J’ai la bouche hyper pâteuse en me réveillant ce matin. Les brownies que la vieille nous ont passés étaient tellement forts (en concentration de beuh et pas en goût, je me demande toujours comment j’ai fait pour rien capter) que les effets sont restés jusqu’à ce qu’on se pose enfin à 19h, perdu au bord de la route sans vraiment savoir où on se trouve. Je m’empare de ma bouteille d’eau et jette un coup d’œil à ma montre : il est 9h10. Il faut qu’on se bouge. On est tous les deux dans un sac de couchage sous une tente, Josh doit déjà être debout et dehors en train de filmer le paysage. Dans tous les cas, je vais pas pouvoir lui demander par où on doit aller, c'est le jeu. On a marché de Wallumbilla jusqu'ici, j’espère au moins qu’on a pris la bonne direction. « Sienna réveille-toi, faut qu’on se bouge. » Je la secoue gentiment pour qu’elle émerge, on plie bagage et on se met en route. J’ai la dalle. Je sais qu’on a bouffé nos sandwich et qu’on s’est payé un paquet de chips hier, mais ça nourrit vraiment pas ces trucs. Niveau calories par contre, on a explosé le compteur. Je regarde l’aiguille sur ma boussole, on doit aller vers l’ouest si on veut rejoindre Charleville. Je sais pas du tout où on est, mais je sais qu’on avait prévu d’aller à Mitchel. On a marché pendant 3h, en regardant sur la carte, on n’a même pas dû atteindre Blythdale. On lève nos pouces en l’air tout en marchant, en espérant qu’une voiture s’arrête, mais elles n’ont pas l’air de vouloir prendre un mec et une fille avec leurs gros sac à dos. Une longue journée s’annonce, je sais pas comment on va réussir à arriver à Mitchell si ça commence comme ça. La Kate (Katy, Kity ? Je sais toujours pas) nous aura fait perdre un temps monstre en fait, elle et sa mère dealeuse de merde. « Et maintenant, j’ai le droit de râler ? » que je marmonne suffisamment fort pour que Sienna entende.

@May glitters @sienna hawkes

La voix de Greg réveillant Sienna sonnait comme les cloches de l’enfer. Elle avait la bouche pâteuse, les yeux collés. Hier, le binôme s’était jetée comme des affolés sur le brownie au chocolat et aux noix de pécan qu’avait concocté la vieille mère de la dame du van. C’était donc pour ça c’est petit gloussement quand elle les observait manger bouchée par bouchée. Parce qu’eux, après, ils étaient complétement dé-fon-cés. Et pourtant, Dieu sait que Sienna en a fumé des joints. Mais là, c’était le pire space cake de toute sa vie. Josh avait pris un malin plaisir à les filmer alors qu’ils arboraient des yeux tout brillants et une allure bien plus lente qu’au début de la semaine. La descente des effets a été longue, très longue. Jusqu’en début de soirée. Au réveil, Sienna avait encore mal au crâne de cette défonce. Qu’elle ne lui donne pas sa recette. Non merci. Elle avait juste besoin d’eau. Elle cherchait désespérément de la main sa bouteille d’eau mais en vain. D’ailleurs la défonce allait plutôt bien à Greg car il la réveilla gentiment sans forcément la sécouer comme un bourin. Ils avaient dépensé tout leur argent pour des chips. Foncedalle de merde. Et maintenant ils avaient dix dollars, retour à la case départ. « Je veux plus marcher, laisse-moi mourir. » Mais elle se leva quand même, parce que c’était le jeu et qu’elle ne se laisserait pas séduire par quelques heures de sommeil en plus. Ils étaient loin, encore loin. Elle n’osait même pas regarder la carte, elle était encore trop dans les vappes. Pouce en l’air, ça devient un automatisme. Il faisait chaud, d’ailleurs. « Tu peux faire ce que tu veux. Franchement vu mon état actuel, je ne remarquerais même pas. » Elle avait fini par s’habituer à la présence de Josh et sa caméra. Ça ne la gênait plus désormais, c’est comme s’il n’était pas là. « Promets-moi de ne plus me laisser manger des brownies faits par une inconnue, d’accord ? »

@Gregory Morton

Elle a l’air de tenir beaucoup moins bien que moi Sienna. C’est pourtant moi le vieux, c’est pourtant moi qui devrais mettre 3 jours à me remettre du space cake, pas elle ? Peut-être que mon endurance au whisky aide, peut-être que mon seuil de tolérance est plus élevé, peut-être que j’ai été plus souvent défoncé qu’elle dans ma vie. Certainement, en y pensant. Je peine à la réveiller, mais elle finit quand même par émerger, et je lui balance une bouteille d’eau quasiment pleine. Si on avait acheté des paquets de chips, on avait aussi eu le réflexe de se prendre des bouteilles d’eau, et ça, c’est pas négligeable. Alors que je me mets à râler parce qu’aucune voiture ne s’arrête, elle ne me remet même pas à ma place. Elle est complètement stone, limite encore dans un état second. « Promets-moi de ne plus me laisser manger des brownies faits par une inconnue, d’accord ? » Je rigole face à sa remarque, on dirait une ado qui sort d’une énorme cuite. « On aurait dû s’en douter de la mère Michelle. » que je rétorque, sourire en coin. « Allez, viens, faut qu’on accélère le pas. » que je lui dis en lui attrapant le bras. « Je sais pas où on est, donc le plus vite on tombera sur une ville, le mieux ce sera. » J’essaie de la motiver, de nous motiver, les rôles s’échangent. Mes jambes sont lourdes, j’ai des cloques aux talons, mais on peut pas se permettre d’attendre sur le bord de la voie rapide en espérant que quelqu’un s’arrête, il faut continuer. « En plus j’ai la dalle, donc il va falloir qu’on se trouve un truc à bouffer, et rapidement en plus. On a quasi tout claqué dans les chips et les bouteilles d’eau hier, on a vraiment pas été futés. » Je m’insulte intérieurement parce que j’aurais dû me contrôler, j’aurais dû nous contrôler, c’est moi le vieux non ? C’est moi qui suis censé être responsable, merde.

Après 2h30 de marche, les voitures n’ont toujours pas daigné s’arrêter. Mais on arrive à Blythdale. C’est une petite victoire. On avait quand même bien marché la veille depuis Wallumbilla.

Spoiler:

Greg essayait tant bien que mal de la motiver mais Sienna était tel un zombie après une overdose de chaire fraîche. Il lui attrapait même le bras pour lui impulser une dynamique dans sa démarche. Ce genre de contact ne la surprenait même plus. La caméra de Josh ne la quittait pas et dans quelques semaines les téléspectateurs pourront lâcher le hashtag #highsienna. Super. Elle avait conscience des choses mais elle était encore bien trop à l’ouest pour s’en soucier un minium. « Hm. » Grogna-t-elle. Elle se laissait clairement guider par Greg. Il pouvait aussi la porter, des gros muscules ça pourrait bien servir à quelque chose. « Me demande pas où, on est, je sais pas non plus. » Elle n’avait clairement pas envie, et pas la force de faire l’effort d’ouvrir grand ses yeux pour analyser la carte et essayer de deviner où ils pouvaient bien se trouver. Mais elle appréciait la démarche de Gregory qui reprenaient pour cette fois-ci le rôle de Sienna. Et dans un binôme, ce genre de choses étaient importantes et devaient être indispensables. Ils s’aidaient et se tirer vers le haut mutuellement, de façon naturelle alors qu’ils se connaissent depuis trois jours. Motivés par l’appât du gain ? Peut-être, mais il y avait aussi beaucoup de sympathie entre eux. Ce qui fait qu’ils arrivaient à communiquer lors des situations de stress maximum. Ils marchaient comme des fous, sur la voie rapide. Les voitures passaient à une vitesse folle et si Sienna tendait le bras pour faire du stop, elle avait 70% de chances de se le faire arracher par une voiture. « En plus j’ai la dalle, donc il va falloir qu’on se trouve un truc à bouffer, et rapidement en plus. On a quasi tout claqué dans les chips et les bouteilles d’eau hier, on a vraiment pas été futés. » Sur ce coup-là, la foncedalle avait parlé à leur place et avait totalement démonté leur budget en même pas cinq minutes. Ils étaient tellement défoncés qu’ils avaient dépensé sans compter, comme dirait un certain John Hammond. « Faut qu’on trouve des barres protéinées ou des conserves je sais pas. » Elle avait plus envie d’un bon barbecue. Pour un hiver dans le Queensland, il faisait chaud et Sienna n’avait cessé de le répéter pendant ses deux heures et demi de marche. Vous vous rendez compte ? Greg l’avait forcé à marcher près de trois heures de marche. C’était du bizutage, pur et dur. « Je te déteste. » Elle, elle avait été tout le long pour l’option du stop. Mais le grand dadet en avait décidé autrement et puis elle avait seulement l’énergie pour le suivre et pas pour rétorquer comme elle savait si bien faire. Arrivés à Blythdale, les magasins n’étaient pas loin de l’entrée de la ville et le binôme arrivèrent rapidement devant une épicerie. Qui malheureusement affichait un panneau « fermée entre 12h et 14H ». Greg demanda à un passant l’heure. 12h30. Sienna ne savait pas si elle devait pleurer ou rire mais elle était bien trop épuisée pour tout ça. Elle se contenta de s’adosser au mur et de se laisser glisser lentement le long de celui-ci pour s’asseoir sur le sol. « Je vais mourir, desséchée ici. J’ai faim, j’ai soif, je veux dormir. La mère Michelle aura eu ma peau. Elle m’a achevée. »

@Gregory Morton

Il fallait bien que je nous porte pour deux, Sienna avait l’air complètement HS ce matin. Ca partait bien. Motiver les troupes, je sais faire, mais ma façon plait pas toujours : gueuler sur les gens pour qu’ils avancent, ça fait pas toujours plaisir. Je sais que ma binôme a pas besoin de morale ni de motivation du genre, alors je me contente de l’encourager à chaque demi-heure qui passe. 2h30 de marche, c’est cuisant mine de rien, surtout avec nos gros sacs sur le dos. « Je te déteste. » « Oui, je sais. Mais c’est pas faute. La chance de cocu a tourné, apparemment nos conjoints respectifs ont décidé de redevenir fidèles. » Elle sait que j’ai personne dans ma vie, je sais qu’elle est célibataire. Clairement, la chance de cocu, c’est qu’une expression. Là on redevient des célibataires sans aucun partenaire pour nous tromper, on a ZERO chance. Pas une seule voiture qui s’arrête en 2h30 de marche, mais c’est quoi ça ? On est tombé où ? Les gens ont peur de nous ou quoi ?

A Blythdale, on recherche un supermarché qui pourra nous fournir des trucs à bouffer, mais tous les magasins sont fermés : il est 12h30, et apparemment dans ce petit village, les gens prennent tous leur pause dej. Sauf les resto, mais on n’a absolument pas les moyens de se payer un resto. On pourra avoir au mieux deux verres d’eau et des cacahouètes, vive le repas. Sienna est morte de fatigue, désespérée, on dirait qu’elle a pas bouffé depuis des jours. « Je vais mourir, desséchée ici. J’ai faim, j’ai soif, je veux dormir. La mère Michelle aura eu ma peau. Elle m’a achevée. » Je me retiens de rire quand je me retourne et que je la vois assise au sol, la mine déconfite et les épaules totalement relâchées. « La barre de céréales de Grace aurait pu nous être utile là, j’avoue. » que je souffle, en venant m’asseoir à côté d’elle. Ca fait du bien à mes jambes, de plus soutenir tout mon poids en pleine marche. « Bon, qu’est-ce qu’on fait ? On continue à marcher, ou tu veux attendre 14h, ou tu veux encore essayer de faire du stop ? » Si j’avais pris les décisions depuis ce matin, je pouvais pas lui en demander trop. Elle était fatiguée, elle avait faim, et moi aussi d’ailleurs.

Sienna savait bien qu’elle le ralentissait en ce début d’après-midi. Mais Gregory était conciliant avec elle, et faisait preuve de patience. Ce qui relevait totalement du miracle parce que depuis lundi, il ne faisait jamais taire son impatience lorsqu’ils avaient du mal à trouver un logement ou une voiture. Toutes les demi-heures, Greg mettait de côté son insigne de lieutenant de police et ses gueulantes sévères pour la motiver avec un peu plus de douceur (enfin, tout est relatif avec Greg). Elle avait été un tantinet chiante lors du trajet à pieds, ses pieds lui faisaient mal d’ailleurs. « J’suis célibataire parce que je veux pas me prendre la tête mais même en l’étant je suis cocue. Est-ce une vie ? » Dit-elle en levant les mains au ciel, demandant la grâce du Tout Puissant. Elle a été en couple plusieurs fois, elle a eu des coups d’un soir, elle ne se prend pas la tête sur son statut amoureux Sienna. Elle s’en fiche, elle ne vit pas le célibat comme une fatalité, bien au contraire. Elle apprend à se connaître et à savoir ce qu’elle veut. Pas de mecs dans les pattes. Elle était indépendante et c’est ce qui lui plaisait.

Totalement lasse, sans énergie sur le sol adossée à la vitre du magasin, Sienna avait le regard vide et maudissait l’émission de l’intérieur. Elle était totalement dépassée. Le space cake, la boutique fermée entre midi et deux, mais qui voulait leurs peaux ? Qui les avait maudit de cette façon ? Cela relevait du vaudou, c’était obligé. Elle avait presque des hallucinations de nourriture. Greg ne tarda pas à la rejoindre sur le sol. « Bon, qu’est-ce qu’on fait ? On continue à marcher, ou tu veux attendre 14h, ou tu veux encore essayer de faire du stop ? » Elle en savait rien, elle haussait simplement les épaules. Ils étaient là, tous les deux, devant cette épicerie. Ils n’avaient croisé encore aucun passant et cette ville semblait être morte. « On peut attendre un peu non ? On pourrait faire du stop aussi mais… On aura le ventre vide. » Josh ne les filmait même plus il n’avait rien à tirer de cette séquence peut-être. Il préférait filmer les environs à quelques mètres plus loin. Cela aurait pu être l’occasion pour eux de parler de choses plus personnelles, plus intimes loin des oreilles affutées de Josh. Mais non, Sienna était silencieuse et Greg réfléchissait sans doute à leur après-midi. Sienna se demanda soudainement s’il y avait quelqu’un dans cette épicerie bien qu’elle soit fermée. Elle se leva avec le peu de force qu’il lui restait (quelle drama queen, on dirait qu’on l’a abandonné dans le désert) et toqua à la porte de l’épicerie. On tente le tout pour le tout.

Spoiler:

@Gregory Morton

Si j’avais réussi à nous porter pendant 2h30 de marche ce matin, j’étais, moi aussi, à bout de force. Alors je demande à Sienna ce qu’elle veut faire, je lui demande parce que j’ai même plus envie d’avancer moi non plus. Ce trip d’hier m’aura quand même achevé, et on n’a rien à se mettre sous la dent. C’est à en abandonner à ce stade-là. « On peut attendre un peu non ? On pourrait faire du stop aussi mais… On aura le ventre vide. » J’acquiesce d’un hochement de tête. Je peux plus vraiment marcher là, j’ai épuisé tout mon stock d’énergie. En vrai, je pourrais encore continuer, mais de voir ma binôme dans cet état, ça ne me motive pas. Tous les deux assis au sol avec nos gros sacs et nos mines déconfites, on dirait des SDF. Peut-être qui si on tendait la main, quelqu’un nous offrirait des pièces. Sienna semble soudain reprendre de son énergie, et elle se lève (difficilement, certes, mais c’est quand même elle qui donne l’impulse), et toque à la porte de l’épicerie contre laquelle on s’était adossés. J’y crois pas trop, je pense que le propriétaire doit être parti, c’est évident, le magasin est fermé. Mais on entend la porte se déverrouiller, et un mec d’une quarantaine d’années sort la tête. Je me lève alors en vitesse, putain, c’est notre chance. Sienna lui explique notre situation, et on finit quand même par rentrer dans la boutique. On parcourt les rayons, mais tout est trop cher. Logique, c’est l’épicerie du coin, il faut qu’il vive lui aussi. Je prends alors l’initiative d’aller voir le vendeur. « Je suis désolé de vous déranger encore une fois, mais est-ce que vous n’auriez pas, par hasard, des produits périmés et prêts à être jetés ? Nous serons ravis de les prendre. » Après le space cake, j’espère que nos estomacs sont parés, parce que si on a la chiasse pendant deux jours, ça va être compliqué de faire la route dans ces conditions.

Spoiler:

L’idée de Sienna semblait être bonne parce que ce qui devait être le propriétaire arriva et ouvrit la porte au binôme. Elle lui expliqua la situation et le but du jeu et c’est tout sourire qu’il les fit entrer pendant son créneau de pause. Le duo errèrent dans le magasin de rayon en rayon et Sienna ne cessait de faire les gros yeux à Greg. Les prix étaient exorbitants. Dix dollars du ketchup ? Mais qui est assez fou pour payer un billet pour du ketchup ? Au-dessus d’un rayon, elle jeta un regard à Greg. Ils avaient eu l’habitude de se parler en regard depuis lundi, et ils n’avaient pas besoin de parler pour se comprendre pendant certaines situations. « Je suis désolé de vous déranger encore une fois, mais est-ce que vous n’auriez pas, par hasard, des produits périmés et prêts à être jetés ? Nous serons ravis de les prendre. » Sur ce coup-ci, il l’avait encore comprise. Avec le peu d’argent qu’ils avaient, ils ne pouvaient se permettre de telles dépenses. Qui pouvait acheter des céréales à huit dollars ? Bon après, il devait bien prendre sa marge le type. Sienna rejoignit Gregory pendant qu’il essayait de négocier avec le propriétaire.C’était un non catégorique et Sienna serra la mâchoire, se maudissant de s’être levée de son trottoir si confortable pour rien (certes, elle aurait pu demander l’autorisation à Ivy avant d’occuper un trottoir). « D’accord monsieur, nous comprenons. Nous vous remercions. Bonne journée à vous. » Inutile de s’attarder encore plus dans cette épicerie du riche. C’était une perte de temps. De retour à la case départ, bredouilles, la mine déconfite. « Bon. Je te propose un truc. Sois on se sort les doigts du cul et on s’active. Sois on végète ici » Clairement, elle était pour la deuxième option. Elle aurait aimé végéter dans un lit bien douillet, un truc débile à la télé qui ne nécessitait pas de réflexion. « Mais j’ai faim. » Son ventre qui crie famine au même moment. Elle regardait Greg avec un regard qui disait "s’il te plaît, trouve moi de la bouffe." Elle était indépendante Sienna, elle pouvait se débrouiller seule mais là, l’effort que lui a demandé d’aller toquer à la porte lui a fumé ses dernières ressources. « On tente une autre épicerie ou on fait du stop ? » Manger ou avancer, fallait peut-être faire un choix.

@Gregory Morton

Je pensais qu’on allait enfin pouvoir se bouffer un truc, mais le destin en a décidé autrement. Le vendeur a bien voulu nous faire une faveur en nous laissant rentrer, mais il a aucune envie de laisser passer son entrée d’argent. Si on veut manger, va falloir payer, et cher. Autant se payer un truc au resto à ce prix-là. J’ai pourtant été aimable, non ? J’ai pourtant mis les formes pour demander à ce qu’'il nous refourgue ses trucs périmés, non ? Bordel de merde, j’ai tellement la dalle. Sienna le remercie avant qu’on s’en aille, mais pourquoi elle le remercie ? Est-ce que c’est normal de remercier quelqu’un pour un service qu’il n’a même pas fourni ?

« Bon. Je te propose un truc. Sois on se sort les doigts du cul et on s’active. Sois on végète ici »

Végéter ici alors que je crève la dalle ? Ca va pas être possible, je vais faire que de penser à ma faim. Elle me demande si on retente une autre épicerie, ou si on continue notre route. J’ai faim, mais c’est clair que je vais pas m’attarder dans ce bled de merde où personne veut nous prendre en stop et que les épiciers sont des putains de chiens radins. « Je laisse pas un seul centime ici. On se barre. Tant pis si on doit encore marcher. » Et tant pis pour tes cloques au pied Sienna, désolé, moi aussi j’en ai. « On tente encore le pouce écoute, mais on aura peut-être plus de chance vers l’extérieur de la ville, les gens seront peut-être moins cons. »

On se met alors en marche, bredouilles, pour chercher une autre bagnole. Je pense qu’on va pas pouvoir marcher encore, il va falloir que quelqu’un nous prenne en stop, parce que ça va pas être possible là.

Spoiler:

Greg était catégorique. Il voulait partir de ce trou tout de suite. Il n’y avait rien pour eux dans ce village d’autoroute et à vrai dire, il avait raison. Dans ce bled, devaient se courir après trois restaurants pourris et des épiceries hors de prix. Pas un seul supermarché à l’horizon. Ça devait être le genre d’endroits où les épiciers étaient livrés toutes les deux semaines. Le problème dans tout ça, c’est que personne ne souhaitait les prendre en stop dans cette histoire. Et Sienna était bien trop fatiguée pour encaisser une marche. « On tente encore le pouce écoute, mais on aura peut-être plus de chance vers l’extérieur de la ville, les gens seront peut-être moins cons. » Les épaules de Sienna s’affaissèrent accompagnées d’un soupir. Pourquoi cette journée était si dure ? Le pire, c’est qu’elle savait que ça allait s’arranger et qu’ils allaient trouver une solution. Mais quand ? À quelle heure ? Ils ne remplissaient aucune condition physique de façon optimale pour le moment et ils avançaient à la vitesse de limace. « D’accord. » Le seul mot qu’elle était capable de prononcer.  Elle le suivait, totalement lente, mais elle tenait le bras de Greg pour ne pas perdre la cadence car si elle le lâchait, elle se laisserait tomber mollement sur le sol et l’abandonnerait pour une bonne sieste. Les quarts d’heure passèrent, les demi-heures aussi… Le temps se faisait long et l’effort plus lourd. Ce n’était que deux heures et demi plus tard qu’ils trouvèrent enfin une voiture qui accepta de les prendre en stop. Un miracle des cieux. Un mirage dans le désert. Et si ce n’était que le fruit de son imagination et que le space cake faisait encore effet ? Non impossible. Sienna était redescendue depuis et ce qu’elle voyait était bien réel. Greg prit les sacs pour les mettre dans le coffre de la voiture pendant que Sienna attendait sagement à l’intérieur. Juste totalement heureuse de pouvoir enfin s’asseoir et d’avancer dans la journée. « Merci madame, vous nous sauvez la vie. » Clairement oui. Elle était accompagnée de sa fille qui ne cessait de fixer Sienna. Greg monta dans la voiture et celle-ci démarra. « Greg,  merci d’avoir été patient avec moi alors que je suis molle cet après-midi. Et merci d’avoir trouver cette voiture seul. »

@Gregory Morton

Sienna est fatiguée, je le sais, je le sens (je le suis il se fout de moi). Elle s’agrippe à mon bras, comme si elle avait besoin que je la tire pour marcher, et moi, ça me fait un poids supplémentaire. Comme si mon sac était pas assez lourd, comme si j’avais pas déjà suffisamment de mal rien qu’à me porter moi-même. Alors qu’on arrive de l’autre côté de la ville, on décide de se poser, parce qu’on a faim, qu’on est épuisé, et qu’on peut vraiment plus marcher (si on est pas des dramaqueen à tous les deux, dites moi ce qu’on est). J’ai repris un morceau de carton pour y écrire la destination dessus, j’ai plus la force de lever mon pouce. Mes coudes sur les genoux, mes deux mains tiennent ma pancarte en l'air qui est à peu près visible par les conducteurs, j’espère juste qu’il y en aura un qui va s’arrêter. Au bout de 2h d’attente, je me décide à me lever pour vraiment chercher activement une voiture. En trente minutes, mes efforts portent leurs fruits, et une dame avec sa gamine dans la voiture s’arrête. Elle est bien confiante cette dame, de laisser monter deux inconnus avec sa fille. Je balance nos sacs dans le coffre, on grimpe dans la voiture en remerciant chaleureusement la dame, et on se met en route, une chanson de Dora l’exploratrice en fond sonore. « Greg, merci d’avoir été patient avec moi alors que je suis molle cet après-midi. Et merci d’avoir trouver cette voiture seul. » Je lui souris en retour, il fallait bien que l’un de nous le fasse de toute façon, et si Sienna ne le pouvait pas, il ne restait qu’une seule option. Je lui donne un petit coup de coude pour lui signifier qu’on est une équipe et qu’elle a pas à me remercier, et ma tête se pose sur la vitre de la voiture. Je suis épuisé, et la faim accentue encore plus ma fatigue. Je m’endors en moins de 2 minutes, et me fais réveiller par la dame : on est arrivés à Mitchell.