce genre de décision qui risque de complètement chambouler le reste de notre aventure. Mais on ne peut pas juste rester ici à attendre, non ? Il faut se décider. « Bon Glenmorgan. » Je hoche la tête, ce serait plus malin, je pense. « Et il faudra qu’on fasse des réserves d’eau, on sait jamais. » dis-je alors. Il ne fait pas si chaud que cela, mais on reste en plein bush australien.

Et alors que l’on change de cap et que l’on marche d’un bon pas pour être sûr d’arriver à l’heure, je commence à entendre du bruit dans les fougères à côtés de nous. Un bruit qui ne me rassure pas vraiment. Tout autour la terre est aride, rouge sang. On est vraiment au milieu de nulle part et je dois dire que l’on pourrait croiser tout et n’importe quoi ici. On est dans la seule partie de la route où des bushs assez fourni cache une partie de la vue. « T’as entendu ça toi aussi ? » Une branche qui craque. Y a quelque chose là-dedans, j’en suis sûr.

dééééé wildlife:

Reculer pour mieux sauter ; c’était l’idée qui avait traversé l’esprit de Kelly. S’ils avaient été largués à proximité de la sortie de la ville, alors ils avaient plus de chances de trouver un signe de vie en rebroussant chemin plutôt qu’en se lançant dans une dizaine d’heures de marche au milieu du bush. La suggestion de Kelly laissa Loan perplexe un instant, mais un coup d’oeil sur sa carte et quelques secondes de réflexion plus tard, il accepta de faire demi-tour. Ils retournaient donc à Glenmorgan, en espérant ne pas en être trop éloignés. Kelly abhorrait réellement l’idée de camper dans un endroit pareil. « Et il faudra qu’on fasse des réserves d’eau, on sait jamais. » ne manqua pas de faire noter son binôme avec pragmatisme. “Définitivement.” acquiesça-t-elle vivement. Si la traversée du désert devenait leur unique option, ils devaient s’assurer de ne pas finir aussi déshydratés que deux pruneaux au bord de la route. Ayant compté jusqu’à présent sur la générosité des connaissances de Kelly pour avancer dans l’aventure, le binôme était parvenu à économiser une grande majorité de leurs sous. De quoi faire largement le plein de bouteilles d’eau minérale.

Le pas est rapide, déterminé ; ils devaient impérativement atteindre Glenmorgan avant dix-neuf heures s’ils voulaient avoir le temps d’effectuer un brin de porte-à-porte -grand spécialité de Kelly depuis sa tendre enfance. Mais au bout de quelques minutes de marche, un bruit suspect se fit entendre. Le duo se figea. « T’as entendu ça toi aussi ? » Lee secoua la tête ; elle avait entendu, et pas qu’un peu. L’horizon était si plat qu’il ne pouvait s’agir que d’un animal. Rien dans les arbres. Un nouveau crac : cela provenait des herbes hautes. “Qu’est-ce que…” Et il déboula sur le bitume tout à coup, le serpent. Il avait beau être petit, les australiens savaient qu’il ne fallait jamais juger une créature sur sa taille. La brune aurait parié que son regard jaune les fixait. Quoi qu’il en soit, il s’était arrêté devant eux. Lee, elle, lâcha un cri si long et strident que même le caméraman eut le réflexe de se boucher une oreille. “HIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIII !!” La voilà qui se mit à courir dans tous les sens, sans aucune direction précise, hurlant, poings serrés, piétinant parfois sur place comme si l’invertébré lui avait grimpé dessus. C’était comme lorsque l’on croise une araignée ; la seconde suivant, l’on est persuadé de la sentir quelque part sur la peau. Et la caméra n'en ratait pas un bout. Finalement, dans sa crise, Kelly se précipita vers un bâton dans les herbes et se mit à frapper le sol incessamment là où, d’un seul oeil ouvert, elle supposait que le serpent se trouvait. “Ah, va t’en ! Sale bête ! Dégage ! Oust ! Zou !” S’agiter de la sorte était certainement le pire des comportements à adopter et le meilleur moyen d’énerver le reptile. Pourtant, celui-ci prit peur et termina de traverser la route vers le reste du bush. Kelly, elle, continuait de se battre contre les moulins à vent, les yeux clos. “Il est parti ?”

Ce qui devait arriva.

On se retrouve au milieu de nulle part dans un endroit qui semble sauvage et un brin trop hostile à mon goût. L’Australie est plutôt réputé pour abriter tout un tas de bêtes par franchement adorable et entrant dans la catégorie des bêtes que l’on ne voudrait jamais croiser dans notre vie.

Un bruit dans le bush commence à me faire légèrement paniquer. Ce n’est rien, au départ, quelques bruissements de feuilles séchés, un léger crissement et puis plus rien. Je suis persuadé d’avoir rêvé. Mais lorsque le bruit reprend bien plus proche de nous, je commence à flipper un peu plus. Je n’aime pas les bêtes, d’accord ? J’ai peur des araignées et je n’en mène pas large devant un serpent ou autre. Pourtant, Martin m’a appris tout ce qu’il y avait à savoir si je devais un jour me retrouver nez à nez avec ce genre de bestiole. Non mais je l’ai rêvé celle-là, pour sûr. C’est la fatigué et le stress de ne pas pouvoir trouver une solution pour notre nuit et la suite de notre aventure.

Et soudainement, un serpent apparaît devant nous. Je ne sais pas si je suis plus effrayé par l’animal en lui-même ou par le cri strident que lâche Kelly à mes côtés. Elle hurle si fort que j’en sursaute et manque de perdre mon équilibre. « Attention. » Elle se met à taper des pieds en hurlant et j’ai peur que dans la précipitation elle se rapproche trop du rampant et qu’il en profite pour l’attaquer. « Kelly. KELLY ! » Mais elle ne m’entend plus du tout la jeune femme, elle tape des pieds et hurle telle une gamine effrayée. Je ne sais plus si je dois avoir peur de l’animal ou de ma coéquipière. Je crois que même le serpent est surpris. Elle attrape un bâton, manque de m’éborgner avec et se met à frapper le sol de toutes ces forces. Je me souviens que les serpents ont peur de nous quand on tape sur le sol et me met à taper des pieds de toutes mes forces aux côtés de Kelly. Oui je me cache derrière elle, ELLE A UN BATON ! Arme imparable contre un serpent, c’est bien connu après tout. « Ah, va-t’en ! Sale bête ! Dégage ! Oust ! Zou ! » Oh qu’ils doivent se régaler nos compères qui ne perdent pas une miette du spectacle. Les deux abrutis qui crient et qui tape des pieds comme des enfants.

« Il est parti ? » Je regarde tout autour de nous et remarque que le serpent est en train de prendre la fuite de l’autre côté de la route, mais Kelly frappe encore un coup, contre ma jambe cette fois. « Il est parti, Kelly, c’est bon. » On se regarde et j’éclate de rire. « Mon dieu… » Je peine à retrouver mon souffle et j’ai les larmes aux yeux tant le fou rire est honnête. « A noter, t’es dangereuse avec un bâton. »

Et on reprend notre route comme si rien ne c’était passer, comme si on n’allait pas finir sur Internet avec notre danse un peu bizarre qui effraye le serpent australien. C’était drôle, mais je sens que l’on va devenir un meme ou une connerie dans le genre. Une fois assuré qu’aucun serpent ne traîne dans le coin, on reprend notre route, Kelly toujours armée de son bâton. « Et donc, tu n’as jamais campé ? » Que je lui demande pour faire un peu la conversation. On a le temps même si déjà, on aperçoit ce qui semble être la silhouette d’une ville, loin à l’horizon. « T’inquiètes pas je m’y connais bien en montage de tente et tout le reste. » que j’ajoute en souriant.

« Il est parti, Kelly, c’est bon. » Ouf. L’australienne se détendit soudainement, abaissant son bâton avec un long soupir de soulagement. Penchée en avant, elle reprenait son souffle comme si elle venait de courir un marathon. Son coeur se remettait doucement de ses émotions. Fichu serpent. Un contact visuel avec Loan suffit à mettre en relief tout le ridicule de la situation et déclencha un long fou rire commun. De quoi relâcher la pression après cette mésaventure. Du coin de l’oeil, elle devinait les caméras braquées sur eux. Ils venaient d’être aussi braves que paniqués et absolument ridicules devant l’Australie toute entière -du moins, lorsque l’émission arriverait à l’antenne. L’une des plus grandes appréhensions de Kelly en participant à cette course était justement de se ridiculiser de la sorte ; maintenant que cela était fait, elle réalisait qu’elle s’en fichait bien, au final. Elle venait de combattre un serpent avec un bâton, perdue dans le désert avec seulement une carte et une boussole au bout de plus de trois-cent kilomètres en stop. Pouvoir le dire tout haut valait bien plus que la peur du ridicule. « A noter, t’es dangereuse avec un bâton. » commenta Loan tandis qu’ils réunissaient à peine leurs esprits. “Et je retiens que t’es un froussard.” elle rétorqua en essayant de faire atterrir l’arme fatale sur son épaule dans un mouvement circulaire digne d’une scène de série -mais le bout de bois lui atterrit sur le coin du crâne, lui faisant lâcher un petit “aïe” de maladresse.

Remis de leurs émotions, le duo reprit la route. Lee garda le bâton, en cas de seconde attaque de reptile -ou de tout autre animal. Sur la main sur tenait celui-ci, elle remarqua que sa manucure avait été ruinée par leur bataille. “Oh non, mon ongle…” qu’elle murmura, dépitée qu’il soit cassé. Quelle poisse. « Et donc, tu n’as jamais campé ? » demanda Loan, la sortant de sa complainte futile. Entre ses soucis de cuticules et la réponse qu’elle s'apprêtait à lui donner, son binôme allait rapidement comprendre que Miss Ward était bien plus une adepte du raffinement que des voyages en camion-benne. “Jamais. Je considère que des vacances sont dignes de ce nom uniquement si je peux commander des muffins à deux heures du matin après un bain de minuit si l’envie m’en dit. Rien ne vaut le room-service et une piscine chauffée.” Elle n’avait jamais compris comment certains pouvaient appeler vacances une semaine qui leur donnait encore plus de fil à retordre que le quotidien habituel : monter une tente, se doucher dans des conditions douteuses, craindre de se faire voler ses affaires à tout moment et, le pire du pire, devoir faire la chenille. « T’inquiètes pas je m’y connais bien en montage de tente et tout le reste. » La brune haussa un sourcil malicieusement. “Tu me donnes presque hâte de voir ça.” En tout cas, les caméras, elles, n’en manqueraient certainement pas une miette.

“Je t’ai pas demandé ce que tu fais dans la vie, quand on était dans le camion vers Miles.” reprit la brune pendant que ses pieds se mettaient machinalement l’un devant l’autre sans plus qu’elle n’y prête la moindre attention. Au jugé, il leur restait vingt bonnes minutes de marche avant d’atteindre la première habitation de Glenmorgan. Kelly priait intérieurement de toutes ses forces pour que la chance leur sourit à nouveau là-bas. Après ce qu’ils venaient de subir, ils méritaient que le karma soit de leur côté.

Libérer de la menace du grand méchant serpent, on éclate de rire comme des enfants. C’est libérateur après le coup de stress que l’on vient de se prendre. Il n’était pourtant pas si énorme ce serpent, mais merde, il nous aura bien foutu la frousse. Un nouveau regard vers Kelly et je repars dans une nouvelle slave de rire. Cela a au moins le mérite de me confirmer que notre binôme semble bien fonctionner. Oui même lorsqu’elle se moque de moi. « Et je retiens que t’es un froussard. » Je hausse les épaules et ouvre les bras dans un geste hautement théâtrale. « Que veux-tu, on peut pas être parfait en tout. » Et en riant à nouveau, j’effectue une petite révérence d’abord devant Kelly, puis devant la caméra. « On sait déjà que vous allez utiliser tout ça contre nous. » que je plaisante en pointant Parker du doigt. « Je veux le meilleur des montages. »

On reprend notre route après cet événement qui restera graver dans les mémoires. On tente d’avancer d’un pas assuré, mais l’un comme l’autre, on ne cesse de fixer les alentours à l’affût du moindre bruit. Je crois que la prochaine bête pourrait y laisser la vie tellement Kelly est prête à sauter sur tout ce qui bouge sans plus aucune hésitation. Ne voulant pas laisser le silence nous englober et briser le moment de complicité, je tente d’entretenir la conversation. « Jamais. Je considère que des vacances sont dignes de ce nom uniquement si je peux commander des muffins à deux heures du matin après un bain de minuit si l’envie m’en dit. Rien ne vaut le room-service et une piscine chauffée. » Je hoche la tête. Elle se débrouille plutôt bien depuis le départ si elle a de tels standards. Fut un temps, j’aurais répondu comme elle, puis j’ai fait une tournée dans un bus minuscule et j’ai partagé toute ma vie avec une troupe entière. Ça vous change un homme tout ça. « Bon le room service s'est foutu, mais on peut tenter de se trouver un toit tous les soirs. » que je lui propose comme un pacte entre nous. « Je fais les sourires et toi, tu parles, tu es très convaincante avec les gens. » Une des premières observations que j’ai pu faire à son sujet. Elle est un véritable mystère Kelly, mais au fur et à mesure des heures, j’ai l’impression de découvrir quelqu’un de vraiment intéressant. « Tu me donnes presque hâte de voir ça. » « Eh c’est vrai ! Mon meilleur ami me force à camper tous les ans. » Dieu Martin va m’entendre dire cela à la télévision maintenant. « Il participe au jeu aussi d’ailleurs. »

Le soleil est aveuglant, mais on avance à un bon rythme. On devrait pouvoir se trouver un refuge pour la nuit. J’en reste convaincu. Toujours à voir le verre à moitié plein. Je suis un optimiste de nature. « Je t’ai pas demandé ce que tu fais dans la vie, quand on était dans le camion vers Miles. » J’ai appris qu’elle était sommelière, mais c’est vrai que je n’ai pas donné plus de détails sur ma vie. « Je suis comédien. » Je souris un peu. « A la Northlight Company depuis peu. Puis j’ai eu un rôle dans un remake de West Side Story juste avant. » Je me perds dans mes souvenirs, le temps d’un instant. « Je passe ma vie sur scène à jouer la comédie, danser et chanter. » Un hochement d’épaule, c’est ma vie. C’est ce que j’aime par-dessus tout. « Tu vas au théâtre parfois ? » Je suis sûr que oui, elle a le profil pour. Et la proximité, notre solitude me pousse à poser une autre question. « Pourquoi tu t’es inscrit à cette émission ? Je veux dire… Vraiment. »

Elle était loin de ses standards, mais Kelly se surprenait à faire preuve d’une certaine adaptabilité. Plus d’une fois elle avait voulu exprimer le fond de sa pensée, demander à Samuel par quel miracle sa boîte de conserve roulait toujours, réclamer autre chose que les plats qui leur étaient servis gracieusement chez Cynthia, se plaindre de la conduite de David et courir loin de James. Mais s’était tue, docile. « Bon le room service s'est foutu, mais on peut tenter de se trouver un toit tous les soirs. Je fais les sourires et toi, tu parles, tu es très convaincante avec les gens. » Cela, elle le savait bien, elle acceptait donc le compliment bien volontiers. Lee avait le contact facile et cela était d’une grande aide au quotidien. Dans une aventure telle que celle-ci, c’était un avantage inestimable. “Deal.” elle approuva. Cependant, la brune espérait presque qu’ils aient au moins une fois l’occasion de camper, juste pour que Loan puisse prouver ses qualités de monteur de tente. Presque. Il disait avoir l’habitude, mentionnant les voyages réguliers avec un ami. « Il participe au jeu aussi d’ailleurs. » qu’il précisa, ce qui ne manqua pas de surprendre l’australienne. “Oh, alors toi aussi tu connais du monde dans la course ! Seulement lui, ou d’autres ? C’est quoi son nom ?” Avec de la chance, peut-être se croiseraient-ils dans le cadre de la course. Et sinon, elle en ferait la connaissance plus tard, une fois arrivés à Charleville pour le week-end.

Puisqu’un brin de marche les attendait encore, la silhouette de quelques maisons modestes se dessinant à l’horizon, Kelly s’engagea sur un terrain plus personnel avec son binôme, comme elle s’était promis qu’elle le ferait si elle en avait l’occasion. Après tout, il se pouvait bien qu’ils passent plus d’une semaine l’un avec l’autre, à vivre mille péripéties, alors il lui semblait important d’apprendre à mieux se connaître. Loan était donc comédien et danseur. Kelly adorait le film West Side Story, savoir que son binôme faisait partie d’un casting live ne la rendait que plus fière. « Tu vas au théâtre parfois ? » lui demanda-t-il. Tout en elle hurlait un grand oui si bien qu’elle n’aurait même pas eu à ouvrir la bouche si elle l’avait voulu. “Ca m’arrive, parfois. J’adore les comédies musicales surtout.” Les pièces de théâtre, c’était une autre paire de manches. Les classiques l’ennuyaient souvent et les modernes étaient parfois incompréhensibles. “Après tout ça, j’espère que je pourrais te voir sur les planches.” elle ajouta avec un sourire complice. Leur duo avait si bien commencé qu’elle s’imaginait facilement garder le contact.

« Pourquoi tu t’es inscrit à cette émission ? Je veux dire… Vraiment. » l’interrogea Loan, ce qui était encore plus personnel que ce à quoi Kelly s’attendait si tôt dans la course. Visiblement, le jeune homme avait noté qu’elle se montrait discrète à ce sujet. Il n’était pas dans sa nature de s’étaler, prendre de la place ; elle parlait peu d’elle, estimant qu’il n’y avait pas grand-chose à dire de sa personne. Elle pensait également que sa démarche et ses questionnements n’intéressaient personne. Mais puisque Loan se montrait avide de comprendre, elle accepta de répondre, le regard fuyant ; “J’ai divorcé il y a trois ans, et… je suis un peu perdue, depuis. J’ai du mal à rebondir, et je me suis dit que sortir de ma zone de confort pourrait m’aider à m’ouvrir à de nouvelles perspectives.” Elle lui épargnait le couplet sur son enfance, ses parents, et le coming out de son mari. Elle ne tenait pas à ce que les caméras capturent sa vie privée pour la distribuer au pays. “J’espère que ce n’est pas trop grave ce qu’il a, ton père.” rebondit-elle avec pudeur. Elle n’attendait pas de Loan qu’il lui révèle les détails de la maladie de celui-ci, ni même si elle était encore d’actualité.

La première maison n’était plus qu’à quelques mètres. “Encore un petit effort !” encouragea Kelly, retrouvant un peu de vigueur dans ses jambes. Malgré les habitations, le patelin semblait désert. Quelque chose paraissait figé, comme si le temps n’était plus passé ici depuis un demi-siècle. Les voitures étaient anciennes, ternies par le sable. Peut-être n’y avait-il personne, au final. Et camper dans une ville fantôme était loin de réjouir Kelly.

« Oh, alors toi aussi, tu connais du monde dans la course ! Seulement lui, ou d’autres ? C’est quoi son nom ? » La surprise avait été immense lorsque je me suis retrouvé nez à nez avec Martin, le jour du départ. « Je connais que lui. Il s’appelle Martin. » Si on le croise au cours de l’aventure, je pense que l’on pourra tenter de s’entraider. Je n’en sais trop rien pour être honnête vu la férocité de sa coéquipière. « Il a l’air d’être tombé sur une nana un peu perchée en coéquipière. » que je pouffe en repensant au scandale qu’avait fait la blonde parce que j’avais osé la bousculer un peu. « J’aimerais bien le croiser. » M’assurer qu’il va bien, qu’il ne force pas trop sur son corps encore affaibli malgré tout. Je vais éviter de me montrer trop inquiet face à la jeune femme, pas sûr qu’elle est envie de me voir en mode protecteur.

Il faut croire que la marche délie les langues. C’est en toute simplicité que l’on commence à échanger sur nos vies, que l’on fait connaissance en douceur. « Ça m’arrive, parfois. J’adore les comédies musicales surtout. » Mon sourire s’illumine à l’entente de ses paroles. « C’est tout ce que je sais faire. » Je ne me vante pas, loin de là. Je fais du bruit, je me fais très souvent remarquer, mais me mettre en avant n’a jamais été ma tasse de thé. « Après tout ça, j’espère que je pourrais te voir sur les planches. » « Ce serait avec plaisir ! » que j’exprime dans un sourire avant d’ajouter : « Et après, on ira se boire un verre de vin et tu m’expliqueras comme on choisit un bon millésime ! » Je hoche la tête, impose un peu mon idée, mais espère qu’elle pourra se réaliser.

« J’ai divorcé il y a trois ans, et… je suis un peu perdue, depuis. J’ai du mal à rebondir, et je me suis dit que sortir de ma zone de confort pourrait m’aider à m’ouvrir à de nouvelles perspectives. » Je tourne la tête afin de croiser son regard. « C’est une belle démarche. » que je lui assure alors que mon bras vient légèrement effleurer le sien. « J’espère que ce n’est pas trop grave ce qu’il a, ton père. » Elle vient de répondre à une question très privée, je peux bien lui accorder ce pan de ma vie. « Ça ira, je crois. » Je n’ai pas vraiment envie de penser à tout cela maintenant, pas alors que les caméras sont si proches de nous. « Il faut rester positif. » Toujours.

Et après ce qui m’a sembler comme des heures de marche, on arrive enfin aux limites de Glenmorgan. L’endroit semble… Complètement désert et un brin flippant. « Ça me fout les jetons. » Merde, je me pensais quand même bien plus courageux que cela. Je crois que je ne me suis pas encore tout à fait remis de notre rencontre avec James et cet endroit… Et bien cela ressemble à un repère de James. On passe devant un garage qui semble complètement abandonner malgré les magnifiques voitures anciennes garé devant. « Au pire, on pique une Cadillac. » Je sais pas si le vol est vraiment autorisé dans l’émission, mais cette ville… Je le sens pas.

Et on arrive devant une première maison qui semble habité, mais qui pourrait très bien sortir tout droit d’un film d’horreur. « Tu frappes en première. » Et je pousse littéralement la jeune femme devant la porte. Pour le courage et la virilité, on repassera.

Spoiler:

“That’s a date.” conclut Kelly, très emballée par l’idée énoncée par Loan. Le théâtre suivi d’un verre de vin avec son partenaire de voyage, c’était fort séduisant, et elle les y voyait parfaitement. Peut-être même feraient-ils plus ample connaissance avec le reste des candidats et qu’ils étendront leur cercle d’amis au delà de ceux qu’ils connaissaient déjà. Puis, comme les promotions d’étudiants se retrouvant tous les cinq ans, ils pourraient se retrouver régulièrement autour d’un dîner. Oh, la fée du logis en elle s’imaginait parfaitement cuisiner pour tout ce beau monde. Et cela lui donnait faim. Heureusement, la ville n’était plus si loin.

En passant une première maison et un garage automobile, Kelly et Loan se firent plus silencieux. La suite de la discussion attendrait qu’ils aient trouvé un lieu où dormir, de quoi manger, et un moyen d’atteindre la prochaine ville sans avoir à traverser le désert à pied. Le jeune homme n’était pas rassuré par le calme plat de l’unique route qui traversait ce pseudo-village de part en part. “J’espère qu’on trouvera au moins quelqu’un…” souffla la brune. Il y avait bien de la lumière à travers les fenêtres des maisons sur pilotis, mais bizarrement, aucune ne lui inspirait confiance. Cependant, il fallait bien commencer quelque part, et le duo s’approcha d’une première porte. “Toujours aussi brave, hm ?” se moqua gentiment Kelly tandis que Loan se cachait derrière elle. Puis elle frappa et entendit des pas à l’intérieur, lourds et lents comme ceux d’un ogre.

L’homme qui leur fit face en avait d’ailleurs tout l’air. Très grand, ses bras faisait quatre fois le diamètre d’une cuisse de Kelly et ses mains, larges comme des palmes, semblaient capable de lui écraser le crâne comme un fruit mûr. Son crâne était dégarni mais ses sourcils froncés, lui donnant l’air sévère, pour ne pas dire terrifiant. Et surtout, il ne disait rien. Pas un mot. Désarçonnée et mal à l’aise, l’australienne força un sourire -sûrement peu convaincant. “B-bonsoir…?” Pas de réponse. Fort bien. “N-nous cherchons un endroit pour passer la nuit, et euh… un moyen de locomotion pour aller vers Charleville.” Il la fixait, puis scrutait Loan avec la même intensité intimidante. Il lui donnait froid dans le dos. “V-vous nous aideriez ?” demanda-t-elle, de moins en moins certaine de vouloir l’aide d’une personne aussi menaçante. Encore une fois, il laissa le silence planer. Il grogna en les détaillant. “Vous, oui. La tantouze, ça rentre pas chez moi.” finit-il par grommeler d’une voix caverneuse. De trop nombreux paquets de cigarettes étaient passés par là. “M-monsieur…” voulut reprendre Kelly afin de prendre le parti de son binôme, mais l’homme ne lui en laissa pas l’occasion. Celui-ci commençait déjà à vociférer des horreurs en faisant de grands gestes en direction de Loan, notamment pour lui ordonner de s’éloigner. “Dégage de mon perron, sale ***** retourne ***** et va bien ******* ” Les oreilles chastes de Kelly en auraient saigné tant les propos -censurés avec soin par la production- étaient d’une haine inouïe. Les yeux écarquillés, elle n’osa pas bouger, clouée sur place par la surprise que lui suscitait pareil comportement virulent. “Monsieur ?” L’homme commençait à sortir de la maison, voyant que Loan ne s’éloignait pas assez à son goût. Kelly se souvint qu’elle tenait toujours son bâton à la main.

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