Et les moines, oh les moines. Il serait resté là des heures durant Jack, en vrai. À rien dire, son rêve le plus cher, le gars qui articule un mot à la minute et encore, faut être bon. Colleen a l'air aussi reposée que lui, c'était pas une mince affaire aux yeux des autres de se relaxer quand on s'est perdus, et quand son sort de la nuit reposait sur les épaules d'un homme de foi qui médite pour arriver à mettre le doigt sur leur sort. Mais eux deux, leur duo atypique, il finit par bien fonctionner, par se complémenter.

Y'a un caméraman qui a allumé un cierge avant qu'ils ne partent tous, probablement pour une personne décédée à voir le voile qui est passé dans son regard. Jack qui est mal à l'aise mais qui l'a vu faire - ils ont partagé un coup d'oeil, une brève seconde plus tard. Il sait, lui aussi, les deux ont perdus quelqu'un de cher et les deux n'en parleront jamais. Personne vit son deuil de la même façon et Jack le vit encore de toute manière. La femme de sa vie qui l'a arrêté sa vie, quand elle s'en est allée.

Et eux aussi, ils s'en vont. Ils marchent et ils prennent du soleil, ils planifient la suite et ils découvrent la ville. Qui n'a rien de bien glorieux, Inglewood n'est pas destination vacances. Mais les gens sont bavards et au détour d'une clope prêtée par un inconnu Jack en apprend plus sur un festival de musique qui avait lieu dans le coin et qui s'est terminé la veille. Ils discutent d'artistes émergeants qu'ils connaissent en commun, de bands qui n'ont rien de bien gros et certainement pas de grands noms, mais qui misent sur la musique, la vraie. Et ils parlent, et ils parlent encore. Et ils finissent par même parler de ROA, faut dire que les caméras mettent la puce à l'oreille. Le gars a un van, le gars monte vers Cameby, le gars offre la balade et c'est ironique de dire que cette clope partagée vient de leur sauver la vie. La seconde d'après, c'est presque trop facile quand Colleen et Jack grimpent dans le Westfalia de River, leur conducteur du jour, bien moins louche que celui de la veille. Sa copine Moon est sur le siège passager, rouquine et solaire à rire pour un tout, pour un rien.

Sur le chemin par contre, entre deux chansons grattées sur le ukulele que tout de suite Jack a repéré et le patchouli allumé pour purifier les ondes et leur souhaiter bonne chance dans leurs aventures, il reconnait une chevelure blonde sur la route, Epstein. Une chevelure blonde, un majeur haut levé, une lueur de rage dans les yeux et des dents acérées. « On peut arrêter? » il chuchote, à l'oreille de Colleen, moins d'un mètre avant d'atteindre le duo d'Ivy. « Elle va le tuer si on arrête pas. » ambiance. « Je pense que j'ai fait une alliance avec elle avant qu'on parte. » et alors? « Ça fera pas de tort, de l'avoir de notre côté. Si elle le tue pas lui, elle tuera nos adversaires. » il pouffe, et River ralentit. Voyons voir qui mourra aujourd'hui.

     
@colleen sainsbury
@ivy waterhouse
@martin murphy
@may glitters

Je vais le tuer. Ca se verrait même pas ici. Je pourrais payer les caméramans pour qu’ils arrêtent de filmer, je m’occupe de lui arracher la tête. Et on le verrait même pas si je finissais par l’enterrer dans un coin de la cambrousse. Il y a des arbres, de la terre. C’est parfait. Je fais des plans dans ma tête, et je me demande pourquoi le kangourou n’a pas réussi à l’assommer ça m’aurait fait des vacances. Les caméras me suivent alors que je suis en train d’imploser, je marche même plus vite que lui. C’est pour dire à quel point mes jambes tentent d’évacuer la pression et l’énervement.

Je lui fais un doigt très long quand on arrive enfin sur une route. Pitié faites qu’il se fasse écraser par une voiture. “Bouge toi !” Et là c’est moi qui dis au papy de l’aventure de se dépêcher parce que sinon on ne trouvera jamais d’abris avant la fin de la journée. Je ne dormirai pas dehors, je n’ai jamais touché à une tente et ce n’est pas parce qu’on est dans une aventure de voyage que je compte le faire. Je pourrais être d’une humeur encore plus affreuse si on ne trouvait pas à se mettre un toit sur la tête.

Un van qui ralentit et je fais des signes. Je ne laisserai pas une voiture de plus passer, même s’il faut que je m’assois sur le capot pour qu’il se sente obligé de nous emmener quelque part. Il s’arrête. “Martin si t’es pas là dans 2 minutes je te jure que je me barre sans toi !” Je le vois un peu plus loin, il a largement le temps de débarquer en deux minutes. Et j’ouvre les porte avant de croiser le regard de Jack. Encore Jack. “Encore toi ?” Pourquoi Jack est constamment sur ma route. Peut-être parce qu’on suit la même ? Je grimpe et me mets à côté de lui. Je regarde la brune qui l’accompagne de haut en bas, je ne la salue pas. Je suis bien trop enragée pour ça.

Plus jamais, OH NON, PLUS JAMAIS je n'écouterais les conseils de Bear Grylls. Alors oui, c'est un aventurier hors paire, il a un courage infaillible et a déjà fait tout ce qu'on peut faire dans la vie, mais alors ses connaissances concernant les animaux c'est pas ça ! Et en plus avec Ivy qui ne comprends clairement rien aux animaux sauvages et qui se barre en courant, je n'ai, moi non plus, pas le choix que de la suivre, car si je reste sur place il est évident que je serais la première cible des griffes de l'animal. Et je n'ai pas prévu de mourir.

Ainsi donc je me met à courir à la suite d'Ivy. En tant normal j'aurais facilement réussi à la rattraper et à maintenir le rythme, mais c'est maintenant que mon corps me fait comprendre qu'il ne s'est pas encore tout à fait remis de la première poussée de la maladie. Je manque clairement en endurance musculaire et en endurance tout cours, me faisant un peu trop rapidement distancé par Ivy. Et le Kangourou qui s'approche dangereusement !

Heureusement que nous pouvons compter sur l'équipe de tournage et leur voiture qui finie par se mettre entre l'animal sauvage et moi-même, lui coupant ainsi la trajectoire et le dévie de sa course. Celui-ci, d'ailleurs, fait rapidement demi tour et détalle de l'autre côté. En voyant cela je ralentis rapidement et m'immobilise, me penchant, haletant, vers l'avant. Du coup de l'oeil je remarque qu'Ivy s'est arrêté, elle aussi et me regarde l'air de me demander ce que je fou, alors qu'un van s'approche et s'arrête face à elle. Je la vois qui discute avant qu'elle ne me hurle que j'ai deux putains de minutes pour venir. Je me redresse, prend une profonde inspiration puis soupire doucement et me met en route, plus lentement et difficilement que ce que j'aurais aimé.

 «ça va, pas besoin de gueuler comme ça. Je suis pas encore ... » je me tais en apercevant Jack, l'homme avec qui j'ai sympathisé alors que nous étions aligné, un bandeau sur les yeux  « Eh salut !» que je m'exclame, ignorant totalement Ivy  «Vous nous allez où ? »  «là où le vent nous porte » répond le chauffeur. Cheveux long, barbe fournie, yeux bleu azur teint bronzé, vêtu d'un sarouel et d'un top en coton délavé, ils nous fait signe de venir alors que celle qui l'accompagne referme la porte  «Moi c'est River et voici ma douce Moon » se présentent-ils. Joignant ses mains devant son cœur, Moon nous accueille en s'inclinant légèrement en avant  « Plus on est de fou plus on ris !» dit-elle avec un large sourire avant de reprendre place sur le siège passager.

Je m'installe sur une des banquettes du van aménagé et sourit à la femme qui accompagne Jack  «Martin » me présentais-je avant de reporter mon attention sur le quarantenaire  «Alors comme ça t'as quand même été enrôlé dans une secte... » soufflais-je à son attention en référence à notre discussion de hier matin.

“Encore toi ?” elle va tuer quelqu'un, il l'avait prédit. Si c'est pas Martin, ça sera Jack, ça sera Colleen, ça sera River ou Moon ou ça sera le monde entier - au choix. Il est probablement suicidaire sans même le savoir Epstein, quand il éclate de rire à la voir qui broie du rouge, du noir, un arc-en-ciel de couleur et de hargne à travers. Elle aurait besoin d'un peu de sauge fumée elle aussi, et lorsque les portes du van glissent sur leurs pentures qui grincent, il espère franchement que les vapeurs d'encens relaxant qui y brûle depuis de longs kilomètres l'aident à détendre son petit coeur, sa ride du lion qu'elle accentue d'une colère qu'il juge rien que passagère.

« Eh salut !» Martin qu'il reconnait de suite, le sourire et le signe du menton le saluant tout autant. Il a survécu, c'est tout à son honneur.  «Vous nous allez où ? »  «là où le vent nous porte » un nouvel éclat de rire en commun qui monte, quand Jack et Colleen se lancent un regard en coin. Ils sont de vrais hippies et ça dérange personne, au sens où ils restent tout de même un lift gratuit. On prend ce qu'on peut, et quand on est Jack Epstein, on se laisse aller là où le vent va, aussi. «Moi c'est River et voici ma douce Moon » les namaste se perdent, les invitations aussi, c'est la caravane du bonheur et de la paix dans le monde. Le canadien se décale pour laisser l'équipe et les deux autres binômes se joindre à leur roadtrip improvisé sur trame de Beatles à la clé. « Plus on est de fou plus on ris !»

Ceux qui ne se connaissent pas se présentent, les autres se serrent les mains, s'embrassent les joues. « Alors comme ça t'as quand même été enrôlé dans une secte... » « Promis, j'ai pas goûté leur Kool-Aid. » qu'il rigole, le brun, le ukulele encore calé sur ses genoux et le sourire de vainqueur qui n'a absolument rien vaincu sur les lèvres. « Vous avez pris part à quel test en laboratoire, vous deux? » à son tour de questionner, sans grand espoir qu'on lui dévoile des bribes de vérité. Ils sont peut-être rusés maintenant que l'aventure est bel et bien commencée. Alors il se moque gentiment, les vêtements tachés et les peaux bariolées de terre dévoilant qu'ils ont eu à survivre aux éléments, sûrement. Ses doigts grattent distraitement les cordes, il improvise un classique au fil de la conversation.

la chanson pour accompagner la route:

Non mais où est ce qu’on est tombé encore ? Un van, déjà j’aurais dû me méfier et aller me cacher derrière un buisson. J’aurais dû me méfier des conducteurs quand j’ai vu Jack dans la voiture avec un aussi grand sourire. Des hippies, et je dois soupirer bruyamment au moins dix fois quand tout le monde se présente. On perd du temps là non ? Ils peuvent pas juste conduire jusqu’à une destination précise et arrêter de parler et de sourire ? Ces sourires sont carrément flippants. Je tourne la tête vers Jack, complètement perdue dans ce qu’il se passe. “C’est pas une ville ça.” Oh et je déteste ça. Ils vont nous perdre, c’est pas sur la carte là où le vent nous porte. Martin m’ignore, il a l’air de s’en foutre de où on peut bien finir mais moi ça me fait pas rire.
Je ne veux pas dormir dehors.

Je croise les bras sur ma poitrine, pourquoi tout le monde est chiant aujourd’hui ? Ils se sont donnés le mot ou quoi ? Je suis épuisée, et ce genre de personne m’épuise encore plus. Il y a trop de positivité, trop de calme dans une seule voiture pour que je puisse m’y sentir bien. Je regarde par la fenêtre pour ne pas faire une nouvelle remarque quand tout le monde pouffe de rire et que moi je lève les yeux au ciel. Mon doigt d’honneur prend la direction de Jack cette fois, et pas Martin. Ca fait 2 en une journée c’est un bon ratio je trouve. “Martin a essayé de gérer un kangourou.” Je grogne presque. On a couru pendant je ne sais combien de temps. Martin a failli se faire tuer, par moi, puis par le kangourou, puis re par moi et la journée n’est pas fini.

Il a trouvé un ukulele. Qui laisse trainer un ukulele dans un van ? Si je posais toutes mes questions je n’aurais pas arrêté de parler depuis au moins 10 minutes. Et il commence à jouer Jack, ça ne m’étonne pas. Je me tourne vers lui en secouant la tête. La musique les met tous dans l’ambiance mais moi je ne bouge pas vraiment. Je lève les yeux au ciel encore une fois avant de jeter encore un coup d’oeil à Jack. C’est qu’il sait vraiment jouer de la musique, on reconnaitrait presque le morceau. “Tu joues au rockeur ?” Un léger rictus passe, un quart de seconde sur mon visage avant que je ne finisse par me reconcentrer sur le paysage.

Revoir Jack est un sacré soulagement et procure en moi une joie immense. Nous n'avons pas pu échanger beaucoup hier avant le départ de la course, mais le peu de mots que nous avons partagé m'a donné l'impression qu'il soit vraiment un bon gars. Il avait l'air cool, dans le sens où il partage mon humour et qu'il ne semble pas se prendre trop la tête. C'est sans doute pour ça que j'accepte volontairement l'invitation de la dénommée Moon lorsqu'elle nous autorise à venir avec eux dans le van. Ne laissant pas le choix à Ivy, je prend place à côté du binôme de Jack, me présente rapidement et lâche un commentaire sur la 'secte' dans laquelle l'homme s'est enrôlé.

Je pouffe de rire lorsque, du tac au tac, il me répond ne pas avoir but leur kool-aid avant de nous demander par quel test de laboratoire nous sommes passé. C'est là que Ivy réagit en disant que j'ai essayé de gérer un kangourou. Je lui lance un regard en coin puis hausse les épaules  « J'avais bien réussi à gérer la vipère pendant 24h, je me suis donc dit qu'un kangourou se serait facile» haussais-je les épaules, traitant ouvertement Ivy de reptile.

Mes yeux se posent ensuite sur Jack qui, tenant fièrement un yukulele dans ses mains, commencent à gratter les cordes. Très vite, je reconnais le classique de Highway to hell et, me reculant contre le dossier de la banquette, j'écoute la musique, dodelinant de la tête sur le rythme. Si pour la plupart d'entre nous cette chanson fait l'unanimité, elle n'est clairement pas du goût de Ivy. Je lève les yeux au ciel puis reporte mon attention sur Jack  «Je crois qu'elle préfère quelque chose de plus doux. Genre ... » je réfléchis rapidement  «Baby shark, ou twinkel twinkel little star ...enfin quelque chose pour les gosses quoi » comment ça je vais encore plus énervé Ivy ?

Spoiler:

Clairement, il y avait pire comme binôme dans l’aventure que Jack Epstein. Avec lui, la course vers Charleville prenait même de faux airs d’excursion hippie. Surtout depuis qu’il était parvenu à dénicher ce qui s’apparentait pour lui au Saint Graal : la cigarette et le ukulélé. Tout simplement.

La veille, la course les avait amenés à rencontrer un moine tibétain qui, après une longue méditation, leur avait permis de passer la nuit dans l’église communautaire d’Inglewood. L’ambiance était particulière, mais Colleen s’était finalement sentie plutôt à l’aise et protégée dans le sanctuaire. Ils en avaient profité pour faire un peu connaissance avec les caméramans et pour une première nuit, la jeune femme était parvenue à trouver le sommeil sans trop de difficultés. Grâce à la générosité du moine tibétain qui à défaut de leur avoir ouvert la porte spontanément leur avait quand même permis de manger à leur faim, l’Anglaise était prête à en découdre dès le deuxième jour, repue et reposée. Après avoir quitté leur gîte provisoire, Jack et Colleen étaient repartis, bien décidés à rattraper leur retard de la veille. Et là, ils avaient rencontré ces locaux qui leur avait proposé de monter à bord de leur van pour faire un bout de chemin ensemble. Direction Cameby. A trois heures de là environ. Colleen connaissait suffisamment bien la carte à présent pour savoir que rejoindre cette ville leur permettrait par la suite de suivre une ligne droite continue vers leur destination, Charleville. Portée par l’enthousiasme de Jack, elle n’avait pas trop réfléchi et s’était installée à ses côtés sur la banquette arrière. C’était grâce à son binôme qu’ils se trouvaient de nouveau en route vers leur destination, et à première vue River et Moon n’avaient pas l’air aussi louches que leur chauffeur de la veille. Avec un peu de chance, ils ne les laisseraient pas sur le bord d’une route complètement déserte, eux.

Peu de temps après leur départ, ils virent un autre binôme sur la route et Jack lui demanda s’ils pouvaient s’arrêter pour leur proposer de les rejoindre. Il semblait persuadé que la fille – une grande blonde que Colleen ne connaissait pas – allait finir par tuer son acolyte s’ils ne volaient pas à leur secours. Il lui confia aussi avoir fait une alliance avec elle avant le début de la course, et elle fronça le nez. Une alliance ne lui disait rien qui vaille, mais elle n’avait pas d’autre choix que de s’en remettre au jugement de son binôme. D’un signe de la tête, elle accepta. Quelques secondes plus tard, River ralentissait et le duo montait à bord. Si la blonde l’ignora avec superbe, Martin prit le temps de se présenter. « Colleen, enchantée » lui répondit-elle avec un sourire. En scrutant la moue boudeuse de la fille, elle glissa à l’oreille de Jack : « tu es sûr que c’est avec elle que tu as fait une alliance ? ». Clairement, elle n’était pas emballée.

Pour détendre l’atmosphère, Jack prit le ukulélé et se lança dans un morceau. Highway to hell – pourvu que ce ne soit pas prémonitoire. Colleen posa un regard ravi vers lui ; la musique apaisait les mœurs disait-on, et vu l’état du binôme qu’ils venaient de repêcher, ce ne serait pas du luxe. La faute à un kangourou, apparemment. Ou à la mauvaise humeur de la blonde, dont elle ne connaissait toujours pas le prénom. D’ailleurs, l’expression de cette dernière devint franchement réprobatrice et Colleen doutait un jour voir apparaître un quelconque sourire sur ses lèvres. Martin proposa une comptine pour les enfants, se moquant ouvertement de sa coéquipière, mais Jack ne l’entendit pas de cette oreille et resta dans le même registre. Colleen, de son côté, était plutôt conciliante : tant qu’elle pouvait éviter de se faire tuer par un regard assassin de la blonde, c’était toujours ça de pris.

“Martin a essayé de gérer un kangourou.”
« J'avais bien réussi à gérer la vipère pendant 24h, je me suis donc dit qu'un kangourou se serait facile »

Des gamins, de vrais gamins, et il rigole dans sa barbe de deux jours Jack, quand rien n'y personne n'aurait été dans un sens où Ivy et Martin se seraient entendus à la perfection. Ils ont tout pour se détester et pour se hurler dessus, ils ont le profil parfait pour faire de la bonne télé en duo, et si leurs caméramans semblent avoir de plus grosses cernes que ceux qui accompagnent Colleen et Jack depuis le début de l'aventure n'en reste que ça l'amuse, le canadien. « Nous on s'est mis à la méditation. » et ils ont dormi, et ils ont fait du yoga. Et ils sont zen, leur combo qui se complète vachement bien tant ils sont au diapason. Ils sont pas à l'abri que l'un ou l'autre explose d'avoir été aussi calme sous pression, mais pour le moment ils sont vraiment au diapason.

“Tu joues au rockeur ?” il gratte sa guitare, il a des airs d'adolescent qui croit à Satan et qui écoute les vinyles de The Who à l'envers en hurlant aux prières démoniaques et ça le fait rire Jack, what else is new. « Non je fais semblant, j'sais même pas jouer. » ça le fait rire au point où il la nargue, les fossettes bien creuses et la lueur de malice éternellement brillante dans son regard d'océan. La seconde d'après il se la joue rockeur pour vrai en pressant la mélodie et en enfilant ses doigts dans des angles qualifiés de gymnastique. «Je crois qu'elle préfère quelque chose de plus doux. Genre ... » Martin reprend, chantonne, ricane et attaque surtout, bon enfant. «Baby shark, ou twinkel twinkel little star ...enfin quelque chose pour les gosses quoi » l'enfant c'est Ivy donc, et Epstein il arrive pas à la voir comme ça. Pourtant, il sait bien que l'ambiance est au jeu là, que chacun des membres de leur binôme a les nerfs à vif et qu'il est en charge de servir de thérapie par le son en somme.  
« Oh, tu veux une comptine pour qu'elle s'endorme, c'est ça? » quel gamin à son tour, quand il entame du Metallica comme s'il avait vu le band en live des dizaines de fois - ça, c'est bel et bien le cas. « On veut chanter nous aussi! » ça s'insurge en babillant à l'avant, il rigole de plus belle, décale un solo aux notes cristallines sur un ukulele qui n'aurait jamais cru être au centre d'un show rock improvisé. « Une chanson à répondre! »

Une chanson à répondre, donc?

en vrai les trois choix c'est le chaos:

Ne pas le tuer. Ne pas le tuer. J’inspire difficilement par le nez. C’est vraiment long cette journée, et Martin est de plus en plus con. Mais c’est con, je peux pas le tuer là, y’a des caméras, et 4 témoins. Quel dommage. Même si je sais que je pourrais certainement convaincre Jack de m’aider à cacher son corps dans la campagne australienne. C’est vrai que je pourrais faire ça, je continue de réfléchir à toutes les manières dont je pourrais le faire disparaître. Et il y en a des tas je vous assure. “Ouais je m’en doutais.” Il sait jouer Jack, il sait chanter même. Mais je ne suis pas d’humeur à profiter, ou à lui rendre son sourire quand je le laisse se concentrer sur tout ce qui nous entoure mais pas sur moi. Il ne prendra pas ma mauvaise humeur, pas maintenant en tout cas. C’est à Martin d’en prendre plein la tête, et pourtant, je reste civilisée et ça va en impressionner des tas. Vous voyez, c’est lui la furie.

Mon regard lance des éclairs quand je fais des allers-retour entre Jack et Martin qui parlent de moi comme si je n’étais pas là. “Surtout faites comme si j’existais pas.” Ils ne peuvent pas faire ça, je prends bien trop de place, et tout le monde me voit. Mais il ne joue pas une comptine Jack, et si j’avais été une personne comme les autres je l’aurais sûrement remercié silencieusement en captant son regard. Mais au lieu de ça je tourne la tête et je regarde à travers une des vitres. Et ça parle, ça veut chanter, je secoue la tête. Dans quoi je suis tombée encore ? Ils commencent à chanter We Will Rock You. Je ne fais rien, je ne fais qu’écouter la manière dont Jack joue avec les cordes de son instrument. Mais je sursaute quand un abruti dans cette voiture déclenche une alarme. “On va encore finir en panne au milieu de la campagne ?”

Je suis con et j'assume, totalement, complètement. Mais Ivy ne mérite pas d'autre traitement aujourd'hui. Encore hier, ça allait, même si j'avais du imaginer qu'elle serait intenable vu comment elle s'en est prise à Sienna, mais alors aujourd'hui elle est juste incroyablement chiante. Je ne suis pas du genre à perdre patience, bien au contraire, mais elle, elle sait comment m'emmerder. En même pas 24h elle a trouvé les boutons qu'il faut pousser pour que j'explose. Fort heureusement que Jack, Colleen, river et Moon nous ont ramassé sur le bord de la route parce que je pense qu'un de nous ne serait plus de ce monde s'ils n'étaient pas arrivé là pour calmer le jeu.

Dans le van aménagé conduit par des hippies des temps modernes, je me sens tout de suite à l'aise et dans mon éléments. D'autant plus que Jack semble être quelqu'un d'adorable qui en plus ne se prend pas au sérieux en jouant highway to hell sur son ukulele. Ça ne plait pas à Ivy et du coup j'en profite pour la narguer d'avantage et me moquer ouvertement d'elle. Et ça l'énerve encore plus, elle souffle, elle rage et ne se calme pas. Même lorsque Jack commence à jouer du Metallica. C'est tout aussi bien en vrai.

 « mais t'es pas le centre du monde, tu sais » que je m'exclame lorsqu'Ivy s'insurge que nous parlons comme si elle n'était pas là.  « Ecoute et apprécie la musique. C'est donc si compliqué que ça ?» je roule des yeux  «C'est vrai que pour quelqu'un qui aime du Rihanna ou qui adule Beyoncé, tu dois pas apprécier les bonnes choses » suis-je trop méchant là ? Possible.

La route file et les kilomètres s'additionnent, ça fait du bien et personne ne le niera d'être dans une ambiance bon enfant où enfin tout le monde peut relaxer un peu en se disant qu'envers et contre tout, ils avancent.

“Surtout faites comme si j’existais pas.”
« Ça me semble impossible ça. »
« mais t'es pas le centre du monde, tu sais »

Jack s'amuse, lui qui gratte patiemment le ukulele, qui l'accorde au fur et à mesure. Il improvise un show rock à l'arrière et sent les prunelles d'Ivy brûler son épiderme, ses doigts et ses notes à chaque nouvelle gamme. Elle rage pour tout et pour rien, encore plus lorsque les chants démoniaques - kinda - activent l'alarme avec toute la vigueur dont les coups sur la console ont déclenché. C'est assourdissant, c'est agressant, ils peuvent rien y foutre et Jack poursuit, tentant même de se servir de la sonnette comme d'une percussion comme une autre. « Oh par Merlin! » il pouffe, partage un coup d'oeil avec Ivy, tente de garder son sérieux aussi. “On va encore finir en panne au milieu de la campagne ?” « Ecoute et apprécie la musique. C'est donc si compliqué que ça ?»

Ça semble compliqué oui, quand River devient un danger public à appuyer partout sans aucun résultat, quand Moon menace le volant tant elle gesticule. Le van bouge d'un côté et de l'autre de la route, fait des zigzags d'un bord à l'autre des lignes et le duo de rageurs ne le réalise probablement pas tant justement ils sont occupés, à rager.  

«C'est vrai que pour quelqu'un qui aime du Rihanna ou qui adule Beyoncé, tu dois pas apprécier les bonnes choses » ça l'inspire ça, et il commence à penser, se demande ce qu'il peut improviser, parce qu'il veut qu'elle - « Au prochain point de vue, on arrête pour la nuit. » changement de plan. Le van s'arrêtera sous peu, et eux avec apparemment. Camping ou pas?

Mais c'est pas ça, le choix important du moment.

play that funky music: